Couverture de RDM_037

Article de revue

Le sexe et l'argent : deux monstres sacrés ?

Pages 385 à 401

Notes

  • [1]
    Cet article est une version remaniée d’une communication intitulée « transactions sexuelles » et présentée au colloque international du GT07 de l’AISLF, qui s’est tenu à Lausanne les 27, 28 et 29 mai 2010.
  • [2]
    Ce terrain a déjà fait l’objet de plusieurs articles et d’un livre de synthèse : [Deschamps, 2006].
  • [3]
    On note toutefois les travaux pionniers de P. Combessie [2008] sur ce terrain, mais sa démarche ne prend pas en compte la dimension spatiale des échanges, et ne porte pas spécifiquement sur la question des infections sexuellement transmissibles.
  • [4]
    En établir une liste exhaustive est impossible. Citons simplement le livre inaugural de Laud Humphreys, Tearoom Trade. Impersonal sex in public places [1970] significativement traduit en français sous le titre : Le commerce des pissotières. Pratiques homosexuelles [sic] anonymes dans l’Amérique des années 1960, [2007]. Et pour la France : [Mendès-Leite, de Busscher, 1997] ; [Proth, 2002] ; [Redoutey, 2002, p. 59-63] ; [Gaissad, 2009].
  • [5]
    Plus de quatre cents pages d’écrits personnels qui n’avaient pas forcément vocation, au départ, à servir un dessein anthropologique.
  • [6]
    Cette correspondance a fait l’objet d’une première analyse [Deschamps, 2009].
  • [7]
    Catherine Deschamps, Bisexualité et bisexuels. De l’invisibilité à l’idéologie de la diversité : l’histoire d’un rapport ambivalent à la domination [1999, p. 525]. Voir plus tôt, sur le même thème, « Épouses et compagnes », in [Mendès-Leite, Deschamps, Proth, 1996].
  • [8]
    C’est par cette expression en français que la sociologue et spécialiste de philosophie morale Patricia Paperman a un temps traduit le care anglo-saxon.
« C’était cela qu’il fallait penser : désir, valeur et simulacre – triangle qui nous domine et nous a constitués. »
.
Lettre de Michel Foucault à Pierre Klossowski, 1970
« Telle trouve à se vendre qui n’eût pas trouvé à se donner. »
STENDHAL, 1833.
« Nul ne la veut donnée, il faut donc qu’elle se vende ! »
NIETZSCHE, 1883.

Introduction

1 À partir d’investigations menées sur deux terrains parisiens différents, l’un sur la prostitution de rue [2], le second sur le multipartenariat de femmes hétérosexuelles et l’espace, cet article vise à questionner la cosacralisation du sexe et de l’argent ou, plus globalement, des dépenses occasionnées par les échanges sexuels, que ces dépenses aient ou non une valeur chiffrable. Le sujet sera traité à partir de deux temps différents : celui des premières, et parfois uniques, rencontres où la dépense, sans être arrêtée à une somme déterminée à l’avance, existe malgré tout ; puis celui du rapport sexuel lui-même, où à partir d’un usage spécifique du préservatif, nous tenterons de montrer que les systèmes de dons et de dettes prennent parfois un tour moins explicite mais tout aussi contraignant. Le préservatif en effet, loin de sa fonction première de moyen de protection contre le VIH, semble jouer un rôle de médiation et d’échange symbolique de la valeur accordée à l’autre, voire de pression exercée sur l’autre pour obtenir compensation. Cependant, les risques pris (ou rejetés) pour la santé se situent bien au cœur du dispositif d’échange, dans une logique qui rappelle d’autant mieux les développements de Marcel Mauss sur les formes extrêmes du contre-don que la mort peut s’ensuivre ; cette logique n’est pas non plus sans permettre de discuter les théories qui circulent depuis une trentaine d’années autour du care.

2 Entre discipline et autorisation, que l’argent circule avec ostentation, lors des premières rencontres, ou qu’il s’efface apparemment derrière un instrument de la prévention qui navigue entre les pôles extrêmes du goût et du dégoût, nous tenterons de montrer que, dans les deux cas, le rapport sexuel espéré ou consenti paraît nécessiter des objets transactionnels alibis ; alibis qu’on serait tenté de qualifier de vitalistes dans certains cas, d’excusatoires dans d’autres. Ainsi, parmi les objets transactionnels possible, la monnaie mais aussi les préservatifs ne constitueraient qu’en apparence ces « mondes antagonistes » de l’espace intime décrits par Viviana Zelizer. Si Louis Dumont a fait le constat d’une séparation entre l’économie et le social dans les pays occidentaux, il est pourtant possible, en observant certains types d’échange, d’établir des ponts entre ces deux sphères d’analyse. Et ce y compris pour ce qui concerne la sexualité, peut-être même d’autant plus qu’il s’agit de sexualité : l’illusion européenne et nord-américaine quant à sa gratuité matérielle et symbolique oblige en effet soit à en caricaturer les modalités – on voit dans ce contexte une opposition nette entre la prostitution et les rapports sexuels et amoureux –, soit à en camoufler ou travestir au maximum le caractère transactionnel.

La monnaie vivante

3 Mes constats de recherche seront mis en relation avec La Monnaie vivante, de Pierre Klossowski, pour interroger son hypothèse d’une vie affective, sexuelle ou « voluptueuse » comme il dit, qui ne serait pas seulement prise dans l’échange économique, mais aussi assurée par l’existence de la dette, laquelle créerait du désir. Cet ouvrage servira donc essentiellement de stimulant intellectuel, un stimulant qui n’ignore pas le côté daté du texte, en particulier parce que le rapprochement qu’il établit entre « vie voluptueuse » et « civilisation industrielle » devrait aujourd’hui être mis en parallèle avec la civilisation des services qui a largement supplanté cette civilisation industrielle. L’essai de Klossowski a aussi vieilli de par la forme de critique du capitalisme qu’il porte et son ancrage marxiste, lequel est devenu plus rare, depuis une quinzaine d’années, dans la littérature anthropologique et philosophique française. Il garde malgré tout une puissance atemporelle comparable, en miroir inversé, à certaines des parties sur le corps dans La société de consommation de Jean Baudrillard, publié la même année 1970. De nos jours, le corps représenté, mais sans désir, s’est substitué à la vieille âme des philosophes pour devenir aussi immatériel. Dans La monnaie vivante, à l’inverse, le corps désirant affleure sans cesse, se nourrit de valeurs, d’argent, voire de violences explicites. Le corps reste un objet particulièrement insaisissable pour les sciences sociales qui peinent encore à appréhender la complexité des affects, positifs ou négatifs, labiles toujours. Mais ne renonçons pas devant la difficulté de l’enjeu et, suivant en cela la position de Pascale Molinier dans ses écrits sur le care, ne confortons pas l’idée que le désir et ses ambiguïtés seraient la chasse-gardée de la psychologie.

4 Dans les bars où se déroule une grande partie de ma recherche sur les femmes multipartenaires, le corps qui s’exprime, qui crée une dette, parfois un surendettement, est bel et bien celui du désir. Un désir que ne veulent pas voir certains mouvements de « libération » ou « d’émancipation » des femmes, puisqu’il crée un déséquilibre – bien souvent conscient, du moins après coup. Le désir peut être mis en scène dans le contexte d’un rejet ponctuel des principes d’égalité, de précaution ou de prévention. Ce n’est pas le moindre des paradoxes que, pendant que certains mouvements féministes s’évertuent à présenter la prostitution comme le dernier bastion de la domination masculine [Deschamps, Souyris, 2009], ce soit parfois une caricature de cette domination qui devienne l’adjuvant du désir des femmes lors de rapports de séduction non officiellement monétarisés.

Méthodologie, profils et précautions

5 Une série d’enquêtes sur la prostitution de rue a été conduite de 2002 à 2005 sur plusieurs sites de racolage parisiens ou de proche banlieue. Cette recherche a reçu le soutien de Sidaction dans le cadre d’un travail consistant à évaluer la prise de risque face au VIH en cas de prostitution. Près de cinq cents personnes se prostituant ont été rencontrées au moins une fois, une cinquantaine a été vue régulièrement pendant trois ans, parfois hors du lieu d’exercice, et j’ai noué des liens plus étroits avec une dizaine de personnes, partageant des moments de convivialité au restaurant, à domicile ou sur leur lieu de vacances. Quelques entretiens semi-directifs, au commencement, qui ont surtout permis de connaître le discours immédiatement médiatisable, ont été vite abandonnés au profit d’une relation plus informelle. Après 2005, j’ai cessé d’aller régulièrement sur les lieux de prostitution tout en continuant de suivre les débats dans la presse française et via quelques listes de discussion sur Internet.

6 Une nouvelle enquête sur « les femmes multipartenaires, l’espace et le VIH », également financée par Sidaction, a vu le jour plus récemment. Elle a été motivée par la rareté des travaux relatifs au sida concernant les femmes « ordinaires », c’est-à-dire non nécessairement prostituées, enceintes, toxicomanes ou migrantes [3], et leur rapport à l’espace. Par comparaison, les recherches sur les hommes, notamment gais, et les lieux de drague sont plus anciennes et très nombreuses [4].

7 Cette nouvelle recherche m’a permis d’enquêter en partant du lieu plutôt que d’un groupe de population. Elle se situe dans des bars de nuit, ouverts jusqu’à deux heures du matin ou plus, des bars populaires où les prix sont peu élevés comparés à d’autres lieux parisiens de consommation. La population qui les fréquente est, pour les hommes, essentiellement faite de travailleurs manuels, d’agents de maîtrise, de petits fonctionnaires, de représentants de commerce en déplacement, de travailleurs immigrés parfois sans papiers, plus rarement de petits malfrats du quartier. Les femmes sont aussi pour la plupart issues des classes moyennes ou de milieux populaires, mais avec un niveau de revenu et culturel souvent légèrement supérieur à celui des hommes. Contrairement aux hommes, elles ne sont pas issues de l’immigration récente ; beaucoup d’entre elles sont parisiennes de longue date. Les hommes ont entre vingt-cinq et soixante ans, les femmes plus de trente-cinq ans.

8 À la nuit tombée, les hommes sont plus nombreux que les femmes, mais ils viennent autant accompagnés que seuls. Les rares femmes qui viennent seules ont un niveau culturel et des ressources financières supérieurs aux autres femmes : ce sont des habituées qui peuvent se reposer sur les serveurs ou les patrons, connus pour assurer leur sécurité. Mais, dans la plupart des cas, la population fréquentant ces bars est d’un niveau social et culturel largement inférieur aux groupes sur lesquels portent habituellement les recherches qualitatives sur la sexualité.

9 Outre un ensemble de notes consignées depuis 2009 sur des bars de nuit, sur quelques sex-clubs et sur des soirées privées à fins sexuelles, je dispose d’un matériau accumulé au cours des deux années précédentes lors de rencontres et d’observations dans des bars et dans des soirées « entre amis » sans fins sexuelles affichées [5], ainsi que d’une centaine de lettres issues de la correspondance privée d’une « informatrice » avec son amant plus âgé, un intellectuel et universitaire de renom [6]. Dans ce corpus, utilisé à titre comparatif, les personnes côtoyées appartiennent plus souvent aux classes moyennes et supérieures qui font l’objet habituel d’enquêtes microsociologiques et ethnologiques sur la sexualité.

10 Pour que les différentes sources conservent une cohérence, il n’a été exploité que ce qui concerne les prostituées femmes, alors que ces enquêtes ont permis de rencontrer aussi bien des hommes, des personnes transgenres et des travestis. Dans la prostitution de rue, les femmes peuvent avoir une activité sur une très longue période et jusqu’à un âge avancé – ce qui n’est pas le cas des hommes –, cette permanence ayant des effets sur la représentation et l’usage qu’elle font de l’argent. En d’autres termes, la notion de « carrière » telle que l’emploie Howard Becker s’applique à ces femmes.

11 Enfin, cet article porte sur les rapports d’échange en matière de sexualité ou de séduction que des femmes entretiennent avec des hommes parce que ce sont à elles que je me suis intéressée en priorité. Pour autant, je suis loin d’être certaine que ces rapports d’échange, qu’on pourrait qualifier d’hétérosexuels, ne se rencontrent que dans le cadre de l’hétérosexualité. En l’occurrence, je ne suis pas certaine que la culture religieuse, et ce qu’elle a forgé de croyances sécularisées, ne doive pas être considérée comme tout aussi centrale dans les facteurs explicatifs de ce que je vais décrire, que le fait que les échanges aient ici lieu entre femmes et hommes. Entre également dans les facteurs explicatifs de l’expérience sexuelle d’échange l’appartenance des personnes rencontrées aux couches les plus populaires de la société parisienne. Notamment, la circulation de l’argent des hommes vers les femmes y répond peut-être en partie à une norme de classe plutôt qu’à un attendu universel.

Du prix à la valeur : circulations directes et indirectes d’argent, et autres continuums

12 « 30 la pipe, 50 l’amour » : l’argent doit se dire lors de la première rencontre entre une prostituée et son client. C’est en principe la personne qui propose le service qui indique le tarif, le client tentant parfois ensuite de négocier à la baisse, ou à la hausse s’il veut convaincre d’un rapport sans préservatif. L’argent, dans la prostitution, est spectaculaire, de pièces « sonnantes » serions-nous tentée de dire – c’est d’ailleurs pour sortir des effets de grossissement de ce côté spectaculaire des choses que j’ai souhaité travailler ensuite sur les cas de femmes (presque) ordinaires. De plus, si c’est la prostituée en tant que femme qui reçoit – ce qui est classique –, c’est aussi elle qui énonce la somme que représente à ses yeux le service qu’elle fournira ; ce qui est plus atypique si on englobe cet échange dans l’ensemble des rencontres sexuelles. Il est vrai que si la somme est acceptée par le client, le service sera nécessairement fourni, ce qui n’est pas toujours le cas lorsque l’homme paie dans l’espoir d’une rencontre sexuelle non contractualisée.

13 À l’inverse, l’argent se fait discret et a besoin d’être converti en nature dans certains bars populaires, la nuit venue. Mais lors du premier contact entre un homme et une femme, comme lors de la rencontre entre un ou une prostituée et un nouveau client, il continue pourtant d’exister. Au comptoir, l’homme, s’adressant à la femme convoitée : « Je vous offre un verre ? ». Ou bien directement au serveur, sans plus s’enquérir de son autorisation à elle, pourtant spatialement proche : « Vous remettrez la même chose à Mademoiselle ». Dernière variante, en langage des signes, notamment lorsque l’intéressante n’est pas directement accessible au comptoir : elle voit arriver « par enchantement » un verre de son breuvage préféré et, d’un geste, le serveur lui indique le « généreux » donateur, l’intéressé. Par ce verre, les hommes proposent — ou imposent — un don, se plaçant d’emblée en donateurs, alors que les femmes ont l’initiative de la réponse, notamment de ce qu’elles donnent ou non en échange de ce verre. Certes, elles ne sont pas obligées de rendre et, surtout, ce rendu peut aller du simple échange furtif de banalités à la rencontre sexuelle. Il n’en reste pas moins que, lors de la rencontre inaugurale de visu, ce sont les hommes qui, le plus souvent, initient l’entrée en matière et en négociation ; ils créent de facto la dette.

14 Plus tard, dans la prostitution comme lors de la poursuite de la séduction, ou bien une fois la relation sexuelle acquise, l’achat est moins manifeste : les prostituées ne verbalisent plus la valeur du service avec leurs « habitués » ; elles reçoivent la somme en silence, et le montant précis n’est pas rappelé. Quant aux amants des bars populaires nocturnes, en inversant parfois le rôle du payeur, ils imaginent brouiller les pistes en faisant sortir le rapport de séduction du rapport monétaire. Il n’en reste pas moins que, à l’amorce d’une interaction entre deux probables partenaires (à l’exception de certaines rencontres de consommation sexuelle immédiate, dans l’espace public même, où la relation est réduite à sa portion congrue et où il n’y a pas forcément de prostitution), l’étroite imbrication entre sexe (ou espoir de sexualité) et argent (ou, plus globalement, dépenses) interroge. Et ce d’autant plus que les faibles niveaux de revenus des clients potentiels ne freinent ni n’empêchent les dépenses.

15 Un ensemble de continuums permet de rendre compte des scènes observées et des phrases volées. Un premier continuum s’établit entre l’argent donné de la main à la main, du client vers la prostituée, et l’argent qui transite via un médiateur, des hommes vers les femmes non prostituées. Il ressemble d’autant mieux à celui proposé par Paola Tabet que des proxénètes, au sens légal contemporain du terme dans la prostitution, ou au sens étymologique ancien aussi bien pour les propriétaires de bars que pour les serveurs ou serveuses, sont susceptibles d’intervenir à tous les niveaux. Une autre facette le caractérise : la circulation d’argent sans intermédiaire présent assure le service sexuel ; la circulation d’argent par triangulation crée l’espoir de la sexualité. Ce continuum, fondé sur l’absence ou l’existence d’entremetteurs, en recoupe un deuxième qui va d’une somme déterminée et contractuelle, entre la prostituée et son client, vers une somme variable, non comptée et non préméditée quant au montant, entre un homme et une femme non prostituée. Dernier continuum, qui inclut les deux précédents et leur donne une dimension temporelle : une somme déterminée de la main à la main assure un service sexuel immédiat, nous sommes dans le temps court ; une somme indéterminée qui transite par un tiers provoque un sentiment potentiel de sexualité, mais l’acte sexuel, s’il advient, sera de toute façon différé, ne serait-ce que le temps de se rendre dans un hôtel ou chez l’un des membres du nouveau couple temporaire (les consommations sexuelles sur place, dans les toilettes de l’établissement par exemple, existent mais sont rares).

16 À propos de la disjonction entre l’immédiateté et le temps différé, je citerai là une phrase de Klossowski : « Une émotion voluptueuse […] gagne en valeur dès que chacun, toujours susceptible de l’éprouver, ne peut pas se procurer le moyen de l’éprouver immédiatement. » (p. 57) Dès lors, la prostituée est-elle discriminée aussi parce qu’elle reçoit elle-même une somme déterminée d’argent pour s’exécuter dans l’instant ? Alors que la femme à séduire serait plus valorisée à mesure que l’homme, parce qu’il paie via un intermédiaire, ne compte plus, ou doit patienter ? En ce sens, prix et valeur ne seraient pas synonymes. Or, il est remarquable que les sommes dépensées par les hommes dans les bars en vue de séduction, si elles ne sont pas connues d’avance, atteignent souvent des montants bien supérieurs à ceux que coûte une passe dans la rue. Rapportées aux revenus d’hommes souvent pauvres, ces sommes peuvent même, à certaines occasions, être qualifiées de somptuaires, notamment lorsque l’intéressé finit par commander une bouteille de champagne pour mieux signifier sa valeur à l’intéressante. Ainsi, alors que certains groupes militants féministes, catholiques ou altermondialistes – en France, des connexions évidentes existent entre ces groupes autour de la prostitution – s’émeuvent que des femmes soient payées pour une sexualité espérée libre d’économie, ils semblent aveugles au fait que la séduction, l’espoir de sexualité ou la sexualité elle-même, hors prostitution patentée, occasionnent des dépenses souvent supérieures, dans des moments courts, ou étalées dans le temps.

17 Dans leur dimension temporelle d’une part (sexualité immédiate ou différée), et dans le passage de la « monnaie inerte » – l’argent et la somme fixe reçue par la prostituée – à la « monnaie vivante » – c’est-à-dire ici le phantasme d’une sexualité à venir porté, suscité et encouragé par l’objet « femme » dans son ensemble –, les deux derniers continuums sont doublement opérants pour Klossowski : « L’objet vivant source d’émotion, du point de vue de l’échange, vaut son coût d’entretien. […] Aucun chiffre ne saurait l’exprimer, si ce n’est la demande » (p. 73). Et le double continuum que m’inspire Klossowski apparaît pertinent si l’on compare la prostitution, et le stigmate dont elle fait l’objet, au multipartenariat de femmes parisiennes et à leur relative acceptation sociale. Dans la transaction qui se noue dans un bar, il s’agit bel et bien d’un échange qui n’est effectif que si les deux personnes y mettent du leur. Les femmes acceptent de jouer le rôle d’objet sexuel, voire recherchent cette situation, sans, loin s’en faut, être soumises. Car pour continuer d’accepter les boissons offertes, il faut que la femme soit satisfaite du jeu de séduction et veuille l’encourager ; il faut qu’elle se réjouisse de rendre les verres offerts dans un corps à corps où l’un et l’autre y trouve son compte. En d’autres termes, pour une femme, favoriser le renouvellement des verres, idéalement sans les réclamer, c’est donner son consentement. Davantage, c’est peut-être encourager la demande de séduction, faire monter les enchères pour faire monter le désir : « Nulle ne la veut donnée, il faut donc qu’elle se vende ! », d’après la citation de Nietzsche en exergue. Ainsi, autant la femme que l’homme accepte de jouer le jeu de la séduction par monstration de la valeur dans les bars. Force est de constater qu’ils semblent, l’un et l’autre, se plaire à jouer le rôle caricatural de leur sexe ; le sens de qui paie les verres et qui les reçoit n’en est qu’une des manifestations. Du moins aussi longtemps que la séduction opère.

Du goût au dégoût, premier opus : proximité apolitique contre distance politisée ?

18 Quand elles ne sont pas ou plus séduites, les femmes quittent ce rôle de soumission apparente pour retrouver un discours moraliste ou un discours politique qui, au nom de ce qu’elles se réapproprient de l’égalité des hommes et des femmes, leur permet de mettre à distance l’indésirable, et de s’en protéger. En général, les discours militants, sur l’égalité aussi bien que sur la nécessité de se protéger du sida, sont utilisés comme repoussoirs. À l’inverse, les jeux de genre caricaturaux et anciens, y compris contre l’autonomie des femmes, pour leur passivité, sont le signe d’un désir réciproque. Ainsi, les femmes comme les hommes disjoignent les moments de leur vie : ceux du désir ne créent pas les mêmes interactions et ne sont pas sous-tendus par les mêmes fondements moraux que ceux du temps professionnel, du temps amical ou du temps militant. La correspondance privée de la journaliste avec son amant universitaire témoigne de cette même disjonction. Cette séparation n’est pas sans évoquer deux autres phrases de Klossowski : « Une sorte d’intimidation et de chantage s’inscrit dès l’origine entre la nécessité de subsister et la manière de jouir » (p. 24) ; et plus loin : « Le dilemme : jouis sans t’affirmer ou affirme-toi sans jouir pour seulement subsister » (p. 44).

19 Une somme de questions se pose alors : quelles conséquences sur le désir lorsque la somme payée ne transite pas directement, sous les yeux du couple potentiel, mais via un intermédiaire global, payé une fois pour toutes : par exemple, les prix d’entrée des sex-clubs, ou bien les participations en argent et champagne aux soirées privées, données à l’entrée. Dans ce cas, les hommes et les femmes doivent utiliser d’autres subterfuges que le transit d’argent pour se signifier leur attirance ou leur non-attirance : comment, alors, signifier la valeur ? Cette interrogation ne vaut pas que pour les soirées privées à fins explicitement sexuelles, mais aussi pour les soirées entre amis où se croisent malgré tout des inconnus. Apporter un verre suffit-il ? Faut-il transmettre la valeur et l’intérêt pour l’autre via l’étalage de culture ou d’intelligence, la flatterie, en tout cas un surplus par rapport au quotidien et par rapport à l’attention portée aux autres ? (une espèce de « gaspillage nécessaire à l’émotion voluptueuse », pour détourner une formule de Klossowski). Mais dans les soirées entre amis ou entre collègues, le contrôle social n’est pas anonyme, ce qui explique en partie que peu de sommes circulent, apparemment, laissant intacte l’illusion occidentale de la gratuité sexuelle.

20 La question se trouve décalée dans les lieux commerciaux organisés pour les échanges sexuels et où la majorité des participants peuvent ne pas se connaître préalablement : par comparaison avec ce qu’observe Philippe Combessie, on peut se demander pourquoi « mes » femmes, dans les bars, acceptent apparemment sans difficulté de se voir offrir des verres, alors qu’elles peuvent y être réticentes dans les lieux que fréquentent majoritairement les femmes qu’il rencontre. Un des facteurs explicatifs peut être le milieu social : globalement, « mes » femmes comme les hommes qu’elles rencontrent sont moins aisés que celles et ceux qui informent Combessie. Mais cet élément ne semble pas suffisant. En l’occurrence, on peut se demander si l’acceptation du paiement par l’homme n’est pas plus aisé dans mes bars parce que, précisément, ils ne sont pas spécialisés dans la sexualité : du verre que l’on pourra laisser croire de simple courtoisie en cas de non-réciprocité du désir, au verre galant ou explicitement introductif à la sexualité, les frontières restent floues et permettent de garder la face.

21 Les interrogations précédentes comprennent le double sens de l’argent et-ou de la valeur : « Il faut ici distinguer d’une part : la fonction phantasmatique de l’argent […] ; en tant que le numéraire extériorise et développe la perversité entre différents partenaires ; et d’autre part : la fonction médiatrice de l’argent entre le monde clos des anomalies et le monde des normes institutionnelles », dit Klossowski (p. 59). Donc, à la fois l’argent stimule, érotise, crée le désir, et il permet la transgression ou il exonère du prix à en payer. On pourrait croire que la dernière acception ne s’applique pas aux femmes rencontrées dans les bars. Toutefois, si elles sont relativement acceptées à Paris, si je n’ai que très rarement, dans les bars, été témoin d’insultes sexistes à leur égard (auquel cas, les autres, hommes et femmes viennent les soutenir), elles ne sont pas tout à fait dans l’orthodoxie hétérosexuelle féminine, et elles le savent. Celles avec qui j’ai le plus discuté, et pour cause, revenaient régulièrement dans leur bar de prédilection pour peut-être rencontrer de nouveaux hommes, au minimum rejouer semaine après semaine le scénario de la séduction, un scénario qui fait table rase des attendus professionnels, amicaux, militants ou performatifs, pour répéter une sorte de scène inaugurale face à des inconnus qui ne savent rien de leur histoire. On pourrait dire que c’est quasiment un des modèles de la perversion sadienne ; Sade, auquel se réfère sans cesse Klossowski : « Pour les personnages sadiens, tantôt c’est la qualité de la même victime sur laquelle s’acharne, diversement pratiqué, l’acte de son bourreau, tantôt c’est le même acte réitéré qui, exercé indéfiniment sur une quantité de victimes, affirme la qualité de l’acte » (p. 37). Nous sommes ici dans le deuxième cas de figure où, si ce n’est l’acte sexuel qui est forcément répété, c’est à coup sûr l’acte de séduction, sur une quantité de « victimes », des hommes. On est alors tenté de qualifier leur attitude de vitaliste, à tout le moins suivant une logique sociale qui, jouant avec la caricature, réinsuffle le sentiment d’une « valeur féminine » essentialiste, par-delà les contingences contemporaines que connaissent les femmes dans leur rapprochement politique et professionnel avec les hommes.

Du goût au dégoût, second opus : les préservatifs, objets contemporains du chantage

22 Mais il arrive que les femmes rencontrées dans les bars soient tentées de fixer leur attention sur un seul homme. Dans ce cas, même si l’échange économique subsiste, l’argent semble perdre un peu de sa valeur immédiate d’adjuvent au désir. En revanche, le non-usage que certaines de ces femmes m’ont alors dit faire du préservatif continue de démontrer l’existence de rapports transactionnels dans la séduction.

23 Par-delà une baisse de vigilance effective vis-à-vis du sida depuis quelques années, que les femmes rencontrées dans les bars rappellent à l’occasion (elles acceptent de parler du sida avec moi si elles ne sont pas en train de séduire ou de se faire séduire, ou pour repousser l’intrus), ce non-usage ou cet usage fait largement écho à la fonction symbolique du préservatif dans la prostitution comme mise à distance du corps d’autrui lors des passes, et comme rapprochement lors des relations privées et amoureuses. En effet, dans la prostitution, alors que l’utilisation des préservatifs est maximale avec les clients pour éloigner la souillure et la contamination morale, elle baisse plus que sensiblement lors des relations non directement commerciales. Comme si le préservatif jouait, là encore, un rôle symbolique, mais à rebours d’une efficacité préventive cette fois : ne pas l’utiliser serait en quelque sorte se reconstituer un capital de pureté. Alors que j’étais auditionnée sur la question de la prostitution en janvier 2010 par le Conseil national du sida, Willy Rozenbaum, son président, codécouvreur du VIH en 1982 et praticien hospitalier à l’hôpital Saint-Louis, confirmait indirectement mon analyse : ma présentation lui faisait réaliser que les patientes séropositives et prostituées qu’il suit dans son service de maladies infectieuses déclarent également le plus souvent avoir été contaminées dans le cadre de leur vie privée.

24 Mais la prostitution ne fait que rendre saillantes des logiques existant dans d’autres groupes. Bien avant ce terrain, lors de mon doctorat, j’avais été marquée par ce que représentait le préservatif pour les femmes vivant en couple avec un homme déclarant des pratiques bisexuelles :

25

Dans ces couples où la gestion de la non-exclusivité du mari n’est aisée qu’en apparence, se prémunir contre le sida au sein même du couple reviendrait à banaliser les interactions sexuelles, en les mettant sur le même plan que les relations extraconjugales de l’homme. Or justement, ce qui rend le contrat acceptable pour l’épouse, c’est qu’elle se sent au-dessus de la mêlée et, en cela, faire intervenir un préservatif, c’est lui signifier qu’elle perd une de ses dernières prérogatives. [7]

26 Plus largement, avant même la formation d’un couple, le désir de projection avec un partenaire incite au rejet des préservatifs. Cette « offrande » à l’autre espéré durable, par-delà les processus de « protections imaginaires », peut s’interpréter aussi comme un don du risque, le contre-don attendu étant celui d’une promesse d’investissement affectif. Cette logique n’est pas sans évoquer les paroles du personnage principal du Liseur, de Bernhard Schlink, face à ce qu’il perçoit comme un don de sexualité des femmes :

27

Suis-je tombé amoureux d’elle pour la payer d’avoir couché avec moi ? Aujourd’hui encore, après une nuit avec une femme, j’ai le sentiment d’avoir été gâté et d’être en dette – envers elle, que j’essaye au moins d’aimer, et aussi envers le monde, que j’affronte [Schlink, 1996, p. 36].

28 Selon cette interprétation, l’absence de préservatif comme, en amont, la sexualité, qui sont une attention et une réponse aux attentes supposées de l’autre, évoquent « l’éthique de la sollicitude » [8] comprise dans la notion de care. Un care qui, loin d’être un don sans demande de contrepartie, loin d’être un simple « souci de l’autre » altruiste, se mute en culpabilisation non verbale du partenaire, culpabilisation dont il aura l’occasion de se défaire par le contre-don de son amour ou, tout au moins, de son apparence d’engagement durable.

Conclusion

29 Dans ses travaux sur la politesse dans l’espace public urbain, Carole Gayet-Viaud revisite la notion de morale telle que l’entend le Durkheim de La Division du travail social. Ses constats font, par certains côtés, écho avec le dilemme interprétatif dans lequel je me trouve entre le sentiment d’amoralité, nécessaire à l’expression du désir, et, à l’opposé, le recours aux discours politiques ou à la prophylaxie comme expression de mise à distance, voire du dégoût de l’autre. Pour Durkheim, la morale est une obligation sociale à caractère coercitif et venue de l’extérieur. La politesse est typiquement issue de la morale. L’entre soi du couple en formation semble dans un premier temps plus difficilement dérivé de la morale parce qu’il évoque l’espace étroit d’un duo. Pourtant, la séduction met bel et bien en relation des personnes qui, ne se connaissant pas auparavant, doivent faire avec des dénominateurs sociaux communs antérieurs à la rencontre. La séduction est peut-être alors comparable à la politesse. Et la définition finale que C. Gayet-Viaux propose de cette dernière fait résonance avec ce que j’ai pu observer : elle est implicite et tacite ; de sorte que le seul fait de révéler une impolitesse fait déjà sortir de la politesse. Les donneurs de leçons, quelle que soit la leçon, manquent de tact. Au cours de mon terrain sur les espaces de séduction entre hommes et femmes, la séduction réussie, comme la politesse, est implicite et tacite : à l’inverse de la prostitution, l’argent existe mais sans qu’il doive être compté ou demandé, sans qu’il assure à coup sûr le rapport sexuel. Toute personne dont l’intervention rend visible les modalités de l’échange, que ces modalités soient monétaires, sexuées ou prophylactiques, est un intrus, ou signifie la sortie de la séduction. L’argent peut bien être un moteur du désir, le rejet des préservatifs signifier un espoir d’attachement, cela ne doit pas être dit. D’où la possibilité de manifestation de ce qui, vu de l’extérieur, peut toujours apparaître comme un excès et une caricature (et qui, là, distingue la séduction de la politesse) : pour se maintenir, pour exister et faire exister, ces « surplus » ou ces « gaspillages » tacites ont besoin d’être tus ; leur désignation est de l’ordre de l’imposture.

30 Cette possible application des règles de la morale à la séduction ne suffit pas pour comprendre les mécanismes du désir. Le champ de l’anthropologie du désir reste largement à construire. Son élaboration ne pourra faire l’économie d’une réflexion quant à la tendance au rejet de toute approche psychologique chez les chercheurs spécialisés sur la sexualité, notamment en France.

Bibliographie

Références bibliographiques

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Notes

  • [1]
    Cet article est une version remaniée d’une communication intitulée « transactions sexuelles » et présentée au colloque international du GT07 de l’AISLF, qui s’est tenu à Lausanne les 27, 28 et 29 mai 2010.
  • [2]
    Ce terrain a déjà fait l’objet de plusieurs articles et d’un livre de synthèse : [Deschamps, 2006].
  • [3]
    On note toutefois les travaux pionniers de P. Combessie [2008] sur ce terrain, mais sa démarche ne prend pas en compte la dimension spatiale des échanges, et ne porte pas spécifiquement sur la question des infections sexuellement transmissibles.
  • [4]
    En établir une liste exhaustive est impossible. Citons simplement le livre inaugural de Laud Humphreys, Tearoom Trade. Impersonal sex in public places [1970] significativement traduit en français sous le titre : Le commerce des pissotières. Pratiques homosexuelles [sic] anonymes dans l’Amérique des années 1960, [2007]. Et pour la France : [Mendès-Leite, de Busscher, 1997] ; [Proth, 2002] ; [Redoutey, 2002, p. 59-63] ; [Gaissad, 2009].
  • [5]
    Plus de quatre cents pages d’écrits personnels qui n’avaient pas forcément vocation, au départ, à servir un dessein anthropologique.
  • [6]
    Cette correspondance a fait l’objet d’une première analyse [Deschamps, 2009].
  • [7]
    Catherine Deschamps, Bisexualité et bisexuels. De l’invisibilité à l’idéologie de la diversité : l’histoire d’un rapport ambivalent à la domination [1999, p. 525]. Voir plus tôt, sur le même thème, « Épouses et compagnes », in [Mendès-Leite, Deschamps, Proth, 1996].
  • [8]
    C’est par cette expression en français que la sociologue et spécialiste de philosophie morale Patricia Paperman a un temps traduit le care anglo-saxon.
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