Marianne Péron-Doise et Marc Verzeroli – Pourquoi l’Indo-Pacifique, d’une certaine manière encore émergent d’un point de vue conceptuel, s’impose-t-il peu à peu comme un espace si déterminant ?› MARC ABENSOUR – Pour y répondre, je crois qu’il faut revenir à la généalogie du concept. La première occurrence du terme remonterait au XIXe siècle sous la plume d’un ethnologue britannique visant à mettre en perspective les échanges civilisationnels entre les deux océans. Sa reprise dès 2007, à l’initiative du Premier ministre Abe, repose quant à elle sur la combinaison de deux dimensions. L’une géographique, qui met l’accent sur la notion de flux, lesquels sont au cœur du processus de mondialisation. Flux maritimes d’abord, en vue de faire ressortir l’interconnexion entre l’océan Indien et l’océan Pacifique, puis flux qui couvrent aujourd’hui l’ensemble des champs de la connectivité (aérien, cyber, sous-marins, etc.). L’autre géopolitique, liée à la rivalité stratégique entre les États-Unis et la Chine, qui vise, par un élargissement du périmètre par rapport à l’Asie-Pacifique, à faire face aux défis de la montée en puissance de la Chine, l’Inde ayant alors vocation à faire contrepoids.
On retrouve ces deux dimensions dans le fait que l’Indo-Pacifique est devenu à la fois un axe structurant de l’économie mondiale et un espace marqué par une polarisation accrue et la montée des tensions. L’Indo-Pacifique est en effet aujourd’hui le centre de gravité de la croissance économique mondiale, et pourrait représenter selon le Fonds monétaire international (FMI), plus de 50 …