L’un des meilleurs indices de la formation d’un champ de la régulation tient dans le fait qu’émergent à compter des années 2000, à la périphérie des agences, des grandes entreprises et des professions du conseil, de nouvelles catégories et savoirs de gouvernement qui semblent désormais circuler aisément d’un domaine d’action public à l’autre. C’est le cas de la compliance, ce mot clé apparu dans le vocabulaire de la régulation qui désigne un ensemble de stratégies et de procédures portées tout à la fois par les régulateurs et par les régulés pour assurer la mise en conformité des seconds aux nouvelles normes juridiques, comptables, environnementales et éthiques qui les concernent. Si les institutions publiques hésitent encore parfois à s’emparer du terme anglais, préférant parler de « conformité », ce nouveau lexique s’est imposé dans des espaces professionnels et sectoriels de la régulation aussi différents que ceux de la banque et de la finance où il a initialement émergé, de la concurrence, mais aussi de l’anticorruption (blanchiment, fraude fiscale, contournement des sanctions, etc.) ou encore de la protection des données personnelles. Il a donné naissance à tout un monde professionnel de la compliance, depuis les chief compliance officers appelés aussi responsables de conformité qui sont salariés des grandes entreprises (publiques ou privées) jusqu’à leurs correspondants dans les agences de régulation, en passant par les spécialistes de la conformité dans les métiers du conseil (audit, avocats, etc…