Qui n’a jamais assisté, au cours d’un change par exemple, au spectacle suivant : un bébé, dont la mère embrasse le pied, s’empresse de le tendre à nouveau vers la bouche de sa mère pour se le faire « manger de bisous » ? Cette scène banale du quotidien d’un jeune enfant avec sa mère nous donne à voir ce que Freud appelait le troisième temps de la pulsion.
La pulsion est ce concept bien connu de la psychanalyse, qui décrit le fait qu’il y a un au-delà à la satisfaction du besoin physiologique. Dans la pulsion orale, par exemple, au-delà de la satisfaction de la faim, il y a la prime de plaisir pour le bébé à être dans les bras de sa mère, à sentir son odeur, à entendre sa voix, à toucher sa peau… Ce qui, transposé à l’âge adulte, explique que l’on préfère partager un bon repas avec des amis plutôt que manger un sandwich tout seul sur une aire d’autoroute !
Ce qui est moins connu, même des psychologues, c’est que la pulsion s’organise en trois temps : le premier est actif (pour la pulsion orale, c’est le fait de manger), le deuxième est réflexif (se manger, par exemple en suçant son pouce), et le troisième est celui de la passivation (se faire manger). Ce troisième temps, qui permet de réaliser le bouclage du circuit pulsionnel, témoigne de « l’appétence relationnelle du bébé ». Il témoigne par sa présence du fait que le bébé ait envie d’être l’objet du désir de son autre de la relation.
Par l’analyse des vidéos familiales, M.-C. Laznik a repéré l’absence de ce troisième temps de la pulsion, dans la première année de la vie, chez des bébés qui recevront plus tard un diagnostic d’autisme…