Notes
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[1]
Ce texte fait suite à une journée d’études du pôle genre de l’irisso (Institut de recherches interdisciplinaire en sciences sociales-umr 7071), en partenariat avec le Mage (Réseau de recherche « Marché du travail et genre »), qui s’est tenue à l’université Paris-Dauphine le 13 juin 2013.
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[2]
Compte tenu du caractère de témoignage à deux voix de ce texte, nous faisons le choix d’évoquer nos positions respectives le plus souvent à la troisième personne du singulier, quelquefois sous forme de citation, afin de rendre compte de la singularité de chacune de nos expériences.
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[3]
Sur la suggestion de Françoise Picq qui enseigne un nouveau cours portant sur les questions de genre dans un Master 1 de Développement durable, piloté par Sylvaine Thrinh, a l’université Paris-Dauphine, cette dernière me demande d’enseigner, en anglais, cinq séances intitulées « Gender and development », me donnant carte blanche sur le contenu.
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[4]
Jacqueline Laufer, 2005, « La construction du plafond de verre : le cas des femmes cadres à potentiel », Travail et Emploi, n° 102, pp. 31-34.
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[5]
Dans deux registres différents, la publication de La domination masculine, par un homme, Pierre Bourdieu en 1998 ainsi que l’entrée du thème Féminin/Masculin au programme de l’agrégation de sciences économiques et sociales la même année, ont contribué à donner une visibilité au genre en sciences sociales.
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[6]
Centre de liaison de l’enseignement et des médias d’information.
1Ce texte vise à contextualiser les témoignages de deux étudiants et une étudiante de la promotion 2013 du « Master de science politique et sociologie » à l’université Paris-Dauphine, qui se sont porté-e-s volontaires pour se prêter à l’exercice d’analyse de l’enseignement qu’ils ont reçu en sociologie du genre durant un semestre [1]. Il s’agit d’une mise en pespective à deux voix, puisque nous avons dispensé ce cours successivement, Céline Bessière (en 2009-2011) et Tania Angeloff (en 2011-2013) [2].
Qui sont les enseignantes du genre à Paris-Dauphine ?
2Paris-Dauphine est une université principalement réputée pour sa formation en gestion et en finance. Depuis sa fondation au tournant des années 1970, la sociologie y occupe une place marginale et s’est longtemps inscrite – du moins jusqu’à la création, en septembre 2005, d’un parcours de sciences sociales du L3, 3e année de Licence, au M2, 2e année de Master – dans les principales filières de gestion et d’économie appliquée.
3« Je (Tania Angeloff) fus recrutée à l’université Paris-Dauphine en septembre 2000 sur un poste de sociologie du travail et des organisations. Dans ce contexte, identifiée comme sociologue du travail "travaillant sur les femmes", il me fallut attendre la publication de mes premières recherches sur la Chine pour être reconnue comme sociologue à part entière par la plupart de mes collègues. Je fus alors désignée comme “sociologue du travail, spécialiste de la société chinoise et des questions de genre”.
4Il n’y eut que peu de places pour inscrire cette triple spécialité dans un cours spécifique, pas tellement plus pour me donner l’occasion d’enseigner un cours de sociologie du genre proprement dit. Cependant, ce dernier devint possible à la faveur de la réforme des enseignements, à partir du passage au lmd (Licence, Master, Doctorat) dans les universités françaises qui a pris effet à la rentrée 2006. La refonte des maquettes d’enseignement permet à cette date aux sociologues de sortir des enseignements généraux (sociologie classique et sociologie contemporaine en seconde et troisième années, sociologie des organisations et du travail en quatrième année) [3]. En amont de la création du Master de science politique et sociologie, je propose aux deux responsables pédagogiques, un politiste spécialiste des institutions et du vote et un socio-économiste spécialiste de l’immobilier, un cours d’introduction au genre. Ce dernier est refusé séance tenante au nom de la « cohérence des enseignements du Master » et du contexte (Paris-Dauphine). La contre-proposition vise à me permettre d’assurer un cours de sociologie du travail et des professions, en continuité avec celui que je ferai en troisième année de licence. J’y aborde les rapports de genre de manière périphérique (deux séances sur treize de 1 h 30) car cette thématique ne doit pas déborder sur le reste. Au fil des années, de plus en plus d’étudiant-e-s de la Licence « sciences de la société » poursuivent dans le Master de sciences sociales. Près de la moitié de la promotion trouve quelques redondances à un cours d’introduction à la sociologie du travail et des professions qui s’adresse, pour l’autre moitié du groupe, à des étudiant-e-s issus de filières d’économie et de sciences humaines et sociales en provenance d’autres universités, dont certains n’ont jamais entendu parler de la sociologie du travail. Fin 2008, en concertation avec les responsables pédagogiques, je reviens à la charge et propose de nouveau un cours d’introduction à la sociologie du genre. Cette fois, compte tenu des étudiants qui apprécient la pédagogie mais demandent des enseignements d’ouverture, mes collègues acceptent. »
5« En 2007, j’ai été recrutée (Céline Bessière) sur un poste de Maître de conférences en “sociologie des organisations” à l’université Paris-Dauphine. Cela n’avait pas non plus de rapport immédiat avec mon intérêt et mes recherches sur les questions de genre. Pendant mes deux premières années à Dauphine, j’introduisais la dimension du genre dès que je le pouvais dans les différents enseignements généralistes que j’assurais à des étudiants en gestion et économie. À cette période, j’étais frappée par le manque de légitimité de la sociologie du genre auprès de mes collègues masculins, y compris ceux de ma génération. Pour en donner un exemple, l’affichage dans mon bureau du sommaire d’un numéro spécial de la revue Sociétés et représentations intitulé (En)quêtes de genre (n° 24, 2007) suscita de vives réactions de la part de mon voisin de bureau qui considérait la sociologie du genre comme une mode passagère, voire comme un prolongement non-scientifique du féminisme. »
Création d’un cours « Introduction à la sociologie du genre » : contraintes et marges de manœuvre
6À l’automne 2009, est créé un cours spécifique de « sociologie du genre » au sein du Master de sciences sociales. Composé d’un volume horaire de treize puis douze séances de 1 h 30, il est plus approprié de qualifier ce cours d’« introduction à la sociologie du genre ». De plus, il nous semble important de souligner la diversité (et donc la richesse) des étudiants en termes de cursus. Peu d’étudiant-e-s de sciences sociales, beaucoup issu-e-s de cursus d’économie, d’aes (Administration économique et sociale) et de gestion, ayant au mieux reçu un cours de sociologie portant sur les « pères fondateurs » de la discipline, tous des hommes, tous aveugles aux questions de genre et sous l’emprise des représentations dominantes de leur temps. Quoi qu’il en soit, la possibilité d’approfondir certains textes ou champs théoriques en quatrième année, dans ce cours de sociologie du genre, s’en trouve réduite de manière parfois drastique puisqu’il s’agit, pour une bonne moitié du public, d’une découverte de la sociologie à l’université. Ces précisions visent notamment à répondre à la critique sans concession de l’un des trois étudiants ci-dessous du Master de 2012-2013, mais en la situant dans ce contexte contraignant ; cette précision aussi pour expliquer les choix pédagogiques que nous avons dû opérer. Voici la description du cours telle qu’elle apparaît dans la brochure en 2012-2013 :
Objectifs et contenu de l’enseignement
Cet enseignement vise à donner aux étudiant-e-s une réflexion sur le social sous l’angle du genre – compris comme la construction culturelle et sociale du masculin et du féminin, ainsi que des différences et des hiérarchies à la fois universelles dans leur contenu et spécifiques dans leur expression. Au-delà des thèmes abordés (socialisation, corps et sexualité, masculinités) dans les grands champs du social (éducation, travail, famille, etc.), le cours a pour objet d’introduire aux concepts et méthodes d’analyse propres à la sociologie du genre depuis les années 1980. Il se fondera sur des textes sociologiques, des enquêtes, ainsi que sur l’étude de films et de documentaires.
Intentions de départ et premiers ajustements (2009-2011)
7Selon Céline Bessière :
8« Lors de la mise en place du cours, mon objectif était de présenter les grands textes classiques de sciences sociales sur le genre (de Françoise Héritier en anthropologie, Pierre Bourdieu en sociologie, à Joan Scott ou Thomas Laqueur en histoire, en passant par Simone de Beauvoir et jusqu’à Judith Butler en philosophie), tout en confrontant les étudiantes et les étudiants aux données empiriques sur les inégalités de genre dans la société française (dans la famille, à l’école, au travail, en politique). La première année, j’ai été frappée par le décalage entre les séances théoriques qui suscitaient une adhésion consensuelle de la part des étudiant-e-s et les séances empiriques qui ont au contraire abouti à des débats très animés en classe. Lors d’un cours consacré à la socialisation au genre dans la famille et à la division sexuée du travail parental une étudiante a vivement protesté : “Madame, vous remettez toujours en cause ce qui est normal, évident et naturel !” Pour elle, il allait de soi que les femmes étant celles qui mettent au monde les bébés, elles devaient aussi prendre en charge les jeunes enfants et se mettre en retrait du marché du travail. S’en est suivi une longue discussion collective sur les congés maternité et paternité, l’histoire de l’allaitement maternel et la place des hommes et des femmes sur le marché du travail. Avec le recul, je me suis rendu compte que bâtir un cours sur les rapports de pouvoir fondés sur la différence entre les sexes n’était pas chose facile face à un public d’étudiantes et étudiants âgé-e-s entre 20 et 22 ans, issu-e-s de classes moyennes et supérieures qui, pour la majorité d’entre eux, ne vivent pas en couple, n’ont jamais occupé d’emploi salarié et connaissent surtout un système scolaire relativement égalitaire du point de vue des rapports de genre (où cependant les filles réussissent mieux que les garçons, bien que dans des filières moins prestigieuses). Cela me paraissait d’autant plus indispensable de les faire réfléchir de façon concrète à la construction sociale des différences et des hiérarchies de genre. C’est pourquoi j’apportais en classe des publicités, des catalogues de jouets et des ouvrages pour enfants, des statistiques sur la répartition des tâches domestiques ou les écarts de salaire entre hommes et femmes à la sortie du système scolaire et au cours du cycle de vie, des documentaires, etc.
9Certain-e-s semblent en avoir tiré profit, comme cette étudiante qui, dans sa fiche anonyme d’évaluation du cours, a écrit au sujet d’un texte de Jacqueline Laufer [4] : “texte essentiel pour affronter le monde professionnel armé […]. Ce cours m’a permis de remettre à distance certaines pratiques qui semblent acquises. En somme, cours génial !… pour penser et améliorer la condition féminine.” »
10Mais ce pari n’a pas fonctionné pour tous les étudiant-e-s et a suscité également des critiques que l’on peut lire à travers ces bilans du cours, exprimés à l’écrit sous couvert d’anonymat :
« Dommage qu’on n’ait pas assez parlé des hommes en tant que groupe ayant des valeurs communes » ;
« Beaucoup de “banalités”. Principal problème : plus un cours sur la domination masculine dans tous les domaines qu’un cours sur le “genre”. On n’a pas ou peu abordé les questions des transgenres, de l’homosexualité, de l’intégration par les hommes de leur domination sur les femmes… » ;
« Je m’excuse mais je n’ai pas eu une passion pour ce cours. Pour être honnête, j’étais très sceptique quant à l’intérêt de ce cours dès le départ, et partais avec beaucoup d’a priori sur ce cours de féminisme. J’ai néanmoins modéré mon jugement au fur et à mesure des séances, après m’être “accrochée” : je suis à ce jour moins critique et peux comprendre que ce cours soit dispensé. Mais je reste antiféministe » ;
« Bon cours, rien de redondant, vu que c’est un aspect de la sociologie que je n’avais jamais traité. Par contre, cours trop axé sur la domination des femmes, placé d’un point de vue trop féministe. On n’a pas vu assez ce qui pèse sur les hommes ».
12Les étudiant-e-s ont ainsi formulé deux principales critiques à cette introduction à la sociologie du genre. Premièrement, ils ont reproché à l’enseignante de ne pas suffisamment aborder le point de vue masculin sur la domination masculine. Cette critique – qui semble aussi renvoyer au sexe de l’enseignante – fut relativement facile à intégrer les années suivantes. Nous avons ainsi introduit des séances sur la construction sociale de la masculinité (cf. plan de cours ci-après). La seconde critique, liée à la première, pose davantage de problème : le procès en féminisme, synonyme de prise de position politique de la part de l’enseignante qui délégitime pour un certain nombre d’étudiant-e-s le caractère scientifique des savoirs enseignés. On retrouve cette question dans les témoignages écrits des trois étudiant-e-s qui figurent ci-dessous pour dire leur adhésion ou au contraire leur résistance au cours de sociologie du genre.
Tirer les leçons du passé proche…
13Faisant le bilan du cours sur les deux premières années, nous décidons d’une nouvelle stratégie. Au lieu de partir de la théorie, nous partirons des pratiques. C’est en ce sens que le cours animé en 2012 et 2013 prend le parti de débuter par la présentation d’enquêtes de terrain et la projection d’extraits de documentaires sur la socialisation, la lecture des romans à l’eau de rose, les pratiques sexuelles, la division du travail domestique, pour déboucher ensuite seulement sur la théorisation scientifique.
14Or, il est intéressant de noter que, quel que soit le bout par lequel on prend le problème, les évaluations sont peu ou prou les mêmes d’une enseignante à l’autre, d’un choix pédagogique à un autre. Les plus récalcitrant-e-s évoquent la banalité de l’objet « genre », le féminisme du traitement des questions sociales abordées, etc. Les plus enthousiastes, comme Jéromine Dabert (voir plus loin), expriment des conversions de regard sur les rapports entre les hommes et les femmes. En 2012-2013, le cours tombe, au premier semestre, en plein débat sur le mariage gay. Après hésitation, l’enseignante décide – peut-être à tort – de ne pas traiter frontalement de la question et d’en parler à la marge, voire à l’intercours, avec celles et ceux que cela intéresse et qui viennent l’interroger. Le témoignage de Gaston Laval (voir ci-après) s’inscrit dans ce contexte.
Auto-analyse d’une pratique
15Au fil des années, le cours n’a cessé d’évoluer pour tenter de répondre au niveau, à la demande et au besoin des étudiant-e-s. Cela ne manqua pas de poser un certain nombre de questions : quelle part laisser au débat théorique ? Lequel retenir ? En fonction des appréciations demandées en fin de semestre aux étudiant-e-s, nous avons tenté de réajuster, rectifier, parfois inverser la démarche (qui, d’abord théorique, est devenue de plus en plus inductive). Cependant, les avis contradictoires des étudiant-e-s, aussi bien d’une année à l’autre qu’au sein d’une même promotion, nous inclinent à penser qu’il n’existe pas de « recette universelle ». Le témoignage critique d’Arnaud Bonduelle (voir ci-après) l’atteste : par sa formation antérieure en philosophie, il regrette que ce cours de sociologie se soit finalement arrêté « aux portes […] des sciences sociales », sans tenir compte de la diversité des profils des étudiants-e-s qui y assistaient.
16Ce type de critiques est sans doute coutumier des formations en sciences sociales. Mais d’où vient alors ce soupçon d’illégitimité, plus fort en la matière qu’en sociologie urbaine, en sociologie de l’éducation ou des organisations ?
La savante et la politique
17Nous nous heurtons là à des résistances communes à toutes les universités, liées à une thématique directement analysable par le sens commun, contrairement à un cours sur les politiques publiques par exemple. Un premier obstacle renvoie à la naturalisation du genre, pratique d’autant plus courante qu’elle est inconsciente et fait barrage à la perception de la matière comme « scientifique », tout en jetant le discrédit sur le discours d’objectivation des pratiques sociales.
18Mais un second obstacle s’explique par la difficile institutionnalisation en France des études de genre en sciences sociales. Nées du féminisme, elles ont été pour cette raison discréditées à l’université jusqu’à la fin des années 1990 (exceptées dans quelques lieux, comme Toulouse, Lyon, Paris 7 et Paris 8) [5]. C’est sans doute pour cela qu’en tant qu’enseignantes entrées à l’université, à sept ans d’intervalle et donc socialisées au genre en sciences sociales dans des contextes différents, nous ne nous sommes pas positionnées de la même manière vis-à-vis de l’enseignement, des étudiant-e-s et des collègues. L’une d’entre nous (Tania Angeloff) perçue comme « travaillant sur les femmes » quand bien même elle étudiait des hommes handicapés au chômage en Angleterre – était désireuse de se démarquer d’une position féministe militante. Tandis que l’autre, Céline Bessière, quelques années plus tard, pouvait davantage assumer la dimension féministe d’un enseignement sur le genre. Quels que soient nos positionnements respectifs, nous avons toutes les deux éprouvé cette tension entre science et politique inhérente à tout enseignement du genre (mais aussi à tout enseignement). Année après année, les témoignages des étudiant-e-s montrent que cette dimension fut structurante dans leur réception de cet enseignement, que ce soit sous la forme de l’adhésion, du soupçon, ou du rejet.
19Une autre spécificité tient sans doute au public de l’université Paris-Dauphine : étudiant-e-s provenant en majorité des beaux quartiers, souvent issu-e-s de la bourgeoisie d’affaires, avec un ancrage religieux fort, en particulier catholique et juif. Les résistances des étudiant-e-s relèvent donc à la fois de leurs conditions sociales, de leurs pratiques culturelles et religieuses et de leurs trajectoires universitaires (inscription en économie et en gestion lors des premières années de faculté, forte minorité ayant réalisé leur cursus secondaire, voire leur licence, dans l’enseignement privé catholique) ; et cela de façon exacerbée dans un moment politique où un cours de sociologie du genre à l’université est d’emblée appréhendé dans les catégories polarisées du débat médiatique (pour ou contre « le mariage pour tous » / pour ou contre « la théorie du genre »). Le cours d’introduction à la sociologie du genre a ainsi révélé les fortes réticences de certain-e-s étudiant-e-s (pourtant inscrit-e-s en Master de sciences politique et sociologie) vis-à-vis des explications constructivistes des sciences sociales qui heurtent leur représentation naturalisée de la différence des sexes, mais aussi un refus de la conflictualité des rapports de sexe et une certaine hostilité à la mise en avant des inégalités de genre et de la domination masculine.
Syllabus du cours de Tania Angeloff en 2012-2013
- séance 1 : Introduction : Qu’est-ce que le genre ? (1)
Extraits en ligne de Certains l’aiment chaud (Some like it hot, usa), de Billy Wilder (1959)
- séance 2 : Introduction : Qu’est-ce que le genre ? (2)
Entretien de Françoise Héritier, Le Point, le 1er novembre 2002 et sur celui d’Anaïs Bohuon, « Caster Semenya, l’incroyable athlète qui bouleverse l’éthique sportive », paru dans Mediapart, le 11 septembre 2009.
Extraits en ligne du documentaire Bienvenue dans la vraie vie des femmes de Virginie Lovisone et Agnès Poirier (2009)
- séance 3 : Genre et socialisation
(1. La construction par les jeux)
Apporter des publicités représentant des enfants (garçons et filles) + un magazine de jouets
Sylvie Cromer, « Vies privées des filles et garçons : des socialisations toujours différentielles ? » [2005].
- séance 4 : Genre et socialisation
(2. la construction par la lecture : l’exemple des romans à l’eau de rose)
Élodie Baerlocher, « Barbie contre Action Man ! Le jouet comme objet de socialisation dans la transmission des rôles stéréotypiques de genre » [2006].
- séance 5 : Corps, sexualité et procréation
(1. Le corps)
Rosella Ghigi, « Le corps féminin entre science et culpabilisation. L’histoire de la cellulite » [2004].
- séance 6 : Corps, sexualité et procréation
(2. Reproduction, genre et contrôle social)
Michel Bozon, « Les significations sociales des actes sexuels » [1999].
Extraits en ligne du documentaire Les dames du planning familial, de Marie-Monique Robin, 2007
- séance 7 : Corps, sexualité et procréation
(3. Genre et sexualités différenciées)
Nathalie Bajos et Michel Bozon, « La sexualité à l’épreuve de la médicalisation : le Viagra » [1999].
- séance 8 : Les inégalités de genre : l’exemple du travail domestique
insee Première, « Femmes et hommes : les inégalités qui subsistent » [2002].
- séance 9 : Genre et masculinité : une épistémologie récente
(1). La domination masculine : qu’est-ce que c’est ?
Pierre Bourdieu, « La promenade au phare » [1998]
Philippe Bourgois, « Viol collectif adolescent » [2001].
- séance 10 : Genre et masculinité : une épistémologie récente (2)
Tania Angeloff, « Des hommes malades du chômage ? Genre et (ré-)assignation identitaire au Royaume-Uni » [2012].
Simon Cross et Barbara Bagilhole, « Girls’ Jobs for the Boys ? Men, Masculinity and Non-Traditional Occupations » [2002].
- séances 11 et 12 : Remise et présentation orale des dossiers thématiques
Jéromine Dabert, étudiante de Master 1 « Sciences Sociales », université Paris-Dauphine, témoigne :
20« Femme de 21 ans, j’ai fait des études de gestion pour me réorienter vers de la sociologie et des sciences politiques. Au lycée, je fus directrice de publication du journal Dis Leur ! (journal récompensé par le clemi [6] et l’association Jets d’encre) durant deux ans. Journal satirique et critique de l’actualité nationale et mondiale.
Expérience avec la sociologie du genre
21Grâce à des rencontres au lycée, grâce à une éducation athée et tolérante, grâce à des lectures, j’ai vite développé des convictions sur la liberté sexuelle ou l’égalité entre homme et femme. De ce fait, certaines paroles, certains actes m’ont souvent dérangée sans que je puisse les expliquer. “C’est normal que tu n’aimes pas le français”, “c’est normal que tu sois mauvaise en maths”, “tu ne vas pas jouer à ça quand même ? !”, “tu dois préparer un bon repas pour ton homme !”… Tant de phrases d’amis, de proches, de connaissances, qui heurtaient mes convictions. Cependant, j’étais dépourvue d’arguments, d’explications sur cette gêne.
22C’est en quatrième année de faculté, bien trop tard à mon goût, que j’ai bénéficié d’un cours de sociologie du genre. Ce cours fut pour moi une révélation. Toutes les idées, les convictions, les petites révoltes qui s’étaient accumulées se sont révélées. J’ai compris pourquoi. Je fais le lien avec un lever de voile, un lever de rideau de théâtre. Toutes ces convictions existaient, mais ne savaient s’exprimer.
23Chaque texte ou documentaire étudié résonnait en moi.
24Alors que j’étais perplexe face aux convictions naturalisantes qui restent ancrées chez la plupart de mes amis, alors que je ne savais comment réagir ni même agir face à elles, la sociologie du genre m’a donné les outils pour y remédier. Car la sociologie du genre n’est pas une théorie que l’on brandit pour ou contre des idées. La sociologie du genre c’est une caisse à outils pour comprendre le monde qui nous entoure.
25Grâce à ces cours, j’ai pu comprendre ces éléments qui auparavant me dérangeaient. Des discussions entre amis sur la sexualité, sur les jouets des enfants, sur la place d’une femme dans un couple… Autant de discussions qui me bouleversaient dans leur contenu et qui ont trouvé une tout autre résonance ensuite.
Changement dans les pratiques quotidiennes
26Souvent le jeudi soir, après mon cours de sociologie du genre, je rentre chez moi et dis à mon ami : “T’es un mec bien”. Pourquoi ? Parce que le partage équitable des tâches ménagères lui semble naturel, parce qu’il ne considère pas que mes amis homosexuels sont bizarres, parce qu’il envisage de se mettre à temps partiel pour s’occuper de nos futurs enfants. Tant de choses qui me semblent normales, naturelles… Cependant, les cours de sociologie du genre m’ont montré que ce n’était pas naturel pour tout le monde. Que, pour certains, le lien d’un père à son enfant était naturellement moins fort que celui d’une mère à ce même enfant. Que de ce fait, c’est la femme qui doit s’occuper des enfants…
27C’est lors de ces conversations entre amis, qui me gênaient tant auparavant, que mon comportement a le plus évolué. Je trouve aujourd’hui des réponses, des arguments, des questions qui dérangent parce qu’elles pointent du doigt les incohérences de raisonnements. Je suis alors souvent cataloguée comme “la chieuse”, “la féministe”, “la gaucho”. Toujours avec humour, bien sûr.
28Je crois cependant que là est la question. Lorsque mes amis esquivent une conversation plus profonde et argumentée en évinçant ma parole, c’est parce que maintenant mes arguments les dérangent. Je ne sais pas si cela changera quelque chose un jour dans leur façon de penser. Je ne peux pas bousculer leur éducation, leur croyance… d’un coup de baguette magique. Néanmoins, cet enseignement m’a donné envie d’oser ce changement, en modifiant mes pratiques quotidiennes. Je suis convaincue que cela sert à quelque chose, à faire bouger, ne serait-ce qu’un peu, leurs idées reçues, leurs préjugés.
29“L’avantage de pouvoir argumenter, lorsque les gens t’écoutent, c’est que même si pour le moment ils restent campés sur leurs positions, peut-être que dans dix ans il en ressortira quelque chose. On ne pourra pas le savoir, mais je veux y croire.” Voilà ce que dit ma professeure de son cours de sociologie du genre. J’applique cela à ma vie de tous les jours maintenant.
Résistances en nous et au sein du groupe
30Face à ce lever de voile qu’a provoqué ce cours, je me remets beaucoup en question. Sur ma façon d’être, mon attitude, mes envies. J’adore la danse et le théâtre parce que je suis une fille, je déteste les maths parce que j’y étais destinée ? Tout peut-il être expliqué par le genre ? Évidemment non. La sociologie du genre n’est pas une théorie comme dit plus tôt. C’est une boîte à outils qui permet de comprendre des réalités sociétales. Par exemple, on sait qu’aujourd’hui les femmes consacrent encore beaucoup plus de temps que les hommes au ménage. On ne peut pas expliquer cela en affirmant que les femmes sont des passionnées du balai, ou qu’il existe des tâches naturelles pour chaque sexe. La sociologie du genre permet de comprendre pourquoi et comment la société affecte les rapports homme/femme. Loin d’être moralisatrice, la sociologie du genre donne des outils de compréhension de notre monde. Et elle est un apprentissage à une plus grande tolérance.
31Au sein du groupe du Master, les résistances ont émergé dès le premier cours. En réaction au texte de Françoise Héritier qui explique que la seule différence notable entre la femme et l’homme c’est l’enfantement et que toutes les différenciations sociales en découlent, on entend alors que cette explication est purement idéologique mais surtout qu’elle ne tient pas. “Comment expliquer alors que ce sont les hommes qui ont pris le dessus ensuite et pas les femmes qui ont tiré profit de cet avantage d’enfanter les héritiers ? C’est bien qu’il y a une différence entre hommes et femmes et que les hommes ont réussi à…” montrer leur supériorité ? Ce type d’aberrations provenait de jeunes hommes, de jeunes femmes, de croyances et de religions multiples. Mais, surtout, ils étaient tous issus d’une formation en sociologie. C’est cet élément qui m’inquiète le plus. Lorsque je me dis que rien n’est perdu, qu’il faut essayer de convaincre et de changer les choses au quotidien, j’ai toujours cette voix dans ma tête d’étudiants en sociologie, à l’université, qui sous-entendent que l’homme est naturellement supérieur à la femme et que l’un et l’autre doivent se cantonner à leur rôle social. Alors je repense à ce que disait ma professeur de sociologie du genre : “Tu ne peux pas le savoir, mais peut-être qu’un jour ou l’autre, ça aura fait son chemin, et que les choses bougeront pour lui, et son entourage.” C’est comme ça que l’on avance. »
Gaston Laval, 22 ans, commence en septembre 2013 sa dernière année d’étude avec un Master d’Affaires Publiques à l’université Paris-Dauphine
32« Après un parcours universitaire qui m’a conduit à connaître, en quatre ans, quatre universités différentes, dont une au Canada pour un semestre, en 2011. Militant politique et syndical depuis mes 15 ans, d’abord à l’extrême gauche puis aujourd’hui au Parti socialiste ; je suis élu étudiant au cevu (Conseil des études et de la vie universitaire) de l’université Paris Dauphine.
Un parcours, des expériences
33J’ai une expérience un peu différente de mes camarades du fait de mon parcours universitaire et militant. J’ai très vite été confronté aux questions de genre par mon engagement dès l’âge de 15 ans dans un parti politique dans lequel le féminisme et les luttes contre les discriminations sont parmi les premiers combats : la Ligue communiste révolutionnaire (lcr). Toute ma formation militante à la lcr a été assurée par deux « soixante-huitards », un homme et une femme, et la première grande manifestation à laquelle j’ai été invité à participer était justement la manifestation annuelle du 8 mars pour la « Journée internationale de lutte des femmes pour leurs droits » comme nous disions. La lcr se dissout en 2009 pour créer le Nouveau parti anticapitaliste (npa) dans une optique de rassemblement des forces anticapitalistes françaises.
34Avant de venir à Dauphine pour le Master de Science de la société-Sociologie-Science politique, ce sur quoi je reviendrai juste après, j’ai effectué une Licence de Science politique à l’université Paris 8-Vincennes-Saint Denis, une université très à gauche politiquement et dans laquelle une véritable formation sur les questions de genre et de féminisme perdure. Je n’ai pas eu la chance de suivre l’enseignement de Sociologie du genre que je devais normalement suivre au premier semestre de troisième année parce qu’à ce moment j’étais en échange universitaire au Canada. Néanmoins, et complètement en lien avec mon engagement politique au npa puis au Parti socialiste, j’ai suivi, en tant qu’auditeur libre, des cours de sociologie du genre afin de mieux appréhender cette thématique dans mon quotidien mais surtout pour avoir un apport théorique et historique sur le féminisme.
Le genre à Dauphine : un choc des cultures
35L’enseignement assuré à Dauphine m’a intrigué et passionné par son approche totalement différente de ce que j’avais pu recevoir comme formation théorique jusqu’à présent. Et je pense que c’était la bonne méthode pour faire comprendre aux différentes sensibilités des étudiant-e-s ce que sont le concept de genre et les discriminations, introduire l’histoire du féminisme sans pour autant faire une fixation sur ce mot qui aujourd’hui est très clivant voire perçu très négativement… Une méthode qui est donc totalement contraire à l’approche militante que j’ai connue à la lcr mais également à Paris 8 où l’enseignement est clairement militant !
36Cette différence a, je pense, été très positive et beaucoup plus efficace pour beaucoup d’étudiant-e-s du fait qu’il s’agissait du premier contact avec cette discipline bien trop déconsidérée et notamment dans cet établissement.
37Je catégoriserais les réactions des étudiant-e-s en trois types qui s’exprimaient par deux réactions. D’abord les intéressé-e-s qui étaient présent-e-s en cours, qui participaient et lisaient les textes. Ensuite les « j’m’en-foutistes » qui, soit venaient en cours parce que même si la présence n’était pas contrôlée, ils y assistaient parce qu’il s’agissait d’un enseignement du cursus commun à tou-te-s ; soit ils ne venaient pas parce que les modalités d’évaluation et la non-obligation de présence ne le requéraient pas. Enfin, les réticent-e-s qui pour certain-e-s ont très vite arrêté d’assister au cours parce que l’enseignement les dérangeait, les heurtait dans leurs convictions personnelles et religieuses alors que d’autres, exactement pour les mêmes raisons, assistaient à toutes les séances afin de confronter leurs idées et convictions à l’enseignement voire à l’enseignante. Cependant les prises de parole et réactions en classe venaient principalement de personnes convaincues ou du moins intéressées, comme moi. Je qualifierais en quelque sorte leur attitude de « masochiste », s’infligeant une souffrance, une violence psychologique et intellectuelle alors même que la présence en cours n’était pas obligatoire dans les faits.
38La réticence aura perduré tout le semestre et plusieurs étudiantes sont allées, à la fin du dernier cours, voir notre enseignante pour lui exprimer les chocs et les difficultés qui ont été les leurs pour suivre cet enseignement qui les heurtaient au plus profond d’elles-mêmes. Jéromine et moi avons assisté, quelque peu effarés, à la scène en question et sommes directement allés voir Tania Angeloff pour lui exprimer notre gratitude et lui faire part du plaisir qu’a été le nôtre de suivre ce cours et, pour ma part, de lui exprimer tout mon soutien dans sa méthode pour assurer un enseignement non-militant.
39Il faut cependant rappeler et accorder une place non-négligeable au contexte dans lequel nous avons eu à suivre ce cours, celui des débats et premières grosses manifestations sur le mariage et l’adoption pour tous. La plupart des « résistant-e-s » de la promotion exprimaient sans gêne leur opposition au projet de loi et, pour certaines, manifestaient et s’essayaient à des travaux de propagande et d’instrumentalisation de la question y compris auprès de nous. »
Arnaud Bonduelle, 25 ans, titulaire d’une Licence de Science politique à l’université Paris Ouest Nanterre la Défense, a étudié dans le Master de Science politique et sociologie de Paris-Dauphine en 2012-2013 et actuellement est inscrit dans le Master 2 « Gestion publique » de l’ena (École nationale d’administration) piloté avec Dauphine
Le « genre » comme discipline : la fermeture de l’espace académique
40« Au début de l’année universitaire, à l’annonce de l’enseignement de cette matière, je m’étais réjoui de son caractère “transversal”. La sociologie du genre permet de trouver un angle d’analyse capable de brasser des thèmes très divers, comme le travail, la sexualité, la santé… La multitude des objets traités par cette matière était une belle promesse de stimulation intellectuelle. Mais il restait à découvrir les types de recherches qui nous seraient proposés comme références pour nos travaux. Cette transversalité s’est finalement arrêtée aux portes de ce qui est tenu dans l’espace universitaire comme acceptable par les enseignants du genre : les sciences sociales. J’ai bien conscience que cette affirmation peut paraître surprenante de la part d’un étudiant inscrit en Sciences de la société. Cependant, les études de la socialisation et des représentations genrées (aussi cruciales soient-elles) sont-elles suffisantes pour traiter pertinemment de sujets comme la santé et la sexualité ?
41Lors du cours, j’ai souvent pensé que nous nous focalisions sur des chercheurs aux manières de penser excessivement semblables, qu’ils soient sociologues, historiens, ou anthropologues. Cette exclusion d’office des études issues de certains champs disciplinaires, comme la neurobiologie, m’a semblé renvoyer plus à la fermeture des espaces académiques qu’à une réelle volonté d’ébranler collectivement et scientifiquement l’“ordre sexué”. Un simple clin d’œil à l’existence d’études contradictoires serait venu me rassurer sur le caractère scientifique de la matière. Cet aspect peut expliquer une partie des réticences et des interventions passionnées d’une infime proportion d’étudiants.
42Par ailleurs, si le sociologue doit parvenir à faire son “autoanalyse” et objectiver ses propos, les étudiants ne sont pas soumis à ce devoir. Alors qu’un universitaire a la possibilité d’affirmer son désaccord à travers la rédaction d’un article ou la participation à un colloque, le droit de réponse d’un étudiant se concentre dans les quelques minutes consacrées par l’enseignant au débat. Les réfractaires qui tentaient de timides oppositions subissaient instantanément les remarques désobligeantes d’autres étudiants. Beaucoup ont pris la décision de ne plus mettre les pieds à ces séances, préférant l’autocensure à la censure.
Une recherche de scientificité au service d’un combat idéologique
43Les enseignants du genre sont parfois accusés de faire de l’“idéologie”. Cet aspect paraît lié à la quête de scientificité de la sociologie du genre. Concernant un point de cours, j’ai débattu avec une camarade. Celle-ci m’a lancé : “Mais comment tu peux dire ça ? Tu as vu les statistiques ? C’est scientifique.” Le mot “science” revêt une immense autorité qui a tendance à clore le débat. J’ai d’ailleurs ressenti un profond souci de la part de l’enseignante d’afficher le caractère scientifique de la matière.
44Mais comment peut-on nier l’aspect politique de cette matière ? Pierre Bourdieu disait lui-même que la sociologie existait pour “donner des armes plus que des leçons”. Pourquoi nier que la sociologie du genre arme les étudiants pour un combat d’idées ? Pourquoi nier que l’université (et donc ces enseignements) produit des visions du monde ? L’étudiant que je suis préfère largement les batailles intellectuelles passionnées que les petites querelles de légitimation scientifique.
45La résistance à l’enseignement du genre dans le Master 1 Sciences de la société de l’université Paris-Dauphine, lors de l’année 2012-2013, a été extrêmement policée, voire inexistante. J’ai surtout ressenti le poids de la discipline et un grand conformisme de la part des étudiants. Si j’ai assisté avec intérêt à ce cours tout au long du semestre, je n’ai cessé de penser avec espoir à cette phrase de Theodor Adorno “La science a besoin de celui qui ne lui obéit pas” ».
46* * *
47Dans ce bilan de quatre ans d’enseignement obligatoire en sociologie du genre, sans doute faut-il rappeler que les témoignages de Jéromine Dabert, de Gaston Laval et d’Arnaud Bonduelle ne sont pas représentatifs, au sens quantitatif du terme, sur quatre promotions d’une soixantaine d’étudiant-e-s, soit deux cent cinquante étudiant-e-s et que les trois étudiant-e-s se sont portés volontaires dans cette entreprise de rédaction.
48On pourrait également rappeler qu’il entre toujours de la passion (ou de l’aversion) pour un cours, son contenu, la manière dont il est dispensé et qu’il convient donc de relativiser le propos concernant l’enseignement du genre proprement dit.
49Or, il nous semble pourtant que ces témoignages – singuliers comme tout récit d’une investigation qualitative – mettent au jour des questions spécifiques au genre et apportent un regard inédit sur un champ d’enseignement et de recherche au statut particulier, comme nous l’avons rappelé plus haut. Ils permettent enfin de sortir du silence où sont trop souvent renvoyés les bénéficiaires d’un cours sur le genre, en poussant à sa limite notre volonté de réflexivité pédagogique, au risque d’être interrogées sur nos pratiques d’enseignement.
Bibliographie
Bibliographie
- Angeloff Tania, 2012, « Des hommes malades du chômage ? Genre et (ré-)assignation identitaire au Royaume-Uni », Travail et Emploi, n° 131, pp. 71-84.
- Baerlocher Élodie, 2006, « Barbie contre Action Man ! Le jouet comme objet de socialisation dans la transmission des rôles stéréotypiques de genre », in Anne Dafflon-Novelle (dir.), Filles-garçons : socialisation différenciée ? Grenoble, pug, p. 69-83.
- Bajos Nathalie et Bozon Michel, 1999, « La sexualité à l’épreuve de la médicalisation : le Viagra », Actes de la Recherche en Sciences Sociales, n° 128, pp. 34-37.
- Bourdieu Pierre, 1998, « La promenade au phare », in La domination masculine, Paris, Le Seuil, pp. 98-112.
- Bourgois Philippe, 2001, « Viol collectif adolescent », in En quête de respect. Le crack à New York, Paris, Le Seuil, pp. 241-248.
- Bozon Michel, 1999, « Les significations sociales des actes sexuels », Actes de la Recherche en Sciences Sociales, n° 128, pp. 3-23.
- Cromer Sylvie, 2005, « Vies privées des filles et garçons : des socialisations toujours différentielles ? », in Margaret Maruani, Femmes, genre et sociétés, L’État des savoirs, Paris, La Découverte, pp. 192-199.
- Cross Simon et Bagilhole Barbara, 2002, « Girls’ Jobs for the Boys ? Men, Masculinity and Non-Traditional Occupations », Gender, Work and Organization, vol. 9, n° 2, pp. 204-226.
- Ghigi Rosella, 2004, « Le corps féminin entre science et culpabilisation. L’histoire de la cellulite », Travail, Genre et Sociétés, n° 12, p. 55-75.
- Insee Première, 2002, « Femmes et hommes : les inégalités qui subsistent », n° 834.
Notes
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[1]
Ce texte fait suite à une journée d’études du pôle genre de l’irisso (Institut de recherches interdisciplinaire en sciences sociales-umr 7071), en partenariat avec le Mage (Réseau de recherche « Marché du travail et genre »), qui s’est tenue à l’université Paris-Dauphine le 13 juin 2013.
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[2]
Compte tenu du caractère de témoignage à deux voix de ce texte, nous faisons le choix d’évoquer nos positions respectives le plus souvent à la troisième personne du singulier, quelquefois sous forme de citation, afin de rendre compte de la singularité de chacune de nos expériences.
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[3]
Sur la suggestion de Françoise Picq qui enseigne un nouveau cours portant sur les questions de genre dans un Master 1 de Développement durable, piloté par Sylvaine Thrinh, a l’université Paris-Dauphine, cette dernière me demande d’enseigner, en anglais, cinq séances intitulées « Gender and development », me donnant carte blanche sur le contenu.
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[4]
Jacqueline Laufer, 2005, « La construction du plafond de verre : le cas des femmes cadres à potentiel », Travail et Emploi, n° 102, pp. 31-34.
-
[5]
Dans deux registres différents, la publication de La domination masculine, par un homme, Pierre Bourdieu en 1998 ainsi que l’entrée du thème Féminin/Masculin au programme de l’agrégation de sciences économiques et sociales la même année, ont contribué à donner une visibilité au genre en sciences sociales.
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[6]
Centre de liaison de l’enseignement et des médias d’information.