Staps 2011/3 n°93

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Article de revue

Analyse d'un projet d'aide au développement organisé par une association locale d'handicapés moteurs de Ouahigouya : la Handicourse solidaire

Pages 7 à 23

Notes

  • [1]
    Aly Zoromé est un homme de 32 ans, artisan handicapé moteur, faisant partie des organisateurs de la course en tant que président de Pengd Wendé. Marié à une femme présentant également un handicap moteur (qui attend un enfant), ce fils d’agriculteurs vit depuis ses 18 ans à Ouahigouya.
  • [2]
    Phrase extraite d’un entretien réalisé avec Daouda Belem, homme de 34 ans, instituteur, organisateur valide représentant de l’OCADES.
  • [3]
    Amadé Ouedraogo, vice-président de Pengd Wendé, était responsable de la formation artisanale à ECLA. Sa participation au concours d’artisanat aurait enlevé tout enjeu, étant donné ses fortes chances de le gagner.
  • [4]
    Abu Zallé, homme de 38 ans, artisan, membre de Pengd Wendé et participant handicapé moteur.
  • [5]
    Ousseni Sanga est un homme valide de 20 ans, soudeur à Ouahigouya. Il a participé à la course en tant que responsable des commissions mécaniques puis de l’accueil/hébergement.
  • [6]
    Daouda Belem, homme de 34 ans, instituteur, organisateur valide représentant de l’OCADES.
  • [7]
    Fatimata Saba est une femme de28 ans, qui fabrique des bracelets à Bang n tum. Célibataire, elle vit chez sa tante à Ouahigouya après avoir fuit de chez ses parents, agriculteurs dans la petite ville de Titao.
  • [8]
    Moussa Touré est un homme de 42 ans, au chômage. Membre d’ECLA, il a participé à la course en tant qu’handicapé moteur.
  • [9]
    Ganamé Dialla est un homme de 50 ans, président de l’association d’handicapés moteurs Eveil.
  • [10]
    Moussa Niampa, homme de 48 ans, couturier/tailleur, participant valide et responsable du théâtre.
  • [11]
    Boukari Sawadogo est un homme valide de 30 ans, au chômage, célibataire et sans enfant, qui entraîne bénévolement une équipe de football de jeunes de son quartier. Il était responsable lors de la course de la commission cuisine, et c’est lui qui a conduit le véhicule frigorifique.
  • [12]
    Ousseni Sanga, homme de 20 ans, soudeur, participant valide à la course responsable des commissions mécaniques puis de l’accueil/hébergement.

Introduction

1Selon Handicap International, 10 % de la population du Burkina Faso souffre d’un handicap, soit deux fois plus qu’en France. En dehors de cette comparaison d’ordre statistique, c’est la visibilité des personnes handicapées dans les rues des grandes villes du pays qui frappe en premier lieu. Peut-on pour autant en déduire une meilleure intégration sociale que dans les sociétés occidentales où, selon Sticker (2005), la proximité avec le handicap provoque invariablement chez les valides un sentiment de malaise ?

2Il est en effet facile d’idéaliser la situation des personnes handicapées en Afrique de l’Ouest, sous l’angle du pittoresque : leur capacité à « se débrouiller » au quotidien leur garantirait ainsi des conditions de vies acceptables, au sein de sociétés où la solidarité et l’entraide sont mises en avant par Guillemain-Gautier et Jacquemin (1994) pour évoquer leur prise en charge par la communauté en l’absence de traitement institutionnel. Cependant, la tentation du misérabilisme est également présente : les croyances traditionnelles relatives au monde invisible (sorciers et génies) seraient en effet responsables de leur maltraitance et de leur exclusion (Devlieger, 1994), dans un contexte de pauvreté croissante et de carence en personnel de santé. Si chacune de ces logiques explicatives contient une part de vérité difficilement contestable, Courade (2006) souligne la multitude d’idées préconçues, diagnostics rapides et solutions toutes faites véhiculées sur le continent africain, oscillant entre « afro-optimisme » et « afro-pessimisme » (Poizat, 2007).

3Concernant le traitement des personnes handicapées au Burkina Faso, la diffusion de ces représentations est liée à une forte tradition coloniale, touristique et humanitaire. En effet, l’aide au développement est extrêmement présente depuis les années 1970 dans cette ancienne colonie française : derrière certaines structures nationales ou internationales existent une foultitude de petites associations, souvent créées au retour d’un voyage dans un objectif bienveillant de soutien aux personnes en difficulté. Bierschenk (2006) fait alors le constat de la relative inefficacité de ces nombreux projets, dont beaucoup se sont soldés par des échecs et des désillusions. Ainsi ne suffirait-il pas de vouloir aider pour y parvenir ; Bourdarias (2003) évoque l’existence d’un « champ humanitaire » caractérisé par des luttes sociales intenses pour la conquête des positions dominantes entre les associations d’aide au développement et les populations bénéficiaires de l’aide.

4Afin d’approfondir ces questions, nous nous sommes intéressée à l’organisation et au déroulement d’un microprojet d’aide au développement finalisé par une sensibilisation au handicap moteur. La Handicourse solidaire a réuni du 21 au 27 décembre 2008 une cinquantaine de participants autour d’un même défi : parcourir en quatre étapes les 75 km reliant Yako à Ouahigouya. Lors des phases de course, personnes valides et handicapées couraient côte à côte ; lors des journées de repos, des activités de sensibilisation comme du théâtre et différents concours étaient proposées.

5C’est au sein d’une association d’handicapés moteurs de Ouahigouya, intitulée Pengd Wendé, qu’a émergé l’idée de la Handicourse solidaire. Présidée par Aly Zoromé [1], présentant lui-même des incapacités motrices, elle regroupe une trentaine de membres avec parmi eux quelques valides : artisans de métier, ils luttent pour l’autonomie et la reconnaissance de la personne handicapée. Pengd Wendé est soutenue depuis 2007 par l’Association des Élèves de l’École Normale Supérieure, département Éducation Physique et Sportive (A3EPS), siégeant à Rennes en France. Cette structure étudiante, dont nous faisons partie, a été créée en 2005 : l’une de ses commissions, réservée à la solidarité internationale, est porteuse de projets à l’étranger dans les domaines sportif et/ou éducatif.

6Nous nous intéresserons à cet événement sous trois angles différents. Tout d’abord, nous questionnerons les effets de la Handicourse solidaire sur les représentations des spectateurs venus y assister, mais également sur celles des membres de la caravane. Ensuite, nous développerons les enjeux de l’organisation de cette course en la resituant dans un contexte d’émergence d’un mouvement associatif local, au sein d’une société traditionnellement communautaire. Enfin, nous analyserons la Handicourse Solidaire, de sa conception à sa réalisation, comme un projet d’aide au développement mettant en relation une association du Nord offrant son aide à une association du Sud, porteuse d’un projet. Notre ambition sera de mettre en évidence, par une analyse des enjeux sous-jacents, le caractère ambivalent de la Handicourse solidaire, c’est-à-dire l’intrication entre la production simultanée d’effets souhaités et d’effets pervers à chacun de ces trois niveaux.
D’un point de vue méthodologique, l’originalité de notre travail réside dans notre double statut d’enquêtrice et de participante. Simultanément actrice et témoin, nous avons tenté d’assumer mais également d’objectiver notre engagement, en nous interrogeant en permanence sur les présupposés et le bien-fondé de nos propres actions et décisions. Notre enquête de terrain « par dépaysement » (Beaud et Weber, 2003) a duré deux mois et demi, répartis en deux voyages : l’un en février 2008 lors de la construction du projet, et l’autre en décembre-janvier 2009 pour sa réalisation. Le milieu d’interconnaissance sur lequel nous avons travaillé se situait à Ouahigouya, au nord-ouest du Burkina Faso : il était constitué des participants, organisateurs et spectateurs de la Handicourse solidaire, valides comme handicapés moteurs. Nous nous sommes appuyée sur une quinzaine d’entretiens semi-directifs d’une durée allant de trente minutes à une heure trente. Malgré l’existence de risques de biais d’interprétation, mis en évidence par Nyamba (2003), nous avons eu recours à un traducteur dans la mesure où la plupart de nos informateurs ne parlaient que la langue locale – le mooré. De plus, des observations effectuées lors des préparatifs et de la réalisation de la course ont également été notées sur notre journal de terrain.

1 – La Handicourse solidaire comme caravane de sensibilisation au handicap moteur

7Au Burkina Faso, même si les textes législatifs récents pensent le handicap moteur comme une atteinte compensable grâce à l’éducation, à l’emploi et aux loisirs culturels et sportifs, la déficience motrice est encore couramment associée dans les représentations coutumières avec une inutilité sociale et une incapacité mentale (Endress, 2010).

8De ce fait, c’est l’envie de montrer à la population locale, mais également aux acteurs politiques, la multiplicité des activités réalisables malgré le handicap moteur qui a conduit les membres de Pengd Wendé à vouloir organiser un événement de sensibilisation comme la Handicourse solidaire. Nous montrerons que, si la mise en scène et l’acclamation des membres de la caravane dans les villages-étapes à l’occasion des différents concours organisés est significative d’une acceptation du corps handicapé, elle révèle en même temps les limites de celle-ci. Selon nous, c’est davantage chez les participants à la course, à l’intérieur même de la caravane, qu’une transformation profonde des représentations s’est opérée.

1.1 – Le rôle des concours sportifs et d’artisanat comme moyen de valorisation des compétences des personnes en situation de handicap moteur

9Dans chacun des villages dans lesquels la caravane s’est arrêtée, différentes animations ont été organisées : si les concours d’artisanat ont été réservés aux participants de la Handicourse solidaire, dont c’est en majorité le métier, des courses de sprint en tricycle –fauteuils roulants propulsés par les mains avec deux roues à l’arrière– ont été ouvertes à la population locale. Systématiquement, ces concours étaient suivis d’une remise des récompenses très solennelle, malgré le caractère symbolique des lots (essentiellement des casquettes et des tee-shirts), devant un public constitué des villageois. Les vainqueurs étaient appelés au micro, sous les applaudissements des autres participants et des spectateurs présents, pour venir chercher un prix remis par une personnalité locale : des présidents d’associations d’handicapés et des acteurs politiques (maires, directeurs des sports et directeurs de l’action sociale au niveau provincial) principalement.

10Si les cinq premiers uniquement étaient récompensés, on peut considérer avec Vieillard-Baron (2002) que ce ne sont pas les individus vainqueurs mais l’« objet même du concours », c’est-à-dire les compétences sportives et professionnelles des personnes en situation de handicap moteur, qui ont été glorifiées. En effet, cet auteur souligne que s’ils ne font qu’un seul grand gagnant, les concours organisés lors des fêtes traditionnelles contiennent une « force de positivité » évitant la mise à l’écart des perdants. Dans le cas des concours d’artisanat de la Handicourse solidaire, ce sont ainsi toutes les personnes handicapées qui ont été gagnantes, dans la mesure où ils ont permis de lutter contre leur image d’inutilité sociale liée à leur supposée incapacité à travailler. Les compétitions sportives se sont inscrites, selon nous, dans la même logique de valorisation de ces individus habituellement « discrédités » (Goffman, 1975) dans la vie quotidienne. En effet, rares sont les occasions de voir des personnes handicapées pratiquer du sport au Burkina Faso : le plus souvent, elles sont vues comme des gens qui « sont là à tourner en ville à un rythme peut-être de 0 ou 5 à l’heure » [2] ; ceux qui s’entraînent régulièrement en athlétisme sur la piste de l’aéroport attirent d’ailleurs toujours le regard surpris des passants. L’activité sportive permet alors, selon Murphy (1990), surtout pour les hommes, de compenser la remise en cause, par l’atrophie du corps, des valeurs culturelles attachées à la virilité comme la force, la rapidité ou le courage.

11En effet, comme l’a montré Marcellini (2005) en France, les personnes handicapées réagissent parfois à leur stigmatisation en consacrant beaucoup d’efforts pour maîtriser certains domaines d’activité que l’on estime fermés ou inaccessibles pour elles. Les courses de sprint en fauteuil pendant la Handicourse solidaire, dont la vitesse a parfois été assez impressionnante car dépassant de loin celle des valides, ont ainsi été l’occasion d’une visibilité singulière et valorisante car mettant en « mouvement » des corps handicapés. Leur mise en scène est alors significative selon cet anthropologue d’une certaine acceptation dans la société de la différence corporelle.
De plus, Marcellini (2005) a montré que les compétitions sportives peuvent être utilisées par ce qu’elle appelle des « minorités actives » comme des espaces supports d’une action politique élargie. Fournier (2008) a d’ailleurs montré, en s’intéressant aux salariés agricoles, que les fêtes traditionnelles servent souvent de « vitrine de communication » permettant à des populations dévalorisées dans les représentations sociales d’attirer l’attention des acteurs politiques. Si lors de la Handicourse solidaire ces derniers n’ont pas toujours répondu présent aux invitations des organisateurs, l’événement leur a permis de se faire connaître, comme en témoigne l’obtention la semaine suivante d’un entretien avec un homme politique de rang national, Sam Mathias. C’est le maire de Yako, ville de départ de la course, qui a donné les coordonnées d’Aly Zoromé à ce représentant du ministère de la Promotion des Droits Humains, venu pour lancer une campagne de sensibilisation au handicap par l’intermédiaire du « théatre-forum ». Ayant l’expérience de ce type de manifestations, organisées lors des soirées passées dans les villages-étapes, l’association Pengd Wendé fait désormais figure de ressource importance dans ce domaine.

1.2 – Limites et effets pervers de ces différents concours

12Si la Handicourse solidaire a permis d’attirer l’attention de certains acteurs politiques, à aucun moment les participants et organisateurs n’ont adopté un discours revendicatif à leur égard, ce qui peut paraître surprenant dans un pays où les personnes handicapées ne représentent pas une priorité pour l’État. Ce rapport uniquement légitimiste des membres de la caravane au pouvoir politique est d’autant plus étonnant que l’ambition première des concepteurs du projet, tel qu’il avait été imaginé au départ, était d’obtenir de la part du président du Burkina Faso, Blaise Compaoré, des mesures concrètes visant l’amélioration de leurs conditions de vie.

13Il est possible de comparer cette absence de dimension contestataire avec le refus d’occuper une « place de manifestant » observé par Marcellini (2005) en France chez des individus en situation de handicap moteur. En effet, s’inscrire explicitement dans un mouvement revendicatif présenterait le risque de se faire assimiler à des personnes assistées, installées dans la plainte et la situation de quémandeur. Cela irait alors à l’encontre des objectifs des organisateurs de la Handicourse solidaire, qui revendiquent au contraire leur autonomie et leur capacité d’indépendance vis-à-vis des valides. Les fêtes, les spectacles, les concours sont d’ailleurs, selon Balandier (2006), l’occasion pour les acteurs de se montrer « idéalement » sur le mode spectaculaire, non pas tels qu’ils sont réellement mais tels qu’ils doivent être. C’est ainsi une image « montrable » (Marcellini, 2005) des personnes handicapées qui a été mise en scène lors de la Handicourse solidaire, entretenant une relation d’analogie avec les représentations de la normalité dans la société burkinabée, sans les remettre en cause.

14Par ailleurs, comme le souligne Fournier (2008), les enjeux des concours lors des fêtes traditionnelles sont complexes : derrière leur fonction première tournée vers l’extérieur de mise en valeur des compétences, il s’agit également de manière implicite de classer les individus et de les mettre en concurrence. Cet esprit de compétition s’est notamment manifesté lors du concours d’artisanat : l’interdiction faite à Amadé Ouédraogo [3] d’y participer témoigne en effet, selon nous, de son fort enjeu pour le vainqueur, sans doute exacerbé par notre présence sur place. Chaque artisan rêve en effet de trouver un « blanc » qui lui achèterait en grand nombre ses objets pour les revendre à l’étranger : à l’occasion de ce concours, un artisan pyrograveur nous a d’ailleurs transmis un message sur un petit bout de papier, dans lequel il nous demandait de l’aider à faire connaître son travail à d’éventuels acheteurs en France. En fin d’entretien, Abu Zallé [4] nous a également fait comprendre qu’il souhaiterait que nous aidions Pengd Wendé à vendre leurs objets d’artisanat.
Ainsi, nous avons montré le caractère ambigu des concours : si à un premier niveau ils ont permis la valorisation des compétences des personnes en situation de handicap moteur, ils n’ont fait que diffuser une image idéale du handicap sans réelle remise en cause des représentations dominantes et du pouvoir politique, tout en renforçant la concurrence entre des participants mettant en jeu leurs conditions de vie future.

1.3 – La pratique sportive comme vecteur de sensibilisation interne à la caravane

15Si l’essentiel des activités organisées lors de la Handicourse solidaire avait pour ambition de sensibiliser les personnes extérieures, les étapes de course entre les villages ont également participé à une transformation des représentations chez les membres de la caravane. Nous nous intéresserons aux effets de mise en coprésence pendant une semaine de personnes valides et handicapées autour du sport.

16En effet, les étapes de course regroupant valides et handicapés sur un même « terrain », avec les mêmes règles, peuvent être considérées comme une « pratique sportive mixte » (Marcellini, 2005). Le plus souvent, les valides ont couru à pied, au sein du peloton ; à d’autres moments, ils ont remplacé dans leurs tricycles des participants ayant besoin de se reposer quelque temps dans le véhicule qui fermait la marche. Ils se sont alors aperçus que l’utilisation d’un tricycle demande une certaine technique, ainsi qu’une puissance importante dans les membres supérieurs. Ousseni Sanga [5], ayant déjà essayé ce mode de propulsion manuelle auparavant, avait constaté que « c’était très dur » de pédaler, et que les « tournantes » étaient difficiles à maîtriser ; il ne croyait pas que des personnes ayant des incapacités motrices soient « aussi solides ». Leur endurance a également « ébloui » Daouda Belem [6], qui ne soupçonnait pas qu’ils pourraient tous « faire la distance ».

17La mixité sportive a également été vécue de manière positive par les personnes handicapées que nous avons interrogées, pour lesquelles il était très important que des valides les accompagnent. Leur présence, signe pour Fatimata Saba [7] de considération, lui a ainsi donné le courage nécessaire pour suivre le peloton, malgré des douleurs importantes au thorax ressenties lors de la dernière étape. Pour Moussa Touré [8], c’est également le fait d’avoir été intégré à un groupe mixte de sportifs qui lui a permis de se dépasser : « comme il y a les valides qui sont là, le temps que tu vas te rendre compte que tu es fatigué, tu es déjà arrivé ! ». Par l’intermédiaire de l’expérience d’une activité sportive intense et quotidienne, on a assisté à la construction d’un véritable collectif, rappelant les travaux de Zanna (2008) sur les effets socialisants de la douleur physique chez des mineurs incarcérés. Le peloton fonctionnait ainsi comme un même corps collectif : avec l’interdiction de doubler, les fauteuils étaient alignés deux par deux, chaque rangée suivant de près les roues de la rangée précédente ; l’allure était gérée par Ganamé Dialla [9], placé devant le groupe, afin que même les moins sportifs puissent suivre. D’ailleurs, le fait d’avoir été contraint par la fatigue à se détacher du « rang », pour récupérer un peu, a été vécu douloureusement par Moussa, qui a souhaité s’excuser à Gourcy d’avoir « abandonné le groupe ».

18Ces modifications des représentations se sont retraduites par une transformation des comportements dans la vie quotidienne, dans le sens d’une plus grande acceptation par les valides de la proximité avec des personnes handicapées, comme en témoigne l’extrait d’entretien suivant :

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« Je vais être honnête, par le passé on ne se tapotait pas quoi, on se voyait peut-être un peu… à distance. On ne s’était jamais côtoyés autant comme ça, à côté, dans des lieux proches, oh non ! (…) Mais pendant la course, j’ai dormi avec eux, j’ai mangé avec eux, j’ai bu le thé avec eux, c’est ça plutôt qui m’a beaucoup plu. (…) J’ai grandi en idée, en esprit ! ».
(Daouda Belem, homme de 34 ans, instituteur, organisateur valide représentant de l’OCADES)
Nous avions d’ailleurs remarqué sa réticence à l’idée de se mêler aux personnes handicapées lors d’une réunion préparatoire : il avait alors refusé de s’inscrire dans une commission (chacune étant composée d’au moins un individu présentant un handicap moteur), prétextant préférer superviser de manière générale l’organisation. Le fait de vivre au quotidien des situations mixtes a ainsi permis à Daouda de dépasser le « malaise » (Goffman, 1975) qu’il pouvait ressentir auparavant. Nous ne nous attendions pas à une telle transformation des membres de la caravane, que nous considérions a priori comme déjà sensibilisés. Nous avions en effet davantage pensé les participants et organisateurs de la caravane comme des vecteurs de diffusion, que comme des bénéficiaires du message de sensibilisation.

2 – La Handicourse solidaire comme événement organisé par une association d’handicapés moteurs de Ouahigouya

20Dans les pays d’Afrique de l’Ouest, les liens sociaux sont décrits comme étant traditionnellement communautaires (Marie, 1997), c’est-à-dire fondés sur une logique de parenté. Cependant, Favreau (1998) souligne une multiplication dans les grandes villes, depuis les années 1990, d’un regroupement de type associatif, basé sur un principe d’adhésion individuelle. À Ouahigouya, quatre associations d’handicapés moteurs coexistent : Pengd Wendé, Bang n tum, Beogo Neeré et Eveil. Si leurs membres se sont regroupés dans une logique avant tout économique, afin de trouver un travail, le lien affectif et relationnel y est également important (Endress, 2010).

21Nous montrerons que si la quasi-totalité des participants sont membres d’une association, c’est dans une logique de solidarité davantage communautaire que s’est inscrite la Handicourse solidaire. Cependant, derrière l’affichage d’une entraide désintéressée, c’est le principe de donnant/donnant qui a relié les membres de la caravane entre eux. Nous mettrons en évidence que l’imposition du bénévolat des participants a placé l’organisateur principal de la course, Aly Zoromé, dans une situation de dette et de dépendance.

2.1 – La participation à la course comme l’expression d’une solidarité communautaire

22Si, à première vue, participer à la Handicourse solidaire semble gratuit, dans la mesure où aucun frais d’inscription n’a été demandé, où toutes les dépenses ont été remboursées (déplacement en bus, remise en état des vélos), et où la nourriture et l’hébergement ont été offerts, nous montrerons que cela a constitué un réel service rendu à Aly.

23En effet, étant donné que les emplois dans les villes d’Afrique de l’Ouest proviennent en majorité de l’économie « informelle » (Dupuy, 2001), s’absenter une semaine de son lieu de travail représente un réel manque à gagner. Moussa Niampa [10], par exemple, a estimé avoir « tout sacrifié, laissé son travail, tout tout tout ! » pour être présent auprès d’Aly, son ami depuis plusieurs années. Certains ont d’ailleurs dû renoncer à participer pour des raisons financières, comme en témoigne l’extrait d’entretien suivant :

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« Vraiment, s’il avait fait ça gratuitement, ça aurait pu lui coûter cher. Parce qu’au moment de la course il n’avait pas à manger, il devait payer son loyer, et il avait les commandes. Ça allait être très très dur pour lui. »
(Traduction par Boukari des propos de Seydou Rayaissé, homme de 28 ans, artisan handicapé moteur, membre de Bang n tum, resté à Ouahigouya.)

25En effet, Fontaine (2004) montre que, pour une grande partie de la population burkinabée, la réalité des initiatives économiques est faite de « trucs et de ficelles », de « magouilles et de débrouille » qui permettent de gagner au quotidien de quoi nourrir et loger sa famille. Étant conscient du fait que la plupart des membres de la caravane « se débrouillent le matin pour gagner leur soirée », Aly savait qu’il ne pourrait inscrire que les personnes appartenant à son réseau familial et amical :

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« J’ai fait toutes les associations des handicapés. À chaque fois, je dis, c’est un truc volontaire. Je vous informe, mais c’est à toi de t’inscrire si tu veux, et tu ne t’inscris pas si tu veux pas (…). Il y a des gens qui voulaient faire bagarre avec moi, ils me demandaient pourquoi je n’ai pas inscrit leur nom. Moi, j’ai peur, parce que c’est un truc volontaire, et tu viens pour rien. Bon, c’est pas pour rien, mais tu peux dire que tu viens pour rien. Donc c’est difficile d’inscrire une personne que tu ne connais pas. »
(Aly Zoromé, homme de 32 ans, artisan handicapé moteur, président de Pengd Wendé.)

27On comprend ainsi qu’une fois accompli son devoir d’information, afin d’éviter toute vexation, le président de Pengd Wendé a sélectionné les personnes à inscrire en fonction de son réseau amical et familial. C’est surtout en direction des valides, qui a priori n’avaient rien à gagner dans cette course (par rapport aux personnes handicapées), que ce filtrage a été réalisé : Aly a sollicité en priorité ses frères et sœurs, ainsi que ses amis valides. De ce fait, on peut dire que c’est en mettant en œuvre les mécanismes de la solidarité communautaire que s’est opéré le recrutement des participants à la Handicourse solidaire.

2.2 – Une logique du donnant/donnant derrière l’affichage d’une solidarité désintéressée

28Malgré l’annonce par Aly et l’affichage par tous les participants d’une solidarité désintéressée, c’est la logique de l’échange qui a régi les rapports sociaux pendant la course. De ce fait, Aly a constamment cherché à compenser leur investissement, en fonction de ses propres moyens, de manière à la fois matérielle et symbolique.

29Ainsi, cinquante tee-shirts blancs offerts par l’association « Enfants du monde » ont été distribués à chacun des coureurs le matin du départ ; pendant la première étape reliant Yako à Niessega, des casquettes jaunes d’une grande banque française ont à leur tour été données aux participants. Nous n’avions pas réellement prêté attention à cette distribution matérielle jusqu’à ce qu’un incident se produise lors de la réunion du 22 décembre à Gourcy. Alors que l’ambiance était plutôt détendue, l’intervention du responsable de la sonorisation a brusquement stoppé les débats, lorsqu’il a menacé de quitter la course pour rentrer chez lui. Quand on lui a demandé les raisons de cette décision surprenante, il a expliqué qu’il n’était pas content parce qu’il n’avait reçu ni tee-shirt, ni casquette.

30En effet, Cissé Kassoum était déjà parti installer le matériel de sonorisation dans le village suivant au moment où Omar Ouedraogo, instituteur venu aider à l’organisation, les a distribuées : il lui a ainsi expliqué qu’il s’agissait d’un oubli involontaire, pour ensuite lui offrir publiquement la sienne afin de réparer l’injustice et de clore l’incident. Ce dernier montre, selon nous, le caractère indispensable des récompenses pour les participants : il est venu remettre en question la dimension désintéressée de la solidarité affichée à l’égard d’Aly, de manière d’autant plus pertinente qu’il a été suivi d’autres incidents du même type.

31Par exemple, Aly avait insisté auprès de Boukari Sawadogo [11] et de moi-même sur l’importance de la qualité des repas, et surtout de la présence de viande dans les assiettes midi et soir. Or la viande est un mets de luxe pour une grande majorité de la population burkinabée, que l’on achète selon ses moyens lors de fêtes comme les baptêmes et les mariages, mais rarement au quotidien. Après négociation avec Aly, nous avions fixé un budget de 80 000 FCFA réservés à l’achat de viande, ce qui représentait déjà plus de la moitié des dépenses de nourriture. Pourtant, ce n’était pas encore suffisant pour certains, qui sont venus se plaindre à Aly de ne pas avoir assez de morceaux dans leurs assiettes. Le jour de Noël, les participants, pourtant tous musulmans, sont même allés demander à Aly de leur ramener de la viande supplémentaire en cadeau pour la faire griller dans l’après-midi. Sachant probablement que nous allions refuser, étant donné que cela ne faisait pas partie du budget prévisionnel très serré, Aly est allé seul au marché, en utilisant ses économies personnelles, afin de leur apporter ce qu’ils avaient demandé.

32Ces compensations n’étant sans doute pas suffisantes, une remise des récompenses très solennelle a été organisée à la fin du repas de clôture à Ouahigouya le 27 décembre à midi, au cours de laquelle une « attestation de participation » officielle, signée par Aly et marquée du tampon de Pengd Wendé, a été donnée à chaque participant. Sur papier cartonné, avec une impression couleur, l’association Pengd Wendé attestait ainsi de la participation de chacun à la Handicourse solidaire édition 2008. Si individuellement leur valeur est symbolique, leur impression en soixante exemplaires a coûté 30 000 FCFA à Aly.
Selon nous, ces observations viennent confirmer les résultats d’une étude d’Eloundou et Kandiwa (2007) sur les solidarités familiales, qui mettent en évidence leur renégociation sur la base d’un « donnant/donnant ». De même, Marie (2002) souligne, dans son observation de la société abidjanaise contemporaine, l’émergence d’une « crise » de la solidarité communautaire, minée par une pauvreté grandissante. Confronté à une obligation de rendre d’autant plus forte qu’elle était implicite, Aly s’est vu contraint de récompenser les participants, quitte à puiser sur ses économies personnelles. Sous la positivité de l’entraide et de la solidarité, peut ainsi se cacher une logique utilitaire.

2.3 – Aly en situation de dette et de dépendance suite à l’imposition du bénévolat

33La question de la rémunération des participants à la Handicourse solidaire s’est posée lors de la construction du budget. Si Aly avait voulu les payer, l’A3EPS souhaitait faire fonctionner au maximum le bénévolat, à la base de l’organisation de toute manifestation associative en France (Desbordes et Falgoux, 2003). Cette imposition de la participation volontaire des populations aux projets de développement relève, selon Le Marcis (2003), d’un paradigme développementaliste, dont l’objectif est de les inciter à « prendre en main » leur avenir, et de témoigner aux bailleurs internationaux de l’engagement personnel des individus. Si dans l’absolu l’objectif est louable, il peut provoquer sur le terrain des effets pervers non souhaités que nous allons développer.

34En effet, malgré les précautions prises par Aly (affichage du volontariat, inscriptions en fonction de son réseau social et familial, récompenses), ce dernier s’est vu placé à la fin de la course dans une situation de dette envers les participants. Certains ont su lui faire comprendre lors du repas de clôture qu’ils attendaient malgré tout de lui une compensation, sous forme monétaire, des services rendus. Par exemple, Ousseni Sanga [12] est venu lui demander « ce qu’il avait gagné » en participant à la course. De même, si personne n’est venu directement réclamer un salaire à Aly, il nous a expliqué en entretien avoir perçu que les participants pensaient recevoir de l’argent :

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« D’autres ne me le disaient pas, mais ils pensaient avoir quelque chose [de l’argent]. C’est comme il y a beaucoup de gens, je vois leurs yeux, je sais qu’il ne me dit pas, mais je sens… Je ne suis pas fou, mais bon. (…) Je sais que il y en a d’autres qui sont déçus, qui n’ont pas pensé qu’on va les laisser partir comme ça, mais bon quand on n’a pas aussi, c’est difficile. »
(Aly Zoromé, homme de 32 ans, artisan handicapé moteur, président de Pengd Wendé.)

36Il est possible d’interpréter avec Marie (2002) la déception des participants comme étant l’expression d’une « expérience désenchantée de la solidarité communautaire », liée à la prise de conscience de l’échec de leur investissement dans l’entretien d’un capital social. Cet auteur souligne que ceux qui vivent cette expérience ont tendance à adopter par la suite un comportement davantage individualiste, et à recentrer leur aide autour de la « petite famille ». Aly a exprimé en entretien son inquiétude à parvenir à trouver des volontaires pour la seconde édition de la Handicourse solidaire :

37

« Il y en a d’autres qui vont s’approcher des gens qui ont fait [la première édition], par exemple ceux qui ne voulaient pas qu’on fasse la course. Ils vont saboter, inciter à ne pas la faire. Ils vont leur dire “je ne vous avais pas dit que ce que vous avez fait là, vous avez aidé des gens à s’en sortir pour rien ?”. Donc voici la raison pour laquelle, à ce moment, ils arrivent vite à convaincre les autres. »
(Aly Zoromé, homme de 32 ans, artisan handicapé moteur, président de Pengd Wendé.)

38Il craignait en effet que des personnes jalouses, de manière à lui nuire personnellement, aillent inciter les éventuels participants à ne pas se réinscrire, argumentant qu’il s’agirait d’un « travail cadeau ». On perçoit ainsi dans le discours d’Aly, à la lumière des travaux de Marie (2002), que c’est en réalité la dette, plus que la solidarité, qui a constitué la logique structurante des relations entre le président de Pengd Wendé, placé en position de « débiteur », et des participants « créanciers ». C’est ainsi que les diplômés-chômeurs ou les anciens salariés qualifiés étudiés par Vuarin (1997) à Bamako cherchent à éviter d’avoir recours aux « prêts familiaux », qui « obligent » en retour. Dans notre cas, la dette a encore été accentuée par la présence sur le terrain d’une association de solidarité internationale, qui faisait figure de débiteur idéal. En effet, si c’est à Pengd Wendé qu’on est venu réclamer de l’argent, indirectement c’est l’A3EPS qui était sollicitée, sur la base d’une association courante dans les représentations entre le « blanc » et l’argent (Chevrier, 1998). Nous nous intéresserons de manière plus approfondie, dans une troisième partie, à l’influence de la présence d’une association d’aide au développement sur l’organisation d’un tel événement.

3 – La Handicourse solidaire comme projet d’aide au développement

39Pour les observateurs en France et à Ouahigouya, la Handicourse solidaire qui s’est déroulée du 21 au 27 décembre 2008 est une réussite : c’est en effet la première fois que des personnes présentant un handicap moteur, accompagnées de valides, se regroupent pendant une semaine entière pour aller rencontrer la population des villages alentour. Si l’idée du projet est née en 2005 au sein de l’association Pengd Wendé, c’est en février 2008 qu’il s’est sérieusement concrétisé avec la venue de deux membres de l’A3EPS à Ouahigouya, ayant pour but d’évaluer sa faisabilité et de construire un budget.

40Nous montrerons que l’engagement de l’A3EPS dans le projet a permis d’obtenir des financements à l’étranger, mais également à Ouahigouya où sa présence a apporté une certaine crédibilité à l’association Pengd Wendé dans sa capacité à organiser la Handicourse solidaire. Cependant, des luttes d’influence entre les deux associations sont apparues au niveau de la gestion de l’argent obtenu, provoquant des stratégies de mises sous tutelle et de résistance.

3.1 – Nature du soutien de l’A3EPS dans le financement de la Handicourse solidaire

41Malgré le fait qu’ils suivent des cours réguliers d’alphabétisation en français, les membres de Pengd Wendé sont encore incapables de mettre en forme un projet par écrit. Or, selon Laurent (1998), la question du dossier de financement représente la clé d’accès aux ressources des donateurs européens ; il évoque ainsi l’existence d’un « divorce entre oralité et écriture » pour caractériser l’incapacité de nombreuses associations du Sud à faire face à cette « obligation d’écrire ».

42Dans le cadre du projet Handicourse solidaire, l’un des principaux apports de l’A3EPS a été de constituer un dossier écrit d’une vingtaine de pages, présentant le projet ainsi que son budget de manière détaillée. Proposé à différents organismes plus de six mois à l’avance, il a permis l’obtention d’une bourse de 960 euros par la ville de Rennes, et de 350 euros par l’association Jeunes à Travers le Monde. Armés du même dossier, les membres de Pengd Wendé ont sollicité des soutiens financiers dans leur propre ville, sans véritable succès. Le directeur de la Chambre de Commerce de Ouahigouya, Mr Boly, les ayant pourtant déjà aidés précédemment, leur a conseillé de revenir une semaine ou deux avant le début de la course, et de réduire le dossier de financement à une seule page de présentation.

43Si la présentation d’un document écrit s’est révélée inutile à Ouahigouya, notre arrivée sur place début décembre, en tant que membre d’une association étrangère, a donné de la crédibilité au projet de Pengd Wendé devant les banques, les grands commerçants, les administrations ou encore les associations. Des négociations, uniquement par oral, ont permis de récolter des sommes modestes allant de 500 à 20 000 FCFA ; des dons matériels, comme des casquettes banque LCL et des tee-shirts (Association Enfants du Monde, Caritas Burkina) ont été obtenus.

44C’est lors d’un rendez-vous avec le directeur de la Police de Ouahigouya, le 15 décembre 2008 en fin de matinée, que nous avons pris conscience de la faible importance de l’écrit dans le financement de projets au Burkina Faso. Nous devions rediscuter d’un devis très précis, qu’il nous avait donné en février pour l’organisation de la sécurité de la caravane : ce dernier, qui s’élevait à 297 000 FCFA, était divisé en sous-parties relatives au carburant des véhicules encadrant la caravane sur la route, au salaire des policiers nous suivant pendant toute la semaine, à leur hébergement ainsi qu’à leur restauration. Une fois installées dans son bureau, après avoir échangé les politesses d’usage, la première phrase prononcée par le directeur de la police nous a laissées sans voix : « Combien avez-vous à nous donner ? ». Ne comprenant pas bien ce qu’il attendait de nous, nous avons présenté le devis-papier proposé en février, en demandant s’il était toujours valable. Le chef de la Police a alors repoussé ce document sans même le regarder, en reposant sa question en nous fixant dans les yeux : « Combien vous pouvez nous payer ? On se débrouillera. » Nous rappelant une conversation quelques jours auparavant avec un ami, au cours de laquelle, trouvant le devis de la Police trop élevé, il nous avait conseillé de le « négocier », nous avons décidé de tenter notre chance, en annonçant sans conviction un budget deux fois moins élevé que le devis : « 150 000 ». Ayant l’air un peu embêté, le chef de la Police a finalement accepté cette proposition, que nous trouvions pourtant audacieuse. Malgré la présence d’Aly lors de cet entretien, à aucun moment le chef de la Police ne s’est adressé à lui dans le cadre de la négociation.
Ainsi, si en France les financeurs exigent, à des dates très précises longtemps avant l’événement, un dossier écrit détaillant le projet avant de le financer, et ne débloquent l’argent qu’en échange de factures, au Burkina Faso c’est au dernier moment qu’il est préférable de les solliciter. Comme le souligne Olivier De Sardan (1991), l’essentiel de la communication en milieu africain s’accomplit sous forme orale : une rencontre est indispensable, au cours de laquelle le financement est négocié de manière globale. La présence d’un soutien étranger permet alors de rassurer les éventuels bailleurs de fonds sur la réalisation effective des projets, et rend plus crédible les associations locales malgré leur mise à l’écart des négociations.

3.2 – Une mise sous tutelle de Pengd Wendé par l’A3EPS dans la gestion du budget ?

45Les désaccords entre Pengd Wendé et l’A3EPS au sujet de l’usage de l’argent lors de la Handicourse solidaire sont nés d’un malentendu au sujet de l’attribution des sommes récoltées. Si, pour nous, il était clair qu’une partie du budget, minoritaire, était apportée par Pengd Wendé et que le reste provenait de l’A3EPS, Aly avait compris que tout l’argent appartenait à son association.

46De ce fait, au départ, les membres de l’association du Sud étaient déterminés à s’occuper, seuls, de toutes les dépenses. Pour cela, une commission « finances » avait été créée avant notre arrivée : chacun devait informer son directeur, Amadé, avant d’effectuer tout achat. N’étant pas au courant de cette règle, nous avons commencé les premières dépenses le 18 décembre avec l’aide de Boukari. Dès le lendemain, Aly nous a fait remarquer que nous ne devions pas effectuer d’achats sans la présence d’un membre de la commission finances. Pour aller faire les courses au marché, nous avons ainsi été accompagnés par Amadé, vice-président de Pengd Wendé ; cependant, ce dernier est resté silencieux, ne faisant qu’observer Boukari négocier avec les commerçants, et nous laissant les régler. Pourtant, de son côté, Aly effectuait des achats sans notre présence, ni même nous en rendre compte.

47Au fur et à mesure du déroulement de la course, Aly a abandonné notre mise sous surveillance : nous avons adopté un mode de fonctionnement séparé, chacun effectuant les dépenses qu’il estimait justes. Cependant, si nous-mêmes utilisions plusieurs enveloppes correspondant aux différentes parties du budget, Amadé ne notait rien et c’est Aly qui conservait tout l’argent de Pengd Wendé. Si nous prenions soin de respecter ce qui était prévu, Aly ne fonctionnait pas avec le budget prévisionnel construit en février, et dépensait au jour le jour en fonction de ses besoins, dont de nombreux n’avaient pas été anticipés.

48Aveuglées par un « ethnocentrisme économique » (Lazuech et Moulévrier, 2006) caractérisé par l’idée que, pour être saine, la gestion d’un budget doit être rigoureuse et que toute charge non prévue doit être débattue (Desbordes et Falgoux, 2003), nous n’avons vu sur le moment que l’incapacité d’Aly et Amadé à tenir des comptes, qu’un « archaïsme » lié à leur analphabétisme. De ce fait, malgré l’éthique de l’A3EPS, que nous partageons, définissant son rôle comme un appui aux initiatives locales, nous avons décidé de demander systématiquement à Aly de nous informer avant d’effectuer une dépense, et de nous ramener immédiatement la facture correspondante, afin d’avoir une vision globale de l’argent restant. Ainsi, est apparu au cours de l’événement un phénomène déjà mis en évidence par de nombreux anthropologues comme Guillermou (2003), à savoir le développement de relations ambiguës et asymétriques dans le sens d’une subordination des associations locales aux ONG du Nord dans la gestion du budget. Descendre (1991) parle de « mise sous tutelle » pour évoquer cette peur de déléguer de réelles responsabilités aux structures du Sud dans l’organisation des projets.

49Loin de vouloir à tout prix dominer Pengd Wendé, notre intention était avant tout pédagogique. En effet, de la même manière qu’aurait pu le faire un tuteur légal en France, nous avons justifié le refus de certaines dépenses demandées par Aly mais non prévues dans le budget, par le fait de lui apprendre à gérer un budget, comme en témoigne notre extrait d’entretien avec Daouda :

50

« Il faut vraiment qu’il [Aly] travaille là-dessus, pour ne pas dépenser plus que ce qui est prévu. (…) Parce que si après il a dépensé plus d’argent, et que je ne sais pas où il est parti, ce n’est pas mon problème quelque part. Parce que sinon qu’est-ce que je peux faire ? Je ne peux pas lui donner comme ça 20 000 francs sans aucune raison ! Sinon, c’est moi qui donne [rires] et si je fais ça, je ne lui apprends pas. Déjà, ce sera mon argent, et je n’ai pas forcément beaucoup d’argent à donner comme ça, mais en plus je ne lui apprends pas à gérer un budget ! »

51On voit ici que nous étions avant tout préoccupées par les exigences de nos bailleurs de fonds, exigeant des factures justifiant une conformité entre les dépenses réalisées sur le terrain et celles prévues dans le dossier, avant de verser la bourse accordée. Malgré le fait que la Handicourse solidaire soit un microprojet au budget limité, nous avons en quelque sorte subi des contraintes similaires à celles de grands développeurs qui, comme le montre Berche (1998), doivent dépenser tout l’argent qui leur a été alloué exactement comme prévu pour espérer une reconduction de leurs subventions l’année suivante.
Nous avons ainsi mis Aly et Amadé sous tutelle dans la gestion du budget, plutôt que de chercher à réinterroger leur rationalité économique. Or, comme nous allons le développer dans la sous-partie suivante, celle-ci n’est pas à considérer comme une « rationalité du pauvre » (Lazuech et Moulévrier, 2006) faite de manques et d’incapacités, mais au contraire comme une économie inventive et astucieuse.

3.3 – La ruse comme stratégie de résistance

52Face à notre volonté d’imposer notre définition de la gestion légitime d’un budget, qui se doit d’être écrite et de respecter au maximum les dépenses prévues, Pengd Wendé a mis en œuvre des stratégies de résistance, afin de nous amener à effectuer des achats indispensables pour lui, mais que nous n’avions pas jugés « utilitaires » (Lassudrie-Duchêne, 1984) au départ. Par un moyen détourné, en nous mettant devant le fait accompli et en jouant avec le temps, il est ainsi parvenu par moments à résister efficacement.

53Par exemple, pour le ravitaillement des coureurs pendant chaque étape de la course, nous avions acheté à Ouahigouya, avant le départ, des sachets souples d’eau (beaucoup moins chers que les bouteilles), car ils sont introuvables en grande quantité dans les villages. Le reste du temps, pour s’hydrater, les membres de la caravane avaient à leur disposition de l’eau stockée dans des bidons sur notre lieu de résidence, pompée à partir des forages auxquels on nous avait donné accès gratuitement. Cependant, à Gourcy, Aly est venu nous demander d’aller acheter de l’eau en sachets, car certains participants se plaignaient de devoir boire l’eau du forage – ce qu’ils font pourtant quotidiennement chez eux. Nous avons refusé en argumentant que nous n’avions pas prévu d’argent pour cela, et que notre infirmier avait confirmé la bonne qualité de l’eau. Cependant, nous nous sommes aperçues le vendredi 26 au matin, en chargeant le matériel, qu’une partie des sachets d’eau prévus pour le ravitaillement des coureurs avait été bus la veille à Bougounam par certains membres de la caravane, avec l’accord d’Aly. Plutôt qu’une décision inconsciente et dangereuse, car privant d’eau des sportifs pendant un effort de longue durée sous une chaleur tropicale, il s’agissait de nous contraindre à effectuer une dépense que nous avions au départ refusée. En effet, sachant que nous jugions indispensable le ravitaillement des coureurs, il nous a obligées par une mesure du risque à racheter des sachets d’eau pour compenser ceux utilisés dans les villages.

54Ici transparaît, selon nous, toute l’inventivité d’Aly : par la ruse, il a résisté à la mise sous tutelle de Pengd Wendé par l’A3EPS, en parvenant parfois à nous imposer certaines dépenses, certes minimes au niveau économique, mais déterminantes socialement. Boire de l’eau en sachets plutôt que de l’eau du forage, bien plus chère pour une qualité équivalente, est en effet ici un signe distinctif, une manière de montrer aux autres qu’on a de l’argent. Ces stratégies utilisées par Aly ne sont pas sans rappeler celles mises en évidence par Laurent (1998) dans son étude d’une association paysanne en pays Mossi. En effet, dans cette ethnie reconnue selon cet auteur pour sa « culture du secret et des non-dits », ainsi que son évitement de l’éclatement des conflits, il montre que dans les relations entre donateur et donataire, la seule certitude est l’indocilité, l’adhésion est ruse et la soumission un calcul ; la communication s’établit alors, selon lui, dans l’ambigüité, l’esquive, la tactique et le bricolage.

55Lors de la Handicourse solidaire, Aly nous a ainsi montré qu’il était capable d’« attirer » vers lui des associations de solidarité internationale comme l’A3EPS ou Enfants du monde, tout en se ménageant des espaces de liberté. En effet, s’il est parvenu à se constituer progressivement un réseau assez dense d’« amis européens » qui le soutiennent dans ses projets, il ne s’est pas laissé enfermer dans une logique d’assistanat. Cette volonté manifeste de conserver la main sur ses projets peut se comprendre à la lumière de son histoire personnelle, marquée par le refus de la soumission aux personnes valides, perceptible dans l’extrait d’entretien suivant :

56

« L’idée est venue de créer une association pour pouvoir gérer nous-mêmes. Parce que à chaque fois les gens nous prennent pour des handicapés (…). Ce sont toujours les personnes valides qui créent et nous on se met dedans et après on nous maltraite, on nous traite comme des esclaves [s’énerve, puis rigole et marque une pause]. Bon, excusez-moi [rires] ! J’ai pas envie de m’énerver… mais bon des fois ça arrive ! Donc, comme nous aussi on grandit et on voit que dans nos têtes c’est pas tout à fait perdu, on va essayer de faire quelque chose pour montrer aux gens que notre handicap ce n’est que des pieds, sinon le reste c’est comme eux ! »
(Aly Zoromé, homme de 32 ans, artisan handicapé moteur, président de Pengd Wendé.)
Capable de jouer dans les interstices des systèmes et des structures, on peut considérer avec Bierschenk et Chauveau (2000) qu’Aly possède certaines des compétences décrites chez des « courtiers en développement » ; la présence de ces personnages clés, faisant office d’intermédiaires entre la population locale et les associations d’aide au développement, serait ainsi, selon ces auteurs, un facteur déterminant dans la réussite des projets amorcés.

Conclusion

57Nous avons cherché dans cet article à mettre en relation des éléments de description ethnographique, relatifs à l’organisation et au déroulement d’un événement précis au Burkina Faso en décembre 2008, avec des interprétations de portée plus large dans trois domaines : l’anthropologie du handicap, l’anthropologie du fait associatif et l’anthropologie de l’aide au développement. Nous avons montré au sein de chaque partie le caractère ambivalent de la Handicourse solidaire : si ce projet d’aide au développement peut être considéré comme une réussite, l’analyse de ses enjeux sous-jacents nous a permis de dépasser l’image d’un monde enchanté de la solidarité, aussi bien au niveau international (entre structures du Nord et du Sud) qu’au niveau local, au sein d’une communauté ou entre associations.

58Nous avons réalisé une double ethnographie, un peu à la manière d’Atlani-Duault (2005), c’est-à-dire à la fois au niveau des supposés bénéficiaires du projet et des organisations de solidarité internationale. La variation des points de vue nous a permis de dépasser une vision trop simpliste de l’aide au développement, mettant uniquement en évidence les décalages culturels et les conflits Nord/Sud, sans pour autant nier que le pittoresque ou l’exotique font parfois partie intégrante du regard occidental. Cependant, même si notre travail de terrain, en deux temps, s’est étalé sur presque un an, les contraintes liées à notre scolarisation en Master 2 ne nous ont pas permis d’inscrire, comme nous l’aurions souhaité, notre enquête dans la longue durée. Il serait intéressant de retourner sur place, afin d’appréhender les effets à plus long terme de l’événement sur d’une part l’évolution des relations entre Aly Zoromé et les participants et d’autre part la durabilité des liens sociaux créés au sein de la caravane entre personnes valides et handicapées.

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Mots-clés éditeurs : association, Burkina Faso, corps, handicap moteur, développement

Date de mise en ligne : 27/10/2011

https://doi.org/10.3917/sta.093.0007

Notes

  • [1]
    Aly Zoromé est un homme de 32 ans, artisan handicapé moteur, faisant partie des organisateurs de la course en tant que président de Pengd Wendé. Marié à une femme présentant également un handicap moteur (qui attend un enfant), ce fils d’agriculteurs vit depuis ses 18 ans à Ouahigouya.
  • [2]
    Phrase extraite d’un entretien réalisé avec Daouda Belem, homme de 34 ans, instituteur, organisateur valide représentant de l’OCADES.
  • [3]
    Amadé Ouedraogo, vice-président de Pengd Wendé, était responsable de la formation artisanale à ECLA. Sa participation au concours d’artisanat aurait enlevé tout enjeu, étant donné ses fortes chances de le gagner.
  • [4]
    Abu Zallé, homme de 38 ans, artisan, membre de Pengd Wendé et participant handicapé moteur.
  • [5]
    Ousseni Sanga est un homme valide de 20 ans, soudeur à Ouahigouya. Il a participé à la course en tant que responsable des commissions mécaniques puis de l’accueil/hébergement.
  • [6]
    Daouda Belem, homme de 34 ans, instituteur, organisateur valide représentant de l’OCADES.
  • [7]
    Fatimata Saba est une femme de28 ans, qui fabrique des bracelets à Bang n tum. Célibataire, elle vit chez sa tante à Ouahigouya après avoir fuit de chez ses parents, agriculteurs dans la petite ville de Titao.
  • [8]
    Moussa Touré est un homme de 42 ans, au chômage. Membre d’ECLA, il a participé à la course en tant qu’handicapé moteur.
  • [9]
    Ganamé Dialla est un homme de 50 ans, président de l’association d’handicapés moteurs Eveil.
  • [10]
    Moussa Niampa, homme de 48 ans, couturier/tailleur, participant valide et responsable du théâtre.
  • [11]
    Boukari Sawadogo est un homme valide de 30 ans, au chômage, célibataire et sans enfant, qui entraîne bénévolement une équipe de football de jeunes de son quartier. Il était responsable lors de la course de la commission cuisine, et c’est lui qui a conduit le véhicule frigorifique.
  • [12]
    Ousseni Sanga, homme de 20 ans, soudeur, participant valide à la course responsable des commissions mécaniques puis de l’accueil/hébergement.

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