Notes
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[*]
Docteur en sociologie à l’Université Paris Descartes Sorbonne, chercheur au CeaQ. Il enseigne méthodologie à l’Université d’Évry Val d’Essonne.
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[1]
B. Glowczewski, Rêves en colère. Paris, Plon, coll. Terre humaine, 2004.
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[2]
P. Teilhard de Chardin, Le phénomène humain. Paris, Seuil, 1955.
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[3]
M. Mc Luhan, La galaxie Gutenberg. Paris, Mame, 1967, cité par P. Breton, in Le culte de l’Internet. Une menace pour le lien social ? Paris, La Découverte et Syros, 2000.
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[4]
F. Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra. Paris, LGF, 1972.
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[5]
G. Anders, « Le monde comme fantôme et comme matrice : considérations philosophiques sur la radio et la télévision », in L’obsolescence de l’homme, sur l’âme à l’époque de la seconde révolution industrielle. Ivréa, Encyclopédie des Nuisances, 2002 (1956).
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[6]
M. Mc Luhan, Pour comprendre les média : les prolongements technologiques de l’homme. Paris, Éditions HMH, 1968.
-
[7]
F. Nietzsche, La naissance de la Tragédie. Paris, Gallimard, coll. Folio, 1989.
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[8]
E. Morin, La Méthode. 4. Les idées, leur habitat, leur vie, leurs mœurs, leur organisation. Paris, Le Seuil, 1991.
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[9]
E. Morin, L’Esprit du temps (1962). Paris, Armand Colin et Institut National de l’Audiovisuel, 2008.
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[10]
E. Morin, La Méthode. 4. Les idées, op. cit. Et ce n’est peut-être pas un hasard si en préface à la réédition récente de L’Esprit du temps, il évoque justement, pour illustrer les capacités que possède toujours la culture de masse à exprimer celui-ci, le film Matrix : « Est-ce que les humains ne sont pas manipulés par les machines infernales qu’ils ont créées ? C’est un thème clé, thème d’angoisse, thème absolument problématique qui porte sur notre vie quotidienne. » Dans le même ordre d’idées, il évoque Blade Runner : « L’un des problèmes des hommes, c’est de savoir s’ils n’ont pas été apprentis sorciers en se lançant dans l’aventure techno-scientifique. Sous cette forme spectaculaire, c’est un problème qui se pose vraiment de plus en plus à l’ère de la prolifération nucléaire, des manipulations génétiques et des dégradations de la biosphère. »
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[11]
Ibid.
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[12]
D. Rushkoff, Media Virus ! New York, Ballantine Books, 1996. Journaliste, écrivain, il est également l’auteur de Cyberia: Life in the Trenches of Hyperspace. 2nd ed., Manchester, Clinamen, 1995.
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[13]
M. Dery, Culture Jamming: Hacking, Slashing and Sniping in the Empire of Signs. Open Media, 1993. Le « culture jamming » s’incarne notamment dans les pratiques de l’« adbusting » des « casseurs de pubs ». Mark Dery est également l’auteur de Vitesse virtuelle : la cyberculture aujourd’hui. Paris, Éditions Abbeville, 1997.
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[14]
W. Burroughs, La révolution électronique. London, H. Chopin, 1999 (1970).
-
[15]
J. Baudrillard, « Disneyworld Company », Libération, 4 mars 1996.
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[16]
G. Deleuze, « Post-scriptum sur les sociétés de contrôle », L’autre journal, n° 1, mai 1990.
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[17]
G. Deleuze, Post-scriptum sur les sociétés de contrôle, in Pourparlers. Paris, Minuit, 2003.
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[18]
J. Baudrillard, La société de consommation : ses mythes, ses structures. Paris, Denoël, 1970.
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[19]
J. de Rosnay, L’homme symbiotique. Paris, Le Seuil, 1995.
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[20]
Ibid.
-
[21]
?M. Heidegger, Dépassement de la métaphysique, in Essais et conférence. Paris, Gallimard, coll. Tel, 1958.
-
[22]
H. Corbin, L’imagination créatrice dans le soufisme d’Ibn’ Arabî. Paris, Médicis-Entrelacs, 2006.
-
[23]
M. Eliade, Le chamanisme et les techniques archaïques de l’extase. Paris, Payot, 1992 (1950).
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[24]
T. Leary, Chaos et cyberculture. Paris, Lézard, 1996.
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[25]
M. Mc Luhan, Pour comprendre les média, op. cit.
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[26]
G. Anders, Sur la honte prométhéenne, in L’obsolescence de l’homme, op. cit.
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[27]
Ibid.
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[28]
cf. www.yannminh.com.
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[29]
B. Glowczewski, « La pensée en réseau des Aborigènes », Le Nouvel Observateur, hors-série n° 51, juillet-août 2003.
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[30]
Cf. M. Heidegger (1958), Dépassement de la métaphysique, in Essais et conférences. Paris, Gallimard, coll. Tel.
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[31]
Cf. notamment M. Heidegger (1958), Bâtir, habiter, penser, in Essais et conférence, op. cit. « Les mortels habitent de telle sorte qu’ils ménagent le Quadriparti le laissant revenir à son être ».
« Les distances ont été supprimées mais la proximité est restée absente : l’absence de proximité a conduit le sans-distance à la domination. »
1L’anthropologue Barbara Glowczewski dans ses travaux a montré l’existence d’une pensée réticulaire multidimensionnelle chez les tribus aborigènes d’Australie, dont le système cognitif spatialisé et la cosmogonie reposent sur une vision traditionnelle de l’univers qu’elle qualifie de « connexionniste » dans le sens où tout y est interdépendant. Une vision holistique du réseau global de la vie donc, où tout entre en interaction : les hommes, les femmes, le règne animal, végétal, minéral, la terre, le ciel, l’infiniment petit et l’infiniment grand, la vie actualisée et les rêves, etc. Cette pensée traditionnelle se manifeste notamment par la perception de la mémoire comme un espace-temps virtuel et la projection de savoirs sur un réseau géographique à la fois physique et imaginaire. Elle s’articule autour de la production de « cartes mentales » liées à l’élaboration d’« itinéraires mythiques » lors de pratiques rituelles liant chants, danses et peintures corporelles, considérées comme des « récits en performance » traitant l’information qui provient souvent également de l’interprétation des rêves. Ce qui se joue là, en l’occurrence, c’est l’émission et la réception d’informations essentielles à la survie de ces sociétés de chasseurs-cueilleurs dont les immenses territoires nécessitent la consignation de données relatives au déplacement de sites en sites et donc la production d’une cartographie cognitive sous forme d’itinéraires reliant des lieux sacrés pensés comme les traces d’ancêtres mythiques. La pratique onirique y joue donc un grand rôle car elle permet de se connecter à l’espace-temps éternel de la mémoire collective où les ancêtres mythiques aux formes hybrides recombinent les éléments dont ils laisseraient des traces sur les sites. C’est ainsi que, par-delà les quatre dimensions du cadre spatio-temporel classique dans lequel se déroulent les rites d’élaboration des cartes mentales, le sommeil, nous dit Barbara Glowczewski, « fait passer dans une cinquième dimension, celle du rêve, qui permet d’expérimenter la synchronicité du mythe sous forme de condensations et d’associations dans une matrice onirique où les images et les sons se connectent sans être entravés par la linéarité du temps ou par les distances et les barrières de l’espace » [1].
Cette « cinquième dimension » du rêve dans le système d’interprétation propre au mode de pensée en réseau des tribus aborigènes, cette « synchronicité », cette « matrice onirique » où les images et les sons – débarrassés de la linéarité du temps, des distances et barrières de l’espace – s’interconnectent avec l’imaginaire collectif, avec le mythe et ses récits, n’est donc évidemment pas sans rappeler la fameuse hypothèse jungienne d’un inconscient archaïque suprapersonnel peuplé d’archétypes qui seraient communs à l’espèce humaine, tout en nous renvoyant aussi à « la matrice du cyberespace » et autre « noosphère » de la cyberculture.
Village people : théophanie du Christ cosmique
2Rappelons que cette notion de « noosphère » – ou « sphère de l’esprit » – a d’abord été conceptualisée dans les années 1950 par le père jésuite, paléontologue et théologien, Pierre Teilhard de Chardin qui, dans une tentative de réconcilier science et religion (à vrai dire darwinisme et catholicisme), la conçoit comme une sorte de « conscience collective planétaire », une immense machine à penser, un magma d’informations entourant la surface du globe comme l’atmosphère et qui est à l’intellect ce que la « biosphère est pour la vie » [2]. Ce grand nuage immatériel gagnerait ainsi en ampleur et en intensité à mesure des progrès de l’évolution humaine et de ce que l’on nomme aujourd’hui la « globalisation ». En l’occurrence, il se trouve que la notion de noosphère prenait une forte connotation religieuse et particulièrement eschatologique chez le père jésuite. En effet, en se déployant sur l’ensemble du globe, elle doit préparer l’avènement d’une ère d’harmonie universelle des consciences et par conséquent une forme de résurrection spirituelle planétaire que marquera le « point Oméga », sommet de l’évolution et aboutissement des temps historiques où l’homme doit finalement rejoindre Dieu dans une communion parfaite alors perçue comme « théophanie du Christ cosmique ».
3La vision cosmique et la « pensée connexionniste » de Teilhard de Chardin, ses propositions œcuméniques de « collectivisme » et de « noosphère » exprimant le désir d’en finir avec « la séparation des humains », inspireront par la suite les théoriciens de la communication, en particulier le Canadien Marshall Mc Luhan, lui-même converti adulte au catholicisme. Celui-ci déclarait notamment que la noosphère était « le cerveau technologique de l’univers (…) la membrane technologique jetée sur l’ensemble du globe par la dilatation électronique de tous nos sens » [3]. McLuhan, on ne le sait que trop, constatait déjà l’existence et le déploiement d’un réseau planétaire issu des technologies de la communication électronique (télégraphe, téléphone, radio, télévision) qui, en bouleversant profondément nos rapports à l’espace et au temps, réduisait littéralement le globe terrestre à la taille d’un village. En cela, il ne faisait selon nous que reformuler une idée déjà largement évoquée par d’autres auteurs. À cet égard, on peut se référer notamment à Nietzsche via les paroles de son Zarathoustra concernant le « dernier homme » auquel il s’adresse, c’est-à-dire le petit homme moderne aux instincts apprivoisés, à la volonté atrophiée et aux valeurs moribondes qui a en horreur la souffrance et ne recherche plus le bonheur que dans le confort, la santé et la sécurité, adepte qu’il est des petits plaisirs, des divertissements et des loisirs. C’est ainsi que le prophète Zarathoustra pressentant la poursuite et l’approfondissement de cette tendance multiséculaire à la réduction dans et par l’autodomestication et le dressage de l’animal humain, tendance lourde du processus civilisationnel s’il en est, annonce alors entre autres choses à la foule amusée que dans les temps prochains « la terre sera devenue plus petite et on y verra sautiller le dernier homme qui rapetisse tout » [4]. Du reste, les artistes futuristes italiens, exaltant les mutations anthropologiques, culturelles et sociales engendrées par l’explosion techno-scientifique de la révolution industrielle avaient également, cinquante ans avant Marshall McLuhan, la vision d’un « village-monde ». Ceux-ci cherchaient d’ailleurs à cristalliser dans leurs œuvres l’émergence de cette nouvelle sensibilité spatio-temporelle planétaire, à saisir la « beauté de la vitesse », le mouvement, le dynamisme énergétique et le vitalisme machinique des nouvelles formes de vie métropolitaine prises dans les processus de modernisation des réseaux de transports et de communications, tendant à abolir les distances et ainsi à conquérir l’ubiquité, la simultanéité, etc. Günther Anders aussi, au début des années 1950, dans ses « considérations philosophiques sur la radio et la télévision » [5] constatait précisément ce processus de miniaturisation du monde devenant par ailleurs toujours plus irréel et fantomatique, avec toutes les conséquences catastrophiques pour le mode d’être de la condition humaine qui en résultent.
Ainsi, Marshall Mc Luhan s’attachait en quelque sorte à décrire les mutations cognitives et sensorielles causes et effets de l’évolution technologique des sociétés humaines, ainsi que nos modes d’existence et de perception au sein du « village global » qui tend à s’actualiser de façon toujours plus efficiente avec le développement de la micro-informatique, de l’Internet et du multimédia. S’étant emparé de la notion de « noosphère », il déclarait également qu’« après trois mille ans d’une explosion produite par des technologies, mécaniques et fragmentaires, le monde occidental “implose”. Pendant l’âge mécanique, nous avons prolongé nos corps dans l’espace. Aujourd’hui, après plus d’un siècle de technologie de l’électricité, c’est notre système nerveux central lui-même que nous avons jeté comme un filet sur l’ensemble du globe, abolissant ainsi l’espace et le temps, du moins en ce qui concerne notre planète [6]. » Et celui-ci de rajouter dans une formule quasi apocalyptique, du moins eschatologique : « nous approchons rapidement de la phase finale des prolongements de l’homme : la simulation technologique de la conscience ».
Meta-phusis
4Ceci étant dit, il faut souligner que la « noosphère » comme « conscience collective » aujourd’hui projetée sur l’ensemble du globe par dilatation électronique et simulation technologique via les réseaux de communication, si l’on suit McLuhan, est par définition plutôt de l’ordre de la conscience claire et réfléchie. En effet « noos » désigne la pensée, la raison, l’intellect, l’âme, l’esprit qui vient mettre le monde en ordre chez le philosophe présocratique grec Anaxagore et à qui Nietzsche attribuait cette formule dans laquelle on pourrait voir le fondement de toute la métaphysique occidentale : « au commencement était le chaos puis la raison [noos] vint et créa l’ordre ».
5Précisément, pour Nietzsche [7] commentant ici les conceptions de la tragédie chez Euripide, qui aurait appliqué cet axiome à ses œuvres, il s’agit alors de montrer le déclin de l’instinct dionysiaque comme force vitale émergeant des plus profonds abîmes de l’Être, source de toute chose. Et par conséquent, la victoire progressive dans tout l’art, la culture et la psyché grecque antique du principe de mesure et de modération apollinien avec toute sa dimension régulatrice et disciplinaire de mise en ordre rationnel. Cette victoire du principe de maîtrise et de mesure apollinien incarné par le « noos » d’Anaxagore, et donc du principe de Raison qui s’oppose à l’instinct et mine la Vie, serait alors aussi, pour Nietzsche, synonyme de nihilisme et de décadence. Ainsi, on comprendra que le déploiement planétaire de la noosphère dans et par le processus de virtualisation pourrait désigner la dynamique par où achève de s’accomplir le nihilisme de la métaphysique occidentale, pour le dire en termes heideggériens. En ce sens, elle ne doit pas nécessairement, comme c’est souvent le cas, être confondue avec ce que l’on pourrait appeler le « monde imaginal » (Corbin, Durand) des archétypes de « l’inconscient collectif » théorisé par Carl G. Jung.
6Edgar Morin, qui s’est également emparé de cette notion de « noosphère » pour en faire le monde immatériel des choses de l’esprit, des idées et productions culturelles de toutes sortes (théories, idéologies, mythes, croyances, concepts, art, littérature, etc.) correspondant au « monde trois » de Popper et doté d’une autonomie, d’une existence propre caractérisée par des lois similaires à celles qui gouvernent l’écosystème des êtres vivants, rappelle que les archétypes sont des formes a priori ou images primordiales, virtuelles en tout esprit humain. « Matrices universelles de l’inconscient collectif, ils commandent et contrôlent nos songes et nos mythes. Bien qu’ils n’existent pas indépendamment de nous, nous dépendons d’eux car nous portons en nous leurs exigences et leur tyrannie [8]. »
Par ailleurs, au début des années 1960 dans son travail sur l’avènement de la culture de masse appréhendée comme seconde révolution industrielle, industrialisation de l’esprit ou « seconde colonisation », « celle qui s’attaque aux images et aux rêves », il évoquait déjà la notion de noosphère avec des accents qui ne sont pas sans rappeler les propos de Marshall Mc Luhan : « un prodigieux réseau nerveux s’est constitué dans le grand corps planétaire : paroles et images émergent des téléscripteurs, des rotatives, des pellicules, des bandes magnétiques, des antennes de radio et de télévision ; tout ce qui roule, navigue, vole, transporte journaux et magazine ; il n’y a pas une molécule d’air qui ne vibre de messages qu’un appareil, un geste, rendent aussitôt audibles et visibles. (…) Les problèmes que pose cette étrange noosphère qui flotte au ras de la civilisation sont parmi les tiers-problèmes qui émergent au milieu du vingtième siècle [9]. » Par la suite, dans le cadre du paradigme de la complexité et de l’auto-organisation basé sur les principes systémiques et cybernétiques auxquels il ajoute les principes dialogiques, récursifs et hologrammatiques qui en découlent, il aura recours à la métaphore informatique pour affirmer que la culture d’une société fonctionne comme une « machine cognitive » et serait comme une sorte de méga-ordinateur complexe mémorisant toutes les données cognitives, qui, porteur de quasi-logiciels, prescrit les normes pratiques, éthiques, politiques de cette société. Ainsi, le grand ordinateur serait présent en chaque esprit/cerveau individuel où il a inscrit ses instructions et où il prescrit ses normes et ses commandements, de même que chaque esprit/cerveau individuel serait « comme un computeur, et l’ensemble des interactions entre ces computeurs constituent le grand Ordinateur » [10]. Dans une perspective dialogique de constante réversibilité et récursivité interactive, Edgar Morin indique également que se met en place un jeu complexe de symbiose, parasitisme, asservissement, exploitation mutuels entre les esprits/cerveaux individuels, la société et la noosphère.
Virus
7En outre, à propos des propriétés « auto-éco-organisatrices » de cette dernière, il évoque la notion de « mème », théorisée par le socio-biologiste néo-darwinien Richard Dawkins. Elle désigne « une unité élémentaire de réplication culturelle dotée d’une certaine autonomie par rapport au gène, comme une idée, un modèle de fabrication, etc., les mèmes apparaissent ainsi comme des structures vivantes, se propageant à travers le langage, de cerveau à cerveau » [11].
8C’est une notion qui s’est elle-même répliquée et a donné naissance à la « mémétique », qui se donne pour objectif d’étudier dans une approche pluridisciplinaire néo-darwinienne les processus de réplication des schèmes ou codes culturels. Elle a ainsi connu une certaine fortune dans les milieux de la cyberculture des années 1980 et 1990, notamment avec Timothy Leary inspiré par McLuhan mais aussi avec Douglas Rushkoff et sa théorie des « médias virus » [12] à vocation subversive, qui renvoie par ailleurs à toutes les techniques de « détournements », « média-tactiques », « guérilla de communication », « adbusting » ou « subvertising », « hacktivisme » et autre « culture jamming dans l’empire des signes » [13]. Pratiques dissidentes dont on sait aussi qu’elles ne font finalement qu’essayer d’adapter aux nouveaux médias « les techniques de cut-up pour guérilla subversive à l’assaut des âmes sclérosées », techniques de chaos sémiotique en quelque sorte, déjà théorisées par William S. Burroughs dans ses écrits sur la « révolution électronique » [14] du tout début des années 1970. Ceci dit, ce qui a pu également être qualifié d’« ingénierie mémétique » connaît selon nous une application beaucoup plus efficace aujourd’hui avec toutes les pratiques extrêmement subtiles du « marketing viral », de la « guérilla marketing », du « marketing alternatif », du « buzz marketing » et autres métiers de la communication, des médias et des réseaux parfaitement capables d’assimiler chaque « usage innovant » dans leur propre système. De manière métaphorique, on pourrait même dire que cette capacité à phagocyter toute innovation sur un mode ascendant est un programme directement inscrit dans leur code génétique, leur code-source. Processus d’absorption et de recyclage écosystémique des singularités par où toutes ces « techno-sciences » de l’information et de la communication opèrent leur propre mutation comme processus homéostatique d’adaptation à l’environnement qu’elles reconfigurent dans le même mouvement. Et c’est d’ailleurs cette capacité à métaboliser l’énergie créatrice des groupes dissidents qui les rend pratiquement « insubversibles », et peut-être aussi parce que la simple idée d’un « devenir-média » de la masse, c’est-à-dire l’injonction à la réappropriation ou au détournement socio-technique du code ne peut de toute façon aboutir qu’à une reproduction élargie du système sous couvert de nouvelles modalités.
Toutes choses qui ne sont pas sans nous rappeler cette réflexion de Jean Baudrillard lorsqu’il affirmait – à propos de la « dysnéification du monde » et du recyclage du réel dans l’univers spectral de la réalité virtuelle comme gigantesque entreprise de cannibalisation-carnavalisation constitutive du Nouvel Ordre mondial – que si cette opération peut réussir avec une telle ampleur, sans soulever d’autre réprobation que morale, tout en suscitant une fascination universelle, c’est que « la réalité elle-même, le monde lui-même, avec toute son activité frénétique de clones, s’est déjà transformé en une performance interactive, en une espèce de Lunapark des idéologies, des techniques, des œuvres, du savoir, de la mort et de la destruction même – tout cela propre à être cloné et ressuscité dans un musée infantile de l’Imagination, dans un musée virtuel de l’Information ». [15] C’est pourquoi de ce point de vue il semble inutile de chercher des virus informatiques, car aujourd’hui « nous sommes tous pris dans l’enchaînement viral des réseaux, et c’est l’information elle-même qui est le virus, non transmissible encore sexuellement, mais bien plus efficace par voie numérique ».
Mobilisation totale
9À propos des mutations post-industrielles du capitalisme s’appuyant sur l’informatique, corollaires de l’avènement de nos « sociétés de contrôle » [16] – fluides, ouvertes, modulaires, multipolaires et à géométrie variable comme installation d’un nouveau régime de domination remplaçant peu à peu les « sociétés disciplinaires » (Foucault) avec la crise généralisée des milieux d’enfermement en système clos (familles, écoles, armée, usines, prisons, hôpitaux, etc.) et où, entre autres choses, les individus deviennent peu à peu des entités « dividuelles », fluctuantes, diffractées et encodées comme banques de données dans un macro-système d’informations – Gilles Deleuze au début des années 1990 affirmait justement que le marketing était maintenant « l’instrument du contrôle social » et par conséquent formait « la race impudente de nos maîtres » [17]. Tendance lourde d’un néo-capitalisme inaugurant aussi l’ère des managers et des gestionnaires instaurant le « salaire au mérite » et la rivalité comme saine émulation entre les dividus. Un capitalisme post-industriel par conséquent de plus en plus flexible, flottant, immatériel, sémiotique et cognitif où, à l’instar des grandes enseignes multinationales (par exemple, Nike, Apple and Co), le « service de vente » devient donc le centre ou l’âme de « l’entreprise » remplaçant « l’usine » de production désormais démantelée, automatisée, externalisée et assez souvent reléguée en périphérie du tiers-monde. Les entreprises se concentrant alors de plus en plus nettement sur les logiques de communication et le développement multi-médiatique, si ce n’est psycho-technique (design, merchandising, etc.), de leur « image de marque ». Psycho-techniques spectaculaires quelque peu magiques par où se déploie aujourd’hui avec toujours plus d’ampleur et d’intensité la prodigieuse et toute-puissante fantasmagorie fétichiste des objets structurant nos environnements quotidiens largement déterminés par le système de la consommation. Au-delà du simple processus fonctionnel de satisfaction des besoins – ainsi que l’avait également bien montré Jean Baudrillard –, celui-ci se dispense avant tout comme système de distribution et de mise en circulation constante de tout un jeu de signes, de symboles, de codes, de messages et de formes, d’une large gamme de modèles et toute une panoplie de rôles stéréotypés. En somme, un grand jeu de langages et d’images, plus ou moins mythiques, comme macro-dispositif de mobilisation et de contrôle social bien plus subtil et totalitaire que celui de l’exploitation. En effet, sous couvert d’une idéologie de la liberté de choix, d’une posture ludique et d’un discours hédoniste, c’est rien moins que « le dressage à la discipline inconsciente d’un code » [18] qui se joue par intériorisation et adhésion aux règles du jeu de la consommation.
10C’est ainsi que marketing et management, par les procédures de contrôle novatrices qu’ils mettent en œuvre, peuvent être considérés comme des technologies biopolitiques caractéristiques de nos sociétés de l’information dont les dispositifs communicationnels et gestionnaires tendent à se capillariser sur toute l’étendue de la vie quotidienne dans un processus matriciel de maillage systémique à vocation ubiquitaire.
11Joël de Rosnay parle de son côté des « managers de la complexité » [19], dont le défi serait de définir des modes de gouvernance capables de répondre aux objectifs de développement adaptatifs autorégulés en co-évolution avec le superorganisme planétaire en émergence (que lui-même nomme le « Cybionte » et d’autres l’« Empire » ou la « Mégamachine »…), une nouvelle forme de vie hybride à la fois biologique, mécanique et électronique constituée par les hommes, les machines et les réseaux de toutes sortes. Dans une approche également néo-darwinnienne et biocybernétique, il s’empare lui aussi de la notion de « noosphère » de Teilhard de Chardin dans une acception très proche de celle de McLuhan en faisant un cerveau planétaire, une « intelligence collective », un écosystème informationnel issu de l’interconnexion multimédiatique de toutes les productions humaines dématérialisées et en croissance exponentielle du fait de la convergence de la révolution informatique, des biotechnologies et des neurosciences. De même, il propose la notion d’« introsphère » qui est la sphère d’intériorisation des consciences collectives interconnectées par les réseaux de communication et serait en quelque sorte le subconscient du cerveau planétaire. Ainsi, « télévision, téléconférences, laboratoires et studios virtuels, radios numériques, télémanipulations d’instruments, communautés virtuelles…, on ne compte plus les activités humaines dématérialisées qui seront présentes dans les cyberespaces pour la création, le plaisir, la connaissance et le travail. Au-delà de la noosphère se crée aussi progressivement l’introsphère, le mental du cybionte [20]. »
Évidemment, avec tout ce « vitalisme machinique », ce « pan-biologisme cybernétique » et ces réflexions prospectives quant à l’avènement de « l’homme symbiotique » et du « cybionte » sur le mode d’une célébration idéaliste exaltée, comment ne pas penser immédiatement aux vues heideggériennes de l’accomplissement nihiliste de la métaphysique occidentale et d’une auto-affirmation de la vie comme volonté de puissance déchaînée ? Les puissances chtoniennes de la nature passant dans les choses et déployant alors désormais planétairement leur être de façon dévastatrice dans et par la technique devenue médium total. Achèvement de la métaphysique donc dans et par « l’objectivation inconditionnelle de toutes les choses présentes » [21] produisant alors un « (non-)monde » (Un-Welt) où tout « ce qui a pris fin est placé dans l’apparence d’une réalité ». Toutes choses faisant que l’homme, placé dans un extrême aveuglement toujours plus loin dans l’abandon loin de l’Être, devient finalement lui-même objet de l’arraisonnement technique (« human and social engineering »), « matériel humain » toujours plus prisonnier des boucles de rétroaction déterminant ses rapports au monde devenant totalement cybernétique. Un corps/objet mobilisé et ainsi « esclave » d’un processus dont il avait pourtant voulu être le sujet autonome et souverain comme « maître et possesseur » de la nature.
L’homme contemporain ainsi dépossédé de sa propre existence apparaît alors toujours plus nettement comme un dividu fragmenté, dispersé, errant dans l’inquiétante étrangeté d’un univers entièrement sémiotisé. Un nuage de données, fiché, tracé, profilé, « abandonné au vertige de ses fabrications », livré aux divertissements, à la consommation, au « temps réel » et à « l’instantanéité » de l’ère de l’information, des médias et des réseaux. Un « homoncule » peut-être, aux instincts domestiqués, à la volonté atrophiée et aux valeurs moribondes, évoluant dans un état second, toujours plus effacé, absent à lui-même, aux autres et au monde ou qui, a contrario, surjoue la présence, se répand de manière théâtrale, excessive et angoissée sur ce qui reste de la scène sociale dans un exercice de conjuration de la facticité et de la précarité de son existence tombée dans la nullité du Néant. Une âme en peine et un corps en souffrance en somme et, quoi qu’il en dise, glissant à la surface d’un monde qui se déréalise.
Mundus imaginalis
12Ainsi, on voit bien que c’est dans et par le déploiement planétaire de la culture de la « virtualité réelle », ainsi que des flux d’informations et de communications électroniques du « village global » que s’actualise, ou s’hyperréalise, l’utopie noosphérique de Teilhard de Chardin, cette nappe pensante qui flotte au ras de la civilisation.
13De fait, on l’a dit, elle n’est pas exactement de même nature que l’hypothèse de « l’inconscient collectif » proposée par la « psychologie des profondeurs » de Carl G. Jung avec ses archétypes comme images primordiales qui seraient communes à l’espèce humaine et par ailleurs assez proches de la notion de « monde imaginal » développée par Henry Corbin qui, pour sa part, apportait cette précision : « Que l’on n’entende pas le mot “image” au sens où de nos jours on parle à tort et à travers d’une civilisation de l’image ; il ne s’agit jamais là que d’images restant au niveau des perceptions sensibles, nullement de perceptions visionnaires. Le mundus imaginalis de la théosophie mystique visionnaire est un monde qui n’est plus le monde empirique de la perception sensible, tout en n’étant pas encore le monde de l’intuition intellective des purs intelligibles. Monde entre-deux, monde médian et médiateur, sans lequel tous les événements de l’histoire sacrale et prophétique deviennent de l’irréel, parce que c’est en ce monde-là que ces événements ont lieu, ont leur “lieu” [22]. »
14On est donc là avec ce mundus imaginalis – lieu de l’histoire sacrale et prophétique, lieu intermédiaire, médian et médiateur entre l’être et l’étant en quelque sorte – dans la perception mystique visionnaire intériorisée que l’on peut bien sûr rapprocher aussi des diverses pratiques chamaniques hallucinatoires et autres « techniques archaïques de l’extase » [23] ouvrant les « portes de la perception » pour reprendre le titre d’un ouvrage d’Aldous Huxley inspiré du poète William Blake. Pratiques extatiques, chamaniques et mystiques dont on sait qu’elles eurent une influence considérable dans la contre-culture psychédélique des années 1960, notamment impulsée par la découverte et l’usage du LSD et autres substances hallucinogènes censées permettre une exploration de l’inconscient en dehors de tout contrôle de la raison. Toutes choses qui se retrouveront de façon idéaliste et fantasmagorique dans la cyberculture et ses utopies posthumaines sous la forme de la vulgate « techno-chamanique » des pionniers de l’informatique, des réseaux et des mondes virtuels. On se souvient d’ailleurs d’un Timothy Leary, figure emblématique du psychédélisme des années 1960, devenu totalement macluhanien et déclarant que le PC était le LSD des années 1990 [24].
15Ainsi, dans les conditions contemporaines du règne planétaire de la technique, où les forces et les énergies cachées dans le tréfonds de l’étant sont toujours et nécessairement calculées de manière d’être libérées en vue d’une exploitation rationnelle, on pourrait peut-être dire qu’il existe entre « inconscient collectif » et « noosphère », entre « monde imaginal » et « village global » – en somme entre profondeur et surface, invisible et visible –, une sorte de rapport dialogique de récursivité interactive tout à fait caractéristique des boucles causales et autres « mécanismes circulaires d’autorégulation » modélisées par la techno-science cybernétique. Peut-être pourrions-nous même parler d’une simulation technologique du mundus imaginalis projeté dans et par le monde des images multimédiatiques. Celui-ci rétro-agissant alors sur notre appareil perceptif, bouleversant radicalement nos rapports à l’espace et au temps et par conséquent notre mode d’être-au-monde devenant aujourd’hui essentiellement (non-)être-au-monde numérique. Une sorte de vampirisation/cannibalisation computationnelle de l’énergie psychique en somme, un recyclage des flux de l’imagination créatrice et symbolique alors métabolisés dans le superorganisme hybride en constitution dont parle Joël de Rosnay. D’ailleurs, Marshall Mc Luhan reconnaissait « que nos sens dont tous les médias sont des prolongements, imposent aussi une servitude à notre énergie individuelle, et qu’ils façonnent l’expérience et la conscience de chacun de nous, cela ressort également d’un autre contexte dont parle le psychologue C.G. Jung : “Chaque Romain était entouré d’esclaves. L’esclave et la psychologie de l’esclave noyaient l’Italie antique. En lui-même, et évidemment sans s’en rendre compte, chaque Romain devint un esclave. Parce qu’il vivait constamment dans un milieu d’esclaves, il était atteint dans son inconscient par leur psychologie. Personne ne peut se protéger d’une influence comme celle-là.” (Contributions to Analytical Psychology. Londres, 1928) [25]. »
Dans les années 1950, Günther Anders posait déjà la question des métamorphoses de l’âme à l’époque de la seconde révolution industrielle, c’est-à-dire à l’époque de la reproductibilité technique et du déploiement de la culture de masse, de l’industrie des médias, des loisirs et du divertissement. Observant dans son exil américain qu’un « ça mécanique » intégrant l’énergie libidinale à sa sphère de domination techno-machinique venait peu à peu se substituer au « ça naturel pré-individuel », il voyait ainsi l’homme – souffrant globalement selon lui d’un sentiment d’obsolescence face à la perfection de la technique – se précipiter déjà vers « le royaume de l’hybride et de l’artificiel » [26] par la grâce du « human engineering », désirant ainsi se faire lui-même, dans un processus d’autoréification, prolongement, rouage et prothèse du monde des machines. Considérant que la structure des moyens de communication déterminait le mode d’être de l’homme, il voyait également se développer via les divers médias une « matrice » planétaire de modèles-stéréotypes-simulacres rendant la présence au monde de plus en plus fantomatique. C’est donc l’avènement d’un monde post-idéologique de copies produites en série et arrangé comme un spectacle où « le réel devient le reflet de son image » [27].
« In-der-Digital-Welt-sein »
16Teilhard de Chardin et Marshall McLuhan deviendront des références dont les théories ont imprégné et façonné tout l’imaginaire de la cyberculture. C’est d’ailleurs pour désigner les néo- ou post-cyberpunks des années 1990 que l’artiste multimédia français Yann Minh a inventé le terme « noonaute » en s’inspirant directement de Teilhard de Chardin et de la cybernétique de Norbert Wiener et qu’il définit comme « navigateur de l’espace informationnel » [28]. Un mode de navigation mentale basé sur la technologie des hyperliens et qui, comme les images et sons du rêve chez les Aborigènes, libère le contenu de toute contrainte spatiale et temporelle. D’ailleurs, pour Barbara Glowczewski, ce serait parce qu’on s’est habitué à circuler sur l’Internet que l’on comprendrait mieux la construction, pourtant très ancienne, de la pensée en réseau chez les Aborigènes. Il s’agirait d’un effet de rupture épistémologique impliquant un changement de paradigme et qui, pour l’auteur, « concerne notamment le fonctionnement de la mémoire, ou la relation entre la matière et l’esprit, l’actuel et le virtuel » [29].
17En anthropologue, l’auteur en conclut que les principes cognitifs des Aborigènes combineraient des aspects universels de la pensée, mis de côté par l’Occident durant les siècles dominés par l’écriture, et que l’avènement de l’ère de l’audiovisuel et des technologies multimédia ferait aujourd’hui de nouveau émerger. Un des aspects universels de la pensée concernerait donc le côté topologique des cartes mentales aborigènes qui se retrouverait à des degrés divers dans la plupart des sociétés, y compris la nôtre aujourd’hui.
18Quoi qu’il en soit, il semble bien en effet que le mode de pensée en réseau des Aborigènes entre aussi directement en résonance, on l’a vu, avec les interrogations épistémologiques contemporaines sur le fonctionnement de la mémoire, les ordinateurs et l’Internet. Pour autant, si l’on peut effectivement observer des analogies structurelles entre les deux modes de pensée réticulaire, gageons que « l’habitation du monde » par les tribus aborigènes d’Australie, le mode rassemblant de leur ordre symbolique, l’antique provenance de leur art et technique cartographique, leur perception de l’espace et du temps, n’a, ou n’avait, strictement rien de commun avec le mode d’être du « citoyen du village global » contemporain, ce « sans-distance » adepte de « l’instantanéité » sautillant sur une terre aujourd’hui réduite à un « non-monde de l’errance » [30], à un « espace de flux », un macro-dispositif technique que l’on ne peut, par conséquent, évidemment plus du tout « habiter » [31], au sens heideggérien du terme.
Bibliographie
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- Teilhard de Chardin P., Le phénomène humain. Paris, Le Seuil, 1955.
Mots-clés éditeurs : dernier homme, réseaux, globalization, errance
Date de mise en ligne : 28/05/2011
https://doi.org/10.3917/soc.111.0035Notes
-
[*]
Docteur en sociologie à l’Université Paris Descartes Sorbonne, chercheur au CeaQ. Il enseigne méthodologie à l’Université d’Évry Val d’Essonne.
-
[1]
B. Glowczewski, Rêves en colère. Paris, Plon, coll. Terre humaine, 2004.
-
[2]
P. Teilhard de Chardin, Le phénomène humain. Paris, Seuil, 1955.
-
[3]
M. Mc Luhan, La galaxie Gutenberg. Paris, Mame, 1967, cité par P. Breton, in Le culte de l’Internet. Une menace pour le lien social ? Paris, La Découverte et Syros, 2000.
-
[4]
F. Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra. Paris, LGF, 1972.
-
[5]
G. Anders, « Le monde comme fantôme et comme matrice : considérations philosophiques sur la radio et la télévision », in L’obsolescence de l’homme, sur l’âme à l’époque de la seconde révolution industrielle. Ivréa, Encyclopédie des Nuisances, 2002 (1956).
-
[6]
M. Mc Luhan, Pour comprendre les média : les prolongements technologiques de l’homme. Paris, Éditions HMH, 1968.
-
[7]
F. Nietzsche, La naissance de la Tragédie. Paris, Gallimard, coll. Folio, 1989.
-
[8]
E. Morin, La Méthode. 4. Les idées, leur habitat, leur vie, leurs mœurs, leur organisation. Paris, Le Seuil, 1991.
-
[9]
E. Morin, L’Esprit du temps (1962). Paris, Armand Colin et Institut National de l’Audiovisuel, 2008.
-
[10]
E. Morin, La Méthode. 4. Les idées, op. cit. Et ce n’est peut-être pas un hasard si en préface à la réédition récente de L’Esprit du temps, il évoque justement, pour illustrer les capacités que possède toujours la culture de masse à exprimer celui-ci, le film Matrix : « Est-ce que les humains ne sont pas manipulés par les machines infernales qu’ils ont créées ? C’est un thème clé, thème d’angoisse, thème absolument problématique qui porte sur notre vie quotidienne. » Dans le même ordre d’idées, il évoque Blade Runner : « L’un des problèmes des hommes, c’est de savoir s’ils n’ont pas été apprentis sorciers en se lançant dans l’aventure techno-scientifique. Sous cette forme spectaculaire, c’est un problème qui se pose vraiment de plus en plus à l’ère de la prolifération nucléaire, des manipulations génétiques et des dégradations de la biosphère. »
-
[11]
Ibid.
-
[12]
D. Rushkoff, Media Virus ! New York, Ballantine Books, 1996. Journaliste, écrivain, il est également l’auteur de Cyberia: Life in the Trenches of Hyperspace. 2nd ed., Manchester, Clinamen, 1995.
-
[13]
M. Dery, Culture Jamming: Hacking, Slashing and Sniping in the Empire of Signs. Open Media, 1993. Le « culture jamming » s’incarne notamment dans les pratiques de l’« adbusting » des « casseurs de pubs ». Mark Dery est également l’auteur de Vitesse virtuelle : la cyberculture aujourd’hui. Paris, Éditions Abbeville, 1997.
-
[14]
W. Burroughs, La révolution électronique. London, H. Chopin, 1999 (1970).
-
[15]
J. Baudrillard, « Disneyworld Company », Libération, 4 mars 1996.
-
[16]
G. Deleuze, « Post-scriptum sur les sociétés de contrôle », L’autre journal, n° 1, mai 1990.
-
[17]
G. Deleuze, Post-scriptum sur les sociétés de contrôle, in Pourparlers. Paris, Minuit, 2003.
-
[18]
J. Baudrillard, La société de consommation : ses mythes, ses structures. Paris, Denoël, 1970.
-
[19]
J. de Rosnay, L’homme symbiotique. Paris, Le Seuil, 1995.
-
[20]
Ibid.
-
[21]
?M. Heidegger, Dépassement de la métaphysique, in Essais et conférence. Paris, Gallimard, coll. Tel, 1958.
-
[22]
H. Corbin, L’imagination créatrice dans le soufisme d’Ibn’ Arabî. Paris, Médicis-Entrelacs, 2006.
-
[23]
M. Eliade, Le chamanisme et les techniques archaïques de l’extase. Paris, Payot, 1992 (1950).
-
[24]
T. Leary, Chaos et cyberculture. Paris, Lézard, 1996.
-
[25]
M. Mc Luhan, Pour comprendre les média, op. cit.
-
[26]
G. Anders, Sur la honte prométhéenne, in L’obsolescence de l’homme, op. cit.
-
[27]
Ibid.
-
[28]
cf. www.yannminh.com.
-
[29]
B. Glowczewski, « La pensée en réseau des Aborigènes », Le Nouvel Observateur, hors-série n° 51, juillet-août 2003.
-
[30]
Cf. M. Heidegger (1958), Dépassement de la métaphysique, in Essais et conférences. Paris, Gallimard, coll. Tel.
-
[31]
Cf. notamment M. Heidegger (1958), Bâtir, habiter, penser, in Essais et conférence, op. cit. « Les mortels habitent de telle sorte qu’ils ménagent le Quadriparti le laissant revenir à son être ».