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Article de revue

L’invention de la formation des entraîneurs (1941-1991) : entre construction identitaire professionnelle et pérennisation des « valeurs » du football

Pages 133 à 163

Notes

  • [1]
    On compte 144 069 licenciés en 1931 et 188 864 licenciés en 1938 (Encyclopédie générale des sports et des sociétés sportives en France. 1946. Paris, Éditions artistiques et documentaires, p. 398). À titre de comparaison, en 1938, le nombre de licenciés dans d’autres fédérations est le suivant : 31 592 en athlétisme, 16 680 en natation, 23 158 en basket-ball. Quant au rugby, il compte 16 247 compétiteurs en 1942-1943.
  • [2]
    Terret Thierry. 2000. « Les modèles d’entraînement en France dans les années vingt : diversité, références scientifiques et pressions internationales », in Saint-Martin Jean-Philippe, Terret Thierry. Le sport français dans l’entre-deux-guerres. Regards croisés sur les influences étrangères, Paris, L’Harmattan, p. 145.
  • [3]
    Grün Laurent. 2010. « L’entraînement des équipes de football de haut niveau en France : de 1890 à nos jours », in Bauer Thomas, Gomet Doriane. Histoire de la performance du sportif de haut niveau, Les cahiers de l’Insep, n° 46, p. 143-154.
  • [4]
    Wahl Alfred. 1989. Les archives du football. Sport et société en France (1880-1980), Paris, Gallimard-Julliard, p. 235-238.
  • [5]
    Griffiths Charles. Football, n° 197, 5 octobre 1933.
  • [6]
    Les valeurs attribuées aux stages deviennent des leitmotivs largement diffusés dans les Bulletins de l’Amicale, et ce jusqu’en 1991 au moins. Elles sont également relayées dans la presse spécialisée, notamment France Football.
  • [7]
    Grün Laurent. 2011. Entraîneur de football : histoire d’une profession de 1890 à nos jours, thèse soutenue à l’université Claude-Bernard, Lyon 1, p. 179-197.
  • [8]
    Wahl Alfred, Lanfranchi Pierre. 1995. Les footballeurs professionnels des années trente à nos jours, Paris, Hachette, p. 27-30.
  • [9]
    Defrance Jacques. 1994. « Les activités physiques et les sports face à l’État », in Clement Jean-Paul, Defrance Jacques, Pociello Christian, Sport et Pouvoirs au xxe siècle, Grenoble, PUG, p. 41-45.
  • [10]
    Gay-Lescot Jean-Louis. 1991. Sport et éducation sous Vichy (1940-1944), Lyon, Presses universitaires.
  • [11]
    Gaston Barreau, sélectionneur de l’équipe de France de football entre 1919 et 1945, est en charge de ces stages de formation depuis 1935.
  • [12]
    Gabriel Hanot est vice-président de la FFFA, ancien joueur international et journaliste sportif réputé.
  • [13]
    L’ENEP, fondée en 1933, est le lieu de résidence des stagiaires.
  • [14]
    Le professeur Chailley-Bert, médecin physiologiste spécialiste de médecine sportive, a été le directeur de l’ENEP de 1933 à 1935 et est directeur de l’Institut régional d’éducation physique de Paris en 1941.
  • [15]
    Gay-Lescot J.-L., op. cit., p. 40-44.
  • [16]
    Charroin Pascal. 2002. « De Borotra à Pascot ou le professionnalisme sous contrôle : le cas de l’A.S. Saint-Étienne », in Arnaud Pierre, Saint-Martin Jean-Philippe, Terret Thierry, Gros Pierre. Le sport et les Français sous l’Occupation. 1940-1944, tome 1, Paris, L’Harmattan, p. 220-221.
  • [17]
    Arnaud Pierre. 2002. « 1940-1944. Vichy et le sport. Années noires ou âge d’or ? », in Arnaud Pierre, Saint-Martin Jean-Philippe, Terret Thierry, Gros Pierre, op. cit., p. 30-31.
  • [18]
    Breuil Xavier. 2004. « Vichy et le football », in Loudcher Jean-François, Vivier Christian, Dietschy Paul (dir.), Sport et idéologie, tome 2, Besançon, ACE-SHS, p. 53-61.
  • [19]
    En 1942, la Fédération française de football association devient la Fédération française de football. Dans le cadre de la Révolution nationale prônée par le maréchal Pétain, cette modification de sigle est loin d’être anodine et dénote une volonté des dirigeants de promouvoir un football « à la française ».
  • [20]
    Dr D’Encausse Philippe. 1944. Éducation physique et sous-alimentation, Paris, Henri Dangles.
  • [21]
    Gay-Lescot J.-L., op. cit., p. 31-33 et p. 147.
  • [22]
    Rapport du comité national de réflexion sur le professionnalisme, A.N., 2 AG 459.
  • [23]
    Courrier de Jean Borotra à la FFF, cité par Gay-Lescot J.-L., p. 31-33 et p. 147.
  • [24]
    Peschanski Denis. 1997. Vichy 1940-1944. Contrôle et exclusion, Bruxelles, Éditions Complexe, p. 28.
  • [25]
    Grün L., op. cit., p. 195.
  • [26]
    Ces moniteurs exercent leur métier de footballeur professionnel au cours de la saison. André Simonyi, (4 sélections entre 1942 et 1945) et Alfred Aston (31 sélections entre 1934 et 1946), tous deux joueurs du Red Star, sont des joueurs internationaux. Lucien Perpère est professionnel au Stade de Reims.
  • [27]
    Gay-Lescot J.-L., op. cit., p.145-147.
  • [28]
    Breuil X. op. cit., 57-61.
  • [29]
    Albert Batteux est sélectionné à huit reprises en équipe de France entre 1948 et 1949. Entre 1950, date de ses débuts en tant qu’entraîneur, et 1960, il remporte quatre titres de champion de France et une Coupe de France avec le Stade de Reims. Il est également finaliste de la Coupe d’Europe des clubs champions en 1956 et 1959. Au terme de sa carrière d’entraîneur en 1972, son palmarès comporte sept titres supplémentaires remportés avec l’A.S. Saint-Étienne : cinq championnats et deux coupes de France. Il est considéré par les spécialistes comme l’un des plus grands entraîneurs français de tous les temps.
  • [30]
    Le diplôme d’entraîneur-instructeur est le degré supérieur du diplôme d’entraîneur. À partir de 1945, c’est ce titre qui devient obligatoire pour entraîner une équipe professionnelle.
  • [31]
    Dix-sept joueurs obtiennent le diplôme en 1943, et trois seulement en 1944. En effet, l’initiative de Jep Pascot, qui crée des équipes fédérales en lieu et place des clubs professionnels pour la saison 1943-1944, contribue également à décourager les joueurs professionnels.
  • [32]
    Pierre Flamion entraînera entre 1957 et 1993, notamment à Metz et Troyes. Henri Roessler entraînera Reims de 1945 à 1950 et Marseille de 1950 à 1954, et obtiendra plusieurs titres nationaux, championnat et Coupe de France.
  • [33]
    « L’attentisme, un produit de Vichy ». Cette formule est empruntée à Laborie Pierre. 2001. L’opinion française sous Vichy. Les Français et la crise d’identité nationale. 1936-1944, Paris, Seuil, p. 296.
  • [34]
    La presse relate parfois ce genre d’attitude, par exemple L’Auto, n° 15412, 10 mai 1943 ; ou encore Football, n° 633, 8 juin 1944.
  • [35]
    En 1936, Maurice Pefferkorn écrit ainsi : « Et combien parmi ceux qui ont aujourd’hui en France, l’étiquette de joueurs professionnels, le sont-ils vraiment ? Combien […] ont conscience des devoirs et des disciplines qu’elle impose ? » Football n° 328, 29 avril 1936. Deux années plus tard, Gabriel Hanot confirme cet avis : « Il est indispensable que nos joueurs soient vraiment des professionnels totalement, intégralement. Leur place n’est pas dans le lit de la grasse matinée, ni autour de la table de la belote, mais au stade, matin et soir, comme en Angleterre. » Football, n° 439, 15 juin 1938.
  • [36]
    Jusqu’aux années 1970 au moins, selon Faure Jean-Michel, Suaud Charles. 1999. Le football professionnel à la française. Paris, PUF, 262 p.
  • [37]
    Wahl A., Lanfranchi P., op. cit.
  • [38]
    Rappelons que, jusqu’en 1940, le stage national ne délivre pas de diplôme officiel.
  • [39]
    Miroir Sprint, n° 13, 19 août 1946. En raison de cette indiscipline qu’il a du mal à réprimer chez ses joueurs, Jules Vandooren préfère ne pas renouveler son contrat pour la saison suivante.
  • [40]
    Le terme est emprunté à Walh A., op. cit., p. 297.
  • [41]
    Rioux Jean-Pierre. 1980. La France de la quatrième République. L’ardeur et la nécessité. 1944-1952, tome 1, Paris, Seuil, p. 68-97.
  • [42]
    Ibid., p. 77-97.
  • [43]
    Pefferkorn Maurice. 1947. France Football officiel, n° 64, 24 avril.
  • [44]
    L’Auto, n° 14762, 16 juillet 1941 ; L’Auto, n° 14771, 26 juillet 1941.
  • [45]
    France Football, n° 120, 7 juillet 1948.
  • [46]
    La répartition des points attribués se décompose ainsi : questions écrites sur les lois du jeu, l’alimentation, les soins, la technique : 30/200 ; oraux et démonstration pratique en technique : 70/200 ; oraux et démonstration pratique en tactique : 45/200 ; oraux et démonstration pratique en éducation physique : 30/200 ; note de l’instructeur : 25/200.
  • [47]
    Cohen Yves. 2001. « Les chefs, une question pour l’histoire du xxe siècle », Cités, n° 6, p. 67-83.
  • [48]
    Kader Firoud, 6 sélections en équipe de France (1951-1952), devient entraîneur en 1955. Il a dirigé 782 matchs de Division 1 (principalement avec Nîmes de 1955 à 1982). Seul Guy Roux a dirigé davantage de matchs professionnels à ce niveau (894 matchs en tout entre 1980 et 2007).
  • [49]
    France Football, n° 275, 26 juin 1951.
  • [50]
    À part Paul Baron (stage 1929) et Jules Vandooren (1939), les autres instructeurs sont les lauréats des stages qui se sont tenus entre 1941 et 1946.
  • [51]
    La question de l’endogamie professionnelle est développée par Pellissier Christine. 1994. « Les notables protestants lyonnais au xixe siècle », Société de l’histoire du protestantisme français, n° 140, p. 381-407.
  • [52]
    Rappelons que le titre d’entraîneur-instructeur confère le droit d’entraîner une équipe professionnelle. Le nombre d’entraîneurs diplômés qui peuvent entraîner des équipes amateurs est bien supérieur à ces chiffres.
  • [53]
    Girault Jean. 1996. Instituteurs, professeurs. Une culture syndicale dans la société française (fin xixe-xxe siècle), Paris, Publications de la Sorbonne, p. 109.
  • [54]
    Andolfatto Dominique, Sabot Jean-Yves. 2004. « Les héritiers du mouvement ouvrier : CGT et CGT FO », in Andolfatto Dominique (dir.), Les syndicats en France, Paris, La Documentation française, p. 27-28.
  • [55]
    Dubar Claude, Tripier Pierre. 1998. Sociologie des professions, Paris, Armand Colin, p. 10-13.
  • [56]
    Gabriel Hanot pratique le mélange des genres. Cadre rémunéré de la FFF entre avril 1945 et août 1949, il est en même temps journaliste à L’Équipe et à France Football, tout en exerçant ses fonctions de sélectionneur de l’équipe de France et de président de l’Amicale des entraîneurs.
  • [57]
    Cette délégation procède d’une certaine logique, puisque Gabriel Hanot est à la fois dirigeant influent de la FFF et membre fondateur de l’Amicale.
  • [58]
    Dubar Claude. 2000. La crise des identités. L’interprétation d’une mutation, Paris, PUF, p. 95.
  • [59]
    Dubar C., Tripier P., op. cit.
  • [60]
    France Football, n° 73, 14 août 1947.
  • [61]
    Lucien Perpère est un des membres fondateurs de l’Amicale.
  • [62]
    Bulletin mensuel de l’Amicale des entraîneurs diplômés de la FFF n° 7, novembre 1948.
  • [63]
    Rioux J.-P., op. cit., p. 6.
  • [64]
    Bulletin de l’Amicale des entraîneurs, n° 21, 15 avril 1954.
  • [65]
    Procès-verbal de l’assemblée générale de l’Amicale, 4 juillet 1959.
  • [66]
    Girault J., op. cit., p. 109.
  • [67]
    Charrier Philippe. 2004. Sociologie des imaginaires professionnels. Le cas des cheminots, Paris Éditions Zagros, p. 237.
  • [68]
    Entretien du 28 octobre 1998.
  • [69]
    Témoignage de Gaby Robert. L’Entraîneur français, n° 336, octobre 1999.
  • [70]
    Entretien du 28 octobre 1998.
  • [71]
    Tort Patrick, Bonnafe Lucien, L’Homme, cet inconnu ? Alexis Carrel, Jean-Marie Le Pen et les chambres à gaz, Paris, Syllepse, 1992.
  • [72]
    Notes personnelles de Georges Boulogne, non datées, qui relate une interview accordée à un représentant de la presse spécialisée. On peut estimer qu’elle a eu lieu entre 1967 et 1968.
  • [73]
    Rhetacker Jean-Philippe. France Football, n° 2907, 25 décembre 2001. Parmi les nombreux exemples que l’on peut répertorier, Georges Boulogne a écrit : « Le verbalisme est dans les écrits des journalistes qui prétendent décortiquer des problèmes qui les dépassent. » Notes personnelles de Georges Boulogne, non datées, qui relatent une interview accordée à un représentant de la presse spécialisée, réalisée entre 1967 et 1968.
  • [74]
    L’Entraîneur français, n° 336, octobre 1999.
  • [75]
    Union nationale et cadre techniques du football. Ce syndicat destiné aux entraîneurs professionnels est fondé en 1977.
  • [76]
    Endroit où fut réalisé l’entretien du 28 octobre 1998.
  • [77]
    L’Entraîneur français, n° 336, octobre 1999. Pour mémoire, Jean-Philippe Rhétacker, qui fut longtemps rédacteur en chef adjoint à France Football et journaliste à l’Équipe, a couvert toutes les Coupes du Monde de football de 1954 à 2002. Il est décédé en 2003.
  • [78]
    Consulter à ce sujet France Football, n° 109, 10 mars 1948 et France Football, n° 616, 7 janvier 1958.
  • [79]
    France Football, n° 616, 7 janvier 1958.
  • [80]
    Boltanski Luc. 1979. « Taxinomies sociales et luttes de classes », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 29, p. 75-106.
  • [81]
    Dumazedier Joffre. 1962. Vers une civilisation du loisir ?, Paris, Seuil.
  • [82]
    Grün L., op. cit., p. 252-261.
  • [83]
    Rioux Jean-Pierre. 1983. La France de la quatrième République. L’expansion et l’impuissance (1952-1958), tome 2, Paris, Seuil. Les revenus et la consommation ont progressé d’un tiers entre 1949 et 1958.
  • [84]
    Sur ce point : Bourg Jean François. 2002. « Le football et la télévision : évolution des relations économiques », Panoramiques, n° 61, « Un monde foot, foot, foot ! », p. 19-23.
  • [85]
    René Hauss sera major du stage de 1965.
  • [86]
    Football Magazine, n° 67, août 1965.
  • [87]
    Entretien téléphonique du 26 juillet 2002. Pierre Cahuzac a notamment entraîné Bastia (1971-1979), Toulouse (1979-1984) et l’Olympique de Marseille.
  • [88]
    Entretien téléphonique du 17 mars 2003. Arnold Sowinski a entraîné le R.C. Lens (1969-1981).
  • [89]
    Lemoine Claude. 2003. Psychologie dans le travail et les organisations, Paris, Dunod, p. 29-30.
  • [90]
    Le terme est couramment employé par Georges Boulogne lui-même dans ses écrits, de 1956 à 1999. Voir par exemple L’entraîneur français au service du football, n° 73, février 1959.
  • [91]
    Grün L., op. cit., p. 368-389.
  • [92]
    Achille Duchenne. L’entraîneur français au service du football, n° 67, août 1958.
  • [93]
    Achille Duchenne est l’attaché de presse de la FFF. C’est un journaliste qui écrivait déjà dans les années 1920, pour Football notamment, et qui s’était opposé vigoureusement à l’instauration du professionnalisme à la fin des années 1920 et au début des années 1930. Sur cette question, Wahl Alfred. 1999. « Un professionnalisme de résignation », Sociétés et Représentations, « Football et sociétés », CREDHESS, n° 7, p. 67-76.
  • [94]
    Attias-Donfut Claudine, Lapierre Nicole, Segalen Martine. 2002. Le nouvel esprit de la famille, Paris, Nathan, p. 116.
  • [95]
    De Singly François. 1996. Le soi, le couple et la famille, Paris, Nathan, p. 11.
  • [96]
    Procès-verbal de la réunion des entraîneurs de la Ligue nationale de football, 5 décembre 1963. Archives personnelles de Georges Boulogne.
  • [97]
    Robert Vergne, journaliste célèbre pour ses prises de position polémiques et ses différends avec Georges Boulogne et l’Amicale des entraîneurs, décrit le stage ainsi : « La quantité de besogne abattue approche comme d’habitude les normes de stakhanoviste. » Football Magazine, n° 67, août 1965.
  • [98]
    Procès-verbal de la réunion des entraîneurs de la Ligue nationale de football, op. cit.
  • [99]
    Jobert Timothée. 2007. « L’Auto, un organe de presse ? », in Combeau-Mari Évelyne (dir.), Sport et Presse en France (xixe-xxe siècles), Paris, Le Publieur.
  • [100]
    À partir de 1955, la durée du stage passe à trois semaines pour les meilleurs candidats, ceux qui pourront entraîner une équipe professionnelle. Seuls quelques candidats obtiennent ce droit, à l’issue d’un examen qui a lieu à la fin des deux premières semaines. Les candidats non retenus, mais qui obtiennent la moyenne, reçoivent néanmoins le diplôme d’entraîneur, qui les autorise à entraîner une équipe amateur.
  • [101]
    France Football, n° 222, 21 juin 1950, consacre la totalité de sa dernière page au stage. Sous le titre : « Une matinée au stage de Reims », l’article est accompagné de cinq photographies. Quant à France Football, n° 379, 23 juin 1953, c’est l’ensemble de la une qui couvre le stage : deux photographies ornent la page, sous le titre : « Jean Robin (OM), major du stage des entraîneurs nationaux ».
  • [102]
    Georges Boulogne. France Football officiel, n° 779, 14 février 1961.
  • [103]
    Au sens défini par Van Gennep Arnold, 1909. Les rites de passage, Paris, Picard (réimpression de l’édition de 1909).
  • [104]
    Dubar Claude. 1996. [1991]. La socialisation. Construction des identités professionnelles, Paris, Armand Colin.
  • [105]
    Cet épisode est relaté dans France Football, n° 1318, 6 juillet 1971, sous le titre : « Herbin à la dure école du stage national ».
  • [106]
    Procès-verbal de la réunion de la Direction technique nationale, 20/21 septembre 1971. Archives personnelles de Georges Boulogne.
  • [107]
    Ces centres de formation fonctionnent selon une discipline quasi militaire. Faure J.-M., Suaud C., op. cit., p. 51.
  • [108]
    France Football, n° 1318, 6 juillet 1971.
  • [109]
    Wahl A., op. cit., p. 298.
  • [110]
    On retrouve ce thème dans de nombreux procès-verbaux de l’Amicale et de la DTN, par exemple celui du 10 décembre 1979 : « Tous les entraîneurs de 1re et 2e Divisions doivent avoir à cœur d’être présents aux réunions. Ceux qui n’en acceptent pas la légère contrainte (deux journées par an) ne méritent pas d’entraîner un club important. » Tous ces procès-verbaux ont été rédigés par Georges Boulogne.
  • [111]
    Dubar C., Trippier P., op. cit.
  • [112]
    Grün L., op. cit., p. 475.
  • [113]
    Charrier P., op. cit., p. 241.
  • [114]
    L’entraîneur français au service du football, n° 94, mai juin 1961.
  • [115]
    Saint-Fuscien Emmanuel. 2011. À vos ordres ? Les relations d’autorité dans l’armée française de la Grande Guerre, Paris, Éditions EHESS, p. 259-267.
  • [116]
    Goffman Erving. 1973. La mise en scène de la vie quotidienne. 1. La présentation de soi, Paris, Minuit, p. 97.
  • [117]
    L’Entraîneur français au service du football, n° 105, juillet-août 1964.
  • [118]
    Wahl A., Lanfranchi P., op. cit., p. 158-159.
  • [119]
    Georges Boulogne a toujours manifesté une aversion caractérisée envers les professeurs d’éducation physique et sportive. Il les accuse notamment de « contre-propagande » envers le football. Procès-verbal de la réunion des entraîneurs de 1re Division du lundi 9 juin 1969. Archives personnelles de Georges Boulogne.
  • [120]
    Saint-Fuscien E., op. cit.
  • [121]
    France Football officiel, n° 2216, 15 juin 1990.
  • [122]
    Lemoine C., op. cit., p. 29-30.
  • [123]
    Dubar Claude. 2003. « Sociologie des groupes professionnels en France : un bilan prospectif », in Menger Pierre-Michel, Les professions et leurs sociologies. Modèles théoriques, catégorisations, évolutions, Paris, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, p. 58.
  • [124]
    Grün L., op. cit., 2011.
  • [125]
    Chapoulie Jean-Michel. 1973. « Sur l’analyse sociologique des groupes professionnels », Revue française de sociologie, n° 14, p. 86-114 ; Demaziere Didier, Gadea Charles (dir.). 2009. Sociologie des groupes professionnels, Paris, La Découverte.
  • [126]
    Bouchet-Valat Milan. 2014. « Les évolutions de l’homogamie de diplôme, de classe et d’origine sociales en France (1969-2011) : ouverture d’ensemble, repli des élites », Revue française de sociologie, n° 55, p. 459-505.
  • [127]
    Les candidats actuels ont ainsi droit à des formations en gestion des ressources humaines, en langues étrangères, en technologies de l’information et de la communication, en connaissances juridiques et financières…
  • [128]
    Gérard Houller, Directeur technique national (DTN) de la FFF dans France Football officiel du 25 mai 1991.
  • [129]
    Gérard Houllier, entraîneur professionnel (1976-1988, puis 1998-2007) a été membre de la DTN de 1988 à 1997, puis directeur technique national de 2007 à 2010. Il est l’un des rares entraîneurs professionnels à n’avoir pas effectué de carrière de joueur professionnel.
  • [130]
    « Rapport sur la formation des entraîneurs de haut niveau et leur situation actuelle » rédigé par Gérard Houllier, DTN adjoint, le 13 décembre 1989 et envoyé à Fernand Sastre, ancien président de la FFF. Fernand Sastre a été nommé président de la commission de réforme du football français, suite à une demande de Roger Bambuck, secrétaire d’État à la Jeunesse et au Sport. Archives personnelles de Georges Boulogne.
  • [131]
    L’absence à ces stages de recyclage entraîne le retrait de la licence d’entraîneur.
  • [132]
    Luis Fernandez, ex-entraîneur du PSG et du Bétis de Séville, dans France Football, n° 3235 bis, 11 avril 2008.

1Dans l’entre-deux-guerres, le football est le sport le plus pratiqué en France [1]. Cependant, ses dirigeants peinent non seulement à trouver des entraîneurs aptes à encadrer des joueurs toujours plus nombreux, mais également à dispenser des formations susceptibles de fournir cet encadrement souhaité. La question de l’entraînement, peu familier aux pratiquants des sports athlétiques en France jusqu’aux années 1920 [2] au moins, ne constitue pas davantage une préoccupation majeure pour les footballeurs français des années 1930. Pourtant, ces derniers savent que leurs homologues britanniques, mais également italiens, espagnols, ou d’Europe centrale, s’y soumettent régulièrement [3]. L’adoption du professionnalisme en 1932 n’impulse guère de changement, à tel point qu’à la veille de la Seconde Guerre mondiale, la pénurie d’entraîneurs dans le football français persiste. Parmi les diverses raisons qui expliquent ce déficit figurent les représentations liées à l’entraînement, ce dernier n’apparaissant pas comme une nécessité pour les pratiquants, notamment les joueurs-vedettes recrutés sous couvert d’amateurisme marron [4]. Il faut souligner également le poids du capitaine d’équipe dont le statut semble le promulguer en substitut idéal de l’entraîneur [5]. Pourtant, des demandes précises émanent des dirigeants, non seulement ceux qui représentent les meilleurs clubs, mais également ceux qui se font entendre dans les instances régionales. Ces requêtes sont relayées par la presse spécialisée qui présume que les progrès du football français devraient être corrélés à l’action de techniciens bénéficiant d’une expertise reconnue. Ces derniers ne pouvant émerger ex nihilo, il semble primordial de leur inculquer une solide formation initiale propice à leur permettre d’entraîner les meilleures équipes françaises. De timides tentatives sont menées par la Fédération française de football association (FFFA) à partir de 1929, parfois relayées par les Ligues régionales, voire par de rares clubs, afin de procurer à quelques volontaires le bagage idoine à l’encadrement et l’entraînement d’équipes de football. Mais, organisées sans réel moyen ni politique clairement définies, elles échouent à former des entraîneurs capables de tenir le rôle escompté par la presse et par les dirigeants : l’ambition de disposer d’hommes aptes à inculquer les bases du football, mais surtout à améliorer le rendement des équipes dont ils auraient la charge, reste inachevée.

2Ce n’est qu’à partir de 1941 que pointe la réponse aux attentes, sous l’impulsion de l’intervention de l’État, rapidement conjuguée à celle, prépondérante, de la structure associative que constitue l’Amicale des éducateurs fondée en 1947, ainsi qu’à la militance d’un homme, Georges Boulogne. Cette convergence de démarches et conjonctions d’intérêts permet la mise en place d’un système de formation d’entraîneurs, propédeutique à l’instauration de procédures d’encadrement efficaces répondant à des buts précis. Les stages d’entraîneurs, instaurés puis pérennisés par la Fédération française de football (FFF), fonctionnent grâce à une hiérarchisation et des rapports d’obéissance établis et acceptés au sein de la « famille » des entraîneurs.

3L’ambition de cet article est donc d’étudier les dynamiques culturelles, sociales et professionnelles à l’œuvre dans la création des stages de formation des entraîneurs de football, en éclairant les raisons pour lesquelles ils ont été mis en place. Notre hypothèse centrale consiste à montrer qu’au-delà du simple objectif de perfectionnement technique, tactique ou pédagogique, ces stages annuels structurent les comportements et attitudes de plusieurs générations d’entraîneurs. En effet, de 1941 à 1991, ils s’inscrivent dans un contexte de reconsidération identitaire de la profession d’entraîneur en football, rendue nécessaire face à plusieurs idées reçues véhiculées par l’imaginaire collectif : l’argent facile qui circule dans le football professionnel et le dilettantisme affiché par ses principaux acteurs y figurent en bonne place. Dès lors, le stage national d’entraîneurs est à la fois le lieu, mais également le moyen d’inculcation de valeurs destinées à combattre ces représentations [6].

4L’étude s’intéressera donc à la forme prise par ces stages nationaux ainsi qu’à l’examen terminal qui en consacre les lauréats. Elle mettra également en évidence le rôle de Georges Boulogne, acteur déterminant du football français dans l’élaboration et la pérennisation de ces procédures d’encadrement. Ce dernier est animé par la conviction inébranlable qu’il est vital de faire progresser le football français afin d’assurer sa pérennité.

5Notre démonstration s’attachera également à mettre en lumière le monopole que s’adjuge l’Amicale des entraîneurs pour organiser et valider ces stages nationaux, contribuant de fait à institutionnaliser cette profession, en partie en raison du caractère endogamique du recrutement.

6Pour mener à bien cette analyse, les sources principales résident dans la littérature professionnelle, notamment dans les bulletins dactylographiés et ronéotypés de l’Amicale des éducateurs de football dont le premier paraît en octobre 1947. Ce bulletin, qui devient le journal l’Entraîneur français au service du football à partir du n° 23 du 15 juin 1954, existe encore en 1991, même s’il a connu des bouleversements de rythmes de diffusion et des changements de dénomination. Durant la période étudiée, de nombreux articles sont signés par les encadrants des stages nationaux d’entraîneurs, et tout particulièrement par Georges Boulogne. Nous avons également eu accès à deux types d’archives : celles que la FFF met à la disposition des chercheurs, mais également les archives privées de Georges Boulogne. Il s’agit de procès-verbaux de personnels dactylographiés et parfois annotés de sa propre main, qui relèvent de réunions d’entraîneurs professionnels de Division 1 et parfois Division 2 entre 1961 et 1981. Ces procès-verbaux concernent également des réunions de la Direction technique nationale (DTN) et permettent de mieux cerner la politique désirée, voire imposée par Georges Boulogne ou par les instances qu’il représente. L’ensemble de ces sources sera confronté à celles qui émanent de la presse écrite spécialisée en football, ainsi qu’à des entretiens et questionnaires menés auprès d’entraîneurs de générations différentes.

I – Former des éducateurs : les stages d’entraîneur de 1941 à 1947

a – Des atermoiements précédant la construction de fondations solides

7De 1929 à 1939, des stages de formation d’entraîneurs de football sont bien instaurés par la FFFA, mais sans qu’ils ne conduisent à la délivrance d’un diplôme. Organisés à la hâte, sans programme réellement préconçu [7], ils ne dotent pas les candidats de savoir-faire propices à l’entraînement. L’encadrement sportif dans les clubs est alors très peu répandu. Dans le championnat professionnel, il revient depuis 1932 à des hommes qui n’ont pas bénéficié d’une formation spécifique. Ce sont souvent des étrangers, originaires de Grande-Bretagne ou d’Europe de l’Est qui, recrutés en tant que joueurs par les formations françaises de l’élite, prolongent leur carrière en acceptant de diriger l’équipe professionnelle au sein de laquelle ils évoluaient [8]. Lors de la première édition du Championnat de France professionnel en 1932, on compte un seul Français pour seize équipes de Division 1. Même si à l’orée de la saison 1939, ce sont six Français sur seize entraîneurs qui officient à la tête des équipes de l’élite, les quelques formations dispensées annuellement par la FFFA lors du mois de juillet peinent à fournir un encadrement de qualité. Il est vrai qu’en France, l’intervention étatique dans le domaine du sport reste très modeste [9]. Dès lors, les prémices d’une organisation plus qualitative, orchestrée par la FFFA et effective à partir de 1939, restent lettre morte. En effet, en raison des difficultés liées à l’Occupation, le stage de 1940 n’a pas lieu. La réorganisation du sport français, sous la houlette du premier commissaire à l’Éducation générale et sportive (EGS) Jean Borotra, ne débute officiellement que le 7 août 1940 [10]. L’année 1941 apporte enfin la concrétisation de demandes réitérées de la part de la presse écrite, ainsi qu’en témoigne un article paru dans L’Auto n° 14762 du 16 juillet 1941 : « Voici le cours de la 3.F.A. en quelque sorte officialisé. Pour la première fois, il revêt un lustre qu’il aurait toujours dû avoir. » Ce stage, suivi par 39 candidats, présente une nouvelle structuration qui suscite ces commentaires élogieux. En effet, la FFFA fait appel à des spécialistes : Gaston Barreau [11], qui encadrait seul les sessions des années précédentes depuis 1935, est conforté dans son rôle, mais il est dorénavant assisté, outre Gabriel Hanot [12], de M. Baldway, arbitre international, de Maurice Baquet, directeur technique pour les sports athlétiques à l’École normale d’éducation physique (ENEP) [13], du professeur Chailley-Bert [14], etc.

8L’expérience du stage national d’entraîneurs de football est à rapprocher de la création des Centres régionaux d’EGS à partir de 1940, ainsi que du Centre national des moniteurs et athlètes (CNMA) d’Antibes à partir de 1941. Ces instituts sont destinés à former en quelques mois un nouveau corps d’enseignants, les moniteurs : leur usage n’est pas réservé à l’école ou à l’université, mais doit être étendu au domaine périscolaire et associatif. Le CNMA d’Antibes, qui fait office de centre d’entraînement et de formation pour une élite sportive, sert de vitrine au commissariat à l’EGS. La formation des athlètes et moniteurs, programmée sur une durée de plusieurs mois, bénéficie d’un véritable aréopage de pédagogues, militaires et sportifs sélectionnés avec soin autour du colonel Beaupuis, directeur du CNMA [15].

9Fort d’un encadrement d’une qualité comparable, le stage de formation d’entraîneurs de la FFF bénéficie d’un fort retentissement, puisque L’Auto du 26 juillet 1941 en publie deux photos à la une. Certes, la politique volontariste du commissaire à l’EGS, Jean Borotra, n’est pas étrangère à cette exposition médiatique [16]. Le stage doit donc administrer la preuve d’une organisation impeccable doublée d’un déroulement savamment orchestré qui s’inscrit dans la Doctrine de la Révolution nationale établie depuis juillet 1940. Il s’agit ici de mettre en ordre le sport français [17]. Comme les autres sports, le football doit inculquer de nouvelles vertus et façonner un « homme nouveau [18] ». Les directives de Jean Borotra conduisent la Fédération française de football [19] (FFF) à imposer, dès 1942, le statut de joueur-moniteur, qui s’obtient par le biais d’un examen officiel fédéral. Le nombre de joueurs a en effet augmenté significativement, passant de 188 760 à plus de 216 202 licenciés entre 1938 et 1942 [20] : cette croissance spectaculaire des effectifs fait émerger des besoins en matière d’encadrement. De ce fait, grâce à la promotion du statut de joueur-moniteur, Jean Borotra espère aider le développement du sport amateur. Selon le commissaire à l’EGS, en accédant à ce statut de joueur-moniteur, les joueurs professionnels pourront également exercer en tant qu’entraîneurs [21] au sein des équipes de jeunes des clubs auxquels ils appartiennent. En conséquence, la FFF organise la première formation officielle d’entraîneurs du 16 au 31 juillet 1942. Le stage de 1942 reprend les modalités de celui de 1941, mais, pour la première fois, délivre un diplôme officiel aux lauréats. Il s’agit bien, pour répondre aux directives du commissaire général à l’EGS ainsi qu’aux conclusions du Comité national de réflexion sur le professionnalisme [22] qu’il a créé, de procurer des éducateurs qualifiés et de certifier une formation en profondeur jusqu’ici négligée [23]. Ce souci d’encadrement social n’est pas spécifique au football et il n’aura jamais été aussi fort qu’entre 1941 et 1942 [24]. Ainsi, c’est finalement la mainmise de l’État sur le monde sportif qui finit par donner une légitimité et une crédibilité tangibles au stage national d’entraîneurs après les timides initiatives créditées à la FFFA dans les années 1930. Les efforts relatifs à l’organisation du premier stage permettant la délivrance d’un diplôme, en 1942, sont d’abord perceptibles quantitativement et comparativement. En effet, de 1929 à 1939, les premiers stages organisés par la FFFA avaient abouti à la délivrance d’un total de 51 diplômes seulement qui, de surcroît, ne consistaient qu’en une simple attestation [25]. Mise en perspective avec ces modestes chiffres, la seule session de 1942 réunit 80 stagiaires. La rupture avec la période antérieure est patente : la FFF assume désormais son rôle d’organiser le football en lui fournissant des cadres. Gaston Barreau et Gabriel Hanot en demeurent les chevilles ouvrières, mais ils sont secondés par des moniteurs fédéraux, parfois lauréats du stage de l’année précédente, tels qu’Alfred Aston, Lucien Perpère, André Simonyi [26]… chargés d’encadrer les participants. Le stage de 1942 correspond donc à la première étape de l’institutionnalisation de la profession d’entraîneur de football.

b – Une formation enfin sanctionnée par un diplôme

10Mais si ce stage de 1942 connaît un succès réel, il amorce dès l’année suivante un déclin indéniable en raison de l’opposition affichée du colonel Jep Pascot envers le professionnalisme [27]. En effet, si l’État soutient sans réserve la formation des cadres sportifs, il ne saurait tolérer l’oisiveté et l’inutilité sociale prêtées aux professionnels. Si Jean Borotra avait déjà manifesté son aversion envers le professionnalisme, le changement de commissariat en 1942 s’accompagne d’un surcroît d’autoritarisme en matière de politique sportive, perceptible à travers les décisions de Jep Pascot [28]. Ce changement de ton n’incite pas les joueurs professionnels, craignant une suppression imminente de leur métier, à s’engager dans la recherche d’un diplôme hybride reposant sur un double statut : celui de moniteur (donc d’entraîneur) et celui de joueur professionnel condamné à disparaître. D’autres types d’obstacles rencontrés par les équipes, inhérents à la vie quotidienne tels que le rationnement, les difficultés de déplacement ou la démotivation dissuadent les joueurs de fréquenter le stage national. En conséquence, si 43 inscrits, dont Albert Batteux [29], obtiennent le diplôme d’entraîneur-instructeur [30] en 1942, le nombre réel de joueurs qui utilisent ce titre pour exercer une fonction de moniteur, dans les années 1942-1944 est réduit à la portion congrue [31]. Mais l’officialisation du stage permet, pendant l’Occupation, de dispenser une formation à des hommes qui deviendront après-guerre des entraîneurs reconnus du football français. Surtout, il jette les bases d’une formation qui se pérennise après la Libération. Une centaine de stagiaires suivent la formation d’entraîneurs en 1945. Vingt-quatre d’entre eux, dont Pierre Flamion et Henri Roessler [32], obtiennent le diplôme d’entraîneur-instructeur.

11Dès 1945, la tâche qui leur est assignée, aussi bien par les dirigeants que par les journalistes, consiste à remettre les joueurs professionnels dans le droit chemin. Il convient, selon eux, de leur redonner goût à l’entraînement, de les débarrasser des habitudes de dilettantisme prises sous l’Occupation, donc de rompre avec « l’attentisme » en vigueur sous le régime de Vichy [33]. De nombreux footballeurs professionnels se soumettaient à l’entraînement obligatoire comme à une corvée, quand ils ne s’y soustrayaient pas tout simplement [34]. Ce type d’accusation porté envers les joueurs professionnels était déjà formulé dans les années trente, en particulier par la presse spécialisée [35]. De fait, cette demande remonte aux années 1920, avant que le professionnalisme ne soit adopté en 1932. Il s’agit de (ré)accoutumer le joueur français à l’entraînement, de le convaincre des bénéfices qu’il peut en tirer. Pour de nombreux professionnels français, depuis 1932 et pour plusieurs décennies [36], le football n’est pas une occupation sérieuse, d’autant qu’il leur laisse quotidiennement du temps libre pour vaquer à d’autres occupations, voire même exercer un second métier [37]. Il est vrai que les salaires perçus par la grande majorité des joueurs professionnels ne leur permettent pas d’envisager une retraite oisive une fois leur carrière terminée. Les plus fortunés, souvent les joueurs-vedettes, acquerront donc un négoce ; d’autres accepteront un travail d’ouvrier, de commercial, ou de moniteur de sport. Enfin, quelques-uns prolongeront leur carrière dans le football, en tant qu’éducateurs. Mais la majorité d’entre eux sont loin d’envisager cette dernière reconversion, à tel point que pour certains, le football ne représente ni une priorité ni une perspective d’avenir. Un entraîneur de l’ancienne école comme Jules Vandooren, lauréat du stage national d’entraîneurs de 1939 [38], responsable du Stade de Reims lors de la saison 1942-1943, s’était étonné du manque de motivation de ses joueurs professionnels, qu’il avait qualifiés de « professionnels sans conscience » et de « brebis galeuses » [39]. Nombreux sont les dirigeants des clubs professionnels qui, souhaitant remettre de l’ordre dans leur équipe, font appel à ce type d’entraîneur semblable à un garde-chiourme [40]. Depuis la Libération, l’ordre et l’ardeur sont les deux maîtres mots de l’autorité de l’État [41]. On assiste donc à un retour à l’ordre dans tous les secteurs de la vie publique. Il s’agit de substituer aux rouages de Vichy de nouveaux garants d’un pouvoir de droit face aux différents pouvoirs de fait. Cette reprise en main s’inscrit également dans un contexte de productivité, perçu d’autant plus comme un impératif par les Français qu’il est martelé dans les discours politiques, les médias, les lieux de travail [42]. À l’échelle des clubs professionnels, si l’autorité administrative est personnifiée par le président, la gestion des joueurs est en revanche du ressort de l’entraîneur. La tâche de ce dernier s’avère délicate, si l’on se réfère aux critiques de la presse sportive, laquelle persiste à dénoncer des joueurs professionnels qui « ne considèrent pas le football comme un véritable métier [43] ». Le stage national fournit donc l’occasion rêvée d’inculquer aux futurs entraîneurs des valeurs qui leur semblaient étrangères lorsqu’ils étaient joueurs et qu’ils auront à leur tour mission de transmettre dans les équipes qu’ils dirigeront.

12Ainsi, dès 1941, à l’initiative de la FFF, placé sous le contrôle du Commissariat au Sport de Vichy, le stage national devient le lieu où des valeurs nouvelles sont transmises aux futurs entraîneurs. Il s’agit de dépasser et combattre des représentations en vigueur dans l’opinion, dont celles qui associent le statut de joueur professionnel au bénéfice inévitable d’un salaire confortable et à l’exercice d’un métier agréable ne nécessitant pas d’investissement démesuré, qu’il soit d’ordre physique ou moral. Le futur entraîneur doit non seulement être pénétré par l’importance de sa mission, prêt à s’investir sans compter les heures, mais également diffuser ces mêmes principes auprès des joueurs dont il aura la charge [44].

c – Appartenir à « la famille » : le credo de l’effort et du mérite

13Cette logique de transmission de valeurs et de références telles que le travail, l’abnégation, le sérieux, mais également l’obéissance et la soumission à l’intérêt collectif, est véhiculée à la fois par les contenus, les discours, mais aussi par la forme que prend ce stage : « Régime du stage national d’entraîneurs : 140 heures de travail gratis… et sans revendications [45]. » L’article du magazine fait implicitement référence aux mouvements ouvriers qui ont agité la vie sociale française lors des trois années précédentes. Les grèves de 1947 ont influencé sans nul doute le jugement des journalistes de France Football qui cultivent ici l’éloge de ces futurs entraîneurs, travailleurs et désintéressés. Effectivement, le programme détaillé du stage indique que, depuis le lever à 5 heures du matin jusqu’au soir, les candidats font preuve d’assiduité. De plus, nombreux sont ceux qui consignent leurs notes ou révisent jusqu’à 23 heures. En l’espace de deux semaines, les aspirants-entraîneurs effectuent presque l’équivalent de ce qui s’accomplit en un mois de travail pour de nombreuses professions. Le diplôme d’entraîneur ne se donne pas, il se mérite par l’effort : telle en est l’image que diffuse invariablement la presse depuis 1941. Si la Libération met fin à certaines orientations impulsées par le Commissariat à l’EGS, néanmoins la FFF, consciente du bien-fondé des stages d’entraîneur, notamment en vue de pallier les déficits en matière d’encadrement, décide de les pérenniser dès 1945 et de les perpétuer en l’état.

14Depuis 1947, l’examen de fin de stage consiste en deux types d’épreuves [46] : des questions écrites portant sur les lois du jeu, l’alimentation et les soins, la technique ; et des questions pratiques constituées d’entretiens oraux, parfois agrémentés d’une démonstration simultanée sur le terrain, en technique, tactique, éducation physique et note de l’instructeur.

15Un total de 140 points, soit une moyenne de 14/20, est nécessaire pour obtenir le diplôme d’entraîneur fédéral qui permet de diriger une équipe professionnelle. La part attribuée à la technique favorise les anciens joueurs professionnels dans la mesure où elle permet d’attribuer plus de deux tiers du total des points. D’autre part, les notes de l’instructeur, comptant pour 1/8e de la note finale, permettent de réguler les comportements des aspirants-entraîneurs qui, en conséquence, ne peuvent se permettre de faire preuve d’insouciance ou de dilettantisme face à des encadrants eux-mêmes irréprochables. Cette moralité des chefs, constituant une des conditions politiques de l’efficacité [47], s’accorde parfaitement avec les exigences du stage. Le joueur et futur entraîneur « Kader Firoud [48] nous disait combien il avait été surpris par la difficulté physique des épreuves. Seuls triomphent finalement des hommes parfaitement équilibrés physiquement et moralement [49] ». La répartition harmonieuse entre qualités physiques et morales serait donc une garantie de la formation des entraîneurs, en mesure de se montrer à leur tour exigeants envers les joueurs qu’ils dirigeront plus tard.

16Dès 1948, le stage national d’entraîneur trouve son rythme de croisière, perceptible à l’examen de ses contenus, dont la quantité a largement augmenté par rapport au stage originel de 1942. Les horaires très matinaux de lever sont adoptés pour des décennies. Les parties techniques et tactiques sont assurées par des instructeurs experts, qui eux-mêmes, en tant qu’anciens lauréats, reproduisent les expériences qu’ils ont vécues en ces mêmes lieux et dans des conditions similaires. Ainsi, alors que le stage de 1948 est dirigé par Gabriel Hanot, ce dernier est secondé par Jules Vandooren, Edmond Delfour, Henri Roessler, Lucien Jasseron, Jean Prouff, André Kuster, André Riou, Boussiron, Camille Cottin, Albert Batteux, Paul Baron et Helenio Herrera. La plupart d’entre eux sont non seulement des lauréats récents du stage national [50], mais également des entraîneurs d’équipes professionnelles en activité. En ce sens se met en place une forme tangible d’endogamie professionnelle [51], puisque ces formateurs ont à évaluer, donc à sélectionner et recruter leurs futurs collègues.

II – L’Amicale, un espace identitaire pour les entraîneurs

17Dès sa création en 1947, l’Amicale des entraîneurs diffuse auprès de la presse l’image d’un stage national d’entraîneurs sévère et rigoureux. La fondation de cette Amicale s’est avérée une nécessité, car, de 1942 à 1947, 122 candidats ont obtenu leur diplôme d’entraîneur-instructeur [52]. Ce nombre chaque année croissant a incité certains d’entre eux à vouloir s’unir pour assurer la protection de la profession. Le choix de se constituer en amicale et non en syndicat est lié à la volonté de ne pas se couper de l’administration et des autorités hiérarchiques [53]. De surcroît, les vagues de grèves de l’année 1947, supportées notamment par la CGT, ont conduit à évincer ce syndicat de nombreuses institutions sociales [54]. Les fondateurs de l’Amicale ont à l’esprit cette scission qu’ils espèrent éviter. Le premier bulletin de l’Amicale, qui paraît en octobre 1947, montre que l’association reçoit une caution morale des autorités du football. Son président d’honneur est en effet Jules Rimet, président de la FFF, alors que parmi ses membres d’honneur figurent Emmanuel Gambadella et Henri Delaunay, respectivement vice-président et secrétaire général de la FFF, ainsi que Raymond Herlory, président du club professionnel du FC Metz. La ligne de conduite initiale de l’Amicale des entraîneurs semble donc s’inscrire dans une logique de dialogue plus que de conflit. L’enjeu pour les entraîneurs français est de faire reconnaître leur profession. Selon C. Dubar et P. Tripier [55], la signification française du terme « profession » recouvre quatre points de vue : elle s’entend comme quelque chose qui s’énonce publiquement ; elle est liée à une déclaration de foi (ici, c’est l’allégeance à l’Amicale qui fait office de profession de foi et constitue le ferment d’une identité professionnelle revendiquée) ; elle est le travail qu’on exécute lorsqu’il permet d’en vivre ; enfin, elle correspond à une fonction ou à une position professionnelle dans un organigramme. On peut donc considérer que répondant désormais à ces quatre impératifs, les entraîneurs français de football viennent de poser les bases de leur profession, qu’ils espèrent solides.

18Les objectifs premiers de l’Amicale s’accordent avec ceux de la FFF, puisqu’il s’agit de contribuer à la promotion du football français. Dès 1948, sous l’influence de Gabriel Hanot [56], la FFF délègue d’ailleurs à l’Amicale l’organisation des stages nationaux d’entraîneurs [57], ce qui lui permet d’inculquer aux candidats ses propres idéaux tout en procédant à des mesures de protection d’une profession relativement nouvelle. De ce fait, elle s’octroie le monopole de la formation des cadres dans le football français. Le stage national représente bien un espace d’identification qui permet à tous les entraîneurs de bénéficier d’une culture commune, d’un référent commun [58], mais également de justifier l’acquisition de compétences particulières que ne possèdent pas nécessairement les éducateurs dans les autres sports. En corrélation avec l’Amicale, il devient un élément clé de la construction identitaire [59] de la profession d’entraîneur, mais aussi de son identification par les autres familles du football (joueurs, dirigeants, journalistes, supporters…) ainsi que par l’opinion publique.

19Le diplôme d’entraîneur représente le sésame qui permet un engagement affinitaire au sein de l’Amicale. Dès sa création en 1947, l’Amicale enregistre 200 adhésions [60]. Une des premières actions concrètes consiste à militer pour que seuls puissent exercer dans les clubs les entraîneurs munis d’un diplôme en bonne et due forme, délivré par la FFF. Lucien Perpère [61] écrit : « Défendre notre métier ! […] Mais il nous reste surtout une tâche très urgente : éliminer une foule de parasites et de mauvais sujets qui jettent sur notre métier un discrédit considérable. Beaucoup d’entraîneurs – la plupart sans diplôme – […] se sont installés à des postes dont ils ne briguent que les avantages et pas les devoirs [62]. » Sans doute, les éléments discursifs employés par Lucien Perpère témoignent-ils des relents de la période d’épuration qui a suivi l’Occupation. Si elle a perdu de son intensité, elle est assimilée à une justice populaire jusqu’en 1947 au moins [63]. Ici, l’entraîneur de football parasite et mauvais sujet est donc avant tout celui qui n’a pas suivi le stage national et ne songe qu’à son profit personnel.

20Un des premiers acquis de l’Amicale est d’obtenir de la part de la FFF qu’elle oblige les clubs ayant bénéficié de dérogations à régulariser leur situation en envoyant les entraîneurs mis en cause suivre le stage national en fin de saison [64]. L’association remplit davantage le rôle d’un syndicat que d’une amicale en exploitant les liens qu’elle a initiés et entretenus avec la FFF et le Groupement des clubs professionnels. Elle joue en quelque sorte un rôle de contre-pouvoir par rapport à la FFF, dont la priorité concerne davantage le statut des joueurs que celui des entraîneurs. L’Amicale s’arroge ainsi un droit de regard et de contrôle sur l’ensemble de l’encadrement du football français dont les effectifs ne cessent de croître. À la date de 1953, plus de 600 contrats d’entraîneurs sont enregistrés par la FFF.

III – La pérennisation de valeurs : 1956-1991

a – Georges Boulogne ou la lutte incessante pour la promotion du football

21Afin de respecter cette ligne directrice, l’Amicale adopte progressivement des positions plus radicales à partir de 1956. Ce durcissement correspond à l’élection de son nouveau secrétaire général, Georges Boulogne. Il se lance dans un virulent processus de promotion et de défense du football français et de ses éducateurs, avec la conviction que ce rôle incombe au premier chef aux entraîneurs eux-mêmes. Georges Boulogne se charge, dès 1956, d’opérer une sélection de ses collaborateurs au motif qu’« un petit nombre s’est imposé tant par la somme de leurs aptitudes (intellectuelles, morales, techniques, pédagogiques), que par leur conviction et leur autorité : ils constituent la base permanente de l’encadrement des stages ; leur présence dans les cadres n’est pas une question de chance ou de piston, mais la reconnaissance de leur valeur [65] ». Sans préciser en quoi consistent réellement les aptitudes qu’il identifie, Georges Boulogne défend les principes d’une cooptation de techniciens adhérant à des valeurs identiques ainsi qu’à des convictions communes. Deux éléments éclairent sa prise de position : tout d’abord, un des buts accessoires d’une amicale est de procurer à ses dirigeants des avancées ou d’autres avantages [66], ici symbolisés par une désignation pour encadrer les stages nationaux ; ensuite, les adhérents constituent une communauté d’hommes aux motivations profondes, unis par des liens moraux qui partagent des valeurs communes. Il s’agit avant tout de placer le football au-dessus de tout, donc de prouver qu’il n’est pas un sport comme un autre et qu’il peut contribuer à la fois à la formation d’un athlète complet tout en étant un moyen d’éducation hors pair. Pour défendre ses idéaux, Georges Boulogne sait s’entourer d’hommes fidèles dévoués, certes, à la cause du football, mais également au soutien indéfectible de sa propre personne. À la lecture de ces constats, il semble évident qu’un entraîneur n’appartenant pas à l’Amicale aura bien des peines à prétendre bénéficier du même traitement que celui accordé à ses membres. À l’inverse, le membre de l’Amicale sera tenté de respecter des principes de conformité, voire de soumission, afin de s’astreindre aux valeurs et usages de son organisation, destinés à perpétuer un fonctionnement qui le gratifie en retour. Ces formes d’obéissance contribuent à garantir la cohésion professionnelle d’une profession d’entraîneur encore émergente autour de leur activité [67].

Portrait de Georges Boulogne (1917-1999)

Georges Boulogne est né en 1917. Il joue dans les équipes de jeunes, puis d’amateurs du club d’Amboise, sans accomplir de carrière professionnelle. Il devient instituteur, mais enseigne l’éducation physique et sportive au collège de la ville d’Amboise dont il entraîne conjointement le club amateur qui évolue alors en Division d’honneur. En 1948, il quitte l’enseignement pour entraîner des clubs amateurs dans l’est de la France ou en Belgique. Très influencé par Gabriel Hanot, qui a été son instructeur lors du stage national d’entraîneurs dont il a été lauréat en 1943, il est l’un des 73 membres fondateurs de l’Amicale des éducateurs en 1947. Son passé d’instituteur lui apporte une certaine considération de la part de ses pairs, lesquels ne peuvent souvent revendiquer des diplômes équivalents. C’est une des raisons pour lesquelles il obtient le poste de secrétaire national de l’Amicale en 1956, en même temps qu’il en devient la cheville ouvrière. Son amour immodéré du ballon rond le conduit à adopter des prises de position intransigeantes dans le but de le promouvoir. En 1958, grâce à sa ténacité, il est nommé instructeur national au sein de la FFF (l’équivalent du directeur technique national actuel). Sa mission consiste à définir une méthode d’entraînement et un plan d’application de cette méthode[68]. De fait, c’est au cours des stages nationaux de formation d’entraîneurs, dont il a désormais la charge, qu’il tente de définir cette méthode. Auparavant, il a été sélectionneur et entraîneur de l’équipe de France Amateurs entre 1956 et 1958. Il s’appuie sur des entraîneurs qui lui sont fidèles et qu’il nomme instructeurs nationaux pour le seconder : Lucien Jasseron, Robert Domergue, mais surtout Gaby Robert, Henri Guérin, Jacky Braun. Avec son cercle de très proches collaborateurs, il se montre plus volontiers affable et jovial, indulgent et généreux[69]. Il est influencé par L’homme, cet inconnu, écrit par l’eugéniste Alexis Carrel, qui devient pour lui un ouvrage de référence dans sa façon de traiter l’adaptation de l’organisme humain à l’effort[70]. Cela accrédite son penchant pour la détection de l’excellence et la sélection des élites, qu’il cherchera à développer tout au long de son existence, tout autant que son goût de la polémique. En effet, la mention à Alexis Carrel ne peut être neutre, puisque ce dernier théorisa un eugénisme – positif et négatif – devant permettre l’éclosion et le maintien d’une élite sociale, théorie, selon plusieurs historiens[71], proche par certains aspects du nazisme. Georges Boulogne se juge lui-même comme un homme sinon froid, du moins calme et réservé. « Je suis technicien, donc attaché aux réalités et peu attiré par les exagérations, aussi bien dans le rose que dans le noir. »[72] Il prend ensuite en mains l’équipe de France B, puis l’équipe de France juniors, avec laquelle il obtient des résultats honorables. Il est donc enfin choisi comme sélectionneur de l’équipe de France A, à une période où l’ensemble du football français est en crise et où les candidats à ce poste ne sont pas légion. Mais malgré quelques résultats positifs, il ne parvient pas à qualifier l’équipe de France pour les grandes échéances que sont le Championnat d’Europe des nations en 1972 et la Coupe du Monde en 1974. Il est souvent éreinté par la critique qui lui fait payer son manque de ménagement vis-à-vis de la presse[73]. Il doit donc laisser sa place au Roumain Stefan Kovacs en mai 1973. Mais Georges Boulogne conserve le poste de DTN qu’il a obtenu en 1970. Il travaille avec encore davantage d’acharnement à la cause du football français et fait renaître L’Entraîneur français qui avait suspendu sa publication durant les années où il était accaparé par son poste de sélectionneur. Il est le principal pourvoyeur du mensuel, rédigeant de longs éditos souvent pamphlétaires, des articles de fond qui témoignent d’une certaine culture générale. Il recherche sans cesse à appuyer ses argumentations sur des articles scientifiques ou pédagogiques qu’il fait reproduire en l’état, ou plus rarement après les avoir fait vulgariser.
Son mérite est reconnu dans les négociations préliminaires, puis dans la rédaction de la Charte du football professionnel de 1973. À cette occasion, c’est son action qui a permis la création du système de « formation à la française ». Il a également veillé à faire inscrire dans la Charte toutes les dispositions relatives au statut des entraîneurs, afin d’en assurer la protection. Il exerce aussi une grande influence sur ses successeurs à la DTN, Michel Hidalgo, puis Aimé Jacquet et Roger Lemerre[74]. Jusqu’à la fin de sa vie, même après sa retraite en 1982, il occupe des fonctions à la tête du football français : il est conjointement secrétaire de l’Amicale et de l’Unecatef[75] jusqu’à sa mort en 1999. Tous les jours jusqu’à son décès, il vient occuper des heures durant le petit bureau qu’il possède encore au siège de la FFF[76]. Sa mort est passée quasiment inaperçue, probablement en grande partie en raison de sa propension à se mettre à dos une grande partie de la presse, du fait de son caractère entier. Cependant, il reste respecté de nombreux entraîneurs, notamment ceux qu’il a formés, comme Robert Herbin, ainsi que par des journalistes qui ont eu l’occasion de le côtoyer davantage lors de certains entretiens, comme Jean-Philippe Rhétacker[77].

22À partir de 1958, sous l’impulsion de Georges Boulogne, sont introduites de surcroît des analyses tactiques jusqu’alors inédites : la FFF dépêche à chaque grande compétition, telle que la Coupe du Monde de football, une délégation d’observateurs chargée de disséquer le jeu des meilleures équipes et d’en définir les principes d’efficacité. Le stage national fait donc bénéficier les futurs entraîneurs de ces apports nouveaux : les sélections du Brésil (1958-1970) ou de l’Allemagne (années 1970) constituent ainsi des modèles de référence pour Georges Boulogne et ses adjoints.

23La dureté du stage est souhaitée, voire érigée en principe, par ses organisateurs administratifs et par les instructeurs qui en sont la cheville ouvrière. Ces derniers sont tous, sans exception, membres de l’Amicale et souvent même de son bureau directeur depuis sa création. De ce fait, l’ensemble des instructeurs et, à travers eux l’Amicale, garantissent l’absence de passe-droits, car le diplôme ne peut s’obtenir que par l’abnégation et le travail. Ces nouveaux entraîneurs sont, à l’instar des joueurs qu’ils auront à diriger par la suite, des exécutants qui subissent et acceptent les modalités de passage selon des procédures précisément définies.

24Plus que jamais, les entraîneurs qui encadrent les joueurs dans les équipes françaises sont sommés de se montrer rigoureux afin de valoriser l’image du football. En effet, le professionnalisme en France n’est toujours pas considéré comme une affaire sérieuse à la fin des années 1950, pas plus que les joueurs professionnels ne sont perçus comme des travailleurs. Ces derniers ne sont d’ailleurs pas eux-mêmes convaincus que leur profession est un véritable métier [78]. France Football publie une enquête au titre évocateur, « Nos footballeurs : athlètes ou bourgeois [79] ? », qui met en doute la quantité et la qualité de l’entraînement des footballeurs professionnels ; ils sont accusés de s’embourgeoiser, c’est-à-dire de se comporter comme des privilégiés. Dans les représentations des journalistes, le bourgeois ne se dépense pas au travail, surtout de manière physique. Dans une France qui voit apparaître de « nouvelles classes moyennes » au côté des classes moyennes [80], qui est invitée à prendre en compte l’importance d’un loisir de masse remodelant les attitudes traditionnelles des hommes des sociétés industrialisées [81], il n’est guère étonnant que le rythme de travail des footballeurs professionnels, inférieur à deux heures trente quotidiennes en moyenne [82], questionne la presse sportive. La notion d’effort, dans le sens d’une dépense énergétique soutenue qui oblige à puiser dans ses ressources physiques et mentales, est trop étrangère aux habitudes prises par les footballeurs français en matière d’entraînement dans un contexte où les Français mènent une vie plus facile [83]. Et c’est paradoxalement tout le rôle des entraîneurs formés à l’école du stage national que de s’atteler à inculquer la rigueur, alors que leurs compatriotes aspirent à organiser leurs loisirs. De surcroît, le football français n’est pas encore porteur en termes de résultats internationaux. Il doit convaincre la télévision qu’il est digne d’être diffusé, bien avant qu’il ne devienne un produit d’appel pour les chaînes de télévision sportives ou thématiques [84], après la création de Canal+ en 1984. En ce sens, puisque des années 1950 aux années 1970 le football n’a pas encore administré la preuve qu’il est télégénique, du moins lui faut-il convaincre qu’il véhicule des valeurs qui le rendent digne d’intérêt.

25Plusieurs générations d’entraîneurs confirment le côté éprouvant du stage. Ainsi, René Hauss [85] affirme-t-il : « Nous travaillons ici comme des bûcherons depuis deux semaines [86]. » Les témoignages de Pierre Cahuzac [87] ou Arnold Sowinski [88] appuient ces propos. À ce titre, en s’appropriant et en intégrant des valeurs liées au travail, les entraîneurs se situent socialement en référence à leur groupe professionnel, qui devient constitutif du sentiment d’appartenance, doublé de sentiments de compétence et d’efficacité [89]. Corrélativement, le stage se targue de revêtir une sévérité réelle : à titre d’exemple, 4 candidats sur 74 en 1958 réussissent l’examen d’entraîneur-instructeur donnant le droit d’entraîner une équipe professionnelle. Par le biais de cette rigueur, la « famille [90] » des entraîneurs de football accentue et valorise l’image positive qu’elle donne de la profession jusqu’à la fin des années 1950.

26Dès 1956, la militance de Georges Boulogne, non seulement au sein de l’Amicale, mais dans tout le football français, conduit à un procès de personnalisation : il s’érige en porte-parole des entraîneurs. Ces derniers, qui ne partagent pas sa philosophie, se gardent d’afficher trop visiblement leurs divergences de peur de se voir interdire l’accès à certains postes dans les équipes professionnelles [91]. Par contre, puisque ses principes ne s’écartent pas de la voie dans laquelle s’est engagée l’Amicale, Georges Boulogne continue à mettre à profit les stages nationaux pour accréditer l’image de rigueur qu’il cherche à diffuser. « Demain, réveil à 5 h 45. Le football français “s’embourgeoise”, amis de la presse sportive et d’information : autrefois c’est à 5 h 30 que Jules Vandooren conduisait d’un pas allègre ses disciples vers le stade où Hébert professa [92]. »

27L’ironie perceptible dans les propos d’Achille Duchenne [93] se double néanmoins de la satisfaction de décrire des stagiaires qui n’ont pas peur d’affronter un réveil matinal à l’heure où de nombreux Français dorment encore, travailleurs, mais surtout vacanciers. La forme choisie pour l’organisation du stage ne diffère pas de celle en vigueur dès 1942. La formation reste éprouvante.

b – Promouvoir l’effort et le mérite grâce à la famille des entraîneurs

28Ce terme de famille, auquel tiennent les entraîneurs, renvoie d’un point de vue ethnologique à des principes de solidarité [94] et de construction de l’identité individualisée [95]. Les dirigeants de l’Amicale, notamment Georges Boulogne, se situent au carrefour de ces différentes conceptions. Ainsi, pour ce dernier, « l’entraîneur a servi le football au cours d’une longue carrière de joueur ; il a suivi les stages et subi les examens imposés par la FFF ; il fait partie de la Maison-Football [96] ». En dotant le stage d’une sévérité et d’une discipline exemplaires, les responsables de l’Amicale fournissent aux yeux des autres familles du football les gages de la crédibilité de la formation dispensée et contribuent à sa propre promotion [97].

29En somme, la tâche des initiateurs du stage national, qui est d’inculquer à leurs futurs collègues les bases de l’enseignement du football, se double d’une mission de propagande :

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« […] tous deviendront les éducateurs qualifiés qui œuvreront demain pour la religion du football [98] ». Car c’est bien de la célébration du football dans son ensemble qu’il est question. Les instructeurs sont les véritables prosélytes du football en France dans les années 1940 et 1950, comme ont pu l’être dans les années 1920 et 1930 les journalistes anciens pratiquants [99]. Et dans les années 1940 et 1950, la compétence de l’encadrement se mesure par l’investissement au travail et par la rigueur affichée et revendiquée.

31Trois semaines [100] représentent un laps de temps très court pour délivrer des enseignements dans des matières variées et jusque-là inconnues de nombreux candidats : notions d’entraînement, de sécurité, de soins, anatomie, physiologie, technique, tactique, psychopédagogie… Ces matières dispensées de façon théorique se doublent de séances de culture physique dès le lever et de pratique plusieurs fois dans la journée. De ce fait, il est indispensable d’allonger la durée potentielle des plages de travail disponibles, en particulier en programmant un lever très matinal.

32D’autre part, les dirigeants du stage ont parfaitement conscience que la presse nationale sportive accorde chaque année, durant les mois creux d’été (ceux dépourvus de compétition officielle), une place assez conséquente à la couverture du stage national [101], des années 1940 aux années 1970 notamment. Il importe donc que ce moment singulier constitue une vitrine aux yeux non seulement des pratiquants de football, mais également de tout le mouvement sportif français. Obliger le candidat à aller au bout de lui-même, c’est donner aux journalistes et donc aux lecteurs la certitude que le stagiaire qui aura triomphé de ces trois semaines d’épreuves sans temps mort sera vraiment digne de sa nouvelle fonction : « …Il a suivi le sévère stage national et suivi un examen auquel son exceptionnelle intensité confère le sens d’une véritable initiation [102]. » L’obtention du diplôme est bien un rite de passage [103] qui confirme le droit d’appartenance à la famille du football et le droit d’entrée dans celle bien plus restreinte des entraîneurs. Elle s’accompagne d’un changement de position sociale et même de lieu et d’état, puisque l’ancien footballeur en action au centre du terrain, se contentant d’appliquer des consignes de jeu, cède la place à un directeur de jeu responsable de l’organisation depuis le bord de la touche.

33Souffrir durant le stage, se taire et s’accrocher, induisent une volonté d’appartenance à la nouvelle communauté qu’intègre le stagiaire : celle des entraîneurs. En effet, le stage est à la fois le lieu et le moment où les futurs entraîneurs, ainsi que leurs instructeurs, tissent des interrelations qui participent à la construction du sentiment identitaire autour de leur profession [104]. Les lauréats sont les produits de ce système dur, mais impartial. Ainsi, un candidat blessé est éliminé systématiquement de l’examen final, car aucune dispense n’est accordée. Cette exemplarité est perceptible dans le refus de Georges Boulogne d’accorder à Robert Herbin, international de l’AS Saint-Étienne, la permission de quitter le stage pour disputer la dernière rencontre de championnat de France de Division 1 en juin 1971 alors que le club forézien est en passe de décrocher le titre de champion. En déniant à Robert Herbin le droit de s’absenter durant 24 heures [105], Georges Boulogne fait preuve d’une intransigeance destinée à délivrer un message envers les autorités nationales : depuis 1966 le titre d’entraîneur n’est plus un diplôme délivré par la Fédération, mais un Brevet d’État d’éducateur sportif (BEES). Son attitude démontre l’impartialité des dirigeants du football dans l’attribution de ce BEES, et les stagiaires y trouvent une manifestation supplémentaire de l’autorité à laquelle ils doivent se soumettre.

34Obtenir le diplôme, dans l’esprit de Georges Boulogne et des instructeurs nationaux, certifie que le nouvel entraîneur est allé au bout de lui-même, qu’il sera donc digne de la fonction. On lui a martelé des valeurs qu’il pourra à son tour dispenser. Comme le reconnaît Georges Boulogne lui-même, « le côté militant, qui a été développé tout au long du stage, a frappé les stagiaires [106] ». Dans le contexte d’un football français qui souffre encore de son amateurisme dans les années 1970, le stage se veut un palliatif des insuffisances perceptibles dans la formation des joueurs. Il est nécessaire de faire émerger une future élite de footballeurs, notamment grâce à la création des centres de formation en 1973, qui seront dirigés par des encadrants bien formés [107]. Depuis le milieu des années 1970, aussi bien dans les centres de formation qu’au niveau professionnel, l’accent est donc mis sur la quantité de travail fourni, mais aussi sur la discipline et l’habitude au travail.

35Il faut se rappeler que les entraîneurs qui dirigent ces centres adoptent le modèle à partir duquel eux-mêmes ont été formés « à la dure école du stage national. […] Ce qui attire indiscutablement le regard, c’est cette immense cohorte, d’une centaine d’hommes de 30 à 40 ans, portant survêtement et sacs de sports, et qui, de 6 heures à 21 heures, se déplace en rangs serrés [108] ». Alfred Wahl compare également l’organisation du stage à la vie militaire [109]. Et effectivement, les uniformes, les déplacements, les lieux revêtent tous une signification, symbolique ou réelle. Sont inculqués l’ordre, l’obligation de réserve envers les instructeurs, de respect envers les pairs, c’est-à-dire des valeurs qui ont toujours constitué des leitmotivs de Georges Boulogne [110]. Et dans la mesure où seuls les entraîneurs diplômés du stage national sont admis au sein de l’Amicale, ces hommes cooptés observent des règles qui, comme dans toute profession, leur permettent d’assurer le monopole de leur activité [111]. La mainmise de la DTN créée en 1970, avec à sa tête Georges Boulogne ayant utilisé l’appui de l’Amicale pour supplanter les autres candidats [112], contribue à amplifier cette recherche de création d’une identité professionnelle par la pratique de l’entre-soi, qui lui apporte cohésion et recherche de stabilité [113].

c – Resserrer les liens dans la famille : se soumettre à l’intérêt collectif

36Avec l’emprise plus forte exercée par Georges Boulogne sur l’organisation du stage à partir de 1958, le poids du jugement de l’instructeur s’accroît dans l’examen terminal. Il attribue en 1961 neuf coefficients sur un total de trente, soit presque un tiers de la note finale. La prise en compte de la carrière antérieure du joueur est plus marquée, car non seulement le candidat se voit attribuer une note en fonction de son niveau de pratique, mais, de surcroît, une note globale de carrière lui est affectée [114]. Cette mesure est destinée à favoriser les anciens professionnels. L’Amicale des entraîneurs est persuadée que le « prestige des chefs [115] », en tant que futurs entraîneurs, est davantage subordonné à leur passé de pratiquants de haut niveau qu’à leurs qualités de pédagogues. L’instructeur est également invité à sanctionner l’assiduité du stagiaire, sa ponctualité et son rayonnement. Ce dernier est implicitement incité à faire preuve de subordination auprès de sa hiérarchie provisoire. En effet, celle-ci a pour fonction d’utiliser « des sanctions » ou de « ramener sur des positions correctes tout membre de l’équipe dont la représentation s’éloigne de la ligne adoptée » [116]. Dans les notes d’examen, la technique (6) et l’éducation physique (4) attribuent dix coefficients sur un total de dix-neuf, alors que l’épreuve « problème d’entraînement » n’en affecte que deux. Les candidats lauréats du diplôme d’entraîneur fédéral, qui ont obtenu une moyenne supérieure à 14/20, subissent à l’issue d’une semaine de stage supplémentaire de nouveaux contrôles de connaissances. Ces nouvelles épreuves se subdivisent à coefficient égal entre pédagogie, examen écrit, technique et tactique [117].

37Comme lors des années 1940, la faible proportion des épreuves écrites répond à une double logique : la volonté de faire subir aux candidats des examens pratiques en rapport avec la réalité du terrain, mais également la prise en compte du niveau de fin d’études modeste de la plupart des candidats [118]. De ce fait, les dirigeants du stage s’assurent ainsi qu’ils ne privilégieront pas, par exemple, les professeurs d’éducation physique [119], davantage rompus à l’exercice de l’expression écrite au cours de leurs études, au détriment des footballeurs de métier et notamment des anciens professionnels. Il convient de rester « en famille ».

38En définitive, si l’examen est effectué par les instructeurs, un avantage psychologique en ressort pour le candidat, car il n’a pas à affronter un jury inconnu. En revanche, le poids laissé au jugement de l’examinateur ne peut manquer de déterminer certains types de stratégies et de calculs. En effet, dans la mesure où les instructeurs ont à évaluer des attitudes et des comportements, et à les sanctionner de manière non négligeable dans l’évaluation finale, le stagiaire a tout intérêt à donner son agrément aux orientations choisies par le directeur du stage et ses adjoints, à acquiescer aux décisions en toute circonstance, donc à se conformer à une « obéissance idéale » du point de vue de la hiérarchie [120]. En résumé, plusieurs procédures mises en place – que ce soit la forme des examens ou la part d’évaluation par les instructeurs –, tendent à renforcer le caractère endogame du recrutement des entraîneurs.

39Au début des années 1970, le stage constitue toujours une référence incontournable. Après la retraite de Georges Boulogne et en dépit du changement de dénomination des stages, ses successeurs à la DTN persisteront à en préserver les exigences et le caractère ascétique. « C’est que le stage préparatoire au brevet d’État du deuxième degré reste, aujourd’hui comme jadis, une sacrée épreuve physique et mentale [121]. » Finalement, malgré un passage de témoin entre générations, les traditions se perpétuent quant à la forme. Certes, les contenus du stage de 1990 se sont diversifiés et correspondent à des préoccupations qui lui sont contemporaines : individualisation de l’entraînement, jeu au poste… Mais le cadre de la journée type, depuis la première séance d’entraînement journalière programmée à 6 h 30 à la dernière séquence sur le terrain à 19 heures, est resté similaire. Quantité importante de travail et intensité élevée sont toujours des valeurs de base pour les encadrants. Obéissance, abnégation, altruisme, résistance et volonté demeurent les vertus exigées des stagiaires. Ces qualités leur sont inculquées par les cadres techniques de la FFF, dont les principaux deviennent membres de la DTN à partir de 1970. Ils espèrent qu’à leur tour les stagiaires transmettront le flambeau à leurs joueurs. Cette vision présuppose que l’implication dans le travail engendrera l’attachement et l’appropriation [122], vecteur essentiel, selon l’institution football, de la perpétuation d’une formation performante. En fait, bien que le stage soit classé dans les Brevets d’État depuis 1963, donc sous tutelle de l’état, son fonctionnement reste autonome et très spécifique au football. Il reste un élément fondamental dans la constitution d’un groupe professionnel, puisqu’il permet aux nouveaux entraîneurs d’intégrer une profession séparée, unifiée, établie ou objective[123]. En partie grâce à lui, la profession des entraîneurs, bien spécifique, doit renvoyer au public des valeurs différentes de celles véhiculées par la « famille » des joueurs.

Conclusion

40De l’attribution du diplôme de joueur-moniteur en 1942 à celle du Diplôme d’entraîneur national de football (DEPF) instauré en 1991, le stage d’entraîneurs professionnels de football a permis la création, puis la pérennisation d’un encadrement de qualité, d’ailleurs reconnu comme tel hors des frontières hexagonales [124]. Il constitue la première étape, décisive, de l’institutionnalisation de la profession [125] d’entraîneur. Si la tutelle autoritaire de la FFF s’est imposée dans le cadre du régime de Vichy dès 1941, elle a cédé le relais à des structures telles que l’Amicale des entraîneurs, puis la DTN, mais également à des hommes comme les instructeurs nationaux, menés par l’emblématique Georges Boulogne. Ce dernier a imprimé durablement sa marque dans la forme et les contenus du stage. Grâce aux modalités et aux procédures d’examen, dont la permanence n’est pas contestable, il a pu procéder à un réel balisage des compétences attendues à destination des futurs lauréats. Mais son action a également participé de la naissance d’une profession gouvernée, au moins jusqu’en 1991, par un fort sentiment d’appartenance amplifié par le perpétuel recrutement de type endogamique. Celui-ci, qui constitue un indice de la force des identités de groupe [126], s’opère dès les années 1940 et se concrétise par l’adhésion à l’Amicale. Durant toute la période concernée, la principale évolution réside dans les contenus des stages, qui se sont diversifiés pour répondre aux évolutions notables de la profession d’entraîneur. Depuis 1991, le DEPF s’est d’ailleurs attaché à exacerber cette révision permanente des contenus [127]. Par son entremise, la DTN a mis en place des conditions qui doivent lui permettre à la fois d’améliorer la formation spécifique des entraîneurs de haut niveau [128], mais également de se prémunir de l’arrivée de non-footballeurs, titulaires du 3e degré du Brevet d’État obtenu dans une autre spécialité sportive par exemple. Il devient très difficile aux candidats qui n’ont pas connu une carrière remarquée de footballeur professionnel d’accéder à ce diplôme, ce qui contribue à perpétuer une endogamie souvent niée par les cadres de la DTN, mais perceptible dès l’institutionnalisation des stages nationaux. Gérard Houllier [129] présente le DEPF comme plus adapté aux exigences du football professionnel que le Brevet d’État d’éducateur sportif (BEEES) à trois degrés en vigueur dans les autres fédérations sportives françaises [130]. Il existe plusieurs épreuves dans l’examen pour l’obtention du DEPF, dont une séance d’entraînement pratique à conduire sur le terrain qui se déroule devant un jury formé par les membres de la DTN. Ces derniers inculquent leurs propres principes et conceptions aux candidats tout au long des formations dispensées, ainsi que lors des stages annuels de recyclage obligatoires [131]. De ce fait, lors de l’examen, les candidats pourraient avoir tendance à proposer un entraînement susceptible de répondre aux attentes du jury, plutôt que de présenter leurs conceptions personnelles. C’est ainsi que, reprenant un terme à la mode chez les détracteurs de Georges Boulogne des années 1960 aux années 1990, certains entraîneurs professionnels, de nos jours encore, émettent des soupçons quant à l’éventualité d’un « formatage » de la part de la DTN vis-à-vis des entraîneurs qu’elle produit [132]. Surtout, il ne faut pas oublier que les exigences actuelles en matière d’encadrement des footballeurs professionnels restent assujetties à des normes d’inculcation de valeurs de travail, de soumission à l’autorité, d’obéissance qui sont martelées tout au long de leur séjour en centre de formation, voire de préformation dès l’âge de 13 ans.

41En ce sens, les entraîneurs de la période 1942-1991, qui sont pour l’immense majorité des anciens joueurs professionnels, ont davantage d’opportunité de reconduire un cadre environnemental auquel ils sont habitués. Que ce soit au cours de leur passé de joueur, avec un cursus encore plus long depuis la création des centres de formation en 1973, ou de leur formation initiale et continue d’entraîneur, on leur a inculqué des conceptions d’encadrement, certes en vigueur au sein de leur propre groupe professionnel, mais également largement acceptées par les autres familles du football français. Une des finalités reste de perpétuer l’image de marque spécifique à leur famille, en s’attachant à prouver que les entraîneurs s’inscrivent en faux contre l’image d’argent facile et de laisser-aller dans le professionnalisme en football.

Notes

  • [1]
    On compte 144 069 licenciés en 1931 et 188 864 licenciés en 1938 (Encyclopédie générale des sports et des sociétés sportives en France. 1946. Paris, Éditions artistiques et documentaires, p. 398). À titre de comparaison, en 1938, le nombre de licenciés dans d’autres fédérations est le suivant : 31 592 en athlétisme, 16 680 en natation, 23 158 en basket-ball. Quant au rugby, il compte 16 247 compétiteurs en 1942-1943.
  • [2]
    Terret Thierry. 2000. « Les modèles d’entraînement en France dans les années vingt : diversité, références scientifiques et pressions internationales », in Saint-Martin Jean-Philippe, Terret Thierry. Le sport français dans l’entre-deux-guerres. Regards croisés sur les influences étrangères, Paris, L’Harmattan, p. 145.
  • [3]
    Grün Laurent. 2010. « L’entraînement des équipes de football de haut niveau en France : de 1890 à nos jours », in Bauer Thomas, Gomet Doriane. Histoire de la performance du sportif de haut niveau, Les cahiers de l’Insep, n° 46, p. 143-154.
  • [4]
    Wahl Alfred. 1989. Les archives du football. Sport et société en France (1880-1980), Paris, Gallimard-Julliard, p. 235-238.
  • [5]
    Griffiths Charles. Football, n° 197, 5 octobre 1933.
  • [6]
    Les valeurs attribuées aux stages deviennent des leitmotivs largement diffusés dans les Bulletins de l’Amicale, et ce jusqu’en 1991 au moins. Elles sont également relayées dans la presse spécialisée, notamment France Football.
  • [7]
    Grün Laurent. 2011. Entraîneur de football : histoire d’une profession de 1890 à nos jours, thèse soutenue à l’université Claude-Bernard, Lyon 1, p. 179-197.
  • [8]
    Wahl Alfred, Lanfranchi Pierre. 1995. Les footballeurs professionnels des années trente à nos jours, Paris, Hachette, p. 27-30.
  • [9]
    Defrance Jacques. 1994. « Les activités physiques et les sports face à l’État », in Clement Jean-Paul, Defrance Jacques, Pociello Christian, Sport et Pouvoirs au xxe siècle, Grenoble, PUG, p. 41-45.
  • [10]
    Gay-Lescot Jean-Louis. 1991. Sport et éducation sous Vichy (1940-1944), Lyon, Presses universitaires.
  • [11]
    Gaston Barreau, sélectionneur de l’équipe de France de football entre 1919 et 1945, est en charge de ces stages de formation depuis 1935.
  • [12]
    Gabriel Hanot est vice-président de la FFFA, ancien joueur international et journaliste sportif réputé.
  • [13]
    L’ENEP, fondée en 1933, est le lieu de résidence des stagiaires.
  • [14]
    Le professeur Chailley-Bert, médecin physiologiste spécialiste de médecine sportive, a été le directeur de l’ENEP de 1933 à 1935 et est directeur de l’Institut régional d’éducation physique de Paris en 1941.
  • [15]
    Gay-Lescot J.-L., op. cit., p. 40-44.
  • [16]
    Charroin Pascal. 2002. « De Borotra à Pascot ou le professionnalisme sous contrôle : le cas de l’A.S. Saint-Étienne », in Arnaud Pierre, Saint-Martin Jean-Philippe, Terret Thierry, Gros Pierre. Le sport et les Français sous l’Occupation. 1940-1944, tome 1, Paris, L’Harmattan, p. 220-221.
  • [17]
    Arnaud Pierre. 2002. « 1940-1944. Vichy et le sport. Années noires ou âge d’or ? », in Arnaud Pierre, Saint-Martin Jean-Philippe, Terret Thierry, Gros Pierre, op. cit., p. 30-31.
  • [18]
    Breuil Xavier. 2004. « Vichy et le football », in Loudcher Jean-François, Vivier Christian, Dietschy Paul (dir.), Sport et idéologie, tome 2, Besançon, ACE-SHS, p. 53-61.
  • [19]
    En 1942, la Fédération française de football association devient la Fédération française de football. Dans le cadre de la Révolution nationale prônée par le maréchal Pétain, cette modification de sigle est loin d’être anodine et dénote une volonté des dirigeants de promouvoir un football « à la française ».
  • [20]
    Dr D’Encausse Philippe. 1944. Éducation physique et sous-alimentation, Paris, Henri Dangles.
  • [21]
    Gay-Lescot J.-L., op. cit., p. 31-33 et p. 147.
  • [22]
    Rapport du comité national de réflexion sur le professionnalisme, A.N., 2 AG 459.
  • [23]
    Courrier de Jean Borotra à la FFF, cité par Gay-Lescot J.-L., p. 31-33 et p. 147.
  • [24]
    Peschanski Denis. 1997. Vichy 1940-1944. Contrôle et exclusion, Bruxelles, Éditions Complexe, p. 28.
  • [25]
    Grün L., op. cit., p. 195.
  • [26]
    Ces moniteurs exercent leur métier de footballeur professionnel au cours de la saison. André Simonyi, (4 sélections entre 1942 et 1945) et Alfred Aston (31 sélections entre 1934 et 1946), tous deux joueurs du Red Star, sont des joueurs internationaux. Lucien Perpère est professionnel au Stade de Reims.
  • [27]
    Gay-Lescot J.-L., op. cit., p.145-147.
  • [28]
    Breuil X. op. cit., 57-61.
  • [29]
    Albert Batteux est sélectionné à huit reprises en équipe de France entre 1948 et 1949. Entre 1950, date de ses débuts en tant qu’entraîneur, et 1960, il remporte quatre titres de champion de France et une Coupe de France avec le Stade de Reims. Il est également finaliste de la Coupe d’Europe des clubs champions en 1956 et 1959. Au terme de sa carrière d’entraîneur en 1972, son palmarès comporte sept titres supplémentaires remportés avec l’A.S. Saint-Étienne : cinq championnats et deux coupes de France. Il est considéré par les spécialistes comme l’un des plus grands entraîneurs français de tous les temps.
  • [30]
    Le diplôme d’entraîneur-instructeur est le degré supérieur du diplôme d’entraîneur. À partir de 1945, c’est ce titre qui devient obligatoire pour entraîner une équipe professionnelle.
  • [31]
    Dix-sept joueurs obtiennent le diplôme en 1943, et trois seulement en 1944. En effet, l’initiative de Jep Pascot, qui crée des équipes fédérales en lieu et place des clubs professionnels pour la saison 1943-1944, contribue également à décourager les joueurs professionnels.
  • [32]
    Pierre Flamion entraînera entre 1957 et 1993, notamment à Metz et Troyes. Henri Roessler entraînera Reims de 1945 à 1950 et Marseille de 1950 à 1954, et obtiendra plusieurs titres nationaux, championnat et Coupe de France.
  • [33]
    « L’attentisme, un produit de Vichy ». Cette formule est empruntée à Laborie Pierre. 2001. L’opinion française sous Vichy. Les Français et la crise d’identité nationale. 1936-1944, Paris, Seuil, p. 296.
  • [34]
    La presse relate parfois ce genre d’attitude, par exemple L’Auto, n° 15412, 10 mai 1943 ; ou encore Football, n° 633, 8 juin 1944.
  • [35]
    En 1936, Maurice Pefferkorn écrit ainsi : « Et combien parmi ceux qui ont aujourd’hui en France, l’étiquette de joueurs professionnels, le sont-ils vraiment ? Combien […] ont conscience des devoirs et des disciplines qu’elle impose ? » Football n° 328, 29 avril 1936. Deux années plus tard, Gabriel Hanot confirme cet avis : « Il est indispensable que nos joueurs soient vraiment des professionnels totalement, intégralement. Leur place n’est pas dans le lit de la grasse matinée, ni autour de la table de la belote, mais au stade, matin et soir, comme en Angleterre. » Football, n° 439, 15 juin 1938.
  • [36]
    Jusqu’aux années 1970 au moins, selon Faure Jean-Michel, Suaud Charles. 1999. Le football professionnel à la française. Paris, PUF, 262 p.
  • [37]
    Wahl A., Lanfranchi P., op. cit.
  • [38]
    Rappelons que, jusqu’en 1940, le stage national ne délivre pas de diplôme officiel.
  • [39]
    Miroir Sprint, n° 13, 19 août 1946. En raison de cette indiscipline qu’il a du mal à réprimer chez ses joueurs, Jules Vandooren préfère ne pas renouveler son contrat pour la saison suivante.
  • [40]
    Le terme est emprunté à Walh A., op. cit., p. 297.
  • [41]
    Rioux Jean-Pierre. 1980. La France de la quatrième République. L’ardeur et la nécessité. 1944-1952, tome 1, Paris, Seuil, p. 68-97.
  • [42]
    Ibid., p. 77-97.
  • [43]
    Pefferkorn Maurice. 1947. France Football officiel, n° 64, 24 avril.
  • [44]
    L’Auto, n° 14762, 16 juillet 1941 ; L’Auto, n° 14771, 26 juillet 1941.
  • [45]
    France Football, n° 120, 7 juillet 1948.
  • [46]
    La répartition des points attribués se décompose ainsi : questions écrites sur les lois du jeu, l’alimentation, les soins, la technique : 30/200 ; oraux et démonstration pratique en technique : 70/200 ; oraux et démonstration pratique en tactique : 45/200 ; oraux et démonstration pratique en éducation physique : 30/200 ; note de l’instructeur : 25/200.
  • [47]
    Cohen Yves. 2001. « Les chefs, une question pour l’histoire du xxe siècle », Cités, n° 6, p. 67-83.
  • [48]
    Kader Firoud, 6 sélections en équipe de France (1951-1952), devient entraîneur en 1955. Il a dirigé 782 matchs de Division 1 (principalement avec Nîmes de 1955 à 1982). Seul Guy Roux a dirigé davantage de matchs professionnels à ce niveau (894 matchs en tout entre 1980 et 2007).
  • [49]
    France Football, n° 275, 26 juin 1951.
  • [50]
    À part Paul Baron (stage 1929) et Jules Vandooren (1939), les autres instructeurs sont les lauréats des stages qui se sont tenus entre 1941 et 1946.
  • [51]
    La question de l’endogamie professionnelle est développée par Pellissier Christine. 1994. « Les notables protestants lyonnais au xixe siècle », Société de l’histoire du protestantisme français, n° 140, p. 381-407.
  • [52]
    Rappelons que le titre d’entraîneur-instructeur confère le droit d’entraîner une équipe professionnelle. Le nombre d’entraîneurs diplômés qui peuvent entraîner des équipes amateurs est bien supérieur à ces chiffres.
  • [53]
    Girault Jean. 1996. Instituteurs, professeurs. Une culture syndicale dans la société française (fin xixe-xxe siècle), Paris, Publications de la Sorbonne, p. 109.
  • [54]
    Andolfatto Dominique, Sabot Jean-Yves. 2004. « Les héritiers du mouvement ouvrier : CGT et CGT FO », in Andolfatto Dominique (dir.), Les syndicats en France, Paris, La Documentation française, p. 27-28.
  • [55]
    Dubar Claude, Tripier Pierre. 1998. Sociologie des professions, Paris, Armand Colin, p. 10-13.
  • [56]
    Gabriel Hanot pratique le mélange des genres. Cadre rémunéré de la FFF entre avril 1945 et août 1949, il est en même temps journaliste à L’Équipe et à France Football, tout en exerçant ses fonctions de sélectionneur de l’équipe de France et de président de l’Amicale des entraîneurs.
  • [57]
    Cette délégation procède d’une certaine logique, puisque Gabriel Hanot est à la fois dirigeant influent de la FFF et membre fondateur de l’Amicale.
  • [58]
    Dubar Claude. 2000. La crise des identités. L’interprétation d’une mutation, Paris, PUF, p. 95.
  • [59]
    Dubar C., Tripier P., op. cit.
  • [60]
    France Football, n° 73, 14 août 1947.
  • [61]
    Lucien Perpère est un des membres fondateurs de l’Amicale.
  • [62]
    Bulletin mensuel de l’Amicale des entraîneurs diplômés de la FFF n° 7, novembre 1948.
  • [63]
    Rioux J.-P., op. cit., p. 6.
  • [64]
    Bulletin de l’Amicale des entraîneurs, n° 21, 15 avril 1954.
  • [65]
    Procès-verbal de l’assemblée générale de l’Amicale, 4 juillet 1959.
  • [66]
    Girault J., op. cit., p. 109.
  • [67]
    Charrier Philippe. 2004. Sociologie des imaginaires professionnels. Le cas des cheminots, Paris Éditions Zagros, p. 237.
  • [68]
    Entretien du 28 octobre 1998.
  • [69]
    Témoignage de Gaby Robert. L’Entraîneur français, n° 336, octobre 1999.
  • [70]
    Entretien du 28 octobre 1998.
  • [71]
    Tort Patrick, Bonnafe Lucien, L’Homme, cet inconnu ? Alexis Carrel, Jean-Marie Le Pen et les chambres à gaz, Paris, Syllepse, 1992.
  • [72]
    Notes personnelles de Georges Boulogne, non datées, qui relate une interview accordée à un représentant de la presse spécialisée. On peut estimer qu’elle a eu lieu entre 1967 et 1968.
  • [73]
    Rhetacker Jean-Philippe. France Football, n° 2907, 25 décembre 2001. Parmi les nombreux exemples que l’on peut répertorier, Georges Boulogne a écrit : « Le verbalisme est dans les écrits des journalistes qui prétendent décortiquer des problèmes qui les dépassent. » Notes personnelles de Georges Boulogne, non datées, qui relatent une interview accordée à un représentant de la presse spécialisée, réalisée entre 1967 et 1968.
  • [74]
    L’Entraîneur français, n° 336, octobre 1999.
  • [75]
    Union nationale et cadre techniques du football. Ce syndicat destiné aux entraîneurs professionnels est fondé en 1977.
  • [76]
    Endroit où fut réalisé l’entretien du 28 octobre 1998.
  • [77]
    L’Entraîneur français, n° 336, octobre 1999. Pour mémoire, Jean-Philippe Rhétacker, qui fut longtemps rédacteur en chef adjoint à France Football et journaliste à l’Équipe, a couvert toutes les Coupes du Monde de football de 1954 à 2002. Il est décédé en 2003.
  • [78]
    Consulter à ce sujet France Football, n° 109, 10 mars 1948 et France Football, n° 616, 7 janvier 1958.
  • [79]
    France Football, n° 616, 7 janvier 1958.
  • [80]
    Boltanski Luc. 1979. « Taxinomies sociales et luttes de classes », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 29, p. 75-106.
  • [81]
    Dumazedier Joffre. 1962. Vers une civilisation du loisir ?, Paris, Seuil.
  • [82]
    Grün L., op. cit., p. 252-261.
  • [83]
    Rioux Jean-Pierre. 1983. La France de la quatrième République. L’expansion et l’impuissance (1952-1958), tome 2, Paris, Seuil. Les revenus et la consommation ont progressé d’un tiers entre 1949 et 1958.
  • [84]
    Sur ce point : Bourg Jean François. 2002. « Le football et la télévision : évolution des relations économiques », Panoramiques, n° 61, « Un monde foot, foot, foot ! », p. 19-23.
  • [85]
    René Hauss sera major du stage de 1965.
  • [86]
    Football Magazine, n° 67, août 1965.
  • [87]
    Entretien téléphonique du 26 juillet 2002. Pierre Cahuzac a notamment entraîné Bastia (1971-1979), Toulouse (1979-1984) et l’Olympique de Marseille.
  • [88]
    Entretien téléphonique du 17 mars 2003. Arnold Sowinski a entraîné le R.C. Lens (1969-1981).
  • [89]
    Lemoine Claude. 2003. Psychologie dans le travail et les organisations, Paris, Dunod, p. 29-30.
  • [90]
    Le terme est couramment employé par Georges Boulogne lui-même dans ses écrits, de 1956 à 1999. Voir par exemple L’entraîneur français au service du football, n° 73, février 1959.
  • [91]
    Grün L., op. cit., p. 368-389.
  • [92]
    Achille Duchenne. L’entraîneur français au service du football, n° 67, août 1958.
  • [93]
    Achille Duchenne est l’attaché de presse de la FFF. C’est un journaliste qui écrivait déjà dans les années 1920, pour Football notamment, et qui s’était opposé vigoureusement à l’instauration du professionnalisme à la fin des années 1920 et au début des années 1930. Sur cette question, Wahl Alfred. 1999. « Un professionnalisme de résignation », Sociétés et Représentations, « Football et sociétés », CREDHESS, n° 7, p. 67-76.
  • [94]
    Attias-Donfut Claudine, Lapierre Nicole, Segalen Martine. 2002. Le nouvel esprit de la famille, Paris, Nathan, p. 116.
  • [95]
    De Singly François. 1996. Le soi, le couple et la famille, Paris, Nathan, p. 11.
  • [96]
    Procès-verbal de la réunion des entraîneurs de la Ligue nationale de football, 5 décembre 1963. Archives personnelles de Georges Boulogne.
  • [97]
    Robert Vergne, journaliste célèbre pour ses prises de position polémiques et ses différends avec Georges Boulogne et l’Amicale des entraîneurs, décrit le stage ainsi : « La quantité de besogne abattue approche comme d’habitude les normes de stakhanoviste. » Football Magazine, n° 67, août 1965.
  • [98]
    Procès-verbal de la réunion des entraîneurs de la Ligue nationale de football, op. cit.
  • [99]
    Jobert Timothée. 2007. « L’Auto, un organe de presse ? », in Combeau-Mari Évelyne (dir.), Sport et Presse en France (xixe-xxe siècles), Paris, Le Publieur.
  • [100]
    À partir de 1955, la durée du stage passe à trois semaines pour les meilleurs candidats, ceux qui pourront entraîner une équipe professionnelle. Seuls quelques candidats obtiennent ce droit, à l’issue d’un examen qui a lieu à la fin des deux premières semaines. Les candidats non retenus, mais qui obtiennent la moyenne, reçoivent néanmoins le diplôme d’entraîneur, qui les autorise à entraîner une équipe amateur.
  • [101]
    France Football, n° 222, 21 juin 1950, consacre la totalité de sa dernière page au stage. Sous le titre : « Une matinée au stage de Reims », l’article est accompagné de cinq photographies. Quant à France Football, n° 379, 23 juin 1953, c’est l’ensemble de la une qui couvre le stage : deux photographies ornent la page, sous le titre : « Jean Robin (OM), major du stage des entraîneurs nationaux ».
  • [102]
    Georges Boulogne. France Football officiel, n° 779, 14 février 1961.
  • [103]
    Au sens défini par Van Gennep Arnold, 1909. Les rites de passage, Paris, Picard (réimpression de l’édition de 1909).
  • [104]
    Dubar Claude. 1996. [1991]. La socialisation. Construction des identités professionnelles, Paris, Armand Colin.
  • [105]
    Cet épisode est relaté dans France Football, n° 1318, 6 juillet 1971, sous le titre : « Herbin à la dure école du stage national ».
  • [106]
    Procès-verbal de la réunion de la Direction technique nationale, 20/21 septembre 1971. Archives personnelles de Georges Boulogne.
  • [107]
    Ces centres de formation fonctionnent selon une discipline quasi militaire. Faure J.-M., Suaud C., op. cit., p. 51.
  • [108]
    France Football, n° 1318, 6 juillet 1971.
  • [109]
    Wahl A., op. cit., p. 298.
  • [110]
    On retrouve ce thème dans de nombreux procès-verbaux de l’Amicale et de la DTN, par exemple celui du 10 décembre 1979 : « Tous les entraîneurs de 1re et 2e Divisions doivent avoir à cœur d’être présents aux réunions. Ceux qui n’en acceptent pas la légère contrainte (deux journées par an) ne méritent pas d’entraîner un club important. » Tous ces procès-verbaux ont été rédigés par Georges Boulogne.
  • [111]
    Dubar C., Trippier P., op. cit.
  • [112]
    Grün L., op. cit., p. 475.
  • [113]
    Charrier P., op. cit., p. 241.
  • [114]
    L’entraîneur français au service du football, n° 94, mai juin 1961.
  • [115]
    Saint-Fuscien Emmanuel. 2011. À vos ordres ? Les relations d’autorité dans l’armée française de la Grande Guerre, Paris, Éditions EHESS, p. 259-267.
  • [116]
    Goffman Erving. 1973. La mise en scène de la vie quotidienne. 1. La présentation de soi, Paris, Minuit, p. 97.
  • [117]
    L’Entraîneur français au service du football, n° 105, juillet-août 1964.
  • [118]
    Wahl A., Lanfranchi P., op. cit., p. 158-159.
  • [119]
    Georges Boulogne a toujours manifesté une aversion caractérisée envers les professeurs d’éducation physique et sportive. Il les accuse notamment de « contre-propagande » envers le football. Procès-verbal de la réunion des entraîneurs de 1re Division du lundi 9 juin 1969. Archives personnelles de Georges Boulogne.
  • [120]
    Saint-Fuscien E., op. cit.
  • [121]
    France Football officiel, n° 2216, 15 juin 1990.
  • [122]
    Lemoine C., op. cit., p. 29-30.
  • [123]
    Dubar Claude. 2003. « Sociologie des groupes professionnels en France : un bilan prospectif », in Menger Pierre-Michel, Les professions et leurs sociologies. Modèles théoriques, catégorisations, évolutions, Paris, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, p. 58.
  • [124]
    Grün L., op. cit., 2011.
  • [125]
    Chapoulie Jean-Michel. 1973. « Sur l’analyse sociologique des groupes professionnels », Revue française de sociologie, n° 14, p. 86-114 ; Demaziere Didier, Gadea Charles (dir.). 2009. Sociologie des groupes professionnels, Paris, La Découverte.
  • [126]
    Bouchet-Valat Milan. 2014. « Les évolutions de l’homogamie de diplôme, de classe et d’origine sociales en France (1969-2011) : ouverture d’ensemble, repli des élites », Revue française de sociologie, n° 55, p. 459-505.
  • [127]
    Les candidats actuels ont ainsi droit à des formations en gestion des ressources humaines, en langues étrangères, en technologies de l’information et de la communication, en connaissances juridiques et financières…
  • [128]
    Gérard Houller, Directeur technique national (DTN) de la FFF dans France Football officiel du 25 mai 1991.
  • [129]
    Gérard Houllier, entraîneur professionnel (1976-1988, puis 1998-2007) a été membre de la DTN de 1988 à 1997, puis directeur technique national de 2007 à 2010. Il est l’un des rares entraîneurs professionnels à n’avoir pas effectué de carrière de joueur professionnel.
  • [130]
    « Rapport sur la formation des entraîneurs de haut niveau et leur situation actuelle » rédigé par Gérard Houllier, DTN adjoint, le 13 décembre 1989 et envoyé à Fernand Sastre, ancien président de la FFF. Fernand Sastre a été nommé président de la commission de réforme du football français, suite à une demande de Roger Bambuck, secrétaire d’État à la Jeunesse et au Sport. Archives personnelles de Georges Boulogne.
  • [131]
    L’absence à ces stages de recyclage entraîne le retrait de la licence d’entraîneur.
  • [132]
    Luis Fernandez, ex-entraîneur du PSG et du Bétis de Séville, dans France Football, n° 3235 bis, 11 avril 2008.
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