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Article de revue

Les fibres courtes d'amiante sont-elles toxiques ? Production de connaissances scientifiques et maladies professionnelles

Pages 95 à 114

Notes

  • [*]
    Annie Thébaud-Mony, sociologue, INSERM, IRIS/Université Paris 13, 74, rue Marcel-Cachin, 93017 Bobigny Cedex, France ; annie.thebaud-mony@wanadoo.fr
  • [1]
    Voir, en particulier, le site de l’Institut du chrysotile « pour un usage responsable et sécuritaire de l’amiante », Montréal (Canada) : http://www.chrysotile.com/
  • [2]
    En 1993, avec d’autres chercheurs de « sciences de la terre et de l’environnement », Arthur Langer signait un appel au rédacteur en chef du New York Times (édition du 23 septembre 1993) contre « la peur de l’amiante » qui affirme l’absence de danger pour les enfants et les professeurs dans les écoles de New York contaminées par la fibre.
  • [3]
    En France, dans les usines Ferodo/Valeo, les ouvriers ont payé un très lourd tribut aux maladies liées à l’amiante.
  • [4]
    Entre 2001 et avril 2006 les deux sociétés travaillant pour les industries à risques — Exponent Inc et ChemRisk —, ont reçu de la part des firmes General Motors, Ford et Chrisler environ 23 millions de dollars pour leurs études remettant en cause la toxicité des fibres d’amiante.
  • [5]
    Selon Michaels « Exponent s’est spécialisé dans des revues de littérature conduisant à des conclusions négatives. Les scientifiques de cette société ont produit plusieurs revues de la littérature concernant l’amiante dans la perspective des procès. Toutes ont conclu que certains types d’amiante ou certains types d’exposition à l’amiante sont beaucoup moins dangereux que ce qu’on croyait auparavant » (Michaels, 2008 : 49), traduit par l’auteur.
  • [6]
    Traduit par l’auteur.
  • [7]
    Voir, en particulier, les références 25 à 35.
  • [8]
    Citation traduite par l’auteur.
  • [9]
    Professeur de santé publique et rédacteur en chef de la revue scientifique International Journal of Occupational & Environnemental Health.
  • [10]
    Dans cet article, la discussion porte sur les fibres courtes, les fibres fines étant sans réserve considérées comme pathogènes par l’expertise AFSSET.
  • [11]
    La biométrologie est la mesure des fibres (ou autres substances) contenues dans l’organisme humain.

1Les effets sanitaires de l’amiante sont connus depuis des décennies (Mc Culloch et Tweedale, 2008 ; Thébaud-Mony, 2008). Pourtant, comme le montre Henry, il a fallu, en France, une conjoncture très particulière pour que l’amiante donne lieu à ce qu’il a appelé un « scandale improbable » (Henry, 2007). Dans les années 1990, l’épidémie de ma - ladies liées à l’amiante, quittant le strict champ des maladies professionnelles, le plus souvent invisibles, est devenue un véritable problème de santé publique, largement médiatisé, obligeant les pouvoirs publics à prendre des décisions politiques.

2Dans la mise en évidence de ce scandale de santé publique, la revue de littérature scientifique, menée en 1996 dans le cadre d’une expertise collective INSERM, a mis un terme en France à la controverse qui opposait, depuis plus de dix ans, les scientifiques cooptés par les industriels dans le cadre du Comité permanent amiante (CPA) et la seule équipe CNRS (dirigée par Henri Pézerat) engagée depuis la fin des années 1970 dans une démarche d’identification des mécanismes de cancérogenèse des fibres d’amiante (Lenglet, 1996 ; Malye, 1996). Les conclusions du rapport INSERM sont alors sans ambiguïté : l’amiante, dans toutes ses variantes (amphiboles ou chrysotile), est toxique, entraînant la survenue de fibroses (asbestose, atteintes pleurales) et cancer (mésothéliome et cancer bronchopulmonaire, en particulier) (Expertise collective INSERM, 1997). Le mouvement social des victimes prend alors un essor sans précédent, notamment dans le domaine des droits à indemnisation.

3L’histoire de l’amiante et celle de la production des connaissances scientifiques concernant ses effets sanitaires ne s’arrêtent cependant pas là. En France, les industriels de l’amiante ont dissous le CPA et cessé de produire des matériaux à base d’amiante. Mais la bombe à retardement des malades et des morts n’en finit pas de dévoiler de nouvelles victimes. Par ailleurs, la France a importé 80 Kg d’amiante par habitant. Le désamiantage est une opération terriblement périlleuse (et coûteuse). La gestion de l’amiante en place et celle des déchets ne le sont pas moins. Enfin, l’amiante n’est interdit qu’en Europe (et encore avec des dérogations) et dans quelques pays d’Amérique latine, d’Afrique et d’Asie. Sous l’effet d’une pression politique constante des principaux pays producteurs (en particulier, le Canada) et de l’utilisation du « doute » scientifique sur la toxicité de certaines variétés de fibres d’amiante, véhiculé par des instituts dédiés à la défense de l’amiante [1], le marché demeure prospère sur ces trois continents. Les connaissances scientifiques produites et admises au plan international ne suffisent pas en elles-mêmes à créer les conditions d’un abandon de ce marché dans les pays où les industriels n’ont aucune contrainte réglementaire (concernant les travailleurs ou l’environnement) ni aucune charge d’indemnisation des victimes.

4Depuis une dizaine d’années, de l’intérieur même du champ scientifique, des historiens, mais aussi des chercheurs en santé publique, ont pris pour objet de recherche les conditions de production scientifique des effets sanitaires de nombreux produits industriels, dont l’amiante. Dans un ouvrage de synthèse des rapports entre industriels et recherches sur la toxicité des fibres d’amiante, des historiens — l’un australien, l’autre anglais — ont élaboré une synthèse d’un siècle de combat international des industriels de l’amiante pour garder le contrôle non seulement de la diffusion mais de la production des connaissances sur les effets sanitaires de l’amiante (Mc Culloch et Tweedale, 2008). Ils montrent comment les industriels ont réussi à prendre le contrôle des travaux de chercheurs ayant un réel pouvoir au sein de la communauté scientifique, induisant ainsi la reconduction d’hypothèses permettant de minimiser, voire de nier totalement, les effets toxiques de l’amiante.

5Cette stratégie de contrôle de la production de connaissances en santé au travail et santé environnementale n’est pas spécifique des industriels de l’amiante. D. Michaels, chercheur et haut responsable américain en santé publique, a publié l’histoire de la construction sociale du « doute », dans laquelle il montre comment les industriels du tabac, du plomb, du chlorure de vinyl, du beryllium et de bien d’autres produits toxiques induisent en permanence de l’incertitude sur la toxicité de leurs produits par le biais des chercheurs dont ils contrôlent les travaux (Michaels, 2008). Cette stratégie a un double objectif : empêcher l’adoption de réglementations strictes conduisant à limiter, voire interdire, certains produits toxiques et éviter aux industriels les charges financières d’indemnisation des victimes professionnelles et environnementales.

6L’internationalisation de la production scientifique tend cependant à isoler les résultats des recherches du contexte qui les a vu naître, rendant invisibles ces liens entre les commanditaires et une production scientifique publiée dans les revues internationales à comité de lecture. C’est ainsi qu’un débat sur la toxicité des fibres courtes d’amiante, né aux États-Unis, est venu remettre de l’incertitude, en France, sur la toxicité des fibres d’amiante selon leurs dimensions.

7Cet article retrace la genèse de ce débat et analyse son impact dans l’expertise collective sur la toxicité comparée de fibres d’amiante — courtes, fines et « réglementaires », c’est-à-dire longues — dont les résultats ont été rendus publics en février 2009 par l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail (AFSSET). Les conséquences qui en résultent, tant dans le champ de la production des connaissances que de la réparation et de la prévention des maladies professionnelles, sont présentées en conclusion.

Les industriels de l’automobile américaine font naître une controverse

8Aux États-Unis, l’amiante est synonyme de centaines de milliers de procès en indemnisation, intentés, par les victimes de maladies liées à l’amiante, aux firmes transformatrices et utilisatrices de ce matériau, responsables de leur contamination. C’est le cas des firmes automobiles. Les dirigeants de ces firmes ont réussi à mettre en place une stratégie de mise en doute de la toxicité des fibres courtes d’amiante en finançant des programmes de recherche toxicologique et épidémiologique, menés sous leur contrôle.

Recherches sous influence

9En 2003, la firme automobile Ford finance une étude examinant « la réduction du potentiel biologique de l’amiante chrysotile dans les conditions d’usage des plaquettes de frein » (Langer, 2002) [2]. S’appuyant sur l’hypothèse selon laquelle la dimension de la fibre conditionne la toxicité de l’amiante (la fibre de moins de 5 µm serait « inerte »), l’auteur affirme que les conditions d’usage des plaquettes de frein (contenant du chrysotile) entraîneraient la production exclusive de fibres courtes d’amiante et l’inactivation des propriétés cancérogènes du chrysotile.

10La démonstration repose sur une reproduction expérimentale de l’usure des plaquettes de frein (en cas de freinage brusque) et non sur une observation de la réalité des émissions de fibres dans les conditions habituelles d’usage des freins. À l’appui de ses résultats, Langer souligne le fait que des études épidémiologiques ne montreraient pas d’importants excès de cancer chez des installateurs et mécaniciens de l’automobile. Il avance alors l’hypothèse que la présence de « fibres courtes » pourrait être un « index » de fibres altérées (sous-entendu sans pouvoir cancérogène), le risque de cancer étant alors moindre, voire inexistant.

11On sait que l’amiante a été très largement utilisé dans la fabrication des matériaux de friction. L’industrie de fabrication de freins a entraîné la survenue de centaines de milliers de victimes aux États-Unis et ailleurs dans le monde [3]. En suscitant les recherches précédemment citées, les dirigeants de Ford tentent de rompre la continuité des effets sanitaires de l’amiante selon les catégories de travailleurs exposés. L’épidémiologie peut identifier des excès de cancer chez des ouvriers d’une industrie présentant une homogénéité d’activité, ce qui est le cas de l’industrie de fabrication des matériaux de friction. En revanche, il est beaucoup plus difficile d’identifier des excès de cancer dans des groupes très hétérogènes comme les mécaniciens de l’automobile insérés dans des garages présentant une très grande diversité de taille, de conditions de travail et d’activité. Dans le cas de l’installation des plaquettes de freins, de leur entretien ou de leur remplacement dans le cadre de la réparation automobile, aucune étude des formes de contamination par des fibres de différentes tailles ne permet à Langer de mettre son modèle expérimental en rapport avec la réalité que ce dernier est censé représenter.

12Simultanément, toujours à la demande des industriels de l’automobile [4], des épidémiologistes — universitaires pour certains et consultants de la société Exponent Inc [5] pour les autres — mènent une « méta-analyse » statistique des études épidémiologiques citées par Langer (Goodman et al., 2004). Leurs conclusions transforment l’absence de résultats significatifs en une affirmation de non-toxicité de l’amiante dans le contexte de la réparation automobile. En effet, ils écrivent que « les données épidémiologiques disponibles montrent que l’emploi comme mécanicien de l’automobile n’accroît pas le risque de mésothéliome. Même si certaines études montrent un faible excès de cancer du poumon, les données épidémiologiques ne valident pas l’hypothèse que le cancer du poumon dans ce groupe professionnel est lié à l’exposition professionnelle à l’amiante lors de la réparation automobile » (Goodman et al., 2004 : 323) [6].

13Ainsi, à l’aide d’un modèle expérimental sans rapport avec la réalité de l’exposition et sans tenir compte des limites de la démarche épidémiologique appliquée à une catégorie de travailleurs — les mécaniciens automobiles — mal définie, en particulier du point de vue de l’exposition à l’amiante, Goodman et al. invalident les connaissances acquises sur la toxicité de l’amiante pour ce groupe professionnel particulier.

Vraie fausse controverse ?

14La question des excès de cancer associés à l’amiante chez les mécaniciens de l’automobile se transforme en un débat qui isole la toxicité des fibres courtes de l’ensemble des connaissances accumulées sur la toxicité des fibres d’amiante et ré-active la controverse au sujet d’une éventuelle dimension-seuil des fibres d’amiante en dessous de laquelle leur toxicité serait nulle.

15Cette question de l’existence d’un seuil de toxicité en rapport avec la dimension des fibres a pourtant été tranchée vingt ans plus tôt par l’étude des mécanismes de cancérogénicité à partir de travaux de toxicologie et physico-chimie fondamentales sur les mécanismes de cancérogenèse (Lauwerys, 2007 ; Pézerat, 1984, 2009). Ces travaux ont fait l’objet de publications dans des revues internationales à comité de lecture et dans des ouvrages scientifiques. Selon Picot, lui-même toxicologue, « Henri Pézerat est l’un des tout premiers au monde à mettre en évidence que l’amiante, à partir de son activité de surface, engendre en milieu biologique des entités chimiques très réactives (…) Un tel mécanisme permet d’expliquer l’activité inflammatoire pulmonaire (asbestose) mais aussi le pouvoir cancérogène de nombreuses variétés d’amiante » (Picot, 2009 : 7).

16Dans un article critique des travaux récents mettant en doute la toxicité du chrysotile, Pézerat — faisant référence à ses propres travaux, mais aussi à ceux de ses collègues engagés dans la même démarche de toxicologie fondamentale — rappelait que le principal facteur de carcinogénicité des fibres est ce mécanisme physico-chimique dit de « réactivité de surface » de la fibre en milieu biologique, la dimension des fibres et leur biopersistance dans l’organisme n’étant que des paramètres complémentaires pouvant influencer le degré de toxicité de ces fibres sans en être les déterminants (Pézerat, 2009) [7].

17Ces travaux, publiés en anglais depuis longtemps, ne sont pas cités par Langer. Suite à l’article de ce dernier, l’Agence américaine sur les substances toxiques — Agency for Toxic Substances and Diseases Registry (ATSDR) — réunit un groupe d’experts sur le thème de la toxicité des fibres courtes d’amiante. Malgré l’allusion à quelques résultats contradictoires, et sans s’interroger sur la faisabilité d’études portant exclusivement sur les fibres courtes d’amiante, le groupe se fonde essentiellement sur des études épidémiologiques chez les mécaniciens auto, contrôlées par l’industrie, et met en doute la toxicité des fibres courtes d’amiante (ATSDR, 2003). Ainsi, une agence ayant une mission de service public donne légitimité aux résultats de recherches faites à la demande des industriels, sans tenir compte des connaissances produites dans le cadre de la recherche fondamentale, ni s’interroger sur la possibilité pour une étude épidémiologique de répondre à la question de la toxicité des fibres courtes d’amiante.

18En écho à cette expertise, dans un article de synthèse présentant les résultats d’études toxicologiques, Dodson, professeur de biologie cellulaire et de sciences environnementales, et ses collègues spécialistes des effets sanitaires de l’amiante et indépendants de l’industrie, alertent la communauté scientifique au sujet de la remise au jour de cette controverse sur l’effet seuil en fonction de la dimension de la fibre, menée essentiellement en référence aux études épidémiologiques. Selon Dodson, « les données expérimentales examinées conduisent à la conclusion que les fibres d’amiante de toute longueur produisent des réponses pathologiques et qu’il faut faire très attention de ne pas exclure, sur la base d’exposition à l’amiante en fonction de la longueur des fibres, des populations exposées susceptibles de développer des maladies liées à l’amiante » [8] (Dodson et al., 2003).

19De l’intérieur même de la santé publique, une analyse critique de la littérature issue des recherches financées par l’industrie automobile permet à Egilman [9] de dégager les choix effectués par les chercheurs parmi les critères de qualification scientifique des études qui figurent dans leurs méta-analyses (Egilman et al., 2005). Le premier de ces critères, désormais généralisé bien au-delà de ce cas précis, est le fait de rendre obligatoire la réalisation — pour un même polluant — d’études épidémiologiques spécifiques mettant en évidence des résultats statistiques significatifs pour chaque secteur économique et chaque groupe de travailleurs. Ainsi faut-il démontrer indéfiniment, à l’aide d’une macabre comptabilité des morts et des malades, que l’amiante et les autres cancérogènes sont toujours toxiques. Les autres critères sont les suivants : la présentation de données d’exposition sélectionnées en fonction d’une spécificité (généralement spéculative et non prouvée) des fibres dans ce secteur d’activité (Wong, 2001), le choix des études qui n’ont pas mis en évidence de corrélation entre la réparation automobile et les cancers, et le choix prioritaire des enquêtes cas-témoins. Egilman montre jusqu’où peut aller l’élaboration du doute issu d’une méta-analyse statistique : pour Goodman et al. (2004), le métarisque relatif de cancer chez les mécaniciens auto étant de l’ordre de 0,67 % (c’est-à-dire qu’il y aurait moins de cancer chez ces derniers que dans les populations de référence), il disqualifie comme erronées toutes les études qui tendraient à montrer un excès de risque dans cette population.

Disqualifier les scientifiques indépendants de l’industrie

20Sur la base de ces conclusions et dans le cadre d’une procédure judiciaire pour indemnisation devant les juridictions civiles, les industriels de l’automobile et des assurances déposent un recours devant la Cour suprême du Michigan demandant le désaveu d’un expert qui attestait de la capacité des fibres d’amiante contenues dans les freins à provoquer la survenue du mésothéliome (Welch, 2007).

21Cinquante deux spécialistes mondiaux des effets sanitaires de l’amiante (toxicologues, épidémiologistes, biologistes et médecins), tous indépendants de l’industrie de l’amiante, dénoncent collectivement cette mise en doute du consensus scientifique international, ainsi portée devant les tribunaux, sous la forme d’une disqualification de l’expertise de préjudices subis par une victime (Welch, 2007). Sur la base de très nombreuses études citées en référence de leur article, ils récusent les hypothèses et les conclusions des travaux sur lesquels s’appuient les avocats et experts des industriels. Ils insistent sur deux points en particulier : la différence entre l’absence de résultats statistiques significatifs dans la mise en évidence d’excès de risque de cancer associés à une exposition et l’absence d’existence de la réalité correspondante, et la nécessaire prise en compte des connaissances produites par toutes les disciplines scientifiques mettant en évidence la réalité de l’incidence du mésothéliome dans la population faisant l’objet d’études. Pour eux, chaque mésothéliome survenant chez un mécanicien de l’automobile est un « événement-sentinelle », devenant signal d’alerte pour la réparation et la prévention des cancers liés à l’amiante dans cette population.

22Selon les chercheurs signataires de l’article, une démarche scientifique rigoureuse sur ce thème ne peut ignorer les centaines de cas de mésothéliomes identifiés chez ces travailleurs de l’automobile au contact de matériaux à base d’amiante dans le cadre de leur activité professionnelle. Ces cas ont été rapportés par des médecins dans la littérature médicale, même si les outils habituels de l’épidémiologie sont inopérants lorsqu’il s’agit de mener des études auprès de travailleurs indépendants ou disséminés dans de multiples petites et moyennes entreprises. Se situant sur le terrain de la discussion scientifique, les auteurs de l’article montrent que les études citées plus haut relèvent non pas d’une démarche scientifique mais plutôt d’un syllogisme dont les prémisses sont sans véritable fondement :

  • les plaquettes de frein ne produiraient « que » des fibres courtes (ce qui n’a jamais été démontré) ;
  • les études épidémiologiques n’ont pas mis en évidence d’excès de cancer chez les mécaniciens de l’automobile (ce qui constitue non pas une « preuve » de l’absence de lien, mais questionne plutôt les limites de l’épidémiologie) ;
  • donc, les fibres courtes ne sont pas dangereuses (ce qui constitue, sur de telles bases, un postulat invérifiable).
Pourtant, les résultats de ces études, publiés dans les revues scientifiques internationales, ont acquis, de ce fait, une légitimité scientifique susceptible d’ouvrir un débat. Exporté hors de la communauté scientifique américaine et des conflits qui s’y déroulent, en particulier devant les tribunaux (Egilman, 2009), ce débat revêt le caractère d’une véritable question scientifique que vont reprendre à leur compte les experts français réunis par l’AFSSET.

Une expertise collective : les fibres courtes et fines d’amiante sont-elles toxiques ? [10]

23En 2003, à l’époque où Langer publie son étude, le ministère français du Travail demande au département santé-travail de l’Institut de veille sanitaire (InVS) une « évaluation quantitative du risque de mésothéliome et de cancer du poumon chez les mécaniciens de véhicules automobiles » (Imbernon et al., 2003).

24L’étude réalisée par l’InVS ne s’appuie pas sur une enquête auprès des mécaniciens eux-mêmes mais sur des données statistiques générales et de la modélisation. La population des mécaniciens de l’automobile est définie statistiquement à partir des données du recensement 1999. L’estimation de l’exposition à l’amiante repose sur des profils simulés d’exposition hebdomadaire sans qu’il soit possible d’en connaître les fondements. Enfin, l’évaluation du risque de cancer est faite selon des modèles théoriques internationaux utilisés pour évaluer les effets sanitaires du chrysotile. Au terme de cette modélisation très abstraite, visant à identifier le risque de cancer associé à l’exposition à l’amiante chez les mécaniciens de véhicules automobiles, les auteurs considèrent qu’un faible excès de risque serait « plausible ».

25Informé de l’article de Dodson et al. (2003), le ministère de la Santé, à son tour, demande en 2005 l’avis de l’AFSSET. Celle-ci crée un groupe de « relecture critique » de cet article. Il s’agit d’évaluer les risques liés à des expositions aux fibres d’amiante de moins de 5 µm (les fibres réglementairement contrôlées étant de 5 µm et plus) ainsi que les implications réglementaires de l’expertise réalisée. Après discussion, le groupe de travail de l’AFSSET admet les conclusions de Dodson et estime que les fibres courtes d’amiante représentent un danger pour l’homme. Même s’il est — en l’état des connaissances — impossible de caractériser plus avant le risque spécifique, les experts consultés recommandent qu’un travail d’approfondissement soit mené en vue d’une révision éventuelle de la réglementation.

26Une expertise collective est organisée par l’AFSSET et s’engage alors sur deux objectifs :

  • déterminer la possibilité de caractériser la répartition des différents types de fibres selon les circonstances d’exposition (professionnelle et environnementale) ;
  • évaluer les risques pour la santé humaine de l’exposition aux fibres courtes et fines d’amiante.
Au préalable, les experts s’interrogent : qu’est-ce qu’une « fibre courte » ? La réponse à cette question montre que c’est l’instrument de mesure et non le potentiel de toxicité qui définit, réglementairement, ce que sont les fibres courtes, longues et fines. Établie par consensus dans les années 1960, la définition des fibres, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), correspond « aux limites de la méthode d’analyse employée à cette époque », à savoir ce que le microscope optique peut identifier : des fibres d’une longueur supérieure à 5 µm. Les experts réunis par l’AFSSET retiennent donc comme définition qu’une fibre de longueur inférieure à 5 µm est une « fibre courte ». Il est à noter que la mise au point de la microscopie électronique permettant le repérage des fibres courtes n’a pas entraîné de modification réglementaire.

Quelles connaissances des expositions aux fibres de différentes dimensions ?

27Dans la revue de littérature de l’expertise AFSSET concernant l’influence du caractère dimensionnel de la fibre d’amiante sur son potentiel toxique, l’étude de Langer est mise en avant. Cependant, les experts de l’AFSSET adoptent une position qui tout à la fois reflète le doute tout en postulant une moindre toxicité des fibres courtes : « La toxicité directe ou indirecte des fibres courtes d’amiante reste difficilement appréciable, mais ne peut pas être exclue. Dans l’hypothèse d’une toxicité des fibres courtes d’amiante, elle serait certainement inférieure à celle des fibres longues, mais aucune pondération n’est définissable à l’heure actuelle » (AFSSET, 2009 : 82). Aucune étude française n’est évoquée à l’appui de ce postulat fondé sur le courant des recherches américaines financées et contrôlées par l’industrie automobile.

28Au chapitre suivant du rapport d’expertise sur « l’évaluation de l’exposition », l’absence totale de données françaises sur les expositions aux fibres de différentes dimensions apparaît, tant pour l’environnement qu’en milieu de travail. L’AFSSET demande alors une étude spécifique d’échantillons d’air contenant de l’amiante.

29En environnement général, une centaine d’échantillons d’air, prélevés en Île-de-France dans des bâtiments dans les années 1990/2000, a été conservée par le Laboratoire d’étude des particules inhalées (LEPI) de la Mairie de Paris. Une « ré-analyse » permet de constater que les fibres courtes représentent de 40 % à 100 % de la teneur en fibres des échantillons. Une étude complémentaire est faite en Haute-Corse en raison de la pollution due aux affleurements de roches amiantifères. Les résultats sont particulièrement alarmants : la contamination la plus importante se situe à l’intérieur des maisons avec la présence majoritaire de fibres courtes, jusqu’à 90 % de la teneur en fibres d’amiante.

30Quant à l’environnement professionnel, il n’existe en France aucune donnée disponible concernant la contamination par des fibres de différentes dimensions en milieu de travail. À la demande de l’AFSSET, le LEPI de la Mairie de Paris se procure des échantillons d’environnement professionnel de différents secteurs d’activité (asphalte, enlèvement d’amiante, amiante-ciment, freins, mines, recyclage, textile), auprès de la banque d’échantillons de l’Institut de recherche de santé et sécurité au travail (IRSST) du Québec. Dans ces échantillons, la proportion de fibres courtes d’amiante varie entre 87 % (textile) et 96 % (enlèvement d’amiante). Dans le secteur des freins, la proportion de fibres courtes est de 93 %. Les experts de l’AFSSET concluent en soulignant l’existence d’une « sous-estimation quantitative » très importante de la contamination globale des lieux de travail par l’amiante, les mesures réglementaires ne prenant en compte que les fibres de plus de 5 µm.

31Enfin, les experts examinent les résultats issus de la biométrologie [11]. Pour l’amiante, il s’agit d’analyses de tissus des poumons ou de la plèvre, au décours d’interventions chirurgicales ou d’autopsies. Dodson et al. (2005) ont examiné les tissus pulmonaires de 53 cas de mésothéliome. Le poumon de ces sujets contenait de l’amiante, avec un pourcentage de fibres courtes allant de 41 % à 70 % du nombre total de fibres.

32Aucune des études recensées dans le rapport AFSSET n’isole le rôle spécifique des fibres courtes par rapport aux fibres longues. Dans un article de 2007, non cité dans l’expertise AFSSET, Tomatis (chercheur italien ayant occupé pendant plus de dix ans les fonctions de directeur du Centre international de recherche sur le cancer) et ses collègues insistent sur le fait que, lorsque les études prennent en compte la réalité des expositions dans des environnements professionnels différents, des fibres de toutes tailles sont retrouvées dans les échantillons, les fibres courtes pouvant représenter jusqu’à 90 % de la charge en fibres d’amiante (Tomatis et al., 2007). En situation professionnelle ou environnementale, la réalité des expositions, si faiblement explorée soit-elle, montre une contamination systématiquement mixte par des fibres d’amiante de variétés et de tailles différentes.

Évaluer les risques pour la santé humaine de l’exposition aux fibres courtes et fines d’amiante

33La réponse à ce second objectif de l’expertise collective de l’AFSSET s’appuie sur un recensement comparé des études épidémiologiques menées dans le secteur des freins, d’une part, des mines et du fibrociment, d’autre part. Le rapport AFSSET souligne que le secteur des freins serait « connu pour son exposition proportionnellement plus importante aux fibres courtes d’amiante que les autres secteurs d’activité » (AFSSET, 2009 : 190). Cette « évidence » n’est assortie d’aucune référence spécifique et semble contredite par l’analyse en microscopie électronique des échantillons obtenus du Québec, qui montre un potentiel élevé de fibres courtes dans tous les secteurs d’activité étudiés.

34Quant aux conclusions, elles se fondent sur les méta-analyses de Wong (2001) et Goodman et al. (2004) faites à la demande et avec le soutien financier des industriels américains de l’automobile, selon lesquelles « aucune des études ne mettait en évidence de sur-risque de mésothéliome dans les populations de mécaniciens automobiles ». Le rapport fait également référence à une étude cas-témoin menée par Goldberg et al. (2006), à partir du programme français de surveillance des mésothéliomes, (PNSM), implanté en 1998 dans 17 départements français, étude dans laquelle « la réparation automobile n’apparaît pas comme associée à un sur-risque de mésothéliome » (Rapport AFSSET, 2009 : 191).

35La littérature étudiée ne tient pas compte de certaines études pourtant intéressantes en ce qui concerne les fibres courtes d’amiante. En 2005, l’InVS a conduit une étude approfondie (non citée dans le rapport AFSSET) des conséquences d’expositions professionnelles et environnementales de l’activité de broyage d’amiante d’une usine qui a pollué la ville d’Aulnay-sous-Bois pendant cinquante ans. Cette activité de broyage qui, selon le témoignage des riverains, réduisait l’amiante en « farine », émettait, à coup sûr, des fibres courtes d’amiante. L’étude réalisée par l’InVS montre une surmortalité par mésothéliome dans la commune et l’existence de cas de mésothéliome dont l’exposition est exclusivement liée au fait d’être riverains de l’usine ou d’avoir fréquenté les écoles voisines de celle-ci (Counil et al., 2007).

36Les études épidémiologiques qui, dans la littérature internationale, montrent l’existence de cas de mésothéliome chez des mécaniciens de l’automobile, sont considérées par les experts comme étant « de faible niveau de preuve scientifique », disqualifiant ainsi les chercheurs ayant mené ces études (AFSSET, 2009 : 191). Parmi celles-ci, figurent les travaux de Leigh qui a dirigé le registre national australien des mésothéliomes pendant plus de vingt ans (Leigh et Driscoll, 2003). Dans ce registre national, le parcours professionnel de chaque patient atteint de mésothéliome signalé est reconstitué. L’exposition à l’amiante fait l’objet d’une expertise par des hygiénistes industriels et le diagnostic de mésothéliome est validé par un panel d’experts de différentes spécialités médicales. Entre le 1er janvier 1980 et le 31 décembre 2001, soit plus de vingt ans, 6 349 cas ont été recensés. Une analyse détaillée des professions exposées a été faite. Ainsi, 78 cas de mésothéliome figurant dans le registre australien et présentant une exposition à l’amiante concernaient des mécaniciens assurant la réparation des freins, dont 59 avaient pour seule source d’exposition à l’amiante ce travail de mécanicien de l’automobile et 19 cumulaient plusieurs sources d’exposition. Dans une publication antérieure, non citée dans le rapport AFSSET, Leigh et al. (2002) précisaient qu’ils étaient parvenus à reconstituer l’histoire de l’exposition à l’amiante de 88 % des cas inscrits au registre et que, pour 80 % des personnes pour lesquelles l’exposition n’avaient pas été retrouvée, l’étude en biométrologie montrait la présence de plus de 200 000 fibres d’amiante d’une longueur supérieure à 2 µm par gramme de tissu pulmonaire, comportant donc une part de fibres courtes (de longueur comprise entre 2 et 5 µm).

37Quant aux chercheurs ayant pris position pour mettre en évidence les incohérences scientifiques de la mise en doute de la toxicité des fibres courtes d’amiante (Welch, 2007), ils ne sont pas cités dans le rapport AFSSET.

38En conclusion de l’expertise collective, les experts reconnaissent que « la toxicité des fibres courtes d’amiante, évaluée d’un point de vue épidémiologique, ne peut être écartée, bien que certains considèrent que celle-ci est nulle », mais ils considèrent que « l’existence d’un effet non nul, mais faible, des fibres courtes d’amiante apparaît comme une hypothèse conservatrice » (AFSSET, 2009 : 213), consacrant ainsi le doute qui permet, de fait, d’éviter une révision drastique de la réglementation de prévention tout en discutant de la légitimité des mécaniciens de l’automobile à demander une indemnisation au titre des maladies professionnelles.

39Les recommandations présentées en fin de rapport sont de contrôler la présence de fibres courtes d’amiante dans l’environnement général mais de ne pas modifier les normes actuelles de contrôle en milieu professionnel, en s’abstenant de compter les fibres courtes d’amiante. De nouvelles études sont suggérées, dans chaque domaine scientifique, ainsi qu’une « veille bibliographique ».

40La stratégie des industriels américains de l’automobile de voir différée l’adoption de réglementations plus strictes avant la réalisation de nouvelles études est ainsi consacrée, au niveau international, par une agence publique française. Ce dernier épisode d’une histoire séculaire est emblématique de l’instrumentalisation du doute scientifique par les industriels de l’amiante (McCulloch et Tweedale, 2008). De la différence de toxicité entre les types de fibres au mythe de l’usage contrôlé, de la biopersistence du chrysotile à la toxicité différentielle selon la dimension des fibres, de l’absence de résultats significatifs à la négation d’excès de cancers dans tel ou tel groupe de population exposée, le doute demeure toujours possible, retardant d’autant les décisions politiques indispensables à la prévention des cancers de l’amiante.

Conclusion

41Dans son ouvrage Science de la science et réflexivité, Bourdieu (2001) met en évidence comment les rapports de domination présents dans la société le sont également dans le champ scientifique. Le processus de mise en doute des fibres courtes d’amiante est révélateur du pouvoir des acteurs de l’industrie, influents dans l’arène politique mais aussi dans le champ scientifique. Ils réussissent à contrôler non seulement l’interprétation des résultats mais les choix effectués en matière de production scientifique. Ce processus joue un rôle déterminant en ce qui concerne la qualification ou la disqualification des travaux de recherche, comme le montrent quelques exemples de l’histoire des rapports de force au sein du champ scientifique de l’amiante.

42Chercheur pionnier des mécanismes d’action de l’amiante en milieu biologique, H. Pézerat a été considéré comme « trop engagé » (sous-entendu en soutien des ouvriers) pour participer au groupe d’experts de l’expertise collective INSERM 1996. Siégeaient pourtant dans ce même comité les professeurs Bignon et Brochard « engagés » dans le Comité permanent amiante créé par l’industrie de l’amiante (Malye, 1996). Le rapport AFSSET fait mention des mécanismes étudiés par Pézerat (sans le citer) mais en juxtaposition d’autres travaux menés en biologie et sans rechercher la cohérence et les contradictions entre ses résultats et ceux d’autres chercheurs, notamment ceux dont l’industrie de l’amiante contrôle les travaux.

43Le registre australien du mésothéliome, malgré une très grande reconnaissance de la part de la communauté internationale, est disqualifié par les experts de l’AFSSET. Pourtant, il permet d’identifier de façon irréfutable l’existence de cas de mésothéliome associés à l’activité de mécaniciens de l’automobile. On peut s’interroger sur la ou les raison(s) de cette disqualification.

44Enfin, tous reconnus par la communauté scientifique internationale du fait de l’excellence de leurs travaux et de leurs publications, les chercheurs qui ont signé ensemble une analyse critique des travaux ayant conduit à mettre en doute la toxicité des fibres courtes d’amiante, ne sont pas même cités dans le rapport de l’expertise AFSSET.

45Ainsi s’opèrent une hiérarchisation et une sélection des travaux scientifiques qui créent les conditions de reproduction de logiques dominantes dans le champ de la recherche, avec tous les risques que cela comporte pour la prévention, notamment en milieu de travail, et pour la réparation des maladies professionnelles.

46Concernant la prévention, inquiet des résultats de l’analyse d’échantillons d’air menée dans le cadre de l’expertise de l’AFSSET, le ministère du Travail a pourtant décidé d’engager une campagne de mesures précises de l’empoussièrement sur les chantiers de désamiantage. Les résultats de cette campagne conditionneront l’adoption d’une réglementation tenant compte de la teneur en fibres courtes. Mais dans combien de temps ?

47La reconnaissance en maladie professionnelle des mécaniciens de l’automobile entre dans le champ des tableaux de maladies professionnelles liées à l’amiante et, le cas échéant, du système complémentaire de reconnaissance en maladie professionnelle, mais aussi du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA). Cependant, la vérification de l’exposition à l’amiante est une condition incontournable et nécessaire de la procédure de reconnaissance. La mise en doute de la toxicité des fibres courtes d’amiante, dans le cas particulier des mécaniciens de l’automobile, pourrait conduire à un exigence renforcée de la partie patronale de la commission des maladies professionnelles concernant les éléments de preuve de l’exposition dans le cas de ce groupe de travailleurs. Or, on sait les difficultés rencontrées par les victimes de cancer dans l’accès à la reconnaissance en maladie professionnelle (Thébaud-Mony, 1991, 2006, 2007, 2008).

48Dans le domaine des liens entre santé-travail-environnement, plus que jamais peut-être, les relations entre savoir et pouvoir sont étroites. L’histoire de l’amiante en apporte une dramatique illustration qui appelle à une vigilance des chercheurs, tant dans le choix de leurs objets de recherche et de leurs partenaires que dans leur implication dans des processus d’expertise tel que celui sur lequel porte cet article. Les pratiques scientifiques s’inscrivent dans des rapports de pouvoir et de domination qui façonnent les formes d’élaboration du savoir. La science n’est pas neutre.

49Conflit d’intérêts : aucun.

Bibliographie

Références bibliographiques

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Mots-clés éditeurs : amiante, industriels, controverse scientifique, maladies professionnelles

Mise en ligne 15/11/2012

https://doi.org/10.1684/sss.2010.0205

Notes

  • [*]
    Annie Thébaud-Mony, sociologue, INSERM, IRIS/Université Paris 13, 74, rue Marcel-Cachin, 93017 Bobigny Cedex, France ; annie.thebaud-mony@wanadoo.fr
  • [1]
    Voir, en particulier, le site de l’Institut du chrysotile « pour un usage responsable et sécuritaire de l’amiante », Montréal (Canada) : http://www.chrysotile.com/
  • [2]
    En 1993, avec d’autres chercheurs de « sciences de la terre et de l’environnement », Arthur Langer signait un appel au rédacteur en chef du New York Times (édition du 23 septembre 1993) contre « la peur de l’amiante » qui affirme l’absence de danger pour les enfants et les professeurs dans les écoles de New York contaminées par la fibre.
  • [3]
    En France, dans les usines Ferodo/Valeo, les ouvriers ont payé un très lourd tribut aux maladies liées à l’amiante.
  • [4]
    Entre 2001 et avril 2006 les deux sociétés travaillant pour les industries à risques — Exponent Inc et ChemRisk —, ont reçu de la part des firmes General Motors, Ford et Chrisler environ 23 millions de dollars pour leurs études remettant en cause la toxicité des fibres d’amiante.
  • [5]
    Selon Michaels « Exponent s’est spécialisé dans des revues de littérature conduisant à des conclusions négatives. Les scientifiques de cette société ont produit plusieurs revues de la littérature concernant l’amiante dans la perspective des procès. Toutes ont conclu que certains types d’amiante ou certains types d’exposition à l’amiante sont beaucoup moins dangereux que ce qu’on croyait auparavant » (Michaels, 2008 : 49), traduit par l’auteur.
  • [6]
    Traduit par l’auteur.
  • [7]
    Voir, en particulier, les références 25 à 35.
  • [8]
    Citation traduite par l’auteur.
  • [9]
    Professeur de santé publique et rédacteur en chef de la revue scientifique International Journal of Occupational & Environnemental Health.
  • [10]
    Dans cet article, la discussion porte sur les fibres courtes, les fibres fines étant sans réserve considérées comme pathogènes par l’expertise AFSSET.
  • [11]
    La biométrologie est la mesure des fibres (ou autres substances) contenues dans l’organisme humain.
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