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Article de revue

Enfants atteints de maladies chroniques et activités périscolaires : des besoins de formation

Pages 439 à 449

Introduction

1Pour un enfant atteint d’une maladie chronique, prendre part aux activités scolaires et périscolaires influence son équilibre psychique, physique et physiologique [1, 2]. Cependant, pour les parents de ces enfants, confier leur enfant à un tiers suscite de nombreuses interrogations, souvent génératrices de stress [3].

2L’école est un lieu de vie de l’enfant où il passe plus de dix pour cent de son temps. L’enfant atteint d’une maladie chronique y est accueilli dans le cadre d’un Projet d’Accueil Individualisé (PAI) [4]. Or, depuis 2013 des temps d’enseignement et des temps d’activités pédagogiques complémentaires ont été organisés. En effet, l’un des axes de la réforme des rythmes scolaires est d’« Ouvrir l’accès de tous les enfants à des activités sportives, artistiques, culturelles pour renforcer le plaisir d’apprendre » [5]. Cette réforme a pour conséquence une multiplication des intervenants auprès des enfants. Ces intervenants que nous nommerons encadrants, dans cette étude sont d’horizons professionnels très différents. Il a été référencé en 2013/2014 que « 80 % des projets (Projet Éducatif Territorial) mobilisent des agents territoriaux ou recrutés par les communes ; 67 % d’entre eux mobilisent également des intervenants associatifs. Moins d’un tiers mobilisent des bénévoles » [6]. Les encadrants des Nouvelles Activités Périscolaires (NAP) peuvent donc être des professionnels de l’animation, de la petite enfance, des éducateurs sportifs, des bibliothécaires, ou encore des bénévoles d’associations. Bien que non professionnels de la santé, ils doivent soutenir les élèves porteurs d’une maladie chronique dans des actes quotidiens de soins et assurer leur sécurité lors des activités périscolaires. Le PAI doit permettre cet encadrement.

3La circulaire 2003-135 du 08/09/2003 relative à l’accueil des enfants et adolescents atteints de troubles de la santé évoluant sur une longue période, précise les conditions et les modalités de cet accueil, non seulement dans les établissements scolaires, mais aussi au sein des structures périscolaires comme les restaurants scolaires, les garderies et autres lieux d’accueil (centres de loisirs et de vacances) [7]. Elle prévoit l’élaboration d’un Projet d’Accueil Individualisé qui détaille plusieurs points essentiels à la scolarisation des enfants atteints de maladies chroniques. Le PAI est un document écrit qui précise les traitements médicaux des différentes pathologies et/ou les régimes spécifiques liés aux intolérances alimentaires durant les temps scolaires et périscolaires [4]. Il détaille les gestes et le rôle de chaque intervenant auprès de l’enfant dans le respect de ses compétences. Il comporte, le cas échéant, les aménagements de la scolarité en lien avec l’état de santé, des temps spécifiques pour contrôler sa glycémie par exemple, ou en cas d’absences répétées et comprend un protocole d’urgence.

4Le PAI est élaboré à la demande de la famille auprès du directeur de l’établissement. Il résulte d’une concertation entre le médecin scolaire, l’infirmière scolaire, le directeur de l’établissement, les enseignants, les parents, l’enfant et les professionnels de santé en charge de la pathologie de l’enfant. Les personnes en charge des enfants lisent et signent le document manuscrit du PAI.

5Ainsi, chaque encadrant doit prendre connaissance du contenu du PAI avant chaque intervention en milieu scolaire aussi courte soit-elle. Plus une structure accueille d’enfants atteints d’une maladie, plus cela multiplie pour l’encadrant les documents à signer, à lire et à s’approprier. Selon l’âge des enfants, la prévalence des enfants porteurs de maladies chroniques atteint plus de 1 % des enfants scolarisés.

6Les pathologies chroniques les plus génératrices de PAI sont l’asthme, les allergies, le diabète et l’épilepsie. En 2009, 63 % des PAI concernaient ces quatre maladies chroniques [8]. En Gironde par exemple, si le nombre de PAI est en augmentation sur les cinq dernières années, la prévalence des quatre maladies chroniques (asthme, allergie, diabète et épilepsie) reste quasi-identique [9].

7Dans le contexte actuel d’augmentation du nombre d’enfants atteints de maladies chroniques, et d’augmentation du nombre d’encadrants, des difficultés persistent. Malgré la protection de l’accueil des enfants grâce à la collaboration des équipes soignantes référentes des pathologies, des professionnels de la médecine scolaire, des équipes enseignantes, des encadrants, des parents et de l’enfant, certains enfants n’ont pas accès à toutes les activités [10]. Par ailleurs, les parents sont fréquemment déconcertés de découvrir qu’un encadrant remplaçant n’a pas été averti de l’existence du PAI ni de son contenu [11]. Ils constatent que l’accessibilité aux documents n’est pas toujours évidente. Dans certains forums de discussion, les parents cherchent un moyen d’éviter ces problèmes [12], ils expriment leurs difficultés à expliquer la maladie de leur enfant à l’école [13] et cherchent du réconfort pour leur enfant qui « se sent en retrait de ses amis » [10]. Des expériences difficiles font quelquefois la une des quotidiens locaux [14]. Ces difficultés traversent les frontières et font l’objet d’initiatives intéressantes. En Belgique par exemple, il a été proposé de « créer une équipe de gardiens pour des enfants diabétiques de type 1, constituée de personnes de confiance, spécifiquement formées et supervisées par les diabétologues… », afin « d’anticiper le délicat problème des sorties scolaires » [15].

8Devant ces constats, nous nous sommes interrogés sur l’accessibilité et l’utilité des informations contenues dans les PAI dans la pratique des encadrants ainsi que l’intérêt d’un document complémentaire pour améliorer l’accueil des enfants atteints de maladies chroniques. L’objectif de cette étude est de recueillir l’opinion des personnes encadrant des enfants lors des NAP concernant ces questionnements.

Méthode

Terrain et population

9L’étude a été menée dans le département de Saône et Loire. Il comporte dix circonscriptions référencées par l’éducation nationale [16]. Trois circonscriptions ont été randomisées : Autun, Chalon 2 et Le Creusot. Ces trois circonscriptions englobent 130 communes. Le service de médecine scolaire de Saône-et-Loire a été sollicité afin d’obtenir une cartographie représentative des PAI mis en œuvre au sein du département et les pathologies concernées. Ces références cartographiques ont confirmé que les circonscriptions interrogées étaient représentatives.

10Un questionnaire en ligne avec l’objet de l’étude a été adressé par mail au secrétariat des mairies des 130 communes afin qu’il soit diffusé auprès des agents territoriaux et des personnes mandatées pour l’encadrement des enfants lors des NAP.

11Après trois semaines, une relance téléphonique et un mailing auprès des communes n’ayant pas répondu ont été réalisés.

Le questionnaire

12Pour élaborer le questionnaire, nous avons, dans un premier temps, sollicité des professionnels de santé spécialisés dans la prise en charge des quatre pathologies chroniques (asthme, allergie, diabète et épilepsie). Le but était de savoir s’il existait des recommandations et de recueillir leur avis sur les informations indispensables à connaître pour un encadrant afin d’assurer la sécurité des enfants lors des activités périscolaires. Les professionnels ont été identifiés par l’intermédiaire du Laboratoire Éducations et Pratiques en Santé (LEPS) de l’Université Paris 13 [17]. Dans leurs spécialités respectives, ces professionnels sont impliqués dans la pratique et la formation en Éducation Thérapeutique du Patient (ETP), ils sont reconnus pour leur expertise auprès des sociétés savantes et publient sur leurs pratiques. Ils ont été interrogés de la façon suivante :

13Avez-vous connaissance de recommandations sur les messages essentiels à diffuser auprès des encadrants lors d’activités périscolaires ?

14Si oui, quelles sont les références de ces recommandations ?

15Selon vous, en ce qui concerne la pathologie (asthme, allergie, diabète ou épilepsie) quel(s) serai(en)t le ou les messages-clés à transmettre à un encadrant :

  • lui permettant de s’assurer que l’enfant va pouvoir faire l’activité périscolaire en toute sécurité (À quoi doit-il faire attention pour prévenir tout problème ?) ;
  • lui permettant de réagir en cas de problème (Que doit-il faire pour assurer la sécurité de l’enfant ? Réagir face à une crise ? autre).

16Aucune recommandation n’ayant été publiée au moment de l’étude dans chacune des pathologies concernées, les messages-clés cités par les experts ont permis d’identifier des éléments de compétences et de construire le questionnaire.

17Il comportait trois parties comprenant principalement des questions fermées et quelques questions ouvertes :

  • des questions concernant les caractéristiques des encadrants avec leur parcours professionnel (sept questions) ;
  • des questions sur le PAI (13 questions) : une question filtre permettant d’identifier les personnes ayant déjà encadré des enfants atteints de maladie chronique, cinq questions sur l’accessibilité du PAI, sept questions sur l’utilité perçue du PAI ;
  • des questions sur la perception d’utilité des encadrants d’un support complémentaire au PAI et sur son contenu (six questions).

18Le questionnaire a été testé auprès de trois encadrants de la région à qui il a été également demandé leurs avis sur la diffusion du questionnaire. Les résultats de ces tests ont conduit à ajouter une partie explicative et descriptive du PAI avant les questions concernant le document complémentaire. La diffusion en ligne a été unanimement retenue. Les trois personnes ayant participé aux tests n’ont pas été intégrées dans l’étude.

19L’étude a été effectuée sur l’année scolaire 2014/2015, fin de la première année de généralisation des rythmes éducatifs.

Modalités d’analyse

20Une analyse quantitative descriptive a été générée automatiquement par Google forms®.

21L’analyse des verbatims s’est appuyée sur la matrice des compétences qu’un patient et/ou son entourage doit acquérir pour vivre le mieux possible avec sa maladie et son traitement [18]. Dans cette étude, nous avons considéré les encadrants comme des membres de l’entourage de l’enfant-patient. En effet, selon la définition du guide méthodologique de structuration d’un programme d’éducation thérapeutique du patient dans le champ des maladies chroniques, la HAS et l’INPES ont considéré comme entourage du patient « les personnes de confiance » [19]. L’enfant étant confié aux encadrants lors des activités périscolaires, les encadrants deviennent alors de véritables partenaires de la gestion de la maladie de l’enfant.

Résultats

22Le verbatim des encadrants est indiqué en italique et entre guillemets dans l’analyse de l’étude.

Caractéristiques de la population étudiée

23Cinquante-cinq encadrants ont rempli le questionnaire en ligne (tableau I). Trente d’entre eux ont répondu sur leur ancienneté dans l’encadrement des NAP : 18 avaient débuté leur activité d’encadrement des enfants au sein des NAP lors de l’année scolaire 2014/2015, cinq en 2013/2014 et six avaient déjà une activité d’encadrement d’enfants avant la création des NAP. L’âge moyen des encadrants était de quarante ans (18-68).

Tableau I

Les caractéristiques de la population étudiée

Tableau I
Caractéristiques de la population étudiée (N = 55) Effectif % Nombre d’encadrants 55 100 • Homme 10 18 • Femme 45 82 Formation professionnelle des encadrants • Brevet des collèges 25 45 • CAP Petite enfance 13 24 • Baccalauréat 24 44 • Études supérieures 14 26 • BAFA 25 46 • Autres 23 42 Profession actuelle des encadrants • Animateur 22 40 • Agent Territorial Spécialisé des Écoles Maternelles (ATSEM)-Auxiliaire de Vie Scolaire (AVS) 7 13 • Responsables administratifs des NAP 6 11 • Éducateurs sportifs 4 7 • Agents territoriaux 2 3 • Professeurs des écoles 2 3 • Artisan créateur de bijoux 1 2 • Sapeur-pompier professionnel 1 2 • Infirmière hygiéniste 1 2 • Professeur de musique 1 2 • Mère au foyer 1 2 • Chaudronnier 1 2 • Bibliothécaire 1 2 • Retraité 1 2 • Non communiqué 4 7 Type d’activités encadrées au sein des NAP • Activités manuelles 35 65 • Activités sportives, physiques et prévention santé 28 52 • Activités d’éveil artistique et culturel 22 41 • Ateliers citoyenneté, environnement 12 22 • Ateliers maîtrise de la langue 3 6 • Activités découverte scientifique et technique, usage du numérique 7 13 • Autres 14 26 Répartition des encadrants par circonscription • Circonscription d’Autun 8 13 • Circonscription de Chalon 2 10 18 • Circonscription de Le Creusot 28 52 • Autres 9 17

Les caractéristiques de la population étudiée

Accessibilité et utilité perçue du PAI

24Trente encadrants sur 55 (soit 54,5 % des répondants) avaient déjà encadré un ou plusieurs enfants atteints d’une maladie chronique telle que l’asthme, l’allergie, le diabète ou l’épilepsie.

25Parmi eux, 21/30 (70 %) avaient toujours ou souvent pu lire le ou les PAI et 7/30 (24 %) avaient toujours ou souvent signé le ou les documents.

2617/30 (57 %) des encadrants avaient participé à une réunion d’information concernant le ou les enfants présentant une maladie chronique. Les points abordés au cours de la réunion étaient : les techniques de soins usuelles (13 fois cités), les différents points de vigilance (12), la pathologie (11) et les situations d’urgence (10).

27Le contenu du PAI avait été expliqué par les parents (11 fois cité), les professeurs des écoles (9), le médecin et ou l’infirmière scolaire (7), les professionnels de l’encadrement (6), les responsables administratifs (3), les professionnels de santé spécialisés (2), les enfants (1).

28Pour 23 sur 28 répondants (82 %) ayant encadré un enfant atteint de maladie chronique, les informations contenues dans le PAI les ont toujours ou le plus souvent aidés. Les encadrants ont précisé en quoi ces informations les avaient aidés. Leurs réponses (38 verbatim) ont été classées selon les compétences (tableau II).

Tableau II

Classification des éléments de compétences répertoriés dans le verbatim des encadrants concernant l’aide apporté par les informations contenues dans le PAI

Tableau II
Compétences Éléments de compétences recueillis au sein du verbatim des encadrants Nombre d’éléments cités (N = 38) Nombre d’encadrants ayant cité les éléments (N = 23) Effectif % Effectif % Compétences d’auto soins Faire face, décider « savoir comment réagir à un moment de crise », « mieux gérer les problèmes », « m’a permis de savoir quoi faire en cas de crise », « que faire », « permettre d’avoir les bons réflexes en cas de problèmes », « conduite à tenir », « procédures » 17 45 15 65 Comprendre, s’expliquer « Détails symptômes et traitements », « mieux connaître la maladie », « explique la maladie »  8 21  8 35 Résoudre un problème thérapeutique quotidien de gestion de sa vie et de sa maladie, résoudre un problème de prévention « elles permettent d’accueillir l’enfant dans de bonnes conditions », « j’ai encadré durant les T.A.P une enfant qui présentait un trouble, j’ai donc pu connaître ses limites et savoir quand faire une pause afin qu’il n’arrive rien », « surtout de ne pas céder à la panique » , « évitent toutes sources de stress pour l’intervenant et les parents »  6 16  5 22 Compétences spécifiques aux encadrants Transmettre les informations contenues dans le PAI « partager avec l’ensemble de l’équipe d’animation », « support pour transmettre infos »  4 11  4 17 Identifier l’enfant malade, les personnes ressources « savoir si un enfant est allergique à un aliment ou autre ou s’il fait de l’asthme »  3  8  3 13

Classification des éléments de compétences répertoriés dans le verbatim des encadrants concernant l’aide apporté par les informations contenues dans le PAI

29Huit encadrants ont aussi souligné leurs difficultés en lien avec le PAI. Ils abordaient alors :

  • la non accessibilité du PAI (n = 4) : « je n’avais pas le droit de voir le PAI, seul le directeur y était autorisé », « aucunes informations données aux animateurs sur ces enfants », « document de l’éducation nationale » ;
  • la non lisibilité du PAI liée à son format manuscrit (n = 2) : « pas toujours lisible suivant l’écriture du médecin » ;
  • le manque de précision dans les conduites à tenir (n = 1) : « savoir comment réagir face à un moment de crise mais pas suffisamment » ;
  • la non perception d’utilité (n = 1) : « elles (les informations du PAI) ne m’ont pas aidé ».

30Cinq encadrants sur 26 ont estimé ne pas avoir besoin d’éclaircir certains points du PAI. Les 21 (81 %) autres répondants ont spécifié leurs besoins à partir d’une liste construite sur la base des messages essentiels identifiés par les experts de chaque pathologie (asthme, allergie, diabète et épilepsie) (figure 1). Les éléments du PAI que les encadrants ont souhaité éclaircir ne diffèrent pas selon les pathologies.

Figure 1

Les différents éléments du PAI que les encadrants auraient souhaité approfondir avant d’encadrer des enfants atteints de maladies chroniques (N = 21)

Figure 1

Les différents éléments du PAI que les encadrants auraient souhaité approfondir avant d’encadrer des enfants atteints de maladies chroniques (N = 21)

31Quelle que soit la pathologie, plus de la moitié des répondants ont souligné leurs besoins concernant la reconnaissance et la gestion d’une crise et un peu moins de la moitié souhaiteraient en savoir plus sur les situations d’urgence.

Utilité d’un document complémentaire

32Les encadrants ont estimé utile de disposer d’un document complémentaire au PAI, tant pour eux-mêmes 98 % (54/55) que pour autrui 94 % (50/53).

33Les réponses aux trois questions posées aux encadrants pour identifier les messages clés que devrait contenir ce document sont les suivantes :

  1. dans un premier temps : 39/55 (71 %) des encadrants ont proposé de manière spontanée 103 éléments considérés comme essentiels dans un document complémentaire au PAI. Chaque encadrant a pu fournir entre un et sept éléments.
  2. dans un deuxième temps, ils ont sélectionné, parmi une liste préétablie issue des éléments de réponse fournis par les experts, les informations devant apparaitre dans le document (figure 2).
  3. enfin, ils ont sélectionné trois messages à conserver : 128 éléments exprimés par 89 % (49/55) des encadrants ont été répertoriés.

Figure 2

Les informations qui devraient selon les encadrants apparaître dans un document complémentaire au PAI (N = 55)

Figure 2

Les informations qui devraient selon les encadrants apparaître dans un document complémentaire au PAI (N = 55)

34Les éléments énoncés librement à la première et troisième question ont été classés selon les compétences à acquérir au terme d’un programme d’éducation thérapeutique [18] (tableau III).

Tableau III

Classification par compétences des éléments essentiels à retrouver dans un document complémentaire au PAI, exprimés spontanément puis priorisés par les encadrants

Tableau III
Compétences Exemple de verbatim correspondant Éléments cités spontanément par les encadrants Éléments priorisés par les encadrants Nombre d’éléments cités (N = 103) Nombre d’encadrants ayant cités les éléments (N = 39) Nombre d’éléments cités (N = 128) Nombre d’encadrants ayant cité des éléments (N = 49) Effectif % Effectif % Effectif % Effectif % Compétences d’auto soins Faire face, décider « Gérer, faire, faire face, quoi faire, que faire, conduite à tenir, rôle à tenir, comment, réaction, à apporter à, en cas de crise, en cas d’urgence, en cas de problème, accident, règles » 24 23 21 54 35 27 31 63 Comprendre, s’expliquer, « Maladie, description de la maladie, problème de santé, pathologies, les manifestations physiques, risques, détails, explication, savoirs, handicap, médicaments, Qu’est-ce ? » 21 20 21 54 11  9 11 22 Repérer, analyser, mesurer « Symptômes, signes, reconnaître, Identifier, détecter, prêter attention, surveillance, comportements, situation » 20 19 17 44 46 36 46 94 Pratiquer, faire « Les gestes à faire, comment utiliser, premiers secours, reflexes » « Le contenu d’une trousse de secours, les premiers gestes » 10 10  8 21  7  5  7 14 Résoudre un problème thérapeutique quotidien de gestion de sa vie et de sa maladie, résoudre un problème de prévention « Anticiper, vigilance, précautions, sécurité, consignes, risques face aux activités proposées »  8  8  5 13 17 13 17 35 Utiliser les ressources du système de soins, faire valoir ses droits « Aides extérieures, médecin traitant, instances à contacter »  3  3  3  8  0  0  0  0 Compétences spécifiques aux encadrants Identifier l’enfant malade, les personnes ressources « Nom, prénom, numéros de téléphones des parents, personnes à prévenir, parents, numéros téléphone » 16 16 15 38  7  5  7 14 Non catégorisé  1  1  1  3  5  4  5 10

Classification par compétences des éléments essentiels à retrouver dans un document complémentaire au PAI, exprimés spontanément puis priorisés par les encadrants

35Les réponses des encadrants convergent autour de trois compétences essentielles devant être abordées dans un document complémentaire :

  1. Repérer, analyser et mesurer ;
  2. Faire-face, décider ;
  3. Résoudre un problème thérapeutique quotidien de gestion de sa vie et de sa maladie, résoudre un problème de prévention.

Discussion

36Cette étude confirme le manque de préparation des encadrants des activités périscolaires qui doivent prendre en charge des enfants atteints de maladie chronique, sans pour autant remettre en cause l’intérêt du PAI [20]. En effet, plus de la moitié des répondants avaient déjà cette expérience au moment de l’enquête, mais 43% d’entre eux n’avaient pas assisté à la réunion d’information et un tiers n’avait pas eu la possibilité de lire le PAI avant l’activité. Différentes raisons limitant l’accessibilité du PAI ont été exprimées par les encadrants : leur droit d’accès, la lisibilité du document par exemple. Dans ces conditions, l’angoisse des parents paraît alors tout à fait justifiée [3]. Bien que la circulaire 2003-135 du 08/09/2003 relative à l’accueil des enfants et adolescents atteints de troubles de la santé évoluant sur une longue période précise l’obligation d’accès au PAI, il paraît donc important de renforcer et légitimer son accessibilité [7].

37Si les encadrants ayant eu accès au PAI estiment qu’il constitue une aide en particulier pour « faire face, décider » lors d’une crise, ils soulignent aussi que l’information est insuffisante puisque ils sont une majorité à avoir indiqué des besoins d’approfondissement en fonction des différentes pathologies. Ces besoins sont d’ailleurs concordants avec les informations jugées nécessaires à aborder dans un document complémentaire au PAI, par l’ensemble des répondants. Nous avions envisagé initialement un support type « document » pour compléter les informations du PAI. Ce document, jugé nécessaire par 95% des répondants, permettrait sans doute de répondre à un des besoins des encadrants de mieux identifier les enfants malades et de pouvoir contacter facilement les parents ou toute autre personne ressource. Les trois messages essentiels identifiés par les encadrants pour la prise en charge des enfants pourraient aussi être repris de façon synthétique. Selon les répondants, ces messages devraient leur permettre de : repérer les signes d’une crise, d’une situation d’urgence, décider de la conduite à tenir dans ces situations, mais aussi prévenir toute situation à risque par des actions préventives.

38Force est de constater au regard des résultats de cette étude que ce document ne serait pas suffisant. Les principaux besoins des encadrants font référence aux compétences d’auto soins qu’un patient ou son entourage doit acquérir pour gérer au mieux sa maladie et son traitement : repérer, analyser, mesurer ; faire face, décider ; résoudre un problème de prévention [18]. Ces compétences, contextualisées dans cette étude à la problématique de la maladie chronique, rejoignent celles identifiées dans le cadre d’une analyse des pratiques professionnelles menée en milieu scolaire par H. Gelle [21]. Elle a mis en évidence des compétences communes aux différents agents territoriaux ou animateurs dont celles de prendre soin et assurer la sécurité des enfants.

39J. Tardif [22] définit une compétence comme « un savoir-agir complexe prenant appui sur la mobilisation et la combinaison efficaces d’une variété de ressources internes et externes à l’intérieur d’une famille de situations ». Un des aspects majeurs de la mise en œuvre d’une compétence est l’autonomie et la prise de décision réfléchie en situation. Bien que les voies de développement des compétences soient diverses, comme le présente R. Wittorski [23], elles relèvent plus d’un apprentissage que d’une information. Un document, quel qu’il soit ne peut permettre à lui seul cet apprentissage. C’est ce qu’à révéler l’expérience d’une équipe suisse qui utilise un support sous forme de DVD afin de transmettre les messages de sécurité aux encadrants [24]. Ils soulignent en conclusion de leur expérimentation « Cet outil est un support dynamique qui sert de tremplin aux discussions interactives. Son visionnement doit impérativement être accompagné par un professionnel de la santé connaissant bien le diabète, apte à répondre aux questions soulevées et ayant l’habitude de l’animation de ces rencontres ».

40Il paraît donc essentiel, outre l’élaboration d’un document complémentaire, de le penser dans un processus d’éducation/formation plus large. Dans son dossier complet « rythmes éducatifs : point d’étape juin 2015 » Madame la Ministre de l’Éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche pointe du doigt l’accompagnement nécessaire des communes pour la qualification et l’emploi des animateurs [25].

41Développer un programme de formation pour les encadrants constitue une recommandation de cette étude. Outre l’acquisition de connaissances complémentaires, cette formation, par la posture réflexive qu’elle mobiliserait, permettrait aux encadrants d’apprendre de leurs expériences, d’identifier leurs capacités et limites dans la prise en charge des enfants, de mieux connaître les compétences des enfants dont ils ont la responsabilité, et ainsi prendre conscience du rôle de chacun lors des activités périscolaires [26].

42Le programme s’intègrerait dans le continuum des éducations en santé [27] puisqu’il permettrait de faire le lien entre la formation Apprendre à Porter Secours (APS) déclinée dans les programmes scolaires, l’Éducation à Porter Soins et Secours (EPSS) [28] qui s’applique autant à l’espace familial qu’à l’espace public, et l’Éducation Thérapeutique du Patient atteint de maladie chronique (ETP) qui concerne le patient et son entourage. De fait, il devrait mobiliser dans sa construction et sa réalisation, différents acteurs : des représentants des encadrants eux-mêmes, des professionnels de santé spécialisés dans les pathologies concernées et en ETP, des enseignants, sans oublier les enfants et les parents. En effet ce sont ces derniers qui initient l’élaboration du PAI et qui ensuite portent son contenu. L’étude a mis en lumière la place prépondérante des parents dans l’explication du contenu du PAI aux encadrants. Par ailleurs, le rôle du parent en tant que co-acteur de l’éducation est primordiale pour la mise en œuvre des compétences et assurer la continuité des soins de leur enfant au quotidien [29]. La collaboration entre l’entourage médical et l’entourage éducatif de l’enfant a déjà été soulignée pour l’optimisation du PAI [30]. La participation de professionnels de santé spécialisés en éducation thérapeutique lors d’une réunion d’information complétant la réalisation du PAI, a été plébiscitée par les parents d’enfants atteints de diabète de type 1, les professionnels de l’enseignement, les encadrants et les professionnels de santé de l’Éducation nationale [31]. De la même manière envisager la co-construction d’un support complémentaire au PAI serait un projet mobilisateur car les enjeux de sa création importeraient aux différents participants. Ces projets, formation et document, permettraient à chaque acteur de mobiliser un savoir agir dédié à la mise en sécurité des enfants.

43La généralisation des résultats de cette étude doit être prudente, l’échantillon étant faible. Il s’agit d’une étude réalisée dans un seul département de France. Le nombre de répondants sur ce département a été limité, plusieurs hypothèses d’explication peuvent être évoquées. Les encadrants n’ayant pas tous accès à internet sur leur lieu de travail, le format informatisé de l’étude et les questions à caractère non obligatoire ont pu limiter le taux de participation. Par ailleurs, le mode de diffusion du formulaire de l’enquête auprès des communes, qui à leur tour devaient transférer le formulaire auprès des encadrants, n’a pas permis pas de quantifier le nombre d’encadrants qui ont été sollicités.

Conclusion

44Cette étude a mis en lumière le cadre insécurisant dans lequel les enfants atteints de maladie chronique évoluent, lorsqu’ils participent aux activités périscolaires. Les encadrants interrogés ont signalé les insuffisances liées au PAI et leurs besoins de formation complémentaire afin d’encadrer en toute sécurité les enfants lors des activités périscolaires. Dans la perspective du développement de leurs compétences, une démarche collaborative associant parents, enfants, professionnels de l’éducation et professionnels de santé spécialisés en éducation thérapeutique, pourrait aboutir à la proposition d’une formation s’inscrivant dans le cadre des différents registres de l’éducation dans le domaine de la santé.

45Aucun conflit d’intérêt déclaré

Remerciements

Cette recherche a été menée dans le cadre d’un mémoire de fin d’étude de Master de Santé Publique spécialité Éducation Thérapeutique Éducations en Santé. Nous tenons à remercier les experts ayant contribué à l’élaboration de l’enquête et les encadrants y ayant participé.

Bibliographie

Références

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Mots-clés éditeurs : activités périscolaires, projet d’Accueil Individualisé, maladie chronique, besoins de formation, enfants

Mise en ligne 27/10/2016

https://doi.org/10.3917/spub.164.0439

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