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Article de revue

Étude comparative de systèmes de codage pour l'évaluation des situations médicales et sociales : le cas des troubles addictifs

Pages 39 à 57

Notes

  • [1]
    Département d’Information et d’Informatique Médicale - CHU de Nice - Centre Hospitalier Universitaire de Nice - Hôpital de Cimiez - 4, avenue Reine Victoria - BP 1179 - 06003 Nice Cedex 1 - France.
  • [2]
    Service de Psychiatrie - CHU de Nice - Hôpital Pasteur - 30, avenue Reine Victoria - 06002 Nice Cedex 1.
  • [3]
    Service d’addictologie - CHU de Nice - Hôpital L’Archet, 151, route Saint Antoine Ginestière - 06202 Nice Cedex 3 - France.
  • [4]
    Service des Urgences - CHU de Nice - France.
  • [5]
    Elles ont été constituées initialement, en recensant les diagnostics associés dont la présence, toutes choses étant égales par ailleurs, augmentait la durée de séjour d’au moins une journée dans au moins 75 % des cas. Afin de permettre une meilleure prise en compte de la gravité des cas, la notion de CMA a évolué et des listes d’exclusions ont été élaborées. Une liste d’exclusions est définie par rapport à un diagnostic principal. Elle énumère les affections qui, associées à ce DP, ne sont pas considérées comme des complications significatives.

Introduction

1L’addiction a été définie dernièrement [1] comme un « processus dans lequel est réalisé un comportement qui peut avoir pour fonction de procurer du plaisir et de soulager un malaise intérieur, et qui se caractérise par l’échec répété de son contrôle et sa persistance en dépit des conséquences négatives ». Le champ des addictions couvre les conduites de consommation de substances ainsi que les addictions dites « comportementales » ou addictions sans drogue, qui correspondent à des comportements compulsifs, notamment, le jeu pathologique. Les conduites addictives ont de fait, des liens étroits avec le champ de la santé mentale et de la psychiatrie. Les professionnels de la psychiatrie sont saisis pour traiter les facteurs psychologiques, psychopathologiques voire de comorbidités psychiatriques sous jacentes qui favorisent l’émergence d’une conduite addictive et leur pérennisation ou secondaires à la consommation de substances psycho actives.

2L’organisation sanitaire et sociale [2] des conduites addictives, place les professionnels de la psychiatrie et de la santé mentale au carrefour de disciplines d’équipement diverses et plus particulièrement au sein des établissements hospitaliers. Un certain nombre d’informations sont réglementairement recueillies et transmises à différents organismes (Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies (OFDT), Agences Régionales de Santé (ARS), Caisse Nationale de Solidarité de l’Autonomie (CNSA)) dans un objectif épidémiologique ou de financement de cette activité. En pratique, à l’heure actuelle, il est souvent demandé de recueillir ces informations de façon redondante. Sera-t-il souhaitable à terme de multiplier les modalités de recueil sans concertation et réflexion vers une structuration de l’information convergente et adaptée au pilotage de la qualité de la prise en charge des patients ?

3Le dispositif de prise en charge et de soins identifié pour l’addictologie est organisé en trois volets [3]: un volet sanitaire, médicosocial et de ville. Le Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Nice, dispose d’un centre d’addictologie qui comprend une unité d’hospitalisation complète pour sevrage et soins résidentiels et de différentes structures de soins ambulatoires médicosociales (CSAPA). Le recueil d’information médicosocial relatif à la prise en charge des conduites addictives est intégré au système d’information de l’établissement depuis 2005. Aussi il nous est permis de chaîner des informations centrées sur les patients et inscrites dans le champ sanitaire ou médicosocial de façon fiable.

4L’objectif de ce travail est, à partir de l’analyse des différentes informations utilisées ou utilisables, de décrire les conduites addictives et leur complication psychologique, leur prise en charge, leur valorisation et de proposer des pistes de réflexion vers une mise en cohérence des outils utilisés pour décrire des états de santé des personnes présentant des troubles addictifs et leurs prises en charge.

5Un rapprochement de ces informations a été appliqué sur le système d’information du CHU :

  • aux informations collectées pour décrire les intoxications à l’alcool dans les fiches du REcueil Commun sur les Addictions et les Prises en charge (RECAP) et les résumés d’information médicales transmises respectivement à l’OFDT et à l’ARS ;
  • aux informations issues des résumés d’information médicale pris en charge par des disciplines d’équipement différentes (Médecine, chirurgie, obstétrique (MCO), PSY, Soins de Suite et de Réadaptation (SSR)) en hospitalisation dans un établissement de santé par la mesure de la prévalence des troubles addictifs.

Méthodes

Les informations transmises

Formulaire RECAP pour l’OFDT et données d’activités pour la DGS

6Les unités de prise en charge en addictologie sont tenues de transmettre des informations au sujet de la file active de patients suivis. Des informations sociales et légales, descriptives sur les produits, les modalités de consommation de substances ainsi que des éléments caractéristiques des complications infectieuses et psychiques sont demandées dans le cadre d’un formulaire RECAP [4] et transmis annuellement à l’OFDT.

7Un rapport annuel d’activité des structures ambulatoires des dispositifs spécialisés de lutte contre les pratiques addictives est transmis à la Direction Générale de la Santé (DGS). Il recense par type de professionnels, le nombre de patients recevant des actes ainsi que le nombre d’actes réalisés. Les activités de groupes thérapeutiques répertoriées peuvent être « des activités thérapeutiques associant plusieurs patients avec au minimum un soignant » Elles se réalisent sous forme de groupes ou de réunions.

8Il est également recensé le nombre de patients ayant effectué un sevrage dans l’année et le nombre de patients sous traitement de substitution.

Le guide d’évaluation (GEVA) des besoins de compensation utilisé par les Maisons Départementales des Personnes Handicapées (MDPH)

9Un guide d’évaluation des besoins de compensation des personnes handicapées (GEVA) est utilisé par les Maisons Départementales des Personnes Handicapées (MDPH). Il définit légalement les références et nomenclatures applicables par les équipes pluridisciplinaires utiles pour l’évaluation des besoins de compensation de la personne en vue de l’élaboration du plan personnalisé de compensation. Il permet l’attribution de droits ou prestations définis dans le code de l’action sociale ou des familles. Il correspond à une adaptation de la CIH-2 au contexte français. Il est utilisé pour les personnes présentant un handicap psychique. Un certain nombre d’informations issues du GEVA sont transmises à la CNSA.

Les classifications

10Dans l’usage commun, la dixième révision de la Classification Internationale des Maladies (CIM-10) de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) est la nomenclature « outil » principalement utilisée par les structures sanitaires. Elle est utilisée pour le codage des diagnostics de morbidité des Résumés Standardisés du Programme de Médicalisation des Systèmes d’Information (PMSI), de chaque discipline d’équipement. Elle est également utilisée pour le codage des informations médicales relatives aux personnes ayant déposé une demande auprès des Maisons Départementales des Personnes Handicapées (MDPH). Cette classification permet de décrire les différentes étapes du processus, d’élaboration diagnostique de la démarche médicale du stade de symptôme (code R du chapitre XVIII) à celui de diagnostic avéré du chapitre V. Les deux versions de la Classification Internationale du Handicap (CIH-1 et CIH-2) sont les outils du médicosocial.

Les résumés d’information standardisés

11Dans le cadre du PMSI, tout séjour hospitalier en établissement de santé public ou privé donne lieu à la production d’un recueil d’information médicale, que ce soit le Résumé de Sortie Standardisé (RSS), constitué d’un ou plusieurs Résumés d’Unité Médicale (RUM) en MCO, le Résumé Hebdomadaire de Sortie (RHS) en SSR ou le Résumé par Séquence (RPS) en Psychiatrie.

12Le guide méthodologique de la production du recueil d’information médicale en psychiatrie [5], définit un certain nombre d’actes dit EDGAR (Entretien, Démarche, Groupe, Accompagnement, Réunion) réalisables par tout type de personnels. Il permet pour chaque intervention de définir le diagnostic médical, les situations de prise en charge, ou les diagnostics environnementaux (chapitre XXI de la CIM-10). Dans le cadre de la psychiatrie de liaison, il existe aussi un relevé d’actes ambulatoires. Il peut s’effectuer dans les établissements médicosociaux.

13La version expérimentale du PMSI en psychiatrie prévoyait de relever les interventions dans la communauté réalisées auprès des professionnels ou des établissements.

14La structuration, les types d’information et les règles de codage pour les différents champs (MCO, SSR, Psychiatrie) sont définis par l’Agence Technique de l’Information et de l’Hospitalisation (ATIH).

15Dans le PMSI SSR [6], la finalité principale de prise en charge décrit le motif de recours aux soins ou de contact avec les services de santé. La manifestation morbide principale et l’affection étiologique éventuelle précisent l’affection prise en charge.

16Le Diagnostic Principal (DP), dans le PMSI-SSR [6], correspond à la Manifestation Morbide Principale (MMP). Le PMSI-SSR distingue séparément l’affection étiologique portée en MMP de la finalité principale de la prise en charge destinée à décrire le motif de recours aux soins ou de contact avec les services de santé.

17Dans le PMSI-MCO, la présence de Complications ou de Morbidités Associées [5] (CMA) de différents niveaux, permet de repérer les cas les plus lourds, avec détermination de niveau de sévérité (GHM de niveau 2, 3 et 4). L’âge (69 ans ou 79 ans) du patient ou la durée du séjour peuvent majorer ou minorer le niveau de sévérité de la pathologie prise en charge au cours du séjour. Un certain nombre de codes du chapitre V (Troubles mentaux et du comportement) sont repérés comme des CMA y compris la présence de troubles addictifs.

18Dans le MCO, les catégories majeures, premier niveau de classement des résumés de séjour, sont déterminées par le diagnostic principal du séjour, ou l’acte.

19Dans le SSR, on différencie des catégories majeures cliniques avec une liste de diagnostics d’entrée (les Troubles mentaux et du comportement sont rassemblés dans la Catégorie Majeure Clinique (CMC) 13).

20Les prises en charge des hospitalisations sont décrites à l’aide d’une classification en groupes: le SSR distingue des Groupes de Morbidités Dominante (GMD 1302: Dépendance et troubles mentaux organiques induits par des substances psychoactives, adulte).

Les modalités de valorisation des activités hospitalières en T2A

21Pour le MCO, le financement de la prise en charge des conduites addictives se repère au niveau des GHM inscrits dans la vingtième Classification Majeure de Diagnostics. Des Groupes Homogènes de Séjours (GHS) [7] spécifiques individualisés pour les soins résidentiels complexes sont générés lorsque le patient est pris en charge plus de onze jours dans une unité d’addictologie identifiée pour la prise en charge des sevrages complexes et reconnue par contrat conclu entre l’établissement et l’ARS. La valorisation économique des GHS est présentée dans le tableau I. Les tarifs ainsi présentés sont réajustés en fonction de ces critères et d’un principe de repérage de borne haute ou basse.

Tableau I

Ventilation des tarifs en euros des GHS des CMD 20 et 19 par niveau de sévérité fixés dans l’arrêté du 27 février 2010 relatif à la classification et à la prise en charge des prestations d’hospitalisation pour des activités de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie des établissements publics de santé

Tableau I
GHM par Niveau de sévérité (T: Très courte durée) T 1 2 3 4 Toxicomanies non éthyliques avec dépendance, durée de séjour <11 j 536 2836 4069 6179 8048 Toxicomanies non éthyliques avec dépendance, durée de séjour >11 j 5498 7888 11978 15599 Abus de drogues non éthyliques sans dépendance 724 2085 3287 4282 Éthylisme avec dépendance, durée de séjour <11 jours 469 2442 3362 5149 6707 Éthylisme avec dépendance, durée de séjour >11 jours 4733 6517 9981 13001 Éthylisme aigu, niveau 1 619 2729 4303 5605 Troubles mentaux organiques induits par l’alcool ou d’autres substances niveau 1 563 2709 6099 8701 11334 Troubles aigus de l’adaptation et du fonctionnement psychosocial 518 1866 3123 4101 5258 Troubles mentaux d’origine organique et retards mentaux, âge > à 79 467 2928 4402 5417 6967 Troubles mentaux d’origine organique et retards mentaux, âge 80 543 2090 4240 5793 8544 Névroses autres que les névroses dépressives 594 2114 3417 4384 5459 Névroses dépressives 505 2144 3341 4498 5601 Anorexie mentale et boulimie 515 3413 6326 11430 14583 Autres troubles de la personnalité et du comportement avec réactions impulsives 549 3435 6365 8170 10168 Troubles bipolaires et syndromes dépressifs sévères 487 2345 4338 5565 6929 Autres psychoses, âge supérieur à 79 ans 476 3056 5664 7266 9047 Autres psychoses, âge inférieur à 80 ans 523 1671 3364 5102 6352 Maladies et troubles du développement psychologiques de l’enfance 628 1163 1492 1858 Autres maladies et troubles mentaux de l’enfance 634 2389 4427 5679 7071 Troubles de l’humeur 430 1656 3407 4371 5442 Autres troubles mentaux 651 1976 4287 5500 6848 Explorations et surveillance pour maladies et troubles mentaux 731 Symptômes et autres recours aux soins de la CMD. 19 688 2925

Ventilation des tarifs en euros des GHS des CMD 20 et 19 par niveau de sévérité fixés dans l’arrêté du 27 février 2010 relatif à la classification et à la prise en charge des prestations d’hospitalisation pour des activités de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie des établissements publics de santé

22Il n’existe pas pour l’instant de modèle d’allocation budgétaire T2A pour les champs SSR et psychiatrie. Les modalités de financement de ces activités restent en dotation complémentaire annuelle, modulée pour le SSR en fonction des points IVA (Indicateur de Valorisation d’Activité) produits par le recueil d’informations contenues dans le RHS.

Analyse descriptive et comparative des données recueillies

23Il s’agit dans un premier temps de faire un état des lieux des informations utiles à la description et à la valorisation économique des conduites addictives à partir de l’analyse descriptive des différentes informations réglementaires.

24Aussi dans cet objectif, sont comparés :

  • la structuration des chapitres et des codes des dernières versions des Classifications Internationales des Maladies [8] et du Handicap [9] ;
  • les codes de la CIM-10 et des informations du RECAP demandées par OFDT.
Le guide d’évaluation [10] (GEVA) des besoins de compensation utilisé par les MDPH est ensuite positionné dans ce contexte.

25Dans un second temps, la prévalence des diagnostics (principal ou autre) de conduite addictive codés dans les épisodes de prise en charge des patients sera mesurée sur une population de personnes hospitalisées au CHU de Nice en 2010. Les informations diagnostiques issues des résumés d’information médicale (RUM, RSS, RHS, et RPS) seront analysées.

26La structuration des informations diagnostiques étant différente d’une discipline d’équipement à l’autre (MCO, SSR et de Psychiatrie), il serait difficile de mesurer de façon comparable la prévalence des diagnostics addictifs. Aussi dans cette étude nous analysons les informations diagnostiques au niveau des diagnostics codés pour chaque épisode, et non pas comme le fait l’algorithme de groupage du PMSI au niveau d’un résumé d’information en fonction du diagnostic principal choisi.

27Dans cet objectif, à l’aide d’un logiciel de statistique SAS – Enterprise Guide 4 ©, à chaque diagnostic codé a été affecté le regroupement en GHM et CMD des diagnostics du manuel des GHM [11]. Les codes de consommation addictive répertoriés dans la vingtième CMD et dans les groupes « Anorexie mentale et boulimie » et « autres troubles de la personnalité et du comportement avec réactions impulsives » de la dix-neuvième CMD ont été présentés.

Résultats

Comportement addictifet classifications internationales

28La CIH-2 définit plusieurs fonctions émotionnelles (comportement pour procurer du plaisir, soulager un malaise), de l’énergie et des pulsions (fonctions mentales générales des mécanismes physiologiques qui poussent l’individu à aller de l’avant avec persistance pour répondre à des besoins spécifiques et atteindre des buts généraux), de la pensée (fonctions mentales spécifiques du langage associée à la composante idéatoire de l’esprit). Le comportement addictif tel qu’il est défini dans la circulaire du 16 mai 2007, sollicite ces fonctions. Il tient compte des complications secondaires aux comportements addictifs : psychiques, somatiques, socioprofessionnelles, légales.

29À un code CIM-10 il peut correspondre un ou plusieurs dysfonctionnements d’un trouble identifié dans la CIH.

Tableau II

Les codes descriptifs des troubles du comportement retrouvés dans la Classification Internationale du Handicap et correspondant à la définition des troubles addictifs avec leur correspondance en code CIM-10

Tableau II
Fonction CCIH CIM-10 Énergie et pulsion Niveau b1300 Vigueur et résistance Motivation b1301 Moteur de l’action Apragmatisme Appétit b1302 Désir naturel de manger et de boire R63.0 F50 Dépendance b1303 Forte envie de consommer une substance F1x.2 Contrôle des pulsions b1304 Régulation des envies Polyphagie, Boulimie, Anorexie F50.0 F50.1 Pensée Processus mental Rythme b1600 Rapidité Neurasthénie F48.0 Forme b1601 Organisation Déficience de persévération idéatoire, de la pensée tangentielle, et de prolixité circonlocutoire Contenu b1602 Idée et processus mental Délire, Idée surinvestie F1x.51 F1x.03 F50.0 Contrôle b1603 Maîtrise de la pensée Rumination, obsession, diffusion de pensée et d’insertion de pensée F42 Émotionnelle Pertinence b1520 Conformité du sentiment et de l’affect à la situation F43 Maîtrise b1521 Contrôle de l’expérience et démonstration de l’affect F41 Gamme b1522 Production d’une gamme de sentiments Amour, haine, sentiment regret, angoisse, joie, peur et colère Psychosociale B 122 Aptitude aux relations sociales globales Z63, Z60.4 Z56 Z59.2

Les codes descriptifs des troubles du comportement retrouvés dans la Classification Internationale du Handicap et correspondant à la définition des troubles addictifs avec leur correspondance en code CIM-10

Codage des intoxications et de la consommation de substances psycho-actives dans la CIM-10

30Dans la CIM, les intoxications liées à l’utilisation de médicaments et de substances biologiques sont représentées de façon différente en fonction des manifestations cliniques ou des mécanismes étiologiques incriminés.

31Les troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation de substances psycho-actives sont décrits dans le groupe F10-F19 du chapitre V de la CIM-10. Ce dernier rassemble une sélection de codes diagnostiques à 6 caractères :

  • le troisième permet de définir le toxique incriminé dans les troubles psychiques ;
  • le quatrième différencie les modalités de l’intoxication : utilisation aiguë, nocive, responsable de dépendance, de sevrage, d’amnésie, ou de troubles psychotiques résiduels ou de survenue tardive ;
  • le cinquième précise les complications psychiques associées, mais aussi les modalités de consommation de toxiques ;
  • le sixième précise le tableau clinique (en rémission récente, complète partielle), la présence de complications somatiques.
L’utilisation et l’intoxication par des substances psychoactives sont décrites dans d’autres chapitres de la CIM-10. Le chapitre XIX rassemble les codes d’intoxication par des médicaments et des substances biologiques, le chapitre XX rassemble les causes externes de morbidité et de mortalité tels que les effets indésirables thérapeutiques iatrogènes, accidentels (sur-dosage ou prise par erreur), volontaires : auto-intoxication, agression.

32En fonction de l’intentionnalité de la prise de substance, différents chapitres sont utilisés. La prise de substance peut être vitale, conviviale ou à visée thérapeutique. Le caractère légal (les substances consommées peuvent être licites ou illicites) n’est pas recensé dans les codes.

Tableau III

Analyse comparative des différents codes de la CIM-10 utilisés pour coder les intoxications par des substances addictives

Tableau III
Intoxication Troubles du comportement Intoxication Accidentelle Auto-intoxication Effet indésirable Alcool F10 T51 X45 X65 Y15 Tabac F17 Analgésiques, antipyrétiques et anti-inflammatoires F11 T40 X40 X60 Y45 Narcotiques et psychodysleptiques F12 F14 à F16, F18 T40.0 à T40.4 X42 X62 Y50 Anti-épileptiques et anti-parkinsonien F13 T42 X41 X61 Y46 Sédatifs ou hypnotiques et tranquilisants T42 Y47 Psychotropes T43 Y49

Analyse comparative des différents codes de la CIM-10 utilisés pour coder les intoxications par des substances addictives

33Dans le cadre de la production d’un résumé d’information médicale, l’ATIH préconise l’utilisation des codes du chapitre V de la CIM-10. Les codes autres que ceux du chapitre V de la CIM-10 ne sont pas à utiliser pour coder la dépendance ou les addictions.

Analyse comparative du recueil d’information à type de résumés de séjour avec la fiche RECAP

34L’analyse comparative (Tableau IV) de la fiche RECAP et des données du PMSI pour les patients hospitalisés distingue après chaînage 193 « fiches patient » RECAP pour 278 RUM générés au cours de l’année. Afin de répondre aux objectifs de l’OFDT une seule fiche est générée dans l’année, même si le patient revient plusieurs fois au cours de l’année. S’il revient, la fiche est réactualisée au niveau d’un onglet « suivi ».

Tableau IV

Comparaison des codes RECAP et CIM-10 pour décrire les intoxications à l’alcool extraites des fiches RECAP et des Résumés d’Unité médicale des patients hospitalisés en 2010 en MCO

Tableau IV
Fiche Recap Nombre Codes CIM-10 des diagnostics saisis dans les RUM Nombre Z811 Antécédents familiaux d’abus d’alcool 0 Z86.4 Antécédents personnels d’abus de substances psychoactives 0 CONSOMMATION: Alcool 79 F10 Troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation d’alcool Z72.1 Usage, difficultés liées à la consommation d’alcool (sans abus) 1 Usage à risque 2 Usage nocif F10.1 Utilisation nocive 3 Dépendance F10.2 Dépendance à l’égard de l’alcool F10.24 Utilise la drogue, dépendance active 65 6 F10.20 Syndrome de dépendance en rémission: Abstinent en rémission récente (F10.200, partielle F10.201, complète F10.200) F10.21 Abstinent en environnement protégé F10.22 Régime de maintenance, substitution sous surveillance médicale F10.23 Abstinent avec médicament aversif ou bloquant (30 derniers jours) Fréquence de consommation: 1 Pas plus d’une fois 2 < d’une fois/semaine 3 2 à 6 x par semaine 1 1 F10.26 Utilisation épisodique (dipsomanie) 17 4 Chaque jour 53 F10.25 Utilisation continue 41 5 Ne sait pas 19 Âge de début de consommation Consommation quotidienne BIOLOGIE R780 Présence d’alcool dans le sang Y90 Preuve du rôle de l’alcool confirmé par alcoolémie 9 Y91 Preuve du rôle de l’alcool confirmé par degrés d’intoxication clinique 4 PRISE EN CHARGE Z502 Sevrage Rééducation pour alcoolisme 117 Z133 Dépistage de troubles mentaux et du comportement: alcoolisme Z714 Conseil et surveillance pour alcoolisme 83 TRAITEMENT Effets secondaires des traitements Acamprosate 1 F10.22 Régime de maintenance, substitution sous surv. médicale Naltrexone 0 F10.23 Abstinent avec médicament aversif ou bloquant Antabuse 0 Antidépresseur 13 Neuroleptique 7 Anxiolytique 18 Hypnotique 13 Tentative(s) de suicide 15 T506 Produits de désintoxication alcoolique Y573 Effets indésirables des produits de désintoxication alcoolique à usage thérapeutique

Comparaison des codes RECAP et CIM-10 pour décrire les intoxications à l’alcool extraites des fiches RECAP et des Résumés d’Unité médicale des patients hospitalisés en 2010 en MCO

35Sur le volume de fiches créées, certaines ont été générées directement sur l’Unité Fonctionnelle dédiée à l’addictologie, d’autres le sont pour les patients hospitalisés en gastro-entérologie et pour lesquels l’équipe du CSAPA d’alcoologie s’est déplacée. Les personnels mobilisés sur les 104 patients concernés sont dans 88 % des cas des psychologues, dans 65 % des cas des assistantes sociales et dans 32 % une diététicienne.

36Les codes diagnostiques qui pourraient être utilisés par ces interventions ne sont pas répertoriés dans le résumé d’information médicale. Le guide méthodologique du PMSI en MCO ne recommande pas de codage de ces situations.

37La CIM-10 offre, en plus de la description des modalités d’intoxication, un panel de codes sur les antécédents, les situations de prise en charge (sevrage, dépistage, conseil et surveillance) dont les modalités peuvent se faire en hospitalisation ou en ambulatoire. Les traitements de substitution se retrouvent, mais ne sont généralement pas codés en diagnostics CIM-10.

38En plus des informations présentées dans le tableau IV, dans la fiche RECAP, il est renseigné la consommation de psychotropes, le nombre d’interventions par un psychologue ou un psychiatre, les antécédents de tentative de suicide et d’hospitalisations psychiatriques. Ces renseignements permettent d’apprécier la prise en charge actuelle et antérieure de la morbidité psychique ou psychiatrique. Les modalités de dépendance, et de fréquence des addictions sans substance, ne sont pas décrites.

39La notion de dépendance identifiée au niveau du quatrième caractère des codes F1, les différentes modalités de consommation décrites sont repérables dans les codes de la CIM-10 dans la fiche RECAP. L’utilisation de substances psychoactives sans addiction se code à l’aide d’un code en Z72.1 [Usage, difficultés liées à la consommation d’alcool (sans abus)]. L’abus (DSM-IV) ou l’usage nocif (CIM-10), sont caractérisés par une consommation susceptible d’induire des dommages au niveau somatique, psychoaffectif et social.

40Les codes CIM-10 permettent de décrire les modalités de consommation de produits addictifs avec beaucoup de précisions. Ils sont plus détaillés et exhaustifs pour décrire les antécédents et les caractéristiques biologiques. Ils ne permettent pas de recueillir les traitements administrés.

Analyse comparative GEVA avec la fiche RECAP

Codage des informations environnementales

41Un certain nombre d’informations relatives aux caractéristiques environnementales du volet médico-social est contenu dans les différents volets du guide d’évaluation GEVA récemment en vigueur pour définir le contenu du dossier informatisé des Maisons Départementales des Personnes Handicapées de façon très complète. Elles se retrouvent en partie dans le dossier administratif du patient à son admission par les bureaux des entrées, dans un objectif de facturation, ou pour pouvoir contacter la personne ou les personnes de l’entourage immédiat du patient ; dans le dossier RECAP ; ou dans les informations médicosociales annexées au RIM-p.

42En raison de l’absence de valorisation des interventions sociales par exemple, et du caractère essentiellement informatif de cette variable, les codes environnementaux et sociaux sont très peu utilisés dans les résumés d’information du PMSI, même si on note par ailleurs l’intervention par les travailleurs sociaux.

Codage des informations légales

43En addictologie, certaines mesures de prise en charge sont prononcées par un magistrat par jugement (injonctions thérapeutiques, classement avec orientation) et prennent donc un caractère légal. Cette information est repérée dans RECAP au niveau de l’Item « Origine de la prise en charge actuelle ». Elle est répertoriée avec d’autres informations utiles à la connaissance de la filière de soins ainsi que l’environnement familial ou professionnel. Des actes spécifiques pour comptabiliser ces modalités d’intervention ont été repérés au niveau des actes recueillis par les CSAPA. Dans le chapitre XXI de la CIM-10, cette notion légale n’est pas explicitée.

44Les informations relatives aux incarcérations relevées dans la fiche RECAP sont essentiellement les antécédents d’incarcération et leur durée. Le caractère « actif » de cette situation n’est pas enregistré, dans la mesure où ce sont plutôt des unités hospitalières (UCSA), implantées en milieu pénitentiaire, qui assurent les soins somatiques et psychiatriques incluant la prévention, l’organisation des soins. Ces situations peuvent être repérées avec les codes Z65 du chapitre XXI de la CIM-10.

Prévalence des troubles addictifs au CHU de Nice

45Le tableau V présente la prévalence des épisodes de soins avec troubles addictifs diagnostiqués et qui ont mobilisé une prise en charge au niveau du CHU en fonction de la discipline d’équipement. 16 % des épisodes de soins des patients en psychiatrie ont présenté des troubles addictifs et seulement 2,4 % ont eu un suivi par les CSAPA. Le repérage des addictions dans les RUM du CHU ne signifie pas forcément qu’une prise en charge ambulatoire ait été réalisée par l’équipe d’addictologie. En outre, le recueil RECAP recense uniquement les troubles suivis par une équipe dédiée.

Tableau V

Prévalence en pourcentage des diagnostics d’addictologie par épisode de soin des patients pris en charge au CHU de Nice en psychiatrie, MCO et SSR en 2010

Tableau V
RPS (Psy) RUM (MCO) RHS (SSR) CHU Toxico Urgen ces psy Gastro Nombre de patients 630 54 954 130 2330 2 299 2 113 Nombre d’épisodes 906 68 004 210 2798 2 983 2 532 % de patients avec au moins un suivi RECAP depuis 2005 2,4 1,5 98,5 6,1 13,7 0 % de diagnostic «troubles mentaux organiques liés à l’absorption de drogues ou induits par celles-ci» 16,59 9 99,5 30,8 21,2 3,5 % de toxicomanies non éthyliques avec dépendance 10,33 5,23 88,6 3,6 14,1 1,3 % de toxicomanies non éthyliques sans dépendance 4,18 0,96 7,1 5,0 0,5 0,6 % Éthylisme avec dépendance 0,99 3,23 49,0 19,2 10,9 1,4 % Éthylisme aigu 9,12 1,67 4,8 17,0 1,3 0,1 % Troubles mentaux organiques induits par substances 1,65 0,41 2,9 2,5 0,6 0,7 % de diagnostic de «Maladies et troubles mentaux» 95,4 21,04 78,1 30,8 19,6 42,1 % de troubles aigus de l’adaptation et du fonctionnement psychosocial 8,61 2,00 2,9 17,0 7,7 3,5 % d’anorexie mentale et boulimie 0,00 0,24 4,3 1,9 1,3 0,1 % d’autres troubles de la personnalité et du comportement avec réactions impulsives 17,88 0,99 31,0 18,3 0,1 0,3 % Troubles bipolaires syndromes dépressifs sévères 9,93 1,28 2,9 19,2 0,6 2,3 % Autres psychoses 17,88 1,97 0,0 33,2 1,1 1,6 % Troubles mentaux d’origine organique et retards mentaux 3,97 6,18 1,0 9,0 3,5 27,4 % Maladies et troubles du développement psychologiques de l’enfance 0,66 0,06 0,0 0,1 0,0 0,0 % Autres maladies et troubles mentaux de l’enfance 0,00 0,07 0,0 0,1 0,0 0,1 % Troubles de l’humeur 0,66 0,25 0,0 0,8 0,5 0,7 % Autres troubles mentaux 1,32 0,51 1,0 9,1 0,1 2,9 % Névroses autres que les névroses dépressives 1,32 0,10 0,5 0,5 0,1 0,1

Prévalence en pourcentage des diagnostics d’addictologie par épisode de soin des patients pris en charge au CHU de Nice en psychiatrie, MCO et SSR en 2010

46La prise en charge par une structure d’addictologie est très faiblement retrouvée dans ce cas. Une hospitalisation pour un autre motif peut être l’occasion de la découverte et éventuellement de la prise en charge d’une conduite addictive, qui ne débouche pas forcément sur une prise en charge poursuivie en ambulatoire par un centre spécialisé (décès du patient lié aux complications de l’addiction, refus du patient du suivi, compliance, participation du médecin traitant à la prise en charge…).

47Dans le recueil SSR, la proportion de codes liés aux addictions n’est pas très importante, les explications peuvent en être le défaut de codage, le caractère plutôt gériatrique de la prise en charge (SSR gériatrique de Cimiez) où l’addiction n’est pas vraiment le problème.

48Les modalités de dépendance et de fréquence des addictions sans substance ne sont pas décrites de façon spécifique. Elles sont répertoriées avec d’autres situations cliniques dans le groupe « autres troubles de la personnalité et du comportement avec réactions impulsives ».

49Les anorexies sont très peu retrouvées en prévalence dans l’établissement. Elles sont essentiellement répertoriées dans les troubles de la nutrition et de la dénutrition dans la mesure où ces pathologies sont suivies par des services d’endocrinologie et de gastroentérologie. Dans le cadre des troubles compulsifs alimentaires, certaines manifestations comme l’obésité seront prévalentes par rapport aux troubles psychiques. Bien souvent, pourtant dans ces situations, les psychologues ou les psychiatres de liaison seront plus particulièrement sollicités avant la pose de By-Pass par exemple. En outre, ces troubles seraient plus souvent pris en charge par des structures privées.

Discussion

50L’analyse des informations disponibles dans la CIM-10 utilisables pour décrire les différentes composantes explicatives, descriptives ou consécutives des troubles addictifs montre qu’une majorité des codes sont retrouvés dans le chapitre des troubles mentaux et du comportement. On retrouve cependant dans les autres chapitres de cette classification un éventail de codes permettant de décrire les toxiques, les complications somatiques et sociales inhérentes à cette pathologie. Une même complication psychique peut également être codée différemment selon que l’on tient compte ou non du mécanisme explicatif du trouble psychiatrique.

51Dans le cadre du codage des RUM dans un objectif de valorisation économique de l’activité médicale, le choix d’un code diagnostique dépend des spécialités concernées par ce recueil mais aussi des recommandations de l’ATIH. Le mécanisme de l’intoxication et l’existence d’une dépendance orientent le choix du diagnostic principal issu d’un des chapitres de la CIM-10.

52L’algorithme de classement des séjours en groupe homogène de malade et en catégorie majeure de diagnostic s’appuie sur la structuration des codes CIM-10 pour individualiser les différents groupes de malade pris en charge. Le classement des séjours se fait par patients et épisodes de soin, aussi il est nécessaire de déterminer des règles de prépondérance dans le choix des diagnostics à relever et donc de perdre un certain nombre d’informations lié aux règles de hiérarchisation du codage des diagnostics de l’ATIH.

53La prévalence des troubles addictifs pris en charge au CHU en 2010 (tableau V) issue de l’analyse des diagnostics principaux ou associés s’est mesurée sur l’ensemble des diagnostics codés à l’occasion d’un séjour hospitalier. Il ressort que l’équipe d’addictologie est essentiellement sollicitée sur les unités dédiées à ce type d’activité. Sur les autres unités d’hospitalisation, très peu de fiches RECAP ont été générées. Ceci montre que les informations transmises à l’OFDT portent essentiellement sur les dispositifs dédiés à ces prises en charge et remet en question une estimation de la prévalence des troubles addictifs basée uniquement sur les données issues des fiches RECAP. Paradoxalement, le recueil d’information du PMSI n’a pas pour objectif d’être épidémiologique, et la fiche RECAP plus centrée épidémiologie ne reflète qu’une partie de la prise en charge des sujets addicts. Afin d’améliorer les basessources de l’information, l’amélioration du codage PMSI est un élément non négligeable. La prise en charge par une équipe spécialisée (psychiatre, psychologue…) des conduites addictives au cours de l’hospitalisation devrait être retracée dans le PMSI par un codage systématique et plus précis des situations constatées. Cela conduirait à une éventuelle meilleure valorisation des séjours et à une amélioration des informations descriptives. Avec le chaînage des séjours, les données PMSI pourraient retracer sur une région le nombre de patients ayant fait l’objet d’une prise en charge de conduites addictives durant leur hospitalisation, et ce nombre pourrait être rapporté au nombre de patients suivis par les structures spécialisées ambulatoires à travers les fiches RECAP.

54Si la CIM-10 décrit parfaitement les modalités d’intoxication à des produits de consommation addictive, les troubles du comportement addictif sans produit mériteraient d’être davantage individualisés. La revue de la littérature montre que le jeu pathologique [12] est fréquemment retrouvé chez les patients consultant en addictologie. Il est cependant difficile à repérer dans cette étude en raison probablement d’une faible cotation par les cliniciens, mais aussi parce qu’il n’est pas individualisé de groupe de malades pour les troubles addictifs sans substance, pas plus que pour les substances moins fréquentes ou associées. Les addictions au tabac prises en charge ne sont pas repérées, elles sont majoritairement prises en charge en ambulatoire cependant. Des troubles de la personnalité (personnalité dépendante, anti-sociale ou obsessionnelle) repérés de façon indépendante des codes F1, sont retrouvés chez 31 % seulement des patients hospitalisés dans l’unité addictologie aux toxicomanes. Ce chiffre est faible, comparé à ceux retrouvés dans les études internationales [13] [14]. Les troubles de la personnalité pourtant inscrits comme des comorbidités associées, facteurs d’une meilleure valorisation économique, sont encore sur la période étudiée, très peu codés par les cliniciens des services. Sa cotation nécessite en outre que l’équipe d’addictologie mobilise spécifiquement des ressources.

55Les urgences psychiatriques, bien qu’elles ne soient pas dédiées à cette problématique accueillent massivement les patients ivres pour lesquels l’addiction mise en place par le patient est essentiellement à visée thérapeutique anxiolytique. Dans ce contexte, l’unité étant dédiée à la prise en charge des troubles psychiatriques, le codage des séjours valorise si possible les troubles psychiatriques sous-jacents. Beaucoup de patients « addicts » sont vus dans un second temps en consultation de post-urgence sans codage.

56Dans cette étude, nous n’avons pas cherché à décrire la fréquence très élevée des comorbidités associées chez les patients présentant des addictions, mais qui, en pratique, compliquent considérablement la prise en charge. En termes de valorisation économique, elles sont repérées au niveau des différents groupes de sévérité.

57Les règles de codage des informations de la fiche RECAP, transmises à l’OFDT, prévoient de hiérarchiser le produit consommé par ordre d’importance de consommation, et repèrent le produit à l’origine de la prise en charge du patient. Les modalités de consommation sont différentes d’un produit à l’autre, et un produit peut, au cours de l’année considérée, passer au second plan, voire s’interrompre, cependant il existe un manque de lisibilité dans le suivi des consommations addictives sur la fiche RECAP telle qu’elle est actuellement structurée.

58Les codes du chapitre V de la CIM-10 permettent de repérer les patients, les stades d’évolution des troubles addictifs ou de leur complication (en rémission, en fin de traitement). Cette information s’appuie sur des critères cliniques, disponibles dans le dossier du patient. Elle est importante à identifier pour étudier l’histoire de l’addiction à un produit, et peut changer pour un produit donné à chaque événement de soin.

59Si l’épisode de soin est facile à identifier au cours d’une prise en charge hospitalière à temps complet, en ambulatoire, les règles définissant un épisode de prise en charge par rapport à une situation de la consommation d’un produit sont difficiles à considérer notamment pour les prises en charge par les CSAPA. Il est classique d’ouvrir un épisode dit « récurrent » pour l’année. Cependant cette notion a essentiellement une pertinence administrative, mais ne correspond pas forcément à une logique clinique. Il serait nécessaire de s’entendre sur les critères médico-administratifs utiles à la définition du début et de la fin d’une séquence de prise en charge. De ce fait, la confrontation de ces informations avec les pratiques de soins n’est pas réalisable, et remet en question l’adaptabilité des systèmes d’information hospitaliers en l’état actuel de sa structuration au pilotage de la qualité de la prise en charge des patients. Ce besoin de pilotage ne pouvant se contenter d’un suivi financier ou d’activité.

60Si les informations médico-économiques du PMSI, recentrent sur un temps de soin considéré, l’ensemble des informations qui mobilisent le personnel en fonction d’un diagnostic posé, les informations du RECAP permettent d’avoir une photographie de la situation générale du patient, sans présumer de la prise en charge immédiate ni de la réponse donnée face à une situation diagnostiquée.

61Un certain nombre d’études a montré que les séjours hospitaliers de personnes en situation de précarité (SDF par exemple) dont on dit que 72 % ont une addiction, seraient plus longs et plus coûteux que ceux des patients qui ne sont pas en situation de précarité [15]. Plusieurs travaux sont en cours dans le domaine de la santé publique de manière à codifier le niveau de précarité du patient, et de nombreux indicateurs comme le score de handicap social [16], les scores EPICES sont proposés pour être utilisés comme indicateur de handicap social [17], ces indicateurs donnent une mesure globale de la situation sociale des patients mais ne préjugent pas des actions sociales mises en place au moment du séjour comme le préconise le recueil des informations médicales.

62La Classification Internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé a pour objectif de proposer un langage uniformisé et normalisé ainsi un cadre de travail pour la description des états de santé. Elle appréhende différentes dimensions: les structures et fonctions du corps (dont les altérations correspondent aux différentes parties du corps), les activités dont les limitations évoquent la notion d’incapacité utilisée dans la CIH et la participation sociale (dont la restriction est considérée comme le handicap vécu par la personne dans sa vie quotidienne), les facteurs environnementaux.

63Elle donne des pistes de travail intéressantes pour l’évaluation des différentes composantes des troubles addictifs, que ce soit les mécanismes psychologiques explicatifs, ou les complications psychiques et sociales inhérentes à ces troubles. Elle pourrait être utile aux évaluations des différents professionnels de santé impliqués dans la prise en charge des personnes présentant des troubles addictifs. Le Guide d’évaluation [18] des besoins de compensation de la personne handicapée est l’outil prévu réglementairement pour les équipes pluridisciplinaires évaluant les besoins de compensation de ces personnes et leur incapacité permanente basée sur leur projet de vie. Il permet de proposer un plan personnalisé de compensation du handicap. L’outil [19] se base sur la CIH-2 du point de vue des items choisis et de l’échelle des capacités mais il prend en compte le schéma interactif du Processus de Production du Handicap ainsi que le principe d’échelle du MHAVIE de Fougerollas [20] qui mesure les habitudes de vie. Il n’est cependant pas validé au niveau international, comme c’est le cas de la CIH ou la CIM-10.

64Un certain nombre de mesures de soins, (l’injonction thérapeutique, l’obligation de soins et l’injonction de soins décidées par un magistrat) revêtent un caractère légal. Avec la Loi du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge, les admissions en soins psychiatriques se font désormais sur décision de justice par le juge des libertés et de la détention. L’enregistrement de ces informations à caractère légal pose cependant des problèmes éthiques, de confidentialité et de respect du secret médical, voire l’individualisation d’un secret médico-légal pour lequel des mesures de protection spécifiques devraient être mises en place.

Conclusion

65L’analyse de l’ensemble des systèmes d’informations actuellement utilisés par les professionnels de santé issus des champs sanitaires et médico-sociaux habilités à prendre en charge les troubles addictifs, montre qu’il faut repérer différents niveaux d’information dans la structuration de ces informations.

66Les informations utiles au repérage de l’évaluation de la situation de la personne à chaque venue sont structurées au niveau du dossier de la personne. Le guide d’évaluation des besoins de compensation des personnes handicapées (GEVA) propose une structuration des informations en différents volets et notamment un volet psychologique encore très peu développé à ce jour. Il intègre l’évaluation des différentes composantes environnementales de la situation de la personne en tenant compte des indicateurs décrits dans la classification internationale fonctionnelle. Il rassemble l’ensemble des informations sociales et environnementales contenues actuellement dans le REcueil Commun sur les Addictions et les Prises en charge (RECAP), ou le dossier hospitalier administratif des patients.

67Les prises en charge mobilisées et réalisées par les professionnels de santé, en réponse à des situations cliniques identifiées, sont structurées au niveau du Programme de Médicalisation des Systèmes d’Information dont l’objectif est essentiellement médico-économique. Les différentes situations sociales prises en charge par ces structures ne sont pas valorisées à ce jour dans les systèmes d’informations sanitaires.

68La Classification Internationale des Maladies offre un éventail de codes diagnostiques complexes et synthétiques, utilisés pour décrire les modalités de consommation de produits, les facteurs étiologiques et les complications psychiques et somatiques inhérentes aux troubles addictifs. La structuration de cette information mériterait cependant d’être simplifiée et harmonisée d’un chapitre à l’autre de la classification et les addictions comportementales sans produit devraient être mieux individualisées.

69La dimension psychologique est bien développée dans la classification du handicap et offre des pistes intéressantes pour son évaluation par les différents professionnels de la santé psychique.

70Il serait souhaitable cependant de disposer d’une classification internationale des situations de santé mettant en convergence les classifications des maladies et du handicap dans laquelle l’ensemble des professionnels pourraient trouver en partie des outils utiles à l’évaluation des situations mobilisant des ressources et correspondant à leurs interventions.

71Un certain nombre de mesures de soins, revêtent un caractère judiciaire, renforcé récemment pour les soins psychiatriques sans consentement qui se font désormais sur décision du juge des libertés et de la détention depuis la Loi du 5 juillet 2011. Ces informations mériteraient une mesure de protection spécifique.

72Aucun conflit d’intérêt déclaré


Glossaire

73ARS Agences Régionales de Santé

74ATIH Agence Technique de l’Information et de l’Hospitalisation

75CHU Centre Hospitalier Universitaire

76CIH Classification Internationale du Handicap

77CIM-10 Dixième révision de la Classification Internationale des Maladies

78CMA Complications ou de Morbidités Associées

79CMC Catégorie Majeure Clinique

80CMD Classification Majeure de Diagnostics

81CNSA Caisse Nationale de Solidarité de l’Autonomie

82CSAPA Centres de Soins d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie

83DGS Direction Générale de la Santé

84DP Diagnostic Principal

85EDGAR Entretien, Démarche, Groupe, Accompagnement, Réunion

86GEVA Guide d’EVAluation des besoins de compensation

87GHM Groupe Homogène de Malade

88GMD Groupes de Morbidités Dominante

89GHS Groupes Homogène de Séjour

90MCO Médecine, Chirurgie, Obstétrique

91MDPH Maisons Départementales des Personnes Handicapées

92MMP Manifestation Morbide Principale

93OFDT Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies

94OMS Organisation Mondiale de la Santé

95PMSI Programme de Médicalisation des Systèmes d’Information

96RECAP REcueil Commun sur les Addictions et les Prises

97RHS Résumé Hebdomadaire de Sortie

98RSS Résumé de Sortie Standardisé

99RUM Résumés d’Unité Médicale

100RPS Résumé par Séquence en Psychiatrie

101SSR Soins de Suite et de Réadaptation

Bibliographie

Bibliographie

  • 1
    Circulaire 16 mai 2007 relative à l’organisation du dispositif de prise en charge et de soins en addictologie.
  • 2
    Schéma Régional d’Addictologie en Provence-Alpes-Côte d’Azur – 2009-2013 – Prévention et prise en charge - Septembre 2009.
  • 3
    Circulaire du 2 janvier 2006 relative à la structuration du dispositif, à la mise en place et au financement des CAARUD par l’assurance maladie.
  • 4
    http://www.ofdt.fr/ofdtdev/live/donneesnat/recap.html
  • 5
    Guide Méthodologique de production du recueil d’information médicalisé en psychiatrie, ATIH, décembre 2010.
  • 6
    Guide méthodologique de production des informations relatives à l’activité médicale et à sa facturation en soins de suite et de réadaptation – BO n° 2010/2 bis – Fascicule spécial.
  • 7
    Arrêté du 19 février 2009 relatif à la classification et à la prise en charge des prestations, hospitalisation pour les activités de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie et pris en application de l’article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale.
  • 8
    Classification Internationale des Maladies – Dixième révision – volume 1 – Organisation Mondiale de la Santé – Genève.
  • 9
    Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la Santé, Project final, Version complète - WHO/GPE/CAS/icidh-2 FI/01.1, Équipe Classification, Enquête et terminologie Organisation Mondiale de la Santé Genève, Suisse.
  • 10
    Annexe 1 de l’arrêté du 6 février 2008 relatif au guide d’évaluation des besoins de compensation des personnes handicapées définissant les références des nomenclatures applicables au guide d’évaluation des besoins de compensation des personnes handicapées prévu à l’article R. 146-28 du code de l’action sociale et des familles.
  • 11
    Manuel des GHM – Volume 2 – Description détaillée par CMD et GHM – 11e version de la classification – 1re révision (11b) – Version 12.11b de la fonction groupage – Mise à jour au 1er mars 2010 – Bulletin officiel - n° 2010/4 bis - Fascicule spécial.
  • 12
    ANPAA, Nalpas B, et al. Pathological gambling in treatment-seeking alcoholics: a national survey in France. Alcohol Alcohol 2011;46:156-60.
  • 13
    Zikos E et al. Personality disorders among alcoholic outpatients: prevalence and course in treatment. Can J Psychiatry. 2010;55:65-73.
  • 14
    Preuss UW, et al. Personality disorders in alcohol-dependent individuals: relationship with alcohol dependence severity. Eur Addict Res 2009;15:188-95.
  • 15
    Mathy C, Bensadon M. Le surcoût de l’hospitalisation des patients précaires. Journal d’économie médicale 2002;20:263-78.
  • 16
    Castiel D, Bréchat PH. Handicap social et hôpitaux publics : pour un GHS « socialisable ». Presse Med 2009;38:142-5.
  • 17
    Castiel D, Bréchat PH. Réformes hospitalières, tarification à l’activité et handicap social: vers une mise en cause de la mission sociale des établissements de santé et du principe de solidarité ? Médecine et droits 2009 (2009) 52-7.
  • 18
    Manuel d’accompagnement du GEVA – Guide d’évaluation des besoins de compensation de la personne handicapée – Mai 2008.
  • 19
    « Handicap d’origine psychique et évaluation des situations » Volet 1 : recherche documentaire – Recherche-action en matière d’évaluation conjointe du handicap psychique réalisé par la délégation ANCREAI Ile-de-France pour le compte de la CNSA – Jean Yves Barreyre 1Yara Makdessi Décembre 2007 CNSA-CEDIAS.
  • 20
    Fougeyrollas P, Noreau L, Boschen KA. « Interaction of Envirronment with Individuals Characteristics and Social Participation: Theoretical Perspectives and Applications in Person with Spinal Cord Injury ». Top Spinal Cord Inj Rehabilitation 2002;7(3):1-16.

Mots-clés éditeurs : addiction, inadaptation sociale, classification maladies, PMSI, santé mentale, GHM, psychiatrie, classification internationale handicap

Date de mise en ligne : 09/02/2012.

https://doi.org/10.3917/spub.110.0039

Notes

  • [1]
    Département d’Information et d’Informatique Médicale - CHU de Nice - Centre Hospitalier Universitaire de Nice - Hôpital de Cimiez - 4, avenue Reine Victoria - BP 1179 - 06003 Nice Cedex 1 - France.
  • [2]
    Service de Psychiatrie - CHU de Nice - Hôpital Pasteur - 30, avenue Reine Victoria - 06002 Nice Cedex 1.
  • [3]
    Service d’addictologie - CHU de Nice - Hôpital L’Archet, 151, route Saint Antoine Ginestière - 06202 Nice Cedex 3 - France.
  • [4]
    Service des Urgences - CHU de Nice - France.
  • [5]
    Elles ont été constituées initialement, en recensant les diagnostics associés dont la présence, toutes choses étant égales par ailleurs, augmentait la durée de séjour d’au moins une journée dans au moins 75 % des cas. Afin de permettre une meilleure prise en compte de la gravité des cas, la notion de CMA a évolué et des listes d’exclusions ont été élaborées. Une liste d’exclusions est définie par rapport à un diagnostic principal. Elle énumère les affections qui, associées à ce DP, ne sont pas considérées comme des complications significatives.
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