1Durant l'Occupation, grâce au courage de tous ses militants, l'O.S.E. a pu sauver des milliers d'enfants juifs. Ils ont pu gagner clandestinement la Suisse et l'Espagne, être placés sous de fausses identités chez des particuliers, dans des institutions publiques ou religieuses et être soustraits au danger de la déportation.
2Dès la Libération, l'O.S.E. a pu reprendre ouvertement ses activités, son siège a été à nouveau transféré à Paris dès l'automne 1944.
3Une des premières tâches a été de retrouver les enfants cachés et aussi d'essayer de retrouver également des membres de leur famille. De nombreux bureaux locaux ont pu être ouverts notamment à Paris, Marseille, Lyon, Grenoble, Nice, Toulouse, Pau, Agen, etc... et grâce à une liste cryptée établie par une des dirigeantes de l'O.S.E. de la région de Limoges, la trace de la presque intégralité des enfants a pu être retrouvée et les enfants regroupés sans trop de difficultés dans les maisons d'enfants ouvertes dans ce but, à l'exception de quelques cas difficiles dont les enfants Finaly, qui ont pu quelques années plus tard retrouver leur famille survivante en Israël à la suite de procès fameux qui ont défrayé la chronique.
4Pour accueillir ces enfants dont le nombre s'est élevé à près de 1 500, de nombreuses institutions ont dû être ouvertes malgré les difficultés immenses dues aux conditions économiques de la période.
5C'est ainsi qu'en fin 1945, 30 établissements ont accueilli ces enfants, la moitié dans la région parisienne, les autres dans la région lyonnaise, dans le centre de la France notamment dans le Limousin, mais aussi en Bretagne, dans la Sarthe, etc...
6L'O.S.E. a pu utiliser certaines propriétés qu'elle avait occupées spécialement dans le centre de la France, elle fera réquisitionner d'autres. Les problèmes matériels ont pu être surmontés grâce à l'appui des instances locales, de l'entraide française et surtout grâce à l'aide financière et alimentaire de l'A.J.D.C.
7La question de l'encadrement a posé de grandes difficultés, des cadres de l'O.S.E. issus de la Résistance ont pris la direction de quelques institutions, d'autres bonnes volontés : enseignants, ingénieurs, responsables de mouvements de jeunesse, sont venus les rejoindre.
8Pour pallier l'absence des cadres pédagogiques, des formations ont été initiées par l'O.S.E.. Une école de jardinière d'enfants a été ouverte dans la maison de Bellevue, en région parisienne, où était accueillis des enfants de 3 ans à 6 ans.
9Un centre de formation de moniteurs éducateurs a fonctionné à la Maison-La-Forge à Fontenay-aux-Roses et un autre pour des moniteurs de sports à Gournay.
10Une fois assurés le gîte et la nourriture des enfants, de nombreux problèmes se posèrent.
11En premier lieu, le regroupement familial, il fallait essayer de retrouver les membres survivants de la famille directe ou alliée, des listes ont pu être publiées en France et diffusées dans les pays où on espérait retrouver des membres proches ou même éloignés, surtout aux États-Unis, Palestine, Canada, Australie, Amérique du Sud. Tout un service dirigé par une des personnalités les plus remarquables de l'O.S.E.a mis tout en œuvre pour faire retrouver, ne fusse qu'un embryon de famille à ces enfants rescapés. Des centaines d'enfants ont ainsi pu retrouver une famille. A cet égard, il faut signaler que près d'une centaine d'enfants, conduits par les responsables de ce service, ont pu gagner les États-Unis, au cours de l'année 1947. Embarqués sur un Liberty-ship, ils étaient bloqués dans le port de New York par suite d'une grève de dockers, grâce à l'intervention des responsables de l'O.S.E. Amérique auprès du syndicat des dockers, des vedettes ont évité aux enfants cette attente et ils ont pu être accueillis par leur famille américaine ou canadienne.
12D'autres problèmes ont dû être également solutionnés. En premier lieu, les enfants souvent trop jeunes ont été cachés sous des fausses identités, il fallait retrouver leur véritable nom, les habituer à se familiariser avec celui-ci : un service juridique a été crée, des tutelles ont été organisées, des cartes d'identité établies. Pour les ayant droits obtenir leur adoption comme Pupilles de la Nation éventuellement obtenir la restitution de leurs biens. Il faut signaler que le même service a effectué ultérieurement les démarches nécessaires pour obtenir pour ces enfants les indemnités et les restitutions prévues par la législation allemande.
13Les questions de santé ont également préoccupé l'O.S.E., des examens médicaux complets furent effectués, les vaccinations et les soins requis par leur santé ont pu être mis en œuvre.
14Un service médico-psycho-pédagogique sous la direction du Dr Minkowski et comprenant des médecins psychiatres et des psychologues a été crée pour prendre en charge les problèmes psychologiques des enfants gravement perturbés par suite des épreuves subies.
15Du fait des événements et surtout de la clandestinité, la scolarité des enfants a subi d'importants retards, des mesures spéciales ont été prises, si les enfants ont tous rejoint les écoles publiques de leur commune, les rattrapages scolaires ont eu lieu au sein des maisons d'enfants, soit par l'équipe de la maison, soit par des intervenants extérieurs. Au cours de l'été 1946, une petite université d'été a été organisée dans la maison de Limoges pour un remise à niveau surtout en mathématiques et en français. Une vingtaine de jeunes de plus de 16 ans avait dû interrompre leurs études, pour eux une maison a été ouverte au Vésinet sous la direction d'une pédagogue expérimentée ; cette maison a porté le nom de Pauline Godefroy, assistante sociale non-juive, assassinée par les nazis au cours d'un mission effectuée pour le compte de l'O.S.E.. Les résultats ont été brillants et les jeunes ont pu poursuivre leurs études à l'université et la maison a pu fermer en 1949.
16Le fonctionnement matériel des maisons d'enfants a pu être assuré, en premier lieu grâce aux instances publiques locales qui malgré les restrictions du moment ont apporté une aide appréciée, mais la charge essentielle a été supportée par l'A.J.D.C. qui a financé presque intégralement les institutions et a apporté d'importants suppléments alimentaires.
Les enfants de Buchenwald
17Un chapitre spécial doit être consacré à l'accueil par l'O.S.E. de 430 enfants et adolescents rescapés du camp de Buchenwald.
18A la demande de l'Organisation Internationale pour les réfugiés et du gouvernement français, l'O.S.E a accueilli dans le préventorium d'Ecouis mis à sa disposition par le gouvernement 430 enfants et jeunes retrouvés par les troupes américaines lors de la libération des camps.
19Ces enfants étaient originaires de Pologne, Tchécoslovaquie, Roumanie et Hongrie, certains avaient séjourné pendant plusieurs années dans des camps en Allemagne et ils avaient perdu toute leur famille.
20De nombreuses études et publications ont été faites et dans le cadre de ce colloque quelques faits saillants seront seulement évoqués.
21Une importante équipe médicale avait été mise en place et on a pu constater que malgré les épreuves subies, l'état de santé de la presque intégralité du groupe était satisfaisant, c'était sans doute le résultat d'une sélection naturelle, les plus résistants ayant pu surmonter les épreuves.
22Parmi le groupe, une centaine de jeunes étaient d'un milieu très religieux et une maison mise à la disposition par un ami de l'O.S.E. a pu les accueillir un mois après leur arrivée et ils y ont trouvé un encadrement compétent, une alimentation rituelle et un mode de vie traditionnel.
23Le service de regroupement familial de l'O.S.E. s'est mis immédiatement en œuvre et presque une centaine d'entre-eux ont pu retrouver et rejoindre une famille proche ou lointaine aux États-Unis, au Canada et en Australie.
24Pour plus de 200, on a pu obtenir exceptionnellement auprès des autorités britanniques des visas d'entrée en Palestine et ils ont rejoint le foyer national juif au cours du mois de juillet 1945.
25Pour ceux qui ont décidé de rester en France, il ont été répartis en fonction de leur âge dans les maisons d'enfants de l'O.S.E ; de la région parisienne et le centre d'Ecouis a été fermé à la fin du mois d'août.
26Une difficulté doit être signalée, ces jeunes parlaient le yiddish à l'exception de quelques Roumains connaissant le français. Or, dans l'équipe d'Ecouis, très peu pouvaient s'exprimer en yiddish, et ils ne tenaient pas à utiliser la langue allemande qui éveillait de trop mauvais souvenirs aux jeunes. Grâce à l'apport de quelques bonnes volontés dont celle d'un écrivain, ce handicap a pu être surmonté.
27Peu à peu, l'effectif des maisons d'enfants a diminué, les plus âgés ont pu entrer dans la vie professionnelle, d'autres ont immigré ou ont retrouvé une famille en France. Par ailleurs, l'A.J.D.C. a réduit considérablement son appui financier et en 1950, l'O.S.E. a dû procéder à la fermeture définitive de la plupart de ses maisons.
28Après le sauvetage des enfants, leur retour dans la famille survivante ou leur intégration dans la vie professionnelle pour les enfants orphelins, l'O.S.E. a continué son action et à l'heure actuelle près de 1 000 enfants juifs de la région parisienne sont accueillis dans ses maisons d'enfants, son placement familial ou suivis dans leur famille par une action éducative et sociale en milieu ouvert.