Notes
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[1]
Cet article est rédigé en appliquant indifféremment l’usage du féminin générique ou du masculin générique dans les cas où la population désignée inclut tant des femmes que des hommes.
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[2]
Il s’agit de l’introduction à un dossier qui comporte six autres articles dont trois traitant chacun d’un candidat de la campagne présidentielle de 2017 : F. Fillon face au scandale, E. Macron dans une situation d’émission de télévision, Jean-Luc Mélenchon sous divers aspects argumentatifs.
- [3]
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[4]
Dans l’étude d’un large corpus d’affiches du PS, F. Cépède (2011 : 82) a identifié que la référence à la droite dans une logique d’antagonisme bipolaire devient un élément textuel très présent dans la période qui suit l’alternance de 1981 avec une mention dans 25 des 98 affiches éditées entre 1985 à 1993 alors que le terme n’apparaît presque pas avant.
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[5]
Accès : https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000000341734/2020-11-19/ (consulté le 19 nov. 2020).
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[6]
Les deux cas où la proportion des contenus négatifs est la plus élevée sont le Royaume-Uni (près de 25 %) et les Pays-Bas (23 %) et les deux où elle est la plus faible sont la Belgique et le Luxembourg (environ 2 %). La tonalité des campagnes nationales sur les réseaux sociaux numériques s’avère donc très variable, mais l’interprétation comparative de ces niveaux est délicate car il faut les rapporter chaque fois au contexte politique national, à la configuration de l’offre électorale, aux rapports entre partis, etc.
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[7]
Le déploiement de la communication électorale négative sur divers formats numériques est aussi attestée dans les contextes nationaux où elle est activement pratiquée sous d’autres formats telles la publicité politique télévisée aux États-Unis (Auter et Fine, 2016 ; Borah, 2016 ; Klotz, 1998) ou les émissions des partis politiques au Royaume-Uni, pays dans lequel plus de la moitié des annonces de chacun des quatre principaux partis sur leur page Facebook était de tonalité négative lors des élections générales de 2017 dont près des deux tiers pour le Labour Party (Anstead et al., 2018 : 10).
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[8]
Accès : https://twitter.com/partisocialiste/status/663827194288803842 (consulté le 20 nov. 2020) ; https://www.parti-socialiste.fr/articles/la-droite-vous-cache-ses-mauvais-coups (page non disponible, consulté le 5 oct. 2020).
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[9]
L’équipe de F. Fillon fait de même mi-janvier avec une note de trois pages détaillant trois orientations critiques envers E. Macron (voir l’article de P. Lefébure dans ce dossier).
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[10]
La tentative de dénigrement de « Farid Fillon » est cependant lancée mi-décembre par les réseaux activistes sur Facebook et Twitter déjà impliqués dans l’opération « Ali Juppé ».
1La communication politique négative consiste non pas à promouvoir sa candidature mais à évoquer un concurrent et d’une manière qui cherche à lui porter préjudice auprès de l’auditoire visé (Geer, 2006 : 23 ; Lau et Pomper, 2004 : 4-5) [1]. La définition la plus restrictive pourrait s’arrêter au fait que le message mentionne explicitement la cible et porte exclusivement sur elle en lui associant un jugement négatif tel « il/elle est malhonnête » ou une conclusion négative telle « on ne peut pas prendre le risque de voter pour lui/elle ». Une définition plus large est cependant utile en retenant l’effet visé qui est de porter préjudice à la cible, cela pouvant procéder d’un discours ne portant pas exclusivement sur elle. Ceci permet d’intégrer les messages comparatifs entre une candidate bénéficiant d’un traitement favorable ou neutre tandis que le concurrent est traité de manière critique. Ce type de traitement mixte a pour caractéristique essentielle de faire intervenir la négativité sans laquelle le principe même de la comparaison n’aurait aucune pertinence. Enfin, on peut élargir la définition jusqu’à catégoriser comme négatif un message qui cherche à stimuler des réactions à travers une évocation identifiée à un concurrent sans qu’il soit mentionné explicitement, forme dite de « comparaison par implication » (« implied comparative advertising », Pinkleton, 1997 : 20). Les membres de l’auditoire sont incités à se défier du candidat implicitement ciblé – et, le cas échéant, à en préférer un autre – en fonction de ce qu’ils sont supposés savoir des caractéristiques ou propositions respectives des candidats.
2L’intérêt d’élargir ainsi la définition est d’inclure des messages ayant une importance stratégique dans le cours d’une campagne en termes d’interaction entre candidats qui se défient durement mais sans attaque directe. Un cas emblématique est la publicité du candidat du Parti démocrate Lyndon B. Johnson lors de la campagne présidentielle américaine de 1964 qui dénonce sans le nommer le candidat républicain Barry Goldwater pour sa volonté déclarée de ne pas hésiter à utiliser la bombe nucléaire pour contrer la menace communiste : la vidéo (Daisy) effectue un traveling progressif vers une fillette puis un gros plan jusqu’à la pupille de son œil dans le noir duquel survient une explosion nucléaire. Cette publicité fait scandale et sa diffusion est arrêtée, mais elle occupe l’agenda médiatique dans les termes souhaités par ses auteurs. D’autres cas de comparaison par implication ont marqué les campagnes américaines : par exemple, la campagne de réélection du républicain Ronald Reagan de 1984 suggère que le candidat démocrate – non nommé – n’est pas vigilant face à la figure de l’ours symbolisant la menace soviétique ; lors de la primaire démocrate de 2008, Hillary Clinton mobilise le symbole du téléphone de crise sonnant en pleine nuit à la Maison Blanche dans une situation qui exige l’expérience et la maîtrise dont il est suggéré que son adversaire Barack Obama – non nommé non plus – est dépourvu.
Figure 1. Photogramme du film publicitaire Daisy (Schwartz et Bernbach, 1964) diffusé pour le compte du candidat à l’élection présidentielle L. B. Johnson (États-Unis). Accès : https://commons.wikimedia.org/w/index.php?title=File%3ACommercial-LBJ1964ElectionAdDaisyGirl.ogv (consulté le 5 nov. 2020)
Figure 1. Photogramme du film publicitaire Daisy (Schwartz et Bernbach, 1964) diffusé pour le compte du candidat à l’élection présidentielle L. B. Johnson (États-Unis). Accès : https://commons.wikimedia.org/w/index.php?title=File%3ACommercial-LBJ1964ElectionAdDaisyGirl.ogv (consulté le 5 nov. 2020)
Figure 2. Photogramme du film publicitaire Bear (Riney, 1984) diffusé pour le compte du candidat R. Reagan. Accès : http://www.livingroomcandidate.org/commercials/1984/bear# (consulté le 5 nov. 2020)
Figure 2. Photogramme du film publicitaire Bear (Riney, 1984) diffusé pour le compte du candidat R. Reagan. Accès : http://www.livingroomcandidate.org/commercials/1984/bear# (consulté le 5 nov. 2020)
Figure 3. Photogramme du film publicitaire 3 A.M. White House ringing phone (2008) diffusé pour le compte de la candidate à l’élection primaire présidentielle du Parti démocrate H. Clinton (États-Unis). Accès : https://ir.stonybrook.edu/xmlui/flashstreamview/bitstream/handle/11401/8427/78.mp4?sequence=1 (consulté le 5 nov. 2020)
Figure 3. Photogramme du film publicitaire 3 A.M. White House ringing phone (2008) diffusé pour le compte de la candidate à l’élection primaire présidentielle du Parti démocrate H. Clinton (États-Unis). Accès : https://ir.stonybrook.edu/xmlui/flashstreamview/bitstream/handle/11401/8427/78.mp4?sequence=1 (consulté le 5 nov. 2020)
3Ainsi définie dans toutes ses déclinaisons, la communication électorale négative peut avoir trois types d’effet qui ont stimulé une abondante littérature. Le premier concerne le sentiment de malaise provoqué chez les citoyens qui fait baisser le taux de participation électorale (Ansolabehere et Iyengar, 1995) et, à terme, accroît leur défiance vis-à-vis du personnel politique ou leur cynisme vis-à-vis du système politique. Le deuxième s’applique aux citoyens qui ne se sont pas détournés de la campagne et consiste en l’élévation de leur niveau d’information et l’amélioration de leur repérage politique par un accroissement de leur attention à des éléments saillants (Geer, 2006 ; Mattes et Redlawsk, 2015 ; Sides et al., 2010). Enfin, en partie comme possible combinaison des deux premiers effets, le troisième concerne le mécanisme de construction des opinions des citoyens par une motivation négative en vue de contrer des menaces plutôt que par adhésion à des propositions (Jackson et al., 2009), sorte de « politisation négative » ou vote par rejet.
4L’analyse des messages négatifs peut s’appliquer à plusieurs aspects. L’objet de la critique peut être, d’une part, la personne (âge, genre, origine…) ou la personnalité (traits d’image, psychologie) du candidat ou ses relations (entourages, soutiens, parti politique d’appartenance…) et, d’autre part, son action à travers ses accomplissements passés (décisions et votes, discours), ses idées présentes et ses propositions ou la qualité de sa campagne. Les procédés peuvent relever des diverses catégories d’humour (moquerie, dérision, parodie, ironie), de la scénarisation d’un futur non désirable (incertain, apocalyptique…), de l’exposé d’informations factuelles ou d’un argument raisonné (comparatif ou non, résultats avérés ou conséquences probables), de l’attribution de valeurs, d’une morale ou d’une idéologie. D’un point de vue narratif, le discours peut être rapporté (restitution des propos de la cible), de l’émetteur du message ou d’une source tierce (média, citoyen, association, acteur politique). Les combinaisons sont donc multiples, sans parler des éléments d’édition pour les formats visuels ou audiovisuels tels la sonorisation, le choix des images, le montage ou la composition. Chacun de ces éléments peut être étudié pour lui-même en vue d’établir sa contribution au discours négatif ou l’on peut chercher à établir les propriétés d’ensemble du message lui-même. Enfin, plutôt que le format et le contenu du message négatif, l’analyse peut porter sur le choix de recourir à la négativité comme un projet stratégique en examinant le moment, le lien à d’autres aspects de la campagne, les interactions suscitées avec les médias ou les candidatures adverses et enfin la sociologie des segments d’électeurs dont la défection ou le ralliement sont recherchés.
5Le sujet s’est largement développé depuis les années 1990, d’abord aux États-Unis puis de manière de plus en plus internationale, notamment en Europe mais pas en France. C’est d’ailleurs avec le double objectif de contribuer à mieux caractériser le contexte français dans son rapport à la communication politique négative et à mieux l’insérer dans la littérature internationale sur la négativité en campagne électorale que le dossier thématique introduit par cet article a été élaboré. Pour ce faire, deux articles présentent d’autre cas nationaux (États-Unis d’Amérique, Russie) avec leurs caractéristiques médiatiques, institutionnelles et partisanes afin d’aider à situer, par rapport à ces modèles, les éventuelles caractéristiques distinctives du cas français. Les autres articles portent sur la communication politique négative durant l’élection présidentielle française de 2017 et permettent de s’interroger sur la négativité comme phénomène communicationnel et politique contribuant à l’analyse de cette campagne si particulière.
Un effort de recherche inégal
6Le sujet de la communication politique négative s’implante dans la littérature scientifique d’abord aux États-Unis dans le courant des années 1980, à mesure que les candidats à différents niveaux d’élections assument de plus en plus de recourir à l’attaque de l’adversaire. En complément des études présentant l’ampleur du phénomène et ses divers registres (Kaid et Johnston, 1991 ; Kern, 1989 ; Pfau et Kenski, 1990), la question des effets est déjà au cœur des travaux (Garramone, 1984 ; Johnson-Cartee et Copeland, 1989 ; Kaid et Boydston, 1987 ; Merritt, 1984 ; Roddy et Garramone, 1988). En même temps que l’interrogation plus ou moins critique quant à l’impact sur le fonctionnement du système politique et le rapport des citoyens à la politique, l’intérêt scientifique s’accroît dans le courant des années 1990, notamment avec des ouvrages qui contribuent à structurer le débat académique (Ansolabehere et Iyengar, 1995 ; Jamieson, 1992 ; Johnson-Cartee et Copeland, 1991) tandis que les bilans sur les effets restent disputés (Lau et al., 1999, 2007) jusqu’à nourrir la controverse sur l’effet défavorable de la négativité sur le niveau de la participation électorale (Ansolabehere et al., 1999).
7Ainsi la recherche nord-américaine est-elle fortement dynamisée pendant une quinzaine d’années par des préoccupations sociales et civiques à travers lesquelles la construction de la négativité comme objet d’enquête ne se départit pas de l’interrogation sur les conséquences des formes agressives et fonctionnellement (autant que moralement) considérées comme nocives que recouvrent les termes incivility (désobligeance, injure) et mudslinging/mudsliding (calomnie, littéralement « couvrir de boue »). Les questionnements en ce sens paraissent d’autant plus fondés qu’une part des professionnels du conseil électoral assume le recours à des stratégies de dénigrement de l’adversaire reposant sur des aspects mensongers, cherchant à éveiller la peur ou sciemment manipulateurs (Pew Research Center, 1998). La figure de Lee Atwater, stratège de la campagne présidentielle victorieuse du républicain George Bush en 1988, apparaît comme l’archétype du consultant désinhibé vis-à-vis des techniques portant atteinte à la réputation de l’adversaire.
8Dans les années 2000, sans avoir épuisé l’examen de la négativité comme forme nocive de la communication politique, une part de plus en plus active de la recherche américaine examine le sujet en termes d’opérationnalisation de l’analyse des contenus négatifs pour en spécifier plus finement les différents registres (Buell et Sigelman, 2009) et envisager des conséquences variées sur différentes catégories de publics (Brooks et Geer, 2007 ; Fridkin et Kenney, 2008, 2011 ; Geer, 2006 ; Jamieson et al., 2000 ; Lau et Pomper, 2004 ; Mattes et Redlawsk, 2014 ; Ridout et Franz, 2008). La négativité est alors rapportée à une définition sobre : le fait d’attaquer l’adversaire sans présumer des conséquences implicites ou observées sur la qualité du débat démocratique ou du fonctionnement du système politique. Dans cette période également, la recherche s’internationalise et porte sur d’autres cas que les élections de différents niveaux aux États-Unis. Les chercheurs européens augmentent la production scientifique en examinant des facteurs de culture partisane et de contexte institutionnel peu ou pas considérés auparavant (Elmelund-Præstekær, 2010 ; Haselmayer et Jenny, 2018 ; Hodess et al., 2000 ; Johansson, 2014 ; Lengauer et al., 2011 ; Nai & Walter, 2015a ; Schmücking, 2015 ; vanHeerde-Hudson, 2011 ; Walter, 2012 ; Walter et Vliegenthart, 2010). Ainsi la production scientifique s’accroît-elle considérablement (Nai et Walter, 2015b) jusqu’à une moyenne d’environ 200 articles de revues à comité de lecture par an entre 2005 et 2016 dont la moitié en science politique (Haselmayer, 2019).
9Hors de ce flux, la production académique française apparaît comme isolée, marginale et hétérogène. Hormis quelques travaux d’historiens se rattachant au thème de la propagande (Buton et Gervereau, 1989 ; Delporte, 2006), les publications peuvent se répartir principalement en deux groupes, mais sans coordination ni articulation. Certains travaux saisissent la négativité à travers le support récent des formats numériques en traitant des sites internet animés par des réseaux militants contre l’adversaire de leur parti (Bargel et Petitfils, 2011 : 194-199), l’usage des vidéos amateur sur l’internet durant l’élection présidentielle de 2007 (Yanoshevsky, 2009), l’adversité et la polémique par les utilisateurs de Twitter dans le contexte des élections municipales de 2014 (Mercier, 2015) ou la proportion et le degré d’hostilité des tweets à l’égard des candidats présidentiels de 2017 (Chavalarias et al., 2019). D’autres travaux s’inscrivent diversement dans le domaine de l’analyse de discours en traitant des débats télévisés de second tour présidentiel (Kerbrat-Orecchioni, 2017), des communiqués de presse des candidats à l’élection présidentielle de 2012 (Labbé et Monière, 2013) ou des « petites phrases » dites pour être reprises dans les médias comme instrument de conflictualité entre candidats dans la campagne présidentielle de 2017 (Al-Matary et Gaboriaux, 2018). Ces deux orientations peuvent se retrouver dans des travaux consacrés à d’autres pays, pour l’analyse structurale du discours dans les affiches des partis politiques italiens dans les années 1960-1980 (Memmi, 1986) ou pour l’analyse processuelle des rumeurs numériques aux États-Unis (Rebillard, 2017). On peut enfin noter une contribution à l’opérationnalisation de la recherche sur la négativité par la sollicitation d’experts académiques qui met en perspective la campagne présidentielle française de 2017 par rapport à un état des lieux international (Gerstlé et Nai, 2019). La seule coordination thématique et conceptuelle s’inscrit dans l’analyse de discours concernant la « réparation d’image » face au préjudice de réputation (Amossy, 2018) [2] qui rejoint par certains aspects les enjeux de la communication politique négative.
10Dans cette production française disparate, le questionnement sur la négativité comme phénomène communicationnel ou politique n’est pas central. À l’exception des travaux les plus récents – analyse de l’hostilité dans les tweets (Chavalarias et al., 2019) et expertise académique sur la communication électorale (Gerstlé et Nai, 2019) –, la négativité est peu ou pas examinée d’un point de vue conceptuel ou en termes de stratégie d’enquête, ce qui montre que les échanges scientifiques internationaux de ces 20 dernières années n’ont pas irrigué la réflexion en France. Cela paraît d’autant plus étonnant que la sociologie politique a bien identifié les phénomènes de défiance et de distance au politique dont la littérature américaine des années 1990 avait précisément nourri la crainte qu’ils soient entretenus par la communication électorale négative. De même, la sociologie électorale française connaît la motivation négative du vote consistant à utiliser le bulletin au nom d’un candidat non par adhésion mais pour faire barrage à un candidat vis-à-vis duquel l’antagonisme est puissant. La motivation d’un tel vote est sans doute plus fondée de manière pérenne dans les valeurs, voire l’idéologie, que dans une sensibilité conjoncturelle à la communication politique, mais il n’en demeure pas moins que la disposition normative de long terme à l’antagonisme est réactivée par la communication de campagne.
11De manière symptomatique, des publications qui se prêteraient bien à examiner l’enjeu de la négativité ne lui considèrent pourtant pas (tels, pour les ouvrages didactiques ou de synthèse, Gerstlé et Piar, 2016 ; Aldrin et Hubé, 2017 ; Gerstlé J., 2017 ; Brouard et Kerrouche 2017). Ainsi, dans un chapitre sur l’opinion des électeurs sur les traits d’image des candidats à l’élection présidentielle de 2007, Daniel Boy et Jean Chiche (2008) constituent la catégorie dite des « défiants » comme l’ensemble des enquêtés ne souscrivant pas aux traits d’image positifs à l’égard d’un candidat, alors que la batterie de questions inclut la proposition « il/elle vous inquiète » qui permettrait de construire un rapport analytique à la négativité. De fait, le questionnement reste structuré par une hypothèse d’adhésion à l’offre électorale sans examiner les facteurs de répulsion tels qu’ils sont pourtant documentés. Sous réserve d’étudier également la communication d’une candidature ralliant à elle des électrices éprouvant de l’inquiétude vis-à-vis du candidat adverse, il y aurait ici de quoi nourrir l’analyse de la négativité comme processus impliqué dans les reports de voix au second tour.
12De même, dans une recherche sur le lien entre contenu des journaux télévisés durant les campagnes présidentielles de 1981 à 2007 et formation des préférences des électeurs, Christophe Piar (2012) retient un large spectre de concepts issus de la littérature américaine sur la communication politique, cumule une grande quantité de données sur le traitement médiatique, sélectionne divers faits de campagne relevant de la critique de l’adversaire ou du scandale sans jamais ouvrir la perspective de la négativité (définition, usage, effets…). Les trois références à des travaux américains sur la négativité ne sont mobilisées qu’en lien avec la méthode de codage des contenus médiatiques (ibid. : 73). En lien avec les questions de recherche sur le rôle des médias d’information dans l’entretien ou l’amplification des stratégies de communication négative, il y avait là une bonne occasion de documenter le cas français.
13Enfin, auteure d’une recherche approfondie sur les registres émotionnels utilisés dans la propagande électorale des candidats présidentiels depuis 1981, Marion Ballet (2014) étudie notamment l’indignation, nécessairement tournée contre un objet, sans faire non plus le lien avec l’analyse de la négativité. Dans une version précédente de son travail (Ballet, 2012 : 277) couvrant la période 1981-2007, tout juste apprend-on par une phrase que le candidat socialiste inclut dans sa communication de la campagne présidentielle de 1981 la dénonciation de son adversaire principal et président de centre droit libéral sur des aspects économiques et que cette tendance se retrouve dans les campagnes suivantes des candidats socialistes autour de la protection sociale : « La focalisation sur les dirigeants de droite au pouvoir est constante sur l’ensemble de la période ». Ces éléments pourraient rejoindre le questionnement sur le recours à la négativité selon que la candidate est du camp sortant ou de l’opposition et dans une relation plus ou moins structurée au corpus idéologique de sa famille politique.
L’ancrage de la communication électorale négative en France
14Si, en dépit de quelques travaux stimulants, la recherche française se tient à ce point en retrait de l’analyse de la communication politique négative pratiquée non plus seulement aux États-Unis mais aussi de manière très internationalisée, cela est-il dû à un déficit de l’usage de la négativité par les acteurs politiques eux-mêmes ? La question pourrait se poser, dans la lignée des travaux sur la négativité qui interrogent le rôle des facteurs institutionnels, de la structuration de l’offre politique et des cultures partisanes (Papp et Patkós, 2019 ; Ridout et Walter, 2015a ; vanHeerde-Hudson, 2011). Par exemple, de nouveau à partir de l’étude du registre émotionnel de l’indignation, il semble que la position fragilisée des gaullistes en 1981 et l’importance idéologique de leur anticommunisme puissent expliquer les critiques de leur candidat à l’encontre de ses concurrents du premier tour de l’élection présidentielle de 1981 (Ballet, 2012 : 316-317). L’analyse des communiqués de presse des candidats durant la campagne présidentielle de 2012 (Labbé et Monière, 2013) établit que les candidats figurant au plus haut dans les sondages sur les intentions de vote s’attaquent mutuellement mais tendent à ne pas le faire contre de plus « petits » candidats comme la littérature spécialisée le suggère habituellement. En revanche, la substance et les motifs des attaques ne sont pas traités assez finement pour évaluer leur lien avec des cultures partisanes ou idéologiques. On peut donc émettre l’hypothèse selon laquelle les acteurs politiques tendent à pratiquer la négativité non pas d’un point de vue technique comme une modalité pratique parmi d’autres avec la préoccupation de n’en négliger aucune pour maximiser leurs chances de réussite mais bien comme un choix politique répondant à des objectifs stratégiques.
15Il n’est sans doute pas aisé de documenter ce qu’a pu être le recours à la négativité dans diverses périodes passées mais, à travers notamment le support de l’affiche, il apparaît clairement qu’il n’y a pas un obstacle culturel à son usage par les acteurs politiques. De même que l’ennemi figure dans l’iconographie de guerre (incitation à l’enrôlement ou à la souscription, prudence envers les « traîtres », promesse de la victoire), la figure de l’adversaire est présente dans l’iconographie politique et notamment le matériel de propagande électorale dans l’entre-deux-guerres. Lors des élections de 1924 à 1936, ce peut être la dénonciation par le Parti radical-socialiste et son affichiste Dukercy du Cartel des droites puis des dirigeants de l’Union républicaine démocratique écrasant le peuple ou l’enchaînant, la colombe radical-socialiste contre le corbeau nationaliste, la dénonciation par la Section française de l’Internationale ouvrière (SFIO) du Bloc national ou de la droite belliciste. D'un autre côté, c’est la virulence anticommuniste, la critique du Cartel des gauches puis du Front populaire de la part des organisations liées à la droite politique, notamment le Centre de propagande des républicains nationaux, qui mobilisent dans les affiches les figures de « l’homme au couteau entre les dents », de la pieuvre ou des engrenages qui broient le citoyen et déploient un effort rationalisé et puissant d’affichage intense et fréquent (Buton et Gervereau, 1989 ; Lebourg, 2012 ; Milot, 2019 : 124-127 ; Passmore, 2014 : 43-47). La forte polarisation idéologique de cette fin de la IIIe République se prolonge dans le traitement négatif de l’adversaire, notamment par le Parti communiste français (PCF) ou à son encontre, aux débuts de la IVe République quand les partis politiques renouent avec la compétition électorale (Delporte, 2006 ; Fougeron, 2001) et aux débuts de la Ve République.
16Plus récemment, divers fonds documentaires (fondation Jean Jaurès, archives électorales du Centre de recherches politiques de Sciences Po, archives de la Seine-Saint-Denis…) [3] attestent de l’utilisation d’un matériel de propagande électorale relevant de stratégies de communication négative. Durant la campagne présidentielle de 1974, des organisations liées à la droite gaulliste (Comité pour la défense de la république, Résistance et liberté) diffusent des tracts qui relaient le discours de l’Union des démocrates (UDR) pour la République sur le danger socialo-communiste avec le candidat socialiste François Mitterrand moqué et dénoncé comme instrument de l’Union soviétique. C’est ensuite plus spécialement la gauche, tenue de longue date dans l’opposition de 1958 à 1981, qui se saisit de la négativité. Le PCF promeut son dirigeant et futur candidat à l’élection présidentielle de 1981 par une affiche où il apparaît en photo au milieu d’une foule d’ouvriers avec le slogan « l’anti-Giscard » qui le pose dans une concurrence implicite avec toute candidature qui émergera du Parti socialiste (PS) comme l’alternative la plus pure au président sortant de droite. À huit semaines du premier tour de cette élection, le PS complète la campagne de son candidat F. Mitterrand par un duo d’affiches contre l’adversaire de droite. Le slogan « 7 ans de Giscard… » et une photo en noir et blanc le présentant de dos sont communs tandis que l’une des affiches énonce « 1 chômeur toutes les 3 minutes » et l’autre « il est temps de tourner la page ». L’adversité pousse aussi la campagne de V. Giscard d’Estaing de 1981 à éditer pour le second tour des séries de tracts comparatifs très critiques à l’encontre de son adversaire socialiste (« Ne jouez pas avec… », « dire “non” à Mitterrand », « aventure […] désordre […] faillite »).
17En prévision des élections législatives de mars 1986, la négativité contribue encore à la polarisation gauche-droite. Dans une sorte de redite inversée de la dénonciation socialiste du bilan de V. Giscard d’Estaing en 1981, le Rassemblement pour la République associe à sa campagne de promotion de son énergie néo-gaulliste libérale (« Vivement demain »/« Vivement la France ») un volet de critique par des affiches militantes affirmant : « socialisme = 1 jeune sur 3 au chômage ». De son côté, le PS réplique en éditant plusieurs séries d’affiches qui ciblent toutes « la droite ». Cinq mois avant le scrutin, en novembre 1985, ce sont l’affiche strictement textuelle « Un pas à droite, c’est trois pas en arrière » et celle au visuel humoristique d’un coq déplumé auquel il ne reste plus qu’une queue tricolore qui proclame « Si la droite passe, la France y laissera des plumes ». Dans la même période, une large campagne d’affichage – non siglée mais publiquement assumée par le PS comme le premier volet d’une communication en trois étapes – se veut virulente et humoristique pour saisir l’attention par le slogan « Au secours ! La droite revient. ». Quatre visuels différents déclinent des profils d’électeurs (ouvrier, femme de ménage, enseignante, étudiant) au visage terrifié : il s’agit de remobiliser des segments socioprofessionnels sociologiquement associés à la gauche par défiance envers le danger que représenterait la droite pour eux. Enfin, à partir de janvier, une affiche est largement diffusée avec le slogan « Dis-moi, jolie droite, pourquoi as-tu de si grandes dents ? » associé au visuel d’un loup au sourire carnassier et en costume cravate dessiné à la manière des dessins animés de Tex Avery. Après sa défaite aux élections législatives de 1986 et dans une tonalité de campagne permanente jusqu’à la campagne présidentielle de 1988, le PS poursuit l’édition d’affiches négatives. Dès le mois d’octobre 1986 avec sa série très dénonciatrice « C’est ça la droite » en trois volets (« Impôts, la loi des riches », « Télévision, la loi des casseurs », « Licenciements, la loi de l’arbitraire »). Le clivage gauche-droite et ses déclinaisons thématiques apparaissent donc clairement comme un thème de communication politique négative pour motiver le vote entre la fin des années 1970 et la fin des années 1980 [4].
18Puis, dans la période qui correspond à l’essor des travaux américains, le contexte institutionnel français change et empêche l’expression des candidats par les moyens publicitaires largement utilisés dans les autres pays où ils nourrissent les corpus des recherches empiriques. En effet, la Loi du 15 janvier 1990 relative à la limitation des dépenses électorales et à la clarification du financement des activités politiques [5] interdit la publicité politique à la radio et à la télévision et, par tout autre moyen, durant les trois mois précédant le scrutin. La diffusion à plusieurs milliers d’exemplaires des grandes affiches sur les panneaux commerciaux urbains et routiers de quatre mètres sur trois qui ont attisé la flamme communicationnelle des campagnes électorales depuis le début des années 1980, ainsi que l’achat d’espace dans la presse ne peuvent plus être pratiqués. Certes, cela n’épuise pas la possibilité de constituer un matériau d’enquête tel celui des affiches militantes, des discours de meeting, des communiqués de presse ou des propos tenus durant les débats télévisés, mais il est vrai que l’inclusion dans les échanges scientifiques internationaux est rendue plus difficile. De même, les contraintes techniques et réglementaires appliquées aux spots télévisés et radiophoniques de la campagne officielle et les conditions de leur diffusion distinguent cette propagande audiovisuelle à la française des émissions partisanes britanniques ou chiliennes et plus encore des publicités américaines, canadiennes ou allemandes.
19L’essor de l’internet et de la propagande électorale sur les comptes de réseaux sociaux numériques des partis ou des candidats fournit un nouveau type de données qui pallie en partie les difficultés évoquées précédemment pour constituer des corpus de recherche en France. Ainsi, en codant 916 publications sur Facebook des principaux partis présentant ou soutenant une liste aux élections européennes de 2019, l’équipe française du projet European Elections Monitoring Center établit que 10 % ont une orientation négative (Borrell et al., 2019), proche de la moyenne de 12 % pour l’ensemble des 28 pays traités dans le cadre de ce projet [6]. Deux tiers de cette production négative française (contre trois quarts en moyenne pour tous les pays) cible un acteur national plutôt qu’européen, notamment le principal parti de la majorité parlementaire ou le président de la République qui en est issu. Sans constituer une caractéristique prépondérante de la tonalité de la campagne des partis sur les réseaux sociaux, la négativité est donc clairement inscrite dans les pratiques, aucun des sept principaux partis ne s’en privant et le Rassemblement national (RN) étant celui qui y recourt le plus. Comme plusieurs des articles de ce dossier (Berthet ; Lefébure ; Stéphan ; Theviot) et une part de la littérature française (Bargel et Petitfils, 2011 ; Chavalarias et al., 2019 ; Yanoshevsky, 2009) tendent à le montrer, la communication politique négative semble trouver en France de larges moyens de développement dans la fluidité, la praticité, la diffusion indépendante du relais des médias traditionnels et, parfois, la possibilité d’anonymat des formats numériques [7].
20Ce phénomène peut s’observer à partir de la campagne présidentielle de 2007 où trois types de procédé inédits sont employés. Le Google bombing (bombardement Google), notamment contre Nicolas Sarkozy, consiste à utiliser la recommandation de contenu automatisée par algorithme des moteurs de recherche. De manière concertée et à large échelle pour obtenir un nombre de cas identiques suffisamment nombreux pour que l’algorithme en tienne compte, donc en mobilisant un vaste réseau militant, il s’agit d’associer sur des pages dont on a la maîtrise éditoriale (blog, site, forum) une dénomination – typiquement le nom d’un candidat ou d’un parti – à l’identifiant URL (uniform resource locator) d’une page de site internet qui, par rapprochement ou association d’idée, provoque le discrédit de l’entité visée. Ainsi, quand des internautes de bonne foi recherchent le nom de l’entité visée, le moteur de recherche leur recommande-t-il parmi les pages à consulter celle que le réseau militant adverse lui a associée dans ses écrits. Le deuxième procédé s’inscrit dans la même logique de prescription de contenu, mais consiste en de la publicité commerciale et est donc désormais interdit après un temps de flou juridique. Il s’agit de payer une prestation au moteur de recherche, ce qu’on appelle l’achat de mots clés, de telle sorte que, en réponse à la requête d’un internaute sur l’un ou l’autre des mots achetés, les résultats dits sponsorisés (distincts des résultats « propres » issus des algorithmes) incluent les pages internet choisies par l’annonceur. C’est ainsi que l’Union pour un mouvement populaire (UMP), parti de N. Sarkozy, achète auprès de Google le mot clé Ségolène Royal et y associe la recommandation sponsorisée de contenus préjudiciables à sa crédibilité (page du site internet de l’UMP, page de blogs militants). Enfin, des militants de ce parti créent de leur propre initiative divers sites internet critiquant de manière plus ou moins humoristique et virulente la candidate socialiste et obtiennent le relais et l’encouragement du parti.
21Parallèlement, début janvier 2007, le PS édite un ouvrage critique de 90 pages sur le candidat que l’UMP s’apprête à investir : Les Inquiétantes Ruptures de monsieur Sarkozy. Adressé aux adhérents au format imprimé et diffusé au format numérique via les sites internet des sections locales et des élus du PS ainsi que par certains médias de sensibilité de gauche (Libération, Le Nouvel Observateur), ce format traditionnel du pamphlet trouve des canaux de propagation modernisés et dématérialisés. Pionnier de la présence sur l’internet à destination de ses communautés militantes, le Front national (FN) investit aussi le numérique en relais des formats traditionnels de propagande à destination d’un public élargi avec sa campagne négative « droite/gauche, ils ont tout cassé » de décembre 2006. En vue de l’élection présidentielle de 2007, elle se décline autour du slogan commun en cinq visuels présentant des profils d’électrices pouce pointé en bas en signe de sanction (jeune femme métisse, adolescent, retraitée, mère de famille, agriculteur), chacun accompagné de mots clés thématiques. La campagne d’affichage classique est déclinée sous format numérique sur l’internet et par messagerie électronique avec une large propagation des visuels qui suscitent à leur tour des détournements numériques, aussi bien par des citoyens anonymes que par le Mouvement des jeunes socialistes (MJS) ou la campagne de l’écologiste indépendant José Bové.
22De 2007 à 2017, la négativité continue de se développer sous divers formats. Ainsi, début novembre 2015, un mois avant les élections régionales, le numérique vient-il compléter la gamme des outils traditionnels pour une campagne négative du PS contre le principal parti adverse. Le slogan général « La droite vous cache ses mauvais coups » est associé à la photo en plan serré du buste d’un homme en costume bleu qui tend d’une main un tract Les Républicains et cache derrière le dos son autre main armée d’un maillet de chantier. Aux 20 000 affiches militantes et aux 1,2 million de tracts imprimés, s’ajoutent les formats numériques, la page du site internet de la campagne et les publications de réseaux sociaux [8]. En réaction aux attentats islamistes du 13 novembre 2015, les partis suspendent leurs campagnes et, quand ils les reprennent, le PS ne réactive pas l’affichage et la diffusion de tracts de son dispositif négatif pour se conformer à l’esprit d’unité nationale face au drame meurtrier.
La communication négative dans la campagne présidentielle française de 2017
23La contribution des formats numériques au développement de la négativité se confirme en 2017 par l’usage inédit de courtes vidéos à vocation de diffusion virale sur Facebook et Twitter. La campagne de Marine Le Pen (FN) assume un dispositif de publication non siglé mais sur ses comptes de réseaux sociaux qui cible successivement le candidat issu de la primaire de la droite et du centre sous l’intitulé « Le vrai Fillon » en janvier-février 2017 après une opération du même nom sur Twitter fin novembre 2016 étudiée dans ce dossier par Gaël Stéphan, puis E. Macron comme adversaire de second tour en deux séries intitulées « Le Vrai Macron » et « Le danger Macron ». Le camp de François Fillon adopte une stratégie de publication intense et prolongée mais dissimulée sous l’anonymat du dispositif « Ridicule TV » sans lien officiel avec la campagne du candidat que nous analysons dans ce dossier. Enfin, comme en attestent les documents remis par les candidats à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques pour la validation de leurs comptes de campagne, le socialiste Benoît Hamon commande et paie à un prestataire quatre vidéos comparatives valorisant son programme conjointement à la critique d’un adversaire (une contre F. Fillon, une contre E. Macron, deux contre M. Le Pen) qu’il choisit finalement de ne pas publier. M. Le Pen et E. Macron recourent également à une forte proportion d’expression négative l’un contre l’autre dans leurs tweets de la campagne de second tour comme le montre Élodie Berthet dans ce dossier. Marine le Pen se démarque par un ratio plus important de négativité (25 %) que son rival (19 %) et par une orientation narrative plus ciblée contre le projet politique de celui-ci tandis que, lui, s’en prend majoritairement à la personne de sa concurrente.
24Outre ces usages du numérique, la campagne présidentielle de 2017 est marquée par un recours assidu à la négativité par M. Le Pen déjà noté en 2012 à travers ses communiqués de presse (Labbé et Monière, 2013). Elle est la seule à en user dans le format traditionnel des spots de la campagne officielle du premier tour. Elle y dénonce les politiques de sécurité et d’immigration de F. Fillon pendant le mandat présidentiel de N. Sarkozy dont il fut le Premier ministre (2007-2012) et les choix économiques d’E. Macron comme conseiller, puis ministre durant le mandat présidentiel de François Hollande (2012-2017). L’équipe de M. Le Pen développe également une approche négative pour le débat télévisé de second tour dont deux notes écrites attestent l’existence en lien avec les propos effectivement tenus dans le débat (Maad, 2018 : en ligne). L’introduction de la note la plus développée et structurée préconise ceci : « L’objectif est de dégrader l’image de Macron, quitte à perdre en crédibilité, pour pousser des gens dans l’abstention ». Enfin, compte tenu de constats passés sur les flux d’électeurs entre candidats présidentiels de la droite et du FN (Perrineau, 2009), l’équipe de M. Le Pen a précocement conçu une pression négative contre le vainqueur de la primaire de la droite et du centre. Initialement attendu comme le plus probable adversaire et positionné comme candidat de centre droit modéré, Alain Juppé apparaît comme susceptible d’être attaqué, même sans fondement sérieux, pour sa volonté de transiger avec le fondamentalisme islamiste. Ainsi les réseaux militants et sympathisants durs du FN, sensibilisés par un antagonisme ancien entre le FN de Gironde et A. Juppé en tant que maire de Bordeaux au sujet de la construction d’une mosquée dans la ville, ont-ils entretenu la figure à la fois dangereuse et ridicule d’« Ali Juppé » sur Facebook et Twitter dont Anaïs Theviot fait l’étude dans ce dossier. Alternativement au dénigrement d’une telle virulence, A. Juppé avait subi de manière plus feutrée un travail de critique de la part de ses concurrents dans la primaire de la droite, exercice de négativité délicat car il se produit au sein d’une famille politique appelée ensuite à serrer les rangs. Le même phénomène vaut pour B. Hamon dans le cadre de la primaire du PS et de ses alliés. Ainsi le développement depuis 2011 des primaires ouvertes à tous les inscrits sur les listes électorales et non aux seuls adhérents des partis est pris en compte par Christian Le Bart dans son article où il interroge la pratique de la critique intra-partisane comme forme de négativité.
25Quand il s’avère que c’est plutôt F. Fillon qui devrait être investi par la primaire de la droite, l’équipe de M. Le Pen passe au crible le programme de ce nouveau concurrent [9]. Auteur deux mois plus tôt d’un ouvrage intitulé Vaincre le totalitarisme islamique (Paris, A. Michel, 2016), il ne peut pas être ciblé de la même façon que le précédent adversaire pressenti [10]. Sous l’influence des animateurs de la campagne plus sensibles aux questions sociales et au ciblage d’un électorat des catégories populaires, l’angle retenu, déjà identifié au printemps 2016 à propos des personnes âgées issues des professions intermédiaires et des classes moyennes en tant qu’usagères de la santé, est celui de la défense de la sécurité sociale contre la proposition de F. Fillon de baisser le remboursement des dépenses de santé pour des atteintes bénignes. Dès la campagne sur Twitter dénigrant « Le Vrai Fillon » le jour du second tour de la primaire de la droite et du centre, le thème de la santé est mobilisé parmi d’autres. Le 9 décembre 2016, à l’occasion de sa convention nationale sur le vieillissement et la santé, la candidate déclare que le projet de son adversaire de privatiser la sécurité sociale lui donne « la nausée » et affirme que « le docteur Fillon nous prescrit un modèle ultra-libéral à l’américaine, les riches auront les moyens de se soigner correctement, les pauvres auront des soins de piètre qualité, les familles et les classes moyennes seront les grandes sacrifiées ». À la fin du mois, un tract comparatif est préparé pour diffusion militante à partir de janvier : le recto est un visuel imitant une carte de sécurité sociale où est inscrit « Fillon va vous rendre malade […] démantèlement […] déremboursement […] fermeture des hôpitaux de proximité » et le verso une synthèse des propositions de la candidate accompagnée de sa photo. Enfin, la deuxième des quatre vidéos de la série « Le Vrai Fillon » publiée le 16 janvier porte sur la santé et affirme notamment que « François Fillon veut le déremboursement généralisé » pour un coût indiqué de 1 200 euros par an pour un couple avec deux enfants.
26Certes, la dénonciation de F. Fillon sur l’immigration reste un marqueur de la campagne de M. Le Pen, conformément au positionnement historique du FN. C’est le sujet de la troisième vidéo « Le Vrai Fillon » publiée le 30 janvier. Il n’en demeure pas moins que, dans un contexte où plusieurs personnalités de gauche critiquent déjà le candidat de la droite sur le thème de la santé et de la sécurité sociale, l’effort de la campagne de M. Le Pen constitue le cas le plus approfondi de dénigrement d’un adversaire sur un aspect programmatique durant la campagne présidentielle de 2017. Quand le scandale d’emploi fictif présumé de son épouse compromet la candidature de F. Fillon fin janvier, ce registre d’attaque devient moins utile et M. Le Pen cible désormais E. Macron qui dépasse le candidat de la droite dans les intentions de vote. Le poids du scandale réoriente tellement le cours de la campagne qu’on pourrait perdre de vue cette phase de décembre-janvier où c’est alors bien la rationalisation stratégique de la négativité à l’encontre des propositions de F. Fillon qui contribue à structurer l’ensemble de la campagne et son traitement médiatique parallèlement à la conduite de la primaire de la gauche où B. Hamon impose le sujet économique du « revenu universel ».
27La négativité qui s’exprime entre candidats après l’éclosion du scandale transparaît bien dans leurs meetings électoraux dont l’organisation vise autant à orienter la couverture journalistique qu’à mobiliser les militants. Dans ce dossier, Claire Sécail montre que l’adversité qui s’y organise est indexée sur les concurrences en matière de position respective des candidats dans les sondages sur les intentions de vote, ce qui constitue une « négativité contingente », tandis que fonctionne une « négativité idéologique » exprimant les clivages pérennes entre familles politiques. Déjà identifiée en 2012, la négativité contextuelle contre les journalistes s’accroît en 2017 dans les meetings de M. Le Pen et de F. Fillon qui dénonce la médiatisation du scandale. Cette dernière produit chez les électeurs une réception de la situation de F. Fillon très contrastée comme le montre l’article d’Anne Jadot, Alexandre Borrell et Émilie Roche. Certains font défection car la couverture négative par les médias administre suffisamment la preuve qu’il n’est plus digne de leur confiance, d’autres mettent en œuvre un biais d’interprétation favorable à F. Fillon en adhérant à l’argument d’un complot destiné à l’abattre. Le traitement médiatique apparaît alors comme un facteur essentiel des effets possibles de la communication politique négative aussi bien en matière de réception de la campagne par les électrices que d’incitation à s’engager dans la négativité pour les candidats, ce qui constitue un important enjeu de recherche. Certains travaux anglo-saxons documentent spécifiquement ce rôle de la couverture médiatique dans le développement de la négativité.
28Le Pew Research Center aux États-Unis et le Centre for Research in Communication and Culture de l’Université de Loughborough au Royaume-Uni ont développé des indicateurs de la part de traitement positif, neutre ou négatif des médias envers les candidats ou partis. Tandis que la tonalité des médias généralistes américains varie plus ou moins en faveur de la candidature démocrate ou républicaine d’une élection à l’autre et fut très préjudiciable à H. Clinton en 2016 (Patterson, 2016), il semble que le Parti travailliste souffre d’un traitement structurellement plus négatif des médias britanniques (Curran et al., 2018). Quels que puissent être les biais éventuels au préjudice ou en faveur de telle ou telle candidature, il semble que les médias soient structurellement disposés à couvrir massivement les éléments de négativité et à les amplifier (Geer, 2012 ; Haselmayer et al., 2019 ; Maier et Nai, 2020 ; Ridout et Walter, 2015b). Aucun résultat équivalent n’existant pour la France, la question reste ouverte et ouvre des pistes de recherche à la croisée des travaux en sciences de l’information et de la communication, sociologie du journalisme et science politique. Dans la campagne présidentielle de 2017, la question se pose évidemment pour F. Fillon mais vaut de fait comparativement pour tous les principaux candidats.
Conclusion
29Il reste difficile de situer le cas français à travers ses facteurs institutionnels, ses cultures partisanes et le développement de son secteur professionnel du conseil politique par rapport à ce que la littérature internationale a pu établir sur les pays où la communication électorale négative est largement étudiée. Dans le présent dossier, le cas des États-Unis est bien documenté par Travis Ridout comme puissamment alimenté par la publicité télévisée, l’inclination des praticiens du conseil politique et les règles institutionnelles dont l’adaptation récente a permis aux groupes d’intérêts indépendants d’accroître considérablement leur contribution à la communication électorale. La négativité y est mobilisée sous toutes ses formes, y compris la calomnie qui rejoint les pratiques d’information trompeuse dites fake news. La publicité sur l’internet y présente une logique spécifique de discours du fait que le ciblage des segments du public peut y être plus fin qu’à la télévision. Dans un système politique où l’offre électorale est principalement binaire, la négativité est une ressource politique primordiale en vue de conquérir les électeurs hésitants ou « indépendants » et de démobiliser le camp adverse. Cette constante stratégique peut ensuite s’appliquer diversement dans chaque contexte en variant l’objet ciblé et les procédés. En Russie, dont l’article de Clémentine Fauconnier fait ici l’étude, la négativité s’avère aussi très présente, mais elle ne constitue pas tant un registre de la communication politique à travers les différents supports médiatiques disponibles et le choix circonstancié au cas par cas d’un ciblage et de procédés que comme le produit du fonctionnement même du système politique et de ses évolutions. La rhétorique et les discours négatifs accompagnent des processus effectifs de « dégagisme » ou de neutralisation à l’encontre de diverses strates et générations du personnel politique. La négativité constitue un mode de régulation de l’offre politique et sa manifestation sous forme d’actions de communication n’est que la traduction d’une culture générale du rapport à la compétition politique comme rapport de force visant à conquérir et maîtriser l’espace public dans son ensemble a contrario d’une conception de l’espace public comme espace partagé de compétition pluraliste.
30Sans relever de l’un ou de l’autre de ces modèles, on peut suggérer que le cas français présente certaines de leurs caractéristiques. Comme dans le modèle américain, les vecteurs de communication ont une grande importance pour permettre au potentiel stratégique de la négativité de s’actualiser au cas par cas selon les besoins identifiés par le candidat qui en use. Ainsi l’affiche traditionnelle mobilise-t-elle la puissance évocatrice de l’image associée au travail discursif de la forme ramassée du slogan. Pour leur part, les dispositifs numériques permettent une réactivité et une intensification du recours à la négativité selon les diverses temporalités et évolutions des campagnes, notamment sous des formes humoristiques. L’interdiction de la publicité politique limite sans doute le développement de la négativité par rapport à ce qu’on observe aux États-Unis ou au Royaume-Uni. Mais cela mériterait d’être relativisé en étudiant des corpus correspondants aux pratiques observables en France (discours de meeting, interviews et déclarations aux médias…) et d’une fréquence et d’une intensité finalement assez substantielles. C’est ce que suggèrent les résultats sur les communiqués de presse (Labbé et Monière, 2013) ou les tweets (Berthet dans le présent dossier) sans toutefois qu’on puisse s’assurer que ces formats de communication tiennent une place essentielle dans la stratégie générale de campagne d’un candidat.
31Par ailleurs, comme dans le modèle russe, mais en matière de polarisation idéologique plutôt que de prétention à exclure l’adversaire de l’espace politique, la négativité est utilisée en France dans les années 1930 comme dans les années 1970-1980 ou en ce début de xxie siècle avec une charge politique profonde. La négativité consiste non seulement en une technique de communication susceptible d’une efficacité ponctuelle pour occuper l’espace public ou solliciter vivement l’attention du public, mais aussi – plus structurellement – en la manifestation de l’existence d’antagonismes profonds mobilisant valeurs et visions du monde. L’anticommunisme et la dénonciation communiste de la démocratie bourgeoise, le clivage droite-gauche, la primauté du national contre ce qui le trahit, la primauté du peuple contre l’élite et le dégagisme ne sont pas des motifs techniquement interchangeables dans une gamme d’outils à disposition du communicant, mais constituent des motivations idéologiquement structurantes. Ainsi y aurait-il un lien assez constant en France entre recours à la négativité et (ré)activation d’une lecture idéologiquement ordonnée de la société. Sans exclure des usages plus tactiques, techniques et contingents, cette hypothèse d’une caractérisation normative de la négativité ouvre une piste pour des travaux comparatistes.
32L’exploration de cette éventuelle spécificité d’une communication électorale négative à la française suppose aussi d’établir des stratégies d’enquêtes. Si les travaux américains et internationaux sont très soucieux de l’opérationnalisation des indicateurs de négativité et de leur mesure d’intensité ou de fréquence, cela dirige vers des collectes de données quantitatives en vue de ce qu’on peut appeler une approche documentaire de la négativité. Cela permet notamment de mener des comparaisons dans le temps et entre cas. Par contraste – et sans incompatibilité –, ce qu’on peut appeler une approche stratégique consiste à établir la motivation politique du recours à la négativité et à interpréter sa place dans le développement d’une candidature. Ce type de questionnement suppose plutôt de procéder par étude de cas approfondie dont le cumul permet ensuite de dégager des types ou tendances. L’approche stratégique semble aussi plus adaptée pour traiter, du point de vue de la réception, non pas seulement, du fait de savoir dans quel sens les électeurs sont incités à voter selon l’adhésion ou la répulsion au contenu négatif, mais aussi du fait de savoir comment ils se représentent les sujets à trancher par l’élection, la pertinence des termes dans lesquels le débat politique leur est soumis. L’enjeu analytique de ce que les électrices considèrent comme de la négativité par rapport aux définitions et catégorisations académiques est d’ailleurs au centre de la réflexion sur le concept même de négativité et sur sa portée culturelle et politique (Lipsitz et Geer, 2017). Ainsi la possible contribution de l’analyse de la forme et du fond de la négativité à l’analyse des cultures politiques et de leurs évolutions se dessine-t-elle.
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Mots-clés éditeurs : négativité, campagnes électorales, élection présidentielle, communication politique
Mise en ligne 03/08/2021
https://doi.org/10.4000/questionsdecommunication.23545Notes
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[1]
Cet article est rédigé en appliquant indifféremment l’usage du féminin générique ou du masculin générique dans les cas où la population désignée inclut tant des femmes que des hommes.
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[2]
Il s’agit de l’introduction à un dossier qui comporte six autres articles dont trois traitant chacun d’un candidat de la campagne présidentielle de 2017 : F. Fillon face au scandale, E. Macron dans une situation d’émission de télévision, Jean-Luc Mélenchon sous divers aspects argumentatifs.
- [3]
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[4]
Dans l’étude d’un large corpus d’affiches du PS, F. Cépède (2011 : 82) a identifié que la référence à la droite dans une logique d’antagonisme bipolaire devient un élément textuel très présent dans la période qui suit l’alternance de 1981 avec une mention dans 25 des 98 affiches éditées entre 1985 à 1993 alors que le terme n’apparaît presque pas avant.
-
[5]
Accès : https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000000341734/2020-11-19/ (consulté le 19 nov. 2020).
-
[6]
Les deux cas où la proportion des contenus négatifs est la plus élevée sont le Royaume-Uni (près de 25 %) et les Pays-Bas (23 %) et les deux où elle est la plus faible sont la Belgique et le Luxembourg (environ 2 %). La tonalité des campagnes nationales sur les réseaux sociaux numériques s’avère donc très variable, mais l’interprétation comparative de ces niveaux est délicate car il faut les rapporter chaque fois au contexte politique national, à la configuration de l’offre électorale, aux rapports entre partis, etc.
-
[7]
Le déploiement de la communication électorale négative sur divers formats numériques est aussi attestée dans les contextes nationaux où elle est activement pratiquée sous d’autres formats telles la publicité politique télévisée aux États-Unis (Auter et Fine, 2016 ; Borah, 2016 ; Klotz, 1998) ou les émissions des partis politiques au Royaume-Uni, pays dans lequel plus de la moitié des annonces de chacun des quatre principaux partis sur leur page Facebook était de tonalité négative lors des élections générales de 2017 dont près des deux tiers pour le Labour Party (Anstead et al., 2018 : 10).
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[8]
Accès : https://twitter.com/partisocialiste/status/663827194288803842 (consulté le 20 nov. 2020) ; https://www.parti-socialiste.fr/articles/la-droite-vous-cache-ses-mauvais-coups (page non disponible, consulté le 5 oct. 2020).
-
[9]
L’équipe de F. Fillon fait de même mi-janvier avec une note de trois pages détaillant trois orientations critiques envers E. Macron (voir l’article de P. Lefébure dans ce dossier).
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[10]
La tentative de dénigrement de « Farid Fillon » est cependant lancée mi-décembre par les réseaux activistes sur Facebook et Twitter déjà impliqués dans l’opération « Ali Juppé ».