Bien qu’il ne soit pas catholique, Michel Houellebecq a fait l’apologie des positions éthiques du pape Jean-Paul II. Cet article analyse le sens de l’usage du catholicisme dans ses premiers romans. Le recours à l’ordre social chrétien sert à instruire par comparaison le procès de l’ordre social engendré par le libéralisme, ainsi qu’à décrire les fonctions d’intégration sociale que l’ordre futur devrait restaurer. L’avenir devra être religieux, comme le passé, et refermer la parenthèse du libéralisme. Mais c’est la science seule qui peut désormais assumer cette mission. Et cette transition du magistère des prêtres à celui des scientifiques n’est pas qu’un transfert d’autorité, c’est une redéfinition de l’humanité. L’Homo sapiens doit laisser place à un héritier scientifiquement « augmenté ». Dans les romans de Houellebecq, cette tension entre un passé définitivement révolu et un avenir indésirable est un ressort fondamental d’expression de la dimension tragique de l’existence des occidentaux à la fin du XXe siècle.