Notes
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[1]
Psychologue, docteure en psychologie, Institut de psychologie, Faculté des sciences sociales et politiques, Université de Lausanne, Suisse.
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Psychologue – psychothérapeute, professeur de psychologie clinique, psychopathologie et psychanalyse, LARPsyDIS, Institut de psychologie, Faculté des sciences sociales et politiques, Université de Lausanne, Suisse.
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[3]
Le choix de ne pas rendre anonymes les données a influencé tant le déroulement de l’entretien que les analyses. D’une part, les entretiens ont été menés avec le souci constant de préserver les participants d’une surexposition de leur intimité. D’autre part, les analyses ont été réalisées avec le souci de ne pas interpréter des contenus qui ne concernaient pas notre objet d’étude tel qu’il avait été annoncé, à savoir le processus d’écriture. Le choix de traiter les données de manière non anonyme a évidemment contribué au façonnage de la perspective prise sur l’objet d’étude, qui comporte ainsi inévitablement des zones blanches laissées par ce que les participants auraient peut-être livré dans un cadre plus protégé. Cependant, la possibilité de s’appuyer sur l’œuvre et d’en citer des extraits a apporté une autre forme de matériau pour la compréhension des processus en jeu.
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[4]
Afin de favoriser la validité des analyses et le respect des participants, la grille synthétique de thèmes ayant émergé du processus d’analyse de chaque entretien a été adressée à l’auteur qu’elle concernait en lui proposant de signaler les éventuels écarts entre ce qu’il avait souhaité transmettre et les choix thématiques réalisés. Julien Burri nous a témoigné de son accord sur la grille thématique.
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[5]
Toutes les citations dans cette section sont issues du roman Poupée.
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[6]
Toutes les citations sont issues des propos de l’auteur lors de l’entretien.
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[7]
On peut rappeler que le roman reprend la thématique du film pour l’ouverture de son récit (chapitre 1 : « Le Film »), ce qui fait écho à sa fonction d’enclencheur du processus d’écriture.
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[8]
Le recueil en question, Si seulement, publié au Editions Samizdat en 2008, présente une couverture réalisée avec la technique d’impression du gaufrage invitant les lecteurs à caresser le livre pour en sentir la texture.
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[9]
Chapitres 8, 9, 10 et 15 : « Le petit cheval (par Poupée) » ; « Rite de passage (par Poupée) » ; « Automate (par Poupée) » ; « Voyage d’études (par Poupée) ».
Introduction
1En élaborant la théorie du complexe d’Œdipe, Freud a inscrit dès ses origines la pensée psychanalytique dans un univers de références culturelles et littéraires qui l’ont par la suite accompagné au cours de ses avancées théoriques. Dix ans plus tard, Freud publie sa première étude systématique d’une œuvre, Le délire et les rêves dans la Gradiva de W. Jensen (1907), qui lui permet, grâce à l’analyse des rêves du héros, de conclure à une certaine proximité entre la démarche psychanalytique et celle des écrivains. A la même époque, il avance l’idée que des liens existent entre le jeu de l’enfant et l’activité du poète (Freud, 1908), intuition qui devient centrale beaucoup plus tard pour le développement d’une réflexion psychanalytique sur les processus de symbolisation et de création. D’autres textes de Freud (1913, 1919) approfondissent certaines idées avancées dans ces premiers écrits et témoignent de la manière dont la création littéraire peut enrichir la théorie psychanalytique. Depuis lors, la pensée psychanalytique a continué à se déployer en s’appuyant sur la création littéraire et la création artistique en général, et l’étude du processus créateur s’est constituée comme un objet de recherche particulièrement fécond pour la compréhension des processus de représentation et de symbolisation, et, en filigrane, pour la compréhension des processus de subjectivation.
2C’est dans cette perspective que nous allons présenter des réflexions issues d’une recherche en psychologie (Lempen, 2014) dont l’un des objets d’étude s’attache au processus d’écriture dans la création littéraire du point de vue des processus intra- et intersubjectifs mis en jeu. Nos réflexions se sont développées à partir de l’analyse de six entretiens semi-structurés avec des écrivains romands publiés portant sur leur processus de création. Nous nous attacherons ici à présenter le processus de création tel qu’il se dessine pour l’un des écrivains ayant participé à la recherche, Julien Burri, auteur de Poupée (2009), roman qui a été le support de l’entretien.
Création littéraire, symbolisation et subjectivation
3L’étude de la création littéraire n’apporte pas seulement une contribution à la compréhension de la dynamique psychique des écrivains, mais aussi un éclairage sur les liens étroits entre le développement de l’activité de symbolisation, avec ce qu’elle suppose d’une mise au travail de la rencontre avec l’altérité, et la question du traumatisme psychique. Ainsi, de nombreux auteurs (Anzieu, 1981 ; Brun, Chouvier et Roussillon, 2013 ; Green, 1971) s’accordent sur l’idée que la démarche créatrice se déploie à partir de ce que Janin (2005) a qualifié de « noyau traumatique de tout processus psychique » (p. 52), noyau constitué des traces laissées par les expériences du sujet n’ayant pu trouver une inscription psychique. Ces traces perceptives restées en souffrance d’intégration aux différents temps de la symbolisation se constituent comme la matière psychique à partir de laquelle le processus créateur, dans une tentative d’inscription et de traitement des « restes à symboliser » (Roman, 2007), va se déployer.
4Dans un texte essentiel sur les processus psychiques dans la création littéraire, Guillaumin (1980) propose de considérer l’œuvre comme surface de projection contenante et pare-excitante, « extension topique de l’appareil psychique » (1998, p.37), qui permet au sujet de modifier et de mieux contrôler les excitations reçues passivement. Le corps pulsionnel du créateur se voit retourné projectivement du dedans au dehors et fixé par l’écriture dans cette nouvelle position. Guillaumin, en se référant aux travaux de Bion (1962 ; 1963) avec la théorie de la rêverie maternelle, propose encore de considérer l’extension psychique introduite par la création comme « un substitut d’une fonction détoxicante » (Guillaumin, 1983, p.72). La création s’enracinerait dans un défaut de rêverie maternelle qui n’aurait pas permis à l’appareil psychique de constituer ses fonctions de contenance et de pare-excitation.
5Du point de vue d’un travail de symbolisation, le processus d’externalisation décrit par Guillaumin doit être pensé en regard de la question de la réappropriation des éléments projetés et du risque de clivage sous-tendu par le mouvement projectif. C’est dans cette perspective que Cadoux (2013) propose de considérer le processus d’écriture dans une « double réflexivité » : la première s’opère avec le support de l’œuvre, la seconde avec le lecteur qui peut conforter l’écrivain dans la position subjective qu’il a prise. Le processus créateur trouve ainsi son élan dans la nécessité de s’appuyer sur le caractère concret de l’œuvre, dans une quête d’un autre dont le reflet a manqué à l’origine pour donner sens aux éprouvés restés impensés.
6Ainsi, une réflexion sur les processus de création, en ce qu’ils mobilisent l’externalisation de la matière psychique dans une forme contenue, voire potentiellement contenante et reflétante, se constitue comme un lieu d’observation privilégié des rouages du travail de la symbolisation et du rapport du sujet à la désorganisation traumatique, sur la voie d’une possible élaboration. En ce sens, on peut considérer que le processus de création soutient le processus de subjectivation, selon la définition qu’en propose R. Cahn (1998) dans le temps de l’adolescence : un processus qui tend à l’unification de la personnalité et contribue au sentiment de continuité de soi, un processus qui implique la rencontre avec un objet « subjectalisant », c’est-à-dire un objet qui actualise une réponse de la part de l’environnement.
Démarche méthodologique : l’Analyse Phénoménologique Interprétative
7L’expérience de création se fonde sur un mouvement visant avant tout à restituer la subjectivité du créateur ; elle ne peut ainsi être abordée à partir d’une théorie univoque et cette recherche a privilégié l’étude de la création littéraire dans ses aspects singuliers. Cependant, son inscription dans un projet méthodologique de recherche rigoureux s’est avérée essentielle pour apporter une contribution générale à l’objet d’étude.
8Nous avons étudié le processus de création littéraire dans une démarche exploratoire, à partir de six entretiens semi-structurés avec des écrivains suisses romands publiés. Les entretiens ont été menés sur le lieu d’écriture des participants et ont porté, d’une part, sur leur activité d’écriture en général et, d’autre part, sur le processus de création d’une de leurs œuvres en particulier, choisie par eux avant l’entretien. C’est cette référence à l’œuvre et la richesse du dialogue entre l’auteur et le texte qui a guidé le choix de proposer aux écrivains de participer à l’entretien de manière non anonyme [3]. Les entretiens ont fait l’objet d’une analyse thématique selon la méthode de tradition britannique Interpretative Phenomenological Analysis (Smith, Flowers et Larkin, 2009). Cette méthode s’appuie sur une procédure d’analyse détaillée et systématisée de verbatims d’entretiens pour aborder des expériences subjectives d’un phénomène commun aux participants à la recherche – ici celui de la création littéraire. La méthode IPA invite les chercheurs à se centrer sur l’expérience telle qu’elle se présente pour chaque participant, en insistant sur la part active des chercheurs dans le processus d’analyse, qui naviguent entre les représentations des participants à la recherche et leurs propres représentations. L’un des principes de la méthode concerne son approche dite idiographique, qui privilégie une approche singulière et approfondie de chaque entretien avant de procéder à une mise en commun transversale permettant de dégager un certain nombre de thématiques propres au corpus de données. Ainsi, cette démarche permet de ne jamais perdre de vue le cas singulier de chacun des participants et de pouvoir y revenir. C’est ce que nous proposons de faire ici pour l’un des écrivains ayant participé à cette recherche, Julien Burri, que nous avons rencontré en 2010 lors d’un entretien de recherche ayant pour appui son dernier roman, Poupée [4]. Les éléments qui ont émergé dans l’analyse des propos tenus lors de cette rencontre témoignent d’une mise à l’épreuve constante de l’expérience d’écriture de l’auteur, qui cherche à s’engager sur la voie de la symbolisation mais se trouve sans cesse confronté à la tentation de céder aux mécanismes de la répétition et du clivage.
Le roman, Poupée
9Julien Burri a publié ses premiers écrits dès l’âge de 17 ans. Il gagne deux années consécutives un prix international pour jeunes auteurs, dans la catégorie théâtre puis dans la catégorie poésie. C’est par cette dernière qu’il poursuit son parcours littéraire en publiant des recueils de poèmes avant de publier son premier roman, Poupée.
10Poupée est un bref roman en dix-huit courts chapitres qui invite le lecteur à être témoin de scènes de l’enfance du personnage de Poupée, petit garçon dont le récit suit le parcours jusqu’à son entrée dans l’âge adulte. Le premier chapitre, « Le Film », décrit les scènes d’un film familial dans un style qui place d’emblée le lecteur dans une position de spectateur, presque malgré lui, des scènes de la vie de Poupée. Les scènes de ce premier chapitre sont décrites à partir des limites du champ de la caméra, il y a ce qui est dans le champ et ce qui est hors champ ; les hommes sont hors champ, « l’image est occupée par les femmes » (p. 11) [5]. On note rapidement le contraste entre l’absence du regard paternel et le trop du regard maternel : « Papa préfère filmer maman » (p. 7), mais Maman préfère regarder Poupée qui « est dans le regard de Maman, isolé par son rayon d’élection » (p. 10). Le second et le troisième chapitre présentent l’« Histoire de Papa » et l’« Histoire de Maman ». Le couple en tant que tel ne figure pas dans le livre. Papa est un homme absent qui « possède » (p. 16) une femme beaucoup trop belle pour lui et dont l’« Histoire » est marquée par un vécu d’exigences et d’injustice. Quant à l’ « Histoire de Maman », elle tourne autour de sa beauté, le personnage ne montre aucune émotion et aucune capacité de comprendre son enfant. Papa et Maman vivent dans « une maison froide » (p. 16).
11Puis le quatrième chapitre ouvre sur la « Vie de Poupée » par cette phrase : « Trou à la base du tronc pour l’évacuation des liquides : j’ai fini. Vient la louve, Maman. Et Grand-Maman se bat pour y avoir droit aussi. Viennent nettoyer, essuyer, torcher : un garçon rien que pour nous, notre garçon à nous ! » (p. 19) Grand-Maman appelle Poupée « biscuit ». Non seulement elle semble vouloir le dévorer, mais elle contribue largement à la confusion des registres affectif et sexuel, avec, de surcroît, un certain plaisir apparent : « Hein mon biscuit ? Quand est-ce que ta maman nous laisse une nuit en amoureux ? Tu descendras dormir dans mon lit. […] Il n’y a pas si longtemps, tu ne marchais pas encore. Et te voilà devenu grand garçon. Quel dommage… ça me fait de la peine de voir comme tu grandis » (p. 32). Les deux femmes dénient activement les mouvements pulsionnels de Poupée, et refusent aussi tout simplement de le voir grandir. Les scènes de soins intimes faits à l’enfant par la mère et la grand-mère accompagnent le récit de manière crue et factuelle, sans pour autant que les actions décrites soient de l’ordre de la transgression. Il en est de même pour les explorations sexuelles de l’enfant qui entre dans l’adolescence. Ainsi, il n’y a pas d’histoire autre que celle des scènes de la vie de Poupée, scènes banales de la vie d’un enfant, mais qui laissent un profond malaise au lecteur, notamment par la froideur et la pauvreté émotionnelle des personnages. Cependant, plus le récit avance et plus l’auteur donne une place aux mouvements pulsionnels, notamment dans un chapitre prenant place vers la fin du livre, intitulé « Cruauté des Poupées » : « La nuit, lorsque le musée est déserté, les poupées reprennent vie dans les vitrines et s’entredéchirent. Liguées contre la plus belle d’entre elles, la préférée des enfants, elles l’ont piétinée » (p. 61).
12La lecture de Poupée et le malaise qu’elle laisse chez ses lecteurs convoquent le registre de l’incestuel. Le récit est cru tout en ne présentant que des allusions. La question de la sexualité est latente dans tout le récit tout en n’étant jamais vraiment là, car ce sont principalement les dimensions non génitales de la sexualité qui se trouvent mises en scène. De manière générale, la relation entre les personnages de Poupée et de Maman témoigne d’une figure proche de celle de l’englobement et le roman se présente comme le témoignage d’un processus d’individuation douloureux. La rencontre avec l’auteur nous a permis de comprendre comment celui-ci a attesté dans son roman d’une fonction d’étayage de l’écriture comme venue au secours de sa propre individuation.
Création du roman, création de soi
13La méthodologie IPA propose une démarche d’analyse systématisée articulée en deux temps principaux ayant pour objectif de favoriser une approche phénoménologique des matériaux de recherche : la présentation des thèmes dégagés, en restant au plus près des propos du participant, grâce à la mise en exergue d’extraits de verbatims, puis celle des élaborations. Nous proposerons ici une vue synthétique de cette démarche en abordant les thèmes dégagés les plus importants de manière parallèle avec les élaborations auxquelles ils ont donné lieu.
Ecrire pour exister, être vu
14Dès le début de son activité d’écriture, Julien Burri est accompagné, d’abord par sa mère qu’il décrit avant tout comme porteuse d’un regard « aimant, encourageant et admiratif » [6], mais qui s’avère assez vite aliénant et étouffant. C’est en se référant au personnage de son livre, Poupée, que l’auteur s’exprime sur la lourdeur du regard maternel : « Ce personnage de Poupée, en gros il me pesait beaucoup, parce que j’en avais ras le bol d’être une poupée, un petit garçon modèle, mignon, oui, une petite chose admirée, qui était assez prisonnier de ça en fait. »
15Lorsqu’il est interrogé sur les objectifs de son écriture, il répond sans hésiter :« Exister, être vu » et on entend dans les propos ci-dessus un vécu d’objet idéalisé et inanimé dont la poupée s’est faite le symbole. L’auteur se souvient que le personnage de son roman a émergé lorsqu’il a visionné des films de famille dans lesquels il s’est soudainement vu comme une poupée [7]. Lorsque l’image de « la petite poupée s’est imposée », l’écrivain commence des recherches qui l’amènent à visiter un atelier de fabricant d’automates dans lequel il remarque un automate qui écrit. Plus tard, il en choisit la photographie pour la couverture de son roman, car, raconte-t-il, l’éditeur ne mettait pas de visage d’auteur sur les couvertures de ses livres. Ainsi, à défaut de pouvoir afficher son propre visage, c’est celui d’un automate qu’il choisit ; celui d’un objet mécanique et programmé, qui s’anime, mais dont les mouvements répétitifs, s’ils cherchent à reproduire ceux d’un être vivant, ne sont en réalité que ceux d’une machine indépendante d’une quelconque action humaine. Ainsi, on peut supposer un vécu d’objet inanimé qui réussit toutefois à créer l’illusion, un objet programmé par le regard parental pour être ce petit garçon modèle, cette petite chose admirée. C’est le vide émotionnel qui se distingue dans la photographie de la couverture du livre : un visage figé, les yeux baissés sur sa feuille, le regard vide de toute émotion. Cependant, l’automate tient une grande plume avec laquelle il écrit et des mots sont inscrits sur la feuille, signifiant que sa main s’anime. Quant à la quatrième de couverture, elle présente le dos de l’automate, ouvert sur son intérieur, donnant à voir sa mécanique, évoquant des expériences d’effractions corporelles.
16Après sa mère, d’autres femmes (une voisine, une écrivaine, toutes deux plus âgées) ont accompagné le jeune auteur dans ses débuts d’écrivain. Julien Burri souligne que sans ces personnes et leur regard sur ses écrits, « il n’aurait pas continué ». L’écriture du jeune écrivain a attiré une multiplicité de regards maternels admiratifs, dont l’auteur semblait avoir besoin pour poursuivre sa quête par l’écriture. Toutefois, dès qu’il relate l’obtention des deux prix pour jeunes auteurs, il évoque aussitôt le caractère pesant de cette forme de reconnaissance qu’il lie à son jeune âge : « On ne parlait pas du texte, […] mais on parlait de moi, de qui j’étais, ce que je faisais. Ce n’était pas la bête curieuse de l’écrivain, mais du jeune auteur. C’est ce côté-là qui était plutôt vendeur. »
17Le vécu d’objet prisonnier d’une image se répète dans l’expérience de ce jeune auteur qu’on regarde comme une bête curieuse sans s’intéresser vraiment à ses mouvements internes, au texte, et dont l’image devient un objet-marchandise.
18Ainsi, le récit de ces débuts dans l’écriture permet de faire l’hypothèse que le travail de création s’est inscrit, de façon primordiale, dans la quête d’un regard subjectalisant qu’on peut supposer avoir été défaillant et que l’activité d’écriture et de publication cherche à restaurer. L’écriture s’est mise en place dans le contexte d’une quête identitaire marquée d’une part par des vécus d’emprisonnement dans une image qui aurait figé les mouvements émotionnels, et, d’autre part par des vécus d’intrusion, tels qu’en témoigne notamment le roman. Cependant, c’est d’abord par une nécessaire confirmation de l’image d’une petite poupée admirée que l’auteur a pu s’engager dans l’écriture et la publication. En effet, la tentative de s’extraire du regard englobant maternel par l’écriture pour « exister » s’est d’abord tournée vers la quête de regards similaires et loyaux à la figure maternelle, qui ont maintenu les repères d’une identité fragile de poupée admirée, de jeune auteur adulé, qui bien qu’aliénante pour la subjectivité s’était présentée comme la solution d’existence pour l’auteur. Malgré le caractère douloureux de ces expériences, l’écrivain affirme : « Sans ça, il me semble que je n’aurais pas continué ».
19L’entrée dans l’écriture de Julien Burri nous invite donc à penser l’expérience de la création et ses potentialités d’élaboration en lien avec la question de la répétition, telle que Freud (1920) l’a élaborée. La compulsion à la répétition pousse le sujet à rechercher de manière répétitive l’éprouvé du traumatisme primaire dans une tentative d’intégration et de représentation, qui pourra aboutir ou non selon les conditions au sein desquelles elle prend place. Les premières expériences de publication de l’écrivain, bien que son processus de création littéraire prenne son origine dans une tentative de résolution d’un vécu traumatique – tentative pour l’auteur « d’exister, d’être vu » dans sa subjectivité –, s’engrènent dans la répétition. Le vécu d’objet prisonnier d’une image se répète, le jeune auteur se sent regardé comme « une bête curieuse » dont les mouvements internes et le texte en tant que tel sont relégués au second plan. Comme l’a proposé de M’Uzan (1964), l’expérience de création peut être considérée comme une « micro-expérience traumatique » (p. 8), qui, paradoxalement, vient d’abord actualiser les failles de la rencontre avec l’environnement premier. Elle se constitue alors comme une expérience d’après-coup du traumatisme particulière (Roman et Lempen, 2013), car tout en répétant le vécu traumatique à mettre en forme – l’abxence d’un regard subjectalisant – elle soutient l’engagement vers ses modalités d’élaboration.
Prendre soin de l’objet-livre
20Julien Burri raconte que suite à ces premières expériences en tant que jeune auteur s’est alors imposé le besoin de trouver des éditeurs qui s’attachent à soigner les caractéristiques physiques des livres. Il mentionne avoir tout particulièrement apprécié le travail d’une maison d’édition qui faisait « des petites plaquettes, toutes faites à la main » ou encore un autre petit éditeur qui soignait l’impression du papier : « C’était bien fait. Ils ne sont pas connus mais ils font du travail dans lequel je me reconnais. »
21Ainsi, on peut faire l’hypothèse que ce travail sur les caractéristiques physiques des livres permet à l’écrivain de s’extraire de la voie de la répétition traumatique du lien à l’objet pour cheminer vers une mise en représentation grâce au recours à l’aspect concret de l’œuvre. Confronté à l’absence d’un regard sur son intériorité, il se met à la recherche d’éditeurs qui donneront une attention toute particulière à l’enveloppe externe de l’objet-livre. Il se tourne vers un éditeur peu connu – témoignant ainsi d’un mouvement de distanciation des modalités admiratives du regard maternel – qui fait un travail « dans lequel il se reconnaît », et c’est d’abord parce que « les plaquettes sont faites à la main » qu’il apprécie l’éditeur. On peut faire l’hypothèse que cet investissement témoigne d’une forme de restauration de l’expérience des premiers soins corporels vécus sur un mode mécanique (l’automate), que reproduirait l’impression en série, pour privilégier des soins plus personnels et ajustés. Prendre soin de l’objet-livre serait comme prendre soin de son propre corps, en réinvestissant d’abord ses qualités sensorielles [8] dans un soin à l’écoute de la subjectivité. Le travail d’édition, en apportant des soins personnels au corps matériel du livre, ouvre la possibilité pour l’auteur de projeter dans l’œuvre, support éprouvé comme suffisamment contenant, son « corps métaphorique » (Anzieu, 1981, p. 119).
A la recherche d’un interlocuteur
22Après avoir éprouvé une forme de fiabilité du lien dans les soins apportés à l’enveloppe matérielle des livres, l’écrivain raconte s’être mis à la recherche d’un éditeur « qui travaillera sur le texte, qui le confronte » et qui soit « un interlocuteur », par– delà un appui soutenant et enthousiaste tel celui qui lui a été donné et dont il a eu besoin durant le début de son parcours d’écrivain. Il traverse alors une période difficile où il se trouve sans interlocuteur pendant un certain temps, « se sent vieux », jusqu’à ce qu’il rencontre le futur éditeur de Poupée, à qui il soumet les premières ébauches de son roman. L’auteur souligne l’importance de cette rencontre avec cet éditeur qui l’accueille, lui et son texte : « Il y avait quelqu’un au bout » qui « a pris le temps de me voir » et de restituer des commentaires concernant l’écrit. Il prend alors le risque de poursuivre son projet d’écriture en étant accompagné, de donner à voir son intériorité et de figurer quelque chose des expériences traumatiques. Un espace pour travailler le texte s’ouvre, espace qui témoigne de la possibilité pour l’écrivain de tolérer un regard qui ne viendrait pas confirmer l’immédiateté de sa perfection. On comprend d’autant plus à quel point cette rencontre est déterminante lorsqu’il évoque la manière dont la figure de l’autre est menaçante pour le projet d’écriture : « Pendant que je travaille, je suis dedans, mais j’ai des doutes, j’ai des peurs que ça ne soit pas bien. […] Quand j’étais adolescent, j’avais très très peur de manquer de pudeur, […] de paraître me répandre, ou d’être impudique. Au début j’étais content quand il y avait un texte qui existait, et en général, moi j’existais assez vite. Mais après j’avais très très peur de m’être trompé, d’avoir une espèce d’euphorie et qu’en réalité, le lendemain en relisant le texte, il n’y ait plus grand-chose. »
23L’expression du monde interne se trouve rapidement sanctionnée par cette figure interne qui l’accuse de se répandre, d’être impudique, et qui incarne un autre tout-puissant qui peut venir détruire, en une nuit, ce sentiment d’existence émergeant dans l’écriture. La rencontre avec l’autre, lecteur, est difficile pour Julien Burri, qui est pris dans un mouvement paradoxal d’une nécessité de s’extraire d’un regard qui l’aliène et de la peur de se perdre dans le monde qui l’entoure. La menace d’intrusion, voire de destruction, plane constamment sur la quête de subjectivation par l’écriture, ainsi que le risque de trop montrer, de dévoiler, et d’être débouté de ce nouveau lieu pour l’affirmation de l’identité par le retour mortifère des éléments traumatiques.
Choisir ses traces
24Dans cette lutte avec les objets internes, la voie prise par le processus de création menace de s’inscrire dans l’attaque et le clivage aux dépens du processus de symbolisation. En effet, lorsqu’il évoque les personnages des parents dans son roman, l’auteur les qualifie de « pions » et lorsqu’il parle de la parution du livre, il insiste sur la primauté du projet d’écriture par rapport aux éventuelles réactions de son entourage : « Ils [les personnages des parents] ressemblaient quand même à mes parents […] et je ne voulais pas diluer, je ne voulais pas faire de compromis, je voulais que ça soit le texte qui fonctionne bien. C’est comme une petite machine, comme l’automate, il y a un mécanisme, il y a des roues que j’ai enlevées parce que ça n’allait pas dans le mécanisme, même si c’était tout à fait mon histoire […] c’est le livre qui prime. »
25Le texte pourrait avoir repris à son compte l’incarnation de l’automate sur lequel l’auteur peut à présent intervenir comme il le souhaite pour donner la priorité à son histoire, telle qu’il souhaite la réécrire. L’écrivain remarque ce retournement car il caractérise le personnage de Poupée de « manipulateur ». Et bien qu’il insiste sur la nécessité de « ne pas déverser les tripes sur la table » à plusieurs reprises dans l’entretien, il relate toutefois comment l’écriture trouve son moteur dans la « colère » et « l’envie de s’échapper, de détruire un corset ». Il décrit « une volonté de contrôle en écrivant » et un processus visant « à créer quelque chose de positif » avec des aspects de son enfance qui ne lui ont pas plu. Il essaie « d’avoir le dessus, de pouvoir gérer la chose, qu’il y ait un petit mécanisme qui fonctionne ».
26Au sujet du rôle qu’a joué l’écriture dans sa vie, Julien Burri propose l’image suivante : « C’est comme un animal qui fait des traces dans la neige, il choisit ces traces-là ». Et en parlant du personnage de Poupée, il témoigne d’une tentative de mise à distance des éprouvés traumatiques : « Ce personnage de Poupée, maintenant, c’est un personnage, ce n’est plus moi, il existe, il a une histoire, il est indépendant. Je l’ai rendu indépendant. »
27Le retournement d’une posture passive (l’automate) à une posture active (l’écrivain) semble nécessaire au processus de création pour faire face à la force destructrice des objets internes. Cependant, il s’en faut de peu que le mécanisme, au lieu de constituer une étape vers la représentation d’expériences intolérables, s’installe comme un obstacle à la symbolisation entérinant les vécus traumatiques dans le clivage. Toutefois, bien que la question de la maîtrise soit centrale dans l’activité d’écriture du romancier, elle est, dans ses propos, sans cesse mise en tension avec les parts du processus qui lui échappent : « Il y a des personnages qui s’imposent, au fur et à mesure que j’écris. Je découvre l’histoire aussi, c’est-à-dire que je n’ai pas un plan très précis au début. Je vais à l’aventure, à la découverte, donc j’ai l’impression que c’est l’histoire qui me pousse. Je la suis, je lui obéis. »
28On peut relever la force du terme « obéir », qui s’oppose radicalement à celui de la maîtrise pour inscrire le processus dans une dynamique de soumission. Il reprend la question de l’obsession pour préciser comment celle-ci opère dans le processus d’écriture : « Ça crée une aimantation plus qu’une obsession, il y a ce terme de poupée, puis on commence à y réfléchir, du coup je vais chercher des livres, de la documentation, des images de poupée […] et alors tout ça amène de la matière qui me permet d’écrire […] il y a ce germe et puis c’est attiré, aimanté, comme de la limaille, ou je ne sais pas, on pourrait dire que ça cristallise. »
29Un peu plus loin il développe encore : « Je dis que c’est une petite machine mais c’est pas monté, construit, conçu comme une machine avec des plans. C’est à l’aveugle, oui, je travaille à l’aveugle, je ne sais pas où je vais. Enfin pendant longtemps je cherche, j’essaie de me laisser guider par ces obsessions, fascinations, mais je ne sais pas où je vais vraiment. »
30Poupée, cette image qui est advenue à la conscience, ce germe, guide l’auteur aveugle qui cherche, suit l’obsession là où elle l’attire et vers ce qu’elle aimante : la limaille, les restes. Le processus engagerait alors les restes d’un travail de limage et leur transformation (la cristallisation) en passant par la recherche de supports dans l’environnement (les livres, la documentation, les images de Poupée). Le processus d’écriture serait sans cesse pris en tension entre la volonté d’une mise à distance et cette attraction par les obsessions, « les restes à symboliser », qui ramènent l’auteur vers ce dont il aimerait se départir, se débarrasser. Julien Burri relate comment cette matière transformée est soumise au risque de la destruction : « Je ne sais pas, j’ai peut-être cent pages d’un texte avec plein de chapitres, des personnages, je ne sais pas du tout, peut-être il ne va rester qu’un chapitre à la fin. Peut-être qu’il restera rien du tout. »
31Un travail d’écriture de différentes versions, de multiples recommencements, témoignent de la tension entre une tentative de mise en forme de la matière et le fantasme de sa destruction, dans un mouvement d’effacement des traces psychiques plutôt que de leur intégration. Mouvement d’effacement que l’auteur évoque à plusieurs reprises dans l’entretien, et qui fait écho avec l’effacement de sa propre subjectivité. C’est ainsi à une perpétuelle remise au travail du rapport à la destructivité que se confronte Julien Burri par l’écriture.
Poupée qui écrit
32Dans l’entre-deux d’une écriture aliénée à l’autre ou construite pour attaquer l’autre, Julien Burri crée dans son livre une figure littéraire originale qui ouvre sur une « aire intermédiaire d’expérience » (Winnicott, 1971) permettant au processus de symbolisation de se déployer. En effet, quatre chapitres intervenant vers le milieu du récit ont pour sous-titre « (par Poupée) [9] » laissant entendre que c’est le personnage qui écrit et non plus le narrateur. Ces chapitres sont alors écrits à la première personne du singulier. Ainsi, le livre figure un double à Poupée, un double qui n’est ni un autre, ni le même, « Poupée (par Poupée) ». Il y a Poupée, que Julien Burri tient à distance par l’usage de la troisième personne du singulier, et il y a Poupée qui écrit pour lequel l’auteur passe au Je. Nous proposons de considérer Poupée qui écrit comme une forme de personnage transitionnel, qui n’est ni l’auteur, ni le personnage, mais se définit comme le lieu de la rencontre et de l’élaboration des traces laissées par la relation à l’environnement premier (Poupée) avec une identité de sujet (qui écrit). En créant ces deux niveaux du personnage et en les attachant dans une même forme littéraire, le romancier peut tout à la fois mettre à distance l’expérience traumatique et tenter sa symbolisation. Poupée qui écrit l’histoire de Poupée signifie un mouvement de reprise et de réappropriation des éléments clivés grâce à l’écriture et à la position active qu’elle permet. Chouvier (2013), dans une réflexion importante sur les processus de création, a proposé la notion d’ « objet uniclivé » pour caractériser une œuvre plastique qui porterait la marque du clivage tout en concrétisant son dépassement dans une forme unificatrice. Le personnage de « Poupée qui écrit » pourrait bien se constituer comme « objet uniclivé » qui viendrait figurer dans une même forme littéraire ce qui doit être tenu à distance (Poupée) et ce qui permettra sa réappropriation (qui écrit). Par ailleurs, ce qui frappe dans les quatre chapitres écrits par Poupée c’est que le lecteur semble être projeté dans un registre plus proche de celui du fantasme que de celui de la concrétude, qui prédomine de manière générale dans les autres chapitres. En effet, dans le premier chapitre écrit par Poupée, Poupée raconte sa propre naissance : « les odeurs de l’accouchement » ; « les caresses de l’abdomen » ; « le rythme de sa respiration » ; « Il n’y a que nous, mon cœur, ils ne viendront pas. Il n’y a que nous », lui dit-elle. Poupée écrit : « C’est ma préhistoire. Peu de vestiges témoignent de cet âge d’or » (Poupée, p. 35) L’auteur évoquerait alors ce temps d’avant la question de la séparation, cet âge d’or. Il fait référence à la préhistoire, cette période d’avant l’écriture, comme si l’écriture avait repris à son compte une fonction séparatrice encore non advenue. Il y a l’avant et l’après l’écriture. L’histoire de Poupée comme sujet commencerait avec l’écriture. Nous pouvons encore mentionner que Julien Burri, lors de l’entretien, a situé le début de son activité d’écriture à un âge très jeune, lorsqu’il dictait des histoires à sa mère. Comptait-il sur ces histoires pour introduire un espace d’imaginaire entre lui et sa mère ? On peut faire l’hypothèse que c’est en se raccrochant à cet espace, dicté par lui et non par elle, espace investi par l’écriture, qu’il aura traversé les épreuves qui ont suivi.
Conclusion
33L’analyse du processus de création littéraire de Julien Burri nous montre comment le processus de symbolisation des expériences traumatiques s’enracine dans une quête de subjectivation par l’écriture. Celle-ci vient actualiser les failles de la relation à l’environnement premier afin de relancer le travail de leur élaboration dans et grâce à l’expérience de création. Le processus s’appuie sur deux étapes :
- d’une part sur les caractéristiques perceptives, tangibles, et contenantes de l’enveloppe de l’objet-livre, dont la fiabilité matérielle et sensorielle doit être éprouvée pour supporter la mise au jour des éléments traumatiques et contenir les risques de débordements ;
- d’autre part le processus dépend essentiellement de la rencontre avec un interlocuteur, ici l’éditeur de Poupée, qui peut soutenir et reconnaître le mouvement de subjectivation engagé dans l’écriture au-delà d’une relation prise dans une dualité des postures activité/passivité.
34Finalement c’est grâce à la forme littéraire même, celle que nous nommons le personnage transitionnel dans ce cas, figure unique et propre à l’écrivain, spécifique au phénomène de la création artistique comme espace pour la rencontre entre le sujet et l’environnement, qui ne s’ancre ni dans la répétition ni dans le clivage, que Julien Burri semble trouver une issue vers la voie de la symbolisation.
35Ainsi, la création littéraire présente des caractéristiques qui peuvent contribuer à la remise au travail de l’activité de représentation psychique : elle se constitue comme potentiel support de projection concret et contenant pour les éléments pulsionnels restés non élaborés psychiquement ; elle mobilise l’émergence de formes d’expression singulières non encore advenues qui soutiennent la reconstitution d’une continuité entre le monde interne du sujet et l’environnement ; en tant qu’objet médiateur qui porte au regard d’un autre la figuration du monde intérieur de l’auteur, elle peut permettre la relance d’une rencontre intersubjective. Ces caractéristiques invitent à considérer une pensée sur la création littéraire et les processus psychiques qu’elle met en jeu comme une contribution utile pour une réflexion clinique sur le travail de la symbolisation ; au delà de la clinique de la création, ces réflexions peuvent être mobilisées au service de la compréhension du fonctionnement psychique.
Bibliographie
- Anzieu, D. (1981) : Le corps de l’œuvre. Paris, Gallimard.
- Bion, W. R. (1962) : Learning from experience. New York, Basic Books.
- Bion W. R. (1963) : Elements of psycho-analysis. New York, Basic Books.
- Brun A., Chouvier B., Roussillon R. (2013) : Manuel des médiations thérapeutiques. Paris, Dunod.
- Burri J. (2009) : Poupée. Orbe (Suisse), Editions Campiche.
- Cadoux B. (2013) : Écritures de la psychose. Folie d’écrire et atelier d’écriture. Vareilles (France), La Rumeur Libre.
- Cahn R. (1998) : L’adolescence dans la psychanalyse. L’aventure de la subjectivation. Paris, PUF.
- Chouvier B. (2013b) : Objet médiateur et groupalité, in : Brun A.,, Chouvier B., Roussillon R. : Manuel des médiations thérapeutiques. Paris, Dunod, pp. 70-94.
- Freud S. (1907) : Le délire et les rêves dans la Gradiva de W. Jensen. Paris, Gallimard, 1986.
- Freud S. (1908) : Le créateur littéraire et la fantaisie, in : Cotet P., Robert F. : Freud et la création littéraire : choix de textes (pp. 11-21). Paris, PUF, 2010.
- Freud S. (1913) : Le motif du choix des coffrets, in : Cotet P., Robert F. : Freud et la création littéraire : choix de textes (pp. 31-45). Paris, PUF, 2010.
- Freud S. (1919) : L’inquiétante étrangeté, in : L’inquiétante étrangeté et autres essais, pp. 209-263. Paris, Gallimard, 1985.
- Freud S. (1920) : Au-delà du principe de plaisir, in : Essais de psychanalyse, pp. 7-81. Paris, Petite Bibliothèque Payot, 1963.
- Guillaumin J. (1980) : La peau du centaure. Le retournement projectif de l’intérieur du corps dans la création littéraire, in : Guillaumin J. (Ed.) : Corps création. Entre lettres et psychanalyse (pp. 227-267). Lyon, Presses Universitaires de Lyon.
- Guillaumin J. (1983) : La souffrance travaillée par la pensée dans l’écriture, in : Caïn J., David C., Faïn M., Guillaumin J., Melor Picaut S., Olender M. : Souffrance, plaisir et pensée (pp. 61-131). Paris, Les Belles Lettres.
- Guillaumin J. (1998) : Le jugement esthétique, un instrument logique étrange entre l’intime et l’universel, in : Chouvier B. (Ed.) : Symbolisation et processus de création (pp. 35-56). Paris, Dunod.
- Green A. (1971) : La déliaison. Psychanalyse, anthropologie et littérature. Paris, Les Belles Lettres, rééd. 1992.
- Janin C. (2005) : Au cœur de la théorie psychanalytique : le traumatisme. In F. Brette, M. Emmanuelli, & G. Pragier (Eds.), Le traumatisme psychique. Organisation et désorganisation (pp. 43-55). Paris, France : PUF.
- Lempen O. (2014) : Processus et fonctions psychiques de l’écriture : de la cération littéraire au groupe à médiation. Thèse de doctorat sous la direction du Pr Pascal Roman, Université de Lausanne.
- M’Uzan M. de (1964) : Aperçus sur le processus de la création littéraire, in : De l’art à la mort (pp. 3-27). Paris, Gallimard, 1977.
- Roman P. (2007) : « Figures du négatif et « expérience « créatrice », in : Brun A., Talpin J.-M. : Clinique de la création (pp. 117-140). Bruxelles, de Boeck.
- Roman P., Lempen O. (2013) : Traumatismes et restes à symboliser : une contrainte à créer ? in : Dumet, N. (Ed.) : De la maladie à la création (pp. 93-108). Toulouse, Érès.
- Smith J.A., Flowers P., Larkin M. (2009) : Interpretative Phenomenological Analysis : Theory, Method and Research. London, Sage.
- Winnicott D.W. (1971) : Jeu et réalité. Paris, Gallimard, 1975.
Notes
-
[1]
Psychologue, docteure en psychologie, Institut de psychologie, Faculté des sciences sociales et politiques, Université de Lausanne, Suisse.
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[2]
Psychologue – psychothérapeute, professeur de psychologie clinique, psychopathologie et psychanalyse, LARPsyDIS, Institut de psychologie, Faculté des sciences sociales et politiques, Université de Lausanne, Suisse.
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[3]
Le choix de ne pas rendre anonymes les données a influencé tant le déroulement de l’entretien que les analyses. D’une part, les entretiens ont été menés avec le souci constant de préserver les participants d’une surexposition de leur intimité. D’autre part, les analyses ont été réalisées avec le souci de ne pas interpréter des contenus qui ne concernaient pas notre objet d’étude tel qu’il avait été annoncé, à savoir le processus d’écriture. Le choix de traiter les données de manière non anonyme a évidemment contribué au façonnage de la perspective prise sur l’objet d’étude, qui comporte ainsi inévitablement des zones blanches laissées par ce que les participants auraient peut-être livré dans un cadre plus protégé. Cependant, la possibilité de s’appuyer sur l’œuvre et d’en citer des extraits a apporté une autre forme de matériau pour la compréhension des processus en jeu.
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[4]
Afin de favoriser la validité des analyses et le respect des participants, la grille synthétique de thèmes ayant émergé du processus d’analyse de chaque entretien a été adressée à l’auteur qu’elle concernait en lui proposant de signaler les éventuels écarts entre ce qu’il avait souhaité transmettre et les choix thématiques réalisés. Julien Burri nous a témoigné de son accord sur la grille thématique.
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[5]
Toutes les citations dans cette section sont issues du roman Poupée.
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[6]
Toutes les citations sont issues des propos de l’auteur lors de l’entretien.
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[7]
On peut rappeler que le roman reprend la thématique du film pour l’ouverture de son récit (chapitre 1 : « Le Film »), ce qui fait écho à sa fonction d’enclencheur du processus d’écriture.
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[8]
Le recueil en question, Si seulement, publié au Editions Samizdat en 2008, présente une couverture réalisée avec la technique d’impression du gaufrage invitant les lecteurs à caresser le livre pour en sentir la texture.
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[9]
Chapitres 8, 9, 10 et 15 : « Le petit cheval (par Poupée) » ; « Rite de passage (par Poupée) » ; « Automate (par Poupée) » ; « Voyage d’études (par Poupée) ».