Notes
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[*]
International Migration Institute, University of Oxford, Grande-Bretagne.
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[1]
Pour une analyse détaillée de la littérature, voir Flahaux (2013), p. 107-131.
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[2]
Kinshasa, la capitale, située à l’Ouest du pays, a été relativement tenue à l’écart des conflits armés qui ont déchiré la RDC, surtout par rapport à l’Est du pays.
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[3]
Pour de plus amples détails sur les données du projet MAFE, voir le chapitre introductif de ce volume.
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[4]
Dans les enquêtes MAFE, il est considéré qu’il y a migration dès lors qu’un séjour de plus d’un an en Europe a été effectué. Les séjours de moins d’un an ne sont pas pris en compte.
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[5]
Dans les données sénégalaises, sur 713 migrations, 615 sont celles de Sénégalais qui migrent pour la première fois, 73 migrent pour la deuxième fois, 21 migrent pour la troisième fois, et 4 migrent pour la quatrième fois. Dans les données congolaises, sur 521 migrations, 412 sont celles de Congolais migrant pour la première fois, 90 migrent pour la deuxième fois, 15 migrent pour la troisième fois, et 4 migrent pour la quatrième fois.
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[6]
Les effets de ces covariables sont proches de ceux du tableau 4.
1Bien que la question du retour des migrants ait fait l’objet d’un nombre croissant d’études empiriques, en particulier dans la dernière décennie (Carling et al., 2011), certains aspects n’ont été que très peu ou pas étudiés. En particulier, l’intention initiale des migrants quant au retour et l’éventuelle concrétisation de leur intention n’ont pas été abordées en profondeur dans la littérature théorique et empirique des migrations internationales.
2Comme le soulèvent de Haas et Fokkema (2011), les théories économiques classiques des migrations internationales présentent le désavantage de lier le retour des migrants au motif initial de leur migration. Ainsi, pour la théorie néoclassique qui considère les migrants comme des acteurs rationnels qui migrent sur la base d’un calcul de coûts et bénéfices pour maximiser leurs revenus (Todaro, 1969), la migration a lieu dès le départ dans une optique définitive. Dès lors, le retour est perçu comme étant la conséquence d’un échec à l’étranger car les bénéfices que les migrants attendaient de la migration n’ont pas été atteints (Cassarino, 2004 ; Constant et Massey, 2002). Pour la théorie de la nouvelle économie de la migration de travail, la migration est une des stratégies que les ménages adoptent pour diversifier les sources de revenus dans un contexte caractérisé par la défaillance des marchés (accès au crédit, aux assurances) (Stark et Bloom, 1985). Selon cette théorie, les migrants sont dès le départ dans l’optique de retourner dans leur pays d’origine lorsqu’ils auront réalisé à l’étranger un objectif bien précis : celui d’acquérir les ressources nécessaires pour surmonter les imperfections des marchés, ce qui leur permettra d’améliorer leurs conditions de vie et celles de leur famille. Il est considéré que les migrants qui retournent dans le pays d’origine sont ceux qui ont acquis assez de capital financier et humain pour pouvoir y réaliser leurs projets (Cassarino, 2004). Ces deux théories ne tiennent pas compte du fait que les motivations initiales et les stratégies des migrants peuvent évoluer pendant leur séjour à l’étranger (de Haas et Fokkema, 2011). Si certains migrants rentrent comme ils le prévoyaient au départ, d’autres vont finalement préférer rester à l’étranger, car les liens avec leur communauté d’origine se sont atténués (Guilmoto et Sandron, 2000 ; Massey et al., 1987), parce qu’ils ont acquis une certaine autonomie (El Hariri, 2003), que des événements d’ordre personnel ou professionnel sont survenus dans leur vie (Hazen et Alberts, 2006), ou en raison d’un changement de contexte dans leur pays d’origine ou de destination (Carling, 2004 ; Cornelius, 2001 ; Massey et Espinosa, 1997 ; Massey et al., 2002). Pour d’autres, le projet de retour reste présent au fil du temps, mais est remis continuellement à plus tard, si bien qu’il prend la forme d’un mythe (El Hariri, 2003 ; Sayad, 1998).
3En raison de l’absence de données, rares sont les travaux quantitatifs qui se sont spécifiquement intéressés à l’intention initiale des migrants quant au retour et à sa réalisation. D’une part, les recherches s’intéressant à l’intention de retour des migrants se basent sur des enquêtes transversales qui posent la question de l’intention de retour au moment de l’enquête, quelle que soit la date depuis laquelle ils sont arrivés dans le pays de destination, et non au moment de leur arrivée. D’autre part, l’analyse de la réalisation du retour suppose des données sur les histoires de vie des individus qui sont rentrés ainsi que sur celles des individus qui sont toujours à l’étranger. Jusqu’à récemment, seul le Mexican Migration Project (MMP), à partir de données collectées à la fois dans les pays d’origine et de destination, a permis d’étudier les facteurs déterminants du retour des Mexicains qui ont migré aux États-Unis (Massey et Espinosa, 1997 ; Reyes, 2004).
4À partir des enquêtes biographiques MAFE-Sénégal et MAFE-Congo réalisées dans des pays d’origine en Afrique et de destination en Europe qui ont collecté des informations à la fois sur les intentions initiales de retour des migrants et sur les retours, cet article poursuit deux objectifs : il vise à analyser d’une part le projet migratoire des Sénégalais et des Congolais au moment de leur arrivée en Europe, et d’autre part la concrétisation de leur intention initiale de retour.
5L’hypothèse est que le projet migratoire initial et le retour dépendent de ce que les migrants estiment être le mieux pour eux et leur famille, mais que ces aspirations sont limitées par la situation prévalant dans les pays d’origine et de destination. On s’attend à ce qu’une détérioration du contexte dans les pays d’origine et un durcissement des politiques migratoires édictées par les pays de destination aient un effet négatif sur l’intention de retour des individus au début de leur migration. Il est aussi attendu que l’intention initiale quant au retour ne se traduise pas en retour si les restrictions pour migrer s’intensifient et si la situation dans les pays d’origine se détériore. À ce titre, le Sénégal et la République démocratique du Congo (RDC) présentent deux contextes intéressants à comparer car ils ont connu des évolutions politiques et économiques différentes.
6La première section de cet article consiste en une brève revue de littérature sur les déterminants de l’intention et du retour des migrants. La deuxième section retrace l’évolution du contexte au Sénégal et en RDC ainsi que des politiques migratoires en Europe, avant de présenter l’histoire et la place du retour dans les migrations sénégalaises et congolaises. Dans une troisième section, les hypothèses de recherche sont détaillées. Enfin, la quatrième section expose la méthodologie de recherche, et la cinquième section présente les résultats.
I – Revue de littérature sur les déterminants de l’intention et de la réalisation du retour
7La littérature met en avant de nombreux facteurs influençant l’intention et le retour des migrants [1]. Cette revue de littérature se focalise particulièrement sur les facteurs reflétant les aspirations des migrants (motif de la migration) et sur les contraintes qui peuvent s’imposer à eux (statut administratif, politiques migratoires restrictives et détérioration de la situation dans le pays d’origine).
8Le motif du départ à l’étranger apparaît comme un déterminant fort. Les individus qui ont migré pour des raisons familiales s’installent généralement dans le pays de destination avec l’intention d’y rester, comme le montre une étude sur les migrants afghans, burundais, éthiopiens et marocains aux Pays-Bas (Bilgili et Siegel, 2012). Une autre étude sur les Pays-Bas confirme que, dans les faits, le regroupement familial donne souvent lieu à une migration définitive (Bijwaard, 2007). Concernant les migrations pour motif d’études, il semble qu’elles ont plus souvent lieu dans une optique temporaire, en particulier si les conditions économiques de retour sont favorables (Baruch et al., 2007). Une recherche montre que les étudiants africains aux États-Unis souhaitent retourner dans leur pays d’origine autant que les autres étudiants étrangers car ils savent qu’ils trouveront un emploi relativement facilement à leur retour (Hazen et Alberts, 2006). Les individus qui ont quitté leur pays pour des raisons politiques semblent être les plus enclins à rester définitivement à l’étranger, comme le révèlent des études sur le cas de la Suède (Edin et al., 2000) et de la Norvège (Carling et Pettersen, 2014).
9Le statut administratif ou légal des migrants dans le pays de destination semble aussi être important pour le retour. Selon Reyes (2004), les migrants en situation irrégulière ne retournent pas au Mexique mais restent aux États-Unis dans l’espoir que leur statut soit régularisé. Les travaux qualitatifs de Sinatti (2011) vont dans le même sens à propos des Sénégalais en situation irrégulière en Italie. Dans la même lignée, des recherches sur les migrations capverdiennes (Carling, 2004), marocaines (de Haas et Fokkema, 2010) et mexicaines (Cornelius, 2001 ; Massey et Espinosa, 1997 ; Massey et al., 2002 ; Reyes, 2004) suggèrent que les individus peuvent différer ou annuler leur projet de retour en raison des politiques migratoires de plus en plus restrictives dans les pays de destination.
10Enfin, la situation prévalant dans les pays d’origine apparaît aussi comme un facteur crucial. Des études réalisées sur le cas du Maroc (de Haas et Fokkema, 2010, 2011) et de l’Amérique latine (Moran-Taylor et Menjívar, 2005) ont mis en avant que les migrants envisagent souvent de ne pas rentrer dans le pays d’origine lorsqu’ils ont quitté un contexte instable et insécurisé ; dans les faits, les probabilités de retour sont aussi plus faibles quand le pays d’origine connaît une crise, car les migrants appréhendent le manque d’opportunités d’emploi et le climat politique défavorable.
II – Contextualisation de la recherche
1 – Le Sénégal et la RDC montrent des évolutions politico-économiques contrastées
11Le Sénégal et la RDC ont connu des évolutions très différentes sur le plan politique depuis leur indépendance. Anciennement colonisé par la France, le Sénégal est réputé pour être l’un des pays les plus stables du continent africain. Cela est attesté par son alternance politique au pouvoir et par sa capacité à surmonter les crises (Dumont et Kanté, 2009). L’histoire de la RDC, colonisée jusqu’en 1960 par la Belgique, a connu des crises politiques plus profondes. Mobutu, commandant en chef de l’armée, est resté au pouvoir 32 ans, caractérisés par une relative stabilité du fait de l’instauration d’un régime politique très centralisé et répressif. L’échec du processus de démocratisation amorcé au début des années 1990 a plongé le pays dans une longue période de troubles politiques, donnant lieu à des émeutes, des mutineries de l’armée et des pillages sans précédent (Braeckman, 2009). Une lente transition vers le changement est apparue en 1997, lorsque Mobutu a été chassé du pouvoir par L. D. Kabila, mais les violences ont persisté jusqu’à l’assassinat de ce dernier en 2001 (Hesselbein, 2007). En 2006, les premières élections ont été organisées. J. Kabila a été élu président et réélu en 2011, bien que ce résultat ait été contesté par une partie de la population, en particulier à Kinshasa [2].
12Sur le plan économique, les populations sénégalaises et congolaises ont vu leurs conditions de vie se dégrader au fil du temps, notamment suite à la mise en place des programmes d’ajustements structurels et du retrait de l’État des secteurs sociaux (Braeckman, 2009 ; Thioub et al., 1998). Au Sénégal, l’impact de la crise s’est fait sentir à partir des années 1990 sur le marché du travail. À Dakar, le chômage et les emplois informels se sont développés, et il est devenu particulièrement difficile pour les individus les plus instruits d’obtenir un emploi salarié qualifié (Bocquier, 1996). Du côté congolais, la détérioration de la situation politique a contribué grandement à la dégradation du contexte économique. Les premières années de la décennie 1990 ont constitué la période la plus sombre de l’histoire du pays. Durant cette période, la RDC a vu le taux de croissance de son PIB chuter fortement, l’inflation augmenter, et la dévaluation de la monnaie s’accélérer (Peemans, 1998). Les répercussions se sont fait fortement ressentir dans la population. Ce n’est qu’au début des années 2000 que le pays a connu une timide reprise économique et que sa population a constaté une légère amélioration des conditions de vie (Mangalu, 2011). En 2014, la RDC occupe l’avant-dernière place dans le classement international des pays selon l’indicateur de développement humain.
2 – Des politiques migratoires plus restrictives en Europe
13Les politiques migratoires qui règlementent l’accès et le séjour des étrangers sur le territoire des pays européens ont considérablement évolué au cours du temps. Migrer en Europe à partir des pays tiers et y séjourner est devenu de plus en plus difficile, bien que les politiques aient varié selon les pays, l’origine et le type de migrants.
14Dans les années 1960, plusieurs pays européens ont fait appel à la main d’œuvre étrangère dans un contexte de croissance économique. À cette époque, les conditions de migration étaient souples (Donovon, 1988). La France a pris des dispositions pour encourager la libre circulation de la main d’œuvre originaire de ses anciennes colonies et a mis en place des bureaux de recrutement, entre autres au Sénégal (Robin et al., 2000). La Belgique n’a jamais procédé au recrutement de travailleurs congolais, mais a octroyé aux ressortissants de son ancienne colonie des visas et des bourses d’études dans des universités belges dans le but de créer une élite qui pourrait se porter garante de la gestion du pays nouvellement indépendant (De Schutter, 2011). Entre 1973 et 1974, avec la crise économique, des mesures ont été prises pour mettre fin au système de recrutement de la main d’œuvre (Castles, 2006). Il n’a dès lors plus été possible de migrer pour un motif de travail, mais le titre de séjour lié au regroupement familial a été créé. L’entrée en France, pour les Sénégalais, a toutefois été facilitée grâce à l’exemption de visa de voyage jusqu’en 1986 (Marot, 1995), et en Italie jusqu’en 1990 (Finotelli et Sciortino, 2009). Le visa donnant accès au territoire belge a quant à lui toujours été obligatoire pour les ressortissants congolais (Geert, 2011).
15Dans les années 1990, les migrations sont devenues un sujet de plus en plus politisé dans de nombreux pays d’Europe. Les conditions pour migrer dans un cadre familial, d’études ou de travail se sont durcies (Gnisci, 2008). À partir des années 2000, la lutte contre la migration irrégulière est devenue le champ prioritaire des actions au niveau européen (Guiraudon, 2000). Avec la création de l’agence Frontex, tout un arsenal ainsi que des moyens considérables ont été mis en place pour tenter d’empêcher l’accès au territoire européen aux migrants ne détenant pas de visa (Carling et Hernández-Carretero, 2011). Les procédures pour obtenir le statut de réfugié se sont également durcies, et l’accent a été mis sur le renvoi des migrants en situation irrégulière dans leur pays d’origine (Cassarino, 2008).
16En raison de la rupture au début des années 1990 de la situation dans les pays d’origine et des politiques migratoires, la périodisation « avant » et « après » 1990 sera utilisée dans les analyses suivantes.
3 – La place du retour dans les migrations sénégalaises et congolaises
17Les évolutions contrastées que le Sénégal et la RDC ont connues ont influencé les histoires migratoires de leurs populations, y compris les retours. Les études quantitatives qui ont analysé l’importance des intentions de retour et des retours sont rares ; ce sont surtout des travaux qualitatifs qui apportent des éclairages sur la question.
La place du retour dans les migrations sénégalaises
18À l’origine, la migration sénégalaise en Europe était principalement celle d’hommes seuls, issus du milieu rural, qui allaient travailler dans l’industrie en France (Timera, 1996). Ils effectuaient des allers-retours entre la France et le Sénégal avant de rentrer définitivement au pays, moment à partir duquel ils étaient remplacés par d’autres membres de leur communauté, selon le système de la noria (Barou, 2001). Cependant, après 1974, lorsque les États européens ont entrepris de réguler leurs frontières, ces migrations de remplacement ont pris fin (Barou, 2001), et certains migrants sénégalais ont fait le choix de recourir au regroupement familial dans le pays de destination (Azoulay et Quiminal, 2002). Des travaux qualitatifs soulignent que le retour est resté au cœur du projet migratoire des Sénégalais. Selon le point de vue sénégalais, en effet, une migration réussie donne lieu à un retour définitif auprès de la famille, après en avoir amélioré les conditions de vie (Sinatti, 2011). Ceci dit, le retour est souvent remis à plus tard, les migrants étant confrontés aux pressions familiales et à la difficulté d’investir leur épargne dans des projets personnels au Sénégal (Hernandez-Carretero, 2012). Cependant, les données de l’enquête Push Pull, réalisée en 1997 auprès de Sénégalais en Italie et en Espagne, révèlent que seuls 38 % d’entre eux avaient l’intention de retourner au Sénégal, 31 % entendaient rester en Europe et les autres étaient indécis (de Haas et Fokkema, 2011).
La place du retour dans les migrations congolaises
19C’est à partir de 1960 que les Congolais ont commencé à migrer vers l’Europe, essentiellement en Belgique dans un cadre d’études (Kagné et Martiniello, 2001 ; Schoonvaere, 2010). À cette époque, bien que fragile, l’État congolais pourvoyait à des services sociaux, et les migrants rentraient au pays après leurs études (Sumata et al., 2004). Ils se voyaient offrir un emploi de cadre, un bon salaire et des conditions de vie favorables dans leur pays d’origine (De Schutter, 2011). Cependant, par la suite, lorsque la situation s’est détériorée en RDC, l’installation des Congolais à l’étranger est devenue plus durable. Comme l’expliquent Bongo-Pasi Moke Sangol et Tsakala Munikengi (2004), auparavant, les familles congolaises dont les enfants étudiaient en Europe et en Amérique du Nord les encourageaient à achever rapidement leurs études et à rentrer au pays ; aujourd’hui, en revanche, elles les poussent à rester à l’étranger à tout prix et à y trouver un emploi, quel qu’il soit, de façon à ce qu’ils pourvoient aux besoins des parents restés en RDC. Bazonzi (2010) écrit : « Une fois en terre étrangère, l’on est prêt à tout faire, sauf retourner au pays, de peur d’être la risée du voisinage » (p. 8). L’étude quantitative de Schoonvaere (2010), réalisée à partir des données du Registre national belge, révèle également que les migrations des Congolais en Belgique sont devenues plus permanentes au fil du temps : parmi ceux arrivés en Belgique en 1991, 18 % étaient déjà repartis de Belgique au bout de deux ans alors que, parmi ceux arrivés dix ans plus tard, la proportion n’était plus que de 8 %.
III – Objectifs et hypothèses de recherche
20Dans un premier temps, cette recherche vise à analyser les facteurs explicatifs de l’intention initiale de retour des migrants sénégalais et congolais partis en Europe. On s’attend à ce que les migrants envisagent initialement de rentrer s’ils ont migré dans le but d’acquérir des ressources qu’ils pourront valoriser dans leur pays d’origine par la suite. Par contre, il est possible que la détérioration du contexte dans le pays d’origine, en particulier pour les Congolais, les poussent à migrer dans une optique définitive. On s’attend aussi à ce que les migrants qui ont eu des difficultés pour migrer en raison des politiques migratoires restrictives n’aient pas l’intention de rentrer dès le début de leur séjour en Europe. Il est en effet possible que ces migrants ne désirent pas prendre le risque de retour car ils savent qu’il leur sera difficile de migrer à nouveau par la suite, en cas de réinsertion difficile au pays.
21Dans un deuxième temps, on cherche à savoir si l’intention initiale de retour des migrants donne lieu à un retour effectif. L’objectif, en particulier, est de répondre à la question : quels sont les migrants qui ne réalisent pas un retour alors qu’ils l’avaient prévu, et comment peut-on l’expliquer ? On pose l’hypothèse que l’intention initiale de retour est généralement un déterminant fort des retours, mais que les politiques migratoires restrictives et la détérioration de la situation dans les pays d’origine ont pour effet d’annuler ou de retarder la réalisation de l’intention de retour de certains migrants, surtout des Congolais et dans une moindre mesure des Sénégalais, en raison de la crise au Sénégal moins sévère qu’en RDC. Le tableau 1 présente les hypothèses de recherche.
Hypothèses de recherche selon le facteur susceptible d’influencer l’intention initiale de retour et sa réalisation
Hypothèses de recherche selon le facteur susceptible d’influencer l’intention initiale de retour et sa réalisation
IV – Méthodologie
1 – Données
22Les données des enquêtes biographiques du projet MAFE présentent des avantages pour étudier la question du retour au Sénégal et en RDC. Ces enquêtes ont été réalisées à la fois dans les pays d’origine des migrants (dans les régions de Dakar et de Kinshasa) et dans plusieurs pays de destination en Europe (en France, Italie et Espagne pour les Sénégalais, en Belgique et au Royaume-Uni pour les Congolais) ; elles ont collecté de façon rétrospective des données sur les histoires de vie des migrants et des migrants de retour. De ce fait, on peut connaître la situation des individus au moment de leur arrivée en Europe et pendant toute leur migration. Des questionnaires identiques utilisés dans les différents pays permettent des analyses comparatives entre les migrants sénégalais et congolais. L’échantillonnage et la nature de ces enquêtes comportent néanmoins certaines limites.
23Les analyses sur la question du retour des migrants au Sénégal et en RDC ne sont d’abord pas représentatives de tous les Sénégalais et de tous les Congolais qui ont migré en Europe, puisque les enquêtes n’ont pas été réalisées dans tous les pays européens. Les enquêtes ne sont pas non plus représentatives des pays d’origine au niveau national, car elles ne se sont déroulées que dans les régions des capitales, Dakar et Kinshasa. Toutefois, tous les migrants enquêtés ne sont pas originaires de ces régions [3]. Bien que cette limite appelle à la prudence dans la généralisation des résultats, le fait que la majorité des migrants aient déjà vécu dans la capitale de leur pays et les efforts de représentativité dans les plans d’échantillonnage permettent de faire l’hypothèse que les migrants qui n’ont jamais vécu dans les régions du pays d’origine où ont eu lieu les enquêtes ne sont pas radicalement différents de ceux qui y ont vécu. Une autre limite à soulever est celle des faibles effectifs qui caractérisent les échantillons de migrants et surtout de migrants de retour. Malgré le sur-échantillonnage des migrants de retour dans les enquêtes qui se sont déroulées dans les pays d’origine, le nombre de migrants de retour d’Europe n’est pas très élevé. Cela reflète la relativement faible propension au retour des migrants. A fin d’avoir le plus de retours possible dans les échantillons, le choix a été fait d’inclure dans les analyses tous les retours que les migrants ont pu effectuer, quels que soient les pays européens où ils ont séjourné.
24D’autres limites sont liées à la nature des enquêtes biographiques. Les efforts de mémoire que les répondants doivent faire pour se rappeler de leur passé peuvent être considérables. Bien que les questionnaires aient été conçus pour favoriser les souvenirs des migrants, des erreurs peuvent survenir lorsque les personnes enquêtées oublient de déclarer certains événements, les déclarent partiellement ou les datent mal. Les informations relatives à des intentions passées, telles que l’intention de retour au moment de l’arrivée en Europe, peuvent être difficiles à se remémorer pour les répondants. Les individus ré-élaborant souvent leur projet migratoire en fonction de leur situation et de leurs interlocuteurs, il est possible que les réponses soient influencées par l’intention actuelle des répondants – qui a pu évoluer depuis leur arrivée – ou par le fait qu’ils sont rentrés (rationalisation a posteriori). Les questions ouvertes sur les motifs du départ et du retour sont également obtenues rétrospectivement, et des biais peuvent être présents avec l’effet du temps.
L’intention initiale de retour et le retour effectif
25Le questionnaire ne contient pas de question précise sur l’intention de retour des migrants au moment où ils ont quitté leur pays d’origine. La variable sur l’intention initiale de retour est construite à partir de plusieurs questions posées à propos du séjour dans le premier pays européen dans lequel les migrants arrivent [4] :
- « Au départ, combien de temps comptiez-vous rester dans ce pays de séjour ? ». Les individus enquêtés répondent à cette question en donnant un nombre défini d’années ou en affirmant « définitivement ». Certains répondent qu’ils ne savent pas.
- « Quand vous êtes arrivé dans ce pays de séjour, (1) vous considériez qu’il s’agissait de votre destination finale, celle où vous aviez prévu d’aller au départ ; (2) vous n’aviez pas d’idée précise sur le pays où vous vouliez aller ; (3) vous aviez en tête d’aller ailleurs, il s’agissait donc d’un pays intermédiaire ».
- Lorsque les enquêtés déclarent qu’ils avaient en tête d’aller ailleurs (3), les questions suivantes leur sont posées : « Quel pays aviez-vous en tête de rejoindre ensuite ? », « Et dans quel pays souhaitiez-vous arriver tout à la fin ? ». À cette dernière question, les migrants donnent le nom d’un autre pays, mais certains déclarent que leur destination finale est leur pays d’origine.
26Partant de ces informations, la variable sur l’intention initiale de retour est construite selon le schéma de la figure 1.
Construction de la variable sur l’intention initiale des migrants quant au retour
Construction de la variable sur l’intention initiale des migrants quant au retour
27La variable sur l’intention initiale de retour distingue trois possibilités :
- Si les migrants déclarent vouloir rester pendant une durée précise dans le pays de destination, qu’ils estiment que ce pays constitue la destination finale de leur migration ou qu’ils envisagent de migrer ensuite ailleurs tout en ayant en tête de retourner dans leur pays d’origine à la fin, on considère qu’ils ont initialement l’intention de rentrer.
- A contrario, si les individus déclarent vouloir s’installer définitivement dans le pays de destination ou avoir en tête de migrer ensuite ailleurs sans que la destination finale envisagée soit leur pays d’origine, on considère qu’il n’y a pas d’intention initiale de retour.
- Dans le cas où les migrants ne donnent pas de réponse à la question sur la durée pendant laquelle ils envisagent de rester dans le pays de destination, on considère qu’ils sont incertains quant au retour.
28Ensuite, on considère qu’il y a retour lorsque les migrants effectuent un mouvement de retour dans leur pays d’origine pour une durée de plus d’un an, ou de moins d’un an à condition qu’ils aient l’intention, au moment de ce retour, de s’y installer. On s’intéresse donc particulièrement aux retours ayant lieu dans une perspective de long terme ; de ce fait, les retours qui ont lieu dans une optique temporaire, dans le cadre d’un séjour de vacances ou d’affaires, ne sont pas considérés comme des retours en tant que tels.
Les variables explicatives d’intérêt
29Les enquêtes MAFE renseignent sur les caractéristiques sociodémographiques des individus tout au long de leur trajectoire de vie. Ainsi, on dispose d’informations sur leur sexe, leur âge chaque année depuis leur arrivée en Europe ainsi que leur niveau d’éducation, qui évolue en fonction du nombre d’années qu’ils passent à étudier. Des informations sur la situation individuelle des migrants sur le plan familial, matériel, professionnel et économique sont aussi disponibles pour chaque année passée en Europe. Ensuite, les enquêtes fournissent des informations relatives aux expériences migratoires. Ainsi, on peut connaître le pays dans lequel les individus ont migré, la durée et le rang de leur migration, mais aussi les circonstances dans lesquelles la migration a eu lieu. À cet égard, on dispose d’informations sur le motif de la migration et sur le fait que les individus sont arrivés en Europe en provenance directe de leur pays d’origine ou s’ils ont séjourné dans un pays tiers pendant au moins une année avant d’atteindre l’Europe. Enfin, les enquêtes contiennent des questions sur les visites que les migrants ont pu effectuer dans le pays d’origine depuis leur arrivée, et sur la situation administrative qu’ils ont dans le pays de destination. L’annexe A.1 fournit des explications plus détaillées sur ces variables.
2 – Méthodes
30Les analyses sont divisées en deux parties. La première partie porte sur l’étude de l’intention initiale des migrants quant au retour. À cet égard, la situation des individus au moment de leur arrivée en Europe est prise en compte. Des régressions logistiques multinomiales simples sont réalisées pour analyser les déterminants de l’intention initiale de retour. Étant donné que l’on s’intéresse spécifiquement à l’explication de l’intention initiale de retour par rapport à l’intention initiale de rester en Europe, les résultats sur les facteurs de l’incertitude quant au retour ne seront pas développés mais se trouvent dans le tableau annexe A.2.
31La seconde partie traite de la question de la réalisation de l’intention de retour, ce qui nécessite de prendre en compte la durée de la migration en Europe, pendant laquelle les individus sont susceptibles de rentrer. Les analyses prennent en considération le fait que, à côté des migrants qui ont effectué un retour dans leur pays d’origine, certains n’ont pas encore effectué de retour et d’autres ont quitté l’Europe pour une destination autre que leur pays d’origine. Les séjours en Europe de ces migrants partis ailleurs sont connus du fait qu’ils ont été enquêtés après leur retour dans leur pays d’origine ou en Europe lors d’une autre migration.
32L’estimateur de Kaplan-Meier est utilisé pour calculer les risques pour les migrants de connaître l’événement du retour au cours du temps selon la période de leur arrivée et leur intention initiale par rapport au retour. Pour analyser les déterminants du retour, des modèles biographiques en temps discret sont réalisés. Les variables explicatives sont mesurées pendant toute cette durée. Elles peuvent être fixes (comme le sexe ou le motif de la migration) ou varier dans le temps (comme l’âge, la situation administrative ou la période). Afin que les variables explicatives renvoient bien à la situation des migrants pendant cette durée d’exposition et non à leur situation après avoir connu l’événement, les événements du retour et du nouveau départ sont mesurés l’année (t-1) qui précède celle de l’événement du retour en t. Un même individu peut se retrouver plusieurs fois dans les échantillons s’il a connu plusieurs épisodes migratoires ou de retour. Étant donné qu’ils présentent des caractéristiques semblables lors de ces épisodes, on en tient compte pour le calcul des écarts types ; à cet égard, des grappes individuelles sont introduites dans les régressions. De plus, pour pallier les effectifs relativement faibles des échantillons, des techniques de réplication de type Jackknife sont utilisées pour chaque modèle. Elles permettent, à partir d’un seul échantillon, de générer de multiples échantillons (chaque échantillon étant égal au nombre d’observations moins une observation), sur la base desquels les écarts types sont calculés (au lieu d’être calculés à partir de présomptions paramétriques). Ces méthodes sont dites « robustes » parce qu’elles sont moins dépendantes des valeurs extrêmes que les méthodes d’estimation classiques. Ces écarts types fournissent généralement des intervalles de confiance plus larges que les estimateurs paramétriques. Cette méthode tend donc à ne retenir que les résultats vraiment significatifs.
3 – Description des échantillons
33L’échantillon sénégalais comprend 713 migrations, tandis que l’échantillon congolais en compte 521. Les migrations de retour s’élèvent à 104 du côté sénégalais et à 86 du côté congolais. Les échantillons sont présentés dans le tableau 2. Il y apparaît notamment que le premier motif de migration des Sénégalais est l’amélioration de leurs conditions de vie, alors que les Congolais migrent d’abord pour des raisons d’études. Une majorité de migrants migrent en Europe pour la première fois [5] ; 27 % de Sénégalais et 16 % de Congolais sont en situation irrégulière l’année de leur arrivée. Presque toutes les migrations ont lieu directement à partir du pays d’origine ; seuls 6 % ou 7 % des migrants ont séjourné au moins une année dans un pays tiers ; 28 % des migrants de l’échantillon sénégalais et 44 % des migrants de l’échantillon congolais sont arrivés avant 1990. Les deux échantillons se différencient donc également sur ce point.
V – Résultats
1 – L’intention initiale de retour dans le pays d’origine
34Au moment de leur arrivée en Europe, moins de la moitié des migrants envisagent de rentrer dans leur pays d’origine : 43 % des Sénégalais et 49 % des Congolais (tableau 2). La part de ceux qui ont initialement l’intention de rentrer a diminué avec le temps, en particulier du côté congolais, où elle est passée de 64 % parmi ceux qui sont arrivés en Europe avant 1990 à 36 % parmi ceux qui y ont migré après cette date. Du côté sénégalais, les intentions initiales de retourner dans le pays d’origine sont également moins fréquentes à partir de 1990, mais elles n’ont diminué que dans une faible mesure, passant de 51 % à 40 %. La détérioration du contexte dans les pays d’origine explique cette diminution. En particulier, les crises politique et économique en RDC qui ont marqué les années 1990 et 2000 ont engendré chez les migrants congolais le souhait de s’établir définitivement en Europe car ils ont perdu confiance en l’avenir de leur pays.
Description des échantillons des migrants sénégalais et congolais l’année de leur arrivée en Europe (résultats pondérés)
Description des échantillons des migrants sénégalais et congolais l’année de leur arrivée en Europe (résultats pondérés)
35Lorsque l’on contrôle pour les caractéristiques des migrants et de leur expérience migratoire (tableau 3), aucune différence n’apparaît en termes d’intention initiale de retour entre les Sénégalais arrivés avant et après 1990.
Déterminants de l’intention de retourner au pays par rapport à l’intention de rester en Europe pour les migrants sénégalais et congolais au moment de leur arrivée en Europe (régression logistique multinomiale ; résultats pondérés et exprimés sous forme de rapports de cotes)(a)
Déterminants de l’intention de retourner au pays par rapport à l’intention de rester en Europe pour les migrants sénégalais et congolais au moment de leur arrivée en Europe (régression logistique multinomiale ; résultats pondérés et exprimés sous forme de rapports de cotes)(a)
(a) Les estimations des rapports de cotes supérieures à 10 ou inférieures à 0,1 sont fragiles.Significativité : *** p < 0,01 ; ** p < 0,05 ; * p < 0,10.
36En revanche, les Congolais arrivés en Europe après 1990 ont cinq fois moins de chances de vouloir retourner en RDC que ceux qui ont migré avant 1990. Ce résultat, confirmant l’hypothèse H4a, montre que le début des années 1990 est un tournant dans les migrations congolaises. Si, avant 1990, les Congolais avaient une certaine confiance dans l’avenir de la RDC, la crise qui a sévi à partir de 1990 a été telle qu’ils n’ont, depuis, plus l’espoir que la situation se rétablisse. De ce fait, ceux qui ont l’opportunité de partir en Europe n’envisagent plus de rentrer.
37Les résultats montrent également que l’intention des migrants quant au retour dépend du motif de leur migration. Conformément à l’hypothèse H1a, les migrants des deux pays partant en Europe dans un cadre professionnel ou d’études présentent des chances très importantes de vouloir rentrer : les Sénégalais en Europe pour cette raison sont 12 fois plus susceptibles d’avoir l’intention initiale de rentrer par rapport à ceux qui migrent pour un motif familial, et les Congolais 13 fois. Ces migrants considèrent qu’ils auront des opportunités dans leur pays d’origine après la migration et qu’ils pourront valoriser à leur retour les compétences qu’ils auront acquises en Europe. En outre, les Sénégalais qui migrent pour améliorer leurs conditions de vie ont trois fois plus de chances d’avoir l’intention de retourner dans leur pays que ceux qui partent dans un cadre familial, mais cet effet n’apparaît pas pour les Congolais. Comme le suggère la littérature qualitative, les Sénégalais qui partent pour cette raison entendent rentrer après avoir réalisé des économies qu’ils pourront investir au Sénégal (Hernandez-Carretero, 2012 ; Sinatti, 2011). Le contexte stable du Sénégal permet aux migrants d’avoir un tel projet, mais celui-ci est moins envisageable pour les migrants originaires de RDC où la situation est plus incertaine. Quant à ceux qui sont arrivés en Europe pour des raisons politiques, ils n’ont initialement ni plus ni moins le projet de rentrer que ceux qui sont partis pour un motif familial.
38Ensuite, les migrants des deux pays qui ne sont pas arrivés directement en Europe mais qui ont séjourné pendant au moins une année ailleurs auparavant sont davantage dans l’optique d’une migration définitive. Ce résultat va dans le sens de l’hypothèse H3a. Il est possible que leur dernier séjour ait été une longue migration de transit destinée à atteindre l’Europe, ou que leur projet migratoire ait échoué dans le pays de destination précédent et qu’ils tentent à présent leur chance en Europe. Dans ces cas-là, ils tendent à ne pas penser à la possibilité de retourner vivre dans leur pays d’origine vu le coût élevé de leur migration.
39Dans le même sens, les Congolais en situation irrégulière l’année de leur arrivée en Europe sont moins susceptibles d’avoir l’intention de rentrer par rapport à ceux qui ont un statut légal. L’hypothèse H2a est donc vérifiée pour les Congolais, mais pas pour les Sénégalais. Motivés par l’absence de perspectives d’avenir dans leur pays d’origine, les migrants congolais ont tout mis en œuvre pour migrer en Europe malgré le contexte politique migratoire restrictif. Leur migration a dû se révéler coûteuse, non seulement au niveau financier – car migrer sans papiers est plus onéreux que migrer de façon régulière – mais aussi au niveau humain – car ils savent qu’ils encourent le risque de se faire expulser. Cela peut expliquer le fait qu’ils espèrent que ces risques pris leur permettront de ne pas devoir retourner dans leur pays d’origine où ils n’envisagent pas leur avenir.
2 – La réalisation de l’intention initiale de retour
40Après avoir analysé les facteurs de l’intention initiale de retour, d’autres questions se posent. Premièrement, l’intention de retour influence-t-elle la réalisation du retour ? Les résultats des modèles (tableau 4) sont unanimes à ce propos : l’intention initiale de retour est un déterminant fort du retour. Les Sénégalais et les Congolais qui ont migré en Europe dans une optique temporaire ont respectivement deux et trois fois plus de chances de rentrer que ceux qui entendaient s’y installer définitivement. Cependant, comme le tableau 4 le montre, ce n’est pas le seul déterminant. La période apparaît aussi comme un facteur important du retour pour les migrants congolais. Ceux qui sont en Europe dans les années 1990 et 2000 sont moins susceptibles de rentrer, ce qui s’explique par la détérioration de la situation dans leur pays d’origine. Les politiques migratoires devenues plus restrictives en Europe ont aussi un effet sur le retour. Les Congolais qui ne sont pas arrivés de façon directe en Europe n’ont pratiquement aucune chance de repartir (conformément à l’intention qu’ils avaient au moment de leur arrivée). Le fait de ne pas avoir atteint l’Europe directement leur a été coûteux en forces et en argent et ne les incite pas à rentrer, car ils ne sont pas prêts à prendre le risque d’avoir à renouveler l’expérience. L’hypothèse H2b se vérifie donc pour les Congolais, mais pas pour les Sénégalais, ce qui peut s’expliquer par le contexte relativement moins difficile au Sénégal. Il est en de même pour l’hypothèse H3b. En effet, les Congolais en situation irrégulière ont de très faibles chances de retourner en RDC, et leur probabilité de rester en Europe est très importante (ce qui correspond à leur intention initiale). Ils ne rentrent pas tant que leur situation n’a pas été régularisée, sans quoi ils savent qu’ils n’auront pas l’assurance de repartir en Europe en cas d’échec ou de problème après leur retour. Ainsi, le fait de pouvoir repartir en Europe après le retour conditionne le retour car cela permet aux migrants de gérer les incertitudes de la réinsertion.
Déterminants du retour au pays pour les Sénégalais et les Congolais qui ont migré en Europe (régression logistique en temps discret ; résultats pondérés et exprimés sous forme de rapports de cotes)(a)
Déterminants du retour au pays pour les Sénégalais et les Congolais qui ont migré en Europe (régression logistique en temps discret ; résultats pondérés et exprimés sous forme de rapports de cotes)(a)
(a) Les estimations des rapports de cotes supérieures à 10 ou inférieures à 0,1 sont fragiles.Significativité : *** p < 0,01 ; ** p < 0,05 ; * p < 0,10.
41Deuxièmement, quels sont les migrants qui ne réalisent pas un retour alors qu’ils en avaient initialement l’intention ? La comparaison de la variable sur le motif de la migration dans les tableaux 3 et 4 met en évidence des résultats qui confirment partiellement l’hypothèse H1b. Les Congolais qui ont migré en Europe dans un cadre professionnel ou d’études, qui présentaient des chances importantes de vouloir rentrer au moment de leur arrivée, ne sont finalement pas susceptibles de le faire. Ils décident de rester plus durablement que prévu en Europe probablement parce qu’ils n’entrevoient pas de perspectives d’avenir durables en RDC. En revanche, la probabilité de retour pour les migrants sénégalais qui ont migré pour cette même raison est élevée. La situation plus favorable au Sénégal explique qu’ils réalisent leur intention initiale de retour car ils savent qu’ils y auront des opportunités professionnelles intéressantes. Ensuite, les Sénégalais partis pour améliorer leurs conditions de vie, qui étaient nombreux à avoir la volonté de rentrer, n’ont finalement que de faibles chances d’effectuer un retour. Il est possible que les réalités de l’Europe ne correspondent pas à leurs attentes et que l’accumulation de capital financier soit plus ardue que prévu, ce qui explique qu’ils retardent leur retour. Quant aux Congolais qui ont migré pour des raisons politiques, ils rentrent encore moins que ce qu’ils prévoyaient au début de leur migration. Cela signifie qu’une certaine rupture a lieu entre ces migrants et leur pays d’origine. En outre, l’effet de la situation familiale sur le retour révèle que les migrants qui vivent avec leur famille en Europe sont moins susceptibles de rentrer que ceux dont la famille se trouve dans le pays d’origine, alors que ce n’était pas leur intention initiale. Avec le temps, la vie en famille en Europe donne donc lieu à une installation plus définitive que prévu.
42Enfin, on peut s’interroger sur les différences d’intentions initiales quant au retour selon la période. Les résultats descriptifs de la figure 2 montrent que la réalisation des intentions de retour est moins fréquente et moins rapide pour les migrants arrivés après 1990 que pour ceux arrivés avant cette date. Si, après 10 ans passés en Europe, 75 % des Congolais qui ont migré avant 1990 en ayant l’intention de rentrer ont effectué un retour, la proportion tombe à 40 % parmi ceux arrivés avec cette même intention après 1990. Du côté sénégalais, 40 % des migrants arrivés avant 1990 sont retournés au Sénégal comme ils le pré voyaient après 10 ans, mais cette proportion n’est plus que de 25 % pour ceux qui sont arrivés en Europe par la suite.
Évolution de la probabilité de rester en Europe en fonction de la durée du séjour et selon l’intention initiale quant au retour, par période d’arrivée (résultats pondérés)
Évolution de la probabilité de rester en Europe en fonction de la durée du séjour et selon l’intention initiale quant au retour, par période d’arrivée (résultats pondérés)
Lecture : Les courbes représentent les probabilités qu’ont les migrants de rester en Europe plutôt que de rentrer, en fonction du nombre d’années écoulées depuis leur arrivée et selon leur intention initiale de retour. L’origine de l’axe des abscisses (année 0) correspond à l’année du départ. Cette année-là, 100 % (noté 1,00 sur l’axe des ordonnées) des migrants sont encore en Europe. À mesure que le temps passe, la probabilité d’y rester diminue, ce qui signifie a contrario que la probabilité d’effectuer un retour progresse.Note : Ces courbes ont été construites en utilisant l’estimateur non paramétrique de la fonction de Kaplan-Meier. Test du log-rank = significatif au seuil de 5 %
43Cependant, toutes choses égales par ailleurs, les analyses du tableau 5 sur l’effet de l’interaction des variables « période » et « intention initiale quant au retour » (prenant en compte les mêmes covariables [6] que dans le tableau 4) suggèrent que l’intention initiale de retour n’apparaît pas toujours comme un déterminant important du retour. En raison des faibles effectifs après l’introduction de l’interaction, le modèle n’améliore pas la qualité de l’adéquation aux données, et les résultats doivent donc être pris avec précaution. Avant 1990, il apparaît que les migrants sénégalais qui avaient initialement l’intention de rentrer étaient, dans les faits, plus susceptibles d’effectuer un retour que ceux qui n’en avaient pas l’intention. En revanche, le modèle montre que les intentions n’influencent pas les retours au Sénégal après 1990. On peut rapprocher ce résultat des conditions de vie devenues généralement plus difficiles au Sénégal après 1990, décourageant de cette façon certains retours, même lorsque les migrants envisageaient de rentrer au moment de leur arrivée en Europe. Les réalités économiques plus difficiles au Sénégal peuvent également impliquer que les besoins des familles restées au pays deviennent plus importants, ce qui engendre plus de charges pour les migrants dont la responsabilité est de subvenir aux besoins familiaux. De ce fait, il est possible qu’ils restent plus longtemps que prévu en Europe afin d’y acquérir le capital financier nécessaire pour leurs propres projets. En ce qui concerne les migrants congolais, toutes choses égales par ailleurs, les résultats du tableau 5 montrent que ceux qui envisageaient un retour ne sont finalement pas plus susceptibles de rentrer, ni avant ni après 1990. Les conditions difficiles en RDC peuvent expliquer ce résultat. Même s’ils planifiaient un retour, les migrants ne prennent pas le risque de rentrer car ils savent que la situation dans leur pays d’origine est instable. Malgré les faibles effectifs du modèle, les résultats confirment partiellement l’hypothèse H4b et suggèrent que le poids des intentions initiales pour expliquer les retours est affaibli après 1990 du côté sénégalais.
Effet de l’intention initiale des migrants quant au retour sur la réalisation du retour, par période, pour les Sénégalais et les Congolais qui ont migré en Europe (régression logistique en temps discret ; résultats pondérés et exprimés sous forme de rapports de cotes)(a)
Effet de l’intention initiale des migrants quant au retour sur la réalisation du retour, par période, pour les Sénégalais et les Congolais qui ont migré en Europe (régression logistique en temps discret ; résultats pondérés et exprimés sous forme de rapports de cotes)(a)
(a) Les estimations des rapports de cotes supérieures à 10 ou inférieures à 0,1 sont fragiles. Les mêmes variables que dans le tableau 4 sont introduites.Significativité : *** p < 0,01 ; ** p < 0,05 ; * p < 0,10.
Conclusion
44Dans une publication de 2011, de Haas et Fokkema soulignent que l’analyse de l’évolution des stratégies initiales des migrants dans le temps constitue un défi important pour les recherches futures. Ce sujet n’est pas développé dans les théories traditionnelles des migrations internationales et n’est pas abordé dans les études quantitatives existantes, faute de données appropriées. Grâce aux enquêtes biographiques du projet MAFE, qui ont interrogé des migrants pendant leur séjour en Europe et des migrants de retour dans leur pays d’origine, cet article a apporté des éléments nouveaux sur les intentions initiales de retour des migrants sénégalais et congolais ainsi que sur la concrétisation de leurs intentions. Rappelons que l’information sur l’intention initiale de retour a été obtenue rétrospectivement, et que l’on ne dispose pas d’information précise sur le niveau d’incertitude dans lequel évoluent les migrants, ce qui pourrait faire l’objet de recherches approfondies dans le futur.
45Cette recherche a révélé que l’intention de retour des migrants, au moment de leur arrivée en Europe, est liée à ce qu’ils estiment être le mieux pour eux et pour leur famille. Ainsi, ceux qui partent dans un cadre professionnel ou d’études sont généralement dans l’optique de retourner dans leur pays d’origine car ils savent que leur expérience migratoire aura un effet positif sur leur vie après le retour. Cependant, le projet migratoire initial des individus dépend aussi du contexte qui prévaut dans leur pays d’origine et des politiques migratoires. Lorsque les migrants quittent un pays en crise comme c’est le cas de la RDC depuis les années 1990, ils ont moins l’intention de rentrer. De plus, ceux qui ont eu des difficultés à migrer en raison des politiques migratoires restrictives envisagent davantage de rester définitivement en Europe, car ils savent que, s’ils rentrent, il leur sera difficile de migrer à nouveau par la suite, en cas d’échec pour se réinsérer ou de crise.
46Les analyses ont également montré que, toutes périodes confondues, l’intention initiale de retour influence généralement la réalisation du retour, mais que certains migrants annulent ou remettent à plus tard le retour. Il semble toutefois que l’intention initiale de retour ne s’avère plus déterminante pour les migrants qui sont en Europe dans les années 1990 et 2000. Avec la détérioration du contexte au Sénégal et en RDC et les politiques migratoires restrictives, même si l’intention de rentrer est présente au début de leur migration, celle-ci ne donne plus autant lieu à des retours après 1990. Pour que l’intention de retour des migrants se réalise, il faut donc que la situation dans leur pays d’origine n’hypothèque pas les perspectives de réinsertion, que les migrants aient acquis les ressources nécessaires à leur réinsertion, et que le contexte politique international facilite pour eux la gestion des incertitudes de la réinsertion, en leur permettant de circuler plus librement entre l’Afrique et l’Europe.
Remerciements
Je remercie Bruno Schoumaker et Cris Beauchemin pour leurs commentaires tout au long de ma recherche ainsi que les relecteurs anonymes pour leurs suggestions sur les versions précédentes de cet article. Je suis également reconnaissante envers le Fonds national de la recherche scientifique (FRS - FNRS) et le Conseil européen de la recherche (dans le cadre du projet DEMIG - ERC Grant Agreement 240940) pour leur soutien financier.Annexe A.1. Les variables explicatives
Annexe A.1. Les variables explicatives
Annexe A.2. Déterminants de l’incertitude de retourner au pays par rapport à l’intention de rester en Europe pour les migrants sénégalais et congolais au moment de leur arrivée en Europe (suite de la régression logistique multinomiale du tableau 3 ; résultats pondérés et exprimés sous forme de rapports de cotes)(a)
Annexe A.2. Déterminants de l’incertitude de retourner au pays par rapport à l’intention de rester en Europe pour les migrants sénégalais et congolais au moment de leur arrivée en Europe (suite de la régression logistique multinomiale du tableau 3 ; résultats pondérés et exprimés sous forme de rapports de cotes)(a)
(a) Les estimations des rapports de cotes supérieures à 10 ou inférieures à 0,1 sont fragiles.Significativité : *** p < 0,01 ; ** p < 0,05 ; * p < 0,10.
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Mots-clés éditeurs : migration de retour, MAFE, migrations africaines, intention de retour, migration sénégalaise, analyse biographique, migration congolaise
Date de mise en ligne : 02/07/2015
https://doi.org/10.3917/popu.1501.0103Notes
-
[*]
International Migration Institute, University of Oxford, Grande-Bretagne.
-
[1]
Pour une analyse détaillée de la littérature, voir Flahaux (2013), p. 107-131.
-
[2]
Kinshasa, la capitale, située à l’Ouest du pays, a été relativement tenue à l’écart des conflits armés qui ont déchiré la RDC, surtout par rapport à l’Est du pays.
-
[3]
Pour de plus amples détails sur les données du projet MAFE, voir le chapitre introductif de ce volume.
-
[4]
Dans les enquêtes MAFE, il est considéré qu’il y a migration dès lors qu’un séjour de plus d’un an en Europe a été effectué. Les séjours de moins d’un an ne sont pas pris en compte.
-
[5]
Dans les données sénégalaises, sur 713 migrations, 615 sont celles de Sénégalais qui migrent pour la première fois, 73 migrent pour la deuxième fois, 21 migrent pour la troisième fois, et 4 migrent pour la quatrième fois. Dans les données congolaises, sur 521 migrations, 412 sont celles de Congolais migrant pour la première fois, 90 migrent pour la deuxième fois, 15 migrent pour la troisième fois, et 4 migrent pour la quatrième fois.
-
[6]
Les effets de ces covariables sont proches de ceux du tableau 4.