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Article de revue

La baisse récente de la fécondité en Chine à partir d'une nouvelle reconstitution statistique

Pages 513 à 542

Notes

  • [1]
    Dans cet article, l’expression « indicateurs de fécondité » est utilisée pour désigner en général tous les indicateurs statistiques relatifs à la fécondité, tels que le nombre de naissances, le taux brut de natalité, le taux global de fécondité, les taux de fécondité par âge, l’indice synthétique de fécondité et certains indices de fécondité longitudinaux.
  • [2]
    Le Bureau national de la statistique chinois (BNS) publie les taux de fécondité par âge dans les résultats de ses enquêtes démographiques annuelles, mais il les utilise rarement pour le calcul direct de l’ISF et n’a pratiquement jamais présenté de commentaires publics et précis sur les valeurs récentes de l’ISF en Chine.
  • [3]
    Les ISF résultant de ces enquêtes de fécondité sont généralement inférieurs aux ISF corrigés officiels. Cependant, en 2004 et 2005, les ISF publiés par le gouvernement sont identiques à ceux fournis pas l’enquête de fécondité de 2006. Ces ISF non corrigés sont utilisés comme statistiques officielles pour la première fois depuis le milieu des années 1990. Il existe certaines controverses autour de l’enquête de fécondité de 2006, qui seront évoquées en détail dans les sections suivantes.
  • [4]
    Bien que ces données officiellement publiées n’aient pas été corrigées pour le sous-enregistrement, des taux de sous-enregistrement ont été avancés par des chercheurs pour certaines enquêtes de fécondité (voir section suivante).
  • [5]
    Bien qu’il affiche une liste de références sur son site, le Bureau du recensement américain n’explique ni comment ces indicateurs ont été calculés ni pourquoi il a décidé d’adopter ces nouvelles valeurs pour estimer l’évolution de la population chinoise.
  • [6]
    Pour estimer ces taux de sous-enregistrement, nous avons comparé l’effectif d’une même génération enregistré par les recensements et enquêtes successifs en supposant complet à chaque fois l’enregistrement par l’opération la plus récente. Quand nous avons utilisé les résultats de l’enquête intercensitaire de 2005, nous avons également fait l’hypothèse que le taux de sondage était le même dans tous les groupes d’âges et égal à 1,325 %. Si ces hypothèses ne sont pas toujours vérifiées, les taux de sous-enregistrement estimés peuvent s’en trouver affectés.
  • [7]
    En 1995, le TBN de la colonne 3 a été calculé à partir des données de l’enquête démographique par sondage à 1 % de 1995, et en 2000 à partir des données de l’échantillon à 9,5 % du recensement de 2000.
  • [8]
    L’ampleur de la correction apportée aux TBN et aux ISF est proche de celle reconnue par l’administration statistique après le mini-recensement de 1995. On soupçonnait que cette enquête avait pu, comme l’enquête de fécondité de 1992, sous-évaluer gravement le nombre de naissances. À partir de cette hypothèse et de l’évaluation de la qualité des données, les autorités ont donc corrigé à la hausse les indicateurs de fécondité : de 14,42 ‰ à 17,12 ‰ pour le TBN et de 1,46 à 1,85 enfant par femme pour l’ISF (Zhang et al., 1997, p. 46-47). Ce qui signifie que le TBN enregistré a été relevé de 18,7 % et l’ISF de 26,7 %. Plus tard, l’ISF a encore été corrigé pour être fixé à 1,78 enfant par femme (tableau 2).
  • [9]
    Selon certaines explications disponibles, le Bureau national chinois de statistiques aurait décidé de gonfler à ce point les résultats des enquêtes annuelles en partie pour contrebalancer ses sous-estimations précédentes. De plus, cette pratique serait également une réponse aux forts soupçons des décideurs politiques et des démographes, qui croyaient le sous-enregistrement plus grave que celui constaté (Zhang, 1995 ; Yu et Xie, 2000). On pourrait retenir aussi l’hypothèse de Qiao, selon lequel le Bureau national de statistiques a peut-être adopté la borne supérieure de l’intervalle de variation comme taux de sous-enregistrement pour effectuer ses ajustements (Qiao, 2005 ; Jia et Sai, 1995).
  • [10]
    Dans son article, Guo a systématiquement comparé les effectifs de population fournis par les recensements de 1990 et 2000, et a calculé la répartition de la population par groupe d’âges en milieu d’année à partir des données du recensement de 2000. Il a montré que les différences d’effectifs des mêmes groupes d’âges entre les deux recensements sont moins importantes que celles obtenues par d’autres chercheurs avec d’autres méthodes d’estimation (Guo, 2004). Dans notre étude, nous avons utilisé le rapport calculé par Guo entre la population de 2000 et celle de 1990 (il n’a pas fourni l’effectif au 1er juillet 2000 dans son article) et la structure par âge de 1990 pour calculer la population féminine au milieu de l’année 2000.
  • [11]
    Ces hypothèses sont étayées par des travaux sur l’évolution de la mortalité en Chine et en Asie de l’Est (Zhao et Kinfu, 2005 ; Zhao, 2007).
  • [12]
    Du fait que ces enquêtes de fécondité n’enregistraient que les femmes âgées de 15 à 49 ans au moment de l’enquête, les nombres de naissances survenues chez des femmes de 42 ans ou plus manquent pour certaines années. Bien que ces nombres soient généralement très faibles et qu’ils n’aient qu’un impact négligeable sur nos calculs, nous les avons estimés à partir des nombres moyens de naissances survenues chez des mères du même âge pendant les années suivantes.
  • [13]
    Pour les années où les données des enquêtes annuelles ne sont pas disponibles, nous avons pris comme estimation la moyenne des distributions des années précédente et suivante.
  • [14]
    Le calcul des TFA impliquant souvent des effectifs plus réduits de femmes et de naissances, ces résultats ont davantage tendance à être affectés par des variations aléatoires. Ceci explique en partie pourquoi les différences observées sur les TFA sont un peu plus importantes que celles constatées sur les ISF.
  • [15]
    Nous avons effectué cette comparaison en supposant que le taux de sondage était identique pour tous les groupes d’âges dans les deux enquêtes intercensitaires et que l’échantillon avait effectivement la taille annoncée.
  • [16]
    Pour comparer nos estimations de taux de fécondité avec les taux officiels non corrigés présentés dans les tableaux 5 et 6, nous avons généralement utilisé le rapport taux officiel/taux estimé.
  • [17]
    En règle générale, l’ISF de rang 1 ne devrait pas être supérieur à 1 enfant par femme, mais cela peut se produire en cas de modification de l’âge à la première naissance. Si l’ISF de rang 1 était de 1 enfant par femme au lieu de 1,32, alors l’ISF pour l’ensemble des naissances serait de 1,56 au lieu de 1,88.
  • [18]
    Bien que la différence entre les populations échantillonnées de ces diverses opérations indique une difficulté majeure dans l’enquête de fécondité de 2006, les publications officielles ne donnent aucune explication sur la manière dont cela a pu se produire (NPFPC, 2007 ; Zhang et al., 2008).
  • [19]
    Ce sont le Cambodge, l’Indonésie, le Japon, Macao, la Mongolie, les Philippines, la Corée du Sud, le Sri Lanka, Taiwan, la Thaïlande et le Vietnam.
  • [20]
    Le nombre de naissances de 2006 a été estimé par la procédure déjà décrite.
  • [21]
    D’après certains chercheurs, l’utilisation des statistiques de fréquentation scolaire pour estimer le niveau de fécondité pourrait montrer des limites, car ces statistiques ont pu être également surestimées. Pour une discussion détaillée, voir Cai (2009).
  • [22]
    Pour notre recherche, nous avons également supposé que dans le mini-recensement chinois de 2005, le sous-enregistrement des naissances atteignait le niveau le plus élevé parmi ceux relevés par Goodkind (2008) dans divers pays asiatiques (16 % des enfants de 0-4 ans et 8 % des enfants de 5-9 ans). À partir de cette hypothèse et des résultats du mini-recensement de 2005, nous avons estimé les taux de fécondité de la période étudiée. Même sous une hypothèse aussi forte, les résultats montrent que les ISF estimés sont encore inférieurs aux ISF corrigés officiels pour la plupart des années étudiées.
  • [23]
    Selon la Commission nationale de la population et du planning familial (National Population and Family Planning Commission, NPFPC), le taux national de fécondité planifiée (mesuré annuellement par la proportion de naissances survenues dans le cadre du plan ou dans les limites des quotas officiels parmi le total des naissances) était de l’ordre de 94 % entre 2001 et 2005 (Division of Development and Planning of the NPFPC, China’s Population and Development Research Centre, 2008). En supposant que ces chiffres correspondent à la réalité et que la politique de fécondité visant 1,5 enfant par femme soit parfaitement appliquée, l’ISF réel devrait être de l’ordre de 1,6.

1Depuis le début des années 1990, la fécondité est en Chine inférieure au niveau de remplacement des générations, mais le niveau exact de la fécondité est actuellement sujet de controverses entre les chercheurs : les femmes chinoises ont-elles aujourd’hui 1,5 ou 1,8 enfant en moyenne ? Les données sur la fécondité en Chine sont à la fois abondantes et limitées. Abondantes, car une enquête annuelle fournit des estimations riches, complétées par de nombreuses enquêtes sur la fécondité. Limitées, car de nombreux résultats sont ajustés pour tenir compte de la sous-déclaration des jeunes enfants dans les enquêtes et au recensement, sans que la méthode d’ajustement ne soit décrite ni justifiée. De plus, l’ajustement n’est pas le même pour les différents indicateurs, ce qui ajoute encore à la confusion. Zhongwei Zhao et Xiaomu Zhang rappellent d’abord les différentes estimations officielles et scientifiques du niveau de la fécondité chinoise depuis 1990, en expliquant l’origine des incohérences, avant de proposer leur propre estimation, fondée sur l’hypothèse selon laquelle la sous-déclaration des enfants en Chine serait comparable avec celle observée dans les autres pays d’Asie.

2Les chercheurs travaillant sur la fécondité chinoise se trouvent dans une situation étrange depuis le début des années 1990. Alors que l’accumulation des recensements, enquêtes de fécondité et enquêtes annuelles sur le mouvement démographique a fourni suffisamment de données pour permettre des travaux approfondis sur la baisse récente de la fécondité, le sous-enregistrement et les incohérences dont souffrent de plus en plus les principales données sur la fécondité font gravement obstacle à de telles recherches. Ces difficultés sont aussi dues en partie au fait que, si l’administration statistique publie quelques indices de fécondité corrigés, elle est peu disposée à fournir des détails sur les techniques qu’elle utilise depuis la fin des années 1990 pour effectuer ces ajustements. C’est pourquoi les chercheurs ont parfois dû exploiter des informations limitées et formuler différentes hypothèses pour estimer la fécondité, aboutissant inévitablement à des résultats divergents (Cai, 2008 ; Goodkind, 2004 ; Guo, 2004 ; Guo et Chen, 2007 ; Retherford et al., 2005 ; Scharping, 2007 ; Wang, 2003 ; Yu et Xie, 2000 ; Zhang, 2004 ; Zhai et Chen, 2007 ; Zhang et Cui, 2003 ; Zhang et Zhao, 2006). Certains de ces travaux ont bien fourni quelques éclairages sur les tendances récentes de la fécondité en Chine, mais cette situation insatisfaisante et la controverse qu’elle a engendrée ont créé une certaine confusion parmi les utilisateurs de ces résultats.
En comparant les différents indicateurs officiels de fécondité et en reconstituant les statistiques récentes de la fécondité chinoise, cet article y examine les problèmes de collecte et de publication des données sur la fécondité depuis le début des années 1990 [1], puis le niveau de la fécondité chinoise récente et les questions qu’elle soulève.

I – Les principaux problèmes des statistiques récentes de la fécondité chinoise

3Il s’agit ici d’examiner les problèmes qui affectent les statistiques chinoises à propos de la fécondité récente et les controverses qui se sont développées autour de son niveau.

4Premièrement, depuis quelques années, l’administration statistique chinoise publie régulièrement le nombre de naissances et le taux brut de natalité (TBN) et plus occasionnellement l’indice synthétique de fécondité (ISF). Ces indicateurs de fécondité sont souvent ajustés pour corriger le sous-enregistrement ou estimés à partir des résultats des enquêtes annuelles sur le mouvement démographique (simplement nommées ici enquêtes démographiques annuelles). Mais aucun détail sur la manière dont ont été effectuées ces corrections et estimations n’ayant été fourni depuis la fin des années 1990 (Zhang et Zhao, 2006), il est difficile de se faire une idée de la validité de ces statistiques.

5Deuxièmement, l’administration chinoise publie les taux de fécondité par âge (TFA) dans les résultats des enquêtes démographiques annuelles [2]. Les statistiques ne sont généralement pas corrigées puisque, la plupart du temps, on ne dispose pas d’informations sur le sous-enregistrement. Il est difficile d’évaluer dans quelle mesure ces statistiques non corrigées sous-estiment la fécondité réelle. Étant donné que les chiffres officiels du nombre de naissances, du TBN et de l’ISF sont corrigés sous certaines hypothèses alors que les TFA ne le sont pas, la cohérence interne de ces statistiques de fécondité n’est évidemment pas respectée. De tels problèmes sont difficiles à résoudre, même en supposant connue la proportion de naissances non enregistrées, du fait que ce sous-enregistrement peut ne pas être équitablement réparti parmi les femmes des différents âges. Diverses hypothèses sur la distribution par âge du sous-enregistrement aboutissent à des valeurs différentes des TFA et de l’ISF.

6Troisièmement, les autorités chinoises publient également, parmi les résultats des enquêtes démographiques annuelles, le taux global de fécondité (TGF). Quand il n’est pas donné directement, on peut facilement l’obtenir à partir du nombre de naissances et de l’effectif de femmes d’âge fécond qui figurent dans les rapports de ces enquêtes. Ces chiffres n’ont généralement pas subi de correction du sous-enregistrement. Le TGF peut aussi être calculé à partir du nombre corrigé de naissances et de l’effectif total de femmes d’âge fécond : ce sera alors un TGF corrigé. Cependant, ces deux séries de TGF, corrigés et non corrigés, sont très différents.

7Quatrièmement, les valeurs officielles corrigées de l’ISF s’écartent considérablement de celles fournies par l’Enquête nationale sur la population et la santé de la reproduction de 1997, par l’Enquête nationale sur le planning familial et la santé de la reproduction de 2001 et par l’Enquête nationale sur la population et le planning familial de 2006 (que nous appellerons enquêtes de fécondité de 1997, 2001 et 2006), et ne concordent donc pas avec les TFA résultant de ces enquêtes [3]. Ces écarts sont attribués en partie au fait que les statistiques calculées directement à partir des données des enquêtes de fécondité ne sont pas corrigées pour compenser le sous-enregistrement [4]. Néanmoins, même redressés en fonction des informations disponibles sur le sous-enregistrement, ces indices restent sensiblement différents des ISF corrigés officiels.

8Cinquièmement, il existe par conséquent de grandes incohérences entre les ISF corrigés officiels (ainsi que les TFA qui en constituent la base) et les indices longitudinaux de fécondité résultant des enquêtes de fécondité récentes. Ces derniers, qu’il s’agisse de descendances finales ou de descendances atteintes à certains âges, sont nettement inférieurs aux valeurs indiquées par les taux de fécondité corrigés officiels, même après la prise en compte du sous-enregistrement.

9Enfin, les nombres de naissances publiés pour la décennie 1990 s’écartent aussi fortement des effectifs d’enfants des mêmes générations enregistrés par le recensement de 2000. La comparaison des deux séries de chiffres montre que si les nombres de naissances publiés par les autorités pour les années 1990 sont corrects, l’effectif total d’enfants nés entre 1991 et 2000 devrait être supérieur à 203 millions. Mais le recensement de 2000 n’a enregistré que 165 millions d’enfants de moins de 10 ans. L’écart est de l’ordre de 38 millions, soit 3 % de la population chinoise et près de 20 % du nombre officiel de naissances. Le taux de sous-enregistrement qui découle de ces chiffres est supérieur au taux de sous-dénombrement officiellement reconnu pour le recensement de 2000. Si le recensement a effectivement omis 38 millions d’enfants de moins de 10 ans et si le taux officiel de sous-dénombrement de 1,81 % est exact, alors un énorme sur-dénombrement affecte les autres groupes d’âges (Zhang, 2004 ; Zhang et Zhao, 2006). On observe des incohérences semblables entre les nombres de naissances enregistrés après 1990 et ceux que donne l’enquête démographique par sondage sur 1 % de la population effectuée en 2005 (appelée, comme celle de 1995, mini-recensement).

10À cause de ces différents problèmes, la plus grande confusion règne sur le niveau de la fécondité chinoise depuis le début des années 1990. Bien que de nombreux chercheurs aient essayé de trouver des solutions, toutes les incohérences en question n’ont pas encore été examinées de façon méthodique et une certaine perplexité subsiste à propos de la fécondité chinoise récente. On le voit dans le cas des estimations de fécondité en 1991 et 1992, époque à laquelle la Chine a très probablement connu une forte chute de fécondité. L’écart maximum entre les estimations pour les deux années est de l’ordre de 10 millions de naissances, soit 20 % à 25 % du nombre total des enfants nés pendant cette période (Zhang et Zhao, 2006). Il existe aussi de fortes divergences du même type pour les estimations des niveaux de fécondité de l’année 2000 (Lutz et al., 2007).

11Cette situation insatisfaisante a provoqué une confusion considérable parmi de nombreux organismes nationaux et internationaux, décideurs politiques et acteurs de différents domaines, qui dépendent essentiellement de ces sources pour connaître le niveau de la fécondité chinoise. Cela a déjà fortement affecté leur perception de la situation démographique récente en Chine, ce qui pourrait avoir des conséquences politiques sérieuses, influençant à leur tour le développement socioéconomique de la Chine et l’évolution démographique mondiale.
Daniel Goodkind, démographe du Bureau du recensement américain (US Census Bureau), a publié en 2004 un article où il affirme que près de 37 millions d’enfants de 0 à 9 ans manquent au recensement chinois de 2000 (Goodkind, 2004). Ce chiffre dépasse de loin celui qu’avançaient ses homologues du Bureau national chinois de statistiques, pour qui le sous-enregistrement était de 30 millions (Zhang et Cui, 2003). L’affirmation de Goodkind était essentiellement fondée sur les TBN officiels publiés par la Chine pendant les années 1990 et sur les estimations du Bureau du recensement américain (Goodkind, 2004). Dans une communication au congrès annuel de la Population Association of America de 2008, Goodkind a modifié son point de vue en avançant qu’une « surinflation importante » affectait les statistiques chinoises de fécondité à partir de 1996 – bien que sa démonstration reste en partie fondée sur les estimations du Bureau du recensement américain utilisées dans son article de 2004 (Goodkind, 2008). Dernièrement, le Bureau du recensement américain et ses chercheurs ont encore changé d’avis sur les niveaux de la fécondité chinoise récente. Selon leurs dernières estimations publiées, l’ISF chinois était de 1,7 enfant par femme en 1996 et 1997, 1,6 de 1998 à 2000 et 1,5 de 2001 à 2010 (Bureau du recensement américain, 2010). Ces ISF sont nettement inférieurs aux chiffres précédemment utilisés par ce même Bureau, et bien plus faibles que les valeurs employées par la Division de la population des Nations unies dans la variante médiane de ses dernières projections démographiques pour la Chine (Nations unies, 2009) [5].
La recherche présentée ici tente de combler en partie le manque de connaissances sur l’évolution récente de la fécondité en Chine à travers les objectifs suivants : d’abord analyser précisément les incohérences qui affectent les diverses statistiques de fécondité publiées en Chine depuis 1990 et trouver le moyen de reconstituer une série cohérente d’indices de fécondité ; ensuite, en nous fondant sur l’examen des indicateurs de fécondité obtenus à partir de sources statistiques ou autres, proposer une série de données sur la fécondité plus fiables pour les années récentes.

II – Quelle est l’ampleur du sous-enregistrement des enfants dans les recensements et enquêtes récentes en Chine ?

12L’examen des statistiques de fécondité fournies par les principales sources officielles et une analyse de leur qualité permet non seulement d’évaluer dans quelle mesure les nombres de naissances et les taux de fécondité ont été sous-estimés, mais aussi de rassembler des informations contextuelles utiles pour la discussion des estimations de fécondité présentées dans les sections suivantes.

13Selon les critères internationaux, la qualité des trois derniers recensements chinois, particulièrement ceux de 1982 et 1990, est bonne ou assez bonne. D’après les rapports officiels, les taux nets de sous-enregistrement de la population dans les recensements étaient de 0,04 % en 1982, 0,06 % en 1990 et 1,81 % en 2000 (Coale, 1984 ; BNS, 1993a et 2002a ; Sun, 2001). Mais le sous-enregistrement varie d’un groupe d’âges à l’autre. Le problème est surtout visible pour les enfants de 0 à 4 ans à cause d’une tendance, observée en Chine au cours des dernières décennies, à la sous-déclaration des enfants nés peu avant le recensement (Zeng, 1996). Selon certaines études, les recensements de 1982 et 1990 pourraient avoir omis respectivement 3 % et 6 % des enfants de 0-4 ans (Zha et al., 1996 ; Zhang et Cui, 2003), mais notre examen indique que les taux de sous-enregistrement pourraient être légèrement plus élevés. Le phénomène est plus marqué dans le recensement de 2000. La comparaison avec les chiffres du mini-recensement de 2005 indique que le recensement de 2000 pourrait avoir sous-enregistré approximativement 17 % des enfants de 0 à 4 ans [6]. Bien qu’élevé, ce taux de sous-enregistrement reste inférieur à celui qu’impliquent les statistiques publiées par le gouvernement et présenté dans la section précédente.

14Par comparaison avec les recensements et mini-recensements, les récentes enquêtes démographiques annuelles et les enquêtes de fécondité ont porté sur des échantillons plus réduits, inférieurs à 1,5 million d’individus. Ces enquêtes ont également été mieux organisées et menées par des enquêteurs plus expérimentés. C’est pourquoi nous escomptons un sous-enregistrement des naissances moins prononcé dans ces enquêtes que dans le recensement de 2000.

15Comme mentionné précédemment, depuis la fin des années 1990, les autorités chinoises ne publient ni les taux de sous-enregistrement des enquêtes démographiques annuelles, ni le détail des ajustements apportés aux indices de fécondité à partir des données de ces enquêtes. Cela constitue une rupture notable avec les pratiques antérieures. Après les contrôles qui ont suivi les enquêtes annuelles de 1993 et 1994, il a été dit qu’elles avaient sous-évalué les TBN respectivement de 6,9 % et 6,4 % (Jia et Sai, 1995). Après le mini-recensement de 1995, le taux de correction a également été évalué et publié (Zhang et al., 1997). Mais depuis lors, ce type d’informations est difficile à trouver. Par exemple, Hu, impliqué dans l’organisation des enquêtes démographiques annuelles pendant de nombreuses années, a présenté de façon systématique le bilan de ces enquêtes dans une revue importante, mais son article n’effleure que brièvement la question du sous-enregistrement, sans en donner la moindre évaluation (Hu, 2005).

16À côté des enquêtes démographiques annuelles, quatre enquêtes par sondage sur la fécondité ont été effectuées depuis 1990. Les données recueillies par celles de 1992 et 1997 ont été exploitées par de nombreux démographes, et celles de 2001 par quelques-uns. La dernière a été menée en 2006 et ses résultats publiés en 2008. Selon Wang, démographe et fonctionnaire impliqué dans l’organisation des deux premières enquêtes de fécondité, l’enquête de 1992 a sous-enregistré au moins 3 % des naissances (Wang, 1996), mais d’autres chercheurs affirment que le problème est plus grave (Zeng, 1996). Les études de contrôle donnent un taux de sous-enregistrement des naissances de 6,47 % pour l’enquête de fécondité de 1997 (Wang, 2000). Par ailleurs, Wang et Huang estiment que l’erreur d’enregistrement est inférieure à 5 % dans l’enquête de fécondité de 2001 (Wang et Huang, 2002). Ces taux de sous-enregistrement sont comparables ou légèrement inférieurs à ceux des enquêtes démographiques annuelles de 1993 et 1994. Le taux de sous-enregistrement de l’enquête de fécondité de 2006 n’est pas encore disponible. Mais pour la première fois depuis le milieu des années 1990, l’administration statistique chinoise a adopté les ISF non corrigés déduits de l’enquête comme chiffres officiels pour les années 2004, 2005 et 2006. Le gouvernement paraît ainsi relativement sûr de la bonne qualité de l’enquête de fécondité de 2006.
Ces analyses montrent qu’il y a bien sous-enregistrement des naissances dans les recensements, les mini-recensements, les enquêtes de fécondité et les enquêtes démographiques annuelles menées en Chine au cours des années récentes. Dans la plupart des cas, les taux de sous-enregistrement des naissances rendus publics par les autorités (ou proposés par des fonctionnaires impliqués dans ces recensements et enquêtes) sont inférieurs à 7 %. Dans quelle mesure, alors, les indicateurs de fécondité ont-ils été corrigés dans les publications officielles durant ces dernières années ?
Le tableau 1 présente les nombres de naissances et les taux bruts de natalité provenant de différentes sources. Dans les colonnes 2 et 3 figurent les nombres de naissances et les TBN calculés directement à partir des données des enquêtes démographiques annuelles, recensements, et mini-recensements récents. Ces dernières années, le taux de sondage des enquêtes annuelles a été de l’ordre de 0,1 % de l’ensemble de la population chinoise. Les chiffres de la colonne 4 sont les nombres de naissances publiés par l’administration statistique sans aucune correction. Les TBN de la colonne 5 ne sont pas corrigés non plus, et ils sont très proches de ceux de la colonne 3, à l’exception des années 1995 et 2000. Les données des colonnes 6 et 7 sont les nombres de naissances et TBN corrigés officiels. Pour la période 1993-1999, les TBN de la colonne 7 valent en moyenne 1,18 fois ceux des colonnes 3 et 5 (les rapports sont donnés dans les colonnes 8 et 9). Pour les années 2001 à 2004, les TBN de la colonne 7 valent 1,17 fois ceux de la colonne 3. Soulignons que le coefficient de correction du TBN atteint 1,31 en 2005 et que, pour les années 1995 et 2000, les TBN non corrigés de la colonne 3 diffèrent nettement de ceux de la colonne 5 [7]. Ces divergences, qui se manifestent les années pendant lesquelles ont été organisés un recensement ou un mini-recensement, méritent une étude approfondie.

Tableau 1

Nombres de naissances non corrigés et corrigés, taux brut de natalité (TBN), Chine, 1990-2005

Tableau 1
Année Nombre de naissances dans l’échantillon TBN dans l’échantillon (‰) Nombre de naissances non corrigé officiel TBN non corrigé (‰) Nombre de naissances corrigé officiel TBN corrigé officiel (‰) Rapport (7)/(3) Rapport (7)/(5) (1) (2) (3) (4) (5) (6) (7) (8) (9) 1990 23 910 000 21,06 1991 19 860 17,67 21 210 000 18,32 22 580 000 19,68 1,11 1,07 1992 30 101 16,55 19 160 000 16,35 21 190 000 18,24 1,10 1,12 1993 20 580 15,79 18 460 000 15,58 21 260 000 18,09 1,15 1,16 1994 19 965 15,55 18 350 000 15,32 21 040 000 17,70 1,14 1,16 1995 166 772 13,49 17 460 000 14,42 20 630 000 17,12 1,27 1,19 1996 17 771 14,26 17 520 000 14,32 20 670 000 16,98 1,19 1,19 1997 17 007 13,68 16 640 000 13,47 20 380 000 16,57 1,21 1,23 1998 16 452 13,23 16 570 000 13,28 19 420 000 15,64 1,18 1,18 1999 15 336 12,65 15 980 000 12,70 18 340 000 14,64 1,16 1,15 2000 1 181 952 10,01 12 180 000 11,40 17 710 000 14,03 1,40 1,23 2001 13 853 11,35 17 020 000 13,38 1,18 2002 13 668 10,86 16 470 000 12,86 1,18 2003 13 328 10,57 15 990 000 12,41 1,17 2004 13 450 10,73 15 930 000 12,29 1,15 2005 161 042 9,48 16 170 000 12,40 1,31 Sources : (2) et (3) 1995 : China Population Statistics Yearbook (BNS, 1996) ; 2000 (données du questionnaire long) : Tabulation on the 2000 Population Census (BNS, 2002a) ; 2005 : Tabulation on the 2005 1% Population Sample Survey (BNS, 2007a) ; autres années : enquêtes annuelles sur le mouvement démographique, China Population Statistics Yearbook (BNS, 1991-2005). (4) et (5) CPIRC (2003), statistiques non corrigées officielles. (6) 1990-2001 : China Population Statistics Yearbook (BNS, 2002 et 2003) ; 2002-2005 : China Population Statistics Yearbook (BNS, 2003-2006), statistiques corrigées officielles. (7) China Statistical Yearbook (BNS, 2006a), statistiques corrigées officielles.

Nombres de naissances non corrigés et corrigés, taux brut de natalité (TBN), Chine, 1990-2005

17Le tableau 2 présente les ISF corrigés officiels, ainsi que les TFA, TGF et ISF non corrigés publiés par le gouvernement, calculés à partir du recensement de 2000, des mini-recensements de 1995 et 2005 et des enquêtes démographiques annuelles. Les TFA et ISF non corrigés calculés à partir des enquêtes de fécondité de 1997, 2001 et 2006 figurent dans le tableau 3. À l’examen des deux séries de TFA et ISF non corrigés, on constate que, comparés aux ISF des enquêtes de fécondité, les ISF déduits des enquêtes démographiques annuelles sont supérieurs entre 1994 et 1999, mais inférieurs ou équivalents entre 2001 et 2004. Quant aux TFA, ceux qui proviennent des enquêtes de fécondité sont plus élevés dans les groupes d’âges inférieurs, mais plus faibles dans les groupes d’âges supérieurs, que les TFA calculés à partir des enquêtes annuelles. Les TGF non corrigés étant calculés directement à partir des mêmes données, ils concordent naturellement avec les TFA et les ISF basés sur les enquêtes annuelles.

Tableau 2

Indice synthétique de fécondité (ISF) corrigé officiel, taux global de fécondité (TGF), taux de fécondité par âge (TFA) et ISF calculés à partir des recensements, mini-recensements et enquêtes démographiques annuelles, Chine, 1990-2005

Tableau 2
Année 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 ISF corrigé officiel(a) 2,31 2,01 1,84 1,83 1,81 1,78 1,81 1,82 TGF (‰)(b) 78,47 56,96 49,73 52,24 49,99 TFA(b) 15-19 ans 0,012 0,004 0,011 0,007 0,003 20-24 ans 0,186 0,139 0,154 0,152 0,129 25-29 ans 0,163 0,124 0,092 0,109 0,122 30-34 ans 0,058 0,040 0,026 0,031 0,035 35-39 ans 0,021 0,008 0,006 0,007 0,007 40-44 ans 0,006 0,003 0,002 0,002 0,001 45-49 ans 0,002 0,001 0,001 0,001 0,001 ISF calculé à partir des TFA 2,244 1,602 1,456 1,546 1,489 Année 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 ISF corrigé officiel(a) 1,82 1,80 1,80 1,80 1,80 1,80 1,59 1,74 TGF (‰)(b) 48,07 46,10 36,11 40,97 39,08 38,01 38,29 34,44 TFA(b) 15-19 ans 0,003 0,003 0,006 0,003 0,003 0,005 0,006 0,006 20-24 ans 0,127 0,122 0,114 0,108 0,113 0,123 0,121 0,114 25-29 ans 0,119 0,119 0,086 0,115 0,106 0,102 0,108 0,092 30-34 ans 0,038 0,040 0,029 0,040 0,043 0,038 0,042 0,040 35-39 ans 0,009 0,010 0,006 0,009 0,010 0,009 0,010 0,011 40-44 ans 0,002 0,001 0,001 0,002 0,002 0,002 0,002 0,002 45-49 ans 0,001 0,000 0,001 0,001 0,000 0,001 0,000 0,001 ISF calculé à partir des TFA 1,488 1,475 1,218 1,387 1,383 1,398 1,444 1,333 Notes : Les TGF, les TFA et les ISF non corrigés ne sont pas disponibles pour la période 1991-1993. Le TGF est le rapport du nombre de naissances aux effectifs féminins de 15 à 49 ans. Sources : (a) 1990 : Yao (1995) ; 1991-2005 : Communiqués du NPFPC (2001-2003 et 2007). (b) 1995 : China Population Statistics Yearbook (BNS, 1996) ; 2000 : Tabulation on the 2000 Population Census (BNS, 2002a) ; 2005 : Tabulation on the 2005 1% Population Sample Survey (BNS, 2007a) ; autres années : enquêtes annuelles sur le mouvement démographique, China Population Statistics Yearbook (BNS, 1991-2005).

Indice synthétique de fécondité (ISF) corrigé officiel, taux global de fécondité (TGF), taux de fécondité par âge (TFA) et ISF calculés à partir des recensements, mini-recensements et enquêtes démographiques annuelles, Chine, 1990-2005

Tableau 3

Taux de fécondité par âge (TFA) et indice synthétique de fécondité (ISF), enquêtes de fécondité récentes, Chine, 1990-2005

Tableau 3
Année 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 TFA : 15-19 ans 0,026 0,019 0,015 0,022 0,010 0,010 0,011 0,008 20-24 ans 0,207 0,181 0,167 0,161 0,143 0,142 0,145 0,128 25-29 ans 0,156 0,111 0,091 0,089 0,082 0,090 0,088 0,085 30-34 ans 0,057 0,028 0,031 0,031 0,028 0,024 0,026 0,027 35-39 ans 0,010 0,009 0,007 0,005 0,006 0,004 0,006 0,005 40-44 ans – – 0,003 0,003 0,002 0,002 0,001 0,001 45-49 ans – – – – – – – – ISF calculé à partir des TFA 2,280 1,740 1,570 1,555 1,355 1,360 1,385 1,270 Année 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 TFA : 15-19 ans 0,008 0,008 0,008 0,014 0,013 0,012 0,012 0,016 20-24 ans 0,143 0,130 0,145 0,122 0,117 0,112 0,144 0,169 25-29 ans 0,085 0,084 0,097 0,099 0,091 0,085 0,104 0,106 30-34 ans 0,026 0,029 0,031 0,038 0,038 0,039 0,046 0,045 35-39 ans 0,007 0,006 0,005 0,007 0,007 0,009 0,010 0,010 40-44 ans 0,001 0,000 0,002 0,001 0,001 0,002 0,001 0,001 45-49 ans – – 0,000 0,000 0,001 0,000 0,000 0,000 ISF calculé à partir des TFA 1,350 1,285 1,440 1,406 1,347 1,299 1,586 1,736 Note : Dans certains groupes d’âges, les données manquent pour le calcul des TFA (« – »). Sources : Calculs des auteurs à partir de l’Enquête nationale sur la population et la santé de la reproduction (NPFPC, 1997) pour 1990-1995 ; et de l’Enquête nationale sur le planning familial et la santé de la reproduction (NPFPC, 2001) pour 1996-2000 ; Zhang et al. (2008) pour 2001-2005.

Taux de fécondité par âge (TFA) et indice synthétique de fécondité (ISF), enquêtes de fécondité récentes, Chine, 1990-2005

18La comparaison entre les ISF corrigés officiels et les deux séries d’ISF non corrigés révèle que les premiers sont nettement supérieurs aux seconds, souvent de plus de 20 %, écart plus élevé que celui constaté entre les TBN corrigés et non corrigés, indiquant des incohérences possibles entre TBN corrigés et ISF corrigés [8]. Bien que l’ampleur de la correction soit relativement importante, les autorités statistiques chinoises n’ont jamais rédigé de commentaire officiel sur les taux d’ajustement appliqués aux TBN et aux ISF, ni publié le moindre détail sur la procédure d’ajustement utilisée depuis la fin des années 1990.
Les résultats de la comparaison précédente montrent que les indicateurs de fécondité enregistrés en Chine ont subi un redressement plus important que celui qu’auraient impliqué les taux de sous-enregistrement constatés par certaines enquêtes de contrôle et d’autres sources. Faute de justification convaincante, on peut raisonnablement considérer cela comme une surcorrection, déjà soulignée par Qiao pour qui le Bureau national chinois des statistiques a « artificiellement ajouté chaque année près de 3 millions de naissances » à la population du pays entre 1990 et 1999 (Qiao, 2005, p. 12). Bien que les autorités statistiques chinoises puissent avoir leurs propres raisons de surévaluer les nombres de naissances, les TBN et les ISF au-delà de ce qu’imposent les taux de sous-enregistrement mesurés par les enquêtes de contrôle, ce genre de pratique crée inévitablement de la confusion, surtout quand aucune explication n’est fournie [9]. Et de fait, ces indices de fécondité corrigés par les autorités et sans doute exagérément gonflés ont directement alimenté la perplexité autour du niveau de la fécondité chinoise, déjà affecté par différents problèmes d’enregistrement constatés dans les statistiques démographiques chinoises récentes.

III – Méthodes de reconstitution des indicateurs récents de la fécondité chinoise

19La discussion développée dans les deux sections précédentes nous amène aux conclusions suivantes. Premièrement, les indices de fécondité publiés par les autorités chinoises souffrent d’incohérences depuis près de vingt ans. Deuxièmement, les nombres de naissances, TBN et ISF rendus publics par le gouvernement ne sont pas seulement incompatibles avec d’autres indices de fécondité, mais ils surévaluent aussi très probablement le niveau réel de la fécondité. Un moyen de résoudre ce problème consiste à reconstituer une série d’indicateurs de fécondité cohérents, détaillés et plus fiables.

20Une étape importante de la reconstitution des indicateurs de fécondité est de produire de meilleures estimations des TFA pour chaque année de la période étudiée. Une possibilité consiste à recourir à la méthode de rétroprojection développée par Lee au début des années 1970. Si on connaît les nombres de naissances et de décès survenus au cours d’une période et la structure par âge de la population à une date donnée, cette méthode peut, sous certaines hypothèses sur les structures par âge de la fécondité et de la mortalité, aboutir à une série d’indicateurs statistiques détaillés du mouvement naturel et de structures par âge de la population (Lee, 1974). Une autre option consiste à appliquer la méthode de Duchêne et Gillet-de Stefano, qui date elle aussi du début des années 1970. Supposant que le schéma de fécondité suit une loi déterminée, par exemple une loi de Poisson, cette méthode permet de calculer les TFA à partir de l’ISF, de l’âge moyen à la maternité et de sa variance (Duchêne et Gillet-de Stefano, 1974).

21Nous pourrions employer l’une ou l’autre de ces deux méthodes pour estimer les TFA et différents indicateurs de fécondité à partir des nombres de naissances enregistrés et des autres données nécessaires. Cependant, nous sommes en mesure de faire mieux. Même affectées par le sous-enregistrement, les données sur la répartition des naissances et les TFA sont abondantes. Nous ne sommes donc pas obligés de faire l’hypothèse selon laquelle la fécondité chinoise suit un type de schéma particulier ou d’autres hypothèses. Nous présentons ci-dessous notre méthode, similaire à celle de Lee, ainsi que les données utilisées pour estimer les taux de fécondité récents en Chine.

22Pour estimer les TFA de la période 1990-2005, nous avons besoin de la structure par âge de la population féminine d’âge fécond. Ces statistiques sont régulièrement publiées par le gouvernement chinois à partir des enquêtes démographiques annuelles. Les derniers recensements et les mini-recensements de 1995 et de 2005 les fournissent eux aussi de manière détaillée, mais les effectifs varient considérablement d’une source à l’autre. Par exemple, dans certaines générations, l’effectif de femmes est plus élevé d’après le recensement de 2000 que les recensements antérieurs. En outre, la date de référence du dénombrement (jour et mois) varie selon que les recensements sont anciens ou plus récents, et lors d’autres enquêtes analogues. Tout ceci rend beaucoup plus difficile que prévu la reconstitution d’un ensemble de données cohérentes sur les effectifs de femmes d’âge fécond.

23Dans le cadre de cette étude, nous avons utilisé deux populations de base pour évaluer la population féminine d’âge fécond chaque année entre 1990 et 2005. Nous avons commencé par estimer le nombre de femmes de 10 à 59 ans au milieu de l’année 2000 à partir des données de Guo (2004) et du recensement de 1990 [10]. Ce chiffre a ensuite servi de base à l’estimation de la population féminine pour l’ensemble de la période. À cause du problème décrit plus haut et de possibles doubles comptes dans certains groupes d’âges lors du recensement de 2000, ce calcul peut légèrement surestimer les effectifs de femmes d’âge fécond et donc sous-estimer les taux de fécondité réels si les nombres de naissances restent inchangés. C’est pourquoi nous avons également utilisé la population au 1er juillet 1990 comme base pour l’estimation des effectifs de femmes d’âge fécond de la période étudiée. En maintenant constantes toutes les autres données, nous avons alors obtenu des effectifs féminins très légèrement inférieurs et des taux de fécondité un peu supérieurs.

24Le recensement de 1990 a sous-évalué les enfants de 0-4 ans, et principalement ceux nés peu de temps avant le recensement. Si on fait l’hypothèse que le recensement de 2000 a enregistré correctement l’effectif de femmes de ce même groupe de générations (alors âgées de 10 à 14 ans), on observe un sous-enregistrement des effectifs féminins de 15 à 19 ans d’environ 2 % en 2002, 3 % en 2003, 5 % en 2004 et 9 % en 2005. Il en résultera une surestimation des TFA dans ce groupe d’âges. Étant donné que, dans la période récente, très peu de femmes ont eu des enfants avant leur 20e anniversaire, l’impact de cette surestimation sur l’ISF est très faible, inférieur à 0,2 % pour les années concernées. Dès lors, nous avons corrigé les effectifs féminins de ce groupe d’âges sur la base des données du recensement de 2000.

25Après avoir déterminé la population de référence, nous avons fait l’hypothèse que la structure par âge de la mortalité féminine chinoise était conforme au modèle Ouest des tables-types de Coale et Demeny (Coale et Demeny, 1983). Nous avons également supposé que l’espérance de vie à la naissance des Chinoises était de 71 ans en 1990-1992, 72 ans en 1993-1996, 73 ans en 1997-2000 et 74 ans en 2001 et 2005 [11]. Avec ces hypothèses, nous avons pu estimer l’effectif et la structure par âge de la population avant et après l’année de référence.
L’étape suivante consiste à calculer ou estimer la distribution des naissances en fonction de l’âge de la mère. Nous avons d’abord calculé, à partir des données des enquêtes de fécondité de 1997, 2001 et 2006, la distribution des naissances, année par année, respectivement pour les périodes 1990-1995, 1996-2000 et 2001-2005 [12] ; nous avons fait ces mêmes calculs à partir des données des enquêtes démographiques annuelles [13], et nous avons finalement choisi la moyenne des deux estimations pour chaque année. Si nous avons procédé ainsi, c’est en grande partie parce que les données des enquêtes de fécondité présentaient très souvent davantage de naissances aux jeunes âges et moins de naissances aux âges élevés que celles des enquêtes démographiques annuelles (Zhang et Zhao, 2006). Ceci ne s’applique cependant pas aux données de l’enquête de fécondité de 2006 qui seront analysées dans la section suivante. Le sous-enregistrement observé dans les données recueillies par les enquêtes de fécondité et les enquêtes démographiques annuelles peut avoir des conséquences importantes sur l’étude du niveau de la fécondité, mais s’il se manifeste de manière à peu près aléatoire, il aura peu d’effet sur la distribution des naissances par âge de la mère. De plus, utiliser la moyenne des distributions de naissances fournies par les deux types d’enquêtes permet de réduire ces aléas.
La troisième étape consiste à calculer les nombres de naissances par âge de la mère à partir du nombre total de naissances et des proportions de naissances par âge de la mère estimées auparavant. On calcule ensuite directement les taux de fécondité par groupe d’âges pour chaque année étudiée, puis l’ISF et les autres indicateurs de fécondité, y compris les indices longitudinaux. Nous avons calculé les TFA par année d’âge et par groupe quinquennal d’âges ; seuls ces derniers sont présentés ici.

IV – Les indicateurs de fécondité estimés à partir des nombres de naissances officiels

26Nous avons tout d’abord appliqué la méthode décrite dans la section précédente aux nombres de naissances officiels pour estimer les TFA et d’autres indicateurs de fécondité. Bien que les nombres de naissances approuvés par le gouvernement soient très probablement supérieurs aux chiffres réels, nous les utilisons encore à ce stade, car le principal objectif de cette partie de notre recherche est d’étudier les incohérences entre les chiffres officiels de naissances, de TBN, d’ISF et d’autres indicateurs de fécondité.

27Conformément aux procédures détaillées dans la section précédente, nous avons choisi comme populations de référence les populations féminines enregistrées par les recensements de 1990 et de 2000, afin d’estimer les taux de fécondité de la période 1990-2005. Comme prévu, les taux de fécondité estimés à partir des effectifs féminins provenant du recensement de 2000 sont inférieurs à ceux du recensement de 1990. Mais les écarts entre les deux séries de taux sont généralement faibles. Si nous considérons comme fiables les indices fondés sur les effectifs féminins du recensement de 1990, alors l’autre série de résultats sous-estime l’ISF de moins de 2 % entre 1990 et 2003. Cette sous-estimation est légèrement plus prononcée en 2004 (2,2 %) et 2005 (2,3 %). De même, la comparaison de 80 paires de taux quinquennaux de fécondité (entre 20 et 44 ans, âges auxquels surviennent la plupart des naissances) de 1990 à 2005 donne un taux de sous-estimation inférieur à 3 % dans 78 cas [14]. Dans deux cas seulement (les femmes de 20-24 ans en 2004 et 2005), les calculs fondés sur le recensement de 2000 sous-estiment le taux de fécondité d’environ 4 %. Pour simplifier notre exposé, seuls les taux de fécondité estimés à partir des effectifs féminins du recensement de 1990 seront présentés par la suite.
Nous commencerons par comparer nos estimations des effectifs de femmes de 15 à 49 ans avec ceux fournis par le recensement de 2000 et les mini-recensements de 1995 et de 2005. Comme le montre le tableau 4, nos estimations sont de 1,1 % plus élevées que celles du mini-recensement de 1995, de 1,6 % inférieures à celles du recensement de 2000 et de 1,7 % supérieures à celles du mini-recensement de 2005 [15]. D’après ces résultats et la comparaison des structures par groupes quinquennaux d’âges (non présentées ici), on peut considérer nos estimations des effectifs féminins d’âge fécond comme une base fiable pour l’estimation de la fécondité.

Tableau 4

Effectifs de femmes d’âge fécond publiés et estimés en 1990, 1995, 2000 et 2005, Chine

Tableau 4
1990 1995 2000 2005 Effectif publié 306 349 792 324 282 605 348 939 746 354 130 022 Effectif estimé 306 349 792 327 872 590 343 415 852 360 278 001 Rapport « estimé / publié » 1,000 1,011 0,984 1,017 Note : Les chiffres publiés de 1990, 1995, 2000 et 2005 sont les effectifs de femmes de 15-49 ans en milieu d’année, calculés à partir des résultats des recensements et mini-recensements récents. Les chiffres publiés de 1995 et 2005 sont calculés en divisant les résultats des mini-recensements par 1,04 % et 1,325 % (taux de sondage de chacune de ces enquêtes). Sources des chiffres publiés : 1990 : Zhuang et Zhang (2003) ; 1995 : China Population Statistics Yearbook (BNS, 1996); 2000 : Tabulation on the 2000 Population Census (BNS, 2002a) ; 2005 : Tabulation on the 2005 1% Population Sample Survey (BNS, 2007a).

Effectifs de femmes d’âge fécond publiés et estimés en 1990, 1995, 2000 et 2005, Chine

28Le tableau 5 présente les valeurs estimées des TGF, des TFA et des ISF de 1990 à 2005. En comparant les ISF estimés avec les ISF officiels (tableau 2), on constate que ces deux séries sont très proches entre 1990 et 1997, mais divergent de plus en plus à partir de 1998 : les ISF estimés commencent à décliner tandis que les indices officiels corrigés se maintiennent au voisinage de 1,8 enfant par femme. Notre estimation est proche du chiffre officiel en 2004, mais nettement inférieure en 2005.

Tableau 5

Taux global de fécondité (TGF), taux de fécondité par âge (TFA) et indice synthétique de fécondité (ISF) estimés à partir des nombres corrigés officiels de naissances, Chine, 1990-2005

Tableau 5
1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 TGF (‰) 78,05 72,54 67,15 66,48 64,93 62,92 62,47 60,76 TFA : 15-19 ans 0,017 0,020 0,013 0,015 0,007 0,008 0,010 0,006 20-24 ans 0,190 0,200 0,189 0,179 0,172 0,170 0,174 0,157 25-29 ans 0,159 0,127 0,111 0,120 0,129 0,130 0,129 0,140 30-34 ans 0,056 0,035 0,039 0,042 0,043 0,038 0,038 0,043 35-39 ans 0,016 0,010 0,009 0,008 0,009 0,008 0,009 0,009 40-44 ans 0,007 0,002 0,003 0,003 0,003 0,003 0,002 0,002 45-49 ans 0,001 0,000 0,001 0,001 0,001 0,001 0,001 0,001 ISF 2,230 1,973 1,825 1,840 1,821 1,789 1,815 1,791 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 TGF (‰) 57,31 53,71 51,57 49,09 47,00 45,16 44,61 44,88 TFA : 15-19 ans 0,005 0,005 0,005 0,007 0,006 0,007 0,006 0,007 20-24 ans 0,157 0,144 0,139 0,124 0,123 0,125 0,126 0,130 25-29 ans 0,132 0,130 0,130 0,131 0,120 0,113 0,117 0,116 30-34 ans 0,044 0,046 0,046 0,050 0,053 0,052 0,054 0,054 35-39 ans 0,011 0,011 0,010 0,011 0,011 0,012 0,013 0,015 40-44 ans 0,002 0,001 0,002 0,002 0,002 0,003 0,002 0,003 45-49 ans 0,001 0,001 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,001 ISF 1,753 1,690 1,665 1,627 1,582 1,561 1,586 1,628 Note : Les ISF ont été calculés à partir des TFA quinquennaux. Sources : Calculs des auteurs à partir de : China Population Statistics Yearbook (BNS, 2002 et 2003) pour 1990-2001 ; China Population Statistics Yearbook (BNS, 2003-2006) pour 2002-2005, statistiques corrigées officielles.

Taux global de fécondité (TGF), taux de fécondité par âge (TFA) et indice synthétique de fécondité (ISF) estimés à partir des nombres corrigés officiels de naissances, Chine, 1990-2005

29La bonne concordance entre les deux séries d’ISF sur la plus grande partie des années 1990 était prévisible, puisque notre estimation se fonde sur les nombres officiels corrigés de naissances et que les autorités statistiques chinoises ont sans doute pris en compte le nombre total estimé des naissances quand elles ont corrigé les ISF, en particulier dans la première moitié de la décennie. Depuis la fin des années 1990, l’ajustement des ISF semble être devenu plus arbitraire. C’est ce que donne à penser le fait qu’entre 1996 et 2003, le nombre officiel corrigé de naissances diminue de 20,7 millions à 16,0 millions, et le TBN chute de 17,0 ‰ à 12,4 ‰ (tableau 1), alors que l’ISF corrigé (tableau 2) ne varie quasiment pas pendant cette période.

30Quand on compare les TFA estimés avec ceux qui peuvent être déduits directement des recensements, des mini-recensements et des enquêtes démographiques annuelles sans correction du sous-enregistrement (tableau 2), les écarts prévisibles sautent aux yeux. Entre 1994 et 2005, période pour laquelle on dispose généralement d’enquêtes annuelles, les TFA estimés sont constamment supérieurs aux taux officiels non corrigés, à quelques rares exceptions près. En prenant nos estimations comme référence, les ISF calculés directement à partir des TFA non corrigés issus des enquêtes annuelles, recensements et mini-recensements équivaudraient en moyenne à 84,8 % des ISF estimés [16]. À partir de 1994, les ISF non corrigés sont de 10 % à 19 % inférieurs aux ISF estimés, à deux exceptions près seulement. En 2004, l’écart entre ISF calculé directement et ISF estimé est inférieur à 10 % et plus faible que celui des autres années. Le plus grand écart est observé en 2000 (environ 27 %), ce qui peut s’expliquer par le fait que l’ISF calculé directement provient cette année-là des données du recensement et non de celles de l’enquête annuelle. Or le sous-enregistrement des naissances est sans doute plus prononcé dans le recensement que dans l’enquête annuelle.

31Pendant la période 1994-2005, les TGF estimés sont aussi constamment supérieurs aux taux calculés directement à partir des recensements, mini-recensements et enquêtes démographiques annuelles. Pour toutes les années où les TGF peuvent être calculés à partir d’une enquête annuelle, la valeur calculée directement est de 12 % à 18 % inférieure à la valeur estimée. Mais l’écart est beaucoup plus important, de 23 % à 30 %, en 1995, 2000 et 2005, années où les TGF non corrigés ont été calculés à partir des données des recensements et mini-recensements. C’est en 2000 que l’on observe la plus grande différence, ce qui peut résulter non seulement du sous-enregistrement des naissances mais aussi de la possible surestimation de l’effectif de femmes d’âge fécond par le recensement de cette année-là. En moyenne, les TGF calculés directement (y compris celui de 1990) sont d’environ 16,4 % inférieurs aux TGF estimés.
La comparaison des TFA et ISF estimés avec les résultats officiels des enquêtes de fécondité de 1997, 2001 et 2006 (tableau 3) conduit aux mêmes conclusions. Pour l’année 1990, les TFA fournis par l’enquête de fécondité de 1997 sont en général supérieurs à nos estimations. L’ISF calculé à partir des TFA de 15 à 39 ans est de 4 % supérieur à notre estimation. Pour toutes les autres années de la décennie 1990 et la plupart des groupes d’âges, les TFA calculés à partir des enquêtes sont nettement plus faibles que les TFA estimés. En moyenne, les ISF déduits des enquêtes, calculés à partir des TFA de tous les groupes quinquennaux d’âges ou d’une partie d’entre eux selon les disponibilités des données, équivalent à environ 79 % des ISF calculés à partir des TFA estimés. Depuis 2000, l’écart entre les deux séries d’ISF diminue. L’ISF officiel est très proche de l’ISF estimé en 2004 et lui est même supérieur en 2005. Mais cela est très probablement lié à la procédure d’échantillonnage utilisée dans l’enquête de fécondité de 2006.
L’enquête de fécondité de 2006 donne des ISF de même niveau que ceux d’autres sources comme les enquêtes démographiques annuelles jusqu’en 2004, mais beaucoup plus élevés en 2005 et 2006. Selon le mini-recensement et l’enquête démographique annuelle, l’ISF était de 1,33 enfant par femme en 2005 et 1,38 en 2006, alors que l’enquête de fécondité de 2006 donnait respectivement 1,74 et 1,88 ; ce qui semble indiquer que la fécondité (du moment) chinoise s’est rapidement redressée après avoir stagné à un niveau faible pendant une décennie. Cependant, deux éléments méritent d’être soulignés. Premièrement, selon l’enquête de fécondité de 2006 de la Commission nationale de la population et du planning familial, l’ISF de rang 1 était de 1,32 enfant par femme en 2006 (National Population and Family Planning Commission, NPFPC, 2007). Ceci signifie que, même si les résultats de l’enquête reflétaient bien la situation de la fécondité de cette année, ils pourraient simplement indiquer une concentration des naissances ou un effet de calendrier plutôt qu’un retour à un régime de fécondité plus élevée [17]. Deuxièmement, et ceci est encore plus important, comparativement à l’enquête démographique annuelle de 2006 et au mini-recensement de 2005, il y a eu, dans l’échantillon de l’enquête de fécondité de 2006, surreprésentation des femmes mariées vivant en milieu rural ou peu instruites, et sous-représentation des femmes de 15-24 ans. Dans un tel échantillon, la fécondité était supérieure à la moyenne nationale, ce qui a directement contribué à l’augmentation relative des ISF fournis par l’enquête [18]. Une analyse détaillée de ces problèmes a été publiée par Zhao et Guo (2010).

V – Estimations de fécondité à partir des nombres de naissances corrigés

32On peut faire plusieurs remarques à partir des résultats des comparaisons présentées dans la section précédente. Premièrement, les indicateurs de fécondité publiés par le gouvernement souffrent manifestement de graves incohérences, dont témoignent les écarts importants observés entre les TFA publiés et les TFA estimés à partir des nombres de naissances officiels. Deuxièmement, depuis la fin des années 1990, les ISF officiellement corrigés ou approuvés sont de plus en plus élaborés de façon arbitraire et non par des méthodes scientifiques, ce que trahissent les incohérences de plus en plus souvent constatées entre les ISF corrigés officiels, d’une part, et les nombres corrigés de naissances et les TBN officiels, d’autre part. Troisièmement, les TFA, ISF et TGF estimés sont beaucoup plus élevés que ceux résultant directement des recensements, mini-recensements, enquêtes démographiques annuelles et enquêtes de fécondité, avec généralement des écarts de 15 % à 20 %. Ces écarts concordent assez bien avec les taux de correction appliqués par le gouvernement aux nombres de naissances tels qu’ils transparaissent dans le tableau 1, mais les taux de sous-enregistrement impliqués par ces écarts sont sensiblement supérieurs à ceux publiés par le gouvernement et plusieurs chercheurs (section II).

33L’un des objectifs de cette recherche est donc atteint, puisque nous avons obtenu une série cohérente d’indicateurs de fécondité pour la période 1990-2005. Mais les éléments présentés dans la section II incitent fortement à penser que les autorités statistiques chinoises ont pu surestimer les nombres de naissances, les TBN et les ISF depuis le milieu des années 1990. Les indices de fécondité calculés à partir de ces nombres de naissances corrigés risquent donc de surestimer le niveau réel de la fécondité chinoise. Par conséquent, il est nécessaire de réévaluer les statistiques de fécondité des années récentes à partir de nombres de naissances plus fiables.

34Une façon d’améliorer nos estimations consiste à réduire les chiffres officiels de naissances pour un nouveau calcul des taux de fécondité de la période étudiée. Les observations effectuées dans la section II montrent que si la qualité des recensements et mini-recensements chinois s’est récemment détériorée, le sous-enregistrement est moins grave dans les dernières enquêtes démographiques annuelles et enquêtes de fécondité. Les taux de sous-enregistrement de certaines de ces enquêtes sont de l’ordre de 7 %, parfois inférieurs, mais ne dépassent pas 8 %.

35Dans une communication au congrès annuel de la Population Association of America, Goodkind a traité des problèmes de sous-enregistrement qui affectent certains recensements asiatiques, surtout en Asie de l’Est et du Sud-Est. Il a montré que les recensements effectués récemment dans onze pays (Chine exceptée) [19] ont omis en moyenne moins de 8 % des enfants de 0-4 ans et moins de 4 % des enfants de 5-9 ans (Goodkind, 2008). On peut penser que la qualité des enquêtes annuelles chinoises sur le mouvement démographique, qui portent sur un échantillon d’environ un million d’individus chaque année et sont réalisées par des enquêteurs relativement expérimentés, n’est pas inférieure à la qualité moyenne des recensements effectués dans ces onze pays asiatiques.
À partir de ces considérations, nous avons fait l’hypothèse que depuis 1993 les enquêtes démographiques annuelles ont sous-enregistré en moyenne 8 % des naissances. Ensuite, en utilisant les nombres de naissances corrigés officiels et les rapports des TBN corrigés officiels aux TBN non corrigés (colonnes 6 et 9 du tableau 1), nous avons recalculé les nombres annuels de naissances des périodes 1993, 1994, 1996-1999 et 2001-2004. Ceux de 1995, 2000 et 2005 ont été interpolés à partir des chiffres estimés de 1994, 1996, 1999, 2001, 2004 et 2006, parce que les rapports des TBN corrigés aux TBN non corrigés, fournis ces trois années-là par les recensement et mini-recensements, sont considérablement plus élevés que ceux des autres années [20]. Le tableau 6 présente les nombres révisés de naissances, qui équivalent en moyenne à 92,1 % des nombres corrigés officiels entre 1993 et 2005. Nous avons enfin utilisé ces nouvelles estimations des nombres de naissances et la méthode décrite précédemment pour estimer à nouveau les indicateurs de fécondité de la période étudiée. Ces résultats figurent également dans le tableau 6. La figure 1 permet la comparaison des ISF obtenus à partir des différentes sources.

Tableau 6

Taux global de fécondité (TGF), taux de fécondité par âge (TFA) et indice synthétique de fécondité (ISF) estimés à partir des nombres estimés de naissances, Chine, 1990-2005

Tableau 6
1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 Effectif de femmes de 15 à 49 ans 306 349 792 311 274 091 315 576 917 319 818 705 324 019 784 327 872 590 330 886 584 335 440 389 Nombre estimé de naissances 23 910 000 22 580 000 21 190 000 19 965 913 19 932 632 19 345 980 18 759 328 18 190 413 TGF (‰) 78,05 72,54 67,15 62,43 61,52 59,00 56,69 54,23 TFA 15-19 ans 0,017 0,020 0,013 0,014 0,007 0,007 0,009 0,005 20-24 ans 0,190 0,200 0,189 0,168 0,162 0,160 0,157 0,140 25-29 ans 0,159 0,127 0,111 0,113 0,122 0,122 0,117 0,125 30-34 ans 0,056 0,035 0,039 0,040 0,041 0,035 0,035 0,039 35-39 ans 0,016 0,010 0,009 0,007 0,009 0,007 0,009 0,008 40-44 ans 0,007 0,002 0,003 0,003 0,003 0,003 0,002 0,002 45-49 ans 0,001 0,000 0,001 0,001 0,001 0,001 0,001 0,001 ISF 2,230 1,973 1,825 1,728 1,726 1,677 1,647 1,599 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 Effectif de femmes de 15 à 49 ans 338 870 997 341 455 264 343 415 852 346 689 354 350 446 211 354 097 506 357 092 376 360 278 001 Nombre estimé de naissances 17 774 237 17 075 172 16 326 400 15 577 627 15 074 237 14 760 000 14 960 348 14 321 639 TGF (‰) 52,45 50,01 47,54 44,93 43,01 41,68 41,89 39,75 TFA 15-19 ans 0,005 0,005 0,005 0,006 0,006 0,006 0,005 0,006 20-24 ans 0,143 0,134 0,128 0,114 0,113 0,115 0,118 0,115 25-29 ans 0,121 0,121 0,120 0,120 0,110 0,105 0,110 0,102 30-34 ans 0,040 0,043 0,043 0,046 0,049 0,048 0,051 0,048 35-39 ans 0,010 0,010 0,009 0,010 0,010 0,011 0,012 0,013 40-44 ans 0,001 0,001 0,002 0,002 0,002 0,002 0,002 0,003 45-49 ans 0,000 0,001 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,001 ISF 1,604 1,574 1,535 1,489 1,448 1,441 1,490 1,442 Note : Les ISF ont été calculés à partir des TFA quinquennaux. Sources : Calculs des auteurs à partir de : China Population Statistics Yearbook (BNS, 2002 et 2003) pour 1990-2001 ; China Population Statistics Yearbook (BNS, 2003-2006) pour 2002-2005, statistiques corrigées officielles ; CPIRC (2003), statistiques non corrigées officielles ; China Statistical Yearbook (BNS, 2006a), statistiques corrigées officielles.

Taux global de fécondité (TGF), taux de fécondité par âge (TFA) et indice synthétique de fécondité (ISF) estimés à partir des nombres estimés de naissances, Chine, 1990-2005

Figure 1

Indicateurs synthétiques de fécondité (ISF) à partir de différentes sources chinoises, 1990-2005

Figure 1

Indicateurs synthétiques de fécondité (ISF) à partir de différentes sources chinoises, 1990-2005

Sources : tableaux 2, 3, 5 et 6.

36Puisque nous avons revu à la baisse les nombres de naissances publiés par le gouvernement depuis 1993, les taux de fécondité estimés à partir de ces chiffres sont eux aussi plus faibles que ceux estimés dans la section précédente et présentés dans le tableau 5. La comparaison montre que nos nouvelles estimations sont inférieures en moyenne de 12 % aux ISF corrigés officiels entre 1993 et 2005. La principale différence entre ces deux séries d’ISF est que, selon nos nouvelles estimations, la fécondité chinoise, après être tombée au-dessous du seuil de remplacement des générations au début des années 1990, n’est pas restée constante comme l’indiquent les ISF corrigés officiels mais a continué à baisser régulièrement. L’ISF a très probablement diminué jusqu’à environ 1,7 enfant par femme au milieu des années 1990, et 1,6 au tournant du siècle. Depuis, il n’est sans doute pas de l’ordre de 1,8 comme le prétendent les statistiques du gouvernement, mais plutôt voisin de 1,5.

37Ces résultats concordent tout à fait avec ceux de plusieurs autres chercheurs. Retherford et ses collaborateurs ont appliqué la méthode des enfants au foyer et la méthode de reconstitution de l’histoire génésique aux données des recensements chinois de 1990 et 2000. Leurs travaux montrent que l’ISF était probablement de l’ordre de 1,6 enfant par femme au milieu des années 1990 et encore plus faible à la fin de la décennie (Retherford et al., 2005). Scharping, après avoir soigneusement reconstitué les ISF à partir des statistiques nationales et provinciales de l’enseignement, a estimé que l’ISF chinois était déjà tombé à 1,60 ou 1,65 en 1997 (Scharping, 2005). Des travaux semblables ont été menés par Zhai et Chen (2007) et par Chen (2009). Ils ont estimé la fécondité chinoise récente à partir de données sur la fréquentation scolaire et de deux taux de scolarité : 95 % et 98 %. Si le taux de scolarité était effectivement de 98 %, comme le prétend le gouvernement, l’ISF estimé vaudrait 1,63 enfant par femme en 1997, 1,62 en 1998, 1,59 en 1999 et 1,71 en 2000. S’il était de 95 %, l’ISF serait légèrement supérieur (Chen, 2009 ; Zhai et Chen, 2007) [21]. De plus, les calculs de Zhang aboutissent à un ISF de 1,59 à 1,63 enfant par femme pour les années 1997 et 1998 (Zhang, 2004). Toutes ces conclusions sont corroborées par l’étude qu’a réalisée Cai avec la méthode de la variable-r (Cai, 2008). Les indicateurs de fécondité utilisés par le Bureau du recensement américain dans ses dernières projections de la population chinoise sont également très proches de ceux précédemment cités et de nos propres estimations (Bureau du recensement américain, 2010).

38La comparaison de nos nouvelles estimations et des taux de fécondité non corrigés déduits des enquêtes démographiques annuelles montre que sur les périodes 1994, 1996-1999 et 2001-2004, les ISF estimés valent en moyenne 1,06 fois les ISF calculés directement à partir des TFA non corrigés, et que les TGF estimés représentent environ 1,09 fois les TGF non corrigés, résultats très proches du taux de sous-enregistrement que nous avons retenu pour corriger les nombres de naissances.
Nous avons également comparé nos estimations d’ISF avec les ISF calculés directement à partir des enquêtes de fécondité récentes. Cette comparaison montre que l’écart entre ces deux séries est important entre 1994 et 1999 et relativement faible entre 2000 et 2005. Cette dernière différence peut être partiellement liée au problème de constitution de l’échantillon de l’enquête de fécondité de 2006 déjà évoqué. Ces résultats semblent aussi impliquer que la qualité des enquêtes de fécondité de 1997 et 2001 serait moindre que nous l’avions supposé dans les sections précédentes. Ceci peut s’expliquer en partie par le fait que, dans cette étude, nous n’avons utilisé les données des enquêtes de fécondité que pour calculer les taux de fécondité des années voisines de celles où ces enquêtes ont été menées. Par comparaison avec les naissances enregistrées pendant les enquêtes annuelles, le sous-enregistrement des naissances semble plus important pour les années proches du moment de l’enquête, données qui ont servi à notre analyse. La comparaison entre nos estimations d’ISF et les ISF calculés directement à partir des données du recensement de 2000 par le Bureau national chinois de statistiques et par l’East-West Centre (BNS et East-West Centre, 2007) montre qu’entre 1993 et 2000, nos estimations sont en moyenne de 14 % supérieures aux ISF calculés directement.

Conclusion

39Cette étude avait pour objectif d’améliorer l’analyse des problèmes dont souffrent les données récentes sur la fécondité chinoise et, à partir de cette analyse, reconstituer une série plus fiable et plus cohérente d’indicateurs de fécondité.

40En comparant les données de fécondité provenant de sources différentes, notre étude confirme que le sous-enregistrement des naissances est problématique dans les derniers recensements et mini-recensements, comme dans les récentes enquêtes démographiques annuelles et les enquêtes de fécondité. Cette situation n’est pas seulement due à la mise en œuvre de politiques strictes de contrôle des naissances (certains répondants peuvent ne pas avoir déclaré les naissances hors-quota), mais aussi à la forte croissance des migrations dans la période récente qui a rendu cette déclaration moins importante qu’auparavant pour les familles. Cependant, le niveau et la structure de ce sous-enregistrement ne sont pas identiques dans toutes les séries de données sur la fécondité recueillies par différents organismes gouvernementaux et diverses opérations de collecte. Le sous-enregistrement est souvent lié à l’effectif de la population enquêtée et au temps écoulé entre la naissance et la date d’enquête. Les naissances risquent d’autant plus d’être omises qu’elles surviennent peu de temps avant la collecte, et les omissions sont plus fréquentes dans les recensements que dans les enquêtes de plus petite échelle. Si le problème de la qualité des données est devenu assez général, il est important de noter que, dans certaines données sur la fécondité comme celles recueillies par les enquêtes démographiques annuelles, le sous-enregistrement n’est peut-être pas aussi grave que celui des TBN et ISF corrigés officiels.

41Le problème largement connu du sous-enregistrement des naissances a abouti aux changements suivants. Pendant les années 1980, la très bonne qualité des données des recensements et des enquêtes de fécondité en Chine était mondialement reconnue, et on utilisait ces données sans aucune correction. À partir du début des années 1990 cependant, il devient important pour le gouvernement d’ajuster les indicateurs de fécondité calculés directement à partir des données des recensements, des mini-recensements et d’autres enquêtes. Les autorités statistiques augmentaient généralement les nombres de naissances, les TBN et les ISF, et conservaient tels quels les TFA et les autres données de fécondité. Ceci entraîna des incohérences dans les statistiques de fécondité. Ces incohérences, ainsi que la confusion qu’elles provoquaient, ont été aggravées par certaines pratiques. Premièrement, les corrections apportées aux TBN et aux ISF ne semblent pas avoir été harmonisées entre elles. Deuxièmement, les nombres de naissances, les TBN et les ISF ont très probablement été surévalués par les autorités depuis le milieu des années 1990 [22]. Troisièmement, ces dernières années, l’administration statistique n’a fourni aucun détail sur les taux de sous-enregistrement dans les enquêtes démographiques annuelles, ni sur les procédures utilisées pour ajuster les niveaux de fécondité. Les autorités chinoises peuvent avoir des raisons d’agir ainsi, mais de telles pratiques ont, au moins en partie, contribué à la confusion à propos de l’évolution récente de la fécondité en Chine. Si les corrections avaient été effectuées de manière plus scientifique et si le détail en avait été rendu public, les tendances récentes de la fécondité chinoise seraient observées différemment.

42Les incohérences des statistiques de fécondité chinoises rendent nécessaire un travail de reconstitution, comme celui présenté dans cet article, pour disposer d’un ensemble d’indicateurs fiables et cohérents et aboutir à une meilleure connaissance de l’évolution récente de la fécondité en Chine. Les estimations présentées dans la section V de cet article s’appuient sur les meilleures informations disponibles sur le sous-enregistrement des naissances observé dans les enquêtes démographiques annuelles récentes et les dernières enquêtes de fécondité. Nous sommes convaincus que ces résultats, comparés aux TBN et ISF corrigés officiels comme aux indices de fécondité non corrigés, sont plus proches des niveaux réels de la fécondité et sont également cohérents les uns avec les autres. Il est encourageant de constater que nos estimations d’ISF sont très voisines de celles de plusieurs études indépendantes citées dans la section V. Bien sûr, nos résultats, comme d’autres estimations de statistiques démographiques, se fondent sur certaines hypothèses. Les indicateurs de fécondité reconstitués pourraient être biaisés ou faux si certaines hypothèses étaient trop peu réalistes ou incorrectes. Par exemple, si le sous-enregistrement des naissances s’était aggravé à partir de l’année 2000, nos résultats pourraient sous-estimer les niveaux de fécondité des années récentes. Nous sommes pleinement conscients de cette éventualité et prêts à réviser nos estimations si des données plus fiables ou des informations nouvelles venaient à notre connaissance.

43Comme indiqué par nos indices de fécondité reconstitués et d’autres résultats publiés ailleurs, la Chine a connu une forte chute de fécondité au début des années 1990. L’ISF est tombé au-dessous de 1,7 enfant par femme dans la seconde moitié de la décennie et a continué à baisser par la suite. La fécondité chinoise est inférieure au niveau de remplacement des générations depuis déjà presque deux décennies, et actuellement son ISF est nettement inférieur à celui de nombreux pays développés.

44Étant donné les effets considérables d’une fécondité et d’une dynamique démographique aussi faibles, la Chine doit examiner toutes les implications de sa fécondité déficitaire et les réponses politiques envisageables. Bien que les avis des démographes sur ces questions convergent de plus en plus, beaucoup de décideurs politiques sont toujours convaincus que l’ISF chinois est encore de l’ordre de 1,8 enfant par femme, que le contrôle des naissances reste une affaire difficile et qu’il faut donc soutenir l’actuelle politique de planning familial. Un récent document officiel sur la stratégie nationale de développement démographique affirme que la Chine maintiendra son ISF au niveau de 1,8 enfant par femme pendant les trente prochaines années ; mais il n’envisage pas l’éventualité d’une baisse de la fécondité au-dessous de ce niveau, ni la façon dont, le cas échéant, une fécondité très inférieure au seuil de remplacement des générations pourrait être relevée au niveau désiré, voire au-dessus (National Strategy on Population Development Research Group, 2007).

45Disposer de statistiques correctes sur la fécondité récente et modifier à bon escient les politiques de fécondité, particulièrement la politique de l’enfant unique mise en œuvre dans de nombreuses régions urbaines et rurales, pourraient aussi aider les responsables chinois du planning familial à sortir d’une autre situation paradoxale moins connue. Dans de nombreux documents officiels, le gouvernement chinois affirme que le programme de planning familial n’a pas cessé de s’améliorer et doit encore progresser, et que la fécondité chinoise doit être maintenue au niveau de 1,8 enfant par femme. Mais les observateurs attentifs auront remarqué que ces dernières années, la politique de fécondité préconisée par le gouvernement implique un taux de fécondité de 1,5 enfant par femme. Cela signifie que si tous les couples se conformaient aux directives gouvernementales, la fécondité chinoise serait inférieure à 1,5 enfant par femme (Gu et al., 2007). Si les politiques de fécondité étaient bien appliquées, comme le prétendent les statistiques officielles, et si le programme de planning familial était renforcé, il serait impossible au gouvernement de maintenir son objectif de 1,8 enfant par femme [23].
Du fait du volume énorme de la population chinoise, tout changement, même modeste, de son niveau de fécondité peut avoir un impact non négligeable sur la situation démographique mondiale, ce que démontrent de nombreuses projections de population effectuées par différents chercheurs et organismes. Si bien des spécialistes ont montré que l’ISF chinois réel était très nettement inférieur à 1,8 enfant par femme depuis le milieu des années 1990, la Division de la population des Nations unies, dans la variante médiane de ses dernières projections démographiques pour la Chine, a encore utilisé des ISF de 2,01 pour la période 1990-1995, 1,80 pour 1995-2000 et 1,77 pour 2000-2010 (Nations unies, 2009).
Par comparaison avec la situation d’il y a quarante ans, lorsque l’ISF était encore autour de 6 enfants par femme, la Chine fait face aujourd’hui à un défi démographique tout à fait différent, car une fécondité extrêmement basse pourrait aussi avoir un effet important sur le développement socioéconomique du pays. Cela rend nécessaire une surveillance étroite de l’évolution de la population chinoise, une meilleure connaissance de ses tendances et des politiques démographiques adaptées.

Remerciements

Cette recherche a été menée, pour l’essentiel, au début de l’année 2008. La première version de l’article a été présentée au Forum de Shangaï de 2008. Les auteurs remercient les participants du forum pour leurs précieux commentaires. Ils tiennent aussi à remercier Pfizer (par l’intermédiaire de l’Université de Cambridge) et l’Australian Research Council qui ont contribué au financement de l’étude.

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Mots-clés éditeurs : évolution de la fécondité, données de fécondité, qualité des données, Chine, fécondité inférieure au seuil de remplacement

Date de mise en ligne : 14/02/2011

https://doi.org/10.3917/popu.1003.0513

Notes

  • [1]
    Dans cet article, l’expression « indicateurs de fécondité » est utilisée pour désigner en général tous les indicateurs statistiques relatifs à la fécondité, tels que le nombre de naissances, le taux brut de natalité, le taux global de fécondité, les taux de fécondité par âge, l’indice synthétique de fécondité et certains indices de fécondité longitudinaux.
  • [2]
    Le Bureau national de la statistique chinois (BNS) publie les taux de fécondité par âge dans les résultats de ses enquêtes démographiques annuelles, mais il les utilise rarement pour le calcul direct de l’ISF et n’a pratiquement jamais présenté de commentaires publics et précis sur les valeurs récentes de l’ISF en Chine.
  • [3]
    Les ISF résultant de ces enquêtes de fécondité sont généralement inférieurs aux ISF corrigés officiels. Cependant, en 2004 et 2005, les ISF publiés par le gouvernement sont identiques à ceux fournis pas l’enquête de fécondité de 2006. Ces ISF non corrigés sont utilisés comme statistiques officielles pour la première fois depuis le milieu des années 1990. Il existe certaines controverses autour de l’enquête de fécondité de 2006, qui seront évoquées en détail dans les sections suivantes.
  • [4]
    Bien que ces données officiellement publiées n’aient pas été corrigées pour le sous-enregistrement, des taux de sous-enregistrement ont été avancés par des chercheurs pour certaines enquêtes de fécondité (voir section suivante).
  • [5]
    Bien qu’il affiche une liste de références sur son site, le Bureau du recensement américain n’explique ni comment ces indicateurs ont été calculés ni pourquoi il a décidé d’adopter ces nouvelles valeurs pour estimer l’évolution de la population chinoise.
  • [6]
    Pour estimer ces taux de sous-enregistrement, nous avons comparé l’effectif d’une même génération enregistré par les recensements et enquêtes successifs en supposant complet à chaque fois l’enregistrement par l’opération la plus récente. Quand nous avons utilisé les résultats de l’enquête intercensitaire de 2005, nous avons également fait l’hypothèse que le taux de sondage était le même dans tous les groupes d’âges et égal à 1,325 %. Si ces hypothèses ne sont pas toujours vérifiées, les taux de sous-enregistrement estimés peuvent s’en trouver affectés.
  • [7]
    En 1995, le TBN de la colonne 3 a été calculé à partir des données de l’enquête démographique par sondage à 1 % de 1995, et en 2000 à partir des données de l’échantillon à 9,5 % du recensement de 2000.
  • [8]
    L’ampleur de la correction apportée aux TBN et aux ISF est proche de celle reconnue par l’administration statistique après le mini-recensement de 1995. On soupçonnait que cette enquête avait pu, comme l’enquête de fécondité de 1992, sous-évaluer gravement le nombre de naissances. À partir de cette hypothèse et de l’évaluation de la qualité des données, les autorités ont donc corrigé à la hausse les indicateurs de fécondité : de 14,42 ‰ à 17,12 ‰ pour le TBN et de 1,46 à 1,85 enfant par femme pour l’ISF (Zhang et al., 1997, p. 46-47). Ce qui signifie que le TBN enregistré a été relevé de 18,7 % et l’ISF de 26,7 %. Plus tard, l’ISF a encore été corrigé pour être fixé à 1,78 enfant par femme (tableau 2).
  • [9]
    Selon certaines explications disponibles, le Bureau national chinois de statistiques aurait décidé de gonfler à ce point les résultats des enquêtes annuelles en partie pour contrebalancer ses sous-estimations précédentes. De plus, cette pratique serait également une réponse aux forts soupçons des décideurs politiques et des démographes, qui croyaient le sous-enregistrement plus grave que celui constaté (Zhang, 1995 ; Yu et Xie, 2000). On pourrait retenir aussi l’hypothèse de Qiao, selon lequel le Bureau national de statistiques a peut-être adopté la borne supérieure de l’intervalle de variation comme taux de sous-enregistrement pour effectuer ses ajustements (Qiao, 2005 ; Jia et Sai, 1995).
  • [10]
    Dans son article, Guo a systématiquement comparé les effectifs de population fournis par les recensements de 1990 et 2000, et a calculé la répartition de la population par groupe d’âges en milieu d’année à partir des données du recensement de 2000. Il a montré que les différences d’effectifs des mêmes groupes d’âges entre les deux recensements sont moins importantes que celles obtenues par d’autres chercheurs avec d’autres méthodes d’estimation (Guo, 2004). Dans notre étude, nous avons utilisé le rapport calculé par Guo entre la population de 2000 et celle de 1990 (il n’a pas fourni l’effectif au 1er juillet 2000 dans son article) et la structure par âge de 1990 pour calculer la population féminine au milieu de l’année 2000.
  • [11]
    Ces hypothèses sont étayées par des travaux sur l’évolution de la mortalité en Chine et en Asie de l’Est (Zhao et Kinfu, 2005 ; Zhao, 2007).
  • [12]
    Du fait que ces enquêtes de fécondité n’enregistraient que les femmes âgées de 15 à 49 ans au moment de l’enquête, les nombres de naissances survenues chez des femmes de 42 ans ou plus manquent pour certaines années. Bien que ces nombres soient généralement très faibles et qu’ils n’aient qu’un impact négligeable sur nos calculs, nous les avons estimés à partir des nombres moyens de naissances survenues chez des mères du même âge pendant les années suivantes.
  • [13]
    Pour les années où les données des enquêtes annuelles ne sont pas disponibles, nous avons pris comme estimation la moyenne des distributions des années précédente et suivante.
  • [14]
    Le calcul des TFA impliquant souvent des effectifs plus réduits de femmes et de naissances, ces résultats ont davantage tendance à être affectés par des variations aléatoires. Ceci explique en partie pourquoi les différences observées sur les TFA sont un peu plus importantes que celles constatées sur les ISF.
  • [15]
    Nous avons effectué cette comparaison en supposant que le taux de sondage était identique pour tous les groupes d’âges dans les deux enquêtes intercensitaires et que l’échantillon avait effectivement la taille annoncée.
  • [16]
    Pour comparer nos estimations de taux de fécondité avec les taux officiels non corrigés présentés dans les tableaux 5 et 6, nous avons généralement utilisé le rapport taux officiel/taux estimé.
  • [17]
    En règle générale, l’ISF de rang 1 ne devrait pas être supérieur à 1 enfant par femme, mais cela peut se produire en cas de modification de l’âge à la première naissance. Si l’ISF de rang 1 était de 1 enfant par femme au lieu de 1,32, alors l’ISF pour l’ensemble des naissances serait de 1,56 au lieu de 1,88.
  • [18]
    Bien que la différence entre les populations échantillonnées de ces diverses opérations indique une difficulté majeure dans l’enquête de fécondité de 2006, les publications officielles ne donnent aucune explication sur la manière dont cela a pu se produire (NPFPC, 2007 ; Zhang et al., 2008).
  • [19]
    Ce sont le Cambodge, l’Indonésie, le Japon, Macao, la Mongolie, les Philippines, la Corée du Sud, le Sri Lanka, Taiwan, la Thaïlande et le Vietnam.
  • [20]
    Le nombre de naissances de 2006 a été estimé par la procédure déjà décrite.
  • [21]
    D’après certains chercheurs, l’utilisation des statistiques de fréquentation scolaire pour estimer le niveau de fécondité pourrait montrer des limites, car ces statistiques ont pu être également surestimées. Pour une discussion détaillée, voir Cai (2009).
  • [22]
    Pour notre recherche, nous avons également supposé que dans le mini-recensement chinois de 2005, le sous-enregistrement des naissances atteignait le niveau le plus élevé parmi ceux relevés par Goodkind (2008) dans divers pays asiatiques (16 % des enfants de 0-4 ans et 8 % des enfants de 5-9 ans). À partir de cette hypothèse et des résultats du mini-recensement de 2005, nous avons estimé les taux de fécondité de la période étudiée. Même sous une hypothèse aussi forte, les résultats montrent que les ISF estimés sont encore inférieurs aux ISF corrigés officiels pour la plupart des années étudiées.
  • [23]
    Selon la Commission nationale de la population et du planning familial (National Population and Family Planning Commission, NPFPC), le taux national de fécondité planifiée (mesuré annuellement par la proportion de naissances survenues dans le cadre du plan ou dans les limites des quotas officiels parmi le total des naissances) était de l’ordre de 94 % entre 2001 et 2005 (Division of Development and Planning of the NPFPC, China’s Population and Development Research Centre, 2008). En supposant que ces chiffres correspondent à la réalité et que la politique de fécondité visant 1,5 enfant par femme soit parfaitement appliquée, l’ISF réel devrait être de l’ordre de 1,6.

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