Notes
-
[1]
Mauger (G.), L’accès à la vie d’artiste : sélection et consécrations artistiques, Bellecombe-en-Bauges, Le Croquant, 2006.
-
[2]
Le processus d’identification désigne le mécanisme selon lequel une entité extérieure attribue une identité à un individu ou groupe d’individus. Avanza (M.), Laferté (G.), « Dépasser la “construction des identités”. Identification, image sociale, appartenance », Genèses, 61, 2005.
-
[3]
Hodak-Druel (C.), Du théâtre équestre au cirque : une entreprise si éminemment nationale. Commercialisation des loisirs, diffusion des savoirs, théâtralisation de l’histoire en France et en Angleterre (1760-1860), thèse pour le doctorat de sciences sociales, EHESS, Paris, 2004.
-
[4]
Salaméro (É.), Haschar-Noé (N.), « Les frontières entre le sport et l’art à l’épreuve des écoles professionnelles de cirque », Staps, 82, 2008.
-
[5]
Brandl (É.), « Ce que l’institutionnalisation fait à la sociologie des arts et de la culture. L’exemple des musiques amplifiées en région », in Girel (S.), dir., Sociologie des arts et de la culture. Un état de la recherche, Paris, L’Harmattan, 2006. Faure (S.), « Institutionnalisation de la danse Hip-Hop et récits autobiographiques des artistes chorégraphes », Genèses, 55, 2004. Faure (S.), « Les structures du champ chorégraphique français », Actes de la recherche en sciences sociales, 175, 2008. Maigret (É.), « La reconnaissance en demi-teinte de la bande dessinée », Réseaux, 67, 1994. Polo (J.-F.), « La politique cinématographique de Jack Lang. De la réhabilitation des industries culturelles à la proclamation de l’exception culturelle », Politix, 61, 2003.
-
[6]
Hénaut (L.), « La construction des groupes professionnels : le cas des restaurateurs d’œuvres d’art en France et aux États-Unis », Formation Emploi, 110, 2010.
-
[7]
Garcia (M.-C.), Artistes de cirque contemporain, Paris, L’Harmattan, 2011.
-
[8]
Lascoumes (P.), Le Galès (P.), Gouverner par les instruments, Paris, Presses de Sciences Po, 2004.
-
[9]
Gilbert (C.), Henry (E.), « La définition des problèmes publics : entre publicité et discrétion », Revue française de sociologie, 53, 2012.
-
[10]
Girard (A.), « Les politiques culturelles, d’André Malraux à Jack Lang : ruptures et continuités, histoire d’une modernisation », Hermès, 20, 1996. Martin (L.), « La politique culturelle de la France depuis 1945 », in Poirrier (P.), dir., Pour une histoire des politiques culturelles dans le monde, 1954-2011, Paris, La Documentation française, 2011.
-
[11]
Dubois (V.), « L’action de l’État, produit et enjeu des rapports entre espaces sociaux », Actes de la recherche en sciences sociales, 201-202, 2014.
-
[12]
Barré-Meinzer (S.), Le cirque classique, un spectacle actuel, Paris, L’Harmattan, 2004.
-
[13]
Salaméro (É.), Devenir artiste de cirque aujourd’hui : espace des écoles et socialisation professionnelle, thèse de doctorat STAPS, Université Toulouse III, 2009.
-
[14]
42 entretiens avaient été réalisés dans le cadre du doctorat ; 105 dans le cadre du programme ANR « Sorties de scène » (n° 13-JSH1-0010-0, Julhe, Salaméro, dir.), dont 36 auprès de responsables nationaux et locaux et représentants professionnels et 31 auprès d’artistes de cirque contemporain. En revanche, malgré nos tentatives, nous ne sommes pas parvenus à interroger des représentants du genre classique.
-
[15]
Les notes de représentants ministériels, les rapports d’experts et les documents de correspondance entre professionnels du cirque et les premiers, sont issus des fonds archivistiques suivants : AN Pierrefitte-Sur-Seine, Politique d’aide au cirque 1978-1987 (20040042/026) ; Direction théâtre, spectacles 1961-1998 (20040042/026) ; Bureau professions du spectacle 1970-1979, Bureau spectacles 1944-1987, 1980- (19900429/28). Leurs auteurs, dates de rédaction, numéros de pages n’étaient pas toujours mentionnés. Ils apparaîtront tels quels au cours de l’article.
-
[16]
Gilbert (C.), Henry (E.), « La définition des problèmes… », art. cit.
-
[17]
Moulin (R.), « De l’artisan au professionnel : l’artiste », Sociologie du travail, 4, 1985.
-
[18]
Barré-Meinzer (S.), Le cirque classique…, op. cit.
-
[19]
Entre 1945 et 1980, une quinzaine de « grands » cirques ferment en France. Si l’administration culturelle répertorie les « grands cirques » dont le nombre constitue pour elle un signe de vitalité et d’équilibre du secteur, elle semble ne pas avoir une idée précise des autres cirques qui sillonnent la France : une trentaine selon certaines notes.
-
[20]
Angrémy (J.-P.), Situation du cirque en France, Note pour Monsieur le directeur du Cabinet, ministère de la Culture, 4 juin 1981, p. 4.
-
[21]
Bernard (A.), Lettre adressée au ministre de l’Économie et des Finances, ministère des Affaires culturelles, 8 juillet 1966.
-
[22]
J. Février indique qu’en cinq ans, « beaucoup de promesses ont été faites à cette profession et qu’elles n’ont jamais débouché sur rien de concret ». Situation du cirque en France, ministère de la Culture, 1979, p. 13.
-
[23]
Les demandes de l’Association française du cirque, 1978, p. 1. Cette association, créée cette même année, regroupe des « grands » établissements toujours en activité tels que Amar, Jean Richard, le cirque Moralles et Bouglione. Compte rendu de la réunion interministérielle du 18 décembre 1979, Secrétariat général du Gouvernement, 20 décembre 1978, p. 2 (document non signé).
-
[24]
Giscard d’Estaing (V.), Lettre du président de la République au ministre de la Culture, 8 août 1978.
-
[25]
Par exemple, M. Jean Desanlis, député du Loir-et-Cher, centriste inscrit au groupe des Réformateurs, alerte M. le ministre de la Culture sur « les difficultés financières » du cirque et demande la mise en place de « mesures […] pour que cette forme de spectacle continue à être présentée ». Débats à l’Assemblée nationale du 16 septembre 1978, Journal officiel, n° 6047. Aucune donnée ne permet de livrer une hypothèse interprétative solide concernant le soutien de ce député aux directeurs de cirque.
-
[26]
Forette (D.), Les arts de la piste : une activité fragile entre tradition et innovation. Avis et rapports du Conseil Économique et Social, Paris, Les Éditions des Journaux officiels, 1998 ; Hénaut (L.), « La construction des groupes professionnels… », art. cit.
-
[27]
Lettre de la sous-direction du Théâtre au ministre de la Culture sur la situation des cirques, ministère de la Culture, 12 juillet 1978 (document non signé).
-
[28]
Rosemberg (J.), Arts du cirque. Esthétiques et évaluation, Paris, L’Harmattan, 2004.
-
[29]
Février (J.), « Situation du cirque », art. cit., p. 15.
-
[30]
Faure (S.), « Les structures du champ chorégraphique… », art. cit.
-
[31]
Germain-Thomas (P.), « La politique de la danse contemporaine en France : une construction conjointe des pouvoirs publics et des lieux de programmation », Quaderni, 83, 2014.
-
[32]
Polo (J.-F.), « La politique cinématographique… », art. cit.
-
[33]
Cela est encore le cas dans les années 1990. Guy (J.-M.), « La fréquentation et l’image du cirque », Développement culturel, 100, 1993.
-
[34]
Exonération du droit de timbre de quittance, le « 1 % à la construction », etc. Secrétariat général du Gouvernement, « Compte rendu de la réunion… », art. cit., p. 2.
-
[35]
Ministère de la Culture et de la Communication, Hommage à Jean-Philippe Lecat, ministre de la Culture et de la Communication (avril 1978-1981), actes de la table ronde organisée le 22 novembre 2011, Paris, Comité d’histoire du ministère de la Culture et de la Communication, 2013.
-
[36]
Ces aides seront activées après plusieurs mois de négociation, notamment auprès du ministère du Budget. Février (J.), Lettre adressée à Mme Cayla du 18 décembre 1979, ministère de la Culture.
-
[37]
Secrétariat général du Gouvernement, « Compte rendu de la réunion… », art. cit., p. 2.
-
[38]
Forette (D.), « Les arts de la piste », art. cit.
-
[39]
L’ANDAC constituait aussi un « lieu d’échange » pour la profession et de « connaissance mutuelle ». Joinet (L.), Présentation du CNP, 7 novembre 1996.
-
[40]
Février (J.), « Situation du cirque », art. cit., p. 15. Au sein des administrations centrales ou déconcentrées du ministère de la Culture, le cirque est aujourd’hui encore majoritairement affilié au service théâtre.
-
[41]
Février (J.), « Situation du cirque », art. cit., p. 13.
-
[42]
Forette (D.), « Les arts de la piste », art. cit.
-
[43]
Brajot (G.), Note pour Monsieur le ministre sur la situation des cirques, direction du Théâtre, des Maisons de la culture et des lettres, 12 juillet 1978, p. 1.
-
[44]
Plan de redressement du cirque, 1979, p. 3 (document non signé).
-
[45]
Moulin (R.), L’artiste, l’institution, le marché, Paris, Flammarion, 1992.
-
[46]
Projet de constitution d’un fonds de modernisation du cirque, p. 2 (document non signé et non daté).
-
[47]
Février (J.), « Situation du cirque », art. cit., p. 16.
-
[48]
En 1979, le subventionnement de l’État est de deux millions de francs, d’un montant a priori équivalent à celui des cotisations professionnelles.
-
[49]
Rauch (M.-A). « Les hussards du Ministère de la Culture ». Article non daté, accessible sur le site : http://www.culturecommunication.gouv.fr
-
[50]
Faure (S.), « Institutionnalisation de la danse Hip-Hop… », art. cit.
-
[51]
Moulin (R.), L’artiste, l’institution…, op. cit.
-
[52]
Bilan des activités du ministère de la Culture et de la Communication dans le domaine du cirque – août 1978-avril 1979, ministère de la Culture (document non signé).
-
[53]
Note pour le président sur la situation des entreprises de cirque, ministère de l’Économie et des Finances, 14 mars 1979, p. 2 (document non signé).
-
[54]
À partir de 1981, ce processus se renforcera. De nombreux rapports et une régulation des arts et de la culture par la loi caractérisent la politique culturelle menée. Martin (L.), « La politique culturelle… », art. cit.
-
[55]
C. Gilbert et E. Henry ont travaillé sur les effets du déplacement du traitement des problèmes dans les arènes confinées, « La définition des problèmes… », art. cit.
-
[56]
Février (J.), « Lettre adressée à Mme Cayla », art. cit., p. 4.
-
[57]
Ibid., p. 2.
-
[58]
Ibid., p. 4.
-
[59]
Germain-Thomas (P.), « La politique de la danse… », art. cit.
-
[60]
Angrémy (J.-P.), « Situation du cirque… », art. cit., p. 4.
-
[61]
Girard (A.), « Les politiques culturelles… », art. cit.
-
[62]
J.-P. Lecat indique que « […] le cirque souffre souvent de certaines réticences de la part des administrations locales, réticences liées à une assimilation hâtive avec les milieux forains et nomades ». Lettre sur la politique du Gouvernement en faveur du cirque adressée à Messieurs les directeurs régionaux et correspondants permanents des affaires culturelles, ministère de la Culture, 19 mars 1979, p. 3.
-
[63]
Forette (D.), « Les arts de la piste », art. cit. Groux (G.), « Les syndicalismes catégoriels : éléments d’analyse d’une catégorie », Terrain et Travaux, 25, 2014.
-
[64]
Abirached (R.), note de la direction du Théâtre et des spectacles, 3 juillet 1986, ministère de la Culture (document non paginé).
-
[65]
Lettre du Syndicat professionnel du cirque français, 17 août 1985 (document non signé).
-
[66]
Notes du ministère de la Culture du 14 novembre 1984 (document non signé et non paginé).
-
[67]
Polo (J.-F.), « La politique cinématographique… », art. cit.
-
[68]
Vincent (G.) « Enseignement du français et système scolaire », Revue française de sociologie, 313, 1968.
-
[69]
Maigret (É.), « La reconnaissance en demi-teinte… », art. cit.
-
[70]
Lascoumes (P.), « Rendre gouvernable : de la “traduction” au “transcodage”. L’analyse des processus de changement dans les réseaux d’action publique », in CURAPP, dir., La gouvernabilité, Paris, Presses universitaires de France, 1996.
-
[71]
Germain-Thomas (P.), « La politique de la danse… », art. cit.
-
[72]
Février (J.), « Situation du cirque », art. cit.
-
[73]
Urfalino (P.), L’invention de la politique culturelle, Paris, Hachette Littérature, 2011.
-
[74]
Girard (A.), « Les politiques culturelles… », art. cit.
-
[75]
Polo (J.-F.), « La politique cinématographique… », art. cit.
-
[76]
Faure (S.), « Production et diffusion des œuvres chorégraphiques : les effets de l’institutionnalisation de la danse », Sociologie de l’art, Opus 9 et 10, 2006.
-
[77]
Dubois (V.), La politique culturelle. Genèse d’une catégorie d’intervention publique, Paris, Belin, 1999 ; Maleval (M.), L’émergence du nouveau cirque. 1968-1998, Paris, L’Harmattan, 2010.
-
[78]
Note sur la situation des cirques français, bureau des Spectacles, 18 avril 1983, p. 4 (document non signé).
-
[79]
Voir le JO du 13 janvier 1986.
-
[80]
Instauré comme « modèle » par le ministère de la Culture mais jalousé par la profession classique dénonçant une sorte de concurrence déloyale, ses activités comme « cirque national » cessent en 1987.
-
[81]
Abirached (R.), Lettre du 30 septembre 1983, direction du Théâtre et des Spectacles, p. 5.
-
[82]
Bureau des Spectacles, « Note sur la situation des cirques… », art. cit, p. 4.
-
[83]
Faure (S.), « Production et diffusion… », art. cit.
-
[84]
Horslesmurs, Chiffres clés des arts du cirque et des arts de la rue, 2010.
-
[85]
Membre de la DGCA, entretien de novembre 2014.
-
[86]
Proust (S.), « Une nouvelle figure de l’artiste : le metteur en scène de théâtre », Sociologie du travail, 43 (4), 2001.
-
[87]
Faure (S.), « Institutionnalisation de la danse Hip-Hop… », art. cit.
-
[88]
HorsLesMurs, en charge du soutien aux arts de la rue, prend également en charge le cirque contemporain suite aux difficultés de l’ANDAC. En 2016, sa fusion avec le centre national du Théâtre donne lieu à Artcena.
-
[89]
Politique du ministère de la Culture en faveur du cirque, communiqué de presse du 13 janvier 1986, p. 2.
-
[90]
Dubois (V.), La politique culturelle…, op. cit.
-
[91]
Dubois (V.), « L’action de l’État… », art. cit.
-
[92]
Voir les propos de B. Lefranc, socialiste et fonctionnaire des Postes Télégraphe(s) Téléphone(s), pointant la « quasi-absence des aides de l’État en faveur des quinze derniers cirques existant en France ». Séance à l’Assemblée nationale du 17 décembre 1984.
-
[93]
Lettre des directeurs de cirque de France à M. le ministre de la Culture, 31 octobre 1986, p. 1.
-
[94]
Faure (S.), « Institutionnalisation de la danse Hip-Hop… », art. cit.
-
[95]
Faure (S.), « Production et diffusion… », art. cit.
-
[96]
Bourdieu (P.), Les règles de l’art : genèse et structure du champ littéraire, Paris, Seuil, 1992.
-
[97]
Lévy (F.), « À nouveaux cirques, nouveaux publics ? », in Guy (J.-M.), dir., Avant-garde : cirque ! Les arts de la piste en révolution, Paris, Autrement, coll. « Mutations », 2001.
-
[98]
Guy (J.-M.), « La fréquentation… », art. cit.
-
[99]
Lettre des représentants du cirque classique sur le fonctionnement de l’ANDAC, 22 mars 1992, p. 8.
-
[100]
Initialement, les aides envers le cirque étaient indifférenciées. Voir la séance à l’Assemblée nationale du 2 octobre 1974 au sujet du cirque Bonjour (un des premiers nouveaux cirques) : « […] le cirque Bonjour en bénéficiera [d’une solution] au même titre que les autres entreprises de cirque [classique] ».
-
[101]
Politique du cirque en France, deuxième réunion de réflexion pour la mise en place d’une nouvelle politique du cirque en 1998, ministère de la Culture, 4 septembre 1997.
-
[102]
Gilbert (C.), Henry (E.), « La définition des problèmes… », art. cit.
-
[103]
Faure (S.), « Institutionnalisation de la danse Hip-Hop… », art. cit.
-
[104]
Le cinéma par exemple. Polo (J.-F.), « La politique cinématographique… », art. cit.
-
[105]
Bourdieu (P.), Les règles de l’art…, op. cit.
-
[106]
Il a été à l’origine, en 1974, du Festival international du cirque de Monte-Carlo, toujours en activité.
-
[107]
Maigret (É.), « La reconnaissance en demi-teinte… », art. cit.
-
[108]
Bourdieu (P.), La distinction. Critique sociale du jugement, Paris, Minuit, 1979 ; Levine (L.-W.), Culture d’en haut, culture d’en bas. L’émergence des hiérarchies culturelles aux États-Unis, Paris, La Découverte, 2010.
-
[109]
Heinich (N.), Le triple jeu de l’art contemporain, Paris, Minuit, 1998.
-
[110]
Urfalino (P.), L’invention de la politique, op. cit.
1Le cirque français a longtemps fonctionné sur le modèle des métiers artisanaux. Aujourd’hui, une partie du milieu est régie par les normes de l’art contemporain, valorisant processus de création et authenticité des artistes [1]. Cirques classique et nouveau se différencient en effet selon des positionnements esthétiques, éthiques et économiques distincts. Le premier, fondé historiquement sur un noyau familial, propose un spectacle composé d’une diversité de numéros indépendants les uns des autres, le plus souvent sous chapiteau. Le nouveau cirque, également appelé cirque contemporain, utilise quant à lui des techniques corporelles au service d’un propos général et correspond davantage aux attentes des établissements culturels soutenus par les financements publics. Cette identification artistique du nouveau cirque est récente et résulte de transformations engagées au cours des années 1970 [2].
2L’analyse sociohistorique du cirque, depuis sa naissance au XVIIIe siècle en Angleterre, a déjà montré que sa définition a fait l’objet de nombreuses luttes entre promoteurs de ce spectacle [3]. De même, depuis la scolarisation de l’apprentissage du métier d’artiste de cirque en France à partir des années 1970, les programmes de formation ainsi que le recrutement des apprentis artistes n’ont eu de cesse de questionner les frontières entre l’art et le sport [4]. Cet article se propose d’éclairer la manière dont l’institutionnalisation du cirque par le ministère de la Culture, a entériné, à la fin du XXe siècle, une double catégorisation de cette pratique sociale et conduit à sa segmentation en deux marchés distincts et hiérarchisés : art (contemporain) pour le nouveau cirque et divertissement pour le cirque classique.
3Des travaux passés ont déjà porté sur les effets de l’institutionnalisation de pratiques artistiques [5], mais peu ont saisi la dynamique de ce processus. Concentrée sur une configuration historique où s’entremêlent les processus d’institutionnalisation, de reconnaissance et de professionnalisation du cirque, l’analyse accorde ici une attention particulière aux acteurs clés de cette conjoncture, à leurs positionnements réciproques et à leurs rapports de force. Si les dynamiques professionnelles s’appuient sur des mouvements internes, sur la période retenue pour l’analyse, marquée par une « crise » du cirque classique et son recours aux pouvoirs publics, le rôle de l’État français apparaît saillant. En France, il constitue par ailleurs un acteur important de la régulation des groupes professionnels [6]. Interroger les modes d’intervention étatique sur le cirque, forme culturelle parmi les moins institutionnalisées [7], apparaît particulièrement pertinent.
4En 1978, le président Valéry Giscard d’Estaing décide de lancer une politique de « sauvetage » du cirque classique qui fait suite à plusieurs demandes de directeurs d’entreprise et s’adresse pour cela à son ministre de la Culture. Ce positionnement présidentiel inédit vis-à-vis du cirque conduit à interroger précisément la manière dont les difficultés repérées par ces professionnels ont été traduites en action publique et en instruments spécifiques [8]. Autrement dit, il s’agit d’une part, d’analyser la manière dont l’institutionnalisation du cirque par le ministère de la Culture a été justifiée, conduite, ajustée, etc., et d’autre part, de cerner ses effets organisationnels et symboliques sur le groupe professionnel que constituent les entrepreneurs du cirque.
5L’approche choisie nécessite de procéder à l’observation d’interactions contextualisées : échanges entre acteurs « politico-administratifs [9] », experts et professionnels du cirque, sur une période allant de la fin des années 1970 à l’après-ministère Jack Lang (post 1993). Cette échelle temporelle retrace une partie de la trajectoire de la politique étatique du cirque ainsi que ses effets sur les dynamiques professionnelles et se justifie aussi au regard des caractéristiques de la politique culturelle publique plus générale qui y est menée. En effet, selon plusieurs observateurs, celle-ci se caractérise par une continuité vis-à-vis des orientations définies par les ministres André Malraux et Jacques Duhamel, en dépit des alternances et de quelques « sauts quantitatifs [10] ». Si les processus conduisant à l’action publique dans les sociétés contemporaines sont en règle générale complexes [11], compte tenu de la conjoncture retenue, des matériaux disponibles ainsi que des caractéristiques du groupe professionnel observé, l’analyse se focalisera sur un nombre limité d’acteurs. En effet, des entretiens auprès des acteurs directement impliqués dans les processus décrits, qu’ils soient des personnalités du cirque ou des responsables en poste au ministère de la Culture, n’ont pu être réalisés. De plus, la profession a longtemps privilégié la transmission orale et l’histoire française du cirque est encore peu documentée [12]. Des données issues d’une thèse [13], des entretiens menés auprès de responsables nationaux et de représentants professionnels actuels du genre contemporain [14], ainsi qu’un travail d’archives portant sur la politique culturelle menée par l’État en matière de cirque depuis les années 1960 [15], permettront d’étayer nos propos. Ces divers matériaux rendent compte des arguments et cadres interprétatifs des acteurs observés, de l’espace de production et des luttes définitionnelles autour de la politique publique à conduire pour le cirque [16]. Ils apportent ainsi un double éclairage de la définition de l’action publique menée en matière de cirque : les « coulisses » peu soumises à l’attention publique (notes et correspondances) et les positionnements publics des acteurs (communiqués de presse, journaux officiels, etc.). Trois temps organisent l’analyse : l’inauguration, par Valéry Giscard d’Estaing, président de la République, d’une politique publique « globale » en matière de cirque ; sa réorientation et le renforcement de l’institutionnalisation du cirque par le ministère de la Culture ; l’application, début des années 1980, d’une politique de démocratie culturelle favorisant l’avènement de nouvelles hiérarchies internes au cirque.
L’élaboration d’une politique publique « globale » du cirque : reconnaissance patrimoniale et exigence de professionnalisation
6Issu des spectacles équestres nés en Angleterre au XVIIIe siècle, le cirque classique constituait l’unique forme de cirque en France jusqu’aux années 1970. En marge du modèle « artistique » dominant depuis le début du XIXe siècle [17], les « artisans » du cirque classique s’organisent de manière spécifique : formation sur le tas, structuration en entreprises familiales et commerciales, recettes sur billetterie, division du travail entre classes d’âge [18], etc. Compte tenu de leurs activités itinérantes, les directeurs de cirque s’adressent à une pluralité de collectivités locales et d’instances ministérielles. Mais dès les années 1960, les entreprises du secteur connaissent d’importantes difficultés, à la fois pour des raisons « structurelles » (importance des besoins en main-d’œuvre et des frais de déplacement, etc.) et « conjoncturelles » (désintérêt du public, concurrence d’autres formes de divertissement, etc.), conduisant à une dégradation de leur situation, voire à leur fermeture [19]. Cette conjoncture particulière implique, pour les directeurs d’entreprise en premier lieu puis pour les représentants de l’État, un recours inédit aux aides publiques, comme l’indique cette note rétrospective datant de 1981 :
« […] le très grand succès qu’a connu le cirque au XIXe siècle n’a jamais justifié une intervention de l’État en faveur de cet art, considéré comme mineur. Jusqu’à une date récente et notamment dans la période 1920-1960, les activités du cirque ont d’ailleurs été suffisamment florissantes pour que le problème ne se pose pas. Mais à partir de 1970, la profession s’est trouvée en présence d’un contexte beaucoup plus défavorable [20]. »
8Des directeurs de « grands » cirques, regroupés sous le Syndicat national des directeurs de cirques français, adressent dans le courant des années 1960, un rapport au ministère des Affaires culturelles sur leurs situations économique et financière. Alain Bernard, directeur de cabinet du ministre des Affaires culturelles, indique « que des efforts en vue de leur sauvegarde devraient être entrepris sur un plan global [21] ». Le 10 janvier 1975, une réunion regroupe Guy Brajot, directeur du Théâtre, des Maisons de la culture et des lettres, Jacques Février, chef du bureau des Professions du spectacle et cinq directeurs de cirques (MM. Jean Richard, Joseph et Firmin Bouglione, Gruss et Mme Sabine Rancy). Y sont examinés les problèmes de fiscalité des cirques, de coûts liés aux moyens de transport automobile, d’emplacement dans les villes, de sécurité, de charges sociales, de promotion du cirque par l’État, de concurrence des troupes étrangères et le cas des écoles de cirque, récemment créées. En 1978, l’absence de réponses concrètes de la part des autorités publiques [22] conduit l’Association française du cirque à interpeller de nouveau le ministère de la Culture. Elle lui adresse plusieurs « demandes », parmi lesquelles des allégements fiscaux, la mise à disposition d’un emplacement permanent à Paris, la « reconnaissance de la vocation culturelle du spectacle de cirque [23] », etc. Affichée en tête des revendications, cette dernière permet de justifier le recours aux aides du ministère de la Culture. Toutefois, les préoccupations de ces directeurs concernent surtout des mesures réglementaires et fiscales offrant une meilleure rentabilité à leurs entreprises. Elles aboutissent au lancement d’une politique de « sauvetage » du cirque par le président V. Giscard d’Estaing. Celui-ci interpelle en effet son ministre de la Culture, Jean-Philippe Lecat, et le somme d’apporter des réponses concrètes à la « crise » du cirque :
« […] Le spectacle de cirque fait partie de notre patrimoine culturel. Il est à l’origine de plusieurs formes de l’expression théâtrale. […] Cette activité traverse actuellement une période difficile, due notamment à son mode de vie itinérant. […] En liaison avec les ministres de l’Intérieur, de l’Économie et du Budget, je vous demande de proposer au Gouvernement, dans les meilleurs délais, des mesures réglementaires et financières permettant aux entreprises de spectacle de cirque de surmonter ces difficultés et d’assurer la poursuite de leur art [24]. »
10La réaction du président V. Giscard d’Estaing atteste d’abord de la capacité de mobilisation de (grands) directeurs de cirque, regroupés pour l’occasion et appuyés par certains parlementaires [25], en vue d’imposer aux pouvoirs publics la prise en charge de leurs problématiques. Les données récoltées tendent à montrer que seuls les grands employeurs du cirque constituent, du moins dans un premier temps, des interlocuteurs pour le ministère de la Culture. Ils composent également les syndicats du cirque et jouent ainsi un rôle important sur la trajectoire de leur groupe professionnel [26]. Un courrier de la sous-direction du Théâtre au ministre de la Culture datant de 1978, mentionne par exemple que « […] la profession est représentée par un groupe étroit d’entreprises importantes (actuellement le groupe Bouglione, le groupe Jean Richard, Sabine Rancy) [27] ». Par ailleurs, le fait que V. Giscard d’Estaing s’adresse à son ministre de la Culture, contribue au lancement de ce que certains identifient comme la première politique culturelle en matière de cirque [28]. Au-delà d’aides économiques et fiscales [29], elle est marquée par la reconnaissance culturelle et « patrimoniale » du cirque (cf. supra), jusque-là considéré comme un art « mineur », ce que confirme rétrospectivement un membre de la direction générale de la Création artistique (DGCA) : « […] reconnaissance [culturelle] tout simplement du cirque ou des arts du cirque, donc domaine rentrant dans le domaine traité par le ministère de la Culture, c’était pas le cas avant » (Entretien de novembre 2014).
11Cette intervention directe du président V. Giscard d’Estaing ainsi que la reconnaissance culturelle tardive du cirque en comparaison avec d’autres formes artistiques, interrogent. La danse, reconnue et encadrée par le pouvoir de longue date [30], bénéficie d’un soutien du ministère des Affaires culturelles dès les années 1950 [31], tout comme le cinéma [32]. Le fait que, dans les années 1970, le cirque soit menacé alors qu’il constitue l’une des premières sorties culturelles des Français au cours de leur vie [33] constitue sans doute une explication. Quelle que soit sa temporalité, la reconnaissance officielle d’une pratique sociale produit des effets sur son fonctionnement et son administration. Le « plan de redressement du cirque » qui succède à l’intervention présidentielle préconise que le cirque doit bénéficier d’« avantages ou d’aménagements fiscaux », à l’instar d’autres disciplines artistiques [34]. Les actions conduites par J.-P. Lecat entre 1978 et 1981 au sein du ministère de la Culture, souvent résumées sous le vocable de « politique du patrimoine », intègrent le cirque, les marionnettes, ou encore la chanson. Il élargit déjà le domaine d’action du ministère [35], bien avant que J. Lang lance une démarche de reconnaissance artistique de pratiques culturelles diverses. Cette première politique publique globale de cirque dessine par conséquent des orientations qui seront renforcées par les gouvernements suivants.
12Suite à cette intervention du président de la République, des réunions interministérielles se succèdent et conduisent à la définition d’un « plan de redressement du cirque ». Parallèlement, un premier rapport « prédiagnostic » (Situation du cirque en France, 1979), est élaboré par le ministère de la Culture. Si la politique envers le cirque est mise en œuvre par ce dernier, elle est décidée par un groupe de travail interministériel (Économie, Budget, Culture et Communication, Environnement et cadre de vie, Intérieur, Travail et participation) piloté par le cabinet du Premier ministre, puis validée par le président de la République. Ce processus décisionnel infléchit les propositions faites par certains membres du ministère de la Culture (cf. infra) et aboutit à la combinaison de différentes formes de soutien envers le cirque. Parmi elles sont prévus des mesures fiscales, l’octroi d’aides financières « exceptionnelles » directes aux entreprises en difficulté [36], des actions en faveur de l’enseignement et de « l’image du cirque » et la création d’un « relais obligatoire pour toutes les actions en faveur du cirque » sous la forme d’un fonds de modernisation. Inspiré de celui mis en place pour le théâtre privé [37], il se développe sous la forme de l’association pour la Modernisation du cirque (APMC, cf. tableau 1).
Les institutions de soutien spécifiques au cirque (1979-1996)
Nom | Dates de création et de fermeture | Principales actions |
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APMC : Association pour la modernisation du cirque | 1979-1982 |
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APEAC : Association pour l’enseignement des arts du cirque | 1980-1982 |
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ASPEC : Association pour le soutien, la promotion et l’Enseignement du cirque | 1982-1987 |
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ANDAC [39] : Association nationale pour le développement des arts du cirque | 1988-1994 |
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HLM : Horslesmurs (devenu Artcena) | 1990-2016 |
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CNP : Conseil national des arts de la piste (présidé par Louis Joinet en 1996) | 1996- |
Les institutions de soutien spécifiques au cirque (1979-1996)
13L’APMC initie la restructuration du cirque mais aussi son anoblissement. En effet, le recours au modèle théâtral permet de mettre à distance la catégorie « cabarets, music-halls, etc. [40] », à laquelle le cirque était jusque-là affilié. Les aides envisagées sont tout de suite assorties d’une exigence de « collaboration des chefs d’entreprise dans les réformes profondes qui devront suivre [41] ». En dehors d’un intérêt fonctionnel, une des finalités des associations créées selon ce modèle (cf. tableau 1) est d’abord « d’établir une liaison entre l’administration et la profession [42] » jusqu’alors ponctuelle. À cette période, le ministère de la Culture peine à trouver « un représentant des intérêts généraux de la profession » [43], compte tenu de l’absence de groupements professionnels stables et de la forte concurrence qui sévit entre entreprises de cirque. Il compte alors appuyer la « résurrection, en 1975, de l’ancien syndicat national des exploitants du cirque [44] ». Ces associations nationales, qui constituent une nouvelle forme d’action administrative [45], entendent aussi favoriser un nouveau cadre de pratiques professionnelles, plus standardisées, surtout en matière de gestion financière. Compte tenu des doutes exprimés sur la capacité d’autogestion des directeurs de cirque [46], ces associations nationales sont soumises au contrôle financier et à l’administration de représentants de l’État et d’élus locaux. Concernant le cirque, leur objectif est triple : « réorganiser [la profession] sur le plan fonctionnel, financier et des relations publiques [47] », notamment avec les collectivités locales. Par exemple, l’APMC entend organiser et coordonner les directeurs de cirques autour des tournées et améliorer la gestion et l’investissement en équipements, ceci, à partir de ressources issues des cotisations des adhérents et de subventions accordées par l’État [48]. Pour ce secteur d’activité dite « entrepreneuriale », l’État n’est censé jouer qu’un rôle « régulateur » :
« Dans le fond, qu’est-ce qu’on dit ? [au travers de ce fonds] On dit que c’est un secteur [le cirque] en capacité de générer sa propre économie et que l’État a une fonction d’accompagnement, voire, si on parle un peu en langage économiste, c’est en fait un correcteur de marché. C’est pour pallier certaines défaillances du marché, notamment par exemple sur la trésorerie, la capacité à aider, à fournir des fonds pour investir dans l’achat de matériel ou des choses comme ça ».
15Malgré les difficultés financières de nombre d’entreprises, cette représentation du cirque classique comme domaine culturel capable de générer une économie propre induit des soutiens publics spécifiques, sous la forme d’aides particulières exceptionnelles à certaines entreprises ou encore d’associations « relais ». En contrepartie, le ministère de la Culture est alors en position d’imposer aux directeurs de cirques, nouvellement administrés par celui-ci, un contrôle autant sur les plans financier, organisationnel, technique que pédagogique, moral, ou en matière de sécurité, etc., selon les missions des associations « relais » concernées. L’injonction à la standardisation des pratiques professionnelles est censée d’une part faciliter la conduite et les effets de la récente politique publique en matière de cirque, d’autre part, assurer la pérennité de l’économie propre au cirque, pour laquelle l’État n’intervient qu’en « correcteur ». Les responsables publics ont donc tout à gagner à promouvoir un « modèle professionnel » auprès de leurs interlocuteurs. Le souci de réglementation des professions artistiques a mobilisé le directeur du bureau des Professions du spectacle, J. Février, en place de 1970 à 1987 [49], chevauchant ainsi les alternances. Mais à l’instar du hip-hop dans les années 1990 [50], l’imposition d’un modèle professionnel donne lieu à des tensions entre pouvoirs publics engagés dans le contrôle du secteur et directeurs de cirque, soucieux de leur autonomie. Enfin, les prémices d’une économisation de la culture, souvent attribuée au ministère J. Lang de 1981 [51], sont ici posées.
16Issues de réunions interministérielles, les premières décisions politiques ont donc cherché à apporter une solution rapide et globale à la « crise » que traversaient les enseignes classiques mais ont été peu documentées. Les aides financières se sont surtout adressées aux plus grosses entreprises du secteur, regroupées pour l’occasion et que l’État a souhaité (re)structurer. Cette forme d’interventionnisme étatique n’a eu qu’un temps et a laissé rapidement place à une redéfinition de la politique publique du cirque, adossée à une nouvelle répartition des aides publiques.
Fin d’un plan exceptionnel et application d’un modèle sélectif d’action publique : la « qualité » comme argument politique
17Au printemps 1979, le bilan des actions entreprises par le gouvernement satisfait certains membres du ministère de la Culture [52], tandis qu’à la même période, J. Février et des experts du ministère de l’Économie et des Finances émettent « […] d’importantes réserves sur la possibilité réelle de consolider durablement le secteur du cirque. La gestion comptable et financière de ces entreprises est d’une qualité médiocre et peut difficilement être contrôlée [53]. » Tandis que la politique lancée en 1978 s’était définie dans l’urgence, l’avis de ces nouveaux experts du cirque est désormais convoqué en amont du processus décisionnel [54]. Dès lors, le traitement de la crise du cirque se réalise en milieu confiné [55]. Le consensus partagé par plusieurs administrations sur les faibles capacités des directeurs du cirque à pérenniser leur entreprise, offre à J. Février une occasion de faire entendre sa position. Il souhaite en effet mettre en place une politique plus sélective autour des « […] très rares troupes traditionnelles qui présentent un intérêt artistique réel et qui ont su créer un style national ; nous pensons à Gruss/Silvia Monfort [56] ». Comme A. Fratellini et P. Etaix, Gruss et Monfort ont favorisé le renouvellement de la profession en ouvrant une école de cirque. La nécessité de porter attention à la qualité artistique avait été exprimée dès 1978 par certains représentants du ministère de la Culture, mais le mode d’élaboration de la politique de « sauvetage » du cirque à cette période avait mis à distance cette exigence. Dans la lettre adressée à Mme Cayla, J. Février évoque en effet des « tentatives pour associer à cette aide à l’investissement une aide au fonctionnement, éventuellement liée à la notion de qualité du spectacle », tentatives qui avaient été « barrées de manière intransigeante par les représentants des ministères du Budget et de l’Économie [57] » présents lors des réunions interministérielles. La prise en charge du cirque par le ministère de la Culture favorise la redéfinition rapide de cette politique inaugurale, face à ce qui est pensé comme des invariants du secteur :
« Le cirque est au fond du puits […] il y a des hommes et des entreprises qui se noieront en cours d’ascension. C’est depuis 200 ans l’aventure normale de la piste. […] La politique improvisée, sous la pression des circonstances en 1979, était nécessairement empirique. Celle qui va être élaborée pour les années 1981 et suivantes demande à être davantage réfléchie [58]. »
19Les difficultés à la fois conjoncturelles et structurelles du cirque classique impliquaient pour l’administration publique des aides exceptionnelles de l’État, parallèlement à une réorganisation de la profession. Désormais, le cadre d’interprétation avancé est quelque peu différent, puisqu’il évoque une sorte de sélection naturelle du marché, sur laquelle l’État ne pourrait intervenir ou de manière limitée. Même si le « sauvetage » du cirque Pinder-Jean Richard, qui constitue la première entreprise de cirque française en termes de chiffres d’affaires, est poursuivi, il s’agit dorénavant de donner priorité à d’autres types d’interlocuteurs : le cirque Gruss et les artistes du nouveau cirque surtout. Comme dans le cas de la danse [59], la réorientation de la politique ministérielle est favorisée par l’arrivée d’une nouvelle génération de professionnels. Constitués en compagnies indépendantes sur le modèle des troupes théâtrales dont ils sont parfois issus, ils sont rapidement considérés par l’administration centrale comme « d’un niveau intellectuel parfois supérieur » et présentant « […] avec des moyens réduits des spectacles souvent séduisants ». Ces caractéristiques conduisent l’administration à envisager ce nouveau cirque comme « […] l’aspect original du cirque à la française » et ses représentants comme « […] l’avenir du cirque [60] ».
20Parallèlement à la création des premières écoles de cirque au début des années 1970, des artistes externes au milieu investissent les disciplines de cirque et proposent des spectacles scénarisés. Inscrits dans la lignée des arts de la rue et des courants contestataires nés en 1968, ils privilégient l’espace public et entendent véhiculer un idéal de démocratisation culturelle : « On voulait faire un théâtre populaire, itinérant, sans frontière, si possible pas bloqué par la parole, corporel, et on s’est dit : “ben voilà, c’est, c’est ce qu’on va faire, donc” » (Pascal, artiste de nouveau cirque formé à l’école Gruss/Monfort). Concevant le cirque comme un art tenant conjointement les exigences de création artistique et de démocratisation culturelle, ces « nouveaux » artistes incarnent malgré eux la politique culturelle française imaginée dès la création du ministère des Affaires culturelles [61]. Issus d’autres secteurs artistiques, ils sont rompus au dialogue avec les pouvoirs publics, ce qui n’est pas le cas des directeurs du cirque classique. Mieux dotés en capital culturel, ils apparaissent ainsi plus « fréquentables ». Par exemple, Pascal, fils d’un directeur de chambre de commerce et d’une institutrice, intègre une école de cirque alors qu’il est âgé d’une vingtaine d’années, après s’être formé au théâtre corporel et au mime. Avant cela, il avait suivi quatre années d’études de médecine, qu’il terminera parallèlement à sa carrière artistique. Directeur d’une compagnie conventionnée pendant une dizaine d’années, il devient administrateur pour le cirque à la Société des auteurs et compositeurs dramatiques. Comme l’illustre son cas, les propriétés sociales, scolaires et artistiques de ces nouveaux acteurs les engagent à saisir les opportunités de labellisation offertes par l’intervention de l’État. Ils prennent ainsi progressivement part aux associations « relais » initialement mises en place pour les entreprises classiques et plus largement, aux diverses instances du milieu et/ou du spectacle vivant. Leur arrivée ainsi que leur capacité de dialogue avec les représentants ministériels renforcent les divisions du milieu.
21Dans ce contexte, les rapports entre administration centrale, élus locaux et directeurs de cirques classiques deviennent plus conflictuels. Les échanges entre le directeur général du cirque Pinder-Jean Richard et le maire de Tourrette Levens en constituent un exemple :
« Permettez-moi, d’abord, de vous exprimer ma stupéfaction pour votre comportement, indigne d’un vrai professionnel du cirque lors de la table ronde au ministère de la Culture et de la Communication. Votre agressivité mal placée, vos commentaires erronés, vos remarques insolentes ont grandement nui à l’image de marque des Gens du voyage [62]. » Sont ensuite évoqués un « spectacle de piètre qualité » et une « entreprise qui fait une contre-publicité au cirque français ».
23Plusieurs éléments peuvent expliquer ces tensions. Dans les années 1960 et les suivantes, la profession peine à se structurer et la pluralité des syndicats, dont le rôle est central dans la régulation d’une profession, reflète ses divisions internes [63]. Dans les années 1980, deux syndicats sont d’ailleurs présentés par le ministère de la Culture comme des « frères ennemis [64] ». Le Syndicat national du cirque défend a priori les intérêts du Cirque Pinder et de Diana Moreno, tandis que le Syndicat professionnel du cirque français regroupe les établissements « [qui] présentent des garanties suffisantes de sérieux et de qualité [65] ». Ayant fait siennes les catégorisations et les injonctions du ministère de la Culture, cette organisation se place ainsi comme un partenaire sérieux. Quant au Syndicat national des propriétaires-installateurs de chapiteaux, certains représentants étatiques instruisent un rapport sur son président, perçu comme un « affairiste agité [66] ». Ces rapports délicats, en plus de complexifier tout dialogue, expliquent en partie la fréquente refonte des associations « relais », principalement composées, à ce stade, d’adhérents issus d’entreprises classiques. Leur instabilité constitue le signe des difficultés de la profession à se réguler et, pour le ministère chargé de la Culture, de l’administrer. À l’inverse, la forte structuration des représentants du cinéma depuis l’après-guerre, a pu contribuer à la prise en compte durable de leurs revendications par le ministère Lang [67].
24Les comportements de certains membres de la profession ainsi que ses modes d’organisation ont, aux yeux des responsables publics, terni son image et n’ont pas facilité la défense d’intérêts communs. La faiblesse des parcours scolaires des « enfants de la balle », fortement contraints par l’activité itinérante des entreprises, a pu également limiter leur capacité à convaincre les pouvoirs publics. La « langue lettrée » constitue en effet une ressource fondamentale dans le domaine culturel [68]. Un représentant syndical actuel en témoigne :
« […] parmi les cirques traditionnels, il y a des problématiques d’alphabétisation. Dans le spectacle, c’est des problématiques très marginales mais qui existent chez eux et puis une grande paupérisation. […] Y’a énormément de gens qui ne sont pas passés par le système scolaire et qui ont appris au sein de la famille […] Ils sont totalement décalés dans ce monde culturel. ».
26Face au développement d’un nouveau cirque, les représentants de l’État sont désormais en capacité de choisir leurs interlocuteurs et optent pour la nouvelle génération au détriment de l’ancienne. Comme pour d’autres arts [69], cette réorientation se fait sous couvert d’une politique publique sélective, soucieuse de garanties financières et surtout de la « qualité » des propositions artistiques de ses bénéficiaires. Dès 1979, certains membres « politico-administratifs » incitaient à s’inspirer davantage des catégories et instruments d’action publique d’ores et déjà expérimentés au sein du ministère de la Culture, ce qui confirme le poids des pratiques de recyclage au sein de l’action publique [70]. Soutenir des compagnies indépendantes dont la qualité est pensée comme supérieure aux entreprises classiques, permet d’une part de renforcer la cohérence de la politique culturelle publique du ministère de la Culture et, dans le même temps, de réaliser des économies substantielles, leur financement étant perçu comme moins risqué. Enfin, si l’intérêt pour le nouveau cirque est fondé, comme dans le cas de la danse [71], sur des arguments esthétiques et économiques, il est aussi le produit du partage de valeurs communes et de la convergence de profils et de ressources entre interlocuteurs professionnels et membres en charge de la politique publique du cirque. À partir de 1981, le ministère de J. Lang offre un changement d’échelle dans le rapprochement entre logique artistique et préoccupations économiques, ainsi que de nouveaux instruments d’action publique destinés à soutenir « l’art » du cirque et ses représentants. Il fera de la qualité artistique et des actions de formation « modèles », une priorité [72].
Construction politique de l’avenir d’une partie de la profession : vers un cirque de « création »
27La politique culturelle conduite à partir de 1981 poursuit plusieurs missions définies dès 1959 par le ministère des Affaires culturelles [73]. Toutefois, le gouvernement socialiste présente la culture comme une des affaires majeures de l’entreprise de modernisation du pays [74], ce qui rend plus acceptable son économisation [75]. Cela conduit à doubler le budget alloué au ministère de la Culture et à créer un sentiment de rupture d’une politique culturelle dont on a pu montrer qu’elle consolide aussi des orientations définies au préalable. Les mécanismes de financement des arts se voient cependant complexifiés par ce modèle d’économie mixte. La pérennité de l’entreprise artistique devient une condition pour toute sollicitation de financement public [76]. Dans ce contexte, les subventions à la création destinées aux compagnies indépendantes fréquemment créées par les nouveaux entrants sur le marché du spectacle augmentent. Enfin, la démocratie culturelle est placée au cœur de la politique conduite par J. Lang [77]. Ce contexte général favorise la création de nouveaux instruments d’action publique pour le cirque autour d’« institutions nouvelles, offrant des garanties artistiques certaines et gérées sous le contrôle étroit de l’État [78] ».
28La politique du cirque se modifie donc nettement en 1982 [79]. Trois institutions sont créées : le Cirque national Alexis Gruss (1982) [80] ; le Centre national des arts du cirque (CNAC, 1985) accueillant une École nationale supérieure devant « contribuer à l’image du cirque en France et en Europe » en devenant « le laboratoire des nouvelles recherches artistiques [81] » ; l’Association nationale pour le développement des arts du cirque (ANDAC, 1987), poursuivant la mission de fonds de soutien aux entreprises de cirque classiques et « nouvelles ». « Cet ensemble de structures nouvelles vise à modifier dans un esprit de Haute Qualité tout le contexte professionnel du cirque en France [82]. ». Perçue comme un moyen de professionnaliser les métiers artistiques et de les sécuriser [83], la formation des artistes représente la première ligne budgétaire du ministère de la Culture [84]. La création du CNAC, « véritable décision d’État », et les moyens qui lui sont attribués [85] accélèrent le renouvellement de la profession, sa structuration et sa reconnaissance artistique, notamment au travers de la pluridisciplinarité et l’autonomisation de la mise en piste [86], qui constituent les piliers du modèle de formation proposé. Modifier les modes de socialisation professionnelle autour des principes de création contemporaine constitue l’un des moyens de rapprochement avec la culture dite légitime [87].
29Ces structures nouvelles sont aussi l’occasion, au travers de leur appellation, d’affirmer la « qualité » artistique du (nouveau) cirque, décisive dans les critères d’attribution des subventions publiques du ministère de la Culture. Elle est affirmée au travers de plusieurs qualificatifs : « création », « arts du cirque », etc. Très vite en effet, le terme « cirque » se voit supplanter par celui d’« art » puis « arts » du cirque ou de la piste. Ce changement terminologique illustre la promotion sociale et politique du cirque, désormais objet à part entière d’une politique culturelle. En passant du cirque aux « arts du cirque », l’État affirme la vocation artistique du cirque, en distingue les formes « nouvelles », tout en disqualifiant le cirque classique, trop « traditionnel ».
« Arts du cirque, le mot ayant été considéré plus opportun que le mot cirque. […] Donc, c’est comme ça que je suis arrivé à m’occuper de l’univers du cirque, prioritairement des formes dites “contemporaines”, non pas par choix mais tout simplement parce qu’aujourd’hui, le cirque traditionnel n’émarge quasiment plus à la politique publique du ministère, puisque la question de la création est mise en avant comme critère de distinction pour préciser ce que l’État ou le ministère de la Culture, aiderait ou n’aiderait pas. »
31La disqualification des entreprises et des membres du cirque classique n’apparaît pas uniquement liée au diagnostic réalisé spécifiquement sur celui-ci par les experts ou le personnel administratif du ministère de la Culture. « On ne peut en aucun cas avoir pour objet de combler systématiquement les déficits d’entreprises gérées avec insuffisamment de rigueur ou présentant des spectacles de qualité médiocre [89] » affirme le ministre J. Lang. Cette disqualification se fait au nom d’une politique plus générale, qui combine saine gestion, réhabilitation des arts dits « mineurs » et promotion des œuvres contemporaines « alternatives [90] ». Retracer le processus de définition d’une action publique sur une période donnée montre bien les mécanismes au fondement de sa légitimation [91].
32Les patrons du cirque classique, soutenus par certains parlementaires [92], se plaignent de ce changement de cap, de leur mise à distance des pouvoirs publics et de l’entreprise de stigmatisation à laquelle ils tentent de faire face. Leur réaction est bien le signe d’une mésentente concernant non seulement les nouvelles modalités d’interprétation et d’action quant aux problèmes qu’ils rencontrent, mais aussi leurs effets sur l’équilibre interne d’une profession.
33Ils attirent « […] l’attention sur l’utilisation des fonds publics destinés au cirque français. Cette aide pourtant substantielle ne permet pas, dans l’état actuel de sa répartition et de son emploi, de faire face concrètement et avec efficacité aux besoins réels de notre profession, confrontée à la situation difficile que vous connaissez. […] Les chefs d’entreprise que nous sommes souhaitent enfin prendre une plus large part aux décisions qui concernent l’avenir du cirque français dans tous les domaines, en participant au plus près à la gestion du fonds de soutien mis en place par votre ministère. Nous aimerions être mieux informés, mieux entendus et plus écoutés que nous le sommes actuellement pour que la politique d’aide au cirque porte réellement ses fruits [93]. »
34Comme pour les professionnels de hip-hop dans le courant des années 1990-2000 [94], l’inégale répartition des aides publiques attise les conflits intergénérationnels et accentue la séparation entre deux marchés du cirque aux économies distinctes. Les directeurs de cirque classique protestent en déployant plusieurs arguments. Dénonçant les tendances de ce qu’ils considèrent comme relevant d’un « néo-cirque » de type élitiste, ils rappellent aux responsables publics leur caractère « populaire », et in fine, leur meilleure adéquation avec l’objectif de démocratisation culturelle du ministère de la Culture : « […] il est vrai que nous revendiquons le terme Populaire. Nous sommes un spectacle qui s’adresse à un large public familial accessible à tous […] Nous ne nous adressons pas à une élite, mais cela ne veut en aucun cas dire que nous ne faisons pas de l’artistique » (Directeur de cirque classique, document non titré de mars 1992). Le fait que les aides attribuées aux entreprises artistiques constituent souvent un label pour les structures de diffusion qui achètent les spectacles [95], amène également les directeurs à remettre en cause les catégorisations proposées par le ministère de la Culture et leurs effets tant symboliques qu’économiques : « Aujourd’hui on essaie de faire des distinctions entre établissements en les classant par type… Ainsi on entend parler de cirque “commercial”, d’autres auraient une vocation artistique… Nous nous élevons contre le terme commercial avec le sens péjoratif qu’on semble vouloir lui attribuer » (Ibid.).
35Ainsi, aux divisions internes entre entrepreneurs de cirque se substituent des luttes entre arts « pur » et « commercial », anciens et nouveaux, etc., caractéristiques du champ artistique [96]. Entre ces deux générations d’entrepreneurs de spectacles de cirque, la conception de la culture et de l’art diffère. L’une, basée sur la création artistique, s’adresse plutôt, dans son fonctionnement actuel et en dépit de sa volonté de démocratisation culturelle, aux classes moyennes à supérieures [97]. L’autre, fondée sur le partage d’un art populaire, vise le plus grand nombre [98]. Si la dernière renvoie à l’objectif originel de démocratisation culturelle du ministère de la Culture, c’est paradoxalement le nouveau cirque qui incarne le mieux aux yeux de ses représentants son projet politique. La démarche de démocratie culturelle mise en œuvre par le ministère Lang a plutôt contribué à renouveler la hiérarchie entre domaines artistiques. Mais ni la prégnance des formes dites consacrées ni les formes de hiérarchisation interne à une discipline n’ont été supprimées.
36Tandis que certains représentants de la profession classique proposent de séparer les « cirques », c’est-à-dire eux-mêmes, et les « cirques théâtre » ou « néo-cirques [99] », les responsables ministériels distinguent progressivement leurs instruments d’action publique en fonction de ces deux formes de cirque [100]. Les entreprises qui sont rentrées dans le « circuit institutionnel », c’est-à-dire les nouvelles formes de cirque, sont susceptibles de recevoir des subventions pour la « création » ; celles qui « répondent à la loi de l’offre et de la demande », autrement dit les cirques dits « traditionnels », peuvent espérer des subventions pour « l’innovation » (décors, costumes, accessoires, etc.) [101]. La différence de traitement se creuse avec la mise en sommeil de l’ANDAC dès 1994 (pour cause de détournement de fonds). Dès lors, le principe de relais des actions publiques par les associations « relais » disparaît et le ministère attribue directement les subventions aux entreprises, en fonction du modèle déjà en vigueur pour le théâtre, cette fois-ci « public ».
« Cet arrêt brutal de ce dispositif [ANDAC] fait que le ministère décide alors de reprendre directement à sa charge l’accompagnement et le soutien du cirque [contemporain] et du coup, s’installe toute une série de dispositifs comme les autres domaines du spectacle vivant subventionnés, dans la logique du subventionnement où effectivement, on a des aides à la création, bien plus tard, des entités, des établissements à qui on confie des missions de production et de diffusion du cirque, donc des labels. ».
38En appliquant au monde du cirque des schèmes de pensée et des modes de catégorisation issus d’autres secteurs du spectacle vivant plus « légitimes », la politique publique remodèle le cirque à leur image. La répartition des aides publiques sied davantage au fonctionnement des compagnies de nouveau cirque et les entreprises classiques sont progressivement écartées des aides de l’État. Même si « rien n’est interdit », les critères d’évaluation autour de la création, toujours en vigueur, avantagent les premières. Les orientations du début des années 1980, qui ont fait le choix de soutenir les « nouveaux entrants », ont donc largement façonné le paysage du cirque.
Conclusion
39L’observation de la mise en œuvre et de l’évolution d’une action publique envers un « problème » donné permet de montrer les mouvements de cadrage/recadrage des responsables publics au fil des conjonctures, suivant la manière dont ils se représentent les origines du « problème » et leurs interlocuteurs [102]. Les rapports développés fin 1970 entre les directeurs de cirques et le ministère de la Culture, témoignent du changement de regard porté sur ce domaine du spectacle vivant, d’abord perçu comme culturel, puis, plus tard, comme artistique. Cette reconnaissance en deux temps se traduit par le dialogue avec deux générations distinctes d’entrepreneurs de spectacles de cirque : patrons de cirques classiques puis artistes/employeurs de nouvelles formes de cirque. À ces périodes correspondent des instruments d’action publique spécifiques. Si les premières initiatives de l’État, issues d’un groupe de travail interministériel, avaient tenu compte des requêtes du cirque classique, on assiste progressivement à l’application d’une politique inspirée du théâtre, contribuant à séparer le cirque en deux marchés opposés. Les modes d’intervention du ministère de la Culture sur le cirque, s’ils contribuent à légitimer cet « art » initialement perçu comme « mineur », impliquent également, en faisant prévaloir progressivement ses formes contemporaines, la hiérarchisation des genres de cirque et la marginalisation d’une partie de la profession. Celle-ci avait pourtant largement œuvré à la démocratisation du cirque sous chapiteau. Comme pour le hip-hop [103], l’institutionnalisation du cirque favorise la modification des pratiques professionnelles, des trajectoires sociales des acteurs et le déploiement de nouveaux rapports de domination au sein du groupe concerné.
40L’action publique affecte fortement la régulation d’une profession mais elle n’en constitue pas le seul moteur. Dans le cas du cirque et à l’inverse d’autres pratiques artistiques [104], la rupture entre le cirque « traditionnel » et le pouvoir politique est accentuée par les difficultés d’organisation interne et les divisions, contrariant la production et la défense d’intérêts communs. Les modes d’organisation des entrepreneurs de cirque classique ont laissé toute latitude aux artistes du « nouveau cirque » pour occuper le rôle d’interlocuteur privilégié et de « modèle » professionnel pour les représentants de l’État. Le positionnement des acteurs vis-à-vis de ceux qui les entourent et les administrent, notamment pour faire reconnaître leur compétence, contribue en effet à leur propre hiérarchisation, symbolique et économique [105]. Le soutien au cirque classique exprimé par certaines personnalités, telles que des élus locaux ou encore le Prince Rainier III de Monaco [106], n’a semble-t-il pas convaincu les responsables de la politique culturelle française. En comparaison avec la bande dessinée par exemple [107], on peut supposer que l’absence de discours savants susceptibles de soutenir les entrepreneurs classiques a sans doute contribué à renforcer leur marginalisation progressive de la sphère publique.
41Le gouvernement socialiste de 1981 a joué un rôle central dans la transformation des modes de régulation du cirque, en renforçant les orientations de la politique culturelle déjà là et en rompant avec une politique « globale » du cirque, malgré les tentatives de résistances des grands directeurs de cirque. Le discours sur la démocratie culturelle et la volonté d’extension des frontières de l’art n’ont pas profité à tous, comme en témoigne la position actuelle du cirque classique, dont le caractère « populaire » apparaît paradoxalement insuffisant pour obtenir les faveurs des pouvoirs publics. Une des manières de sacraliser la culture dite légitime est en effet de dévaloriser celle « d’en bas » en la mettant à distance [108]. Ce faisant, les formes contemporaines de cirque, administrées à la manière des arts subventionnés, se confrontent à l’ambition de démocratisation culturelle, dans le sens où l’intervention d’intermédiaires culturels tend à éloigner le public des « œuvres » artistiques [109]. Le cirque, aux genres hiérarchisés, illustre ainsi parfaitement la double exigence de la politique culturelle française comme ses paradoxes ou « tensions » internes [110].
Mots-clés éditeurs : divisions, pratique culturelle, dynamiques professionnelles, régulation politique
Mise en ligne 11/05/2018
https://doi.org/10.3917/pox.121.0217Notes
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Le processus d’identification désigne le mécanisme selon lequel une entité extérieure attribue une identité à un individu ou groupe d’individus. Avanza (M.), Laferté (G.), « Dépasser la “construction des identités”. Identification, image sociale, appartenance », Genèses, 61, 2005.
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Hodak-Druel (C.), Du théâtre équestre au cirque : une entreprise si éminemment nationale. Commercialisation des loisirs, diffusion des savoirs, théâtralisation de l’histoire en France et en Angleterre (1760-1860), thèse pour le doctorat de sciences sociales, EHESS, Paris, 2004.
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Dubois (V.), « L’action de l’État, produit et enjeu des rapports entre espaces sociaux », Actes de la recherche en sciences sociales, 201-202, 2014.
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Barré-Meinzer (S.), Le cirque classique, un spectacle actuel, Paris, L’Harmattan, 2004.
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[13]
Salaméro (É.), Devenir artiste de cirque aujourd’hui : espace des écoles et socialisation professionnelle, thèse de doctorat STAPS, Université Toulouse III, 2009.
-
[14]
42 entretiens avaient été réalisés dans le cadre du doctorat ; 105 dans le cadre du programme ANR « Sorties de scène » (n° 13-JSH1-0010-0, Julhe, Salaméro, dir.), dont 36 auprès de responsables nationaux et locaux et représentants professionnels et 31 auprès d’artistes de cirque contemporain. En revanche, malgré nos tentatives, nous ne sommes pas parvenus à interroger des représentants du genre classique.
-
[15]
Les notes de représentants ministériels, les rapports d’experts et les documents de correspondance entre professionnels du cirque et les premiers, sont issus des fonds archivistiques suivants : AN Pierrefitte-Sur-Seine, Politique d’aide au cirque 1978-1987 (20040042/026) ; Direction théâtre, spectacles 1961-1998 (20040042/026) ; Bureau professions du spectacle 1970-1979, Bureau spectacles 1944-1987, 1980- (19900429/28). Leurs auteurs, dates de rédaction, numéros de pages n’étaient pas toujours mentionnés. Ils apparaîtront tels quels au cours de l’article.
-
[16]
Gilbert (C.), Henry (E.), « La définition des problèmes… », art. cit.
-
[17]
Moulin (R.), « De l’artisan au professionnel : l’artiste », Sociologie du travail, 4, 1985.
-
[18]
Barré-Meinzer (S.), Le cirque classique…, op. cit.
-
[19]
Entre 1945 et 1980, une quinzaine de « grands » cirques ferment en France. Si l’administration culturelle répertorie les « grands cirques » dont le nombre constitue pour elle un signe de vitalité et d’équilibre du secteur, elle semble ne pas avoir une idée précise des autres cirques qui sillonnent la France : une trentaine selon certaines notes.
-
[20]
Angrémy (J.-P.), Situation du cirque en France, Note pour Monsieur le directeur du Cabinet, ministère de la Culture, 4 juin 1981, p. 4.
-
[21]
Bernard (A.), Lettre adressée au ministre de l’Économie et des Finances, ministère des Affaires culturelles, 8 juillet 1966.
-
[22]
J. Février indique qu’en cinq ans, « beaucoup de promesses ont été faites à cette profession et qu’elles n’ont jamais débouché sur rien de concret ». Situation du cirque en France, ministère de la Culture, 1979, p. 13.
-
[23]
Les demandes de l’Association française du cirque, 1978, p. 1. Cette association, créée cette même année, regroupe des « grands » établissements toujours en activité tels que Amar, Jean Richard, le cirque Moralles et Bouglione. Compte rendu de la réunion interministérielle du 18 décembre 1979, Secrétariat général du Gouvernement, 20 décembre 1978, p. 2 (document non signé).
-
[24]
Giscard d’Estaing (V.), Lettre du président de la République au ministre de la Culture, 8 août 1978.
-
[25]
Par exemple, M. Jean Desanlis, député du Loir-et-Cher, centriste inscrit au groupe des Réformateurs, alerte M. le ministre de la Culture sur « les difficultés financières » du cirque et demande la mise en place de « mesures […] pour que cette forme de spectacle continue à être présentée ». Débats à l’Assemblée nationale du 16 septembre 1978, Journal officiel, n° 6047. Aucune donnée ne permet de livrer une hypothèse interprétative solide concernant le soutien de ce député aux directeurs de cirque.
-
[26]
Forette (D.), Les arts de la piste : une activité fragile entre tradition et innovation. Avis et rapports du Conseil Économique et Social, Paris, Les Éditions des Journaux officiels, 1998 ; Hénaut (L.), « La construction des groupes professionnels… », art. cit.
-
[27]
Lettre de la sous-direction du Théâtre au ministre de la Culture sur la situation des cirques, ministère de la Culture, 12 juillet 1978 (document non signé).
-
[28]
Rosemberg (J.), Arts du cirque. Esthétiques et évaluation, Paris, L’Harmattan, 2004.
-
[29]
Février (J.), « Situation du cirque », art. cit., p. 15.
-
[30]
Faure (S.), « Les structures du champ chorégraphique… », art. cit.
-
[31]
Germain-Thomas (P.), « La politique de la danse contemporaine en France : une construction conjointe des pouvoirs publics et des lieux de programmation », Quaderni, 83, 2014.
-
[32]
Polo (J.-F.), « La politique cinématographique… », art. cit.
-
[33]
Cela est encore le cas dans les années 1990. Guy (J.-M.), « La fréquentation et l’image du cirque », Développement culturel, 100, 1993.
-
[34]
Exonération du droit de timbre de quittance, le « 1 % à la construction », etc. Secrétariat général du Gouvernement, « Compte rendu de la réunion… », art. cit., p. 2.
-
[35]
Ministère de la Culture et de la Communication, Hommage à Jean-Philippe Lecat, ministre de la Culture et de la Communication (avril 1978-1981), actes de la table ronde organisée le 22 novembre 2011, Paris, Comité d’histoire du ministère de la Culture et de la Communication, 2013.
-
[36]
Ces aides seront activées après plusieurs mois de négociation, notamment auprès du ministère du Budget. Février (J.), Lettre adressée à Mme Cayla du 18 décembre 1979, ministère de la Culture.
-
[37]
Secrétariat général du Gouvernement, « Compte rendu de la réunion… », art. cit., p. 2.
-
[38]
Forette (D.), « Les arts de la piste », art. cit.
-
[39]
L’ANDAC constituait aussi un « lieu d’échange » pour la profession et de « connaissance mutuelle ». Joinet (L.), Présentation du CNP, 7 novembre 1996.
-
[40]
Février (J.), « Situation du cirque », art. cit., p. 15. Au sein des administrations centrales ou déconcentrées du ministère de la Culture, le cirque est aujourd’hui encore majoritairement affilié au service théâtre.
-
[41]
Février (J.), « Situation du cirque », art. cit., p. 13.
-
[42]
Forette (D.), « Les arts de la piste », art. cit.
-
[43]
Brajot (G.), Note pour Monsieur le ministre sur la situation des cirques, direction du Théâtre, des Maisons de la culture et des lettres, 12 juillet 1978, p. 1.
-
[44]
Plan de redressement du cirque, 1979, p. 3 (document non signé).
-
[45]
Moulin (R.), L’artiste, l’institution, le marché, Paris, Flammarion, 1992.
-
[46]
Projet de constitution d’un fonds de modernisation du cirque, p. 2 (document non signé et non daté).
-
[47]
Février (J.), « Situation du cirque », art. cit., p. 16.
-
[48]
En 1979, le subventionnement de l’État est de deux millions de francs, d’un montant a priori équivalent à celui des cotisations professionnelles.
-
[49]
Rauch (M.-A). « Les hussards du Ministère de la Culture ». Article non daté, accessible sur le site : http://www.culturecommunication.gouv.fr
-
[50]
Faure (S.), « Institutionnalisation de la danse Hip-Hop… », art. cit.
-
[51]
Moulin (R.), L’artiste, l’institution…, op. cit.
-
[52]
Bilan des activités du ministère de la Culture et de la Communication dans le domaine du cirque – août 1978-avril 1979, ministère de la Culture (document non signé).
-
[53]
Note pour le président sur la situation des entreprises de cirque, ministère de l’Économie et des Finances, 14 mars 1979, p. 2 (document non signé).
-
[54]
À partir de 1981, ce processus se renforcera. De nombreux rapports et une régulation des arts et de la culture par la loi caractérisent la politique culturelle menée. Martin (L.), « La politique culturelle… », art. cit.
-
[55]
C. Gilbert et E. Henry ont travaillé sur les effets du déplacement du traitement des problèmes dans les arènes confinées, « La définition des problèmes… », art. cit.
-
[56]
Février (J.), « Lettre adressée à Mme Cayla », art. cit., p. 4.
-
[57]
Ibid., p. 2.
-
[58]
Ibid., p. 4.
-
[59]
Germain-Thomas (P.), « La politique de la danse… », art. cit.
-
[60]
Angrémy (J.-P.), « Situation du cirque… », art. cit., p. 4.
-
[61]
Girard (A.), « Les politiques culturelles… », art. cit.
-
[62]
J.-P. Lecat indique que « […] le cirque souffre souvent de certaines réticences de la part des administrations locales, réticences liées à une assimilation hâtive avec les milieux forains et nomades ». Lettre sur la politique du Gouvernement en faveur du cirque adressée à Messieurs les directeurs régionaux et correspondants permanents des affaires culturelles, ministère de la Culture, 19 mars 1979, p. 3.
-
[63]
Forette (D.), « Les arts de la piste », art. cit. Groux (G.), « Les syndicalismes catégoriels : éléments d’analyse d’une catégorie », Terrain et Travaux, 25, 2014.
-
[64]
Abirached (R.), note de la direction du Théâtre et des spectacles, 3 juillet 1986, ministère de la Culture (document non paginé).
-
[65]
Lettre du Syndicat professionnel du cirque français, 17 août 1985 (document non signé).
-
[66]
Notes du ministère de la Culture du 14 novembre 1984 (document non signé et non paginé).
-
[67]
Polo (J.-F.), « La politique cinématographique… », art. cit.
-
[68]
Vincent (G.) « Enseignement du français et système scolaire », Revue française de sociologie, 313, 1968.
-
[69]
Maigret (É.), « La reconnaissance en demi-teinte… », art. cit.
-
[70]
Lascoumes (P.), « Rendre gouvernable : de la “traduction” au “transcodage”. L’analyse des processus de changement dans les réseaux d’action publique », in CURAPP, dir., La gouvernabilité, Paris, Presses universitaires de France, 1996.
-
[71]
Germain-Thomas (P.), « La politique de la danse… », art. cit.
-
[72]
Février (J.), « Situation du cirque », art. cit.
-
[73]
Urfalino (P.), L’invention de la politique culturelle, Paris, Hachette Littérature, 2011.
-
[74]
Girard (A.), « Les politiques culturelles… », art. cit.
-
[75]
Polo (J.-F.), « La politique cinématographique… », art. cit.
-
[76]
Faure (S.), « Production et diffusion des œuvres chorégraphiques : les effets de l’institutionnalisation de la danse », Sociologie de l’art, Opus 9 et 10, 2006.
-
[77]
Dubois (V.), La politique culturelle. Genèse d’une catégorie d’intervention publique, Paris, Belin, 1999 ; Maleval (M.), L’émergence du nouveau cirque. 1968-1998, Paris, L’Harmattan, 2010.
-
[78]
Note sur la situation des cirques français, bureau des Spectacles, 18 avril 1983, p. 4 (document non signé).
-
[79]
Voir le JO du 13 janvier 1986.
-
[80]
Instauré comme « modèle » par le ministère de la Culture mais jalousé par la profession classique dénonçant une sorte de concurrence déloyale, ses activités comme « cirque national » cessent en 1987.
-
[81]
Abirached (R.), Lettre du 30 septembre 1983, direction du Théâtre et des Spectacles, p. 5.
-
[82]
Bureau des Spectacles, « Note sur la situation des cirques… », art. cit, p. 4.
-
[83]
Faure (S.), « Production et diffusion… », art. cit.
-
[84]
Horslesmurs, Chiffres clés des arts du cirque et des arts de la rue, 2010.
-
[85]
Membre de la DGCA, entretien de novembre 2014.
-
[86]
Proust (S.), « Une nouvelle figure de l’artiste : le metteur en scène de théâtre », Sociologie du travail, 43 (4), 2001.
-
[87]
Faure (S.), « Institutionnalisation de la danse Hip-Hop… », art. cit.
-
[88]
HorsLesMurs, en charge du soutien aux arts de la rue, prend également en charge le cirque contemporain suite aux difficultés de l’ANDAC. En 2016, sa fusion avec le centre national du Théâtre donne lieu à Artcena.
-
[89]
Politique du ministère de la Culture en faveur du cirque, communiqué de presse du 13 janvier 1986, p. 2.
-
[90]
Dubois (V.), La politique culturelle…, op. cit.
-
[91]
Dubois (V.), « L’action de l’État… », art. cit.
-
[92]
Voir les propos de B. Lefranc, socialiste et fonctionnaire des Postes Télégraphe(s) Téléphone(s), pointant la « quasi-absence des aides de l’État en faveur des quinze derniers cirques existant en France ». Séance à l’Assemblée nationale du 17 décembre 1984.
-
[93]
Lettre des directeurs de cirque de France à M. le ministre de la Culture, 31 octobre 1986, p. 1.
-
[94]
Faure (S.), « Institutionnalisation de la danse Hip-Hop… », art. cit.
-
[95]
Faure (S.), « Production et diffusion… », art. cit.
-
[96]
Bourdieu (P.), Les règles de l’art : genèse et structure du champ littéraire, Paris, Seuil, 1992.
-
[97]
Lévy (F.), « À nouveaux cirques, nouveaux publics ? », in Guy (J.-M.), dir., Avant-garde : cirque ! Les arts de la piste en révolution, Paris, Autrement, coll. « Mutations », 2001.
-
[98]
Guy (J.-M.), « La fréquentation… », art. cit.
-
[99]
Lettre des représentants du cirque classique sur le fonctionnement de l’ANDAC, 22 mars 1992, p. 8.
-
[100]
Initialement, les aides envers le cirque étaient indifférenciées. Voir la séance à l’Assemblée nationale du 2 octobre 1974 au sujet du cirque Bonjour (un des premiers nouveaux cirques) : « […] le cirque Bonjour en bénéficiera [d’une solution] au même titre que les autres entreprises de cirque [classique] ».
-
[101]
Politique du cirque en France, deuxième réunion de réflexion pour la mise en place d’une nouvelle politique du cirque en 1998, ministère de la Culture, 4 septembre 1997.
-
[102]
Gilbert (C.), Henry (E.), « La définition des problèmes… », art. cit.
-
[103]
Faure (S.), « Institutionnalisation de la danse Hip-Hop… », art. cit.
-
[104]
Le cinéma par exemple. Polo (J.-F.), « La politique cinématographique… », art. cit.
-
[105]
Bourdieu (P.), Les règles de l’art…, op. cit.
-
[106]
Il a été à l’origine, en 1974, du Festival international du cirque de Monte-Carlo, toujours en activité.
-
[107]
Maigret (É.), « La reconnaissance en demi-teinte… », art. cit.
-
[108]
Bourdieu (P.), La distinction. Critique sociale du jugement, Paris, Minuit, 1979 ; Levine (L.-W.), Culture d’en haut, culture d’en bas. L’émergence des hiérarchies culturelles aux États-Unis, Paris, La Découverte, 2010.
-
[109]
Heinich (N.), Le triple jeu de l’art contemporain, Paris, Minuit, 1998.
-
[110]
Urfalino (P.), L’invention de la politique, op. cit.