Notes
-
[1]
Monnerville (G.), Témoignage. De la France équinoxiale au Palais du Luxembourg, Paris, Plon, 1973, p. 375.
-
[2]
En Guyane, le terme de Créole désigne uniquement les descendants à la fois des esclaves émancipés en 1848 ou affranchis auparavant et des immigrants qui se sont agrégés à ce groupe initial, notamment par le biais des mariages, cf. Jolivet (M.-J.), La question créole. Essai de sociologie sur la Guyane française, Paris, ORSTOM, 1982.
-
[3]
Mam Lam Fouck (S.), Histoire de l’assimilation. Des « vieilles colonies » françaises aux départements d’outre-mer. La culture politique de l’assimilation en Guyane et aux Antilles françaises (XIXe et XXe siècles), Matoury, Ibis Rouge Éditions, 2006.
-
[4]
Maurice (E.), Les enseignants et la politisation de la Guyane (1946-1970). L’émergence de la gauche guyanaise, Matoury, Ibis Rouge Éditions, 2014.
-
[5]
Crozier (M.), dir., « L’administration face aux problèmes du changement », Sociologie du travail, 8 (3), 1966, p. 226, cf. également dans ce numéro spécial, Worms (J.-P.), « Le préfet et ses notables », Sociologie du travail, 8 (3), 1966.
-
[6]
J. Moch considère toutefois la population cayennaise « moins dense et moins enflammée » que celle de la Martinique. Moch (J.), Une si longue vie, Paris, Robert Laffont, 1976, p. 255.
-
[7]
Archives territoriales de la Guyane, anciennement archives départementales (désormais AT 973). PER 431, « 31 août 1947. L’“intégration” improprement appelée “assimilation” est-elle un succès ? », Parallèle 5, septembre 1951.
-
[8]
Ibid.
-
[9]
Par exemple, les principales figures politiques guyanaises sont issues du monde enseignant. Citons Christiane Taubira, ancienne militante indépendantiste puis députée de la Guyane de 1993 à 2012 devenue ministre de la Justice dans les gouvernements socialistes du président François Hollande entre 2012 et 2016 ; Antoine Karam, secrétaire général du parti dominant de la gauche locale de 1989 à 1993 puis de 2003 à 2011 et, depuis 2014, sénateur de la Guyane ; Rodolphe Alexandre, dernier président du conseil régional (2010-2015) et, depuis 2015, premier président de l’assemblée de Guyane. Cf. Maurice (E.), « Vers l’État post-colonial : enseignants créoles et pouvoir local en Guyane (années 1950-1960) », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 61 (1), 2014.
-
[10]
Rouban (L.), « Les Préfets de la République 1870-1997 », Les Cahiers du Cevipof, 26, janvier 2000, p. 26-30.
-
[11]
Bargeton (R.), Dictionnaire biographique des préfets, septembre 1870 – mai 1982, Paris, Archives nationales, 1994.
-
[12]
Alexandre (R.), Le Conseil général de la Guyane française (1945-1977), mémoire de maîtrise d’histoire, Université Bordeaux III, 1977, p. 109-114.
-
[13]
Maurice (E.), Les enseignants et la politisation de la Guyane…, op. cit., p. 94-96.
-
[14]
Cette position permet d’être nommé préfet sans être affecté dans un territoire. Elle peut être un préalable à une prochaine affectation ou à une mise à la retraite.
-
[15]
Cet article est issu d’une recherche doctorale en cours d’achèvement. Cette dernière n’aurait été possible sans le soutien de la collectivité territoriale de Guyane et celui du projet ANR « Autochtom » coordonné par Benoît Trépied (EHESS-CNRS). L’auteur tient également à remercier pour leurs commentaires Raberh Achi et Michelle Zancarini-Fournel.
-
[16]
Maurice (E.), « Vers l’État post-colonial… », art. cit.
-
[17]
Cf. également l’analyse de son action à l’égard des populations amérindiennes et noirs-marronnes dans Guyon (S.), « Des “Primitifs” aux “Autochtones”. Savoirs ethnologiques et politiques publiques en Guyane de 1946 à nos jours », Genèses, 91 (2), 2013.
-
[18]
AT 973. PER 92. La Semaine, 22 novembre 1947.
-
[19]
Ibid.
-
[20]
Vignon (R.), Gran Man Baka, Sorel Moussel, Éditions Davol, 1985, p. 282.
-
[21]
AT 973. WP 2026. Rapport de mission d’information de l’Inspection générale de l’Administration (IGAME) sur le préfet Vignon au ministre de l’Intérieur, 26 octobre 1954. L’IGAME désigne un haut fonctionnaire placé, depuis 1954, à la tête d’un service des DOM au sein de l’administration centrale du ministère de l’Intérieur. Sur les premiers IGAME installés par J. Moch en 1948, alors ministre de l’Intérieur, cf. Moch (J.), Une si longue vie…, op. cit., p. 278-279.
-
[22]
AT 973. WP 2026. Rapport de mission d’information de l’Inspection générale de l’Administration (IGAME) sur le préfet Vignon au ministre de l’Intérieur, 26 octobre 1954.
-
[23]
En 1954, il favorise, par exemple, la création de l’Institut français d’Amérique tropicale (IFAT) qui a pour mission d’effectuer des recherches intéressant le développement économique et social de la Guyane.
-
[24]
Cf. Mary (S.), Le gaullisme d’opposition aux Antilles et en Guyane. Le RPF sous l’œil de Jacques Foccart, Paris, L’Harmattan, 2013.
-
[25]
Dumont (J.), « La quête de l’égalité aux Antilles : la départementalisation et les manifestations des années 1950 », Le Mouvement social, 2010, p. 85.
-
[26]
AT 973. PER 431, « 31 août 1947. L’“intégration” improprement appelée “assimilation” est-elle un succès ? », Parallèle 5, septembre 1951.
-
[27]
AT 973. WP 2026. Rapport de mission d’information de l’Inspection générale de l’Administration sur le préfet Vignon au ministre de l’Intérieur, 26 octobre 1954 (22 pages).
-
[28]
Archives nationales, Pierrefitte-sur-Seine (Désormais AN). 19940180.215. Rapport sur la situation de la Guyane du préfet Érignac, 26 juin 1962 (114 p.)
-
[29]
AN. 19940180.215. Rapport mensuel du préfet Érignac au ministre de l’Intérieur, novembre 1961.
-
[30]
AT 973. WP 2026. Rapport de mission d’information de l’Inspection générale de l’Administration sur le préfet Vignon au ministre de l’Intérieur, 26 octobre 1954 (22 pages).
-
[31]
Vignon (R.), Gran Man Baka…, op. cit., p. 56
-
[32]
Sur l’histoire socio-politique de Saint-Laurent-du-Maroni, cf. Guyon (S.), Du gouvernement colonial à la politique racialisée. Sociologie historique de la formation d’un espace politique local (1949-2008). Saint-Laurent du Maroni, Guyane, thèse pour le doctorat de science politique, Université Paris I, 2010 et Coquet (M.), La ville et le bagne. Histoire d’une commune pénitentiaire en terre coloniale : Saint-Laurent-du-Maroni, Guyane, 1857-1949, thèse pour le doctorat d’histoire, EHESS, 2016.
-
[33]
AT 973. WP 2026. Rapport de mission d’information de l’Inspection générale de l’Administration sur le préfet Vignon au ministre de l’Intérieur, 26 octobre 1954.
-
[34]
AN. 19940180.215. Rapport sur la situation de la Guyane du préfet Érignac, 26 juin 1962.
-
[35]
Décret n° 60-407 du 26 avril relatif à la déconcentration administrative et aux pouvoirs des préfets dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion, JORF, 29 avril 1960, p. 3945
-
[36]
Turrel (D.), « Une identité imposée : les marques des pauvres dans les villes des XVIe et XVIIe siècles », Cahiers de la Méditerranée, 66, 2003, [en ligne : https://cdlm.revues.org/97].
-
[37]
Malraux (A.), Le Miroir des Limbes I. Antimémoires, Paris, Gallimard, 1972, p. 136 et 143.
-
[38]
AT 973. PER 80. « Les agents des services public », Études et documents, INSEE Guyane, 1976, p. 7.
-
[39]
Maurice (E.), « Vers l’État post-colonial… », art. cit., p. 158-159.
-
[40]
Archives INSEE, Paris. S Guya.Fra 1 (1959-1961). Annuaire statistique de la Guyane, Paris, INSEE, 1962, p. 24.
-
[41]
AT 973. PER 80. « Les agents des services publics », Études et documents, INSEE Guyane, 1976, p. 11.
-
[42]
AN. 19940180.216. Rapport sur la situation de la Guyane du préfet Érignac, 20 juin 1963 (133 p.). Par exemple, en janvier 1963 le bureau saint-laurentais du Front démocratique de gauche qui rassemble toutes les formations politiques et syndicales autonomistes du département se compose quasi-exclusivement des enseignants des écoles de cette ville.
-
[43]
Archives départementales de Seine-Saint-Denis (désormais AD 93). 261 J7/18. Rapport d’information du député Marcel Clermontel au nom de la commission des Finances, de l’Économie générale et du Plan à la suite de la mission effectuée aux Antilles et en Guyane du 19 mars au 2 avril 1962.
-
[44]
Maurice (E.), « Vers l’État post-colonial… », art. cit.
-
[45]
Sur la singularité de ce parti dans l’espace politique guyanais, cf. Mam Lam Fouck (S.), « L’Union du peuple guyanais et l’invention du nationalisme en Guyane française (1955-1965) », Outre-Mers. Revue d’histoire, 352-353, 2006.
-
[46]
AD 93. 261J7/18. Lettre de T. Radamonthe, Secrétaire général de l’Union départementale-CGT, à Élie Mignot, Conseiller de l’Union française (1947-1958) et membre permanent de la section de politique extérieure du PCF, 12 avril 1958.
-
[47]
Maurice (E.), op. cit., p. 92-93. Observons que l’absence du PCF en Guyane n’exclut ni l’organisation de partis se réclamant du communisme, ni les candidatures sous étiquette communiste.
-
[48]
AT 973. 1114W. Rapport des Renseignements généraux, mars 1964.
-
[49]
Thénault (S.), « La gauche et la décolonisation », in Becker (J.-J.), Candar (G.), dir., Histoire des gauches en France. XXe siècle : à l’épreuve de l’histoire, Paris, La Découverte, 2005 (2004), p. 448.
-
[50]
Mam Lam Fouck (S.), Histoire de la Guyane contemporaine 1940-1982. Les mutations économiques, sociales et politiques, Paris, Éditions Caribéennes 1992, p. 366.
-
[51]
AN. 19940180.215. Rapport sur la situation de la Guyane du préfet Érignac, 26 juin 1962.
-
[52]
Maurice (E.), Les enseignants et la politisation de la Guyane…, op. cit., p. 60.
-
[53]
AN. 19940180.216. Rapport mensuel du préfet Érignac au ministre de l’Intérieur, février 1963.
-
[54]
Ibid.
-
[55]
Ibid.
-
[56]
AN. 19940180.215. Rapport mensuel du préfet Érignac au ministre de l’Intérieur, août 1961.
-
[57]
R. Vignon effectue donc son retour en Guyane en 1961. Il y trouve une terre qui comble son désir, cette fois, d’embrasser une carrière politique. D’abord élu conseiller général du canton d’Iracoubo et ce, pendant douze ans, il est, par la suite, sénateur de la Guyane (1962-1971) et maire de la commune de Maripasoula (1969-1976).
-
[58]
AN. 19940180.215. Rapport sur la situation de la Guyane du préfet Érignac, 26 juin 1962 et Vignon (R.), Gran Man Baka, op. cit., p. 317-318.
-
[59]
Worms (J.-P.), « Le préfet et ses notables », art. cit., p. 252.
-
[60]
AD 93. 261J7/18. Lettre de T. Radamonthe, Secrétaire général de l’Union départementale-CGT, à Élie Mignot, conseiller de l’Union française (1947-1958) et membre permanent de la section de politique extérieure du PCF, 1959.
-
[61]
AN. 19940180.215. Rapport sur la situation de la Guyane du préfet Érignac, 26 juin 1962 (114 p.)
-
[62]
Ibid.
-
[63]
AN. AG/5(F)/737. Rapport du Secrétaire général de la Préfecture de la Guyane à l’IGAME A. Trémeaud, 22 septembre 1958.
-
[64]
AN. AG/5(F)/737. Rapport sur la situation politique de la Guyane du Secrétaire général de la Préfecture de la Guyane au ministre de l’Intérieur, 29 septembre 1958 (13 pages).
-
[65]
AT 973. WP 514. Conférence des préfets des départements français d’Amérique tenue à Saint-Claude les 21-23 mars 1958 sous la présidence de M. l’IGAME pour les DOM (15 p.).
-
[66]
Archives de la Fondation nationale des sciences politiques, Paris (désormais AFNSP). Fonds Michel Debré. 2 DE 34. « La France, l’Afrique noire et Madagascar », note du secrétaire d’État chargé des relations avec la Communauté française au Premier ministre, février 1961.
-
[67]
AFNSP. Fonds Michel Debré. 2 DE 23. Lettre du Premier ministre au secrétaire d’État au Sahara, aux DOM et aux territoires d’outre-mer, 26 décembre 1961.
-
[68]
Sainton (J.-P.), La décolonisation improbable. Cultures politiques et conjonctures en Guadeloupe et en Martinique (1943-1967), Pointe-à-Pitre, Éditions Jasor, 2012, p. 297.
-
[69]
Archives nationales, Paris. F17 27939. Dossier de carrière de J. Catayée.
-
[70]
AN. AG/5(F)/737. Rapport sur la situation politique de la Guyane du Secrétaire général de la Préfecture de la Guyane au ministre de l’Intérieur, 29 septembre 1958 (13 p.).
-
[71]
Entretien avec Jean Catayée, Cayenne, 24 octobre 2015.
-
[72]
Maurice (E.), Les enseignants et la politisation de la Guyane…, op. cit.
-
[73]
Brasseur (G.), « La Guyane française. Un bilan de trente années », Notes et études documentaires, 4497-4498, 1978, p. 166.
-
[74]
Bibliothèque nationale de France, Paris. JO-7696. Catayée (J.), « Les libertés individuelles sont-elles menacées en Guyane Française », Debout Guyane, 13 septembre 1958.
-
[75]
Tanguy (G.), « “Le préfet dans tous ses états”. Une histoire de l’institution préfectorale est-elle (encore) possible ? », Histoire@Politique, 27, 2015 [en ligne : http://www.histoire-politique.fr/index.php?numero=27&rub=pistes&item=33].
-
[76]
AT 973. WP 2026. Rapport de mission d’information de l’Inspection générale de l’Administration sur le préfet de Guyane R. Vignon au ministre de l’Intérieur, 26 octobre 1954 (22 pages).
-
[77]
AT 973. PER 115. Catayée (J.), « Soyez le Bienvenu Monsieur le Préfet », Debout Guyane, 10 décembre 1960.
-
[78]
AN. 19940180.215. Rapport mensuel du préfet Érignac au ministre de l’Intérieur, décembre 1960.
-
[79]
AN. 19940180.215. Rapport mensuel du préfet Érignac au ministre de l’Intérieur, février et avril 1961.
-
[80]
Archives privées Pierre M. Lettre de J. Catayée à Pierre M, 24 février 1961.
-
[81]
AT 973. 1114W. Rapport des Renseignements généraux, mars 1961.
-
[82]
AT 973. 1114W. Rapport des Renseignements généraux, août 1961.
-
[83]
AT 973. 1114W. Rapport des Renseignements généraux, août 1961 et PER 115, Debout Guyane, 19 août 1961
-
[84]
AN. 19940180.215. Rapport mensuel du préfet Érignac au ministre de l’Intérieur, septembre 1961.
-
[85]
Rapport de la Commission d’information et de recherche historique du ministère de l’Outre-mer sur les événements de décembre 1959 en Martinique, de juin 1962 en Guyane et de mai 1967 en Guadeloupe.
-
[86]
Codaccioni (V.), Punir les opposants. PCF et procès politiques (1947-1962), Paris, CNRS Éditions, 2013.
-
[87]
AN. AG/5(F)/737. Rapport du Secrétaire général de la Préfecture de la Guyane à l’IGAME A. Trémeaud, 22 septembre 1958.
-
[88]
AD 93. 261J7/18. Lettre de T. Radamonthe, Secrétaire général de l’UD-CGT, à Marcel Dufriche, membre du bureau confédéral de la CGT et responsable des pays d’Outre-mer, 26 septembre 1958.
-
[89]
Malraux (A.), Le Miroir des Limbes…, op. cit., p. 145
-
[90]
Entretien J. Mariéma, Cayenne, 27 octobre 2013.
-
[91]
Thénault (S.), « La gauche et la décolonisation », in Becker (J.-J.), Candar (G.), dir., op. cit., p. 448.
-
[92]
AN. AG/5(F)/737. Rapport sur la situation politique de la Guyane du Secrétaire général de la Préfecture de la Guyane au ministre de l’Intérieur, 29 septembre 1958.
-
[93]
Grendi (E.), « Micro-analisi e storia sociale », Quaderni storici, 35, 1977.
-
[94]
Ordonnance 60-1101 du 15 octobre 1960, JORF, 18 octobre 1960, p. 9483.
-
[95]
Il faut indiquer que les fonctionnaires affectés dans les DOM bénéficient d’un régime de rémunération et de congés spécifiques. Cf. Maurice (E.), « Vers l’État postcolonial… », art. cit.
-
[96]
AD 93. 261J7/3. Réponse le 15 décembre 1961 du ministre des DOM-TOM à la question écrite du député de la Martinique, Le droit ouvrier, n° 189-190, mars-avril 1964, p. 30.
-
[97]
Séance du 10 octobre 1972, à l’Assemblée nationale, JORF, p. 4000. Toutefois, le même type d’ordonnance est mis en place à Mayotte en 1996. En 2011, un enseignant, dirigeant local du Réseau éducation sans frontières, a ainsi été muté en métropole. Le Canard enchaîné, 28 janvier 2012.
-
[98]
Audigier (F.), Girard (P.), dir., Se battre pour ses idées. La violence militante en France des années 1920 aux années 1970, Paris, Riveneuve Édition, 2012.
-
[99]
AT 973. 1114W. Note des Renseignements généraux, 23 mai 1962 et entretiens avec Bernard L., Paris, 16 mai et 10 juin 2014.
-
[100]
Archives privées de Pierre M. Lettre du Haut-Commissaire de la République, Gouverneur général de l’AOF au ministre de la France d’Outre-mer, 26 mars 1948.
-
[101]
Archives privées de Pierre M. et entretien avec Danièle-Djamila A. M., Neuilly-Plaisance, 9 juin 2014 et Gilberte M., Aix-en-Provence, 8 juillet 2015.
-
[102]
AT 973. 1114W. Note des Renseignements généraux, avril et octobre 1960.
-
[103]
Archives privées de Pierre M. Lettre de l’Inspecteur général adjoint au Directeur général des enseignements classiques et modernes à Pierre M., 22 novembre 1960.
-
[104]
Maurice (E.), op. cit., p. 73.
-
[105]
Archives privées de Pierre M. Lettre de J. Catayée à Pierre M., 29 novembre 1960.
-
[106]
Archives privées de Pierre M. Lettre de l’Inspecteur général adjoint au Directeur général des enseignements classiques et modernes à Pierre M., 3 décembre 1960.
-
[107]
AT 973. 1114W. Note des Renseignements généraux, 30 septembre 1960.
-
[108]
Archives privées de Pierre M. Lettre de J. Catayée à Pierre M., 16 décembre 1960.
-
[109]
Archives privées de Pierre M. Lettre de J. Catayée à Pierre M., 24 février 1961.
-
[110]
En 1972, au cours du débat parlementaire qui conduit à l’abrogation de l’ordonnance, le député de la Guyane confirme qu’aucun fonctionnaire natif de ce département n’a fait l’objet d’une mesure d’expulsion depuis sa mise en vigueur. Séance du 10 octobre 1972, à l’Assemblée nationale, JORF, p. 4005.
-
[111]
AD 93. 261 J7/3. Marcel Manville, « L’Ordonnance du 15 octobre 1960 sur le rappel d’office en Métropole des fonctionnaires des Départements d’Outre-Mer. Une résurrection du droit de bannissement », Le droit ouvrier, 189-190, mars-avril 1964, p. 27-30.
-
[112]
Juminer (B.), « De Dunkerque à Maripasoula ? », Présence africaine, 43 (3), 1962, p. 265.
-
[113]
AD 93. 261 J7/3. Réponse le 15 décembre 1961 du ministre des DOM-Tom à la question écrite du député de la Martinique, Le droit ouvrier, n° 189-190, mars-avril 1964, p. 30.
-
[114]
Juminer (B.), « De Dunkerque à Maripasoula ? », art. cit., p. 268.
-
[115]
Maurice (E.), Les enseignants et la politisation de la Guyane…, op. cit., p. 103.
-
[116]
Entretien avec Jean Catayée, Cayenne, 24 octobre 2015.
-
[117]
AT 973. 1114W. Note des renseignements généraux, septembre 1961.
-
[118]
AD 93. 261J7/18. Lettre de T. Radamonthe, Secrétaire général de l’Union Départementale-CGT, à Élie Mignot, Conseiller de l’Union française (1947-1958) et membre permanent de la section de politique extérieure du PCF, 1959.
-
[119]
AT 973. 1114W. Note des Renseignements généraux, 19 novembre 1960.
-
[120]
AN. AG/5(F)/737. Rapport sur la situation politique de la Guyane du Secrétaire général de la Préfecture de la Guyane au ministre de l’Intérieur, 29 septembre 1958.
-
[121]
AN. 19940180.215. Rapport mensuel du préfet Érignac au ministre de l’Intérieur, août 1961.
-
[122]
AN. 19940180.215. Rapport mensuel du préfet Érignac au ministre de l’Intérieur, novembre 1961.
-
[123]
Matonti (F.), Poupeau (F.), « Le capital militant. Essai de définition », Actes de la recherche en sciences sociales, 155 (5), 2004.
-
[124]
AN. 19940180.215. Rapport sur la situation de la Guyane du préfet Érignac, 26 juin 1962 (114 p.).
-
[125]
Worms (J.-P.), « Le préfet et ses notables », art. cit., p. 271.
-
[126]
AN. 19940180.215. Rapport mensuel du préfet Érignac au ministre de l’Intérieur, novembre 1961.
-
[127]
AT 973. WP 2026. Rapport de mission d’information de l’Inspection générale de l’Administration sur le préfet Vignon au ministre de l’Intérieur, 26 octobre 1954.
-
[128]
Bertrand (R.), Saada (E.), dir., « L’État colonial », Politix, 66, 2004, p. 11-13.
-
[129]
Kernalegen (T.), « Le réveil des revendications régionalistes et nationalitaires au tournant des années 1968 : analyse d’une “vague” nationale », Fédéralisme Régionalisme, 13, 2013, [en ligne : http://popups.ulg.ac.be/1374-3864/index.php?id=1195].
-
[130]
Codaccioni (V.), Justice d’exception. L’État face aux crimes politiques et terroristes, Paris, CNRS Éditions, 2015, p. 179.
-
[131]
Scott (R. J.) et Zeuske (M.), « Le “droit d’avoir des droits”. Les revendications des ex-esclaves à Cuba (1872-1909) », Annales, Histoire, Sciences Sociales, 3, 2004.
1Possession française depuis le XVIIe siècle, la Guyane accueille la loi du 19 mars 1946 sur la départementalisation avec enthousiasme, selon le témoignage de Gaston Monnerville, député de ce territoire de 1932 à 1946 [1]. La transformation de cette « vieille colonie » en un département constitue l’aboutissement d’un projet politique porté depuis le milieu du XIXe siècle par les élites créoles [2], composées de commerçants, de fonctionnaires de l’administration coloniale et de membres de professions libérales [3]. Le préfet en Guyane, comme dans d’autres territoires ultra-marins, n’a de ce fait pas toujours eu cette image de proconsul agent d’un État colonial, accréditée et décriée par les enseignants à la tête des partis autonomistes qui s’imposent sur la scène politique locale à partir de la fin des années 1950 [4]. Loin s’en faut. Dans les premières années de la départementalisation, le préfet et les notables créoles, « derrière les antagonismes de surface [5] », participent bien d’un même système fondé sur l’espoir partagé d’un futur développement économique et social et, pour ce faire, sur une collaboration dans la défense des intérêts de leur département.
2C’est au cours de l’été 1947 que les préfets des nouveaux départements d’Outre-mer (DOM), accompagnés par Jules Moch, le ministre des Travaux publics et des Transports, sont installés. Leur arrivée donne lieu à de nombreuses manifestations de ferveur et d’optimisme [6]. À l’instar de leurs homologues qui, presque 150 ans plus tôt, devaient contribuer, sur les bases héritées de la Révolution, à la « grandeur » de l’État dans le cadre départemental, ils ont l’honneur et la lourde tâche de mettre en œuvre le passage du statut de colonie à celui de département français. Dans le cadre d’un État-providence émergent, les préfets d’Outre-mer deviennent à la fois les symboles et les garants des profondes aspirations à l’égalité sociale des populations ultramarines. Tirant un bilan de leur action, Pierre Trouillé, le premier préfet de la Martinique, l’énonce à l’occasion de l’assemblée générale de l’Association du corps préfectoral en 1951. Ainsi pointe-t-il que « les considérations sociales étaient sans nul doute, les plus dignes de l’attention des nouveaux administrateurs, car l’intégration avait essentiellement représenté pour la masse populaire l’accès au bénéfice d’une législation sociale inconnue mais mirifique [7] ». Unique représentant dans le département d’un gouvernement qui, depuis la conférence de Brazzaville de 1944, redéfinit ses relations avec ses possessions coloniales, le préfet d’Outre-mer conçoit également sa charge comme une réponse, dans l’espace régional dans lequel est situé son département, aux impératifs de ce renouveau impérial. Soustraire à l’exception coloniale les populations en les plaçant « dans le droit commun des Français [8] » relève d’un credo que partagent préfet et élites sociopolitiques créoles. Il ne faut donc pas s’étonner que la grande majorité de ces élites condamne la motion de la conférence interaméricaine de Bogota d’avril 1948, selon laquelle la départementalisation serait une décolonisation factice. Une dizaine d’années plus tard, cette rencontre administrative inédite se trouve pourtant bouleversée par l’affirmation d’une bipolarisation du jeu politique ultramarin qui s’articule entre une gauche locale autonomiste et une droite départementaliste, déclinaison guyanaise des partis hexagonaux. Il s’ensuit une violente configuration conflictuelle opposant militants autonomistes politisés et préfet qui, pour bâillonner les premiers, n’hésite pas à user de ses importants pouvoirs de coercition.
3De ce point de vue, singulier est le cas de la Guyane, seul territoire continental de l’Outre-mer français. Jusqu’en 1951, le préfet y porte également le titre de gouverneur du Territoire de l’Inini, une colonie d’administration directe créée en 1930 qui s’étend, au-delà de la zone côtière départementalisée, sur 90 % de la superficie du territoire guyanais. Si la Guyane est peuplée majoritairement de Créoles, à l’instar des autres DOM, elle compte en effet des Amérindiens et des Noirs-Marrons, fréquemment établis en sociétés hiérarchisées et autonomes dans cet intérieur amazonien sous administration coloniale. Par ailleurs, la revendication autonomiste reste animée aujourd’hui, dans ce territoire, par des élus politiques créoles, qui se présentent comme les héritiers des élites politiques des années 1950 et qui ont, comme leurs prédécesseurs, pour dénominateur commun d’avoir exercé la profession d’enseignant [9]. Entre 1946 et le début des années 1960, cinq préfets se succèdent à la tête de la Guyane. Souvent issus des cabinets ministériels, à l’instar de nombreux préfets de la IVe et de la Ve République [10], ceux-ci se rejoignent cependant autour d’un fait : ils exercent pour la première fois en Guyane cette haute fonction [11]. Face à eux, avec huit élus, les enseignants forment, dans les années 1950 et 1960, le groupe socioprofessionnel le plus représenté au conseil général [12]. De surcroît, deux tiers de ces enseignants qui siègent dans la plus haute assemblée délibérative du département sont affiliés aux partis autonomistes [13]. [14]
Liste des préfets en Guyane de 1946 au tournant des années 1960
Liste des préfets en Guyane de 1946 au tournant des années 1960
4Dans ce cadre, cet article vise à appréhender la structuration d’un nouvel espace politique postcolonial dans l’ensemble national [15]. Après avoir analysé les pratiques du premier préfet de la Guyane, nous expliquerons comment, à partir de la fin des années 1950, l’affirmation d’une gauche locale autonomiste, au sein de laquelle un groupe d’enseignants joue un rôle majeur, conduit à un violent face-à-face préfet/autonomistes. Ce moment sera l’occasion de s’intéresser particulièrement aux relations qui opposent le premier préfet de la Guyane à la fois muni au préalable d’une expérience aux Antilles et auteur de deux longs rapports sur la vie politique de ce département au premier enseignant autonomiste élu député en 1958. Enfin, ces relations conflictuelles permettront de revenir sur l’outil le plus représentatif, dans la mémoire guyanaise, de l’ampleur des pouvoirs de coercition d’un préfet d’Outre-mer mais aussi des limites de ses pouvoirs exorbitants. Plus largement, nous montrerons, en effet, que la construction de l’État postcolonial dans une périphérie éloignée du centre est le produit d’un processus qui accélère l’émergence d’une nouvelle élite et contraint son plus haut représentant à ne plus occuper le devant de la scène, en dépit de l’étendue de ses pouvoirs.
Les premiers pas de la départementalisation : entre convergence d’intérêts et inquiétudes
5La départementalisation reçoit à ses débuts le soutien quasi unanime des enseignants créoles de Guyane, qui représentent plus des deux tiers des 93 membres du personnel éducatif local recensés en 1945. Ces derniers en attendent la fin de l’opposition coloniale entre cadres métropolitains, c’est-à-dire enseignants du ministère de l’Éducation nationale détachés au ministère des Colonies, et cadres locaux dont la carrière dépend en grande partie d’arrêtés rendus par le gouverneur [16]. Né à Constantine en 1910, doté uniquement d’une expérience dans les cabinets de préfecture, Robert Vignon tient à 37 ans du jeune préfet inexpérimenté, profondément animé cependant de cette volonté de changements simultanés dans tous les domaines [17]. Voulant marquer la rupture avec l’administration coloniale, il bouleverse, par exemple, les usages en organisant en novembre 1947 au lycée Félix Éboué, seul établissement secondaire public du département jusqu’en 1968 et, en l’absence d’enseignement supérieur, le plus haut lieu d’éducation du territoire, une « rentrée solennelle [18] ». Dans un discours prononcé devant professeurs et élèves, R. Vignon rappelle d’abord ses « liens affectifs » avec le corps enseignant : son père fut directeur d’école, sa mère, institutrice. Il expose ensuite, aux élèves comme aux professeurs, leurs devoirs de Français et de Français de Guyane. En tant que Français, les uns et les autres sont tenus de s’« imprégner […] de cette culture française qui a assuré le rayonnement de [sa] pensée au-delà des mers, sur tous les continents ». En tant que Français de Guyane, ils doivent manifester « une vue très large et très haute des […] destinées économiques [de la Guyane…] un pays encore neuf où beaucoup reste à faire, à créer, à développer ». En somme, conclut le préfet, il s’agit de « refaire la Guyane, par la Guyane, pour la Guyane, pour la plus grande France [19] ». Dans ses mémoires parues en 1985, trente ans après avoir quitté sa fonction, R. Vignon souligne que le lycée représentait la clé de voûte de cette grande idée qu’il concevait pour la Guyane. Ainsi avait-il pour ambition que cet établissement acquière une réputation dans toute l’Amérique du Sud et concurrence les universités américaines aux moyens d’une « armée de professeurs d’élite [20] ». Ce discours et cette vision du rôle du champ éducatif, développés par le préfet Vignon, témoignent d’une dimension émancipatrice de la départementalisation en Guyane alors largement partagée.
6Les enseignants et la classe politique guyanaise y adhèrent pour deux raisons. Premièrement parce que le préfet entend inscrire son action dans la durée, à la différence des anciens gouverneurs. Dès 1948, il requiert de sa hiérarchie « 10 ans pour faire de […] la Guyane l’un des plus riches territoires de l’Union française [21] », rapporte l’inspecteur général de l’Administration Bardon en mission extraordinaire (IGAME) dans les DOM. Deuxièmement, les projets du préfet Vignon s’accompagnent pour la première fois d’une forte participation financière de l’État. « Aucun Préfet ne fera tomber la manne comme M. Vignon l’a fait [22] », fait valoir l’inspecteur Bardon lorsqu’il dresse un bilan de l’œuvre accomplie par ce préfet après huit ans d’exercice, soit jusqu’à ce jour la plus longue période de fonction d’un préfet dans l’Outre-mer.
7En définitive, d’un côté l’inédite installation de l’institution préfectorale dans les DOM et le prestige traditionnel auquel celle-ci est attachée, de l’autre la jeunesse et l’engagement volontaire de R. Vignon nourrissent l’espoir de lendemains prometteurs aussi bien pour les enseignants que pour l’ensemble de la population guyanaise. Plus qu’un administrateur, le préfet en Guyane est un bâtisseur et un aménageur de vastes projets pour son département [23]. En ce sens, R. Vignon marque profondément la nature de l’institution préfectorale en Guyane et la mémoire locale.
8Si le préfet Vignon trouve en Guyane à la fois un champ d’action immense et inédit et l’appui des populations administrées, il reste que, souvenirs des formes d’exception coloniale, les moyens de son action et ses pratiques font naître des inquiétudes. Le député gaulliste et créole guyanais Édouard Gaumont (1951-1958) tente ainsi d’obtenir en 1954 la création d’une commission parlementaire chargée d’examiner les conditions dans lesquelles fonctionne l’administration préfectorale de son département. Il est vrai qu’É. Gaumont, ex-avocat à la cour d’appel d’Aix-en-Provence et capitaine d’infanterie coloniale, tient du notable créole dont l’élection à la députation marque l’implantation locale du Rassemblement du peuple français (RPF) qui ne cesse, depuis 1947, de présenter Vignon comme un « préfet SFIO [Section française de l’Internationale ouvrière] » [24].
9Toutefois, la nomination des préfets n’étant effectuée qu’en juillet 1947, les nouveaux départements demeurent soumis à l’administration coloniale, « pendant près de 18 mois, alors que la loi est votée [25] ». La fonction de préfet « devenait simultanément et par la force des choses [celle] de Gouverneur [26] » concède en 1951 l’ancien préfet de la Martinique. Au demeurant, le décret du 7 juin 1947 leur attribue sans ambiguïté des pouvoirs antérieurement reconnus aux gouverneurs des colonies. Comme eux, les nouveaux préfets exercent un strict contrôle hiérarchique sur les fonctionnaires de leur département. Ils ont, de surcroît, la possibilité de les suspendre provisoirement – à l’exception des magistrats. En Guyane, cette coïncidence trouble entre pouvoirs républicains du préfet et attributions coloniales des gouverneurs est plus manifeste encore puisque, nous l’avons vu plus haut, le préfet représente le seul membre du corps préfectoral à cumuler, jusqu’en 1951, la fonction de gouverneur d’une colonie, celle du Territoire de l’Inini. Signe éloquent de cette double position, jusqu’à la fin des années 1960, il réside dans l’ancien hôtel des gouverneurs. En septembre 1951, une loi transforme l’Inini en un arrondissement doté d’un statut particulier, pendant dix ans, qui maintient au préfet les pouvoirs des gouverneurs. Il faut attendre 1969 pour qu’un décret mette fin à cette législation d’exception, mais aucun statut ne vient régler la situation de l’arrondissement de l’Inini qui n’a plus d’existence légale. Autrement dit, sous la forme coloniale ou celle d’un arrondissement, l’Inini devient un instrument majeur du pouvoir du préfet. Ce faisant, quand le préfet Vignon « entend engager certaines dépenses sans avoir à en référer à qui que ce soit, il peut puiser dans le budget de l’arrondissement de l’Inini [27] ».
10Les inquiétudes portées sur les modalités d’action du préfet Vignon s’expliquent également par « l’empirisme » dont il fait preuve dans ses pratiques administratives, empirisme qui le conduit à contourner parfois les règles. Au début des années 1960, compte tenu de la distance avec Paris, les communications téléphoniques entre la préfecture et les administrations centrales, lorsqu’elles ne sont pas interrompues par les perturbations climatiques, ne peuvent s’effectuer « que de 9 heures à 13 heures [28] ». Né en 1909 dans le Cantal, directeur de cabinet du premier préfet de la Guadeloupe puis sous-préfet de Pointe-à-Pitre, le préfet René Érignac (1960-1963) déplore également que « les délais nécessaires pour obtenir une réponse […] des différentes administrations centrales [soient] parfois extrêmement longs, même pour les affaires les plus simples [29] ». Ces obstacles à l’action préfectorale peuvent pourtant devenir un atout selon la personnalité du préfet. « Un Préfet d’Outre-mer, accrocheur, batailleur, obstiné fait ce qu’il veut » affirme l’inspecteur Bardon. C’est ainsi qu’« au bout de quelques mois de démarches de tout genre, M. Vignon finit par obtenir des crédits d’abord refusés. Quant aux refus de départ des autorités de tutelle, ils se dissolvent bien souvent en acquiescement de lassitude, donnés – cela va sans dire – à “titre tout à fait exceptionnel” [30] ». Dans son autobiographie, R. Vignon illustre cet aspect de sa pratique administrative par le stratagème suivant : « Faute de réponse de votre part avant telle date, je considèrerai ma proposition comme ayant votre agrément et la mettrai à exécution [31] » forme la conclusion de ses rapports. En 1949, il procède ainsi pour abroger le régime colonial de la commune pénitentiaire de Saint-Laurent-du-Maroni, la deuxième ville la plus peuplée de la Guyane [32].
11Si ces formes personnelles de pratiques administratives « avaient eu pour théâtre un quelconque département de la France continentale », elles « seraient graves » et « difficilement défendables », juge l’Inspecteur Bardon. L’œuvre de Vignon, poursuit-il, s’est réalisée au mépris « de toute prudence humaine et politique, [d’]une indifférence éperdue à l’endroit des procédures légales et des considérations d’ordre financier [33] ». Au surplus, selon le préfet Érignac, la genèse de la revendication d’un « statut spécial » pour la Guyane, leitmotiv de la vie politique locale à partir du milieu des années 1950, doit être attribuée au préfet Vignon. Au cours d’une séance du conseil général en 1950, celui-ci aurait lancé cette expression appelée à un grand souvenir, en raison du fait « que le Préfet de ce lointain département ne disposait pas de pouvoirs suffisants et que l’Assemblée départementale devait être consultée sur les problèmes essentiels concernant l’avenir économique et social du territoire [34] ».
12Dix ans plus tard pourtant, la visite en avril 1960 du président de la République, pour la première fois dans l’histoire de la Guyane, s’accompagne de décrets qui accroissent considérablement les pouvoirs du préfet outre-mer. Par exemple, le préfet coordonne désormais « les activités de tous les chefs des services civils [35] ». L’étendue de ces prérogatives institutionnelles accroît également son prestige social et symbolique. Dès la fin des années 1950, André Malraux, envoyé par le général de Gaulle en tournée dans les Antilles et en Guyane pour défendre le « oui » au référendum sur la Constitution de 1958, observe avec surprise et sarcasme le faste et la majesté dont se pare le préfet Pierre Voitellier (1957-1958) lors des représentations protocolaires. D’origine parisienne et époux de la fille du préfet Édouard Kuntz, P. Voitellier semble vouloir tirer parti de cette visite pour marquer son nouveau rang et sa « résonance sociale [36] ». Il accueille donc le délégué du général de Gaulle « dans une Cadillac de grand luxe » lors même que les ministres, selon A. Malraux, ne disposent à cette époque « que de Citroën ». À la préfecture, il en vient même à singer « les réceptions de l’Élysée. [37] »
13Plus haut personnage du département, le préfet y recherche la prééminence absolue à la faveur des pouvoirs très étendus dont il dispose et de pratiques personnelles qui l’amènent à se réserver sans partage la maîtrise de l’action. Il devient de ce fait la cible privilégiée des enseignants engagés dans les partis de la gauche autonomiste.
Au tournant des années 1960 : préfets et militants autonomistes en conflit
14À partir de la fin des années 1950, l’affirmation d’une gauche guyanaise autonomiste dans le champ politique est le facteur majeur d’un intense conflit entre le préfet et les militants de cette gauche locale, au sein de laquelle un groupe d’enseignants va jouer un rôle majeur. L’entrée en scène de cette mouvance politique représente, à maints égards, une rupture du régime de gouvernement établi par le préfet Vignon.
15Ce dernier, dans le contexte d’une départementalisation qui vise à faire de la Guyane, au moyen de considérables transferts financiers de l’État, l’équivalent de n’importe quelle parcelle de l’espace hexagonal, est un artisan majeur de la modernisation de ce département. Bien qu’elle compte moins de 35 000 habitants au recensement de 1961, la Guyane se trouve équipée de presque tous les services départementaux. Il s’ensuit un recrutement massif de fonctionnaires. Entre 1954 et 1961, l’effectif total des agents de l’État et des collectivités locales passe de 1 118 à 2 425 [38], soit une augmentation de 116 %. Celui de l’Éducation nationale connaît dans ce mouvement général, et ce jusqu’à la fin des années 1960, la plus forte croissance [39]. De 93 en 1945, il atteint 209 enseignants en 1961, dont plus des trois-quarts relèvent du premier degré [40]. À la fin de la décennie 1960, les fonctionnaires de ce ministère représentent de ce fait plus d’un cinquième des agents de l’État en service en Guyane [41]. Toujours majoritairement d’origine créole, ils forment, selon le préfet Érignac, les agents « les plus marqués par la politique », de surcroît « plutôt en faveur des partis extrémistes ou antigouvernementaux. » « Les éléments les plus agressifs et les plus dangereux », surenchérit-il, se retrouvent parmi les professeurs qui exercent dans le seul lycée du département et dirigent les partis autonomistes. Il faut y ajouter « un certain nombre d’instituteurs en service […] dans les deux principales villes [du] département : Cayenne et Saint-Laurent [42]. » Cette analyse du jeu politique guyanais est largement relayée à Paris. À la suite d’une mission effectuée aux Antilles et en Guyane au début du deuxième trimestre de l’année 1962, le député gaulliste du Puy-de-Dôme Marcel Clermontel, ancien membre actif du RPF et rapporteur du budget de l’Éducation nationale de 1959 à 1961, se désole « que ce soit parmi les enseignants […] que se rencontrent trop souvent les plus virulents propagandistes d’idées subversives [43] ».
16Depuis le milieu des années 1950, des enseignants créoles guyanais créent et animent en effet des partis locaux qui multiplient les charges à l’encontre du régime départemental, au nom d’une mise en œuvre de la départementalisation qui témoigne de discriminations de toutes sortes et, finalement, de continuités avec un passé colonial qu’ils croyaient révolu [44]. Il en va ainsi de Justin Catayée, professeur de mathématiques né à Cayenne en 1916, qui quarante ans plus tard fonde et dirige le Parti socialiste guyanais (PSG). C’est aussi le cas de deux membres de la petite bourgeoisie dont les pères figurent parmi les premiers instituteurs créoles guyanais élus aux plus hautes fonctions politiques : l’un, Serge Patient, né en 1934, est le fils du premier sénateur de l’histoire de la Guyane ; l’autre, Edmes Léonço, né en 1923, celui du seul enseignant membre du conseil général lors de l’installation du préfet Vignon en août 1947. Le premier devient professeur d’espagnol et occupe la fonction de secrétaire général adjoint à la création de l’Union du peuple guyanais (UPG) [45] en décembre 1958, le second, professeur de sciences physiques, celle de trésorier. Enfin, cette gauche guyanaise autonomiste émerge également à l’initiative de Marius Miron, marxiste d’origine martiniquaise né en 1924, qui enseigne la philosophie au lycée Félix Éboué. En 1958, M. Miron est nommé secrétaire général du Réveil progressiste guyanais (RPG) afin de relancer l’activité de ce parti, fondé en 1947 par un jeune instituteur et « plongé en sommeil » en 1951 à la suite de la création d’une fédération SFIO [46]. Fait singulier à l’endroit de ce jeu politique guyanais, la SFIO ne dispose d’aucune structure avant la départementalisation et, à la différence des autres DOM, le Parti communiste français (PCF) n’a jamais souhaité organiser de fédération dans ce territoire [47]. Cela accentue à n’en pas douter l’influence de cette gauche autonomiste. Celle-ci est telle qu’à l’occasion des cantonales de mars 1964, la prise de position d’une institutrice membre de la section saint-laurentaise de l’UPG en faveur d’un candidat, pourtant jeune et novice, est perçue par l’administration préfectorale comme un soutien décisif qui affaiblit le conseiller sortant départementaliste Joseph Symphorien, président du conseil général et élu de cette assemblée sans discontinuité depuis 1945 [48].
Les forces politiques en Guyane au début des années 1960
Les forces politiques en Guyane au début des années 1960
17Au total, sur les sept partis que compte la Guyane à la fin des années 1950, quatre se rattachent à une gauche guyanaise qui prône une plus importante prise de décisions locales ; trois parmi ces quatre ont à leur tête des professeurs du lycée qui, au moment où ils accèdent à ces fonctions dirigeantes, n’ont pas plus de quarante ans. Leur conscience et leur socialisation politique se produisent « en même temps que la décolonisation », si bien que cette dernière leur paraît « une source de mobilisation primordiale [49] ». Une première politisation pendant leurs études universitaires en France continentale et une reconnaissance accrue de leur statut d’intellectuel aux multiples réseaux, dans un espace social étroit dont, jusqu’à la fin des années 1960, seuls 8 % des plus de vingt-cinq ans disposent au moins d’un diplôme du niveau du baccalauréat [50], concourent à les faire percevoir comme de nouvelles figures politiques. Face à eux, les anciennes élites sociopolitiques créoles guyanaises, taxées de départementalistes, font en l’occurrence bien pâle figure, bien qu’elles conservent la majeure partie des positions clés. Les leaders enseignants autonomistes les contraignent même à rallier la revendication de la délégation de davantage de compétences pour gérer un territoire fort éloigné du centre. Au tournant des années 1960, aucune élection locale et nationale ne se joue en Guyane sans que la réforme du statut départemental ne soit au premier plan. Il n’est de manifestation, de congrès et de comité, organisés sous l’égide de cette gauche guyanaise, sans qu’une pétition ou un projet de statut spécial pour la Guyane n’aboutisse à la préfecture.
18Le clivage autonomiste/départementaliste que cette gauche autonomiste promeut recoupe progressivement une opposition Créole/Métropolitain, ce dernier terme relevant d’un euphémisme pour désigner les Blancs accusés de monopoliser les nouveaux postes de cadres et de techniciens offerts par la départementalisation. « Aucun chef de service n’est guyanais et s’il y a eu, avant 1946, des fonctionnaires occupant un rang élevé dans la hiérarchie administrative, c’était dans l’Administration coloniale et, de préférence, en service hors de Guyane », reconnaît le préfet Érignac [51]. Dans le champ scolaire, à la fin des années 1960, deux tiers des professeurs du secondaire sont des agents métropolitains [52]. Les enseignants créoles à la tête des formations de cette gauche autonomiste trouvent alors deux inlassables angles d’attaque : les métropolitains et le statut départemental. De son côté, R. Érignac ne cesse de dénoncer leur « campagne raciste qui […] favorise la formation d’un fossé entre les métropolitains et les “créoles” [53]. » Pour preuve, il cite « divers incidents […] symptomatiques », à l’image, en janvier 1963, d’un élève métropolitain de classe de cinquième qui aurait tenté de se suicider à cause des « brimades que lui [auraient] infligées un groupe de camarades “créoles” [54] » et, en février, de la même année « de véritables batailles rangées entre enfants des deux origines [55] » à la sortie du lycée.
19Résumons. L’émergence d’une gauche guyanaise autonomiste sous la houlette de professeurs créoles contribue à une inédite bipolarisation de la scène politique. Le préfet y tient, malgré lui, le rôle de chef de file du parti départementaliste, lequel regroupe la majorité des élus locaux empêtrés dans des luttes de clans qui opposent le maire de Cayenne au sénateur de la Guyane et dépourvus de partis suffisamment forts et encadrés pour soutenir l’action gouvernementale [56]. Cela explique que le préfet Érignac sollicite vivement et obtienne la candidature de l’ancien préfet R. Vignon aux cantonales de 1961 [57], tant l’effraie l’idée de côtoyer J. Catayée, le leader du PSG, à l’assemblée départementale [58]. Le préfet apparaît de ce fait comme le symbole du maintien des Européens métropolitains dans la direction politique et administrative du territoire. Il devient ainsi le « bouc-émissaire favori » des autonomistes qui n’hésitent pas à lui prêter « les plus noirs desseins manipulateurs [59] », tel celui d’entraver la guyanisation des cadres.
Radicalisation et répression
20Les séquences conflictuelles entre les enseignants engagés dans les formations autonomistes et les préfets de Guyane qui s’ensuivent font progressivement se succéder radicalisation des uns et mesures répressives des autres. De 1958 à 1962, les relations entre J. Catayée, la figure autonomiste la plus marquante, et les successifs préfets constituent une illustration éclairante.
21L’engagement politique de J. Catayée en Guyane se concrétise d’abord par un rôle actif dans la création d’une fédération guyanaise de la SFIO en octobre 1951, date à laquelle il est titularisé dans le grade des professeurs certifiés. Turenne Radamonthe, le leader local cégétiste, relève avec dépit comment, sous l’influence de J. Catayée, la SFIO « prêche l’anticommunisme » et attire la majorité des militants du RPG [60]. Aux yeux de ses contemporains, y compris les préfets, J. Catayée dispose des qualités attendues d’un homme politique. Par exemple, il « répond aux sollicitations, tient des audiences, se déplace à travers le département [61] ». Aussi, lorsqu’à la suite de dissensions politiques sur le choix du candidat à présenter aux législatives de 1956, il quitte la SFIO pour fonder le PSG, ce parti s’impose rapidement comme le premier et le « seul parti véritablement organisé en Guyane [62] ». Il faut dire, qu’avant les relations conflictuelles avec J. Catayée que nous allons décrire plus bas, l’administration préfectorale participe pleinement à cette rapide ascension. En septembre 1958, pendant la campagne du référendum sur la constitution, A. Malraux a pour mission principale en Guyane de retourner la position de J. Catayée. À la suite d’un entretien avec A. Malraux, J. Catayée se déclare de manière inattendue pour le « oui ». Il tire alors profit des immenses moyens mis à sa disposition par la préfecture pour promouvoir la position gouvernementale et se construire une stature départementale [63]. Quatre ans plus tard, fort de ses 1 200 adhérents, le PSG s’est implanté dans les quartiers populaires de la banlieue sud de Cayenne et compte des sections dans la plupart des communes du département. Sa capacité de mobilisation est donc redoutée. Le secrétaire général de la préfecture estime, par exemple, qu’il « peut sans aucune difficulté grouper 200 à 300 personnes décidées à organiser une manifestation violente [64] ».
22La prise de conscience, progressive et tardive, chez l’État gaulliste, au tournant des années 1960, de l’affirmation simultanée d’une revendication autonomiste dans les trois départements français d’Amérique permet de comprendre ce revirement à l’égard de J. Catayée. En mars 1958, à l’issue des exposés des préfets d’Outre-mer sur la situation politique de leur département à la veille des élections cantonales et sénatoriales, l’IGAME André Trémeaud se propose d’informer le gouvernement que ce désir de « “self-government”, d’autodétermination, […] a fait de grands progrès » en raison, suggère-t-il, de « l’exemple africain [qui a] joué un grand rôle [dans] la création de ces mouvements à tendance autonomiste [65]. » Dès alors, cette « véritable mystique de la décolonisation, avec comme consécration l’entrée à l’ONU [66] » ne doit pas s’étendre aux DOM. Par exemple, en 1961, le Premier ministre, Michel Debré, somme son secrétaire d’État aux DOM, Jean de Broglie, l’un des principaux négociateurs des futurs accords d’Évian de mars 1962, de faire voter tout texte qui favorise la lutte contre toute « manœuvre sécessionniste dans les DOM. [67] » Cette injonction illustre assurément ce que Jean-Pierre Sainton nomme la « doctrine Debré » ou la politique de répression menée par l’État à l’encontre des autonomistes ultramarins dans les années 1960 [68].
23Dans ce contexte, afin d’obtenir la mutation de J. Catayée hors de Guyane, le préfet Voitellier saisit, en juin 1958, le directeur général de l’enseignement secondaire. Ce dernier lui répond que « les règlements actuels ne permettent pas de déplacer d’office un professeur [69] ». Le préfet s’engage alors plus directement dans la voie répressive. Dans un premier temps, sans consulter le ministère de l’Intérieur, il refuse d’attribuer au PSG le statut de « parti officiel » à l’occasion de la campagne du référendum pour la nouvelle constitution. Lorsque J. Catayée se prononce pour le « non », le préfet décide, dans un second temps, de « mettre fin […] à une longue tolérance concernant l’application des lois sur les attroupements et les haut-parleurs [70] ». J. Catayée a en effet introduit la pratique à l’entrée du local de la SFIO, à Cayenne, d’installer un haut-parleur le jour de la réunion hebdomadaire du parti [71]. Il maintient cette pratique au PSG dont les réunions, quasi quotidiennes, se tiennent en plein centre de Cayenne, au 34 rue Voltaire, aujourd’hui rue Justin Catayée, et peuvent attirer jusqu’à huit cents personnes [72]. Dans le journal de son parti, Debout Guyane, tiré à plus de deux mille exemplaires – tirage supérieur à celui de la presse publiée par la préfecture [73] –, J. Catayée défie l’autorité préfectorale. Il invite ses « compatriotes et amis de la Guyane », ses « amis des communes », à assister « en masse à […la] très importante conférence » du mercredi qui suit l’interdiction prononcée par le préfet Voitellier [74].
24Ce premier conflit entre J. Catayée et le préfet s’achève en octobre 1958. À la suite des incidents provoqués par les militants du RPG pendant un discours qu’A. Malraux voulait triomphal, le préfet Voitellier est révoqué. Si « la mutation et la révocation semblent l’alpha et l’oméga [75] » de l’histoire du corps préfectoral, le chef du PSG ne manque pas de faire du limogeage du préfet une victoire personnelle. Alors qu’à l’échelle nationale les élections législatives de novembre 1958 plébiscitent le gaullisme, en Guyane, celles-ci consacrent l’idée autonomiste à travers la victoire de J. Catayée, dès alors premier enseignant de ce territoire à accéder à la députation. Si le préfet Vignon tenait « tout en mains en Guyane et […] toute la Guyane dans ses mains [76] », au tournant des années 1960, le préfet de la Guyane doit désormais partager son « trône » avec un député, dont la notoriété s’est construite, en partie, sur la remise en cause de la légitimité de l’institution préfectorale dans les DOM.
25Fort de la confirmation électorale de son assise populaire, J. Catayée signifie au préfet Érignac, dès son entrée en fonction, ce nouveau rapport de force. Dans un article paru dans le numéro du 10 décembre 1960 de Debout Guyane, il le somme de ne pas ignorer la représentation parlementaire. « Souffrez que nous réclamions de vous des actes positifs de nature à dégeler cette ambiance terriblement lourde que vous ont léguée vos prédécesseurs » trompète J. Catayée, puisque, selon lui, le préfet Érignac aura « à présider un régime transitoire [77] ». Ce dernier, « tant en privé qu’en public, notamment devant l’Assemblée départementale » réplique par « une mise au point énergique » et un « hommage au travail réalisé par [son] prédécesseur [78] ». Deux mois après son installation, la virulence des attaques dont il est la cible le conduit à rompre ses relations avec J. Catayée, cependant que celui-ci prend l’engagement d’obtenir le rappel immédiat du préfet [79]. Ainsi, dans un courrier de février 1961 adressé à un ami, il explique ne pas croire « que le nouveau préfet restera très longtemps » tant « dans le domaine politique [il a] pris une attitude locale très violente [80] ». J. Catayée opte alors pour la menace directe : « Si le Préfet restait en Guyane, nous entrerions dans la rébellion ouverte et systématique [81] ». En raison d’un nouvel article outrancier, le préfet fait saisir le numéro du 5 août 1961 de l’organe de J. Catayée. Ce dernier y déclare notamment : « Bien que nous ne soyons pas sûrs que ses capacités intellectuelles comme ses capacités mentales soient en mesure de nous comprendre, nous devons dire à cet Érignac qu’il n’est qu’un fonctionnaire d’exécution. […] Il voudrait être Préfet, la belle blague. [82] » À l’évidence, la mesure préfectorale ne tempère nullement le député. Alors que le préfet Érignac envisage, comme son prédécesseur P. Voitellier, de faire interdire l’usage des haut-parleurs pendant les réunions publiques, J. Catayée lui rappelle qu’une telle tentative « a déjà valu le limogeage d’un préfet [83] ». En septembre, « au micro de son parti », il en vient même à provoquer le préfet en duel [84]. La virulence du conflit entre les deux hommes, qui s’exprime dans les arènes publiques et privées du jeu politique, prend fin avec le décès du député dans un accident d’avion le 22 juin 1962. La thèse d’un complot ourdi par l’État prend aussitôt corps dans les milieux autonomistes [85].
26L’institution préfectorale a montré en effet sa capacité à multiplier les coups bas pour disqualifier le mouvement autonomiste et garantir, de son point de vue, l’unité nationale. « Punir les opposants [86] » est bien le répertoire d’action privilégié dans la lutte contre les forces autonomistes. Dès le lendemain de la démonstration de force des militants du RPG pendant le discours d’A. Malraux, dans le cadre de sa tournée de propagande dans les DOM en faveur de l’approbation du référendum de 1958, onze manifestants sont arrêtés, incarcérés et inculpés pour coups et blessures et rébellion puis, six jours plus tard, jugés et condamnés. Olivier Philip, alors préfet intérimaire, rapporte à l’inspecteur A. Trémeaud, promu secrétaire général pour les DOM, comment il a pris « contact avec la magistrature pour que les peines soient légères pour les porteurs de pancartes et très sévères pour les autres [87] ». Parmi ces derniers, retenons la figure de Jean Mariéma. Né à Cayenne en 1931, il tient pour ses compagnons d’arme de l’instituteur « défenseur acharné de la tendance cégétiste à la section guyanaise du Syndicat [national] des instituteurs [88] », pour d’autres, tel A. Malraux, d’un « instituteur abruti [89] ». Outre une amende, J. Mariéma est condamné à deux mois de prison ferme ; en appel, en décembre 1958, à quatre mois de prison et à un an de suspension de traitement [90]. Bien que son père, André Philip, ministre socialiste de l’Économie entre 1946 et 1947, incarne « dès la fin des années 1940, une option d’ouverture envers les revendications exprimées outre-mer [91] », O. Philip se félicite que « l’appareil répressif de l’autorité gouvernementale » ait fait ses preuves en Guyane « aussi rapidement et aussi énergiquement [92] ». Cette allégeance des magistrats outre-mer à l’autorité préfectorale souligne en creux le caractère « exceptionnel normal [93] » du recours à la violence politico-judiciaire à l’encontre des militants autonomistes.
Des pouvoirs exorbitants de sanction et la reconfiguration du gouvernement départemental : l’ordonnance du 15 octobre 1960
27Cette violence que nous venons de décrire se cristallise lorsqu’en octobre 1960 une ordonnance accentue le pouvoir exorbitant et discrétionnaire du préfet d’Outre-mer à l’égard des fonctionnaires et, par conséquent, élargit son répertoire d’action pour lutter contre les formations autonomistes. Sur simple proposition aux ministres concernés, le préfet peut rappeler d’office en métropole « les fonctionnaires de l’État et des établissements publics de l’État, en service dans les départements d’Outre-mer, dont le comportement [serait] de nature à troubler l’ordre public [94] ». Il nous paraît pertinent de revenir sur ce moment à double titre. Premièrement, en instituant une discrimination dans les statuts des fonctionnaires [95], cette ordonnance légitime la thèse autonomiste de territoires ultramarins d’exception au sein de l’ensemble national. Deuxièmement, l’analyse de son application en Guyane donne à voir, toutefois, une reconfiguration du gouvernement départemental qui ne dessert pas la cause autonomiste des enseignants créoles guyanais politisés.
28Cette ordonnance s’inspire de celle du 28 septembre 1960 qui prévoit dans le cadre de la guerre d’Algérie la suspension provisoire de tout fonctionnaire « qui ferait l’apologie de l’insoumission ». Dans les DOM, elle a pour objet, selon le ministre d’État Robert Lecourt, « de mettre un terme à l’action subversive » de fonctionnaires qui « ont pour but avoué de faire douter, par leur propagande, par leurs paroles et par leur comportement, de la France et du caractère français de ces Départements [96] ». Vingt-six fonctionnaires, dont près de 90 % dans l’année qui suit sa ratification, sont ainsi sanctionnés jusqu’à son abrogation en 1972 [97]. En Guyane, elle vise particulièrement les enseignants communistes, aussi bien créoles qu’européens, encartés ou non au PCF, arrivés dans le département à la fin des années 1950 munis d’une expérience directe ou indirecte de la guerre d’Algérie. Le préfet redoute la capacité de ces enseignants à reconvertir leur capital d’action forgé en Algérie et/ou dans l’Hexagone vers les organisations autonomistes locales et, ce faisant, leur volonté, réelle ou supposée, de faire de la Guyane, par le biais de la violence militante [98], un nouveau front de la lutte anticoloniale. Sous le préfet Érignac, quatre enseignants « métropolitains », communistes et/ou sympathisants autonomistes, sont ainsi victimes de cette ordonnance. L’un d’entre eux, instituteur, natif de Cambrai puis installé en 1960 en Guyane après une première affectation en Kabylie, refusant son rappel en métropole prononcé en septembre 1961, se trouve même révoqué [99].
29Relevons de ce fait le cas du premier enseignant frappé par cette ordonnance en Guyane, Pierre M., professeur de philosophie en poste à Cayenne entre 1957 et 1961, dont la socialisation politique antérieure avait de quoi effrayer l’administration préfectorale. Né en 1914 dans le département du Nord, ancien officier des Forces françaises de l’intérieur, Pierre M. est expulsé du Sénégal en 1948, en raison de son activité syndicale et politique, qui l’avait amené à former avec ses élèves un cercle d’études marxistes [100]. Le même sort lui est réservé, en 1957, en Algérie. Outre à nouveau la création d’un cercle marxiste, Pierre M. y organise dès 1954 un groupe d’initiation au maniement des armes. De surcroît, sa fille, âgée de 17 ans, s’engage pleinement au côté du Front de libération nationale (FLN), cependant que son ex-épouse adhère au Parti communiste algérien [101]. Pierre M. fait donc l’objet de nombreux rapports des Renseignements généraux qui demandent sa mutation hors de la Guyane, arguant que cet enseignant développe une « intense propagande hostile au général De Gaulle » au sein des milieux autonomistes et que nombre de parents d’élèves lui reprochent de trop développer ses opinions politiques dans ses classes [102].
30En octobre 1960, alors qu’il se trouve à Paris depuis près de six mois dans le cadre d’un congé administratif, il est informé par le ministère de l’Éducation nationale que son départ pour Cayenne est différé. Un mois plus tard, à la date d’expiration de son congé, il reçoit un courrier indiquant que le Ministère n’entend pas le voir « réintégrer [ses] fonctions au Lycée de Cayenne [103] ». Ce n’est que dans une nouvelle lettre du 3 décembre qu’il comprend que cette décision ad nutum est prise en application de l’ordonnance du 15 octobre 1960, à la demande du préfet de la Guyane André Dubois-Chabert (octobre 1958-octobre 1960), qui lors de sa nomination peut se prévaloir de près vingt ans de carrière dans les cabinets préfectoraux et les sous-préfectures. Pierre M. peut compter sur de multiples secours, tant en Guyane et dans les DOM que dans l’Hexagone. À Cayenne, se forme un Comité guyanais de défense des libertés républicaines qui, sous l’égide de l’UPG, réunit quasiment toutes les tendances syndicales et politiques [104]. Pierre M. ne représente plus en effet la figure tant décriée du métropolitain mais celle d’un martyr guyanais, époux d’une institutrice créole dont il a eu deux enfants, frappé par l’État colonial. À Paris, les associations de fonctionnaires, les organes communistes et le député Catayée avec qui Pierre M. échange de nombreuses lettres se font les ardents défenseurs de sa réintégration en Guyane.
31Dans un courrier du 29 novembre 1960, J. Catayée l’informe que le ministre d’État des DOM-TOM « ne s’est jamais opposé à son retour en Guyane », lequel semble par conséquent dépendre du ministre de l’Éducation nationale [105]. Mais ce dernier maintient sa décision [106], en dépit de la situation scolaire préoccupante du lycée de Cayenne. À la rentrée scolaire, à l’instar de Pierre M., cinq professeurs titulaires sont en congé administratif ; ni les professeurs mutés, ni J. Catayée, depuis son élection, n’ont été remplacés ; le leader de l’UPG et professeur d’espagnol, Serge Patient, doit être appelé sous les drapeaux [107]. À la mi-décembre, enthousiaste, J. Catayée annonce à son collègue, sans traitement depuis un mois et demi, que le Premier ministre Michel Debré l’autorisera à retrouver son poste en Guyane, si le préfet Érignac y consent [108]. Celui-ci douche finalement les espoirs de retour de Pierre M. et le fait savoir aux ministres concernés en janvier 1961. « Malgré la décision du Premier ministre », écrit J. Catayée à Pierre M. un mois après, le préfet Érignac, « qui a fait l’Algérie » ajoute-t-il comme si le préfet y avait mobilisé un savoir politico-administratif explicatif, s’obstine à appliquer l’ordonnance à l’encontre de Pierre M. [109]. Au mois de mars 1961, Pierre M. est donc muté d’office au lycée d’Uzès dans le Gard tandis que son épouse et ses enfants regagnent seuls le département.
32Bien que l’ordonnance du 15 octobre 1960 ne touche, pendant la période de fonction d’Érignac, qu’un nombre limité d’enseignants et aucun Créole guyanais [110], elle laisse par sa valeur symbolique, au-delà des effets retours violents de la guerre d’Algérie, des plaies béantes dans les relations conflictuelles qui se sont établies entre les enseignants autonomistes et le préfet de Guyane depuis le milieu des années 1950. Outre sa terminologie qui renvoie à l’Ancien Régime, elle est vécue comme une « résurrection du droit de bannissement [111] » à la seule discrétion du préfet, lequel, on l’a vu, peut imposer ses choix face aux exigences ministérielles. Bertène Juminer, militant de l’UPG et, au début des années 1980, premier créole à occuper la fonction de recteur de l’Académie des Antilles et de la Guyane, l’assimile même aux déportations qu’a connues l’Europe sous domination nazie [112]. Cette ordonnance tend finalement à réduire l’action préfectorale à la seule répression politique, à l’image du préfet policier du Second Empire, et à accréditer la figure d’un proconsul ennemi des libertés publiques.
La reconfiguration du gouvernement départemental
33Derrière cet antagonisme, l’ordonnance traduit pourtant une recomposition politique au cours de laquelle les enseignants créoles guyanais autonomistes deviennent l’élite dirigeante des principaux mouvements politiques de leur département. Le système de relations entre le préfet et ces nouvelles élites sociopolitiques créoles guyanaises se reconfigure alors au détriment de l’institution préfectorale.
34L’ordonnance ne vise aucun des leaders enseignants des partis autonomistes. Pourtant ces derniers multiplient les actes susceptibles « de faire douter […] du caractère français de ces départements [113] ». Parmi ceux qui ne sont pas membres du PSG, en revanche, certains en viennent à penser que cette ordonnance servira également les intérêts de J. Catayée. Si l’administration préfectorale brandit à tout propos l’argument d’une conscience autonomiste téléguidée par Moscou de sorte que les départementalistes taxent les leaders autonomistes de « bolcheviks camouflés [114] » et J. Catayée de « Sékou Touré de la Guyane [115] », il reste que le député, ancien engagé dans les Forces françaises libres et médaillé de la croix de guerre, est un farouche anticommuniste [116]. Celui-ci fonde l’opposition PSG/UPG et, partant, la division du camp autonomiste. Pour preuve, le 15 septembre 1961, à l’occasion d’un meeting regroupant toutes les forces autonomistes pour protester contre une nouvelle application de l’ordonnance à un instituteur métropolitain, le député Catayée refuse de prendre la parole et quitte la salle, offusqué des violentes attaques portées contre le président de Gaulle [117]. Il n’en faut pas plus pour tracer une connivence de circonstances entre le député et le préfet. T. Radamonthe est persuadé que le directeur départemental des Renseignements généraux, « en accord avec la direction du PSG falsifiait le rapport de ces inspecteurs sur [les] conférences [du RPG] » afin de discréditer ce parti et le PCF [118]. De même, Jules Patient, le premier enseignant élu sénateur du département et membre influent de la SFIO, soupçonne J. Catayée d’avoir « poussé à la roue » pour obtenir la parution de cette ordonnance en vue d’éliminer ses adversaires politiques de l’UPG [119]. Souvenons-nous en effet, qu’avant d’être reconnu comme le plus influent autonomiste local, J. Catayée fait figure d’allié du gouvernement gaulliste. Le lendemain de l’écrasante victoire du « oui » au référendum de 1958, faisant valoir son savoir-faire en matière de prospective électorale sur les élections législatives à venir, O. Philip indique à son ministre de tutelle qu’il convient d’éviter une candidature de J. Catayée en l’encourageant à « prendre la tête de la municipalité de Cayenne » ; dans le cas contraire, ajoute-t-il, « si M. Catayée devait être élu député, il serait intéressant au point de vue national de le récupérer [120] ». Non seulement, nous l’avons vu, J. Catayée est élu député, mais il prend la tête de l’opposition gaulliste, déçu des promesses non tenues qu’aurait engagées A. Malraux, au nom du général de Gaulle, quant à l’application d’un « statut spécial » pour la Guyane.
35Les hésitations ou les échecs du préfet Érignac dans sa politique répressive illustrent également la reconfiguration du gouvernement départemental au profit des nouvelles élites enseignantes créoles guyanaises. Après avoir décidé la saisie du numéro d’août de Debout Guyane, le préfet informe son ministre de tutelle que des poursuites judiciaires pour injures et diffamation peuvent être intentées contre Henri Agarande, instituteur, membre influent du bureau du PSG dès sa fondation et directeur de publication du journal de ce parti. Mais il craint que cette action en justice n’attire l’attention de l’opinion publique sur le PSG et réclame, si celle-ci devait être engagée, qu’elle le soit « à la diligence de l’autorité supérieure et non du préfet [121] ». De même, il évoque sa réticence à faire appliquer la loi sur le problème des haut-parleurs que seuls le PSG et l’UPG utilisent à l’occasion de leurs réunions publiques, lesquelles permettent pourtant de reprendre publiquement les « flots d’injures à l’égard de la France, du Gouvernement et de l’Administration locale » au premier rang des motifs justifiant la censure de la presse autonomiste. Là encore, il souligne sa peur que cette entreprise « se solde par un échec » et sollicite du ministre de nouveaux moyens juridiques [122].
36S’il peut prononcer l’expulsion d’étrangers jugés indésirables et des fonctionnaires métropolitains suspectés de connivence avec le FLN ou le PCF, le préfet Érignac n’a pas davantage de moyens juridiques d’empêcher Tiburce Rollé, instituteur créole guyanais communiste exerçant dans la Seine-et-Oise, de jouir de son congé administratif dans son département natal pendant six mois à partir de mai 1962. Fondateur à Paris en 1949 de l’Union des étudiants guyanais, principale instance de socialisation politique des étudiants guyanais dans l’Hexagone, membre du PCF et du bref Front antillo-guyanais pour l’autonomie entre avril et juillet 1961, T. Rollé dispose d’un « capital militant [123] » qu’il entend réinvestir dans le champ politique guyanais en vue d’y conquérir une fonction politique nationale, particulièrement après le vide politique laissé par la mort imprévisible de J. Catayée en juin 1962. Informé de sa prochaine arrivée à Cayenne, le préfet Érignac tente d’obtenir son assignation à résidence dans le cadre des dispositions relatives à la sûreté de l’État. À sa grande déception, Paris ne le suit pas [124]. Somme toute, bien qu’il soit investi de pouvoirs exorbitants, le préfet n’ose pas y recourir entièrement à l’encontre des enseignants créoles guyanais autonomistes, ou du moins n’obtient pas une approbation explicite de Paris à le faire.
37On touche sans doute là au problème majeur de l’affirmation d’une gauche guyanaise autonomiste, qui ne permet plus au préfet de Guyane de rejeter sur l’administration centrale la responsabilité des espoirs déçus et des promesses non tenues. Le « tous uni contre Paris [125] », argument pivot de la convergence d’intérêts qui réunit d’ordinaire le préfet et les notables à l’échelle départementale, n’est plus une ressource mobilisable. Cette prise de position serait en effet présentée comme une victoire politique des leaders enseignants autonomistes. Inversement, ceux-ci n’attendent plus du préfet qu’il leur accorde publiquement le mérite de telle décision ou la venue de telle mission parlementaire, reconnaissant par-là leur qualité de bons défenseurs des intérêts du département. Finalement, avec l’émergence d’une gauche autonomiste, le préfet n’est plus l’intermédiaire obligé entre l’État et les intérêts locaux. Érignac le reconnaît lui-même tant il souligne à l’envi dans ses rapports comment les « difficultés que l’administration locale a dans ses rapports avec Paris sont dénoncées par les partis autonomistes qui y trouvent un argument de choix pour réclamer l’autonomie de gestion [126] ».
38Entre 1946 et le tournant des années 1960, les relations entre le préfet et les enseignants autonomistes en Guyane ont donc connu de profonds bouleversements. Trois configurations ont été mises en évidence. La première correspond aux premiers pas de l’institution préfectorale dans le territoire, dans le contexte d’une départementalisation alors perçue comme émancipatrice et rénovatrice. Cette configuration est marquée par la figure du préfet Vignon qui occupe la fonction pendant presque une décennie. Elle se caractérise par une même conception, entre Vignon et la majorité des enseignants, du destin de la Guyane et, pour le réaliser, de la nécessité d’attribuer d’importants pouvoirs locaux, tant au Préfet qu’aux élus du département. Si le « tous uni contre Paris » est au cœur de cette structuration d’un nouveau système politico-administratif local, il reste d’une part que le préfet Vignon se considère comme le seul apte à définir l’action politique en Guyane, quand bien même celle-ci est construite au gré des circonstances ; d’autre part que seul le préfet est investi de pouvoirs locaux extraordinaires, de plus en plus perçus comme coloniaux. Dans cette configuration, le préfet d’Outre-mer, au sommet du système politico-administratif local, doit veiller, d’après l’IGAME Bardon, à « donner des os à ronger aux politiciens » locaux afin que ces derniers « laissent [le préfet et l’État] travailler en paix aux choses sérieuses [127]. » Peu s’indignent alors, à Paris, des procédures et des pratiques administratives parfois douteuses du préfet outre-mer.
39L’opposition à cette vision d’une prééminence absolue du préfet forme la deuxième configuration à partir du milieu des années 1950. Cette dernière se développe dans le triple contexte de la décolonisation, au niveau international, de la guerre d’Algérie, sur le plan national et, à l’échelle régionale, des espoirs déçus placés dans la départementalisation. Les enseignants créoles guyanais autonomistes, qui sont parvenus à capter à leur profit les nouvelles ressources qu’offre la départementalisation et, partant, prétendent à la conquête du pouvoir en Guyane, sont les acteurs majeurs de cette reconfiguration du champ politique. Dès alors, au moment où dans l’Hexagone se renforce le pouvoir exécutif avec l’instauration de la Ve République, le représentant de l’État en Guyane se trouve contraint, souvent par le conflit, de reconnaître la place et le rôle des acteurs locaux. Les manifestations de l’imperium du préfet en matière de répression s’accentuent mais ce dernier devient enfin, en Guyane, un haut fonctionnaire révocable chaque mercredi.
40La troisième et dernière configuration étudiée témoigne mieux encore de ce jeu de collaboration et d’opposition qui participe d’une co-construction d’un espace politique postcolonial dans les marges éloignées de la République. Avec l’ordonnance du 15 octobre 1960, le préfet est doté de pouvoirs suffisamment conséquents pour empêcher la collusion entre enseignants métropolitains communistes et enseignants créoles guyanais autonomistes. La lourde répression qui s’abat sur les premiers profite d’une certaine manière aux seconds, en ce qu’elle délimite in fine le recrutement du personnel politique local aux seuls Créoles guyanais. Quand bien même ces derniers multiplient les brûlots à l’encontre du préfet et les prises de positions sécessionnistes, le préfet, garant de l’unité nationale, ne peut prendre le risque de mobiliser les importantes ressources administratives, judiciaires et politiques dont il dispose pour éliminer cette nouvelle élite sociopolitique et, ce faisant, déstabiliser le système politico-administratif qui s’est établi à la faveur de la départementalisation.
41En un mot, la compréhension de l’appareil d’État et de ses modalités de fonctionnement, qui connaît un vif regain d’intérêt depuis vingt ans, a bien à gagner à faire un détour tant par le colonial [128] que par l’Outre-mer départementalisé. C’est sans doute dans ces lointains départements que se lisent le mieux, en effet, à la fois l’évolution de la fonction préfectorale en relation avec les transformations du rôle de l’État et le renouvellement accéléré des élites locales dans un contexte où l’autorité de l’État est fortement contestée.
42Les années 1960 voient en effet une vague autonomiste et nationaliste déferler sur l’ensemble des États occidentaux [129]. En France, au moyen de la Cour de sûreté de l’État, la répression politique et judiciaire s’abat en ce sens aussi bien sur les séparatistes bretons que les autonomistes guyanais. À partir de 1968, les compétences de cette juridiction politique sont de ce fait étendues aux DOM « en dehors de tout cadre légal [130] ». L’exemple de la Guyane souligne cependant combien cette répression se conjugue à un processus de recomposition sociale et politique, au cours duquel les enseignants créoles guyanais autonomistes deviennent une élite dirigeante de leur département. Affiliées au PSG, ces nouvelles élites autonomistes font la conquête de la mairie de Cayenne en 1965 ; cinq ans plus tard, du conseil général. Pendant trois décennies, à partir de 1980, elles dirigent le conseil régional. Enfin, en juin 2013, une statue de J. Catayée, fondateur du PSG et premier enseignant autonomiste élu député de la Guyane, est érigée à l’une des entrées du chef-lieu, laquelle conduit, en outre, à l’avenue Justin Catayée inaugurée le même jour.
43Par bien des aspects, depuis six décennies désormais, ces élites autonomistes enseignantes ont renforcé leur domination politique. Elles sont cependant confrontées, aujourd’hui, aux revendications des groupes socioculturels de l’intérieur, longtemps relégués dans le champ des « primitifs ». Ces groupes affirment en effet leur appartenance à la catégorie politique et juridique des « peuples autochtones », telle qu’elle a émergé en droit international aux Nations unies depuis trente ans et, ce faisant, leurs « droits d’avoir des droits [131] ». On ne s’étonnera donc pas que la structuration de cet espace politique ultramarin soit toujours en cours.
Notes
-
[1]
Monnerville (G.), Témoignage. De la France équinoxiale au Palais du Luxembourg, Paris, Plon, 1973, p. 375.
-
[2]
En Guyane, le terme de Créole désigne uniquement les descendants à la fois des esclaves émancipés en 1848 ou affranchis auparavant et des immigrants qui se sont agrégés à ce groupe initial, notamment par le biais des mariages, cf. Jolivet (M.-J.), La question créole. Essai de sociologie sur la Guyane française, Paris, ORSTOM, 1982.
-
[3]
Mam Lam Fouck (S.), Histoire de l’assimilation. Des « vieilles colonies » françaises aux départements d’outre-mer. La culture politique de l’assimilation en Guyane et aux Antilles françaises (XIXe et XXe siècles), Matoury, Ibis Rouge Éditions, 2006.
-
[4]
Maurice (E.), Les enseignants et la politisation de la Guyane (1946-1970). L’émergence de la gauche guyanaise, Matoury, Ibis Rouge Éditions, 2014.
-
[5]
Crozier (M.), dir., « L’administration face aux problèmes du changement », Sociologie du travail, 8 (3), 1966, p. 226, cf. également dans ce numéro spécial, Worms (J.-P.), « Le préfet et ses notables », Sociologie du travail, 8 (3), 1966.
-
[6]
J. Moch considère toutefois la population cayennaise « moins dense et moins enflammée » que celle de la Martinique. Moch (J.), Une si longue vie, Paris, Robert Laffont, 1976, p. 255.
-
[7]
Archives territoriales de la Guyane, anciennement archives départementales (désormais AT 973). PER 431, « 31 août 1947. L’“intégration” improprement appelée “assimilation” est-elle un succès ? », Parallèle 5, septembre 1951.
-
[8]
Ibid.
-
[9]
Par exemple, les principales figures politiques guyanaises sont issues du monde enseignant. Citons Christiane Taubira, ancienne militante indépendantiste puis députée de la Guyane de 1993 à 2012 devenue ministre de la Justice dans les gouvernements socialistes du président François Hollande entre 2012 et 2016 ; Antoine Karam, secrétaire général du parti dominant de la gauche locale de 1989 à 1993 puis de 2003 à 2011 et, depuis 2014, sénateur de la Guyane ; Rodolphe Alexandre, dernier président du conseil régional (2010-2015) et, depuis 2015, premier président de l’assemblée de Guyane. Cf. Maurice (E.), « Vers l’État post-colonial : enseignants créoles et pouvoir local en Guyane (années 1950-1960) », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 61 (1), 2014.
-
[10]
Rouban (L.), « Les Préfets de la République 1870-1997 », Les Cahiers du Cevipof, 26, janvier 2000, p. 26-30.
-
[11]
Bargeton (R.), Dictionnaire biographique des préfets, septembre 1870 – mai 1982, Paris, Archives nationales, 1994.
-
[12]
Alexandre (R.), Le Conseil général de la Guyane française (1945-1977), mémoire de maîtrise d’histoire, Université Bordeaux III, 1977, p. 109-114.
-
[13]
Maurice (E.), Les enseignants et la politisation de la Guyane…, op. cit., p. 94-96.
-
[14]
Cette position permet d’être nommé préfet sans être affecté dans un territoire. Elle peut être un préalable à une prochaine affectation ou à une mise à la retraite.
-
[15]
Cet article est issu d’une recherche doctorale en cours d’achèvement. Cette dernière n’aurait été possible sans le soutien de la collectivité territoriale de Guyane et celui du projet ANR « Autochtom » coordonné par Benoît Trépied (EHESS-CNRS). L’auteur tient également à remercier pour leurs commentaires Raberh Achi et Michelle Zancarini-Fournel.
-
[16]
Maurice (E.), « Vers l’État post-colonial… », art. cit.
-
[17]
Cf. également l’analyse de son action à l’égard des populations amérindiennes et noirs-marronnes dans Guyon (S.), « Des “Primitifs” aux “Autochtones”. Savoirs ethnologiques et politiques publiques en Guyane de 1946 à nos jours », Genèses, 91 (2), 2013.
-
[18]
AT 973. PER 92. La Semaine, 22 novembre 1947.
-
[19]
Ibid.
-
[20]
Vignon (R.), Gran Man Baka, Sorel Moussel, Éditions Davol, 1985, p. 282.
-
[21]
AT 973. WP 2026. Rapport de mission d’information de l’Inspection générale de l’Administration (IGAME) sur le préfet Vignon au ministre de l’Intérieur, 26 octobre 1954. L’IGAME désigne un haut fonctionnaire placé, depuis 1954, à la tête d’un service des DOM au sein de l’administration centrale du ministère de l’Intérieur. Sur les premiers IGAME installés par J. Moch en 1948, alors ministre de l’Intérieur, cf. Moch (J.), Une si longue vie…, op. cit., p. 278-279.
-
[22]
AT 973. WP 2026. Rapport de mission d’information de l’Inspection générale de l’Administration (IGAME) sur le préfet Vignon au ministre de l’Intérieur, 26 octobre 1954.
-
[23]
En 1954, il favorise, par exemple, la création de l’Institut français d’Amérique tropicale (IFAT) qui a pour mission d’effectuer des recherches intéressant le développement économique et social de la Guyane.
-
[24]
Cf. Mary (S.), Le gaullisme d’opposition aux Antilles et en Guyane. Le RPF sous l’œil de Jacques Foccart, Paris, L’Harmattan, 2013.
-
[25]
Dumont (J.), « La quête de l’égalité aux Antilles : la départementalisation et les manifestations des années 1950 », Le Mouvement social, 2010, p. 85.
-
[26]
AT 973. PER 431, « 31 août 1947. L’“intégration” improprement appelée “assimilation” est-elle un succès ? », Parallèle 5, septembre 1951.
-
[27]
AT 973. WP 2026. Rapport de mission d’information de l’Inspection générale de l’Administration sur le préfet Vignon au ministre de l’Intérieur, 26 octobre 1954 (22 pages).
-
[28]
Archives nationales, Pierrefitte-sur-Seine (Désormais AN). 19940180.215. Rapport sur la situation de la Guyane du préfet Érignac, 26 juin 1962 (114 p.)
-
[29]
AN. 19940180.215. Rapport mensuel du préfet Érignac au ministre de l’Intérieur, novembre 1961.
-
[30]
AT 973. WP 2026. Rapport de mission d’information de l’Inspection générale de l’Administration sur le préfet Vignon au ministre de l’Intérieur, 26 octobre 1954 (22 pages).
-
[31]
Vignon (R.), Gran Man Baka…, op. cit., p. 56
-
[32]
Sur l’histoire socio-politique de Saint-Laurent-du-Maroni, cf. Guyon (S.), Du gouvernement colonial à la politique racialisée. Sociologie historique de la formation d’un espace politique local (1949-2008). Saint-Laurent du Maroni, Guyane, thèse pour le doctorat de science politique, Université Paris I, 2010 et Coquet (M.), La ville et le bagne. Histoire d’une commune pénitentiaire en terre coloniale : Saint-Laurent-du-Maroni, Guyane, 1857-1949, thèse pour le doctorat d’histoire, EHESS, 2016.
-
[33]
AT 973. WP 2026. Rapport de mission d’information de l’Inspection générale de l’Administration sur le préfet Vignon au ministre de l’Intérieur, 26 octobre 1954.
-
[34]
AN. 19940180.215. Rapport sur la situation de la Guyane du préfet Érignac, 26 juin 1962.
-
[35]
Décret n° 60-407 du 26 avril relatif à la déconcentration administrative et aux pouvoirs des préfets dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion, JORF, 29 avril 1960, p. 3945
-
[36]
Turrel (D.), « Une identité imposée : les marques des pauvres dans les villes des XVIe et XVIIe siècles », Cahiers de la Méditerranée, 66, 2003, [en ligne : https://cdlm.revues.org/97].
-
[37]
Malraux (A.), Le Miroir des Limbes I. Antimémoires, Paris, Gallimard, 1972, p. 136 et 143.
-
[38]
AT 973. PER 80. « Les agents des services public », Études et documents, INSEE Guyane, 1976, p. 7.
-
[39]
Maurice (E.), « Vers l’État post-colonial… », art. cit., p. 158-159.
-
[40]
Archives INSEE, Paris. S Guya.Fra 1 (1959-1961). Annuaire statistique de la Guyane, Paris, INSEE, 1962, p. 24.
-
[41]
AT 973. PER 80. « Les agents des services publics », Études et documents, INSEE Guyane, 1976, p. 11.
-
[42]
AN. 19940180.216. Rapport sur la situation de la Guyane du préfet Érignac, 20 juin 1963 (133 p.). Par exemple, en janvier 1963 le bureau saint-laurentais du Front démocratique de gauche qui rassemble toutes les formations politiques et syndicales autonomistes du département se compose quasi-exclusivement des enseignants des écoles de cette ville.
-
[43]
Archives départementales de Seine-Saint-Denis (désormais AD 93). 261 J7/18. Rapport d’information du député Marcel Clermontel au nom de la commission des Finances, de l’Économie générale et du Plan à la suite de la mission effectuée aux Antilles et en Guyane du 19 mars au 2 avril 1962.
-
[44]
Maurice (E.), « Vers l’État post-colonial… », art. cit.
-
[45]
Sur la singularité de ce parti dans l’espace politique guyanais, cf. Mam Lam Fouck (S.), « L’Union du peuple guyanais et l’invention du nationalisme en Guyane française (1955-1965) », Outre-Mers. Revue d’histoire, 352-353, 2006.
-
[46]
AD 93. 261J7/18. Lettre de T. Radamonthe, Secrétaire général de l’Union départementale-CGT, à Élie Mignot, Conseiller de l’Union française (1947-1958) et membre permanent de la section de politique extérieure du PCF, 12 avril 1958.
-
[47]
Maurice (E.), op. cit., p. 92-93. Observons que l’absence du PCF en Guyane n’exclut ni l’organisation de partis se réclamant du communisme, ni les candidatures sous étiquette communiste.
-
[48]
AT 973. 1114W. Rapport des Renseignements généraux, mars 1964.
-
[49]
Thénault (S.), « La gauche et la décolonisation », in Becker (J.-J.), Candar (G.), dir., Histoire des gauches en France. XXe siècle : à l’épreuve de l’histoire, Paris, La Découverte, 2005 (2004), p. 448.
-
[50]
Mam Lam Fouck (S.), Histoire de la Guyane contemporaine 1940-1982. Les mutations économiques, sociales et politiques, Paris, Éditions Caribéennes 1992, p. 366.
-
[51]
AN. 19940180.215. Rapport sur la situation de la Guyane du préfet Érignac, 26 juin 1962.
-
[52]
Maurice (E.), Les enseignants et la politisation de la Guyane…, op. cit., p. 60.
-
[53]
AN. 19940180.216. Rapport mensuel du préfet Érignac au ministre de l’Intérieur, février 1963.
-
[54]
Ibid.
-
[55]
Ibid.
-
[56]
AN. 19940180.215. Rapport mensuel du préfet Érignac au ministre de l’Intérieur, août 1961.
-
[57]
R. Vignon effectue donc son retour en Guyane en 1961. Il y trouve une terre qui comble son désir, cette fois, d’embrasser une carrière politique. D’abord élu conseiller général du canton d’Iracoubo et ce, pendant douze ans, il est, par la suite, sénateur de la Guyane (1962-1971) et maire de la commune de Maripasoula (1969-1976).
-
[58]
AN. 19940180.215. Rapport sur la situation de la Guyane du préfet Érignac, 26 juin 1962 et Vignon (R.), Gran Man Baka, op. cit., p. 317-318.
-
[59]
Worms (J.-P.), « Le préfet et ses notables », art. cit., p. 252.
-
[60]
AD 93. 261J7/18. Lettre de T. Radamonthe, Secrétaire général de l’Union départementale-CGT, à Élie Mignot, conseiller de l’Union française (1947-1958) et membre permanent de la section de politique extérieure du PCF, 1959.
-
[61]
AN. 19940180.215. Rapport sur la situation de la Guyane du préfet Érignac, 26 juin 1962 (114 p.)
-
[62]
Ibid.
-
[63]
AN. AG/5(F)/737. Rapport du Secrétaire général de la Préfecture de la Guyane à l’IGAME A. Trémeaud, 22 septembre 1958.
-
[64]
AN. AG/5(F)/737. Rapport sur la situation politique de la Guyane du Secrétaire général de la Préfecture de la Guyane au ministre de l’Intérieur, 29 septembre 1958 (13 pages).
-
[65]
AT 973. WP 514. Conférence des préfets des départements français d’Amérique tenue à Saint-Claude les 21-23 mars 1958 sous la présidence de M. l’IGAME pour les DOM (15 p.).
-
[66]
Archives de la Fondation nationale des sciences politiques, Paris (désormais AFNSP). Fonds Michel Debré. 2 DE 34. « La France, l’Afrique noire et Madagascar », note du secrétaire d’État chargé des relations avec la Communauté française au Premier ministre, février 1961.
-
[67]
AFNSP. Fonds Michel Debré. 2 DE 23. Lettre du Premier ministre au secrétaire d’État au Sahara, aux DOM et aux territoires d’outre-mer, 26 décembre 1961.
-
[68]
Sainton (J.-P.), La décolonisation improbable. Cultures politiques et conjonctures en Guadeloupe et en Martinique (1943-1967), Pointe-à-Pitre, Éditions Jasor, 2012, p. 297.
-
[69]
Archives nationales, Paris. F17 27939. Dossier de carrière de J. Catayée.
-
[70]
AN. AG/5(F)/737. Rapport sur la situation politique de la Guyane du Secrétaire général de la Préfecture de la Guyane au ministre de l’Intérieur, 29 septembre 1958 (13 p.).
-
[71]
Entretien avec Jean Catayée, Cayenne, 24 octobre 2015.
-
[72]
Maurice (E.), Les enseignants et la politisation de la Guyane…, op. cit.
-
[73]
Brasseur (G.), « La Guyane française. Un bilan de trente années », Notes et études documentaires, 4497-4498, 1978, p. 166.
-
[74]
Bibliothèque nationale de France, Paris. JO-7696. Catayée (J.), « Les libertés individuelles sont-elles menacées en Guyane Française », Debout Guyane, 13 septembre 1958.
-
[75]
Tanguy (G.), « “Le préfet dans tous ses états”. Une histoire de l’institution préfectorale est-elle (encore) possible ? », Histoire@Politique, 27, 2015 [en ligne : http://www.histoire-politique.fr/index.php?numero=27&rub=pistes&item=33].
-
[76]
AT 973. WP 2026. Rapport de mission d’information de l’Inspection générale de l’Administration sur le préfet de Guyane R. Vignon au ministre de l’Intérieur, 26 octobre 1954 (22 pages).
-
[77]
AT 973. PER 115. Catayée (J.), « Soyez le Bienvenu Monsieur le Préfet », Debout Guyane, 10 décembre 1960.
-
[78]
AN. 19940180.215. Rapport mensuel du préfet Érignac au ministre de l’Intérieur, décembre 1960.
-
[79]
AN. 19940180.215. Rapport mensuel du préfet Érignac au ministre de l’Intérieur, février et avril 1961.
-
[80]
Archives privées Pierre M. Lettre de J. Catayée à Pierre M, 24 février 1961.
-
[81]
AT 973. 1114W. Rapport des Renseignements généraux, mars 1961.
-
[82]
AT 973. 1114W. Rapport des Renseignements généraux, août 1961.
-
[83]
AT 973. 1114W. Rapport des Renseignements généraux, août 1961 et PER 115, Debout Guyane, 19 août 1961
-
[84]
AN. 19940180.215. Rapport mensuel du préfet Érignac au ministre de l’Intérieur, septembre 1961.
-
[85]
Rapport de la Commission d’information et de recherche historique du ministère de l’Outre-mer sur les événements de décembre 1959 en Martinique, de juin 1962 en Guyane et de mai 1967 en Guadeloupe.
-
[86]
Codaccioni (V.), Punir les opposants. PCF et procès politiques (1947-1962), Paris, CNRS Éditions, 2013.
-
[87]
AN. AG/5(F)/737. Rapport du Secrétaire général de la Préfecture de la Guyane à l’IGAME A. Trémeaud, 22 septembre 1958.
-
[88]
AD 93. 261J7/18. Lettre de T. Radamonthe, Secrétaire général de l’UD-CGT, à Marcel Dufriche, membre du bureau confédéral de la CGT et responsable des pays d’Outre-mer, 26 septembre 1958.
-
[89]
Malraux (A.), Le Miroir des Limbes…, op. cit., p. 145
-
[90]
Entretien J. Mariéma, Cayenne, 27 octobre 2013.
-
[91]
Thénault (S.), « La gauche et la décolonisation », in Becker (J.-J.), Candar (G.), dir., op. cit., p. 448.
-
[92]
AN. AG/5(F)/737. Rapport sur la situation politique de la Guyane du Secrétaire général de la Préfecture de la Guyane au ministre de l’Intérieur, 29 septembre 1958.
-
[93]
Grendi (E.), « Micro-analisi e storia sociale », Quaderni storici, 35, 1977.
-
[94]
Ordonnance 60-1101 du 15 octobre 1960, JORF, 18 octobre 1960, p. 9483.
-
[95]
Il faut indiquer que les fonctionnaires affectés dans les DOM bénéficient d’un régime de rémunération et de congés spécifiques. Cf. Maurice (E.), « Vers l’État postcolonial… », art. cit.
-
[96]
AD 93. 261J7/3. Réponse le 15 décembre 1961 du ministre des DOM-TOM à la question écrite du député de la Martinique, Le droit ouvrier, n° 189-190, mars-avril 1964, p. 30.
-
[97]
Séance du 10 octobre 1972, à l’Assemblée nationale, JORF, p. 4000. Toutefois, le même type d’ordonnance est mis en place à Mayotte en 1996. En 2011, un enseignant, dirigeant local du Réseau éducation sans frontières, a ainsi été muté en métropole. Le Canard enchaîné, 28 janvier 2012.
-
[98]
Audigier (F.), Girard (P.), dir., Se battre pour ses idées. La violence militante en France des années 1920 aux années 1970, Paris, Riveneuve Édition, 2012.
-
[99]
AT 973. 1114W. Note des Renseignements généraux, 23 mai 1962 et entretiens avec Bernard L., Paris, 16 mai et 10 juin 2014.
-
[100]
Archives privées de Pierre M. Lettre du Haut-Commissaire de la République, Gouverneur général de l’AOF au ministre de la France d’Outre-mer, 26 mars 1948.
-
[101]
Archives privées de Pierre M. et entretien avec Danièle-Djamila A. M., Neuilly-Plaisance, 9 juin 2014 et Gilberte M., Aix-en-Provence, 8 juillet 2015.
-
[102]
AT 973. 1114W. Note des Renseignements généraux, avril et octobre 1960.
-
[103]
Archives privées de Pierre M. Lettre de l’Inspecteur général adjoint au Directeur général des enseignements classiques et modernes à Pierre M., 22 novembre 1960.
-
[104]
Maurice (E.), op. cit., p. 73.
-
[105]
Archives privées de Pierre M. Lettre de J. Catayée à Pierre M., 29 novembre 1960.
-
[106]
Archives privées de Pierre M. Lettre de l’Inspecteur général adjoint au Directeur général des enseignements classiques et modernes à Pierre M., 3 décembre 1960.
-
[107]
AT 973. 1114W. Note des Renseignements généraux, 30 septembre 1960.
-
[108]
Archives privées de Pierre M. Lettre de J. Catayée à Pierre M., 16 décembre 1960.
-
[109]
Archives privées de Pierre M. Lettre de J. Catayée à Pierre M., 24 février 1961.
-
[110]
En 1972, au cours du débat parlementaire qui conduit à l’abrogation de l’ordonnance, le député de la Guyane confirme qu’aucun fonctionnaire natif de ce département n’a fait l’objet d’une mesure d’expulsion depuis sa mise en vigueur. Séance du 10 octobre 1972, à l’Assemblée nationale, JORF, p. 4005.
-
[111]
AD 93. 261 J7/3. Marcel Manville, « L’Ordonnance du 15 octobre 1960 sur le rappel d’office en Métropole des fonctionnaires des Départements d’Outre-Mer. Une résurrection du droit de bannissement », Le droit ouvrier, 189-190, mars-avril 1964, p. 27-30.
-
[112]
Juminer (B.), « De Dunkerque à Maripasoula ? », Présence africaine, 43 (3), 1962, p. 265.
-
[113]
AD 93. 261 J7/3. Réponse le 15 décembre 1961 du ministre des DOM-Tom à la question écrite du député de la Martinique, Le droit ouvrier, n° 189-190, mars-avril 1964, p. 30.
-
[114]
Juminer (B.), « De Dunkerque à Maripasoula ? », art. cit., p. 268.
-
[115]
Maurice (E.), Les enseignants et la politisation de la Guyane…, op. cit., p. 103.
-
[116]
Entretien avec Jean Catayée, Cayenne, 24 octobre 2015.
-
[117]
AT 973. 1114W. Note des renseignements généraux, septembre 1961.
-
[118]
AD 93. 261J7/18. Lettre de T. Radamonthe, Secrétaire général de l’Union Départementale-CGT, à Élie Mignot, Conseiller de l’Union française (1947-1958) et membre permanent de la section de politique extérieure du PCF, 1959.
-
[119]
AT 973. 1114W. Note des Renseignements généraux, 19 novembre 1960.
-
[120]
AN. AG/5(F)/737. Rapport sur la situation politique de la Guyane du Secrétaire général de la Préfecture de la Guyane au ministre de l’Intérieur, 29 septembre 1958.
-
[121]
AN. 19940180.215. Rapport mensuel du préfet Érignac au ministre de l’Intérieur, août 1961.
-
[122]
AN. 19940180.215. Rapport mensuel du préfet Érignac au ministre de l’Intérieur, novembre 1961.
-
[123]
Matonti (F.), Poupeau (F.), « Le capital militant. Essai de définition », Actes de la recherche en sciences sociales, 155 (5), 2004.
-
[124]
AN. 19940180.215. Rapport sur la situation de la Guyane du préfet Érignac, 26 juin 1962 (114 p.).
-
[125]
Worms (J.-P.), « Le préfet et ses notables », art. cit., p. 271.
-
[126]
AN. 19940180.215. Rapport mensuel du préfet Érignac au ministre de l’Intérieur, novembre 1961.
-
[127]
AT 973. WP 2026. Rapport de mission d’information de l’Inspection générale de l’Administration sur le préfet Vignon au ministre de l’Intérieur, 26 octobre 1954.
-
[128]
Bertrand (R.), Saada (E.), dir., « L’État colonial », Politix, 66, 2004, p. 11-13.
-
[129]
Kernalegen (T.), « Le réveil des revendications régionalistes et nationalitaires au tournant des années 1968 : analyse d’une “vague” nationale », Fédéralisme Régionalisme, 13, 2013, [en ligne : http://popups.ulg.ac.be/1374-3864/index.php?id=1195].
-
[130]
Codaccioni (V.), Justice d’exception. L’État face aux crimes politiques et terroristes, Paris, CNRS Éditions, 2015, p. 179.
-
[131]
Scott (R. J.) et Zeuske (M.), « Le “droit d’avoir des droits”. Les revendications des ex-esclaves à Cuba (1872-1909) », Annales, Histoire, Sciences Sociales, 3, 2004.