Notes
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[1]
http://documentaryheaven.com/dispatches-the-dyslexia-myth/ (consulté le 22/11/11). J. Elliott, « Dyslexia myths and the feel-bad factor », Times Educational Supplement, 2 Septembre 2005.
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[2]
Des entretiens ont été réalisés avec F. Ramus, M. Snowling, A. Inizan et J. Elliott.
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[3]
Les citations et extraits d’entretiens en anglais ont été traduits en français.
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[4]
Great Britain committee of enquiry into the education of handicapped children and young people Special Educational Needs, Chairman H. M. Warnock, HMSO, 1978.
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[5]
UK Government, Education Act 1981, HMSO, 1981, p. 1.
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[6]
B.O. n° 6 du 8 février 1990.
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[7]
D’après A. Inizan, en entretien. Les travaux qui mènent au plan d’action de 2001 sont ensuite initiés par S. Royal, alors ministre déléguée à l’Enseignement scolaire.
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[8]
Du fait de la reconnaissance plus tardive de la dyslexie et du moindre succès des disability studies en France, il n’existe pas de tels travaux sur la dyslexie.
1La dyslexie est une catégorie nosographique reconnue parmi les « troubles spécifiques des apprentissages » du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (APA, 2013). Cette manière de décrire les difficultés en lecture, fondée sur une hypothèse cérébrale (Woollven, 2017) s’est progressivement imposée dans l’institution scolaire en France et au Royaume-Uni (Ringard et Veber, 2001 ; DFES, 2001) ainsi que dans le grand public, venant concurrencer d’autres interprétations, comme celle d’échec scolaire (Ravon, 2000). Or, cette appréhension de la dyslexie est porteuse d’une vision du monde, de la société et de l’école bien spécifique.
2En sociologie de l’éducation, la dyslexie est le plus souvent étudiée comme une forme de médicalisation de l’échec scolaire (Pinell et Zafiropoulos, 1983 ; Morel, 2014). D’après ces travaux, le domaine d’étude de l’échec scolaire a d’abord connu à partir des années 1970 une concurrence entre un pôle psychanalytique et un pôle médico-psychologique. Le second pôle tend à devenir dominant dans les années 2000, tant dans la recherche que dans les pratiques des professionnels, avec l’essor des sciences neuro-cognitives. Dans une perspective critique, bourdieusienne notamment, d’autres travaux (Garcia, 2013) montrent comment le traitement de l’échec scolaire s’inscrit dans des rapports de classes et répond aux intérêts de certains groupes sociaux. Ils témoignent également d’une conception dualiste (Borelle, 2017) dans la présentation de la concurrence entre sciences médico-psychologiques et sciences sociales. Or, le succès croissant dans l’institution scolaire des catégories de dyslexie et plus généralement de troubles des apprentissages dans les années 2000 accompagne un déclin progressif d’une appréhension de l’école et de la société en termes de rapports sociaux. Dans la seconde moitié du xxe siècle, l’échec scolaire était le principal problème public et la sociologie a occupé une place prépondérante pour en rendre compte (Morel, 2014). Mais de nouvelles catégories sont venues concurrencer ce schème de compréhension des difficultés scolaires et la vision du monde social qui lui était associée.
3Cet article montre comment la catégorie de dyslexie, qui fait partie des représentations dominantes et légitimes des questions scolaires aujourd’hui, va de pair avec une absence relative de l’appréhension sociale de l’école. Elle suppose une vision du monde dans laquelle le social est tout au mieux secondaire ou périphérique pour penser l’apprentissage de la lecture et les difficultés qui peuvent en découler. On verra donc, à travers l’étude de la dyslexie dans une perspective constructiviste, comment une vision asociale de l’école repose sur des logiques qui coexistent et qui appréhendent les difficultés en lecture, et plus généralement l’école, sans envisager ni les contextes ni les rapports sociaux.
4Les analyses s’appuient sur un corpus de données empiriques issues d’une recherche sur la construction de la catégorie de dyslexie en France et au Royaume-Uni (Woollven, 2012). La France et le Royaume-Uni sont deux cas suffisamment différents – dans les formes d’État-providence, l’organisation du système scolaire et le type de droit – et suffisamment proches – les sociétés contemporaines françaises et britanniques sont le produit d’un processus historique englobant des aspects culturels, sociaux et politiques – pour être mis en regard. Au Royaume-Uni, depuis le début des années 2010, la dyslexie est un problème social qui a réussi. Après la « découverte » par des médecins des cas de difficultés en lecture inhabituelles, les revendications en vue de leur reconnaissance ont été structurées autour d’une définition précise du problème et des solutions ont été proposées par un groupe d’acteurs, occupant des positions différenciées dans l’espace social (chercheurs, praticiens et associations), mais dont les activités sont unifiées autour du problème. La dyslexie est donc un problème reconnu par des groupes qui défendent son existence et participent à la mise en œuvre de politiques publiques pour le résoudre. En France, la dyslexie est un problème social dont l’autonomisation, la publicisation et la consécration étatique sont très récentes. Longtemps circonscrit à des secteurs d’activité limités, il parvient à une reconnaissance par l’État à l’issue d’activités de revendications à très faible visibilité. La démarche comparative mobilisée ici n’est ni descriptive, ni explicative (Vigour, 2005) mais vise au contraire à opérer une montée en généralité pour dégager les traits caractéristiques d’appréhension et de reconnaissance de la dyslexie au-delà de ses déclinaisons nationales.
5On montrera d’abord, grâce à l’étude des publications de six chercheurs ayant défendu ou au contraire critiqué la notion de dyslexie, que cette dernière est sous-tendue par une vision de la science dans laquelle le social, et plus précisément le contexte scolaire, est périphérique. Il s’agira ensuite d’expliquer le « modèle social » du handicap, présent dans les politiques publiques et dans les travaux de recherche, qui confèrent de la visibilité à la question de la dyslexie, impliquent une vision faible du social. Enfin, on montrera comment les procédures administratives et épidémiologiques qui servent à compter les dyslexiques et à les distinguer d’autres populations rendent le social invisible et limitent ainsi la compréhension des difficultés des personnes identifiées comme « dyslexiques ».
La dyslexie : une notion « scientifique »
6Depuis les années 2000 dans les deux pays, l’explication dominante de la dyslexie, reconnue par les pouvoirs publics (Ringard et Veber, 2001 ; DFES, 2001) s’appuie sur les sciences neuro-cognitives et s’inscrit dans un mouvement plus vaste de biologisation du social (Lemerle, 2009) qui touche particulièrement les questions scolaires (Morel, 2016). Les recherches considérées comme les plus légitimes s’appuient sur le mode de raisonnement des sciences expérimentales (Passeron, 2006) et sont aussi le mieux à même de produire des généralisations et des applications. Mais la reconnaissance d’un problème public implique qu’une explication a été préférée parmi d’autres possibles (Gusfield, 2009). Il existe un second type d’explications scientifiques, alternatives et dominées qui se rapprochent des sciences historiques (Passeron, 2006). Les connaissances produites par cette seconde approche scientifique ont un moindre degré de généralisation dans la mesure où elles sont nécessairement indexées sur leur contexte de construction (ibid.). Ces oppositions ne relèvent pas seulement de barrières disciplinaires ou de distinctions épistémologiques, mais ont pour enjeu deux manières radicalement différentes de comprendre et d’agir sur l’école. Parmi les chercheurs ayant publié des travaux sur les difficultés scolaires depuis les années 1970, on peut identifier six scientifiques, sélectionnés sur le critère de leur participation publique (par des ouvrages de vulgarisation ou des interventions dans les médias) aux débats relatifs à l’origine et aux modalités de prise en charge de ces difficultés. P. Debray-Ritzen et A. Inizan s’opposent en mars 1973 dans l’émission « Les chemins de la connaissance » sur France Culture, F. Ramus et J. Fijalkow entrent en débat en 2005 dans une série de textes publiés essentiellement sur Internet, et l’épisode du dyslexia myth au cours duquel M. Snwoling est critiquée par J. Elliott en 2005 se déroule essentiellement à la télévision et dans la presse [1]. Les trois premiers sont des défenseurs de la notion dyslexie, les trois suivants la critiquent. Sans entrer dans l’étude des termes de chacune de ces controverses, l’analyse des publications de ces chercheurs, ainsi que des entretiens [2], montre que ces divergences sont sous-tendues par des conceptions opposées du travail scientifique et de la manière de définir la place du social – ici, le contexte scolaire et les relations pédagogiques – dans la compréhension des phénomènes scolaires.
La dyslexie : une notion portée par des sciences a-sociologiques
7Les trois chercheurs qui défendent publiquement la notion de dyslexie ont en commun une conception de la recherche que l’on qualifiera de sciences « dures » : la science a une visée nomologique, elle permet d’établir des lois qui, à travers la recherche appliquée, sont susceptibles de devenir des normes. L’école constitue alors seulement un domaine d’application de la connaissance scientifique.
8Dans les années 1970, le psycho-pédiatre français Pierre Debray-Ritzen (1922-1993) défend avec virulence la notion de dyslexie dans deux ouvrages (Debray-Ritzen et Melekian, 1970 ; Debray-Ritzen, 1978). Tenant d’une position organiciste quasi-idéaltypique (Pinell et Zafiropoulos, 1983), il connaît un grand succès éditorial mais reste scientifiquement et institutionnellement isolé (Lemerle, 2009). Il revendique l’héritage de la méthode expérimentale de Claude Bernard et affirme qu’il ne peut y avoir de connaissance scientifique sans recours à la méthode expérimentale (Debray et Mélékian, 1970). Toutes les autres formes de connaissance sont considérées comme non-scientifiques. La science est définie selon des critères méthodologiques et épistémologiques : c’est une manière de procéder, de produire des connaissances, selon un protocole rigoureux et spécifique. Les résultats qu’elle produit ont une « portée universelle » (Debray-Ritzen, 1992, p. 13) : ils sont « vrais », c’est-à-dire valables toujours et partout, et peuvent être généralisés. Cette conception de la science a des implications fortes en termes de poids et de légitimité des propos présentés dans un débat public. S’appuyant sur des connaissances produites selon un protocole scientifique, P. Debray-Ritzen peut parler au nom de la « vérité scientifique » (ibid.), avec tous les attributs de vérité et d’universalité que cela implique ; c’est exactement ce qu’il fait lorsqu’il s’engage publiquement dans les débats sur l’école et la dyslexie, sur la base de ses travaux médicaux. Les relations et les contextes n’ont pas leur place dans cette approche et sont considérés au mieux comme des « palabres philosophiques » (ibid.).
9Une trentaine d’années plus tard, alors que les sciences neurocognitives sont devenues dominantes dans les débats sur la lecture en France, le neurobiologiste Franck Ramus (né en 1972) adopte une approche biologisante de la dyslexie assez proche de celle de P. Debray-Ritzen. Il parle lui aussi « au nom de la science ». Il entre dans le débat public sur la dyslexie en France en publiant un article dans lequel il montre que la thèse selon laquelle « la dyslexie développementale n’existe pas », qui est « une croyance répandue dans les milieux de l’éducation », est « en contradiction flagrante avec l’ensemble des recherches scientifiques sur l’apprentissage de la lecture » (Ramus, 2005). F. Ramus se fait le porte-parole du « large consensus parmi les chercheurs du monde entier », selon lesquels la dyslexie est causée par un déficit cognitif de type phonologique. Sa position est donc sans appel : « aucune personne ayant accès à l’information scientifique ne peut plus aujourd’hui douter de l’origine biologique de la dyslexie ». Cette volonté d’aborder la question de la lecture « de manière scientifique », en visant « l’objectivité scientifique », sur la base de « connaissances scientifiques » apparaît aussi dans un texte qu’il co-signe avec dix-sept autres chercheurs (pour la plupart en neuropsychologie ou psychologie cognitive) publié dans le Monde de l’éducation en mars 2006.
10Dans les propos de F. Ramus, la science fait autorité de manière incontestable. En entretien, il explique qu’une de ses missions en tant que chercheur est de transmettre la vérité scientifique. Pour lui, l’autorité de la science ne provient pas seulement de la supériorité d’une forme de savoir, comme chez P. Debray-Ritzen, c’est également une autorité de type institutionnelle. Interrogé en entretien sur sa participation à l’expertise collective de l’INSERM sur la dyslexie (CNRSI, 2007), il explique ce qui fait la scientificité de cette entreprise – à laquelle il souscrit – et en quoi elle se distingue d’autres types de savoirs qui ne peuvent pas être considérés comme scientifiques :
« eux [l’INSERM] ils savent pas qui est expert sur un sujet. Donc, ils font une recherche sur les bases de données de la littérature scientifique internationale, qui est la seule qui fait foi, en fait, pour les connaissances scientifiques. Et donc, ils cherchent dans Pubmed, dans Web of Science, quels sont les Français qui ont publié dans ce domaine et ils les identifient par leurs publications. Et donc voilà, il se trouve que le monde des sciences de l’éducation en France ne produit pas des travaux internationaux, ils existent pas, en fait, sur la scène mondiale. Ils font peut-être des choses intéressantes au niveau franco-français, ils le publient entre eux, et ça reste dans l’ombre, finalement. Et c’est jamais confronté avec la recherche qui se fait au niveau des sciences de l’éducation sur la scène internationale. Donc voilà, ils ont été éliminés d’emblée, parce qu’ils ne produisent pas les travaux par lesquels les experts ont été sélectionnés. »
12La logique selon laquelle Franck Ramus juge de la scientificité des travaux de recherche est pragmatique. Elle est mise en œuvre par le biais des dispositifs de légitimation que sont les revues à comité de lecture ou bases bibliographiques. La dimension internationale est un élément essentiel : elle traduit non seulement l’appartenance à une communauté de chercheurs qui dépasse les frontières des états, mais elle implique aussi que les résultats des travaux sur les difficultés sont indépendants des contextes nationaux dans lesquels ils sont produits. L’international l’emporte donc sur le social. Si pour P. Debray-Ritzen la production de connaissances est par définition sans ancrage social (en laboratoire), cet ancrage n’est pas ignoré par F. Ramus mais il est tout à fait secondaire étant donné les critères de scientificité qu’il mobilise dans son travail.
13Professeure de psychologie cognitive à l’université de York, Maggie Snowling (née en 1955) consacre ses travaux au langage oral et écrit, et plus particulièrement aux troubles développementaux de ces compétences. Elle cumule une grande reconnaissance scientifique, des fonctions d’expertise au niveau national – auprès du ministère de l’Éducation britannique ou en tant que membre du groupe d’experts consultés pour l’élaboration du rapport sur la dyslexie et les difficultés de la langue écrite (Rose, 2006) – et une présence médiatique importante. Auteure d’ouvrages de vulgarisation scientifique (Snowling, 2000), elle conduit également des recherches appliquées, en vue d’élaborer des méthodes de remédiation qui s’appuient sur des connaissances théoriques.
14À première vue, les données d’entretien laissent penser que son approche est beaucoup moins décontextualisée que celle des deux chercheurs précédents. Elle dirige en effet un cabinet de psychologie à l’intérieur de l’université et explique que ce travail clinique lui permet d’étudier la dyslexie dans son contexte :
« je pense que quand on fait de la recherche sur les troubles, il est bon de faire l’expérience du travail avec ces troubles dans leur contexte. Par exemple, quand on fait une expérience scientifique, on a vingt-cinq enfants dyslexiques dans l’expérience, on sait qu’on fait quelque chose de très ésotérique, en fait, comme de la dénomination rapide automatisée, ça n’existe pas dans la vraie vie.
On en déduit ensuite des choses sur leur cognition et leur comportement. Mais cela ne vous permet pas de voir de la dyslexie dans le contexte familial, dans la vie quotidienne. Donc par le cabinet de psychologie… et je pense que ce retour est pris en compte et façonne notre recherche fondamentale et nos applications [3]. »
16Si l’on y regarde de plus près, la prise en compte d’aspects sociaux dans ses travaux de recherche ne doit pas être confondue avec la notion de contexte telle qu’elle est définie en sciences sociales. Pour M. Snowling, le contexte n’est rien de plus qu’un ensemble de paramètres permettant de préciser l’observation. Ainsi, l’étude en situation expérimentale et clinique de la dyslexie, est considérée comme suffisante pour rendre compte du phénomène. La notion d’environnement telle qu’elle est utilisée en sciences expérimentales, convient donc davantage que celle de contexte, puisque la place assignée au social est périphérique (Darmon, 2005). Surtout, les éléments constitutifs de ce « contexte » sont la clinique, la famille et certaines caractéristiques individuelles, mais en aucun cas l’école. Lorsque M. Snowling parle de l’école au cours de l’entretien, c’est uniquement en tant que domaine d’application de ses recherches. Elle ne répond à aucune de mes relances sur le fonctionnement de l’institution scolaire. Le contexte scolaire, au sens sociologique, ne fait pas partie de son objet d’étude.
17Pour ces trois chercheurs, la science ne peut être qu’expérimentale et produire des connaissances qui atteignent un très haut degré de généralité : elles sont théoriques, de portée universelle, reconnues au niveau international. Les situations expérimentales ne sont pas celles de la « vraie vie » : les enfants dont ils étudient les troubles vivent dans un environnement dont les situations expérimentales de laboratoire ne retiennent pas toutes les caractéristiques, mais dont l’étude reste périphérique par rapport à l’étude scientifique des troubles. L’école peut être une donnée environnementale mais n’est pas un matériau à analyser.
Contre la dyslexie : la primauté du contexte scolaire défendue par les sciences sociales
18Les trois chercheurs suivants ont été engagés dans des moments de controverse avec les tenants des sciences « dures » présentés précédemment. Leur critique de la notion de dyslexie repose sur une conception opposée et actuellement moins légitime du travail scientifique et de la portée des connaissances qu’il produit. Pour eux, l’école est un objet d’étude en tant que tel et l’on ne peut étudier la lecture, son apprentissage et ses troubles sans tenir compte du contexte scolaire dans lequel ils s’inscrivent. La recherche sur les difficultés en lecture ne peut se faire sans prendre en compte des données sociales. D’un point de vue strictement disciplinaire, ces trois chercheurs sont psychologues. Mais leur discipline se situe au croisement des influences de la philosophie, de la médecine, des sciences expérimentales et des sciences sociales.
19André Inizan (1924-2016) a pris position dans les années 1970 contre la conception de la dyslexie présentée en France par P. Debray-Ritzen. Psychologue scolaire, il s’oriente ensuite vers l’enseignement spécial en tant que formateur au Centre National de Pédagogie Spéciale de Beaumont-sur-Oise puis devient inspecteur. En 1973, il soutient une thèse consacrée à l’apprentissage de la lecture qui s’appuie sur un long travail d’observation dans des classes de Grande Section de maternelle et de Cours Préparatoire. Il devient ensuite enseignant-chercheur en psychologie à l’université de Tours, où il est rattaché à un laboratoire de psychologie expérimentale.
20A. Inizan est donc un psychologue très proche de l’institution scolaire. Sa critique de la notion de dyslexie est récurrente tout au long de sa carrière et les arguments mobilisés restent identiques. Il insiste d’abord sur la nécessité d’effectuer toute recherche sur la lecture dans des classes et non en laboratoire. L’expérimentation en classe est la principale condition que doit remplir un travail de recherche scientifique (Inizan, 1992). Bien qu’il utilise le même vocabulaire que les acteurs cités précédemment, A. Inizan lui accorde un sens très différent : dans les recherches sur l’école, toutes les formes d’expérimentation ne se valent pas, seules celles réalisées en classe sont légitimes. Il ne parle jamais de contextualisation mais le caractère récurrent de la thématique de la salle de classe, tant dans ses publications qu’en entretien, traduit la prééminence du contexte scolaire dans son travail. L’accent mis sur l’expérimentation en classe lui permet donc de critiquer tout à la fois les approches organicistes ou médicalisantes, incarnées par P. Debray-Ritzen, et les approches cliniques (c’est-à-dire psychanalytiques).
21Mais la position d’A. Inizan n’est pas qu’une critique de la méthodologie de la recherche, elle inclut aussi un aspect d’intervention. Les recherches menées sur la lecture peuvent donner lieu à des interventions pédagogiques. A. Inizan défend, dans ses textes théoriques et par le développement de méthodes de lecture et d’outils de remédiation, une « psychologie scientifique au service de la pédagogie » (Inizan, 1963). La pédagogie – envisagée de manière relationnelle et contextuelle – est à la fois le préalable et la finalité de ses recherches. L’enseignement est donc considéré comme une activité sociale. A. Inizan défend une psychologie expérimentale de la salle de classe : les explications des difficultés et les solutions pour les résoudre se trouvent dans le contexte, les connaissances ou méthodes de remédiation extérieures à l’institution scolaire n’ont pas besoin d’y être importées.
22Au Royaume-Uni, Julian Elliott (né en 1955) est le chercheur le plus en vue ayant dénoncé les usages de la notion de dyslexie. Enseignant, enseignant spécialisé puis psychologue scolaire, il devient chercheur en psychologie de l’éducation à l’université de Durham. Son propos sur les difficultés en lecture consiste à montrer que la dyslexie n’est qu’un « mythe » qui empêche l’institution scolaire de fonctionner correctement. En entretien, il affirme que la recherche, en tant qu’activité, va de pair avec un statut particulier, celui de chercheur universitaire, qui lui confère à son tour une responsabilité de diffusion de l’information. En ce sens, il est comparable à F. Ramus, mais s’en distingue par la dimension sociale et morale de ses responsabilités. Il ne s’agit pas tant pour lui de faire en sorte que les vérités de la recherche soient correctement diffusées que de veiller aux implications de la recherche et à ses usages sociaux.
23À l’intérieur de la psychologie, J. Elliot se situe proche du pôle le plus social et culturel de la discipline. Ses travaux portent sur les élèves en difficulté, les méthodes de remédiation et les évaluations psychologiques. Il qualifie lui-même sa recherche de « soft science », par contraste avec la « hard science » d’une généticienne avec laquelle il travaille ou les travaux de M. Snowling. Il reconnaît ainsi la hiérarchie interne à sa discipline et affirme sa vision d’une science plus « humaine », qui s’intéresse aux « gens ». Tout comme M. Snowling, sa participation à la formation lui permet d’aborder la mise en œuvre de résultats de recherche. Il se distingue de cette dernière par son intérêt pour ce qu’il nomme les « implications » de la recherche, autrement dit ses effets sociaux et politiques. C’est à ce titre qu’il s’intéresse à la dyslexie, comme le montre la citation suivante :
« L’objet de ce chapitre n’est pas seulement sur le sens du terme dyslexie mais, ce qui est peut-être plus important, sur la question de savoir si le terme nous permet d’accroître notre capacité à comprendre et à remédier aux problèmes des enfants qui ont des difficultés à apprendre à lire. »
25À plusieurs reprises en entretien, il explique que certaines questions sont légitimes dans la constitution d’un dispositif expérimental, à des fins de recherche, mais qu’elles n’ont pas la même pertinence en pratique dans le contexte scolaire. Il peut exister un lien entre la recherche et les pratiques pédagogiques, mais qui n’est pas nécessairement celui de l’application directe des découvertes scientifiques. Pour ce chercheur, la démarche qui consiste à appliquer directement les concepts, les théories et les méthodes élaborées par les recherches expérimentales est insuffisante car elle ne tient pas compte du contexte social particulier de l’école.
26Jacques Fijalkow (né en 1940) est professeur émérite de psycholinguistique à l’université de Toulouse-Le Mirail. De même que les deux chercheurs précédents, sa trajectoire professionnelle le rapproche de l’école : ses travaux portent sur la lecture et il a enseigné en faculté de sciences de l’éducation. Dans ses propos, l’adjectif « scientifique » (utilisé le plus souvent entre guillemets) prend une valeur péjorative et sert en réalité à critiquer les travaux les plus « scientistes » sur l’école et la lecture. Il défend au contraire une pratique du travail scientifique dans laquelle l’école a une place centrale en tant que lieu de la lecture. La contextualisation est donc une dimension déterminante.
27En France, J. Fijalkow fait partie des auteurs qui s’inscrivent le plus clairement contre la notion de dyslexie. Son argumentation s’appuie explicitement sur les sciences sociales, qui lui permettent d’objectiver les rapports de force qui existent autour des questions relatives à la lecture entre différentes disciplines, mais aussi en termes politiques.
28Selon lui, la dyslexie est un terme d’origine médicale mais cela n’en fait pas nécessairement une notion scientifique. Une approche sociologique lui paraît plus appropriée : il préfère s’appuyer sur des « indicateurs sociologiques objectifs » plutôt que d’évoquer des « troubles organiques hypothétiques » (Fijalkow et Fijalkow, 2003, p. 102), puisque les compétences en lecture sont corrélées avec l’origine sociale. D’après lui, les défenseurs de la notion de dyslexie s’inscrivent dans une perspective « positiviste », « fonctionnaliste » et « scientiste » (Fijalkow, 2009). Il affirme s’inscrire au contraire dans « une approche sociale et pédagogique » (ibid.), qui considère la lecture non pas comme une fonction cérébrale mais comme une « activité » à dimension sociale et culturelle. Par conséquent, les méthodes d’investigation empiriques sont non seulement différentes, mais aussi plurielles, l’expérimentation n’étant pas la seule valable et « Le lieu le plus fécond à explorer est alors moins le cerveau que la salle de classe » (ibid., p. 182). Pour J. Fijalkow, le social est d’abord l’objet d’étude des sciences sociales. Il revendique ainsi une conception de la psychologie – sa discipline universitaire d’appartenance – comme science sociale.
29La mobilisation dans des travaux de recherche de la notion de dyslexie s’avère donc indissociable d’une approche dans laquelle la science produit par l’expérimentation des connaissances de portée générale. Critiquée, cette approche s’oppose aux démarches qui promeuvent la prise en compte de données sociales contextuelles, portant notamment sur les pratiques et relations en milieu scolaire. La récurrence des débats reflète la permanence des enjeux et, au final, le caractère non seulement scientifique mais aussi politique de la perspective adoptée. Cela explique que l’approche critique n’ait guère été valorisée dans le contexte des politiques publiques autour de la dyslexie des années 2000, la dimension sociale des questions scolaires étant reléguée à une place périphérique.
La dyslexie comme handicap : un « modèle » faible du social
30Ces désaccords entre défenseurs et détracteurs de la dyslexie, et l’opposition entre les deux approches concurrentes de la science qui les sous-tend, sont masqués par une appréhension de la dyslexie en tant que handicap, qui constitue le deuxième élément constitutif de la vision a-sociale des difficultés scolaires. On verra que, d’une part, ce trouble des apprentissages relève du secteur d’action publique du handicap et que, d’autre part, il est étudié par des chercheurs qui promeuvent un « modèle social » du handicap. Ces deux dimensions du handicap, politique et scientifique, s’allient dans une vision consensuelle et dépolitisée des difficultés scolaires. Bien que la dimension « sociale » du handicap soit fréquemment mentionnée, les rapports sociaux sont largement absents.
31Dans les deux pays, la dyslexie est reconnue en tant que handicap. Ce processus s’est opéré d’abord au Royaume-Uni. En 1978, le rapport Warnock [4] propose de regrouper au sein de la catégorie unique de « besoins éducatifs particuliers » tous les élèves dont l’éducation nécessite des aménagements. Ce concept entre dans le droit trois ans plus tard : « un enfant a des “besoins éducatifs particuliers” s’il a une difficulté d’apprentissage qui nécessite qu’une prise en charge éducative spécifique soit mise en place pour lui [5] ». La loi ouvre des droits nouveaux aux élèves en difficulté – notamment mais pas exclusivement aux élèves handicapés – dans une perspective qui se veut pédagogique et non médicale (Tomlinson, 1982) et les élèves dyslexiques sont inclus dans la nouvelle catégorie.
32L’intégration de la dyslexie au domaine du handicap s’opère en France selon un processus légèrement différent. Par l’arrêté du 9 janvier 1989, la nomenclature des déficiences, incapacités et désavantages, inspirée de la classification internationale de handicaps (CIDIH) de l’Organisation Mondiale pour la Santé, entre dans le droit français. La « déficience de l’apprentissage du langage écrit ou parlé » fait partie des nouvelles catégories. Par la note de service n° 90-023 du 25 janvier 1990, l’Éducation nationale reconnaît la dyslexie et en propose une définition relativement consensuelle :
« De nombreux enfants souffrent de troubles de la maîtrise du langage oral et/ou du langage écrit. Il est convenu de regrouper ces troubles, quelle que soit leur origine ou leur intensité et à quelque niveau de scolarité qu’ils apparaissent, sous le nom de dyslexie [6]. »
34Trois ans plus tard, les termes de dyslexie, dysorthographie et dysphasie sont cités dans le cadre de l’attribution de prestations aux personnes handicapées dans le décret n° 93-1216 du 4 novembre 1993 relatif au guide-barème applicable pour l’attribution de diverses prestations aux personnes handicapées, émanant du ministère des Affaires sociales.
35Dans les deux pays, le problème de la dyslexie relève du handicap à partir des années 1990, ce qui a pour effet de limiter les possibilités de prises de positions divergentes. Son traitement peut être associé à des questions de justice sociale qui transcendent les clivages politiques classiques. Ainsi, la commission Warnock est convoquée par un gouvernement travailliste et la loi de 1981 votée sous un gouvernement conservateur. En France, alors que la dyslexie était portée par P. Debray-Ritzen, politiquement proche de la Nouvelle Droite (Pinell et Zafiropoulos, 1983) dans les années 1970, la question se diffuse dans les réseaux socialistes à partir du début des années 1990 [7]. Cette problématisation de la dyslexie en termes de handicap en fait une revendication acceptable pour le plus grand nombre. De même que les problèmes relatifs à l’enfance en danger (Best, 1990), le fait qu’elle désigne des êtres innocents et vulnérables que la société doit protéger fait qu’il devient beaucoup plus difficile de s’y opposer, d’être « contre ».
36À partir des années 2000, les politiques relatives à la dyslexie sont précisées et s’intègrent davantage à l’action publique spécifique en matière de handicap (Baudot et al. 2013). En 2001, le Special Education Needs and Disability Act britannique promeut largement la scolarisation en milieu ordinaire des élèves à besoins éducatifs particuliers et fait une large part aux troubles spécifiques du langage écrit. En France, la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées fournit un cadre à la mise en œuvre du Plan d’action pour les enfants atteints d’un trouble spécifique du langage de 2001. Le consensus moral, l’absence de dimension conflictuelle et la « sous-politisation » mis en évidence pour le handicap dans son ensemble (Baudot et al., 2013) valent aussi pour la question spécifique de la dyslexie.
37Sur le plan de la recherche, la dyslexie est envisagée en tant que handicap dans des travaux qui se revendiquent du « modèle social du handicap » (Bodin et Douat in Cukier et Gaudin, 2017). Selon ce modèle théorique, issu des disability studies qui allient recherche et perspective militante (Albrecht et al., 2001), le handicap n’est pas la conséquence d’une déficience mais résulte des obstacles physiques, sociaux et culturels, présents dans l’environnement, auxquels les personnes handicapées sont confrontées (Baudot et al., 2013). Bien que la perspective sociale et la mise en évidence de rapports de domination soient revendiquées, les travaux britanniques qui l’appliquent à la dyslexie (Campbell, 2010 ; Pollak, 2005) donnent à voir une conception faible du social [8]. Le travail du sociologue S. MacDonald en fournit un exemple éclairant. Ce dernier propose de réintroduire une dimension sociologique aux recherches sur la dyslexie en étudiant les « biographies cachées » de personnes dyslexiques en faisant entendre leurs voix, grâce à une enquête par récits de vie. Selon le « modèle social », il considère la dyslexie comme une « barrière », une forme de discrimination institutionnalisée dans le cadre de l’école. Il s’agit de comprendre les effets des structures sociales sur les trajectoires des personnes dyslexiques. Pourtant, en envisageant le handicap « principalement comme une forme d’oppression sociale » (MacDonald, 2009b, p. 81), l’auteur en fait la principale forme d’inégalité sociale réellement pertinente.
38Par ailleurs, la dyslexie est envisagée dans une perspective essentialisante comme une caractéristique organique : elle « est d’orientation neurologique plutôt que d’origine physique » (MacDonald, 2009b, p. 78). Bien que l’auteur place la notion de classe sociale au cœur de son questionnement, l’usage qu’il en fait est faiblement social dans la mesure où il ne tient pas compte des rapports sociaux. Tout d’abord, cette notion n’implique aucune dimension relationnelle. Les variables retenues pour identifier la classe sociale des enquêtés sont leur adresse, le type d’emploi occupé et le niveau de scolarisation, mais, au fil du travail, la notion est remplacée par l’expression « position socio-économique ». Les aspects économiques et la position dans la hiérarchie professionnelle priment donc sur la dimension culturelle. Deuxièmement, l’enquête empirique a été réalisée auprès d’une population dont les spécificités ne sont pas mises en évidence. Les enquêtés ont été contactés par le biais des Disabilities Centres de deux universités, d’une agence pour l’emploi des personnes handicapées et d’un service de probation. L’auteur n’envisage à aucun moment les effets de ce mode de recrutement sur sa population d’enquête. Il ne situe pas non plus ses enquêtés dans une structure sociale plus générale.
39Enfin, la classe sociale (envisagée dans une conception minimale) est considérée dans l’analyse comme un facteur totalement exogène, qui n’implique pas l’incorporation de normes ou de valeurs. Le propos de l’auteur est d’étudier les « implications », les « effets » de la classe sociale sur le handicap, notamment en termes de mobilité sociale. Mais le questionnement sur les effets des inégalités n’est appliqué qu’au diagnostic de dyslexie, la différenciation des trajectoires scolaires et sociales des enquêtés n’étant pas prise en compte. Au contraire, il étudie les « effets » de la dyslexie sur le « développement » des individus comme si toutes choses étaient égales par ailleurs, notamment en termes de scolarité. Il considère que les compétences en lecture de ses enquêtés dépendent seulement de leur degré de dyslexie. S. MacDonald conclut :
« Ce travail semble suggérer que les enquêtés de classe ouvrière sont en général plus vulnérables à la discrimination due à la dyslexie, que leurs homologues de classe moyennes et supérieures »
41La moindre vulnérabilité des enquêtés de classes moyennes supérieures tient selon lui au fait qu’ils détiennent des ressources économiques supplémentaires leur permettant de réduire l’effet des barrières handicapantes causées par la déficience, ici la dyslexie. De ce fait, le seul effet de la classe sociale dans une conception principalement économique est, dans certains cas, d’atténuer celui du handicap.
42Ainsi, le fait d’envisager la dyslexie comme une forme de handicap parmi d’autres s’inscrit dans une perspective qui se désintéresse des rapports sociaux. Tant comme secteur d’action publique que dans les travaux sur le « modèle social », cette perspective donne de la place à la dyslexie mais s’inscrit dans une conception faible du social.
Des manières de compter qui rendent le social invisible
43Le fait d’appréhender les difficultés en lecture en termes de dyslexie occulte le social pour une troisième raison, comme on peut l’observer au travers des procédures de quantification (Desrosières, 2008) utilisées pour saisir la population des personnes dyslexiques, dans une perspective administrative et dans des travaux épidémiologiques. En effet, la statistique, associée au travail de l’État, consiste à affecter des cas singuliers à des classes (Desrosières, 1993) et les statistiques publiques sont la première source de données permettant de saisir l’ampleur d’un phénomène ayant le statut de problème public (Gusfield, 2009). On verra ainsi que des « facteurs sociaux » sont le plus souvent pris en compte dans ces manières de compter les dyslexiques. Mais les critères retenus et les opérations de codage réalisées rendent invisibles les relations entre les groupes et les processus sociaux.
44Au Royaume-Uni, les procédures de quantification de la dyslexie s’inscrivent dans une représentation du monde social qui accorde peu d’importance aux relations de pouvoir et de domination, entre groupes sociaux. La notion de classe sociale n’est pas présente dans les outils statistiques permettant de quantifier la dyslexie.
45En Angleterre, des données longitudinales sont collectées pour tous les élèves scolarisés dans les établissements publics, de la maternelle à la fin du secondaire, dans la National Pupil Database. Ces données nominatives (PLASC – Pupil Level Annual School Census) sont très détaillées : sont indiqués pour chaque élève son nom, sa date de naissance, son code postal, son sexe, son groupe ethnique, sa langue maternelle ainsi que de nombreuses informations relatives à sa scolarité. On trouve aussi des indications quant à l’aide dont bénéficie un élève en réponse à des besoins éducatifs particuliers, parmi lesquels figurent les troubles spécifiques des apprentissages et donc la dyslexie. Malgré ce foisonnement d’informations, il n’y a pas réellement d’indicateur de positionnement social. Seuls deux indicateurs économiques sont disponibles : l’accès gratuit aux cantines scolaires (Free School Meal Entitlement) et un indicateur de pauvreté, relatif à la zone de résidence des élèves (Income Deprivation Affecting Children Index).
46Analysant les usages de la nomenclature des catégories socioprofessionnelles en France, E. Pierru et A. Spire (2008) montrent que les outils statistiques de description de la société vont de pair avec des visions du monde social. Ainsi, les CSP suggèrent une division en groupes sociaux et « une perception discontinue de l’espace social » (ibid., p. 459). Au contraire, un classement sur une échelle continue indique moins clairement les discontinuités dans la structure sociale. De la même manière, la structure des données PLASC permet de mettre en évidence les représentations sociales dominantes à propos de l’école au Royaume-Uni. Les groupes considérés comme pertinents sont l’ethnie et la langue maternelle. Ces groupes « culturels » ne sont pas inscrits dans une hiérarchie sociale. La seule hiérarchie valable est de type économique et les indicateurs utilisés (FSM et IDACI) suggèrent une société divisée entre un groupe de personnes en situation de grande pauvreté et le reste, qui pourrait être classé sur une échelle continue. Le positionnement des élèves dans une hiérarchie sociale et leur appartenance de classe ne peuvent pas être appréhendés directement.
47L’absence de données disponibles sur les classes sociales à l’école s’accompagne d’une disparition des questionnements de recherche en sciences sociales portant sur la notion de classe (Steward, 2010). Le phénomène observable en Angleterre grâce aux données PLASC n’est pas équivalent à celui du déclin des PCS en France. Ils ont pourtant en commun de privilégier d’autres variables (et donc d’autres interprétations des phénomènes étudiés) « au détriment d’une pensée relationnelle du monde social qui permet de restituer la cohérence de l’ensemble des pratiques économiques, culturelles ou politiques » (Pierru et Spire, 2008, p. 477). Les manières de compter les élèves que sont les statistiques de l’institution scolaire rendent matériellement impossible l’identification de régularités sociales, autres que l’appartenance ethnique et linguistique, propres à l’ensemble des élèves bénéficiant d’aide en raison de troubles spécifiques des apprentissages. Les données statistiques officielles traduisent une vision a-sociale de ces troubles comme de l’école dans son ensemble.
48En France, il existe assez peu de chiffres officiels portant sur la dyslexie. Les seules données administratives existant à l’heure actuelle renvoient à la catégorie de handicap. Ainsi le rapport Blanc (2011) fait-il état de la hausse de la part des élèves ayant des troubles des apprentissages parmi les élèves handicapés. Le handicap est donc le principal critère à l’aune duquel sont comptabilisés les dyslexiques dans la statistique publique. Il existe néanmoins des travaux épidémiologiques qui visent à quantifier et étudier cette population particulière. Depuis le début des années 2000, les débats autour de la dyslexie n’opposent plus de manière antagoniste les partisans du « social » à ceux du « tout organique ». À la différence des années 1970 et 1980, les différents professionnels de l’échec scolaire (Morel, 2014) tout comme les travaux de recherche intègrent des facteurs sociaux. Les régularités de réussite scolaire en fonction de l’origine sociale sont connues des chercheurs travaillant sur la dyslexie. À partir de l’analyse de l’expertise collective de l’INSERM sur la dyslexie (CNRSI, 2007) et des travaux épidémiologiques conduits sous la direction de C. Billard (2009 et 2010), on verra que la place accordée au social est clairement circonscrite : il est considéré comme une simple variable dont l’effet peut être mesuré mais aussi annulé, le social est synonyme d’environnement.
49À première vue, ces travaux anticipent les critiques sociologiques les plus courantes en traitant explicitement de ce qu’ils nomment les « facteurs sociaux ». Cependant, la portée de ces facteurs est considérée comme faible :
« Les travaux de recherche indiquent clairement que les facteurs décrits ci-dessus (facteurs socioculturels présents dans l’environnement de l’enfant et les capacités cognitives générales propres à chaque enfant) ne suffisent pas à expliquer l’ensemble des difficultés d’apprentissage rencontrées chez les enfants. De nombreuses données montrent qu’il existe des enfants en difficulté d’apprentissage dans tous les milieux socioculturels y compris les plus favorisés et également à tous les niveaux de capacités cognitives générales y compris les plus élevés. Cette situation a conduit les chercheurs à formuler l’hypothèse de l’existence de troubles spécifiques des apprentissages ».
51Ici, la dyslexie est donc un résidu obtenu après l’annulation des effets du QI et de la PCS sur la réussite scolaire. C’est une des « “niches” sociales à l’écart de l’empire de la causalité » (Mercklé, 2005, p. 4) dans lesquelles d’autres interprétations causales trouvent leur pertinence.
52L’enquête épidémiologique dirigée par C. Billard, neuropédiatre au centre de référence des troubles des apprentissages de l’hôpital Bicêtre, étudie les compétences en lecture et les facteurs en cause dans les difficultés d’apprentissage de 1 000 élèves de CE1, suivis pendant trois ans. Des variables socio-économiques figurent parmi les données recueillies, mais ces données ne font pas l’objet d’un travail spécifique et sont considérées comme problématiques par les auteurs. Alors que les variables médicales sont recueillies par un médecin scolaire, les variables « cognitives » évaluées par un neuropsychologue et les variables comportementales appréciées par le questionnaire d’Achenbach rempli par les enseignants, les variables socio-économiques de l’enquête (nommées SES, pour Socioeconomic status) sont collectées par téléphone auprès des parents des enfants ; on ignore qui les a collectées. Ainsi, le social est le seul domaine de connaissance envisagé dans cette enquête qui ne fasse pas l’objet d’une compétence professionnelle spécifique.
53Par ailleurs, d’après les auteurs, les phénomènes sociaux sont emprunts de mystère. Leur appréhension empirique et les possibilités d’action dans ce domaine sont limitées. Ainsi, les activités de lecture des parents :
« sont probablement difficiles à renseigner précisément ou sincèrement. Elles n’ont pas pu être modulées par les modalités de devoirs à la maison, trop hétérogènes selon l’enseignant. »
55Les pratiques réelles hors du cadre scolaire seraient donc difficiles à saisir précisément. Le mode de recueil des données sur les pratiques domestiques est, certes, une réelle question méthodologique pour les chercheurs en sciences sociales mais les auteurs de l’article concluent à l’impossibilité de leur analyse scientifique. Par ailleurs, même les pratiques domestiques sont envisagées comme des données environnementales : le suivi du travail scolaire serait déterminé par l’enseignant. Les pratiques d’accompagnement éducatif en dehors de celles dictées par l’école ne sont pas envisagées. Le social est donc difficilement objectivable et encore moins transformable, ce qui conduit les auteurs à un certain fatalisme.
56Lorsque les facteurs sociaux sont pris en compte, c’est comme une variable à la fois environnementale et collective. Les données sociales évoquées dans ces publications sont principalement des indicateurs de contexte et non des données individuelles. Ainsi les auteurs considèrent-ils que le social ne peut être appréhendé que comme ce qui environne les individus : il s’agit soit d’une zone géographique, soit d’un contexte particulier d’interaction. En termes géographiques, l’attention porte sur les zones où vivent des catégories défavorisées – selon les critères de classification de l’Éducation nationale (Merle, 2013). Ainsi, l’équipe de C. Billard évalue l’effet de la « zone d’implantation scolaire » (2009, p. 198) et traite des « faibles lecteurs scolarisés en environnement défavorisé » (2010, p. 107). Le contexte d’interaction, c’est-à-dire l’école, est le deuxième paramètre social environnemental. Selon Billard (2009, p. 200) on peut s’attendre à ce que tous les élèves des zones « socialement défavorisées » échouent dans l’apprentissage de la lecture. Le fait considéré comme déterminant ici n’est pas le capital culturel, mais la pédagogie, selon la logique suivante : ces élèves réussissent moins bien parce que la pédagogie « marche moins bien », parce que l’école est moins efficace dans ces zones.
57Dans l’ensemble de ces traitements, les facteurs sociaux sont des variables parmi d’autres, dont les effets peuvent être annulés en situation expérimentale. Pour ce faire, les élèves en difficulté d’origine sociale modeste, ou plus précisément les élèves scolarisés dans des écoles situées dans des quartiers identifiés comme « défavorisés », sont exclus des populations d’enquête (CNRSI, 2007, p. 156). En supprimant ces individus des populations étudiées, il est possible de supprimer les effets des facteurs sociaux sur les difficultés en lecture. Cette procédure technique fait apparaître la vision du social sous-jacente à l’ensemble de ces travaux : les facteurs sociaux touchent les seules populations « défavorisées », le social est donc synonyme de précarité. De même, C. Billard (2009, p. 200) envisage la prise en compte d’autres indicateurs :
« Le lieu de naissance des parents, la date d’arrivée en France, la maîtrise du français des parents et de la fratrie, les conditions d’habitation (surpeuplement, logement HLM) seraient des indicateurs plus pertinents de la position sociale de la famille, en lien avec les difficultés de lecture. »
59La réalisation d’une telle enquête conduirait à identifier des situations de grande précarité et – vraisemblablement – de très grandes difficultés scolaires. L’idée sous-jacente à ce prolongement de l’enquête épidémiologique est que la différenciation sociale n’est pertinente qu’au plus bas de la hiérarchie sociale. Les explications sociologiques ne valent que pour un type de population particulier : ceux qui ont des problèmes « sociaux », qui sont pris en chargent par les travailleurs « sociaux » dans le cadre de politiques « sociales » (Lenoir, 1999). Les indicateurs retenus sont donc extrêmes au sens où ils ne permettent pas d’établir de différenciations plus fines, valables pour la société dans son ensemble. Ce mode de raisonnement a une contrepartie extrêmement forte : dès lors que l’on n’a pas affaire à des situations d’extrême précarité socio-économique, les difficultés d’apprentissage ne sont plus imputables à des facteurs sociaux. Ainsi, les facteurs sociaux ne sont ni individuels, ni relationnels et renvoient à un environnement dans lequel les individus « baignent », un contexte qui peut influer sur les comportements.
60L’étude de ces données et facteurs « sociaux » à travers lesquels la dyslexie est comptabilisée est en affinité avec une vision de la société – et par extension de l’école – dont on peut retenir trois traits. D’abord, l’environnement est une donnée prise en compte, mais qui reste totalement extérieure aux individus et à la compréhension de leurs difficultés. Ensuite, le social est synonyme de précarité, tant dans les données PLASC que dans l’enquête épidémiologique. Les facteurs sociaux ne valent implicitement que pour une partie de la société. Par conséquent, on comprend que les explications des sciences dites « sociales » perdent en pertinence dès lors que des dyslexiques sont identifiés dans l’ensemble des « milieux sociaux ». Enfin, les rapports entre groupes sociaux n’ont pas de place dans ces manières d’envisager le phénomène.
Conclusion
61À travers l’exemple de la dyslexie, on voit donc comment la vision d’une institution scolaire traversée par des rapports entre groupes sociaux perd sa pertinence pour comprendre les difficultés scolaires. Si tous les problèmes sociaux ne sont pas nécessairement publics (Gusfield, 2009), on peut néanmoins s’interroger sur le qualificatif « social » à propos de la dyslexie. Dire d’un problème qu’il est social (ou reconnu comme social) implique qu’il soit défini à travers la prise en compte de déterminants ou processus sociaux. Ce type de définition produit des assignations de compétences : les spécialistes du social, tant chercheurs que praticiens, sont alors considérés comme étant les mieux placés pour traiter le problème. Or, à la différence de l’échec scolaire, les savoirs les plus légitimes, les catégories administratives et interprétatives mobilisées pour en rendre compte sont sous-tendus par une vision de la société et de l’école laissant peu de place aux groupes sociaux, aux relations sociales et à la contextualisation de ces dernières. Plus encore, le caractère dominant des savoirs issus des sciences de la nature et les procédures de quantification contribuent à gommer la part des déterminants sociaux dans les difficultés scolaires et à les rendre de plus en plus difficiles à appréhender. Si le problème tend à être naturalisé du fait des schèmes d’interprétations sur lesquels il repose, c’est plus largement l’ensemble des dimensions sociales des questions scolaires qui sont ainsi mises en invisibilité.
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Mots-clés éditeurs : dyslexie, catégorisation, sociologie, rapports sociaux, comparaison
Date de mise en ligne : 26/02/2019
https://doi.org/10.3917/pdc.011.0131Notes
-
[1]
http://documentaryheaven.com/dispatches-the-dyslexia-myth/ (consulté le 22/11/11). J. Elliott, « Dyslexia myths and the feel-bad factor », Times Educational Supplement, 2 Septembre 2005.
-
[2]
Des entretiens ont été réalisés avec F. Ramus, M. Snowling, A. Inizan et J. Elliott.
-
[3]
Les citations et extraits d’entretiens en anglais ont été traduits en français.
-
[4]
Great Britain committee of enquiry into the education of handicapped children and young people Special Educational Needs, Chairman H. M. Warnock, HMSO, 1978.
-
[5]
UK Government, Education Act 1981, HMSO, 1981, p. 1.
-
[6]
B.O. n° 6 du 8 février 1990.
-
[7]
D’après A. Inizan, en entretien. Les travaux qui mènent au plan d’action de 2001 sont ensuite initiés par S. Royal, alors ministre déléguée à l’Enseignement scolaire.
-
[8]
Du fait de la reconnaissance plus tardive de la dyslexie et du moindre succès des disability studies en France, il n’existe pas de tels travaux sur la dyslexie.