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Article de revue

La Russie et la Turquie au Caucase : se rapprocher pour préserver le statu quo ?

Pages 153 à 166

Notes

  • [*]
    Ce texte a été publié pour la première fois en janvier 2006 dans la collection « Russie.Nei.Visions », n° 8, du Centre Russie-NEI de l’Ifri.
  • [1]
    Pour les données sur le commerce et le tourisme, voir la revue électronique « Turkey-Russia Relations » sur le site <www. euractiv. com/ Article? tcmuri= tcm:29-134083-16&type= LinksDossier>.
  • [2]
    Entretiens des auteurs à Ankara en août, septembre et octobre 2005. Pour une présentation détaillée de cette position, voir H. Unal, « Turkey would be better off outside the EU », Financial Times, 17 décembre 2004.
  • [3]
    Entretiens des auteurs à Ankara en août, septembre et octobre 2005.
  • [4]
    Entretiens des auteurs à Ankara, en août, septembre et octobre 2005.
  • [5]
    Ibidem.
  • [6]
    Ibidem. En 2002, le général Tuncer Kilinc, secrétaire du Conseil national de sécurité, a été l’un des premiers à suggérer publiquement, que la Turquie devait probablement abandonner ses tentatives de devenir membre de l’UE et chercher des alliances alternatives avec ses autres voisins comme la Russie ou l’Iran. Voir O. Matthews, « Europe’s Orphan: A Showdown is Brewing Between Turkey and the EU », Newsweek International, 22 avril 2002.
  • [7]
    Entretiens à Moscou, septembre 2005, et à Ankara, septembre et octobre 2005.
  • [8]
    Parti turc de la Justice et du Développement (au pouvoir en Turquie).

1Les relations entre la Russie et la Turquie ont évolué de façon spectaculaire au cours de la dernière décennie. En réalité, elles ont probablement atteint en 2005 un degré de qualité sans précédent depuis plusieurs siècles, en raison de leur rivalité impériale, des guerres récurrentes entre la Russie et l’Empire ottoman depuis le xviiie siècle et de la confrontation pendant la guerre froide. Depuis 2003, le président Poutine et le Premier ministre Erdogan se sont rencontrés à plusieurs reprises, et les deux pays semblent avoir trouvé des terrains d’entente sur les contentieux d’antan.

2Le contraste est frappant par rapport au début de l’après-guerre froide : la Russie considérait la Turquie comme un pays proche des États-Unis et un rival stratégique dans l’Eurasie post-soviétique. Au cours des années 1990, la Russie et la Turquie ont adopté des positions diamétralement opposées sur plusieurs problèmes clés comme la Bosnie, le Kosovo et la Tchétchénie : les liens historiques étroits de la Turquie avec les peuples musulmans de la région et la présence d’importantes diasporas venant des Balkans et du Caucase sur son territoire expliquent cette différence d’approche. La politique turque au sein de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) combinée à la perspective de l’élargissement de l’OTAN vers les anciennes républiques soviétiques a accentué l’exaspération de la Russie. Ces facteurs sont à l’origine de tensions bilatérales. La Russie a donné la priorité à ses relations avec les États-Unis, l’Europe et les États voisins de la Communauté des États indépendants (CEI), tandis que la Turquie s’est consacrée à son partenariat stratégique avec les États-Unis, la gestion de sa relation instable avec la Grèce et Chypre et les efforts en vue de devenir membre de l’Union européenne (UE). Pendant une grande partie des années 1990, la Russie et la Turquie se sont enfermées dans une indifférence politique réciproque, qui n’a cependant pas contrarié le développement des relations commerciales.

3Comment expliquer la mutation de cette relation bilatérale ? Les signes les plus visibles ont été les relations énergétiques ainsi que l’augmentation du commerce et des flux touristiques entre les deux pays. En ce qui concerne la dimension géostratégique du rapprochement turco-russe, la motivation principale semble être un sentiment de frustration partagé à l’égard de l’« Ouest ». C’est particulièrement visible depuis 2003 : les déceptions russes et turques vis-à-vis des États-Unis et de l’Europe, leur volonté commune d’éviter l’implication des Américains et des Européens dans le Caucase, ainsi que la contestation de la politique américaine au Moyen-Orient, ont contribué au rapprochement russo-turc.

4De ce point de vue, le Caucase – zone de compétition ouverte entre la Russie et la Turquie pendant plusieurs décennies, de l’époque impériale aux années 1990 en passant par la guerre froide – émerge en tant que région où les intérêts russes et turcs commencent à converger. Une telle évolution n’était guère prévisible au lendemain de la chute de l’Union des républiques socialistes soviétiques (URSS). Aujourd’hui, elle entraîne des conséquences importantes pour l’UE, qui, compte tenu de son élargissement aux pays de la mer Noire, doit désormais construire une nouvelle politique à l’égard de la région du Caucase et de chacun de ses États (Géorgie, Arménie et Azerbaïdjan), situés dans l’espace géopolitique entre la Russie et la Turquie.

Principaux facteurs de rapprochement

5Plusieurs facteurs ont favorisé ce profond changement dans les relations russo-turques depuis l’arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine en 2000. Aujourd’hui, à titre d’exemple, la Russie fournit plus de 70 % du gaz importé par la Turquie. Un gazoduc passant sous la mer Noire – le Blue Stream – a été spécialement construit pour augmenter les exportations russes. Les deux pays viennent de signer des accords complémentaires pour intensifier leur partenariat énergétique : ils peuvent contribuer à transformer la Turquie en principal pays de transit du gaz russe vers l’Europe et, potentiellement, vers le Moyen-Orient. Le volume global du commerce entre les deux pays est en augmentation constante : de 10 milliards de dollars en 2004, il est passé à 15 milliards en 2005. Une augmentation à 25 milliards de dollars est prévue à l’horizon 2007 [1].

6Bien que l’énergie représente la plus large proportion du commerce bilatéral, les relations économiques se sont également développées dans d’autres domaines. Dans le secteur du bâtiment, des groupes turcs ont remporté des contrats conséquents à Moscou et dans d’autres grandes villes. En 2004, la Turquie a été la première destination de vacances pour les Russes : environ 1,7 million de Russes ont représenté, à côté des Allemands, l’un des principaux flux touristiques étrangers. La Turquie a aussi été pendant longtemps la destination préférée des « touristes économiques » russes, qui ont profité, depuis le milieu des années 1990, de vols charters pour faire de courts voyages à Istanbul, où ils achetaient des articles turcs pour les revendre ensuite en Russie. Appelé couramment « commerce de navette » en Russie et « tourisme de la valise » en Turquie, ce commerce informel, estimé à 2 ou 3 milliards de dollars, est à ajouter aux chiffres officiels. Il est intéressant de souligner l’existence d’un lobby politique et économique anti-UE qui s’appuie sur ce type de commerce pour obtenir des accords de libre-échange avec des pays comme la Russie, l’Iran, la Chine et l’Inde en refusant de fonder toute la politique commerciale de la Turquie sur son union douanière avec l’UE [2].

7Cette volonté de réorientation vers les voisins orientaux et septentrionaux venant des milieux nationalistes turcs traduit un sentiment de frustration croissant à l’égard de l’UE, perçue comme une source d’ingérence permanente dans la politique intérieure turque. Les tensions avec les États-Unis au sujet de l’Irak ont également contribué à la dégradation des relations turques sur le « front occidental ». Cette complexe interaction entre dynamiques politiques et économiques a influencé d’une manière positive la perception par une grande partie de la société turque de la Russie ; cette dernière est désormais considérée comme un partenaire potentiel et non plus comme un ennemi historique.

8Sur les questions de sécurité, plusieurs dossiers épineux ont été réglés, ouvrant ainsi la voie à la poursuite du rapprochement. La création du Conseil OTAN-Russie a amorti le choc de l’élargissement de l’OTAN pour la Russie. En mars 2003, le refus de la Turquie d’autoriser les troupes américaines à utiliser son territoire pour ouvrir un front nord en Irak a illustré son émancipation à l’égard des États-Unis. La Russie et la Turquie ont aussi trouvé un terrain d’entente au Moyen-Orient, souvent par opposition ouverte à la politique américaine dans la région. Malgré la pression de cette dernière, les deux pays se sont efforcés de préserver leurs relations économiques avec l’Irak et l’Iran. En outre, pour des raisons différentes, ils se sont opposés à la guerre en Irak et s’opposent à une éventuelle intervention en Iran.

9Les inquiétudes et les intérêts turcs quant à l’Irak sont évidents. Avant l’intervention américaine, la Turquie redoutait la désintégration de l’Irak, l’apparition d’un État kurde indépendant dans le nord du pays, une déstabilisation profonde du commerce transfrontalier ainsi qu’un afflux massif de réfugiés. Le sud-est de la Turquie dépend fortement du commerce avec l’Irak : Ankara avait évalué à 30 milliards de dollars les pertes dues aux sanctions imposées par les États-Unis sur le commerce avec l’Irak après la guerre du Golfe et à l’interruption des exportations du pétrole irakien via Ceyhan, port turc sur la Méditerranée. Les inquiétudes russes étaient moins vives et portaient essentiellement sur la dette de Bagdad à l’égard de Moscou, contractée à l’époque soviétique pour environ 8 milliards de dollars, ainsi que sur des contrats préférentiels pour la réouverture des champs pétroliers irakiens à long terme (après la levée des sanctions) de la compagnie pétrolière russe LUKoil. La Russie craignait de voir ses intérêts économiques en Irak complètement lésés par l’intervention américaine.

10La Turquie et la Russie ont d’importants intérêts commerciaux en Iran : la Turquie achète du gaz iranien, alors que la Russie vend des technologies nucléaires civiles à l’Iran et considère ainsi Téhéran comme l’un de ses alliés stratégiques au Moyen-Orient. Même si Moscou et Téhéran ont récemment eu quelques désaccords sur le partage des ressources énergétiques de la mer Caspienne, l’Iran a toujours appuyé la position russe sur la Tchétchénie et s’est abstenu de soutenir des groupes radicaux islamistes agissant au sein de la Fédération. La Turquie fait preuve de davantage de prudence dans ses relations politiques avec l’Iran, en raison du soutien apporté dans le passé par Téhéran à des groupes islamistes et terroristes en Turquie. Ce soutien a affecté les relations commerciales bilatérales. Dans le même temps, la Turquie considère l’Iran comme une force potentielle de stabilisation de la région et non pas comme le rogue state absolu dépeint par l’Administration Bush depuis 2000. Bien que les militaires turcs refusent l’émergence de l’Iran comme puissance nucléaire, il est important de rappeler que la dernière guerre entre Turcs et Iraniens remonte au xviie siècle. En ce sens, la majorité de la population turque ne considère pas l’Iran comme une menace pour sa sécurité. En réalité, une frappe préemptive américaine contre l’Iran est considérée comme plus déstabilisante [3].

11En plus de ces approches largement partagées sur les dossiers irakien et iranien, la Turquie et la Russie entretiennent chacune des liens de plus en plus étroits avec Israël. Les trois États – Turquie, Russie et Israël – partagent la même volonté d’endiguer les mouvements islamistes radicaux en provenance du Moyen-Orient ou qui y sont liés. La Turquie a conclu une alliance en matière de sécurité avec Israël dans les années 1990. En ce qui concerne Moscou, ses relations avec Jérusalem n’ont cessé de se développer à travers l’immigration vers Israël, qui est à l’origine d’une importante diaspora russophone (environ 1 million de personnes) dans ce pays. Les Israéliens russophones sont devenus une force culturelle et politique importante ; ils contribuent au développement des relations commerciales, qui pourraient bientôt s’étendre directement à la Turquie. De manière significative, à l’occasion de la cérémonie d’ouverture officielle du gazoduc Blue Stream en novembre 2005, le ministre russe de l’Énergie et de l’Industrie Viktor Khristenko a évoqué la future construction d’un autre pipeline sous-marin en Méditerranée, destiné à acheminer du gaz russe en Israël, via la Turquie.

Frictions partagées avec les États-Unis et l’Union européenne

12Ces évolutions et frictions partagées avec les États-Unis ont profondément modifié les rapports russo-turcs. Outre l’action des États-Unis en Irak et leur politique à l’égard de l’Iran, la Russie et la Turquie sont préoccupées par la stratégie américaine, qui consiste manifestement à encourager les « révolutions colorées » et les changements de régime en Géorgie, en Ukraine et au Kirghizstan, avec en ligne de mire d’autres pays en Eurasie. Chaque action des États-Unis en faveur d’élections libres et équitables dans la région est perçue par Moscou, d’une manière ou d’une autre, comme hostile. Aux yeux de la Russie, l’objectif des États-Unis est de remplacer les alliés traditionnels de la Russie par des amis et affidés « occidentaux », (comme Mikhaïl Saakachvili en Géorgie ou Viktor Iouchtchenko en Ukraine).

13Tout en approuvant officiellement la politique de démocratisation menée par les États-Unis au Moyen-Orient et en Eurasie, Ankara craint de manière sous-jacente de voir la marche de l’Administration Bush en faveur de « la liberté et l’autodétermination » aboutir inévitablement à l’indépendance du Kurdistan irakien [4]. Dans la mesure où la Turquie compte environ 15 millions de citoyens d’origine kurde – contre 5 millions de Kurdes en Irak –, la perspective de l’indépendance kurde représente pour elle un « scénario cauchemar ». En outre, depuis l’arrivée au pouvoir de nouveaux dirigeants en Géorgie et en Ukraine, la Turquie considère ces pays comme des concurrents potentiels à l’adhésion à l’UE, ou, tout au moins, comme une autre série de prétextes que l’UE pourrait utiliser pour bloquer les négociations d’adhésion. Le peu d’enthousiasme manifesté par les démocrates chrétiens allemands et la classe politique française devant la perspective d’adhésion de la Turquie ne fait qu’accentuer son sentiment d’incertitude. Une grande partie de la société turque considère déjà l’UE comme un « club chrétien [5] ». À ses yeux, il ne serait guère surprenant de voir l’Ukraine ou la Géorgie – deux pays traditionnellement (et anciennement) chrétiens – bénéficier d’un traitement plus favorable en Europe, en particulier de la part des démocrates chrétiens européens.

14Plus largement vis-à-vis de l’UE, les deux pays mènent des négociations complexes avec Bruxelles, qui ont des conséquences décisives non seulement sur le développement de leurs économies, mais aussi sur leur future identité politique et culturelle européenne. Les deux éprouvent un sentiment croissant de rejet voire de mépris de la part de l’UE ; ils lui reprochent de ne pas suffisamment tenir compte de leurs préoccupations. En Turquie, l’opinion publique semble s’éloigner de l’idée que la Turquie sera (et même qu’elle souhaiterait être) membre de l’UE. Fin septembre 2005, par exemple, à la veille de la décision d’ouverture des négociations d’adhésion, la plupart des sondages indiquaient une baisse brutale (de 85 % à 65 %) du nombre de personnes favorables à l’adhésion. En ce qui concerne la Russie, l’opinion et les élites politiques savent qu’il n’est pas question de devenir membre de l’UE. Cependant, les observateurs politiques à Moscou surveillent de près les négociations turques avec l’UE. Même si la Russie ne manifeste pas un enthousiasme particulier devant la poursuite de l’élargissement vers les pays situés le long des frontières russes – il y aurait de ce point de vue une certaine satisfaction à voir la candidature de la Turquie rejetée comme membre à part entière et à assister finalement à l’émergence d’une UE à trajectoires multiples –, elle comprend, en même temps, qu’un échec de la Turquie rendrait plus difficile son propre partenariat avec l’UE.

15Désormais, en Russie comme en Turquie, des observateurs et des hommes politiques, y compris au plus haut niveau, expriment ouvertement l’importance de s’affirmer comme principales puissances régionales et de former une alliance étroite entre elles, au cas où elles ne parviendraient pas à obtenir satisfaction de la part de l’UE (ou des États-Unis) [6]. En Turquie, la Russie est perçue comme une meilleure alternative stratégique, notamment par les partisans de l’aile kémaliste dure des militaires, préoccupés par les pressions européennes et les sympathies américaines en faveur des droits politiques des Kurdes. L’accentuation des sentiments antiaméricains, combinée à une vision plus positive de la Russie, explique pourquoi, dans certains milieux politiques ou d’analyse à Ankara, tout dossier lié aux intérêts américains en mer Noire ou dans le Caucase est perçu comme un facteur potentiel de déstabilisation. Pour les mêmes raisons, la Russie s’est opposée en 2005 à la demande des États-Unis d’obtenir le statut d’observateur au sein de l’Organisation de coopération économique de la mer Noire (CEMN), basée à Istanbul. De son côté, la Turquie, membre de l’OTAN, alliée régionale des États-Unis et pays d’accueil du siège de cette organisation, n’a pas cherché à appuyer cette demande. Ce sont d’autres membres de la CEMN qui ont dû faire pression pour que la candidature des États-Unis soit acceptée.

Moscou et Ankara : progresser ensemble dans le Caucase

16Pour résumer, la Russie et la Turquie ne se perçoivent plus comme puissances rivales dans leur voisinage du Caucase. Au cours des années 1990, la Turquie n’a jamais réellement réussi à pénétrer la région économiquement et politiquement en dépit de l’affaiblissement des positions russes. En outre, les deux pays entretiennent des relations difficiles et controversées avec certains États de la région (par exemple, la Russie avec la Géorgie ou la Turquie avec l’Arménie), ce qui rend les prises de décision complexes. Aujourd’hui, la Russie et la Turquie ont rapproché leurs positions sur des dossiers qui étaient hier encore des pierres d’achoppement (comme la Tchétchénie ou la question kurde).

17Au cours de la première guerre en Tchétchénie, les Tchétchènes et les autres diasporas d’origine nord-caucasienne installées en Turquie, y compris les Abkhazes et les Tcherkesses, ont soutenu d’une manière active la cause tchétchène, sans provoquer de réponse énergique de la part des autorités turques. Parallèlement, la Russie a fermé les yeux sur les activités des associations kurdes liées au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) et basées à Moscou (la Russie et chaque État du Caucase ont leur propre minorité kurde). Cependant, depuis le début de la deuxième guerre en Tchétchénie, les inquiétudes turques devant le fondamentalisme islamique et la radicalisation des groupes islamistes en Turquie même, ainsi que la peur de voir émerger un Kurdistan indépendant à la suite de la politique américaine en Irak ont tempéré les sympathies pour la cause tchétchène. Lors de la dernière rencontre bilatérale à Sotchi, en juillet 2005, V. Poutine et T. Erdogan se seraient, selon certaines sources, mis d’accord pour se soutenir mutuellement sur les questions de la Tchétchénie et du Kurdistan, tout en exprimant les mêmes inquiétudes au sujet du terrorisme et du séparatisme.

18Le rapprochement des positions sur la Tchétchénie, la fin des perceptions croisées hostiles et une notable amélioration de l’état général des relations entre la Russie et la Turquie devraient (au moins théoriquement) exercer une influence positive sur la situation politique et économique dans le Caucase, tout en ouvrant des perspectives pour l’intégration régionale de cette zone charnière. Pourtant, il n’en est rien.

19Pour quelles raisons ? Du côté russe, cela s’explique par l’hostilité de Moscou vis-à-vis de la Géorgie et par son obsession du rôle joué par les États-Unis dans la région, qui minent ses relations avec tous les États du Caucase. Du côté turc, cela s’explique par une profonde inertie vis-à-vis des pays du Caucase. La Russie et la Turquie manifestent aujourd’hui peu de volonté d’engager un dialogue stratégique sur cette région [7].

Postures de la politique étrangère russe au Caucase

20La politique étrangère russe actuelle – globale, aussi bien qu’à l’égard du Caucase – est avant tout réactive. Pourtant, les relations de la Russie avec tous ses ennemis historiques, y compris la Turquie, la Chine, le Japon, l’Allemagne, la France, l’Iran et même les États-Unis, sont sans doute meilleures qu’elles ne l’ont jamais été. De plus, la Russie reste un acteur international majeur au sein des institutions prestigieuses comme le G8 (qu’elle préside en 2006) ou le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (ONU). Cependant, le rapide déclin de ses capacités militaires conventionnelles depuis 1991, l’adhésion de ses anciens satellites à l’OTAN et l’UE, une image généralement négative à l’étranger et une absence manifeste de tout allié proche, à l’exception de la Biélorussie, ont alimenté un profond sentiment d’humiliation. Ne pas avoir d’amis et être considérée comme une « Haute Volta avec des missiles » ou une « Haute Volta avec beaucoup de pétrole et de gaz », sont deux traits mal acceptés par l’élite politique russe, les responsables de la politique étrangère et le Kremlin.

21Par conséquent, la Russie est devenue une puissance paranoïaque sur la scène internationale, de plus en plus soucieuse de prévenir la diminution de son influence, d’éviter le prochain élargissement de l’UE, ainsi que la pénétration des compagnies et des intérêts occidentaux, notamment américains, sur les marchés eurasiatiques. Moscou poursuit la construction de son propre espace économique commun en Eurasie, en misant sur ses principaux partenaires commerciaux comme l’Ukraine et le Kazakhstan. En outre, elle a cherché à contrer les alliances régionales « sponsorisées par l’Occident » et perçues comme antirusses – de l’OTAN au GUAM en passant par l’OSCE – par la conclusion d’arrangements spéciaux (comme le Conseil OTAN-Russie), la création de structures alternatives ou des actions délibérées visant à paralyser leur fonctionnement (comme, par exemple, ses tentatives de bloquer le budget de l’OSCE en 2005).

22En outre, la stratégie de Moscou à l’égard de ses voisins – en particulier, les États du Caucase, les États baltes ou l’Ukraine – est dominée par la vieille approche de « jeu à somme nulle ». Moscou voudrait avoir le dernier mot dans les décisions de ses voisins en matière de politique étrangère ou d’investissements économiques (en créant une nouvelle forme de « finlandisation » comme à l’époque soviétique) ; elle a donc misé l’essentiel de ses forces sur la préservation du statu quo. La Russie n’est pas décidée à prendre les choses en main pour, par exemple, régler les problèmes régionaux dans le Caucase, tels que les conflits territoriaux en Abkhazie, Ossétie du Sud et Haut-Karabakh – surtout si le règlement à long terme est susceptible d’affecter ses positions actuelles. À cet égard, parmi tous ses voisins, ses relations avec la Géorgie sont probablement les plus délicates.

23À titre d’exemple, des heurts sévères, liés à la situation en Tchétchénie, ont été évités de justesse entre la Russie et la Géorgie en 2002. À cette date, de nombreux réfugiés et combattants tchétchènes s’étaient installés dans la vallée de Pankissi en Géorgie, une zone isolée, avec la population autochtone tchétchène. Au début, la Géorgie a manifesté peu d’empressement pour traiter ce dossier en dépit d’une forte pression de la Russie. Le gouvernement géorgien était confronté à des conflits internes, une impopularité croissante d’Édouard Chevardnadze, des troubles sociaux, une corruption endémique, une criminalité généralisée et des relations conflictuelles avec l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud. Les observateurs extérieurs, surtout à Moscou, ont commencé à analyser la Géorgie comme un failed state. Après une période de tensions et de protestations réciproques, des raids aériens russes clandestins dans la vallée de Pankissi, la menace russe d’envoyer des troupes sur le territoire géorgien et le lancement par les États-Unis d’un programme d‘entraînement des militaires géorgiens, le gouvernement géorgien a fini par lancer sa propre opération antiterroriste. Cette opération et l’accord russo-géorgien sur la création des patrouilles frontalières communes ont provisoirement stabilisé la situation. Toutefois, des hommes politiques russes, y compris le président Poutine et le ministre de la Défense Sergueï Ivanov, ont laissé clairement entendre qu’ils continuaient à considérer la Géorgie comme un failed state. La confrontation entre la Russie et la Géorgie reste toujours aussi vive sous Mikhaïl Saakachvili que sous Chevardnadze : Moscou soupçonne les États-Unis d’avoir orchestré la « révolution des roses », en novembre 2003, pour amener Saakachvili au pouvoir et renforcer ainsi leurs positions dans la région de la mer Noire et au Caucase.

Le Caucase dans l’optique turque

24Les relations de la Turquie avec les États du Caucase ne sont pas aussi négatives que les relations entre la Russie et la Géorgie : elles sont stagnantes dans la plupart des cas. Mises à part quelques personnes au ministère des Affaires étrangères, Ankara n’a pas réfléchi à une véritable stratégie dans le Caucase depuis la mort du président Turgut Ozal en 1993, qui avait mis en œuvre une nouvelle approche à l’égard de cette région. La même observation peut être faite à propos des trois États du Caucase : aucun d’eux n’a accordé d’attention particulière à son voisin du sud au cours des dernières années, en se cantonnant, par effet d’inertie, aux relations existantes (ou à l’absence de relations dans le cas de l’Arménie).

25Les préoccupations de la Turquie sont en général mal comprises par les États du Caucase. La Géorgie, l’Arménie et l’Azerbaïdjan sont beaucoup plus préoccupés par leur politique intérieure respective, les relations bilatérales au sein de ce triangle et les rapports avec la Russie plutôt qu’avec la Turquie. Cependant, la Turquie est leur principal partenaire commercial, y compris pour l’Arménie. Des négociations sont en cours sur la modernisation et l’extension des lignes ferroviaires entre l’Azerbaïdjan, la Géorgie et la Turquie pour augmenter le commerce interrégional. En outre, les dirigeants des trois États soutiennent la candidature turque d’adhésion à l’UE en estimant qu’un échec serait contre-productif pour leurs propres intérêts. Chacun des trois pays envisage l’adhésion à l’UE à long terme : le refus de la candidature turque marquerait clairement un temps d’arrêt pour l’élargissement de l’UE et affaiblirait leurs chances d’adhésion, voire les réduirait à néant. En revanche, avoir un État membre de l’UE à leurs frontières, qui plus est sur ce côté de la mer Noire, donnerait une forte impulsion à leur développement économique et politique. Malgré ces considérations, même l’Azerbaïdjan, qui fait, pourtant, figure de proche allié de la Turquie dans la région, n’a pas de réflexion stratégique sur le nouveau rôle que la Turquie pourrait potentiellement jouer en tant que futur candidat à l’adhésion à l’UE.

26En réalité, sous bien des aspects, les relations entre la Turquie et l’Azerbaïdjan se caractérisent par l’inertie. Les deux pays pensent bien se connaître grâce à leurs liens culturels et linguistiques anciens, ainsi qu’à des relations économiques et politiques étroites, établies depuis le début des années 1990. Cependant, leurs divergences d’intérêt s’accentuent sur plusieurs dossiers : le rôle de l’islam dans la société et la politique – le gouvernement azéri se montre de plus en plus mal à l’aise avec la conception de l’islam politique défendu par l’AKP [8] en Turquie ; l’Iran, dans la mesure où un conflit frontalier terrestre ou maritime (dans la Caspienne) est susceptible à long terme d’opposer l’Iran et l’Azerbaïdjan et même facilement d’impliquer la Turquie ; les relations avec les États-Unis, car le gouvernement azéri est de plus en plus considéré comme pro-américain, tandis que les sentiments antiaméricains se renforcent en Turquie ; et, enfin, l’Arménie et le Haut-Karabakh, où le gouvernement turc se sent pris au piège en raison de son soutien à l’Azerbaïdjan.

27En ce qui concerne les relations entre la Turquie et l’Arménie, elles se heurtent à la reconnaissance du génocide de 1915, au problème du rétablissement de relations diplomatiques et à l’ouverture de la frontière commune. L’Arménie continue de considérer la Turquie comme la principale source de menace pour sa sécurité. De son côté, la Turquie perçoit de plus en plus l’Arménie comme un obstacle supplémentaire (outre la question chypriote) à son adhésion à l’UE dans la mesure où plusieurs États membres soutiennent la cause arménienne, en faisant pression sur le gouvernement turc pour qu’il reconnaisse le génocide et en considérant cet acte comme condition préalable à une adhésion à part entière. Les Arméniens ne considèrent plus l’ouverture de la frontière et la normalisation des relations avec la Turquie comme prioritaires. L’Arménie vit une période de croissance économique : son commerce bilatéral annuel avec la Turquie atteint (au moins) 100 millions de dollars malgré la frontière fermée. Les marchandises transitent par voie terrestre à travers la Géorgie ou par vols charters directs entre Erevan et Istanbul. Les hommes d’affaires arméniens, en particulier dans la vente de détail et dans l’import-export avec la Russie et l’Iran, appuyés sur la diaspora arménienne dans le monde entier, sont parvenus à contourner le « blocus » de l’Arménie. Le pays ressemble de plus en plus à une mini-Chypre, un territoire enclavé et une zone « off-shore » qui peut fonctionner seule pendant un certain temps. Dans ce contexte, l’Arménie peut mieux se développer que l’Azerbaïdjan et la Géorgie, même si elle a sacrifié la croissance des industries manufacturières d’exportation et a renoncé à jouer un rôle économique et politique de premier plan dans la région.

Le nœud abkhaze

28Si les relations bilatérales de la Turquie avec l’Azerbaïdjan et l’Arménie stagnent, celles entre la Géorgie et la Turquie se dégradent au point de susciter aujourd’hui une certaine inquiétude. Cette situation s’explique à la fois par l’inexpérience du nouveau gouvernement de Saakachvili dans la gestion du dossier turc lors de son arrivée au pouvoir en janvier 2004 et par la priorité accordée aux relations avec les États-Unis, la Russie et l’Europe. C’est également la conséquence des incompréhensions mutuelles sur certains dossiers comme l’Abkhazie.

29À la suite de l’exode de populations caucasiennes de l’Empire russe vers l’Empire ottoman dans les années 1860, il y a plus d’Abkhazes en Turquie qu’en Abkhazie (c’est le deuxième groupe ethnique après les Tcherkesses). Nombreux sont les Turcs qui ont une interprétation erronée du conflit en Abkhazie, en n’y voyant qu’une persécution de la minorité musulmane par des Géorgiens chrétiens. La complexité du problème et le fait que le mélange ethnique en Abkhazie comprend un grand nombre d’Arméniens et de russophones leur échappent donc. C’est la présence du « facteur russe » dans le conflit actuel entre l’Abkhazie et la Géorgie qui lui confère son caractère particulièrement complexe. Ayant soutenu la sécession abkhaze, les forces armées russes veillent aujourd’hui au respect du cessez-le-feu. La Russie est le seul lien de l’Abkhazie avec le monde extérieur. Le rouble russe circule comme monnaie officielle dans la République, et la majorité de la population possède maintenant des passeports délivrés par Moscou, qui remplacent les anciens passeports soviétiques expirés. Seuls ces passeports permettent de voyager en Russie. Pendant la dernière décennie la dépendance de facto de l’Abkhazie vis-à-vis de la Russie s’est ainsi progressivement transformée en une dépendance quasiment de jure. À plusieurs reprises, Moscou a clairement exprimé son désir, sinon sa ferme intention, de voir l’Abkhazie devenir de jure une région de la Fédération de Russie. Tout récemment, Moscou a évoqué la possibilité d’utiliser le précédent de l’indépendance du Kosovo (si elle est reconnue dans les prochains mois) pour faire pression en faveur de la séparation officielle de l’Abkhazie de la Géorgie et de son intégration éventuelle dans la Fédération de Russie. Compte tenu du soutien américain au gouvernement de Saakachvili, ces tensions ont transformé la Géorgie en une des principales pierres d’achoppement des relations russo-américaines.

30La Turquie est un autre élément de complexité dans ce conflit. Au cours de la dernière décennie, les relations commerciales entre la Turquie et l’Abkhazie n’ont cessé de croître. Le nouveau gouvernement géorgien a récemment essayé de mettre fin à ce commerce, en interceptant des bâtiments turcs qui naviguaient sur la mer Noire entre les ports de Samsun ou de Trabzon et le port abkhaze de Soukhoumi. Leurs capitaines et équipages ont été arrêtés, condamnés à une amende et emprisonnés. Les négociations entre la Géorgie et la Turquie sur la possibilité de surveiller ensemble leur frontière maritime n’ont pas connu d’avancées significatives. Les Géorgiens soupçonnent l’existence d’une sorte de collusion russo-turque sur le dossier abkhaze. Chacun de ces incidents turco-géorgiens à la frontière maritime peut facilement prendre une tournure plus grave, compte tenu de l’antagonisme persistant entre, d’une part, la Géorgie, et, de l’autre, la Russie et l’Abkhazie. La Turquie est actuellement considérée par les Géorgiens comme un pays soutenant ces dernières. Reste à savoir comment Ankara réagirait à l’utilisation par Moscou du précédent du Kosovo pour finaliser l’indépendance abkhaze, compte tenu de ses propres inquiétudes à l’égard des territoires kurdes. Quoi qu’il en soit, il ne faut pas perdre de vue que la Géorgie a sans doute besoin de coopérer avec la Turquie pour rétablir et améliorer ses relations actuelles avec l’Abkhazie.

31Paradoxalement, ce sont donc les relations turco-géorgiennes qu’il est urgent de normaliser plutôt que les relations turco-arméniennes, qui retiennent tant l’attention des pays européens. La Turquie n’a été ni encouragée ni aidée par l’Europe ou les États-Unis à jouer un rôle plus actif en Géorgie et dans le règlement du conflit en Abkhazie. Elle a pourtant traditionnellement joué un rôle positif en Géorgie à travers, par exemple, son soutien à l’indépendance géorgienne après la chute de l’URSS, sa participation à la négociation du cessez-le-feu en Ossétie du Sud en 1992 et son rôle pour faciliter la « démission » pacifique du chef adjar Aslan Abachidze au lendemain de la « révolution des roses » en 2003. Cependant, le rapprochement avec la Russie, l’antipathie croissante à l’égard des États-Unis à cause de la guerre en Irak et une frustration croissante vis-à-vis de l’UE déterminent par défaut ses relations avec la Géorgie.

32***

33Les évolutions des relations russo-turques font l’objet d’une attention particulière en Europe, surtout dans le contexte de la nouvelle politique de voisinage de l’Union à l’égard du Caucase, dans laquelle la Turquie devrait jouer un rôle de premier plan. Un rapprochement de la Turquie et la Russie est sans doute une meilleure chose pour l’Europe qu’une compétition territoriale de ces deux anciens rivaux géopolitiques. Il n’est pas impossible qu’une Turquie démocratique et prospère, devenue membre de l’UE, ait une influence positive sur la Russie. Cependant, il est important que l’UE prenne conscience qu’au-delà de certains intérêts communs économiques, politiques et sécuritaires (même s’ils sont importants), le principal moteur du rapprochement russo-turc est le désir partagé de maintenir le statu quo. Si la Turquie craint une déstabilisation à ses frontières et ses conséquences pour sa propre intégrité territoriale, la Russie est davantage préoccupée par la pénétration des États-Unis et de l’UE dans sa sphère traditionnelle d’influence. Elle cherche à tirer un avantage économique et politique des appréhensions de la Turquie et de son insatisfaction vis-à-vis des États-Unis et de l’UE. Par conséquent, ce partenariat est davantage fondé sur les inquiétudes et les angoisses d’aujourd’hui que sur les espoirs de demain.

34Les angoisses des deux partenaires doivent être prises en compte, mais l’UE devrait accorder une attention particulière aux appréhensions de la Turquie. Même si actuellement la Turquie n’a pas de raisons stratégiques manifestes de se détourner de son orientation occidentale au profit d’un partenariat alternatif avec la Russie, il est évident que l’évolution en Irak pourrait prochainement modifier cet état de fait. L’UE doit être particulièrement vigilante sur ce point. L’émergence d’un État kurde indépendant à la suite de l’effondrement de l’État irakien uni pourrait facilement déclencher un virage autoritaire et nationaliste dans la politique intérieure et étrangère turque tout en rompant l’ancrage du pays à l’Ouest. Compte tenu de sérieuses difficultés des relations turco-américaines, la perspective d’adhésion à l’Union européenne dans un délai raisonnable semble être le seul moyen crédible de prévenir une telle dérive turque – si un Kurdistan indépendant voyait le jour. Il est essentiel pour l’UE d’élaborer une vision stratégique claire à l’égard de la Turquie et de soutenir son implication croissante dans le Caucase, en mer Noire et au Moyen-Orient dès le début du processus d’adhésion pour prévenir son éventuel isolement.

Notes

  • [*]
    Ce texte a été publié pour la première fois en janvier 2006 dans la collection « Russie.Nei.Visions », n° 8, du Centre Russie-NEI de l’Ifri.
  • [1]
    Pour les données sur le commerce et le tourisme, voir la revue électronique « Turkey-Russia Relations » sur le site <www. euractiv. com/ Article? tcmuri= tcm:29-134083-16&type= LinksDossier>.
  • [2]
    Entretiens des auteurs à Ankara en août, septembre et octobre 2005. Pour une présentation détaillée de cette position, voir H. Unal, « Turkey would be better off outside the EU », Financial Times, 17 décembre 2004.
  • [3]
    Entretiens des auteurs à Ankara en août, septembre et octobre 2005.
  • [4]
    Entretiens des auteurs à Ankara, en août, septembre et octobre 2005.
  • [5]
    Ibidem.
  • [6]
    Ibidem. En 2002, le général Tuncer Kilinc, secrétaire du Conseil national de sécurité, a été l’un des premiers à suggérer publiquement, que la Turquie devait probablement abandonner ses tentatives de devenir membre de l’UE et chercher des alliances alternatives avec ses autres voisins comme la Russie ou l’Iran. Voir O. Matthews, « Europe’s Orphan: A Showdown is Brewing Between Turkey and the EU », Newsweek International, 22 avril 2002.
  • [7]
    Entretiens à Moscou, septembre 2005, et à Ankara, septembre et octobre 2005.
  • [8]
    Parti turc de la Justice et du Développement (au pouvoir en Turquie).
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