Couverture de POLAF_127

Article de revue

Du laboratoire au miroir : quand l'Afrique subsaharienne construit l'Europe stratégique

Pages 135 à 153

Notes

  • [1]
    L’auteur remercie Fred Eboko pour ses encouragements et conseils en première lecture, ainsi que les relecteurs anonymes et les rédacteurs en chef pour leurs critiques, commentaires et suggestions.
  • [2]
    La notion d’« architecture africaine de paix et de sécurité » définit l’ensemble formé par les différentes institutions et organisations africaines (Union Africaine et organisations régionales) impliquées dans la gestion des enjeux diplomatiques, de sécurité et de défense sur le continent.
  • [3]
    Voir C. Major, EU-UN Cooperation in Crisis Management, the Experience of EUFOR RD Congo in 2006, Paris, IES-UE-Occasional Paper, n° 72, 2008 ; N. Bagayoko-Pénone, « L’Opération Artémis, un tournant pour la politique européenne de sécurité et de défense ? », Afrique contemporaine, vol. 1, n° 209, 2004, p. 101-116. Pour une analyse plus globale sur le rôle de l’Union européenne dans la gestion des crises, voir B. Delcourt, M. Martinelli et E. Klimis (dir.), L’Union européenne et la gestion des crises, Bruxelles, Éditions de l’ULB, 2008.
  • [4]
    Voir B. Nivet, Security by Proxy? The EU and (Sub-)regional Organizations, the Case of ECOWAS, Paris, IES-UE-Occasional Paper, n° 63, mars 2006, <http://www.iss.europa.eu/uploads/media/occ63.pdf> ; H. M. Rakotonirina, « Le Dialogue interrégional UE-Afrique depuis Cotonou : le cas de la facilité de soutien à la paix en Afrique », Politique européenne, n° 22, 2007, p. 125-147 ; A. Gnanguênon, La Gestion des « systèmes de conflits » en Afrique subsaharienne : concept et pratique d’un multilatéralisme régionalisé, Thèse de doctorat de science politique, Université de Clermont-Ferrand 1, 2010.
  • [5]
    F. Mérand et M. Rakotonirina, « La Force européenne au Tchad et en Centrafrique, le baptême du feu », Politique africaine, n° 114, juin 2009, p. 105-125 ; N. Bagayoko-Pénone et M. V. Gibert, « The Linkage between Security, Governance and Development: the European Union in Africa », Journal of Development Studies, vol. 45, n° 5, mai 2009, p. 789-814.
  • [6]
    Le recours au terme de « laboratoire » mériterait à lui seul de longs développements. Sans prétendre nous y inscrire, il nous semble simplement possible d’établir ainsi un lien sémantique entre nos observations sur les politiques européennes en Afrique subsaharienne et celles produites dans des champs comme les politiques de développement ou les politiques de santé publique internationales. Celles-ci insistent parfois sur le caractère exploratoire, expérimental des politiques et outils mis en œuvre et sur le fait que l’Afrique, plus facilement que d’autres continents, sert de lieu privilégié pour tester des outils ou méthodes de résolution de défis (politiques, sanitaires, etc.), avant qu’ils ne soient officiellement formalisés ou avant que leur efficacité ne soit prouvée par ailleurs. Voir, par exemple, R. Rottenburg, « Social and Public Experiments and New Figurations of Science and Politics in Postcolonial Africa », Postcolonial Studies, vol. 12, n° 4, 2009, p. 423-440.
  • [7]
    Cette contribution s’inscrit dans un corpus déjà solide sur l’émergence de l’UE comme acteur international : voir D. Helly et F. Petiteville, L’Union européenne, acteur international, Paris, L’Harmattan, 2005 ; sur les significations et implications de l’émergence de la PESD au sein de l’UE, voir : B. Irondelle et P. Vennesson (dir.), L’Europe de la Défense : institutionnalisation, européanisation, numéro spécial de la revue Politique européenne, n° 8, automne 2002 ; B. Nivet (dir.), « Repenser la Défense européenne », La Revue internationale et stratégique, n° 48, 2002, p. 73-158.
  • [8]
    La notion de « résistance africaine », notamment vis-à-vis des pouvoirs extérieurs, a déjà fait l’objet d’une littérature solide. Nous l’employons ici au sens des « intentions et actions concrètes destinées à s’opposer à d’autres ou à refuser d’accepter leurs idées, actions ou positions pour une multitude de raisons », pour reprendre la formule de K. van Walraven et J. Abbink dans « Rethinking Resistance in African History: An Introduction », in J. Abbink, M. De Bruijn et K. van Walraven (dir.), Rethinking Resistance: Revolt and Violence in African History, Leiden/Boston, Brill, 2003, p. 8.
  • [9]
    Des travaux portant sur les rapports de pays africains aux opérations de maintien de la paix et aux interventions extérieures apportent ici des éclairages utiles. Ainsi Laurie Nathan a-t-il par exemple mis en avant la puissance des paradigmes africanistes et anti-impérialistes comme explication à l’émergence de divergences avec les pays occidentaux au sujet du Darfour : L. Nathan, « Interests, Ideas and Ideology: South Africa’s Policy on Darfur », African Affairs, vol. 110, n° 438, janvier 2011, p. 55-74 ; cependant que G. Piccolino et J. Karlsrud ont mis en avant des dynamiques de résistance accrue et de consentement érodé aux opérations internationales de paix, sur fond d’affirmations africaines renouvelées : « Withering Consent, but Mutual Dependancy: UN Peace Operations and African Assertiveness », Conflict, Security and Development, vol. 11, n° 4, octobre 2011, p. 447-471.
  • [10]
    Voir A. Dumoulin, R. Mathieu et G. Sarlet, La Politique européenne de sécurité et de défense (PESD). De l’opératoire à l’identitaire, Bruxelles, Bruylant, 2003.
  • [11]
    Pour de nombreux observateurs en effet, il apparaissait lors du lancement de la PESD « ni justifié ni rationnel qu’une force armée de l’UE configurée pour défendre la sécurité collective du continent européen se retrouve régulièrement détachée à d’anciens postes coloniaux afin de défendre un “ordre” inévitablement mouvant et très relatif », selon la citation tirée de J. Howorth, « L’intégration européenne et la défense : l’ultime défi ? », Cahiers de Chaillot, n° 43, novembre 2000, p. 84.
  • [12]
    Voir par exemple A. Dumoulin, R. Mathieu et G. Sarlet, La Politique européenne…, op. cit., J. Howorth, L’intégration européenne et la défense, op. cit. ; B. Irondelle et P. Vennesson (dir.), L’Europe de la Défense…, op. cit. ; B. Nivet (dir.), « Repenser la défense européenne… », op. cit.
  • [13]
    Voir par exemple N. Bagayoko-Pénone, « Les politiques européennes de prévention et de gestion des conflits en Afrique subsaharienne », Les Champs de mars, n° 16, 2005, p. 93-114 ; N. Bagayoko-Pénone et M. V. Gibert, « The Linkage between », art. cit. ; B. Charbonneau, « Dreams of Empire: France, Europe and the New Interventionism in Africa », Modern and Contemporary France, vol. 16, n° 3, 2008, p. 279-295 ; C. Gegout, « Causes and Consequences of the EU’s Military Intervention in the Democratic Republic of Congo (DRC): A Realist Explanation », European Foreign Affairs Review, vol. 10, n° 3, automne 2005, p. 427-443.
  • [14]
    C. Gegout, « Causes and Consequences… », art. cit.
  • [15]
    Adoptée par les États membres en décembre 2003 sous le titre « Une Europe sûre dans un monde meilleur ».
  • [16]
    F. Faria, La Gestion des crises en Afrique subsaharienne, le rôle de l’UE, Paris, IES-UE-Occasional Paper, n° 55, novembre 2004, p. 49.
  • [17]
    Propos d’un diplomate cités dans C. Gegout, « Causes and Consequences… », art. cit., p. 437. Cette opinion rejoint la quasi-totalité des témoignages français et européens à ce sujet.
  • [18]
    Opérations Artemis, Eupol Kinshasa (mission de police de l’UE en RDC) et Eusec-RDC (mission de l’UE en matière de réforme du secteur de la sécurité en RDC).
  • [19]
    Et de savoir si la demande de l’ONU émane réellement de cette dernière ou fait suite à une suggestion d’intervention de la part d’un ou plusieurs État membres de l’UE dont elle vient légitimer le projet en le sollicitant, ou encore si cette demande onusienne est le relais de demandes africaines.
  • [20]
    Dans le champ des études européennes, la notion d’« européanisation » a notamment été définie par Claudio Radaelli comme un « processus de construction, diffusion et institutionnalisation de règles formelles et informelles, de procédures, de styles, de “manières de faire”, de croyances partagées et de normes, qui sont tout d’abord définies et consolidées durant l’élaboration des politiques au sein de l’UE et sont par la suite incorporées dans la logique des discours, des identités des structures politiques et des politiques publiques nationales », in C. Radaelli, « The Domestic Impact of European Union Public Policy: Notes on Concepts, Methods and the Challenge of Empirical Research », Politique européenne, n° 5, 2002, p. 108.
  • [21]
    À travers le programme Recamp (Renforcement des Capacités Africaines de Maintien de la paix) dans le cas de la France et BMATT (British Military Assistance and Training Team) pour le Royaume-Uni.
  • [22]
    Ou comme le résumait en 2005 un diplomate français en poste au Conseil de l’UE au sujet de l’Afrique de l’Ouest : « La France souhaiterait réellement européaniser la région. Pas seulement pour des questions économiques et financières, mais aussi parce qu’on ne sait plus quoi faire. La France aimerait bien […] que l’UE apporte son aide dans ce cadre ». Entretien réalisé à Bruxelles, le 10 novembre 2005. Ce sentiment d’impuissance traduit la difficulté diplomatique et militaire, pour la France, d’assumer ses responsabilités internationales en répondant aux éventuelles demandes de l’ONU sans prêter le flan aux accusations d’interventionnisme postcolonial, et à mener une action efficace sans engagement militaire direct important.
  • [23]
    Ou comme le notait un diplomate au moment où Paris cherchait à mutualiser son initiative, « toujours apparaitre en situation de gendarme, cela complique les choses ». Cité dans L. Zecchini, « Paris veut européaniser sa présence en Afrique », Le Monde, 27 septembre 2005.
  • [24]
    Sur la politique du Royaume-Uni à l’égard de l’Afrique sous le gouvernement de Tony Blair, voir par exemple R. Abrahamsen et P. Williams, « Ethics and Foreign Policy: the antinomies of New Labour’s “Third Way” in Sub-saharan Africa », Political Studies, vol. 49, n° 2, 2001, p. 249-264 ; ou encore J. Gallhagher, « Healing The Scar? Idealizing Britain in Africa, 1997-2007 », African Affairs, vol. 108, n° 432, 2009, p. 435-451.
  • [25]
    Entretien avec un diplomate suédois, réalisé à Stockholm en octobre 2002.
  • [26]
    Les débats européens ont duré de nombreux mois, se soldant par la décision de lancement de l’opération Eufor Tchad-RCA par la décision 2008/101/PESC du Conseil de l’UE. Les règles en matière d’opérations extérieures de l’UE prévoient que la mise sur pied de ces missions repose sur des contributions « volontaires » des États membres. La définition du mandat et des objectifs de ces missions doit aussi être collectivement entérinée par les États membres. Cette double contrainte explique le difficile lancement de certaines opérations de l’UE, comme celle au Tchad et en Centrafrique : voir par exemple B. H. Seibert, « African Adventure? Assessing the European Union’s Military Intervention in Chad and the Central African Republic », MIT Security Studies Program Working Paper, novembre 2007 ; Antoine Rayroux, « Adaptation, projection, convergence ? L’Européanisation de la défense et l’intervention de l’intervention militaire Eufor Tchad/RCA », Politique européenne, n° 34, 2011, p. 201-230.
  • [27]
    Structures permanentes du Conseil de l’Union européenne basées à Bruxelles en particulier.
  • [28]
    Le concept de « nation-cadre » définit le rôle prééminent joué par un pays dans une opération menée en coalition, ce rôle prééminent se traduisant notamment par la fourniture par le pays en question du commandement de l’opération et/ou d’une grande partie des effectifs, notamment d’encadrement et de logistique.
  • [29]
    La France testant à l’occasion elle-même son Centre de Planification et de Conduite des Opérations (CPCO), structure de commandement jouant un rôle de planification et de conduite des opérations de gestion des crises dans lesquelles des forces françaises sont engagées.
  • [30]
    N. Bagayoko-Pénone, « Les Politiques européennes… », art. cit., p. 94.
  • [31]
    Rappelant en cela les interventions de la communauté internationale dans l’immédiate après Guerre froide. Dans le vocabulaire de l’UE, un « concept » (de gestion des crises, de soutien à la réforme du secteur de sécurité, etc.), définit un document dans lequel États membres et/ou institutions de l’UE clarifient les conditions, objectifs, méthodes, règles, etc., devant guider l’action de l’UE dans le domaine concerné.
  • [32]
    Décision 2005/355/PESC du Conseil de l’UE du 2 mai 2005.
  • [33]
    La « réforme du secteur de sécurité » (RSS en français, SSR en anglais), définit des adaptations des institutions, structures et acteurs en charge du contrôle et de la garantie de la sécurité (armée, services de renseignement, services de police ou pénitentiaires, etc.), prises à des fins de stabilisation et de démocratisation à long terme.
  • [34]
    Que l’on songe par exemple à l’extrême diversité du contrôle parlementaire des opérations extérieures ou des forces spéciales, ou à la diversité des utilisations de forces de maintien de l’ordre d’un État membre de l’UE à l’autre.
  • [35]
    Voir, par exemple, le document du Conseil de l’UE, « EU Concept for ESDP Support to Security Sector Reform » du 13 octobre 2006, <http://register.consilium.europa.eu/pdf/en/05/st12/st12566-re04.en05.pdf>
  • [36]
    Institution de l’UE basée à Bruxelles et remplissant des fonctions d’expertise et de planification au service de la politique européenne de gestion des crises.
  • [37]
    Intervention du Général Jean-Paul Perruche, lors d’un colloque de l’Assemblée de l’UEO sur le thème du maintien de la paix en Afrique, tenu à Paris les 20 et 21 septembre 2005, <http://www.assemblyweu.org/fr/documents/colloques/docs/2005/prog_africa_sep05.pdf>.
  • [38]
    Expression employée à deux reprises lors d’un entretien avec un membre de la Commission européenne chargé de la mise en œuvre des dimensions politiques et sécurité du partenariat UE-Afrique de l’Ouest (Bruxelles, 9 novembre 2005).
  • [39]
    Ces deux notions étaient censées attester du renouvellement des relations euro-africaines, les rendant moins sujettes aux classiques rapports d’influence, de domination et d’intervention Nord-Sud. Force est aujourd’hui de constater qu’elles ont certes en partie renouvelé et diversifié ces rapports d’influence, en multipliant par exemple les acteurs (EU, UA, organisation régionales africaines, etc.), et en les rendant moins directs et visibles, sans les éradiquer.
  • [40]
    Entretien avec un membre de la délégation de la CE à Abuja (Nigeria), réalisé par téléphone en novembre 2005.
  • [41]
    Des travaux de nature empirique ont par exemple été menés en France pour apporter un début de nuance et de diversification entre régions et pays d’Afrique subsaharienne sur ce que pouvaient être des enjeux de sécurité propres à faire l’objet de coopérations entre l’UE et les différents acteurs africains. Voir par exemple les travaux menés depuis 2010 dans le cadre de l’Institut de Recherches Stratégiques de l’École Militaire sous la direction d’Amandine Gnanguênon.
  • [42]
    Des enjeux comme la défense du territoire ou la surveillance des frontières accaparent encore une bonne partie des ressources et de l’attention des politiques nationales de sécurité et de défense.
  • [43]
    Entretien avec un ancien conseiller du ministère britannique de la Défense délégué auprès du gouvernement sud africain et de la SADC, réalisé à Paris le 7 décembre 2010.
  • [44]
    Depuis l’accord de Cotonou (2000), les politiques de coopération et de développement de l’UE avec les pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) incluent un dialogue politique, au même titre que des relations commerciales, de coopération et de développement plus classiques. Il s’agit d’aborder entre partenaires européens et africains des enjeux comme la démocratie et les droits de l’homme, la paix et la sécurité, ce qui est perçu par des acteurs européens, de la Commission notamment, comme un moyen de politiser les relations UE-Afrique, et d’utiliser les outils financiers et commerciaux de l’Union à des fins d’influence politique et stratégique.
  • [45]
    Voir les exemples de la SADC ci-après.
  • [46]
    Le projet de FAA envisageait la mise sur pied d’une capacité de l’UA à mener ses propres missions de gestion de crise et de maintien de la paix. Bien que déclarée officiellement opérationnelle en 2010, elle est à ce jour encore largement en chantier.
  • [47]
    Comme cela nous semble être parfois le cas au sein de la Cedeao. Voir B. Nivet, Security by Proxy…, op. cit.
  • [48]
    Comme le Nigeria en Afrique de l’Ouest ou l’Afrique du Sud en Afrique australe.
  • [49]
    Voir les travaux initiaux de L. Laakso, Regional Integration for Conflict Prevention and Peacebuilding in Africa, Helsinki, University of Helsinki, 2002 et pour une étude plus globale et récente mais comportant des études de cas africains, R. Tavares, Regional Security: The Capacity of International Organizations, Londres, Routledge, 2010.
  • [50]
    Comme la crise malgache.
  • [51]
    Sur le régionalisme en Afrique, voir par exemple D. Bach, « Régionalismes, régionalisation, globalisation », in M. Gazibo et C. Thiriot (dir.), Le Politique en Afrique, Paris, Karthala, 2009, p. 342-361 ; pour un aperçu récent sur la SADC, on pourra se référer à C. Saunders, G. Dzinesa et D. Nagar (dir.), Region-Building in Southern Africa, Londres, Zed Books, 2012 ; et pour des travaux sur le régionalisme en Afrique appliqué aux enjeux de sécurité et de défense, on pourra se référer aux travaux initiaux de L. Laakso, Regional Integration for Conflict Prevention…, op. cit.
  • [52]
    Pour un point de vue « local » sur l’exemple de la SADC, voir par exemple D.-P. Baker et S. Maeresera, « SADCBRIG Intervention in SADC Member States: Reasons to Doubt », Africa Security Review, vol. 18, n° 1, 2009, p. 106-110, <www.iss-co.za>.
  • [53]
    Une remarque qui pourrait aussi s’appliquer à l’UE elle-même et à ses politiques africaines.
  • [54]
    B. Nivet, Security by Proxy…, op. cit., p. 32 et 34.
  • [55]
    En attestent les différences de tonalité des diagnostics opérés en entretien par les interlocuteurs institutionnels européens selon qu’ils sont en poste dans les Délégations européennes sur le terrain ou à Bruxelles.
  • [56]
    En témoigne, par exemple, le refus de la SADC de formes de coopérations poussées entre les institutions européennes et certaines de ses institutions politiques et de sécurité.
  • [57]
    Sans que cela ait conduit, à Bruxelles comme au sein des États membres, à une inflexion de cette approche interrégionale promue par les institutions en charge de la PESC et de la PESD.
  • [58]
    Entretien avec un membre de la mission militaire française à Pretoria, réalisé par téléphone le 23 novembre 2010.
  • [59]
    La politique régionale et internationale de la République d’Afrique du Sud est déterminante dans la construction de la SADC et de son contenu, mais aussi dans la structuration de ses relations extérieures. Pour un aperçu de la posture internationale de l’Afrique du Sud ces dernières années, on pourra se référer notamment à C. Alden et G. Le Père, South Africa’s Post-Apartheid Foreign Policy, from Reconciliation to Revival?, Oxford, Oxford University Press, 2003, ou encore G. Le Père, « L’Action diplomatique sud-africaine pour la paix en Afrique », Transcontinentales, n° 2, 2006, p. 21-46.
  • [60]
    Entretien avec un membre de la délégation de la CE à Gaborone, avril 2007. Cet entretien avait été mené à un moment où le secrétariat de la SADC, basé à Gaborone, ne souhaitait tout simplement plus discuter politique étrangère, sécurité et défense avec la Délégation de la CE sur place. La Commission européenne avait conditionné son aide financière à une éventuelle école sous-régionale de formation au maintien de la paix à plusieurs critères politiques comme le fait que cette école ne se situe pas au Zimbabwe, une condition politique vivement rejetée par la SADC. L’école a finalement vu le jour par la transformation en 2005 en organe de la SADC du Regional Peacekeeping Training Centre (RPTC) de Harare qui avait été créé en 1995 au Zimbabwe.
  • [61]
    Difficulté concernant notamment les relations entre la délégation de la CE et le secrétariat de la SADC basés à Gaborone, mais aussi difficultés de cette délégation à mettre en place les programmes conçus par son institution mère à Bruxelles.
  • [62]
    Entretien avec un membre de la Direction de la coopération de sécurité et de défense du MAEE, réalisé à Paris le 17 décembre 2010.
  • [63]
    Pour un point de vue local sur la régionalité de l’Afrique australe en matière de sécurité et de défense, voir N. Ngoma, Prospects for a Security Community in Southern Africa, Pretoria, Institute for Strategic Studies, 2004, <www.iss-co.za>.
  • [64]
    Entretien avec un membre de la mission militaire française à Pretoria, réalisé par téléphone le 23 novembre 2010. Ces limites institutionnelles pointées par des acteurs locaux comme européens peuvent surprendre, compte tenu de l’ancienneté relative de la SADC créée dans sa forme initiale dès 1980. Elles sont liées à la relance et aux réorientations du projet suite à l’adhésion de l’Afrique du Sud post Apartheid en 1994.
  • [65]
    Interview du Général Engelbert Abel Rugeje, président (zimbabwéen) du Defence Inspectorate Working Group de la SADC, The Herald, 4 septembre 2010, <www.allafrica.com>. L’inertie relevée ici s’explique en partie par le poids militaire prépondérant de l’Afrique du Sud dans la région, induisant une tendance des autres États membres à s’appuyer sur le leader régional en faisant l’économie d’efforts nationaux accrus (en matière de budgets de défense ou de contribution à la mise en place de forces régionales par exemple).
  • [66]
    Au sujet de laquelle le terme de résistance peut être à remplacer par la notion d’ambigüité, cette dernière pouvant d’ailleurs être une forme de résistance.
  • [67]
    Entretien avec un membre de la délégation de la CE à Gaborone, réalisé par téléphone le 25 novembre 2010.
  • [68]
    Courrier électronique du Chef de la délégation de la CE à Gaborone, le 23 décembre 2008.
  • [69]
    Entretien avec un membre de la délégation de la CE à Gaborone, réalisé par téléphone le 25 novembre 2010.
  • [70]
    Voir l’exemple déjà mentionné du différend UE-SADC à propos du RPTC de Harare, ou le refus de la SADC d’accueillir un officier de liaison de l’UE.
  • [71]
    Les États d’Afrique australe ont par exemple refusé des offres de soutien de l’UE ou de ses États membres pour des exercices de préparation au maintien de la paix, ou des programmes de formation et d’entraînement dans ce domaine.
  • [72]
    Les propos tenus par le leader de l’ANC Youth League Julius Malema, qualifiant le Botswana de « poupée à la solde de l’impérialisme américain », bien qu’ayant fait l’objet d’une vive polémique dans la région et au sein même de l’ANC, illustrent l’existence d’un sentiment de défiance à l’égard des puissances extérieures.
  • [73]
    Proposé par le Président George W. Bush en 2007, ce projet visait à créer un commandement américain pour l’Afrique, et à renforcer la présence militaire des États-Unis sur le continent.
  • [74]
    Cité dans A. Carl LeVan, « The Political Economy of African Response to the US Africa Command », Africa Today, vol. 57, n° 1, automne 2010, p. 9.
  • [75]
    Ibid.
  • [76]
    Pour des conclusions proches à partir du cas des opérations de maintien de la paix, voir L. Nathan, « Interests, Ideas and Ideology… », art. cit., et G. Piccolino et J. Karlsrud, « Withering Consent… », art. cit.
  • [77]
    Rejoignant les diagnostics établis successivement sur l’institutionnalisation de la PESC à partir de 1993, puis de la PESD à partir de 1999-2000, et d’études de cas antérieures. Pour un aperçu d’ensemble, voir par exemple F. Terpan, La Politique étrangère et de sécurité commune de l’Union européenne, Bruxelles, Bruylant, 2003 et du même auteur, La Politique étrangère, de sécurité et de défense de l’Union européenne, Paris, La Documentation française, 2010.
  • [78]
    Entretien avec un membre de la délégation de la CE à Gaborone, déjà cité.
  • [79]
    Ibid.
  • [80]
    Comme nous le signalait en fin d’entretien un membre de la Délégation de la CE à Gaborone (déjà cité) : « En tant que fonctionnaire de la Commission, je ne devrais même pas être en train de vous parler de cela ! »
  • [81]
    Cas n° C-91/05 déposé par la Commission européenne le 21 février 2005.
  • [82]
    N. Bagayoko-Pénone, « Les Politiques européennes… », art. cit.

1L’Afrique subsaharienne a émergé depuis dix ans comme l’une des principales zones d’activité de la politique européenne de sécurité et de défense (PESD) de l’Union européenne (UE) [1]. Dix missions y ont ainsi été déployées, tandis que l’UE agit également sur les recompositions de l’architecture africaine de paix et de sécurité [2]. Européanistes et internationalistes se sont emparés de ce phénomène en questionnant en particulier le « rôle de l’UE » en Afrique, à travers deux prismes principaux. Le premier, inspiré des études de sécurité, consiste à étudier les missions de l’UE, leur nature, leurs spécificités institutionnelles ou opérationnelles [3]. Le second, s’inspirant de travaux sur l’intégration régionale ou les communautés de sécurité, observe la façon dont l’UE structure l’environnement stratégique africain, en particulier à travers son rôle de soutien aux organisations régionales et sous-régionales africaines et au renforcement des capacités africaines de gestion de crises et des conflits [4]. L’étude des relations entre l’UE et l’Afrique subsaharienne dans les domaines de la sécurité et de la défense recèle encore des zones d’ombre et des questionnements insuffisamment explorés ou débattus. Pourquoi et comment l’Afrique subsaharienne a-t-elle émergé comme un objet privilégié de la PESD ? Quelle signification accorder au positionnement de l’UE comme principal moteur des transformations de l’architecture africaine de sécurité alors qu’elle est elle-même un acteur encore en construction ? Quelles sont de ce point de vue la légitimité et la pertinence des initiatives et des choix européens en Afrique en matière de sécurité et de défense ? Nous ne prétendons pas répondre ici à l’ensemble de ces questions. Notre propos entend plus modestement saisir les conditions, contours et motivations de l’émergence de l’Afrique subsaharienne comme objet d’attention et d’application de la PESD, et leurs implications sur la nature de la relation UE-Afrique subsaharienne. Ceci permet de comprendre que l’Afrique subsaharienne a représenté un terrain d’expérimentation [5], un laboratoire [6] et un espace de légitimation attractif pour des politiques européennes naissantes. Ce laboratoire produit in fine des influences et enseignements multiformes sur l’émergence de l’UE comme acteur international [7], jouant ainsi un rôle de miroir renvoyant l’UE à ses propres difficultés. Les résistances africaines [8] à ce statut de laboratoire de la PESD, observées en Afrique australe en particulier, sont peu étudiées, mais riches d’enseignements [9]. Cette contribution repose sur plusieurs terrains d’études menés sur les relations UE-Afrique et sur des entretiens avec des acteurs institutionnels, essentiellement européens. Elle entend ainsi contribuer, dans le champ des relations internationales et des études européennes qui est le sien, à une relecture de l’influence des acteurs et réalités africaines sur des acteurs tiers, dépassant l’étude plus courante des influences exogènes sur le continent africain.

L’UE à la (re)conquête de l’Afrique : l’émergence de l’Afrique subsaharienne comme terrain privilégié de la PESD

2Le lancement de la PESD au tournant des années 2000 [10] a constitué une remise en cause inattendue de postulats alors solidement ancrés sur l’impossibilité de toute dimension de sécurité et de défense dans l’Union européenne. L’irruption de l’Afrique comme l’un de ses champs de mise en œuvre privilégiés, à partir de la première mission de l’UE en Afrique en 2003, a représenté une autre surprise, tant il semblait admis que la diversité des héritages, intérêts et rapports à l’Afrique subsaharienne des États membres ferait de ce continent l’une des zones grises des politiques étrangère, de sécurité et de défense de l’UE [11]. Les motivations opérationnelles et politiques intra-européennes ayant permis le lancement d’une PESD jusqu’alors jugée improbable ont déjà fait l’objet d’une importante littérature [12]. Le décryptage de l’émergence de l’Afrique subsaharienne comme terrain d’application privilégié de cette politique a en revanche été moins abordé [13].

L’UE et la conquête des espaces vides : la tentation d’exister

3L’engagement africain de l’UE résulte en partie d’une conjonction d’opportunités conduisant l’UE à agir là où elle le peut et où les autres acteurs internationaux ne le font pas. Il s’agit d’une attitude tenant davantage de la volonté de faire exister l’UE à tout prix et de combler les espaces du système international – considérés à tort ou à raison comme vacants – que d’une véritable stratégie préétablie. La première mission de l’UE en Afrique subsaharienne – l’opération Artémis déployée à Bunia en République démocratique du Congo (RDC) en juin 2003 – ne se comprend ainsi que dans le contexte diplomatique européen des mois qui l’ont précédée [14]. Désireuse de s’afficher unie malgré des intérêts parfois divergents entre ses membres, l’UE cherchait à resserrer ses rangs en matière d’action internationale après les violentes divisions entre ses membres sur la question irakienne en 2002-2003. La rédaction d’une stratégie européenne de sécurité sous l’égide du Haut représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune (PESC), Javier Solana [15], a été un moyen conceptuel de reconstruire un peu cette unité. L’opération Artemis en a été un autre, opérationnel celui-là. La crise humanitaire en Ituri est apparue à un moment où les Européens cherchaient un sujet sur lequel se montrer actifs, où des États membres de l’UE comme la France souhaitaient redynamiser par l’action une PESD que l’on disait voler en éclats en raison de divergences diplomatiques. La décision de mener l’opération dans un cadre et sous drapeau européen – et non national ou multinational hors UE – a reposé aux dires des acteurs impliqués à Paris comme à Bruxelles sur des « raisons politiques » [16] plus qu’opérationnelles, consistant notamment à montrer que « l’UE pouvait agir seule » [17]. Cette première opération de l’UE en Afrique subsaharienne, opportuniste, a été révélatrice de la tendance de l’UE à se positionner et à agir sur des registres ou théâtres stratégiques délaissés par d’autres acteurs, États-Unis et Organisation du traité de l’Atlantique Nord (Otan) en particulier. L’Afrique subsaharienne a fourni un terrain privilégié pour un acteur cherchant parfois avant tout à « faire de la sécurité et de la défense », sans que cela renvoie nécessairement à une stratégie pensée. Cette tentation d’exister répond dans certains cas à une demande réelle d’acteurs locaux ou d’instances internationales comme l’Organisation des Nations unies (ONU). Des interventions de l’UE en Afrique subsaharienne, comme celles en RDC [18], ont ainsi fait suite à des demandes de l’ONU et de son Secrétaire général, sans qu’il soit néanmoins toujours possible de retracer la genèse exacte et la réalité concrète de la « demande d’Europe » [19].

L’UE légitimatrice : la délicate européanisation des politiques africaines des États membres

4L’émergence de l’Afrique subsaharienne comme terrain privilégié de la PESD s’explique aussi par une européanisation [20], timide mais réelle, des politiques africaines de certains États membres. Pays clés dans le lancement de la PESD, le Royaume-Uni et la France l’ont aussi été, non sans arrière-pensées, dans l’émergence du continent africain comme terrain d’attention privilégié de la PESD. Lors des premières années de la PESD, les deux États étaient déjà lancés dans des initiatives destinées à favoriser un développement des capacités africaines de maintien de la paix et permettre ainsi un engagement plus sélectif et moins systématique de leurs propres forces [21]. Ces initiatives incarnaient une volonté des deux pays de diminuer leurs engagements militaires directs en Afrique subsaharienne tout en assurant la permanence d’un engagement plus indirect et limité sous forme de conseil, de soutien et d’assistance aux forces locales. Elles visaient à maintenir leur influence à un moindre coût financier, humain et politique [22]. Une possible européanisation de ces programmes est apparue, aux yeux des responsables français notamment, comme un levier supplémentaire pour satisfaire ces contraintes. Européaniser le programme Recamp en invitant institutions et partenaires européens à y participer, pouvait permettre d’en mutualiser les coûts, et d’en renforcer la légitimité politique en atténuant les critiques décrivant ce programme comme l’instrument d’influence d’une ancienne puissance coloniale [23]. Le Royaume-Uni, qui au tournant des années 2000 cherchait à se positionner en champion de la PESD et de l’attention portée par la communauté internationale à l’Afrique [24], a mené une réflexion quasi-similaire et simultanée. Si cette européanisation ne s’est pas faite sans réticence de la part de certains États membres, elle a attesté d’une certaine capacité d’adaptation de leur part. Ainsi, fin 2002, un diplomate suédois pouvait affirmer au sujet des craintes et attentes de son pays à l’égard de la PESD alors balbutiante : « Ce que nous ne voulons pas, c’est nous retrouver embarqués dans des aventures françaises en Afrique » [25]. Quelques mois plus tard, la Suède était l’un des principaux contributeurs à l’opération Artémis, en RDC : les craintes théoriques de notre interlocuteur avaient été surmontées dans la mesure où il s’agissait d’agir dans un cas concret et un cadre relativement précis. L’Allemagne en revanche, également active dans l’opération Artemis, en est ressortie plus prudente sur de futurs engagements européens en Afrique, se montrant récalcitrante lorsque la France tentera de mettre en place une intervention de l’UE autour du Darfour [26].

5Cette émergence stratégique opportuniste de l’UE en Afrique a été concomitante de l’échafaudage des institutions, concepts et outils européens en la matière. Parfois même, l’action a précédé la conceptualisation ou l’institutionnalisation formelle, faisant de l’Afrique subsaharienne non seulement un objet d’attention privilégié, mais bien un laboratoire de la PESD.

L’Afrique subsaharienne, laboratoire de la PESD

6Si l’investissement de l’Afrique subsaharienne par la PESD a servi – en particulier dans les années 2003-2010 – de laboratoire de la PESD, c’est parce que l’UE y menait des coopérations et politiques sur des enjeux qu’elle était elle-même en train de s’approprier ou de développer. Mais c’est aussi parce que l’Afrique a servi de lieu où étaient exportés des modèles et des politiques conçus ailleurs, au sein des institutions en charge de la PESC et de la PESD en particulier [27].

Des opérations expérimentales

7L’opération Artemis a ainsi permis aux Européens de tester la possibilité de mener une mission en dehors du continent européen, en l’absence de toute structure commune permanente de commandement et de contrôle, par exemple l’Otan. Elle leur a permis de recourir à une nation cadre [28] – la France dans ce cas [29] – alors que le commandement opérationnel était assuré sur le terrain par un État-major multinational. Artémis a aussi constitué un test grandeur nature pour les relations opérationnelles et institutionnelles UE-ONU ou pour l’interopérabilité des armées européennes, constituant ce que Nyagalé Bakayoko a pu appeler un « terrain de validation du cadre institutionnel de la PESC et de la Politique européenne de sécurité et de défense (PESD) » [30]. La littérature sur cette première opération, comme celle sur d’autres missions de l’UE menées depuis, constitue un vaste exercice de retour d’expérience sur ce qui a fonctionné ou au contraire dysfonctionné et sur les améliorations possibles des procédures et mécanismes européens.

8Les opérations de l’UE en Afrique ont aussi été expérimentales sur le plan conceptuel. L’opération Artémis s’est faite sans « concept européen » de maintien de la paix et de stabilisation [31]. La Mission de conseil et d’assistance de l’UE en matière de réforme du secteur de la sécurité en RDC (l’opération Eusec-RDC), lancée en juin 2005 [32] a en effet été menée en l’absence de définition commune de la réforme du secteur de la sécurité (RSS) [33]. Elle l’a même été sur fond de différences persistantes entre États membres sur ce qu’est un secteur de la sécurité efficace, transparent et démocratiquement contrôlé [34]. Des tentatives de clarification conceptuelle ont eu lieu au niveau européen depuis [35]. Comme le soulignait alors le directeur de l’État-major de l’UE (Emue) [36], « Eusec en RDC constitue la première manifestation tangible des actions du conseil en matière de réforme du secteur de la sécurité (SSR), que l’UE s’efforce actuellement de codifier dans le cadre d’un concept SSR de l’UE, en cours de rédaction au sein de l’État-major de l’Union européenne (Emue) » [37]. Ce n’est qu’après cette opération en RDC que les acteurs européens ont adopté des règles communes pour des opérations de RSS de l’UE en se basant sur les leçons tirées, et que la Guinée-Bissau est ensuite apparue comme devant servir de « cas pilote » [38] pour les tester sur le terrain.

Une exportation sans discernement de l’agenda européen de sécurité et de défense ?

9Une logique d’exportation exploratoire des priorités européennes s’est produite en matière d’agenda de sécurité et de défense. Sous couvert d’appropriation africaine et d’africanisation des enjeux de sécurité et de défense [39], les acteurs européens (l’UE en tant que telle, à travers les institutions bruxelloises, mais aussi les États membres), expriment des attentes à l’égard de l’Afrique subsaharienne. Ils encouragent sur le sous-continent des projets correspondant davantage à ce que les institutions en charge de la PESC et de la PESD et les administrations nationales compétentes considèrent comme devant être du ressort des États africains qu’aux aspirations de ces États eux-mêmes. Comme le reconnaissait un membre de la délégation de la Commission européenne (CE) à Abuja (Nigeria) auquel nous demandions de décrire sa vision de l’élaboration « en partenariat » d’un agenda de coopération UE-Cedeao en matière de sécurité : « Durant les négociations, la CE et la Cedeao s’accordent sur des priorités […]. Nous sommes dans un partenariat, mais c’est nous qui tenons le stylo » [40]. Le discours européen sur l’africanisation des enjeux de sécurité et de défense est biaisé, les enjeux sur lesquels les Européens cherchent à favoriser un développement des capacités africaines (capacités de maintien de la paix et de gestion des crises par exemple) n’étant pas forcément des priorités locales, ni en tant que telles ni en tant que domaines de coopération avec l’UE et ses États membres [41]. Ce sont les institutions européennes, aux dires mêmes des acteurs européens concernés, qui fixent l’agenda des discussions et négociations. D’où une distorsion possible entre l’agenda local de sécurité et l’agenda de coopération UE-Afrique. La contribution aux opérations de maintien de la paix, notamment dans le cadre de l’Union africaine (UA), n’est pas une priorité pour de nombreux États africains [42]. Elle constitue pourtant la pierre angulaire d’une politique de l’UE poussant les Africains à faire ensemble ce que les Européens ne souhaitent pas ou plus faire. Certains observateurs le regrettent :

« Insister sur la gestion des crises, financer les brigades régionales, c’est une façon de financer les armées africaines pour qu’elles tentent de répondre à des problèmes, ce qui empêche de s’attaquer aux causes de ces problèmes […]. Si l’on entraîne et forme des gens pour du maintien de la paix, cela signifie qu’ils ne seront pas capables de faire autre chose ensemble. Mais la RDC, par exemple, ce n’était pas du maintien de la paix, c’était de la guerre. On cherche à entrainer des gens pour quelque chose de différent de ce qu’ils feront sur le terrain… » [43]
Au printemps 2011, et malgré des menaces diplomatiques réitérées, aucune force africaine, qu’elle fut nationale, de la Cedeao ou de l’UA, n’aurait été en mesure d’intervenir en Côte d’Ivoire, tant le contexte impliquait un savoir-faire et des méthodes pour lesquelles les forces africaines ne sont pas formées. Il ne s’agit là que d’un exemple d’inadéquation entre des priorités que l’UE cherche à exporter au sein des organisations (sous-)régionales africaines et les réalités locales. Il en va de même pour le dialogue politique que l’UE cherche à mettre en place avec les organisations sous-régionales et les États africains dans le cadre de sa politique de coopération et de développement [44]. Il ne répond pas, dans certains cas, à des besoins locaux et suscite parfois des réticences et des craintes [45]. Ce décalage entre propositions européennes et attentes locales est aussi manifeste dans les attitudes respectives des acteurs à l’égard des institutions régionales.

Une vision régionaliste préconçue

10L’UE affiche un attachement sans faille à l’organisation de l’architecture africaine de paix et de sécurité autour d’une organisation panafricaine – l’UA – et de communautés régionales censées en être les relais locaux et les composantes. L’UE a souhaité que chaque région constitue une brique du puzzle africain en matière de gestion de crise, dans la cadre de la Force africaine en attente (FAA) [46] agissant sous la direction politique et stratégique de l’UA. Cette architecture est en apparence séduisante, dans la mesure où elle offre à l’UE un partenaire principal, l’UA. Mais au dire d’observateurs locaux comme européens, l’UE et ses États membres se trompent à la fois d’agenda et de méthode en appliquant sans discernement à l’ensemble du continent africain une telle vision régionaliste. Cette approche peut donner lieu à des relations et débuts de partenariats timides entre Européens et Africains dans certaines régions [47], mais elle ne peut fonctionner en présence d’acteurs locaux plus prudents, pour ne pas dire réticents, à l’égard tant de l’UA que de l’UE. C’est en particulier ce que démontre la résistance de la Communauté de développement de l’Afrique australe (Southern African Development Community, SADC) à devenir le partenaire régional que l’UE souhaiterait. Au lieu de partir des dynamiques de régionalisation propres à l’Afrique et diversifiées selon les régions du continent, l’approche de ces régions sous forme d’exportation du « modèle régional européen » sur le continent africain – exemple le plus évident de tentative d’exportation d’un agenda diplomatique et sécuritaire bruxello-centré – se heurte aux réalités du contexte africain lui servant de terrain d’expérimentation. Diversité et inégalités des intégrations régionales en Afrique subsaharienne, diversité des rapports aux interventions et coopérations extérieures en matière de sécurité et de défense, impacts différenciés des puissances régionales dans les différentes organisations [48] se conjuguent alors pour rendre inopérante toute exportation de schémas de coopération interrégionale préconçus [49].

L’Union européenne face au miroir africain : résistances africaines, incohérences européennes

11L’utilisation d’un laboratoire permet de tester la validité d’hypothèses théoriques, de révéler les faiblesses d’un acteur ou de dispositifs d’action. Le contexte africain éclaire ainsi d’un jour nouveau certains postulats clés de l’action extérieure de l’Union européenne, notamment l’importance des dynamiques régionales, l’idée d’un « besoin » ou d’une « attente » d’Europe dans les relations internationales, et celle de l’émergence naturelle et inévitable de l’UE comme acteur international.

Une approche régionale battue en brèche par des résistances sous-régionales et nationales

12La vision régionaliste de l’UE à l’égard de l’Afrique considère a priori ce qui vient d’en haut (continent, région) comme plus efficace, légitime et pertinent que ce qui vient d’en bas (États et acteurs nationaux). Sans être dénuée de pertinence diplomatique et stratégique vue de l’UE, cette approche est inégalement partagée à travers l’Afrique subsaharienne. La question de la répartition des rôles entre l’organisation panafricaine qu’est l’UA et les organisations régionales se pose notamment. Des États, soucieux d’être les principaux acteurs de la médiation et de la résolution des crises surgissant dans leur région, privilégient le cadre régional, ce que les statuts et principes fondamentaux de l’UA garantissent a priori. Dans une région comme la SADC, les acteurs locaux montrent une forte volonté de gérer entre eux les crises régionales [50] et opposent une résistance réelle aux tentatives de médiation ou d’intervention extrarégionales perçues comme des ingérences tierces, qu’elles émanent de l’UA ou de l’UE. Cette dernière se heurte alors à une forme alternative de régionalité ne se définissant ni par une organisation régionale très approfondie et bureaucratiquement performante, ni par l’émergence d’un partenaire régional comme les acteurs européens en recherchent, mais comme un sentiment exclusif vis-à-vis des acteurs tiers. Cet exemple, qu’explique l’histoire politique de cette sous-région, rappelle au passage qu’il existe autant de définitions et de manifestation de la régionalité que de « régions » institutionnellement définies. La perception bruxelloise d’une régionalisation réussie peut être en décalage avec les aspirations régionales des États africains [51]. Le thème de la différenciation interrégionale africaine mérite ici d’être soulevé. Les attentes des acteurs locaux à l’égard des différentes organisations ne peuvent en effet être les mêmes [52], tant les processus régionaux et les rapports des acteurs locaux à l’UA et aux partenaires extérieurs sont hétérogènes. L’impact inégal des organisations régionales sur leurs propres États membres [53] constitue aussi une limite indéniable de l’approche européenne régionaliste du continent africain [54]. Les politiques mises en œuvre au niveau des institutions en charge de la PESC et de la PESD à Bruxelles peinent à prendre la mesure de cette difficulté, alors même que les acteurs européens opérant sur le terrain en ont de plus en plus conscience [55]. Cet état de fait rend envisageable une approche bottum up qui viserait à saisir les besoins des acteurs locaux plutôt que de vouloir leur faire partager des ambitions et concepts conçus à Paris, Bruxelles, ou même à Addis-Abeba.

Le mythe d’un besoin d’Europe contrecarré par des expressions de la souveraineté africaine

13Les acteurs africains valident inégalement la volonté de l’UE d’être un acteur politique et stratégique sur leur continent. Si ses velléités de nouer des relations interrégionales dans le domaine de la sécurité et de la défense ont été plutôt bien accueillies au sein de la Cedeao, la résistance à laquelle l’UE s’est heurtée dans une région comme la SADC a désarçonné les responsables européens en charge du dossier [56]. Interrogés à ce sujet, les acteurs européens oscillent entre scepticisme et désillusion [57]. Une inadéquation entre ce que Bruxelles avait à offrir et les attentes locales est admise par certains acteurs opérationnels après plusieurs années de piétinement des discussions UE-SADC. Concernant la faiblesse des coopérations concrètes entre les deux organisations, certains admettent que « dès que l’UE arrive avec des perspectives ou des projets de coopération en matière de sécurité et de défense, elle tombe un peu à côté, dans le vide » [58]. Accumulation de maladresses diplomatiques, incompréhension de réalités politiques et diplomatiques locales (solidarités avec le Zimbabwe de Robert Mugabe au sujet duquel l’activisme de l’ancienne puissance coloniale britannique dans la mise en place de sanctions européennes a été mal perçu) ou rôle prépondérant de l’Afrique du Sud [59] ont réduit le potentiel de coopération de la région dans les domaines de la sécurité et de la défense avec l’UE. Des erreurs diplomatiques sont parfois admises après coup et du bout des lèvres [60]. Certains attribuent aussi la responsabilité de cette difficulté européenne [61] aux faiblesses intrinsèques de la SADC, expliquant les difficultés de la relation interrégionale UE-SADC par les faiblesses internes à cette organisation : « Les États membres de la SADC n’en attendent rien en matière de sécurité et de défense. À partir de là, pourquoi la SADC demanderait-elle quoi que ce soit à l’UE en la matière ? » [62]. C’est omettre que les États membres de la SADC ont, à l’égard de leur organisation de rattachement, des attentes bien différentes de celles qu’ont les acteurs européens [63]. La « jeunesse » de la SADC dans les domaines étudiés ici en fait certes un partenaire incertain. Des acteurs européens soulignent, dans une approche institutionnelle très européenne que « la SADC n’est pas encore organisée, elle n’a pas les structures » [64], tandis que des acteurs locaux reconnaissent : « Nous n’avons pas accompli beaucoup. Nous sommes encore en apprentissage et en cours de standardisation en tant que région » [65]. En réalité, dans une région comme la SADC, l’UE avance sur un terrain politique plus mouvant, délicat et résistant qu’elle ne le fait lorsqu’elle traite avec l’UA ou la Cedeao [66]. Comme le reconnaissent les fonctionnaires européens interrogés sur la timidité des coopérations avec la SADC, « les relations UE-SADC ne sont pas très bonnes […], tout cela est très compliqué » [67], ou encore « le dialogue demeure très difficile à établir… » [68]. Si l’utilisation classique des aides techniques et financières du Fond européen de développement (FED) a pu avoir une influence sur les choix et progrès institutionnels et organisationnels de la Cedeao ou de l’UA par exemple, elle se révèle plus difficile dans le cas de la SADC. Ses membres adoptent en effet parfois une logique que l’un d’entre eux exprime ainsi : « Nous ne pouvons pas accepter d’argent extérieur parce que cela veut dire qu’ils vont vouloir nous dire ce que l’on doit faire » [69]. Toute tentative des représentants européens de s’exprimer trop directement sur l’usage des fonds issus de la coopération européenne est très négativement perçue et source de difficultés diplomatiques [70]. Les institutions européennes en charge de la PESC et de la PESD déplorent l’absence de demandes de coopération avec l’UE en matière de sécurité et de défense, quand ils ne font pas face à des résistances farouches lorsqu’une telle coopération est proposée [71]. Cette forme de résistance par absence de réceptivité à l’égard de ce qui vient d’en haut (la communauté internationale) et non d’en bas (les acteurs locaux) s’adresse tant à l’UE et à ses États membres qu’à d’autres acteurs comme les États-Unis [72]. Le projet Africom [73] a ainsi été accueilli de façon très froide, la SADC déclarant que « les pays frères de la région ne devraient pas accepter d’accueillir Africom et, en particulier, des forces armées, car cela aurait un effet négatif » [74], tandis que la presse de plusieurs États de la région qualifiait ce projet de dangereux, déstabilisateur ou de basse tentative de contrer l’influence grandissante de la Chine sur le continent [75].

14Ces diverses formes de résistances à des coopérations et influences extérieures sont l’expression d’une souveraineté africaine amenant des pays à refuser, notamment, de servir de laboratoire ou de faire-valoir aux ambitions d’acteurs tiers [76].

Quand l’Afrique révèle une Union européenne composite

15Le contexte africain a aussi servi de révélateur des limites et incohérences de l’UE elle-même en tant qu’acteur international. Le laboratoire a agi comme un miroir. La nature composite de l’UE, associant plusieurs institutions et surtout vingt-sept États, a en premier lieu été mise en évidence [77]. Les échanges d’informations entre capitales européennes présentes sur le continent africain tout comme les échanges entre ces capitales et les représentations de l’UE sur place sont discontinus et incomplets, conduisant à un flou certain, les États membres ne sachant pas toujours précisément ce que font les uns et les autres dans telle ou telle région. Des membres des délégations de la CE en Afrique subsaharienne admettent parfois, comme dans cet exemple à propos de la SADC, que « les États membres ne sont pas vraiment enclins à dire exactement quels genres de discussions ou de coopération ils ont avec la SADC et ses États membres », et que « si l’on sait que des États membres comme le Royaume-Uni, l’Allemagne, la France nouent des relations de sécurité et de défense avec des acteurs locaux », la délégation n’a « aucune idée sur ce qu’ils font exactement » [78]. Ce sentiment de confusion au niveau des relations bilatérales et politiques entre les États membres de l’UE et les acteurs locaux ne facilite pas la capacité de l’UE à apparaître comme un interlocuteur crédible et uni auprès des acteurs africains. Si les acteurs et observateurs européens mettent souvent en exergue les faiblesses institutionnelles ou politiques des États et organisations africaines pour justifier les limites aux relations UE-Afrique dans les domaines de la sécurité et de la défense, ses expériences africaines montrent aussi à l’UE qu’elle n’est pas non plus toujours parfaitement outillée et compétente. Comme le reconnait un membre de la délégation de la CE – chargée des relations avec la SADC – à Gaborone : « La délégation n’a actuellement aucun rôle en matière de sécurité et de défense. Mais puisque je suis là et que j’avais participé à l’élaboration de la Peace Facility, je m’y intéresse… » [79]. Jusqu’à présent, ce n’est que de façon informelle que des membres de délégations européennes dans les pays tiers peuvent s’intéresser et nouer des contacts avec des acteurs locaux en matière de sécurité et de défense car telle n’était pas leur prérogative [80]. La division entre institutions et acteurs européens en Afrique a parfois tourné à la caricature, comme lorsque la CE et le Conseil de l’Union européenne ont fait appel à la Cour de justice de l’Union européenne pour savoir lequel des deux était compétent pour mener la lutte contre la prolifération des armes légères et de petits calibres en Afrique de l’Ouest [81]. Ce manque d’unicité, de cohérence et de cohésion, déjà révélé dans d’autres régions d’intervention de l’UE, est problématique dès lors qu’il s’agit d’influencer les acteurs locaux pour qu’ils acquièrent eux-mêmes un peu plus ces qualités. Le déficit européen en la matière conforte l’image d’une élaboration exploratoire des politiques européennes en matière de sécurité et de défense en Afrique subsaharienne, l’action précédant la consolidation de l’acteur européen et dépassant donc la simple « validation » [82] des institutions et procédures européennes.

16L’Afrique subsaharienne est devenue en quelques années le terrain d’expérimentation privilégié de la PESD balbutiante de l’UE. Des acteurs européens – États, institutions, individus – ont vu en elle un laboratoire possible et porteur pour favoriser l’émergence de l’UE comme acteur international. Certes, des effets d’opportunité multiples, l’accueil bienveillant de certains acteurs africains et la coopération d’acteurs tiers comme l’ONU se sont conjugués pour permettre à l’UE de tester ses ambitions politiques et stratégiques. Cette dynamique a eu pour effets positifs de favoriser un début d’européanisation des politiques africaines de certains États membres et de contribuer au renforcement des relations euro-africaines. Pour autant, au regard des difficultés rencontrées par l’UE, elle devrait aussi avoir pour effet d’amener cette dernière à repenser plusieurs postulats, solidement ancrés mais plus ou moins inopérants, de son action internationale tout en favorisant une rationalisation de celle-ci. Ce statut de laboratoire soulève en tout cas des interrogations quant à une exceptionnalité africaine dans le jeu international, qui ferait de l’Afrique un continent sur lequel des acteurs tiers s’autorisent à mener une action expérimentale qu’ils ne se permettraient pas sur d’autres continents. La résistance de certains acteurs africains aux propositions de coopérations européennes invite à une rénovation de l’approche européenne des réalités africaines. Celle-ci implique d’inverser les conditions d’élaboration et de conceptualisation des politiques européennes, pour les faire partir des aspirations et des demandes des acteurs locaux et non plus d’outils et de concepts préétablis. À l’heure où l’Union européenne devient à nouveau – crise de la dette et de l’Euro aidant – un objet de préoccupation pour la communauté internationale, une telle rénovation participerait d’une introspection plus large et sans aucun doute très utile de l’UE sur elle-même.

Notes

  • [1]
    L’auteur remercie Fred Eboko pour ses encouragements et conseils en première lecture, ainsi que les relecteurs anonymes et les rédacteurs en chef pour leurs critiques, commentaires et suggestions.
  • [2]
    La notion d’« architecture africaine de paix et de sécurité » définit l’ensemble formé par les différentes institutions et organisations africaines (Union Africaine et organisations régionales) impliquées dans la gestion des enjeux diplomatiques, de sécurité et de défense sur le continent.
  • [3]
    Voir C. Major, EU-UN Cooperation in Crisis Management, the Experience of EUFOR RD Congo in 2006, Paris, IES-UE-Occasional Paper, n° 72, 2008 ; N. Bagayoko-Pénone, « L’Opération Artémis, un tournant pour la politique européenne de sécurité et de défense ? », Afrique contemporaine, vol. 1, n° 209, 2004, p. 101-116. Pour une analyse plus globale sur le rôle de l’Union européenne dans la gestion des crises, voir B. Delcourt, M. Martinelli et E. Klimis (dir.), L’Union européenne et la gestion des crises, Bruxelles, Éditions de l’ULB, 2008.
  • [4]
    Voir B. Nivet, Security by Proxy? The EU and (Sub-)regional Organizations, the Case of ECOWAS, Paris, IES-UE-Occasional Paper, n° 63, mars 2006, <http://www.iss.europa.eu/uploads/media/occ63.pdf> ; H. M. Rakotonirina, « Le Dialogue interrégional UE-Afrique depuis Cotonou : le cas de la facilité de soutien à la paix en Afrique », Politique européenne, n° 22, 2007, p. 125-147 ; A. Gnanguênon, La Gestion des « systèmes de conflits » en Afrique subsaharienne : concept et pratique d’un multilatéralisme régionalisé, Thèse de doctorat de science politique, Université de Clermont-Ferrand 1, 2010.
  • [5]
    F. Mérand et M. Rakotonirina, « La Force européenne au Tchad et en Centrafrique, le baptême du feu », Politique africaine, n° 114, juin 2009, p. 105-125 ; N. Bagayoko-Pénone et M. V. Gibert, « The Linkage between Security, Governance and Development: the European Union in Africa », Journal of Development Studies, vol. 45, n° 5, mai 2009, p. 789-814.
  • [6]
    Le recours au terme de « laboratoire » mériterait à lui seul de longs développements. Sans prétendre nous y inscrire, il nous semble simplement possible d’établir ainsi un lien sémantique entre nos observations sur les politiques européennes en Afrique subsaharienne et celles produites dans des champs comme les politiques de développement ou les politiques de santé publique internationales. Celles-ci insistent parfois sur le caractère exploratoire, expérimental des politiques et outils mis en œuvre et sur le fait que l’Afrique, plus facilement que d’autres continents, sert de lieu privilégié pour tester des outils ou méthodes de résolution de défis (politiques, sanitaires, etc.), avant qu’ils ne soient officiellement formalisés ou avant que leur efficacité ne soit prouvée par ailleurs. Voir, par exemple, R. Rottenburg, « Social and Public Experiments and New Figurations of Science and Politics in Postcolonial Africa », Postcolonial Studies, vol. 12, n° 4, 2009, p. 423-440.
  • [7]
    Cette contribution s’inscrit dans un corpus déjà solide sur l’émergence de l’UE comme acteur international : voir D. Helly et F. Petiteville, L’Union européenne, acteur international, Paris, L’Harmattan, 2005 ; sur les significations et implications de l’émergence de la PESD au sein de l’UE, voir : B. Irondelle et P. Vennesson (dir.), L’Europe de la Défense : institutionnalisation, européanisation, numéro spécial de la revue Politique européenne, n° 8, automne 2002 ; B. Nivet (dir.), « Repenser la Défense européenne », La Revue internationale et stratégique, n° 48, 2002, p. 73-158.
  • [8]
    La notion de « résistance africaine », notamment vis-à-vis des pouvoirs extérieurs, a déjà fait l’objet d’une littérature solide. Nous l’employons ici au sens des « intentions et actions concrètes destinées à s’opposer à d’autres ou à refuser d’accepter leurs idées, actions ou positions pour une multitude de raisons », pour reprendre la formule de K. van Walraven et J. Abbink dans « Rethinking Resistance in African History: An Introduction », in J. Abbink, M. De Bruijn et K. van Walraven (dir.), Rethinking Resistance: Revolt and Violence in African History, Leiden/Boston, Brill, 2003, p. 8.
  • [9]
    Des travaux portant sur les rapports de pays africains aux opérations de maintien de la paix et aux interventions extérieures apportent ici des éclairages utiles. Ainsi Laurie Nathan a-t-il par exemple mis en avant la puissance des paradigmes africanistes et anti-impérialistes comme explication à l’émergence de divergences avec les pays occidentaux au sujet du Darfour : L. Nathan, « Interests, Ideas and Ideology: South Africa’s Policy on Darfur », African Affairs, vol. 110, n° 438, janvier 2011, p. 55-74 ; cependant que G. Piccolino et J. Karlsrud ont mis en avant des dynamiques de résistance accrue et de consentement érodé aux opérations internationales de paix, sur fond d’affirmations africaines renouvelées : « Withering Consent, but Mutual Dependancy: UN Peace Operations and African Assertiveness », Conflict, Security and Development, vol. 11, n° 4, octobre 2011, p. 447-471.
  • [10]
    Voir A. Dumoulin, R. Mathieu et G. Sarlet, La Politique européenne de sécurité et de défense (PESD). De l’opératoire à l’identitaire, Bruxelles, Bruylant, 2003.
  • [11]
    Pour de nombreux observateurs en effet, il apparaissait lors du lancement de la PESD « ni justifié ni rationnel qu’une force armée de l’UE configurée pour défendre la sécurité collective du continent européen se retrouve régulièrement détachée à d’anciens postes coloniaux afin de défendre un “ordre” inévitablement mouvant et très relatif », selon la citation tirée de J. Howorth, « L’intégration européenne et la défense : l’ultime défi ? », Cahiers de Chaillot, n° 43, novembre 2000, p. 84.
  • [12]
    Voir par exemple A. Dumoulin, R. Mathieu et G. Sarlet, La Politique européenne…, op. cit., J. Howorth, L’intégration européenne et la défense, op. cit. ; B. Irondelle et P. Vennesson (dir.), L’Europe de la Défense…, op. cit. ; B. Nivet (dir.), « Repenser la défense européenne… », op. cit.
  • [13]
    Voir par exemple N. Bagayoko-Pénone, « Les politiques européennes de prévention et de gestion des conflits en Afrique subsaharienne », Les Champs de mars, n° 16, 2005, p. 93-114 ; N. Bagayoko-Pénone et M. V. Gibert, « The Linkage between », art. cit. ; B. Charbonneau, « Dreams of Empire: France, Europe and the New Interventionism in Africa », Modern and Contemporary France, vol. 16, n° 3, 2008, p. 279-295 ; C. Gegout, « Causes and Consequences of the EU’s Military Intervention in the Democratic Republic of Congo (DRC): A Realist Explanation », European Foreign Affairs Review, vol. 10, n° 3, automne 2005, p. 427-443.
  • [14]
    C. Gegout, « Causes and Consequences… », art. cit.
  • [15]
    Adoptée par les États membres en décembre 2003 sous le titre « Une Europe sûre dans un monde meilleur ».
  • [16]
    F. Faria, La Gestion des crises en Afrique subsaharienne, le rôle de l’UE, Paris, IES-UE-Occasional Paper, n° 55, novembre 2004, p. 49.
  • [17]
    Propos d’un diplomate cités dans C. Gegout, « Causes and Consequences… », art. cit., p. 437. Cette opinion rejoint la quasi-totalité des témoignages français et européens à ce sujet.
  • [18]
    Opérations Artemis, Eupol Kinshasa (mission de police de l’UE en RDC) et Eusec-RDC (mission de l’UE en matière de réforme du secteur de la sécurité en RDC).
  • [19]
    Et de savoir si la demande de l’ONU émane réellement de cette dernière ou fait suite à une suggestion d’intervention de la part d’un ou plusieurs État membres de l’UE dont elle vient légitimer le projet en le sollicitant, ou encore si cette demande onusienne est le relais de demandes africaines.
  • [20]
    Dans le champ des études européennes, la notion d’« européanisation » a notamment été définie par Claudio Radaelli comme un « processus de construction, diffusion et institutionnalisation de règles formelles et informelles, de procédures, de styles, de “manières de faire”, de croyances partagées et de normes, qui sont tout d’abord définies et consolidées durant l’élaboration des politiques au sein de l’UE et sont par la suite incorporées dans la logique des discours, des identités des structures politiques et des politiques publiques nationales », in C. Radaelli, « The Domestic Impact of European Union Public Policy: Notes on Concepts, Methods and the Challenge of Empirical Research », Politique européenne, n° 5, 2002, p. 108.
  • [21]
    À travers le programme Recamp (Renforcement des Capacités Africaines de Maintien de la paix) dans le cas de la France et BMATT (British Military Assistance and Training Team) pour le Royaume-Uni.
  • [22]
    Ou comme le résumait en 2005 un diplomate français en poste au Conseil de l’UE au sujet de l’Afrique de l’Ouest : « La France souhaiterait réellement européaniser la région. Pas seulement pour des questions économiques et financières, mais aussi parce qu’on ne sait plus quoi faire. La France aimerait bien […] que l’UE apporte son aide dans ce cadre ». Entretien réalisé à Bruxelles, le 10 novembre 2005. Ce sentiment d’impuissance traduit la difficulté diplomatique et militaire, pour la France, d’assumer ses responsabilités internationales en répondant aux éventuelles demandes de l’ONU sans prêter le flan aux accusations d’interventionnisme postcolonial, et à mener une action efficace sans engagement militaire direct important.
  • [23]
    Ou comme le notait un diplomate au moment où Paris cherchait à mutualiser son initiative, « toujours apparaitre en situation de gendarme, cela complique les choses ». Cité dans L. Zecchini, « Paris veut européaniser sa présence en Afrique », Le Monde, 27 septembre 2005.
  • [24]
    Sur la politique du Royaume-Uni à l’égard de l’Afrique sous le gouvernement de Tony Blair, voir par exemple R. Abrahamsen et P. Williams, « Ethics and Foreign Policy: the antinomies of New Labour’s “Third Way” in Sub-saharan Africa », Political Studies, vol. 49, n° 2, 2001, p. 249-264 ; ou encore J. Gallhagher, « Healing The Scar? Idealizing Britain in Africa, 1997-2007 », African Affairs, vol. 108, n° 432, 2009, p. 435-451.
  • [25]
    Entretien avec un diplomate suédois, réalisé à Stockholm en octobre 2002.
  • [26]
    Les débats européens ont duré de nombreux mois, se soldant par la décision de lancement de l’opération Eufor Tchad-RCA par la décision 2008/101/PESC du Conseil de l’UE. Les règles en matière d’opérations extérieures de l’UE prévoient que la mise sur pied de ces missions repose sur des contributions « volontaires » des États membres. La définition du mandat et des objectifs de ces missions doit aussi être collectivement entérinée par les États membres. Cette double contrainte explique le difficile lancement de certaines opérations de l’UE, comme celle au Tchad et en Centrafrique : voir par exemple B. H. Seibert, « African Adventure? Assessing the European Union’s Military Intervention in Chad and the Central African Republic », MIT Security Studies Program Working Paper, novembre 2007 ; Antoine Rayroux, « Adaptation, projection, convergence ? L’Européanisation de la défense et l’intervention de l’intervention militaire Eufor Tchad/RCA », Politique européenne, n° 34, 2011, p. 201-230.
  • [27]
    Structures permanentes du Conseil de l’Union européenne basées à Bruxelles en particulier.
  • [28]
    Le concept de « nation-cadre » définit le rôle prééminent joué par un pays dans une opération menée en coalition, ce rôle prééminent se traduisant notamment par la fourniture par le pays en question du commandement de l’opération et/ou d’une grande partie des effectifs, notamment d’encadrement et de logistique.
  • [29]
    La France testant à l’occasion elle-même son Centre de Planification et de Conduite des Opérations (CPCO), structure de commandement jouant un rôle de planification et de conduite des opérations de gestion des crises dans lesquelles des forces françaises sont engagées.
  • [30]
    N. Bagayoko-Pénone, « Les Politiques européennes… », art. cit., p. 94.
  • [31]
    Rappelant en cela les interventions de la communauté internationale dans l’immédiate après Guerre froide. Dans le vocabulaire de l’UE, un « concept » (de gestion des crises, de soutien à la réforme du secteur de sécurité, etc.), définit un document dans lequel États membres et/ou institutions de l’UE clarifient les conditions, objectifs, méthodes, règles, etc., devant guider l’action de l’UE dans le domaine concerné.
  • [32]
    Décision 2005/355/PESC du Conseil de l’UE du 2 mai 2005.
  • [33]
    La « réforme du secteur de sécurité » (RSS en français, SSR en anglais), définit des adaptations des institutions, structures et acteurs en charge du contrôle et de la garantie de la sécurité (armée, services de renseignement, services de police ou pénitentiaires, etc.), prises à des fins de stabilisation et de démocratisation à long terme.
  • [34]
    Que l’on songe par exemple à l’extrême diversité du contrôle parlementaire des opérations extérieures ou des forces spéciales, ou à la diversité des utilisations de forces de maintien de l’ordre d’un État membre de l’UE à l’autre.
  • [35]
    Voir, par exemple, le document du Conseil de l’UE, « EU Concept for ESDP Support to Security Sector Reform » du 13 octobre 2006, <http://register.consilium.europa.eu/pdf/en/05/st12/st12566-re04.en05.pdf>
  • [36]
    Institution de l’UE basée à Bruxelles et remplissant des fonctions d’expertise et de planification au service de la politique européenne de gestion des crises.
  • [37]
    Intervention du Général Jean-Paul Perruche, lors d’un colloque de l’Assemblée de l’UEO sur le thème du maintien de la paix en Afrique, tenu à Paris les 20 et 21 septembre 2005, <http://www.assemblyweu.org/fr/documents/colloques/docs/2005/prog_africa_sep05.pdf>.
  • [38]
    Expression employée à deux reprises lors d’un entretien avec un membre de la Commission européenne chargé de la mise en œuvre des dimensions politiques et sécurité du partenariat UE-Afrique de l’Ouest (Bruxelles, 9 novembre 2005).
  • [39]
    Ces deux notions étaient censées attester du renouvellement des relations euro-africaines, les rendant moins sujettes aux classiques rapports d’influence, de domination et d’intervention Nord-Sud. Force est aujourd’hui de constater qu’elles ont certes en partie renouvelé et diversifié ces rapports d’influence, en multipliant par exemple les acteurs (EU, UA, organisation régionales africaines, etc.), et en les rendant moins directs et visibles, sans les éradiquer.
  • [40]
    Entretien avec un membre de la délégation de la CE à Abuja (Nigeria), réalisé par téléphone en novembre 2005.
  • [41]
    Des travaux de nature empirique ont par exemple été menés en France pour apporter un début de nuance et de diversification entre régions et pays d’Afrique subsaharienne sur ce que pouvaient être des enjeux de sécurité propres à faire l’objet de coopérations entre l’UE et les différents acteurs africains. Voir par exemple les travaux menés depuis 2010 dans le cadre de l’Institut de Recherches Stratégiques de l’École Militaire sous la direction d’Amandine Gnanguênon.
  • [42]
    Des enjeux comme la défense du territoire ou la surveillance des frontières accaparent encore une bonne partie des ressources et de l’attention des politiques nationales de sécurité et de défense.
  • [43]
    Entretien avec un ancien conseiller du ministère britannique de la Défense délégué auprès du gouvernement sud africain et de la SADC, réalisé à Paris le 7 décembre 2010.
  • [44]
    Depuis l’accord de Cotonou (2000), les politiques de coopération et de développement de l’UE avec les pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) incluent un dialogue politique, au même titre que des relations commerciales, de coopération et de développement plus classiques. Il s’agit d’aborder entre partenaires européens et africains des enjeux comme la démocratie et les droits de l’homme, la paix et la sécurité, ce qui est perçu par des acteurs européens, de la Commission notamment, comme un moyen de politiser les relations UE-Afrique, et d’utiliser les outils financiers et commerciaux de l’Union à des fins d’influence politique et stratégique.
  • [45]
    Voir les exemples de la SADC ci-après.
  • [46]
    Le projet de FAA envisageait la mise sur pied d’une capacité de l’UA à mener ses propres missions de gestion de crise et de maintien de la paix. Bien que déclarée officiellement opérationnelle en 2010, elle est à ce jour encore largement en chantier.
  • [47]
    Comme cela nous semble être parfois le cas au sein de la Cedeao. Voir B. Nivet, Security by Proxy…, op. cit.
  • [48]
    Comme le Nigeria en Afrique de l’Ouest ou l’Afrique du Sud en Afrique australe.
  • [49]
    Voir les travaux initiaux de L. Laakso, Regional Integration for Conflict Prevention and Peacebuilding in Africa, Helsinki, University of Helsinki, 2002 et pour une étude plus globale et récente mais comportant des études de cas africains, R. Tavares, Regional Security: The Capacity of International Organizations, Londres, Routledge, 2010.
  • [50]
    Comme la crise malgache.
  • [51]
    Sur le régionalisme en Afrique, voir par exemple D. Bach, « Régionalismes, régionalisation, globalisation », in M. Gazibo et C. Thiriot (dir.), Le Politique en Afrique, Paris, Karthala, 2009, p. 342-361 ; pour un aperçu récent sur la SADC, on pourra se référer à C. Saunders, G. Dzinesa et D. Nagar (dir.), Region-Building in Southern Africa, Londres, Zed Books, 2012 ; et pour des travaux sur le régionalisme en Afrique appliqué aux enjeux de sécurité et de défense, on pourra se référer aux travaux initiaux de L. Laakso, Regional Integration for Conflict Prevention…, op. cit.
  • [52]
    Pour un point de vue « local » sur l’exemple de la SADC, voir par exemple D.-P. Baker et S. Maeresera, « SADCBRIG Intervention in SADC Member States: Reasons to Doubt », Africa Security Review, vol. 18, n° 1, 2009, p. 106-110, <www.iss-co.za>.
  • [53]
    Une remarque qui pourrait aussi s’appliquer à l’UE elle-même et à ses politiques africaines.
  • [54]
    B. Nivet, Security by Proxy…, op. cit., p. 32 et 34.
  • [55]
    En attestent les différences de tonalité des diagnostics opérés en entretien par les interlocuteurs institutionnels européens selon qu’ils sont en poste dans les Délégations européennes sur le terrain ou à Bruxelles.
  • [56]
    En témoigne, par exemple, le refus de la SADC de formes de coopérations poussées entre les institutions européennes et certaines de ses institutions politiques et de sécurité.
  • [57]
    Sans que cela ait conduit, à Bruxelles comme au sein des États membres, à une inflexion de cette approche interrégionale promue par les institutions en charge de la PESC et de la PESD.
  • [58]
    Entretien avec un membre de la mission militaire française à Pretoria, réalisé par téléphone le 23 novembre 2010.
  • [59]
    La politique régionale et internationale de la République d’Afrique du Sud est déterminante dans la construction de la SADC et de son contenu, mais aussi dans la structuration de ses relations extérieures. Pour un aperçu de la posture internationale de l’Afrique du Sud ces dernières années, on pourra se référer notamment à C. Alden et G. Le Père, South Africa’s Post-Apartheid Foreign Policy, from Reconciliation to Revival?, Oxford, Oxford University Press, 2003, ou encore G. Le Père, « L’Action diplomatique sud-africaine pour la paix en Afrique », Transcontinentales, n° 2, 2006, p. 21-46.
  • [60]
    Entretien avec un membre de la délégation de la CE à Gaborone, avril 2007. Cet entretien avait été mené à un moment où le secrétariat de la SADC, basé à Gaborone, ne souhaitait tout simplement plus discuter politique étrangère, sécurité et défense avec la Délégation de la CE sur place. La Commission européenne avait conditionné son aide financière à une éventuelle école sous-régionale de formation au maintien de la paix à plusieurs critères politiques comme le fait que cette école ne se situe pas au Zimbabwe, une condition politique vivement rejetée par la SADC. L’école a finalement vu le jour par la transformation en 2005 en organe de la SADC du Regional Peacekeeping Training Centre (RPTC) de Harare qui avait été créé en 1995 au Zimbabwe.
  • [61]
    Difficulté concernant notamment les relations entre la délégation de la CE et le secrétariat de la SADC basés à Gaborone, mais aussi difficultés de cette délégation à mettre en place les programmes conçus par son institution mère à Bruxelles.
  • [62]
    Entretien avec un membre de la Direction de la coopération de sécurité et de défense du MAEE, réalisé à Paris le 17 décembre 2010.
  • [63]
    Pour un point de vue local sur la régionalité de l’Afrique australe en matière de sécurité et de défense, voir N. Ngoma, Prospects for a Security Community in Southern Africa, Pretoria, Institute for Strategic Studies, 2004, <www.iss-co.za>.
  • [64]
    Entretien avec un membre de la mission militaire française à Pretoria, réalisé par téléphone le 23 novembre 2010. Ces limites institutionnelles pointées par des acteurs locaux comme européens peuvent surprendre, compte tenu de l’ancienneté relative de la SADC créée dans sa forme initiale dès 1980. Elles sont liées à la relance et aux réorientations du projet suite à l’adhésion de l’Afrique du Sud post Apartheid en 1994.
  • [65]
    Interview du Général Engelbert Abel Rugeje, président (zimbabwéen) du Defence Inspectorate Working Group de la SADC, The Herald, 4 septembre 2010, <www.allafrica.com>. L’inertie relevée ici s’explique en partie par le poids militaire prépondérant de l’Afrique du Sud dans la région, induisant une tendance des autres États membres à s’appuyer sur le leader régional en faisant l’économie d’efforts nationaux accrus (en matière de budgets de défense ou de contribution à la mise en place de forces régionales par exemple).
  • [66]
    Au sujet de laquelle le terme de résistance peut être à remplacer par la notion d’ambigüité, cette dernière pouvant d’ailleurs être une forme de résistance.
  • [67]
    Entretien avec un membre de la délégation de la CE à Gaborone, réalisé par téléphone le 25 novembre 2010.
  • [68]
    Courrier électronique du Chef de la délégation de la CE à Gaborone, le 23 décembre 2008.
  • [69]
    Entretien avec un membre de la délégation de la CE à Gaborone, réalisé par téléphone le 25 novembre 2010.
  • [70]
    Voir l’exemple déjà mentionné du différend UE-SADC à propos du RPTC de Harare, ou le refus de la SADC d’accueillir un officier de liaison de l’UE.
  • [71]
    Les États d’Afrique australe ont par exemple refusé des offres de soutien de l’UE ou de ses États membres pour des exercices de préparation au maintien de la paix, ou des programmes de formation et d’entraînement dans ce domaine.
  • [72]
    Les propos tenus par le leader de l’ANC Youth League Julius Malema, qualifiant le Botswana de « poupée à la solde de l’impérialisme américain », bien qu’ayant fait l’objet d’une vive polémique dans la région et au sein même de l’ANC, illustrent l’existence d’un sentiment de défiance à l’égard des puissances extérieures.
  • [73]
    Proposé par le Président George W. Bush en 2007, ce projet visait à créer un commandement américain pour l’Afrique, et à renforcer la présence militaire des États-Unis sur le continent.
  • [74]
    Cité dans A. Carl LeVan, « The Political Economy of African Response to the US Africa Command », Africa Today, vol. 57, n° 1, automne 2010, p. 9.
  • [75]
    Ibid.
  • [76]
    Pour des conclusions proches à partir du cas des opérations de maintien de la paix, voir L. Nathan, « Interests, Ideas and Ideology… », art. cit., et G. Piccolino et J. Karlsrud, « Withering Consent… », art. cit.
  • [77]
    Rejoignant les diagnostics établis successivement sur l’institutionnalisation de la PESC à partir de 1993, puis de la PESD à partir de 1999-2000, et d’études de cas antérieures. Pour un aperçu d’ensemble, voir par exemple F. Terpan, La Politique étrangère et de sécurité commune de l’Union européenne, Bruxelles, Bruylant, 2003 et du même auteur, La Politique étrangère, de sécurité et de défense de l’Union européenne, Paris, La Documentation française, 2010.
  • [78]
    Entretien avec un membre de la délégation de la CE à Gaborone, déjà cité.
  • [79]
    Ibid.
  • [80]
    Comme nous le signalait en fin d’entretien un membre de la Délégation de la CE à Gaborone (déjà cité) : « En tant que fonctionnaire de la Commission, je ne devrais même pas être en train de vous parler de cela ! »
  • [81]
    Cas n° C-91/05 déposé par la Commission européenne le 21 février 2005.
  • [82]
    N. Bagayoko-Pénone, « Les Politiques européennes… », art. cit.
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