« Aujourd’hui, fête de la poésie, j’ai été salué par des grues qui volaient haut dans le ciel et j’ai cru les entendre caqueter : tout ira bien pour l’Ukraine. Je crois en la victoire ». Tels sont les derniers mots écrits au stylo Bic par Volodmyr Vakoulenko dans son journal le 23 mars 2022. Comme d’autres dans des circonstances similaires, il aura eu la présence d’esprit d’enterrer son cahier à carreaux dans un sac en plastique pour sauver ses mots de l’oubli. Ces mots « malgré tout » ont été retrouvés sous le cerisier derrière sa maison de Maïdan. Volodmyr Vakoulenko a été arrêté peu après. Son corps a été retrouvé en septembre parmi les 400 tombes creusées à la va-vite pendant l’été 2022 sous les pins, à l’entrée du cimetière Shakespeare. Les journaux ont raconté la vie de ce poète ukrainien, ses drames personnels, ses aspirations, la douleur de sa famille qui a essayé longtemps de comprendre ce qu’il était devenu. Il est poignant de retrouver dans la terre ces mots fragiles et simples qui disent la souffrance et l’espoir : le désarroi qui étreint la vie, mais aussi la force de ce regard tourné vers le ciel au passage des grues. On se souvient alors que les anciens faisaient de la grue le symbole de l’âme et de sa lutte pour le bien – « leur voix, écrit Hésiode, annonce du haut des airs aux laboureurs le moment favorable pour ouvrir la terre ». Aristote, Pline, et Buffon disent la vigilance des grues qui ne se posent que sur une patte, comme aux aguets.
La poésie et la poétique défendues et illustrées dan…
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