… ces derniers temps – ou faut-il dire : ces temps derniers, en postposant l’adjectif au lieu de l’antéposer ? –, Michel, au moment de nous saluer, me disait toujours, presque toujours : « salut, vieux ».
Depuis quand me saluait-il ainsi ? Je ne saurais le dire, car je n’ai commencé à l’entendre dans toute sa portée, ce salut, que dernièrement. Depuis que ce salut, même s’il ne cesse de se répéter en moi, est devenu le dernier.
J’imagine, je crois entendre précisément – avec une acuité presque troublante – comment il aurait su ausculter les résonances de cet adverbe : dernièrement. Et je pense à la manière dont il a plusieurs fois prêté l’oreille aux effets renversants d’une simple antéposition ou postposition (derniers temps ou temps derniers), lorsqu’un mot se place au sein d’un syntagme en position première ou dernière (c’est-à-dire derrière : l’ancien français derrenier ou derrain dérive avec quelques méandres du latin deretro).
En 1987, dans le no 41 de Po&sie, on pouvait lire, en partie transcrites, les interventions de Michel lors d’un colloque qui avait été consacré l’année précédente à « l’extrême contemporain » (l’expression, on le sait, deviendra un an après le nom de la collection qu’il fonde chez Belin) : « l’épithète préposée », disait-il, « répond à la question temporelle du contemporain ; y répond par le lieu : à l’extrémité ». Et il ajoutait que l’extrême, c’est ce qui point « à la fin du temps, au bout du temps, au Finistère du temps qui s’effile »…
Cet article est en accès conditionnel
Acheter cet article
3,00 €
Acheter ce numéro
20,00 €
S'abonner à cette revue
À partir de 75,00 €
Accès immédiat à la version électronique pendant un an
4 numéros papier envoyés par la poste