Du fond obscur de la clarté
Du fond secret des veines
Regardez remonter le désir
Écoutez ce grand vent
Qui soulève la robe d’ombre
Ce battement écoutez-le
Venu du fond ardent c’est un
Grand cri haut cri long cri
C’est comme un feu immense et doux
Un grand feu blanc qui tue
Qui fait du bien
Laissez-vous emporter saccager
Retrouvez ce frisson d’avant tout
C’est le temps de l’aveu
Le temps du corps à corps perdu
Quand tout est là
Eau feu vent sel chant nuit
Oh oui c’est beau un corps brûlé
Dans l’éclat fou de sa fièvre
Laissez-le feu vous dévoiler
Et le ciel jaillir dans vos veines
La nuit meurt le jour vient c’est l’heure
Poissons au vent chevaux levés
Ouvrez vos mains
Dos cils du sol jusqu’au
Tempêtes tempêtes et puis des cris l’arc des cris les plus
Rauques les plus cris les plus tempêtes et creux de pluie
Et le jasmin les acacias tout ça les éclairs et l’éclat le cra
Quement des roses comment est-il possible que notre vie
Passe comme ça et le claquement des fouets sur les murs
Tout ce qui fait mal aux cheveux comment est-ce dicible
À quel vent quelles heures voraces à quels vœux se jouer
Les loups sont dans nos bras et leurs regards vrillés verts
Nous flashent soufflent nous poussent dans leurs fleuves
À qui donner ces mots âcres la tête éclaboussée d’ombre
Les danseurs nous emportent au pire et n’écoutent l’aveu
Froissé des membres obscurs que dans la perte Quel sens
Accorder à la clarté confuse aux doigts délicats du jour si
Toutes les taches du ciel sont tombées Comment regarder
Le ciel nettoyé jusqu’à l’os par la tempête avec qui danser
Oui dites-moi si le tant pis si le froid qui vous hante là
Si le fracas des mains sur la poitrine dites-moi s’il faut
L’effondrement ou quoi l’après la pluie la hanche lente
Sous la plus terrifiée des deux n’est pas celle qui crève
Comme un nuage sur les bras dites-moi si vous arrivez
À remonter la pente des couleurs si vous imaginez cela
La bouche emplie de terre et les yeux écoutez les yeux
Emplis de terre l’effondrement des rêves derniers dans
La nuit étrangère ou cette odeur sucrée des hyacinthes
Quand on vous appelle et qu’il est l’heure de monter à
L’échafaud des larmes car l’espoir est un enfant perdu
Qui ne se rattrape jamais dites-moi s’il faut peut-être s’
Il faut se coucher dans la chambre du fleuve et s’il faut
Un dernier effort avant la peau de nuit du chagrin l’eau
Qui coule comme une pluie des lèvres des mains de ça
Mer brûlée ses ongles rouges dévorant le bleu le tumulte
Mais pourquoi cette brûlure et pourquoi le vent pourquoi
Un tableau un poème nous change nous inonde les yeux
Peut-on enfermer le vent ses mains chaudes peut-on dire
Ce qu’aurait été Hélène sans Homère peut-on apprendre
Le monde sans les peintres les poètes le verso des choses
Apprivoisé cette distance comme des oiseaux qui ont pris
La pluie foulent le vent sans qu’il y paraisse – et pourtant
Chaque regard avale l’horizon y invente ce qu’il veut l’or
La nuit une baignoire de fleurs le poète est son seul maître
Les heures pour lui s’arrondissent comme des coquillages
D’où sort le bruit du monde l’arbre des rêves a ses racines
Au ciel le reste est l’anguille bleue qui file entre les doigts
Une fumée un chat qui danse Dieu est dans les détails car
Tout être ne nous possède que de ce qu’il change en nous
Comme si j’étais un assassin d’hiver qui te rêverait à vif
Un réfugié poétique perdu dans ses images en attendant
La mer qui ne remonte pas comme le nid noir de la cave
Où je m’oublie moi-même la tête vide de la poitrine aux
Larmes qui coulent sur les genoux sur le trottoir jusqu’à
La mer qui pourtant ne remonte pas et me laisse plaintif
La tête penchée à la portière du désir comptant les jours
Alors que je suis perdu depuis si longtemps depuis cela
Ce champ de cadavres où il fallait lever haut les jambes
Haut les cœurs pour ne pas mais rien n’efface son odeur
La mort m’a dit qu’elle était tranquille et qu’elle enfilait
Ses sandales en silence en jouant avec toutes ces images
Tous ces mots et je n’ai que mes mains vides à regarder
Sur le bord du trottoir en attendant la mer quand passent
Les questions qu’on n’ose les autres les comme si j’étais
Crocs cris et crache et j’hurlemente oh la beauté des seins
L’intense beauté de l’amante ouverte jusqu’au sang jusqu’
Aux abeilles du désir les voilà blanches les voilà courbées
Vers les hanches de celle seule qui me tourmente et j’aime
Ses ne m’oublie pas emmène-moi ses silences quand il est
Temps de partir ses rires qui éclaboussent il pleut toujours
Des soleils soyeux vénéneux quand elle se donne immense
À voir sur le sol de sa peau que je rage arrache rouge celle
Qui monte comme un galop de chevaux enflammés la mer
Aux dents oh l’incroyable lueur entre ses cuisses hurlantes
Et l’écume et le sel et l’audace du jour tout est si or et ciel
On ne sait plus qui croire il ne reste que ça qui palpite cela
Cette clarté cette obscure évidence ce qui veille au fond de
Nous ne sommes rien et nous ne sommes autres que de ça
Cette explosion d’une amante que les abeilles ont couverte
Il voulait peindre les nuages et la terrible beauté des mains
Dessiner l’ombre du vent la vague qui retombe cet instant
Où elle retombe fracassée Il voulait répondre à la question
Du silence l’énigme intense du regard quand il appréhende
Le pire au fond de soi derrière la jalousie des cils Il voulait
Broyer les couleurs dans ses mains pour tenter de raconter
Cette histoire terrible d’ombre et de nuages ce qu’on défait
Entre l’aube et l’aurore ce passage discret quand il faudrait
Avouer Il voulait peut-être essayer de parler du seul instant
Où le monde lui avait basculé dans les bras cette épouvante
Ce plomb fondu dans ses reins dans ses veines et sa bouche
Arrondie comme pour un cri qui ne vient pas Il voulait voir
L’envers de cette ultime nuit ces nuages trop lourds et trop
Soir d’été ce sable qui coulait des yeux pour mieux te crier
Mon enfant qu’il n’est déjà plus temps Il voulait peindre ça