Cet article développe les résultats d’investigations de terrain conduites juste avant la première vague de la crise sanitaire dans plusieurs services de psychiatrie publique pour adultes en France. Nous y constatons une évolution de la pratique clinique sensible par rapport à nos travaux et enquêtes précédents (Demailly & Autès, 2012) : une tendance à la diminution de la place des psychothérapies (Mojtabai & Olfson, 2008) au profit d’une myriade d’«interventions psychiques», souvent éclectiques, parfois innovantes.
S’il existe de nombreux travaux sur les évolutions contemporaines globales de la politique publique française de psychiatrie, un bilan des travaux portant sur les pratiques cliniques laisse voir que celles-ci sont abordées, soit de manière historique et macrosociologique, soit sous l’angle des modèles conceptuels et idéologiques de la psychopathologie (Chamak & Moutaud, 2014; Forner-Ordioni, 2020; Jacqueline, 2006), soit dans le cadre de monographies de populations particulières (on pensera par exemple à Lovell, 2001 sur les SDF), soit enfin par des monographies de structures organisationnelles spécifiques (Lézé, 2008 dans un hôpital de jour; Marques, 2010 dans une équipe mobile; Velpry, 2008 dans un CMP).
L’originalité de notre approche a été de saisir l’offre globale de prestations de soin et d’accompagnement par rapport à une population donnée, donc dans l’ensemble des unités qui sont liées à un pôle psychiatrique. Cette démarche nous a permis de repérer plusieurs évolutions des pratiques de soins…