Couverture de NRE_021

Article de revue

Pourquoi conserver les œuvres d’art et le patrimoine ?

Pages 109 à 119

Notes

  • [1]
    Paul Valéry, « Le problème des musées », Pièces sur l’art, Œuvres, t. II, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de La Pléiade », 1960, p. 1291.
  • [2]
    Voir Roger Pouivet, « De Van Inwagen à saint Athanase, une ontologie personnelle de la résurrection des corps », Klésis, 2010, n° 17. <http://www.revueklesis.org/pdf/Religion07RPouivet.pdf> (site consulté le 30 janvier 2018).
  • [3]
    X survient sur Y, si et seulement si X dépendant de Y, X co-varie avec Y, mais X n’est pas réductible (identifiable) à Y. Sur la question de la survenance, voir Roger Pouivet, L’Ontologie de l’œuvre d’art, Paris, Vrin, 2e éd., 2010, chap. vi.
  • [4]
    Somme théologique, IIIa, 25, 6.
  • [5]
    Le risque d’idolâtrie qui, dans le culte des reliques, inquiétait tant Calvin, se retrouve aussi, peut-être, dans la conservation des œuvres d’art et du patrimoine. Je laisse ici ce point, important toutefois, de côté.
  • [6]
    Pierre Leveau, « Le problème de l’ontologie de la conservation du patrimoine », Conserver restaurer les biens culturels, 2009, n° 27, p. 3-30.
  • [7]
    C’est une notion héritée de Duns Scot. Mais ce qui en est dit ici au sujet des œuvres d’art ne correspond certes pas à la théorie fort complexe de certains scolastiques.
  • [8]
    Voir Eddy M. Zemach, « No Identification Without Evaluation », British Journal of Aesthetics, Summer 1986, vol. 26, n° 3.
  • [9]
    Eugène Viollet-le-Duc, Dictionnaire raisonne de l’architecture française, art. « Restauration », 1866. <https://fr.wikisource.org/wiki/Dictionnaire_raisonné_de_l’architecture_française_du_XIe_au_XVIe_siècle/Restauration> (site consulté le 18 janvier 2018).
  • [10]
    Salvador Muñoz Viñas, Contemporary Theory of Conservation, Amsterdam, Elsevier, 2005, p. 4.
  • [11]
    Les Cloisters, à New York, est un intermédiaire entre la conservation patrimoniale et Disneyland : le déplacement et la muséification des œuvres architecturales – telle qu’elle se pratique aussi au Musée des monuments français, à Paris.
  • [12]
    C’est en gros la perspective de John Dewey.
  • [13]
    Jean-Pierre Cometti, Conserver/Restaurer. L’œuvre d’art à l’âge de sa préservation technique, Paris, Gallimard, 2016, p. 38. Tout le livre de Cometti développe une conception pragmatiste (inspirée de Dewey) de la conservation et de la restauration.
  • [14]
    Voir Roger Pouivet, « Contre le pragmatisme en ontologie de la musique », Aisthesis, Special issue, 2013. D’une façon plus générale, in L’Ontologie de l’œuvre d’art (op. cit.), je m’efforce d’éviter le Charybde de l’essentialisme radical et du nominalisme, en adoptant une thèse réaliste modérée et immanentiste. Elle me semble la mieux adaptée à l’activité de conservation et de restauration. <http://www.fupress.net/index.php/aisthesis/article/view/14097/13088> (site consulté le 12 janvier 2018).
  • [15]
    Ernest Renan, L’Avenir de la science, in Œuvres complètes de Ernest Renan, t. III, Paris, Calmann-Lévy, 1949, p. 882.
  • [16]
    Ibid.
  • [17]
    Kendall Walton, « Catégories de l’art », Esthétique et poétique, textes réunis par G. Genette, Paris, Seuil, 1992.

1 Examinons les raisons disons métaphysiques de la conservation des œuvres d’art et du patrimoine. Après tout, conserver ne va pas de soi ! La formule de Paul Valéry à propos du musée en général est bien connue : « Une civilisation ni voluptueuse ni raisonnable peut seule avoir édifié cette maison de l’incohérence [1]. » Pourquoi l’oubli et l’indifférence historique ne seraient-ils pas préférables à la manie conservatrice ? Pourquoi ne pas laisser le temps faire son œuvre, voire détruire, pour que ce que l’homme fait, plutôt que ce qu’il fît, soit mis en valeur ? Pourquoi vivre dans le cimetière de l’art et la commémoration de nos grandeurs, quand ce n’est pas aussi de nos petitesses ?

L’hegelianisation de l’art

2 La France s’est dotée d’un corps de fonctionnaires chargés de conserver les œuvres d’art. Ils doivent également étudier les œuvres d’art, les classer, les entretenir, et aussi enrichir, mettre en valeur et faire connaître le patrimoine. Même quand elle est laissée à l’initiative privée, l’importance et la valeur de cette activité de conservation, de préservation et d’étude des œuvres d’art sont presque partout reconnues. L’indifférence à la conservation des œuvres et du patrimoine, et plus encore le vandalisme, sont unanimement condamnés. Quand le 21 mai 1972, Laszlo Toth porta une quinzaine de coups de marteau à la Piéta de Michel-Ange, l’émoi fut immense. Certains réclamèrent la peine capitale pour le vandale ! La destruction des mausolées musulmans de Tombouctou et des monuments de Palmyre a récemment fait réagir ce qu’on appelle « la communauté internationale ». Même ce qu’il reste du mur de Berlin, pourtant de sinistre mémoire, est maintenant préservé, élégamment éclairé et proposé à la visite, comme le sont les baraques militaires de Check Point Charlie. Le saccage des monuments en est venu à être assimilé à du terrorisme.

3 Quelle est l’origine de cette attitude conservatrice et préservatrice à l’égard de l’art et du patrimoine ? Pour une grande part, elle résulte, à mon sens, de ce que j’appellerai une « hégélianisation de l’art ».

4 Au xix e siècle et depuis, tout le monde n’est pas devenu hégélien. Loin de là. Toutefois, une idée foncièrement hégélienne s’est répandue, nous devenant presque naturelle. Elle fait maintenant partie de l’équipement intellectuel de l’homme moderne et post-moderne : l’Art serait un produit de l’Esprit, qui est la réalité même dans son développement à travers l’histoire. L’Art est ainsi une expression de l’Esprit, son auto-affirmation et la compréhension qu’il a de lui-même. Dans l’Art, l’Esprit ne se manifeste pas dans des concepts, comme c’est le cas en philosophie ; l’Esprit ne se manifeste pas dans la foi, comme c’est le cas dans la religion ; mais il s’exprime dans des réalisations artistiques. Dans l’histoire, elles laissent des traces : des objets, faits de pierre, de bois, de couleurs, de sons, de mots, voire des pratiques. La vie de l’Esprit, dans sa manifestation, n’a pas seulement une histoire, mais il est l’histoire elle-même. Nous contemplons et apprécions dans les œuvres d’art et les monuments du passé des images de l’Esprit.

5 Hegel a gagné : sa conception de l’Art se trouve partout implicitement. Les journaux, radios, télévisions, le petit monde de l’art et de la culture, en France tout particulièrement, la véhicule, et même la célèbre. C’est là certes du Hegel allégé en concept, un idéalisme délavé. C’est ce que j’entends par « hégélianisation de l’art » : l’art serait un processus dont les œuvres sont à la fois des expressions artistiques et des moments historiques. Que Hegel ait raison ou tort n’est pas la question. Ce qui importe est le rôle joué par cette hégélianisation dans notre conception générale de l’art et du patrimoine. Pourquoi conservons-nous les œuvres d’art ? Pourquoi entrent-elles, parfois à peine sont-elles produites, au même titre que les monuments et bien d’autres choses encore, dans un patrimoine que nous entendons préserver ? La réponse est qu’il s’agit là d’expressions de l’Esprit se manifestant dans l’histoire.

6 Les musées ont plus particulièrement en charge ce dépôt de l’Esprit qu’est l’Art. Avec la notion de patrimoine, le projet de conservation des manifestations de l’Esprit s’est élargi. L’Esprit serait dans les monuments, mais aussi les danses folkloriques, recettes de cuisine, outils agricoles, broderies, instruments de mesure, et bien d’autres choses encore. Le tourisme culturel voue aussi un culte hégélien à l’Esprit. Il impose la visite des villes, églises, châteaux et musées d’un peu tout, mais aussi pourquoi pas des vieux marchés, et même des caves pour goûter un bon vin. Un hégélianisme de voyage voit l’Esprit partout. Ainsi, en troupeaux souvent, nous hantons les lieux chargés d’histoire et de mémoire, tout vibrants d’historicité et de spiritualité.

L’ontologie matérielle de l’art et du patrimoine

7 La simple idée que l’art et d’autres artefacts manifestent notre spiritualité n’aurait-elle pas pu contenter l’homme moderne, sans pourtant qu’il se sente tenu de conserver les œuvres et le patrimoine ? La mémoire des exploits réalisés par l’Esprit ne pourrait-elle lui suffire, qu’il doive encore collectionner et commémorer ? Après tout, qu’avons-nous besoin de conserver et de préserver les traces de l’Esprit, pour ne pas dire ses déchets ? L’hégélianisation de l’art aurait pu faire de nous des êtres nostalgiques ou simplement des historiens, plutôt que des muséophiles et des acharnés du patrimoine.

8 Expliquons alors pourquoi, de l’hégélianisation à l’ontologie matérielle des œuvres d’art et du patrimoine, la conséquence est bonne. Pour cela, je commence par une remarque. On parle aujourd’hui de « patrimoine immatériel de l’humanité ». Mais sa conservation suppose toujours celle de choses parfaitement matérielles. Pour, par exemple, conserver une langue en voie de disparition, le lorrain par exemple, ce sont ceux qui la parlent qu’il faut préserver ; ou pour conserver une pratique culinaire, par exemple l’authentique pâté lorrain, il faut préserver ceux qui la connaissent. Ainsi, l’idéalisme hégélien entraîne le souci le plus matériel de l’art et du patrimoine, voire un véritable culte de l’objet matériel.

9 Afin d’expliquer maintenant cette importance de la matérialité des œuvres et du patrimoine, même au sein d’un paradigme fondamentalement idéaliste, je décrirai deux situations. Elles seront ensuite comparées à la conservation de l’art et du patrimoine.

10 Première situation. Questionnée pour savoir pourquoi elle fait attention à une clé, une personne répondra qu’elle lui est utile pour ouvrir une certaine porte. Il peut s’agir d’une clé classique en fer ou en acier, actionnant mécaniquement une serrure. Mais cette clé peut aujourd’hui être un rectangle de plastique comprenant une puce électronique agissant sur une cellule réceptrice, ou une bande magnétique contenant des informations, voire un code numérique ou un code barre. Supposons qu’une clé classique soit remplacée par une clé électronique ou magnétique, cette personne n’a plus de raison de conserver la première, et elle s’en débarrasse. Dans ce cas, une chose matérielle, une clé, a une fonction utilitaire, ouvrir une porte. Mais cette fonction perdue, la chose matérielle n’a plus à être conservée.

11 Deuxième situation : la mèche de cheveux d’une personne aimée. Cette mèche de cheveux n’est pas conservée pour sa fonction, car elle ne l’a plus. Elle est conservée parce qu’elle est cette mèche de cheveux là, de telle personne, à tel moment – par exemple d’un enfant, le jour de ses deux ans. Si la mèche de cheveux est détruite, rien ne pourra jamais la remplacer. Elle a une fonction de souvenir et elle est chargée d’émotion. Mais pour cela, elle doit être cette mèche-là, celle d’une certaine personne à un certain moment. Ce serait la même chose avec son mouchoir, son stylo-plume, sa tabatière, quelque chose qui est un peu d’elle.

12 À mon sens, la conservation des œuvres d’art et du patrimoine nous place dans la seconde situation plutôt que dans la première. Les œuvres d’art sont aussi irremplaçables que la mèche de cheveux d’une certaine personne. C’est aussi le cas du patrimoine culturel et la raison pour laquelle il est préservé. L’œuvre d’art et le patrimoine sont des accès matériels à ce qui sinon serait perdu. Mais quoi exactement ? La mèche de cheveux donne un accès mémoriel à une personne disparue. S’agissant d’une œuvre d’art ou d’un monument, à quoi donnent-ils accès ?

13 L’art en général ou le patrimoine donne accès à des valeurs esthétique, cognitive, émotionnelle, religieuse, spirituelle, politique. Et d’autres valeurs encore, peut-être. Les philosophes de l’art ne s’accordent nullement sur la liste et la nature de ces valeurs propres aux œuvres d’art. Mais tous sont d’accord pour considérer qu’elles ont une valeur, quelque chose qui rend préférables qu’elles existent plutôt que non, et que nous nous préoccupions d’elles. Ici, nul besoin de faire le tri, en insistant sur certaines valeurs et en contestant d’autres. Il suffit de remarquer que ces valeurs, quelles qu’elles soient, supposent que des choses matérielles perdurent, continuant à être ce qu’elles étaient.

14 Une comparaison encore, pour me faire bien comprendre. Cette fois, c’est avec la résurrection des corps. Selon la foi chrétienne, les corps ressusciteront à la fin des Temps, lors du Jugement dernier. Dans la tradition aristotélicienne et thomiste, l’identité des personnes humaines ne tient pas à leur âme, qui n’assure que leur identité générique (celle d’être humain), mais à leur corps. (Nous avons tous, êtres humains, la même âme, c’est-à-dire la même forme substantielle ; mais notre individualité est corporelle.) C’est par notre corps que chacun de nous est et reste celui qu’il est, telle personne (distinguée de ce qu’il est, un être humain). Dès lors, chaque personne ressuscite non pas comme une âme ou un pur esprit, mais comme un corps ; et dès lors, le jugement dernier, le concerne bien lui, telle ou telle personne [2]. (Notre identité est garantie par ce qu’un scolastique appellerait notre « matière désignée ».)

15 C’est par son corps que nous accédons à une personne, aussi bien à ce qu’elle pense (elle nous le montre dans ses actes, et elle nous le dit, dans ses paroles) et à ce qu’elle vaut (ce qu’elle fait). De même, nous devons conserver les œuvres d’art, comme choses matérielles, pour accéder à leur signification (ce qu’elles veulent dire) et à leurs valeurs (de multiples sortes). Les propriétés esthétiques, artistiques et patrimoniales des œuvres d’art surviennent sur la perception sensible de leurs propriétés matérielles [3]. Si donc les œuvres n’étaient pas conservées, nous serions privés de leurs propriétés et de leurs valeurs, quelles qu’elles soient exactement. À partir ou même dans les propriétés matérielles des œuvres, nous accédons à leurs propriétés non matérielles : propriétés intentionnelles (leurs significations) et propriétés axiologiques (leurs valeurs). Sans la conservation et la préservation matérielles des œuvres et du patrimoine, nous perdrions tout leur bénéfice.

16 Encore une comparaison, et plutôt même une analogie. Cette fois avec le culte des reliques. Pourquoi des parties du corps d’un saint ou des objets qu’il aurait touchés sont-ils conservés, et même, dans le culte catholique, vénérés ? Parce que les reliques nous servent à accéder à ce qui les a habitées. Comme le dit saint Thomas : la vénération des reliques des martyrs revient en fait au Christ dont ils sont les martyrs. « Nous n’adorons pas ce corps sensible pour lui-même, mais à cause de l’âme qui lui fut unie et qui jouit maintenant de Dieu, et à cause de Dieu, dont l’âme et le corps furent les serviteurs [4]. » De la même façon, parce que les œuvres d’art et le patrimoine contiennent quelque chose de spirituel, nous conservons des objets matériels grâce auxquels nous y accédons.

17 Le musée et la patrimonialisation de bâtiments, de quartiers entiers dans des villes, d’espaces naturels mêmes, ne serait-ce pas la laïcisation du culte des reliques [5] ?

Conserver/restaurer

18 L’analogie entre le culte des reliques et la conservation des œuvres d’art permet aussi d’expliquer pourquoi elle s’accompagne de restauration. Le conservateur-restaurateur affirme autant que faire se peut, qu’il garantit l’authenticité de l’œuvre, c’est-à-dire son origine et son histoire. Toutefois, la continuité matérielle ne nous satisferait pas si l’œuvre perdait, au fil du temps, la plupart de ses propriétés artistiques (par exemple, être dans un certain style) et esthétiques (par exemple, être émouvante). La continuité matérielle ne garantirait pas la préservation de l’œuvre. Il y a bien une continuité matérielle entre un enfant à la naissance et la même personne à l’âge, disons, de soixante ans. C’est la même personne, mais sans qu’elle ait les mêmes propriétés matérielles qualitatives. Dans le cas d’une personne, la seule continuité matérielle préserve l’identité. Nous pouvons changer graduellement – et à certains âges rapidement – tout en restant le même. Mais la continuité matérielle ne suffit pas au conservateur pour assurer l’identité d’une chose. Il doit aussi préserver l’identité des propriétés qualitatives constitutives de l’œuvre : une certaine couleur, certains traits d’un dessin, des caractéristiques singulières d’une chose. À ces qualités matérielles sont liées des caractéristiques phénoménales qui, elles aussi, doivent subsister, et à défaut desquelles l’œuvre perd son identité numérique.

19 L’œuvre d’art reste la même si les propriétés qualitatives matérielles sur lesquelles surviennent ses propriétés artistiques, esthétiques et patrimoniales, perdurent elles aussi, au moins suffisamment. On peut ainsi distinguer une individualité matérielle large, assurée par la seule continuité et tolérant une importante modification graduelle, c’est le cas des personnes humaines, et une individualité matérielle étroite laquelle suppose une continuité matérielle, mais aussi la préservation des propriétés matérielles qualitatives. Le tableau dont les couleurs ont pâli ou sont radicalement modifiées n’est finalement plus l’œuvre du peintre auquel on l’attribue.

20 Conserver va supposer, pour ainsi dire, d’arrêter le temps ou, au moins, d’accompagner le vieillissement afin que l’individualité étroite de l’œuvre persiste, autant que possible. La conservation supposera souvent d’intervenir préventivement pour garantir la persistance d’une propriété qualitative qu’on craindrait de voir disparaître ou se modifier. Les traces de ce qui a été fait pour maintenir les propriétés qualitatives initiales peuvent être manifestées ; la conservation n’est pas une tromperie voulant faire prendre du neuf pour du vieux. Le conservateur-restaurateur n’a ainsi ni à se cacher ni à mentir. Et c’est d’avoir maintenu ou même restitué les propriétés matérielles qualitatives constitutives que le conservateur se justifie.

21 Dans le détail, les opérations de conservation et de restauration à effectuer sont variables ; elles peuvent faire l’objet de discussions et même de débats. Il reste que l’identité d’une œuvre d’art est assurée par la persistance des propriétés matérielles.

Objections et réponses

22 Examinons maintenant plusieurs objections à la thèse de l’ontologie matérielle des œuvres d’art.

23 Une première objection vient à l’esprit. Le raisonnement qui vient d’être suivi vaut pour la peinture, la sculpture ou l’architecture, mais en dirions-nous autant pour les œuvres musicales, littéraires ou chorégraphiques ? Nous n’avons pas alors une entité matérielle singulière qui est l’œuvre. Une œuvre musicale doit-elle être considérée encore comme matérielle, alors même qu’elle est douée d’ubiquité, en étant au même moment en plusieurs endroits ? Si même ces occurrences sont matérielles, elle n’est pas singulière et ne suppose donc pas la conservation d’une chose particulière, mais plutôt d’un type. La même œuvre littéraire n’est-elle pas partout où elle est lue ? Traduite, n’a-t-elle pas aussi des propriétés matérielles différentes, celle d’un autre texte que l’original ? Les œuvres chorégraphiques sont remontées lors d’un nouveau spectacle ; mais nous admirons alors d’autres danseurs, et matériellement autre chose.

24 C’est indéniable, il y a bien des différences ontologiques entre un tableau et une œuvre littéraire ou une œuvre musicale. Dans le cas des arts autographiques, conserver l’œuvre, c’est s’assurer de la continuité matérielle entre l’œuvre sortie des mains de l’artiste et celle que nous conservons et préservons. En revanche, dans le cas des arts allographiques, la continuité historique n’est pas requise. Il suffit qu’un texte soit conservé, mais ce n’est ni nécessairement ni habituellement le texte manuscrit, ni la partition rédigée par le compositeur. Ce qui est particulier pour certaines œuvres, c’est que seule une chose singulière est la voie d’accès aux propriétés intentionnelles et axiologiques de l’œuvre. Alors que pour d’autres œuvres, une notation a permis de distinguer entre un objet matériel initial et un autre servant à lire l’œuvre, qu’elle soit littéraire ou musicale. Nous avons dans ce cas, une œuvre-type comprise dans un texte ou une partition.

25 Certaines œuvres sont conservées dans un objet matériel-type, comme un texte. En revanche, c’est le cas qui nous intéresse ici, d’autres œuvres supposent la conservation de l’œuvre matérielle historique. On ne peut pas les refaire à partir d’une notation ou d’un texte. Si elles sont détruites, elles doivent être reconstituées, comme le fut la vieille ville de Varsovie, par exemple. L’intention de cette reconstitution est de nous ramener à ce que Varsovie fut, d’éliminer l’interruption dans la continuité matérielle. Une des conditions de l’identité des propriétés non matérielles, celles de signification et de valeur, c’est alors l’identité des propriétés matérielles de l’œuvre grâce à laquelle est préservée l’identité de l’œuvre tout court. Pour rester telle œuvre, l’œuvre doit rester la même. Alors, le conservateur-restaurateur prend soin avant tout de l’identité d’une chose en garantissant sa continuité matérielle. La conservation des œuvres d’art est dès lors une affaire d’ontologie appliquée [6]. Comment s’assurer de la continuité matérielle d’une chose que présuppose son identité artistique, esthétique et patrimoniale ? Telle est la question fondamentale de la conservation et de la préservation.

26 Une seconde objection consiste à soutenir que chaque œuvre possède une propriété individuelle non matérielle, une haeccéité, disons une différence essentielle individuelle, en faisant l’œuvre singulière qu’elle est [7]. La notion d’essence individuelle doit être comprise comme un noyau de signification ; il est l’œuvre elle-même et il fonde son individualité. La persistance d’un tel noyau de signification, plutôt que les propriétés matérielles de l’œuvre, garantirait son identité. Ce noyau de signification est une réalité intensionnelle, non matérielle. L’œuvre est ce qu’elle veut dire, en quelque sorte. Si l’on adopte une telle théorie, le travail du conservateur-restaurateur ne porte pas tant sur la matière de l’œuvre que sur le maintien de ce noyau de signification, cette essence individuelle de l’œuvre. Une façon de soutenir cette thèse consiste à dire, comme Eddy Zemach, que l’identification suppose la signification [8]. Sa signification est la norme en fonction de laquelle l’identité d’une œuvre est garantie. C’est l’attitude adoptée par Eugène Viollet-le-Duc et son école : le restaurateur vise la signification de l’œuvre. Ce qui suppose qu’il soit à même de l’appréhender indépendamment de la matérialité des œuvres. La formule de Viollet-le-Duc est connue : « Restaurer un édifice, ce n’est pas l’entretenir, le réparer, ou le refaire, c’est le rétablir dans un état complet qui peut n’avoir jamais existé à un moment donné [9]. » Salvador MuñozViñas dit que Viollet-le-Duc visait la « vraie nature [10] » d’un bâtiment à conserver ou à restaurer. Nous pourrions dire son haecceité.

27 Mon refus de cette conception repose sur un double doute. Cette thèse suppose un accès aux œuvres indépendamment de leur existence matérielle et de leur appréhension sensible. Le noyau de signification réelle serait alors un type, instancié par des entités matérielles, dont les propriétés matérielles pourraient être fort variables et différentes. Ce qui mettrait à coup sûr en péril la théorie de la survenance des propriétés artistiques, esthétiques et patrimoniales, sur les propriétés matérielles des œuvres. Parmi toutes les objections à une telle théorie, la suivante me semble décisive : cette théorie rend en réalité inutile la conservation des œuvres et leur restauration. Nous pourrions en revanche produire, à partir de l’idée que nous nous faisons de ce que sont les œuvres et les monuments, une chose supposée manifester cette idée. En gros, je crains que cela n’encourage un Disneyland patrimonial [11]. Il nous suffirait de nous faire une idée et de produire les œuvres à partir d’elle, pour garantir l’accès à la signification des œuvres. Les œuvres – comme noyaux de signification – pourraient survivre à leur disparition matérielle. Une fiction suffirait donc à nous donner l’idée de ce qui était. Mais il y a une différence entre une fiction et une documentation ou des archives. Il y a une différence entre un roman historique et un livre d’histoire présentant des documents originaux. On ne peut même pas prétendre que le second nous en apprend plus sur l’histoire que le premier. Cela dépend des cas. Mais ontologiquement, ils ne peuvent être confondus.

28 Une troisième objection pourrait être faite à une ontologie matérielle des œuvres mettant l’accent sur la matérialité des œuvres et leur identité numérique, comme je le propose. Certains considèrent que l’art est plutôt affaire d’expérience, d’usage, d’activation et de fonctionnement, plutôt que d’existence de choses matérielles ayant une nature particulière. Seule une conception pragmatiste de l’art rendrait alors justice à cet élargissement indispensable de la notion d’art [12]. Le conservateur-restaurateur n’a donc pas seulement à s’intéresser à des objets matériels et à leur identité. L’entité matérielle s’il en est même une, est un élément d’une totalité bien plus large, incluant des expériences et des pratiques. Pour parler comme Jean-Pierre Cometti, « le conservateur-restaurateur doit d’abord adopter une attitude qui rende justice à la spécificité de son objet, du type d’intérêt qu’on lui porte et des exigences que cela induit [13] ». Or cet objet n’est pas du tout un simple objet, mais tout un ensemble de pratiques et d’usages, d’expériences et d’attitudes.

29 Mais il n’est pas sûr que la recommandation, faite au conservateur-restaurateur, d’élargir son champ d’intérêt, en tenant compte d’autre chose que d’un simple objet, soit en réalité, et paradoxalement, très différente de l’idée, évoquée précédemment, du noyau de signification, en quoi l’œuvre consisterait. L’œuvre n’existerait pas indépendamment des pratiques, usages et fonctionnements qui, selon cette thèse, la constituent. L’œuvre d’art est donc, fondamentalement, une signification inscrite dans ces pratiques, usages et fonctionnements. Dès lors, l’essentialisme radical, qui mise sur la notion d’essence individuelle, et le pragmatisme intégral, qui mise sur les pratiques, finissent par se ressembler, voire par affirmer, le style mis à part, la même chose [14]. Or, serait-il vraiment utile de dire aux conservateurs-restaurateurs qu’ils doivent s’assurer que des pratiques, des usages et des fonctionnements perdurent ? Je ne vois pas très bien ce qu’ils peuvent bien faire à ce sujet ! Il est clair en plus que dans de très nombreux cas, ces pratiques, ces usages ont justement disparu. Quand nous admirons un tableau d’autel, qui se trouvait donc dans une église, et devant lequel la pratique initiale était de prier, c’est parce que nous ne prions plus ! Plus généralement, la conservation commence quand la pratique a disparu. Elle correspond à cette hégélianisation de l’art dont il était question au début de cet article. Il me semble que défendre une théorie pragmatiste de la conservation ne fait en pratique aucune différence dans l’activité du conservateur et du restaurateur ! Si le conservateur-restaurateur s’intéresse cependant aux pratiques, c’est afin de s’assurer de la conservation d’un objet matériel, et du bien-fondé de la restauration qu’il envisage. La conservation et la restauration sont fondamentalement affaire d’ontologie. (Qui ferait reposer une théorie météorologique sur les pratiques vestimentaires selon les saisons ?)

Traditions de rationalité

30 Une quatrième objection pourrait être la suivante. Une ontologie matérielle de l’art et du patrimoine semble renfermer l’œuvre d’art et le monument sur son mode matériel d’existence. Ce dont j’ai parlé au début de l’article – les œuvres d’art comme manifestation de l’Esprit – peut-il vraiment en être encore question ? En insistant à ce point sur la matérialité des œuvres, leur sens n’est-il pas délaissé au profit de la matérialité la plus grossière, bien loin de tout idéalisme ? Répondre à cette objection va me permettre d’ajouter un élément important à la conception esquissée de la conservation et de la restauration des œuvres d’art et du patrimoine. C’est l’idée d’une « tradition de rationalité ». Je voudrais en réalité la substituer à l’hégélianisme. Après tout, si le projet de conservation et de patrimonialisation a trouvé son origine dans l’hégélianisation des esprits modernes et post-modernes, nous ne sommes pas pour autant tenus de nous y tenir.

31 J’ai déjà dit que sur les propriétés matérielles de certains artefacts surviennent des propriétés intentionnelles, non matérielles. Ces propriétés non matérielles comprennent leur signification. Par exemple, nous regardons un paysage d’hiver de Jacob van Ruysdael, c’est-à-dire une chose matérielle, et nous comprenons qu’il exprime une sereine tristesse, c’est-à-dire qu’il signifie la tristesse, ou une certaine sorte de tristesse, en la manifestant. Toutefois, l’appréhension de ces propriétés sémiotiques grâce auxquelles une œuvre a une signification, n’est jamais indépendante d’une tradition. Dans ce cas, c’est celle de la peinture flamande de paysage. Pour comprendre et apprécier cette œuvre, il faut passer des propriétés matérielles à des propriétés intentionnelles. Mais ce passage n’est possible que sur l’arrière-fond d’une tradition de pensée se manifestant dans l’histoire de la peinture de paysage, avec ce moment particulier en Flandres, au xvii e siècle.

32 C’est une tradition de rationalité parce qu’elle manifeste une certaine compréhension du monde dans la production de tableaux fonctionnant esthétiquement d’une certaine façon. Cette tradition est différente de la peinture de paysage en Italie, à la même époque, comme chez Le Dominiquin, par exemple, ou du paysage classique français, chez Claude Lorrain en particulier. Une certaine tradition de peinture de paysage, c’est finalement l’équivalent, mutatis mutandis, d’une tradition philosophique, comme par exemple celle du stoïcisme, voire d’une certaine forme de stoïcisme. C’est aussi l’équivalent d’une tradition scientifique, comme celle de l’atomisme, laquelle prend aussi différentes formes.

33 Nous n’admirons pas une œuvre – et nous n’y comprenons simplement pas grand-chose – en la coupant de sa tradition de rationalité. Ernest Renan disait que « l’admiration absolue est toujours superficielle [15] ». Il ajoute :

34

Nul plus que moi n’admire les Pensées de Pascal, les Sermons de Bossuet, mais je les admire comme œuvres du xvii e siècle. Si ces œuvres paraissaient de nos jours, elles mériteraient à peine d’être remarquées. La vraie admiration est historique [16].

35 La survenance des propriétés intentionnelles sur les propriétés matérielles sensibles, suppose ainsi des catégories génétiques, génériques et stylistiques. Une peinture appartient à la tradition flamande du paysage, ou une sonate relève de la musique romantique, un film est un western hollywoodien, un roman est dans le genre du roman historique à la Walter Scott, etc. Les catégories de peinture, de sculpture, de musique, de danse, avec toutes les complexités qui s’attachent à leur détermination fine et précise, sont elles-mêmes nécessaires à l’appréhension des œuvres et du patrimoine. C’est toujours en fonction de telles catégories, artistiques et esthétiques, que nous identifions les œuvres et que nous saisissons ce qui fait d’elles ce qu’elles sont.

36 Ces catégories – les « catégories d’art », pour parler comme Kendall Walton [17] – sont essentielles pour la conservation et la restauration des œuvres d’art. Mais elles ne sont pas détachables des propriétés matérielles des œuvres, parce qu’elles surviennent sur elles et sur notre appréhension d’une tradition de rationalité.

37 Nous aurions donc tort d’opposer une conception humaniste et spirituelle de l’art et une ontologie matérielle des œuvres et du patrimoine. Elles sont en réalité solidaires par la survenance des propriétés intentionnelles sur des propriétés matérielles, et par l’importance des traditions de rationalité, comme cadres de compréhension et d’appréciation, avec leur caractère historique.

L’esprit n’est pas dans la tête

38 La signification des œuvres n’est pas un noyau appréhendable comme tel, indépendamment des propriétés matérielles des œuvres et donc de leur réalité sensible et même matérielle. Mais, les œuvres n’ont pas de réalité et d’identité indépendamment de leur signification, et de leur contextualité historique. La conservation patrimoniale n’est cependant pas une chirurgie garantissant, par une opération strictement matérielle, l’éternelle jeunesse d’une œuvre. Et la conservation patrimoniale n’est, pas plus que l’injection de botox, un élixir de jouvence. La conservation tâche de renouer avec des traditions, comprises comme l’horizon de la compréhension. Autrement dit, dans la préservation, des opérations matérielles sur des choses matérielles entrent dans la rationalité d’une œuvre. Ce à quoi nous fait accéder le patrimoine, ce sont, à travers l’attention aux choses matérielles, des traditions de rationalité, manifestant la destination spirituelle de l’humanité. C’est la raison, elle n’est donc pas mineure, pour laquelle nous conservons et préservons le patrimoine.

39 Cette raison fondamentale de la conservation et de la restauration, c’est finalement un trait caractéristique du genre d’être que nous, êtres humains, sommes. On pourrait dire que « les significations ne sont pas dans la tête » des êtres humains, comme l’affirme Hilary Putnam. Dès lors, notre pensée dépend des choses matérielles sur lesquelles elle porte. Les significations supposent ces choses matérielles vers lesquelles notre esprit est dirigé. C’est la conversio ad phantasmata dont parlait saint Thomas. Conserver les œuvres d’art, le patrimoine en général est ainsi une des conditions de notre pensée et même de notre rationalité, parce que sans les choses matérielles mêmes ce qu’elles veulent dire et ce qu’elles valent nous échappent.


Date de mise en ligne : 19/11/2018.

https://doi.org/10.3917/nre.021.0109

Notes

  • [1]
    Paul Valéry, « Le problème des musées », Pièces sur l’art, Œuvres, t. II, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de La Pléiade », 1960, p. 1291.
  • [2]
    Voir Roger Pouivet, « De Van Inwagen à saint Athanase, une ontologie personnelle de la résurrection des corps », Klésis, 2010, n° 17. <http://www.revueklesis.org/pdf/Religion07RPouivet.pdf> (site consulté le 30 janvier 2018).
  • [3]
    X survient sur Y, si et seulement si X dépendant de Y, X co-varie avec Y, mais X n’est pas réductible (identifiable) à Y. Sur la question de la survenance, voir Roger Pouivet, L’Ontologie de l’œuvre d’art, Paris, Vrin, 2e éd., 2010, chap. vi.
  • [4]
    Somme théologique, IIIa, 25, 6.
  • [5]
    Le risque d’idolâtrie qui, dans le culte des reliques, inquiétait tant Calvin, se retrouve aussi, peut-être, dans la conservation des œuvres d’art et du patrimoine. Je laisse ici ce point, important toutefois, de côté.
  • [6]
    Pierre Leveau, « Le problème de l’ontologie de la conservation du patrimoine », Conserver restaurer les biens culturels, 2009, n° 27, p. 3-30.
  • [7]
    C’est une notion héritée de Duns Scot. Mais ce qui en est dit ici au sujet des œuvres d’art ne correspond certes pas à la théorie fort complexe de certains scolastiques.
  • [8]
    Voir Eddy M. Zemach, « No Identification Without Evaluation », British Journal of Aesthetics, Summer 1986, vol. 26, n° 3.
  • [9]
    Eugène Viollet-le-Duc, Dictionnaire raisonne de l’architecture française, art. « Restauration », 1866. <https://fr.wikisource.org/wiki/Dictionnaire_raisonné_de_l’architecture_française_du_XIe_au_XVIe_siècle/Restauration> (site consulté le 18 janvier 2018).
  • [10]
    Salvador Muñoz Viñas, Contemporary Theory of Conservation, Amsterdam, Elsevier, 2005, p. 4.
  • [11]
    Les Cloisters, à New York, est un intermédiaire entre la conservation patrimoniale et Disneyland : le déplacement et la muséification des œuvres architecturales – telle qu’elle se pratique aussi au Musée des monuments français, à Paris.
  • [12]
    C’est en gros la perspective de John Dewey.
  • [13]
    Jean-Pierre Cometti, Conserver/Restaurer. L’œuvre d’art à l’âge de sa préservation technique, Paris, Gallimard, 2016, p. 38. Tout le livre de Cometti développe une conception pragmatiste (inspirée de Dewey) de la conservation et de la restauration.
  • [14]
    Voir Roger Pouivet, « Contre le pragmatisme en ontologie de la musique », Aisthesis, Special issue, 2013. D’une façon plus générale, in L’Ontologie de l’œuvre d’art (op. cit.), je m’efforce d’éviter le Charybde de l’essentialisme radical et du nominalisme, en adoptant une thèse réaliste modérée et immanentiste. Elle me semble la mieux adaptée à l’activité de conservation et de restauration. <http://www.fupress.net/index.php/aisthesis/article/view/14097/13088> (site consulté le 12 janvier 2018).
  • [15]
    Ernest Renan, L’Avenir de la science, in Œuvres complètes de Ernest Renan, t. III, Paris, Calmann-Lévy, 1949, p. 882.
  • [16]
    Ibid.
  • [17]
    Kendall Walton, « Catégories de l’art », Esthétique et poétique, textes réunis par G. Genette, Paris, Seuil, 1992.
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