Couverture de NRE_019

Article de revue

La poïétique d’Étienne Souriau

Étienne Souriau’s poïetic

Pages 13 à 21

Notes

  • [1]
    René Passeron (dir.), Recherches poïétiques, t. I., Paris, Klincksieck, 1975, p. 14.
  • [2]
    Les informations qui suivent sont extraites du travail des archivistes du CNRS dans le fonds légué par l’IESA et versé aux Archives nationales. On en trouvera une version plus complète dans « ACTE… Un peu d’histoire », à l’adresse : <http://www.institut-acte.cnrs.fr/blog/bienvenue-sur-le-site-de-acte/>.
  • [3]
    Lilianne Brion-Guerry (dir.), L’Année 1913. Les formes esthétiques de l’œuvre d’art à la veille de la première guerre mondiale, t. I-II, Paris, Klincksieck, 1971.
  • [4]
    Étienne Souriau, « La notion d’œuvre », in Recherches poïétiques, op. cit., pp. 214-223.
  • [5]
    Aristote, Éthique à Nicomaque, trad. Tricot, Paris, Vrin, 1979, pp. 282-285.
  • [6]
    Étienne Souriau, « La notion d’œuvre », op. cit., p. 215.
  • [7]
    Paul Valéry, « L’Homme et la Coquille », Œuvres, I, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1937, p. 99.
  • [8]
    Étienne Souriau, ibid.
  • [9]
    Emmanuel Kant, Fondements de la métaphysique des mœurs, trad. Delbos, Delagrave, 1907, p. 149.
  • [10]
    Étienne Souriau, La Correspondance des arts. Éléments d’esthétique comparée, Paris, Flammarion, coll. « Bibliothèque de philosophie scientifique », 1947, p. 49.

1Ce titre peut surprendre car c’est avant tout à l’esthétique qu’on pense dès qu’il s’agit d’Étienne Souriau, et pourtant je voudrais par là affirmer qu’il a eu non seulement une grande importance dans la formation des concepts essentiels de la poïétique, mais aussi que dans ses écrits se trouvent nombre des ferments des recherches ultérieures sur la création.

2René Passeron, reprenant l’approche poïétique moins d’une quarantaine d’années après le Discours au Collège de France de Valéry (1937) la définit ainsi : « Appelons poïétique l’ensemble des études qui portent sur l’instauration de l’œuvre, et notamment de l’œuvre d’art [1]. » Par le terme d’instauration, Passeron d’emblée se réfère à Souriau dans la définition même de la poïétique. On pourrait multiplier les exemples et nous y reviendrons tout à l’heure.

3Mais en tant qu’actuel directeur de l’institut ACTE CNRS – université de Paris I et donc portant modestement la responsabilité de l’héritage institutionnel de l’Institut d’esthétique créé par Étienne Souriau, je voudrais, pour commencer, revenir sur la généalogie de la poïétique telle qu’elle a pu se développer depuis les années 1960. Et à travers ce parcours, soulever certaines problématiques qui n’ont pas manqué de faire débat et même division, jusqu’en 2012, date à laquelle nous avons fondé l’institut ACTE.

4Les éléments que je vais rapidement évoquer sont le résultat de l’analyse des archives conservées par l’Institut et ses tutelles (CNRS, université de Paris I), et sur le recueil des témoignages des acteurs de son histoire [2].

5Repartons de l’IESA : l’Institut d’esthétique et des sciences de l’art voit officiellement le jour en 1960 à l’initiative d’Étienne Souriau. Dépendant de ce qui était à l’époque l’université de Paris et caractérisé dès l’origine par sa pluridisciplinarité, le nouvel institut de recherche entend conjuguer l’emploi des méthodes traditionnelles de l’esthétique philosophique, historique et critique, avec l’utilisation des techniques expérimentales les plus avancées. À une époque où l’Amérique du Nord exerce son hégémonie dans ce domaine, il constitue un exemple rare d’initiative européenne et s’impose de fait comme un modèle à suivre. Étienne Souriau, je le rappelle, membre de l’Institut, directeur de l’IESA, président du jury de l’agrégation de philosophie et président de la section « Psychologie et philosophie » du CNRS, a ainsi permis à l’esthétique de reprendre une place dans le cadre général de la recherche en philosophie.

6L’Institut s’installe tout d’abord dans des locaux situés au 16 de la rue Chaptal, à Paris. Les chercheurs français et étrangers de l’Institut se regroupent alors en deux équipes.

7D’une part, les chercheurs de l’équipe d’esthétique générale du CNRS, constituée comme groupe de recherche en 1968. Le « GR 10 » est alors placé sous la double responsabilité d’Étienne Souriau et de Liliane Brion-Guerry, directrice de recherche au CNRS. L’équipe acquiert son renom dès 1969 avec la préparation de l’ouvrage collectif L’Année 1913[3]. Les formes esthétiques dans les différents arts à la veille du premier conflit mondial (trois volumes parus entre 1971 et 1973). Elle travaille en parallèle, dans les années 1970-1971, sur le concept de « poïétique », comme cadre d’étude de la création des différents arts.

8Jusqu’à la fin de sa vie, en 1979, Étienne Souriau dirige les séminaires du GR 10, qui se déroulent une fois sur deux dans son appartement de la rue Boulard à Paris. L’originalité de son groupe tient notamment à la diversité des chercheurs qui le composent : spécialistes de la littérature, de la musique, de la peinture, de la poésie, qui confrontent leur savoir, leurs problèmes et leurs expériences personnelles – souvent celles de créateurs – afin d’opérer les synthèses possibles entre des domaines des arts techniquement différents et d’en tirer les leçons sur le plan de l’esthétique philosophique. C’est là un point historique capital que cette mise en relation directe entre les artistes, les praticiens et les esthéticiens théoriciens. Ce sont à mon avis les prémisses à la fois de ce qui va être au fondement de l’UER des arts plastiques et sciences de l’art de Paris-I et de ce qui est aujourd’hui l’institut ACTE, acronyme de Arts/Créations/Théories/Esthétiques.

9Par ailleurs, il y a aussi le laboratoire de psychologie de la culture et esthétique expérimentale. Mais cela concerne moins la poïétique que la psychologie de la perception.

10Les locaux de la rue Chaptal abritent également d’autres groupes de travail notamment celui œuvrant à l’élaboration du Vocabulaire d’esthétique, sous la direction d’Étienne Souriau. Ils accueillent également les secrétariats de La Revue d’esthétique, fondée en 1948, et Scientific Aesthetics, créée par Robert Francès en 1964. On perçoit là l’étendue des préoccupations heuristiques inspirées par Souriau.

11Dans le courant des années 1970, l’IESA rejoint le centre Saint-Charles de l’université de Paris I, dans le XVe arrondissement. René Passeron, directeur de recherche au CNRS, est élu à sa tête en 1975, et devient également directeur du GR 10 après le décès d’Étienne Souriau. Sous sa responsabilité, l’Institut reste constitué de trois équipes (« recherches poïétiques » dir. René Passeron, « textes théoriques » dir. Liliane Brion-Guerry, « vocabulaire d’esthétique », qui sera continué en externe par Anne Souriau). Il abrite aussi la bibliothèque Souriau.

12Mais une rupture survient au sein du GR 10 au cours des années 1979-1985, qui conduit finalement à sa dislocation. Dès 1979, René Passeron remarque que l’apport d’Étienne Souriau à l’esthétique est en train de se diviser en deux axes : d’une part une étude scientifique, et souvent expérimentale des phénomènes psychologiques de sensorialité et de sensibilité, d’autre part, une étude anthropologique et une réflexion axiologique sur les conduites créatrices.

13La scission entre « poïétique » et « sémiotique » devient effective en 1981.

14La situation évolue en deux sens opposés. Les chercheurs pratiquant les méthodes de l’analyse textuelle, principalement Raymond Bellour et Tzvetan Todorov, songent à quitter le GR 10 pour s’intégrer à une équipe « Arts et langage », en voie de constitution à l’EHESS, tandis qu’un regroupement s’opère autour de la poïétique.

15Avec le départ à la retraite de René Passeron, en octobre 1989, l’unité n’est pas renouvelée par le CNRS. Elle est remplacée par une unité de recherche associée « Esthétique des arts contemporains », dirigée par Bernard Teyssèdre.

16Au début des années 1990, après la création du CRAL à l’EHESS, l’IESA se réorganise mais va néanmoins continuer à en appeler à l’héritage de Souriau. Par la re-création de l’institut ACTE, suite à différentes déconvenues, le CNRS a évité la disparition d’une partie importante de l’héritage de Souriau.

17Sur un plan personnel, la première fois que j’ai lu Étienne Souriau, c’était en 1973 à la bibliothèque de la cité universitaire d’Antony. Il s’agissait de polycopiés dactylographiés de ses cours, concoctés par ses étudiants. Cette pensée n’était pas du tout à la mode en ces temps où parler de création était suspect et où la notion d’œuvre était quasiment proscrite du débat. Ces textes ont été pour moi très importants car ils ont préparé ma rencontre au même moment avec René Passeron qui s’appliquait à réinventer la poïétique comme philosophie de la création, revitalisant l’approche valérienne. Dans le premier volume de la série des Recherches poïétiques, le texte de Souriau intitulé « La notion d’œuvre » marque cette riche filiation. La collection de Klincksieck comprend d’ailleurs aussi bien des ouvrages de Mikel Dufrenne et d’Olivier Revault d’Allonnes qui sont des lieux de débat avec la pensée de Souriau. La manière dont Revault va au plus près de l’objet de ses analyses et dont Dufrenne met en place la notion de d’œuvre comme « pseudo-personne », montre bien, la place tutélaire que tient le locataire de la rue Boulard dans le champ de l’esthétique française contemporaine.

18Du reste, Souriau a contribué à féconder la poïétique tout en restant fondamentalement du côté de l’Aisthèsis. Passeron, parce qu’il est aussi artiste a adopté le point de vue du créateur, mais sans renoncer à réfléchir sur les fonctions de l’apparence et à ce que Valéry appelait l’esthésique.

19Le texte de Souriau intitulé « La notion d’œuvre [4] » est un riche exposé de ses réflexions sur la création à faire et en train de se faire, qui ne néglige pas la réception, mais la reconsidère à l’aune à la fois du projet et du trajet créateurs. Souriau, en un raccourci saisissant, présente une histoire philosophique de la notion d’œuvre en considérant le point de vue des créateurs et la force immanente des œuvres.

20Aussi, la poïétique étant toute du côté de l’instauration, et Passeron mettant l’œuvre au centre du dispositif poïétique, reprend-il la terminologie de Souriau.

21Pour bien distinguer dans l’instauration de l’œuvre, l’action, la production et la création ainsi que ce qui relève d’une genèse en regard de ce qui est de l’ordre d’une poïèse, Souriau se tourne vers Aristote. Non pas Aristote auteur de la Poétique, dit-il, mais plutôt celui de la Métaphysique et de l’Éthique à Nicomaque. Dans ce texte laconique et complexe, Aristote propose une définition de la tekhnè, recouvrant pour les Grecs autant les beaux-arts que les productions artisanales et techniques de l’homme. L’enjeu de ce texte par les distinctions qu’il opère est le suivant : en dehors de la theôria, science pure qui s’occupe du savoir sans tenir compte de son application, en dehors de la praxis, l’action, qui se développe par l’intervention de l’homme sur la réalité, Aristote considère un domaine, la poïèsis, domaine de l’art qui se distingue par sa fin : la production. Dans ce dernier cas, l’homme produit un objet dont il est lui-même le principe essentiel constituant comme l’objectivation de l’homme dans la réalité. Ainsi – et l’on retrouve clairement cette distinction traditionnelle chez Valéry puis chez Souriau, alors que les objets naturels détiennent en eux-mêmes leur principe, c’est-à-dire leur raison et leur cause –, « l’art concerne toujours un devenir, et, s’appliquer à un art, c’est considérer la façon d’amener à l’existence une de ces choses qui sont susceptibles d’être ou de n’être pas, mais dont le principe d’existence réside dans l’artiste et non dans la chose produite [5] ».

22Ainsi l’œuvre a sa cause formelle hors d’elle-même ; l’art relève donc non de l’action mais de la production. Comme nous l’explique É. Souriau, c’est dans sa Métaphysique qu’Aristote a traité cette question : Souriau précise que ergon signifie en grec « aussi bien l’ouvrage fait que le travail par lequel on le fait », « c’est pourquoi Aristote oppose les deux verbes poïein et prattein, faire et agir, le faire aboutissant à l’existence du poiema, la chose faite ». Double opposition de l’idée de faire avec non seulement l’agir mais encore « avec l’idée d’une genèse, d’une advenue à l’existence par suite d’une phusis, d’un processus naturel. […] C’est que l’œuvre d’art a sa cause formelle hors elle-même. La graine qui germe a en elle-même la cause formelle de la plante qui va pousser. Mais la statue n’a pas en elle-même la cause de sa forme ; c’est la volonté de l’artiste qui lui impose cette forme [6] ». Dans L’Homme et la Coquille, Valéry avait déjà magistralement développé ce thème : « qui donc a fait ceci ? », se demande-t-il observant un coquillage, son « premier mouvement d’esprit a été de songer au Faire », car pour lui « l’idée de faire est la première et la plus humaine. Expliquer, ce n’est jamais que décrire une manière de Faire : ce n’est que refaire par la pensée ». Autre questionnement plus loin… « À quoi reconnaissons-nous qu’un objet donné est ou non fait par un homme ? » Contrairement à la « nature vivante » du mollusque qui sans repentir, sans réserve, sans retouche, distille sa coquille indéfiniment, l’œuvre humaine commence à partir de diverses libertés de matière […] ; liberté de figure, liberté de durée, toutes choses qui semblent interdites au mollusque. […] La fabrication de la coquille est chose vécue et non faite : rien de plus opposé à notre acte articulé, précédé d’une fin et opérant comme cause [7]. Souriau en conclut que « c’est le double contraste avec [d’un côté] la genèse naturelle et [de l’autre] avec l’action qui n’instaure rien en dehors d’elle-même par où se définit la poïétique [8] ».

23Si la notion d’œuvre se trouve au centre de la poïétique, en art, créer, n’est-ce pas « mettre en œuvre » plus qu’instaurer. Le verbe Œuvrer est aussi une option. La mise en œuvre a l’avantage de focaliser sur le trajet dans son mouvement, là où « instaurer » suppose une forte autorité performative.

24Il y a une décision juridique, institutionnelle, presque officielle dans l’instauration qui convient bien à l’optique globale de Souriau mais comment un artiste, en proie au négatif, à l’errance, au repentir, à tous les hasards et surprises de la création pourrait-il se reconnaître pleinement dans cette notion ? Imagine-t-on Delacroix, Miró ou Bacon, pour prendre trois exemples de récits poïétiques, se définir comme « instaurateurs » d’œuvres ? Plus que la pompe que suggère le mot, c’est la trajectoire univoque qui est gênante.

25Bien entendu cette notion a aussi ses vertus car elle pose un acte qui fait passer de l’indétermination et du caractère fugace d’une pensée à une advenue dans le monde des faits. Ce passage à l’acte, quelle que soit sa fragilité, est essentiel pour qu’il y ait existence d’œuvre et le mode d’existence de l’œuvre passant de l’œuvre à faire à son accomplissement, nécessite absolument de sauter le pas. Il existe certes des « artistes sans œuvres » comme l’a montré Jouanais, mais c’est l’existence même de l’artiste qui en devient le subjectile. On pense par exemple à « Quand les attitudes deviennent formes », pour reprendre l’heureuse formule de la fameuse exposition de 1969 par laquelle son commissaire Harald Szeemann a su cristalliser le début d’une nouvelle ère pour l’art contemporain.

26Voyons alors les mots : si production est trop général et finalement réducteur, si élaboration ou construction concernent plus directement le faire, on pourra leur préférer instauration pour marquer le caractère positif philosophiquement de l’acte créateur. En effet, même soustractif, un acte en tant qu’acte est toujours positif. On pourrait aussi proposer « réaliser » et « réalisation », moins solennels et plus concrets mais sont-ils trop connotés du côté de l’audio-visuel ?

27Par la volonté, l’intentionnalité, le caractère volontiers performatif qu’il sous-entend, le terme instauration, peut convenir à la création humaine en général. Si pour l’art, il présente les inconvénients que je viens de signaler, quand il s’agit par exemple de la République comme institution singulière qui compromet ses auteurs et dont l’abolition nous mettrait en deuil, il est tout à fait opérant. Ainsi faire exister une œuvre humaine, artistique ou pas, nécessite sa manifestation unique, l’implication de son ou ses auteurs et que l’œuvre soit comme une personne qui nous manquerait si elle venait à disparaître.

28C’est un autre point que je voudrais discuter que cette notion d’œuvre comme « personne » qu’avance Souriau. Passeron a préféré le terme de « pseudo-personne » repris de Mikel Dufrenne. Donner à un artefact le statut d’une personne n’est pas pour Souriau d’ordre métaphorique mais juridique et moral. Il s’agit de protéger l’œuvre comme une personne, c’est-à-dire à l’instar de Kant et de l’impératif catégorique (où les personnes sont des fins en soi), et selon l’impératif pratique : « Agis de telle sorte que tu traites l’humanité aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre toujours en même temps comme une fin, et jamais simplement comme un moyen [9]. » En même temps pour Kant, sont appelées « personne » des êtres raisonnables, ce qui les distingue des choses qui sont des moyens. N’est-il donc pas plus prudent de parler de « pseudo-personne » que de personne quand il s’agit de qualifier les œuvres ?

29Remarquons qu’à l’heure où nos ingénieurs se demandent comment empêcher les dérives d’une intelligence artificielle capable de s’autoprogrammer, la question se pose avec une nouvelle acuité.

30Toutefois, la personnification intégrale de l’œuvre et le statut de quasi-sujet que cela lui confère semblent non seulement poser un problème ontologique, mais aussi fermer la porte à des types d’œuvres qui échapperaient à ce système de pensée. Le principe de reconnaissance humaine nous induit à tout rapporter à notre propre existence : dès que nous nommons un animal, il devient pour nous un être avec une identité sur lequel nous projetons des affects analogues à ceux d’un humain. Or bien des artistes ont essayé, sans toujours y parvenir, d’échapper à cet anthropomorphisme qui colle à la peau de tout ce que nous envisageons et convoitons. De là à faire de l’œuvre une « personne », il n’y a qu’un pas que Souriau franchit quand par exemple il parle de la Pathétique comme présence équivalente à celle des personnes : « Un de mes amis est au piano. J’attends. Voici les trois premières mesures de la Pathétique. Bien que la porte ne soit pas ouverte, quelqu’un est entré. Nous sommes trois ici : mon ami ; moi ; et la Pathétique[10]. »

31Il y aurait beaucoup à dire encore sur l’apport de Souriau à la poïétique. Par les questions de l’instauration, la notion d’œuvre, ou les modes d’existence de l’œuvre à faire, il a largement contribué après Valéry et avant Passeron à orienter notre attention d’abord sur la concrète relation aux œuvres et en particulier aux œuvres artistiques ; il a su fédérer autour de lui et après lui le meilleur de l’esthétique française en lui donnant un avenir philosophique et institutionnel ; il a brisé le carcan disciplinaire en cultivant la « correspondance des arts ». S’il n’y a pas à proprement parler une poïétique d’Étienne Souriau, il est possible que, sans lui, la poïétique ne se serait pas retrouvée.


Date de mise en ligne : 02/10/2017

https://doi.org/10.3917/nre.019.0013

Notes

  • [1]
    René Passeron (dir.), Recherches poïétiques, t. I., Paris, Klincksieck, 1975, p. 14.
  • [2]
    Les informations qui suivent sont extraites du travail des archivistes du CNRS dans le fonds légué par l’IESA et versé aux Archives nationales. On en trouvera une version plus complète dans « ACTE… Un peu d’histoire », à l’adresse : <http://www.institut-acte.cnrs.fr/blog/bienvenue-sur-le-site-de-acte/>.
  • [3]
    Lilianne Brion-Guerry (dir.), L’Année 1913. Les formes esthétiques de l’œuvre d’art à la veille de la première guerre mondiale, t. I-II, Paris, Klincksieck, 1971.
  • [4]
    Étienne Souriau, « La notion d’œuvre », in Recherches poïétiques, op. cit., pp. 214-223.
  • [5]
    Aristote, Éthique à Nicomaque, trad. Tricot, Paris, Vrin, 1979, pp. 282-285.
  • [6]
    Étienne Souriau, « La notion d’œuvre », op. cit., p. 215.
  • [7]
    Paul Valéry, « L’Homme et la Coquille », Œuvres, I, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1937, p. 99.
  • [8]
    Étienne Souriau, ibid.
  • [9]
    Emmanuel Kant, Fondements de la métaphysique des mœurs, trad. Delbos, Delagrave, 1907, p. 149.
  • [10]
    Étienne Souriau, La Correspondance des arts. Éléments d’esthétique comparée, Paris, Flammarion, coll. « Bibliothèque de philosophie scientifique », 1947, p. 49.

Domaines

Sciences Humaines et Sociales

Sciences, techniques et médecine

Droit et Administration

bb.footer.alt.logo.cairn

Cairn.info, plateforme de référence pour les publications scientifiques francophones, vise à favoriser la découverte d’une recherche de qualité tout en cultivant l’indépendance et la diversité des acteurs de l’écosystème du savoir.

Retrouvez Cairn.info sur

Avec le soutien de

18.97.14.86

Accès institutions

Rechercher

Toutes les institutions