Notes
-
[1]
Dans le numéro 29 (juin 1997) de nord’, Paul Renard a consacré une étude à l’une des pièces du xviiie siècle consacrée au sujet, Le Siège de Calais de De Belloy (1765). Nous y renvoyons. La même année qu’était donnée cette première tragédie « nationale » élaborée pour sauver le genre par l’exploitation d’épisodes glorieux de notre histoire, était aussi publié Les Décius français, par Du Rozoi. On trouvera dans l’« Anthologie littéraire » le compte rendu que la Correspondance littéraire de Grimm propose de la publication-représentation de ces deux œuvres mises rapport par elle avec Le Siège de Calais de Madame de Tencin (1739), nouvelle galante, admirée de Voltaire, qui mêle événements historiques et aventures amoureuses. On lira également des extraits de celle-ci dans l’« Anthologie ». (Dans cette introduction, l’« * » à la suite des œuvres mentionnées indique qu’on en retrouvera des extraits dans la dite « Anthologie »).
-
[2]
Son travail constitue ainsi un clin d’œil à un Calaisien trop mal connu : Pierre-Antoine de La Place (1707-1793), favori de la Pompadour et secrétaire de l’Académie d’Arras. Grand passeur de littérature anglaise en France, il fut le traducteur de Shakespeare (1745-9, 8 volumes), de l’Oronoko d’Aphra Benn (1756), de la Venise sauvée d’Otway (1772), ou encore de l’Hermippus Redivivus ou le triomphe du sage sur la vieillesse et le tombeau de Cohausen (1789).
-
[3]
Dans son Grand Testament, Villon ne fait-il pas, sur trois huitains, à (un) « Jehan de Calais » un de ses plus grands legs lui donnant pouvoir de commenter et gloser son œuvre :
CLX.
Pour ce que sçait bien mon entente, Jehan de Calays, honnorable homme, Qui ne me veit des ans a trente, Et ne sçait comment je me nomme, De tout ce Testament, en somme, S’aucune y a difficulté, Oster jusqu’au rez d’une pomme Je luy en donne faculté.
De le gloser et commenter, De le diffinir ou prescripre, Diminuer ou augmenter ; De le canceller ou transcripre De sa main, ne sceust-il escripre ; Interpreter, et donner sens, A son plaisir, meilleur ou pire ; A tout ceci je m’y consens.
Et s’aucun, dont n’ay congnoissance, Estoit allé de mort à vie, Audict Calais donne puissance, Affin que l’ordre soit suyvie Et mon ordonnance assouvie, Que ceste aulmosne ailleurs transporte, Sans se l’appliquer par envie ; A son ame je m’en rapporte. -
[4]
Jean Castilhon, Histoire de Jean de Calais. Sur de nouveaux mémoires (1770). Il y eut plusieurs rééditions de ce texte dont une à Liège en 1787. Nous lui empruntons notre citation (page 1). Cette version de l’histoire de Jean de Calais reprend celle, « originale », de Madame de Gomez dans ses Journées amusantes (1722). Disant s’inspirer d’une « Histoire fabuleuse des rois de Portugal », l’auteur avait composé un conte sur le motif de la « princesse (ici du Portugal) sauvée (par le héros calaisien) et épousée (par lui, malgré l’opposition de son père et d’un rival) ». La version initiale ne contenait pas l’éloge de Calais que nous citons – tout en situant une part de l’action dans cette ville. On notera que Madame de Gomez est aussi l’auteur d’une Histoire d’Eustache de Saint-Pierre et de Beatrix de Guînes au siège de Calais publiée en 1737, intéressante à mentionner pour apprécier l’importance de l’événement dans la littérature française : l’auteur y met en scène deux amoureux, Amaury, fils d’Eustache de Calais, et Beatrix de Guînes, séparés par les nécessités de la guerre contre les Anglais et la défense de Calais qui, une fois la ville prise, se retrouvent, Beatrix ayant obtenu la grâce des bourgeois.
-
[5]
G. Simenon, « Mademoiselle Berthe et son amant », in Les Silences de Maigret (Bruxelles, 1942). Cette histoire fait partie des Nouvelles de Simenon publiées par Omnibus au tome X de Tout Maigret (février 2008). On sait d’autre part que le criminel de guerre qui est le narrateur-protagoniste des Bienveillantes de Jonathan Little (2006) vit, sous les traits d’un industriel, dans une ville du Nord où l’on fabrique le tulle et qu’il s’agit vraisemblablement de Calais…
-
[6]
Ph. Bouin, Comptine en plomb (Archipoche, 2009).
-
[7]
Page 356.
-
[8]
C’est par là que, chez l’abbé Prévost*, passe le Chevalier des Grieux amoureux de Manon Lescaut, et, dans la réalité, Rousseau et Stendhal (cf. Souvenirs d’Egotisme*) se rendant en Angleterre ou Chateaubriand, en revenant (cf. Mémoires d’Outre-Tombe*).
-
[9]
Smaïn Laacher, Après Sangatte… nouvelles immigrations nouveaux enjeux (La dispute, collection « Comptoir de la politique », 2002).
-
[10]
Denis Lecat, En Regard de Sangatte (L’Églantine, 2002).
-
[11]
Alix Clémence, Sangatte express (Lyon, Jacques André éditeur, 2006).
-
[12]
Lancelot Hamelin, Vraiment un homme Théâtre Avant propos de Hélène Cixous (Quartett, 2011).
-
[13]
Voir aussi de Paul Léautaud, Lettres à ma mère (Mercure de France 1956) et l’étude sur « L’inconnue de Calais, d’après l’œuvre de Paul Léautaud » in Cahiers Paul Léautaud numéro 6 (1989).
-
[14]
Stéphane Audeguy, L’Enfant du Carnaval (Gallimard, 2009). Le titre de cet essai est emprunté à Pigault-Lebrun lui-même (cf. infra).
-
[15]
Il était impossible de consacrer un article à chacun des aspects de Calais ni à tous les auteurs qui en ont parlé. Essayer de combler ces lacunes est une des fonctions de notre « Anthologie ». Outre des extraits de certains des écrivains mentionnés plus haut, on y trouvera des textes de Froissart sur le siège de Calais, de Victor Hugo sur sa visite de la ville et les alentours, de poètes-chansonniers du début du xx e siècle déplorant le naufrage du Pluviôse. Pour des raisons de place et de cohérence nous avons limité nos références à des auteurs français. L’anthologie s’articulera autour de trois pôles : « Calais, ville à (re)prendre », essentiellement sous le signe de ses sièges successifs ; « Calais, ville-étape » où l’on embarque, débarque et séjourne : Rousseau y est passé et Louis XVIII y arrive le 18 avril 1814, retour d’exil ; enfin, « Calais, entre terre et mer », synthétisant l’ouverture (pour le meilleur et le pire) de la ville sur l’eau et ses attaches à l’arrière-pays.
-
[16]
C’est à Magali Domain que ce numéro doit une partie de ses plus belles illustrations puisqu’elle a bien voulu que nous reproduisions à la fois la gravure de l’église Notre-Dame et le très rare portrait de Pigault-Lebrun jeune qui font partie de sa collection personnelle. Nous l’en remercions.
À la mémoire de Georges et de Simonne Leroy, autrefois Calaisiens
1 Rompant avec son habitude de numéros consacrés à des mouvements littéraires, à des genres et, surtout, à des écrivains, notre revue a voulu consacrer à une ville de notre région la totalité de son présent dossier.
2 Et du point de vue littéraire, Calais est vite apparue comme une cité de choix, à la fois une et diverse – témoins ses multiples « quartiers », dont le Courgain est peut-être parmi les plus connus. C’est en tout cas à ce dernier quartier que Jacques Landrecies (Université de Lille III), s’intéressera du point de vue de la littérature picarde dont il est spécialiste, en se demandant s’il s’agit là de « l’unique objet de la littérature picarde calaisienne ».
3 L’épisode de sa prise par les Anglais en 1347 et le dévouement héroïque de ses « Six bourgeois » en a fait, du xiv e siècle au xxe siècle, le sujet de chroniques, de nouvelles et de pièces de théâtre [1]. Monique Dubar (Université de Lille III) montrera ici l’écho de cette inspiration jusque dans le théâtre étranger, en étudiant une pièce de l’écrivain allemand Georg Kaiser (1913). Mais c’est aussi de l’autre côté du Channel – voire de l’Atlantique – que Calais, pour ces raisons historiques, est devenu un motif poétique : Gilles Bertheau (Université François Rabelais – Tours) en a étudié pour nous les multiples figures dans les œuvres de poètes anglo-saxons, essentiellement des xixe et xx e siècles, dont il propose de manière intéressante une traduction inédite de plusieurs de leurs pièces [2].
4 Entre vérité et fiction, l’importance littéraire de la ville dépasse cependant l’illustre épisode : sa reconquête en 1558 a ainsi donné lieu à d’importants poèmes célébrant ce retour à la France*. Auparavant, au xiv e siècle, Eustache Deschamps en avait fait le sujet de plusieurs de ses pièces. Miren Lacassagne (Université de Reims Champagne-Ardenne) nous en propose ici une anthologie commentée. On sait aussi que, depuis le Moyen Âge, la mythique figure de Jean de Calais, inspirée du « marin-corsaire » Jehan Pédrogue (fin du xiii e siècle et début du xive), hante notre littérature populaire [3]. Propagée par les contes bleus, c’est elle qui permet à Jean Castilhon de célébrer encore avec enthousiasme (en 1770) la patrie bien réelle de ce personnage fictif :
La ville de Calais sera à jamais mémorable par les exemples de vertus qu’elle a donnés. Le dévoûment de ses sept Citoyens qui firent le sacrifice de leur vie, pour sauver leurs compatriotes, qu’Édouard voulait livrer au carnage, l’a immortalisée. Jean de Calais, avant cette époque, est un des Héros qui avait le plus contribué à sa gloire. Le commerce et la navigation firent, de tout temps, la principale occupation des Calaisiens [4].
6 Moins glorieusement certes, c’est encore à Calais que, chez Simenon, jeune malfrat en fuite, Albert Marcinelle, écrit qu’il se trouve à sa jeune maîtresse :
« Ma petite Berthe,
Comme tu le verras d’après cette lettre, je suis à Calais, d’où il faut que je passe la frontière au plus tôt… Tu n’as qu’à mettre dans L’Intran une annonce disant : “Albert, tel jour, telle heure”, et je serai à la gare de Calais [5] ».
8 Développant ces ressources « noires » de la ville, Philippe Bouin y a d’ailleurs situé tout récemment la totalité de son roman policier (« Prix polar Cognac », 2008) Comptine en plomb [6], qui commence en 1965 par une série de meurtres mystérieux et déroule sa sombre trame jusqu’à l’épilogue, 40 ans plus tard, quand une des héroïnes revient dans ce qui est devenu « pour des centaines d’exilés l’ultime port de l’espoir » [7].
9 C’est par cette formule rappeler, si besoin en était, que Calais est évidemment une ville de passage : vers et de l’Angleterre pour les multiples voyageurs qui y font étape [8]. On verra dans l’article de Christian Leroy sur Marée fraîche Vin de champagne de Pierre Hamp comment l’auteur y en scène l’activité commerciale de « Calais-triage » pour opposer l’activité portuaire de la ville active, symbole de la « peine des hommes », à sa plage « oisive ».
10 D’autre part, dans les années 2000, à la suite de l’ouverture en 1999 du centre d’hébergement et d’accueil d’urgence humanitaire de Sangatte puis de sa fermeture en 2002, s’est aussi développée une littérature mettant en scène la foule des migrants échouée là faute de ne pouvoir passer en Grande-Bretagne. Littérature sociologique réfléchissant, comme dans Après Sangatte de Smaïn Laacher, sur les « nouvelles immigrations » et leurs « nouveaux enjeux » [9]; littérature engagée et de témoignage comme En regard de Sangatte dont l’auteur, Denis Lecat,
Un jour [a] décidé d’aller voir ce qui ce passait à Sangatte. De [s]es propres yeux. De [s]on regard neuf et naïf, de [s]a niaiserie poétique, de [s]es angoisses, de [s]son amour, de [s]on ignorance et de [s]a connaissance sont sortis,
12explique-t-il,
ces textes qui racontent, à dates sporadiques, le parcours et le cheminement qui [l]’ont amené à [n]ous conter cela : cette aventure tranquille. Ce qui devait en advenir [10].
14 Signe de l’émergence d’un « genre » qu’on appellerait « littérature-Sangatte » parallèle à une littérature d’inspiration strictement calaisienne mais évidemment non sans rapport avec la ville, des ouvrages pour la jeunesse ont été publiés sur le sujet comme le Sangatte express d’Alix Clémence [11], qui raconte la rencontre d’Alice, jeune fugueuse, venue à Calais pour y rencontrer le chanteur dont elle est une fan et qui, déçue par son idole, erre entre Calais, Blériot-plage et Sangatte jusqu’à rencontrer le jeune Illi, adolescent bulgare qui a fui avec ses parents une vie sans espoirs. À l’autre pôle de cette littérature, il y aurait bien sûr aussi à citer Vraiment un homme à Sangatte de Lancelot Hamelin qui retrouve la tradition d’un théâtre épique en vers pour mettre en scène trois personnages (Requeim, Julie et la Mouette) et célébrer ces réfugiés « portés au-dessus d’eux mêmes, en incandescence, appel[an]t leurs poètes et leurs chantres » comme le note Hélène Cixous en préface à ce très beau texte en huit chants (?) créé au Théâtre des Subsistances à Lyon en 2002 et publié en 2011 [12].
15 Mais ville des déchirements, Calais est aussi la ville des retrouvailles et des liens à nouveaux tissés comme pour Paul Léautaud qui, à l’occasion des obsèques de sa tante, y retrouve fugitivement sa mère, si longtemps perdue de vue et raconte cette histoire, en 1903, dans Le Petit Ami [13].
16 Calais est, enfin, la ville natale de Charles-Antoine-Guillaume Pigault de L’Épinoy, dit Pigault-Lebrun (1753-1835), que Stéphane Audeguy a récemment remis à l’honneur avec son essai L’Enfant du carnaval [14]. C’est à lui qu’est consacré le dossier central de ce numéro. On y trouvera une présentation, par Frédérique Péron, de « la vie et des aventures » de cet auteur parmi les plus lus de l’Empire et dont les Œuvres complètes (1822-1824) ne comportent pas moins de 20 volumes. Pour illustrer ce foisonnant génie, nous avons choisi deux œuvres, certes de jeunesse, mais qui valurent d’emblée à notre auteur une grande réputation : son premier roman, L’Enfant du carnaval (1796) que sous le titre « Un ambigu charmant », Frédérique Péron présente, en étudiant l’étonnant foisonnement des catégories romanesques dont se joue son auteur, au point de le faire échapper, à force de transgressions ludiques, toute tentative de classification. De son côté, Christian Leroy propose une analyse de Le Blanc et le Noir (1795), pièce anti-esclavagiste qui se fait aussi réflexion sur le langage dramatique et réinterprétation des années révolutionnaires. Enfin, Shelly Charles (Université de Paris IV-CNRS), dans « La faute à Pigault », aborde la question de la réception de Pigault au xix esiècle. Mais au lieu de s’appuyer, comme on le fait habituellement, sur un discours critique, elle fonde son étude sur la fiction. Elle analyse en effet la représentation du lecteur de Pigault-Lebrun dans Les Misérables de Victor Hugo, rappelant que chez les plus grands romanciers, cette figure du lecteur de Pigault est largement présente. On verra que, plaçant Thénardier, « lecteur infamant », au centre de son étude, elle aboutit à des conclusions qui ouvrent des pistes de réflexions particulièrement éclairantes quant à la position de Hugo, et plus largement, quant à la postérité de Pigault.
17 Telle est donc la ville dont ce numéro a voulu rendre compte d’un point de vue littéraire [15].
18 Considérant que comme pour un auteur ou un personnage, l’approche « biographie » est toujours éclairante, nous avons demandé à Magali Domain, historienne, Calaisienne et spécialiste de sa ville, de bien vouloir nous présenter Calais. Elle a accepté de le faire en choisissant le biais original de l’histoire de l’église Notre-Dame. C’est son article qui devait naturellement ouvrir le numéro, faisant se retrouver histoire et littérature, pour nous conduire du passé au présent – et à l’avenir de la ville [16]. Son article est suivi d’une étude de Philippe Lançon sur un album, Rue des Quatre coins, du chanteur Louis Arti consacré à Calais (« Calais, c’est ma ville ») preuve que la ville inspire, au-delà des seuls écrivains, tous les domaines artistiques : la chanson ici mais également naguère, et comment ne pas l’évoquer au terme de cette présentation, Rodin dont « Les Bourgeois » furent inaugurés à Calais en 1895.
19 Nous espérons que, retrouvant la périodicité habituelle de la revue, ce volume saura vous intéresser.
Notes
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[1]
Dans le numéro 29 (juin 1997) de nord’, Paul Renard a consacré une étude à l’une des pièces du xviiie siècle consacrée au sujet, Le Siège de Calais de De Belloy (1765). Nous y renvoyons. La même année qu’était donnée cette première tragédie « nationale » élaborée pour sauver le genre par l’exploitation d’épisodes glorieux de notre histoire, était aussi publié Les Décius français, par Du Rozoi. On trouvera dans l’« Anthologie littéraire » le compte rendu que la Correspondance littéraire de Grimm propose de la publication-représentation de ces deux œuvres mises rapport par elle avec Le Siège de Calais de Madame de Tencin (1739), nouvelle galante, admirée de Voltaire, qui mêle événements historiques et aventures amoureuses. On lira également des extraits de celle-ci dans l’« Anthologie ». (Dans cette introduction, l’« * » à la suite des œuvres mentionnées indique qu’on en retrouvera des extraits dans la dite « Anthologie »).
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[2]
Son travail constitue ainsi un clin d’œil à un Calaisien trop mal connu : Pierre-Antoine de La Place (1707-1793), favori de la Pompadour et secrétaire de l’Académie d’Arras. Grand passeur de littérature anglaise en France, il fut le traducteur de Shakespeare (1745-9, 8 volumes), de l’Oronoko d’Aphra Benn (1756), de la Venise sauvée d’Otway (1772), ou encore de l’Hermippus Redivivus ou le triomphe du sage sur la vieillesse et le tombeau de Cohausen (1789).
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[3]
Dans son Grand Testament, Villon ne fait-il pas, sur trois huitains, à (un) « Jehan de Calais » un de ses plus grands legs lui donnant pouvoir de commenter et gloser son œuvre :
CLX.
Pour ce que sçait bien mon entente, Jehan de Calays, honnorable homme, Qui ne me veit des ans a trente, Et ne sçait comment je me nomme, De tout ce Testament, en somme, S’aucune y a difficulté, Oster jusqu’au rez d’une pomme Je luy en donne faculté.
De le gloser et commenter, De le diffinir ou prescripre, Diminuer ou augmenter ; De le canceller ou transcripre De sa main, ne sceust-il escripre ; Interpreter, et donner sens, A son plaisir, meilleur ou pire ; A tout ceci je m’y consens.
Et s’aucun, dont n’ay congnoissance, Estoit allé de mort à vie, Audict Calais donne puissance, Affin que l’ordre soit suyvie Et mon ordonnance assouvie, Que ceste aulmosne ailleurs transporte, Sans se l’appliquer par envie ; A son ame je m’en rapporte. -
[4]
Jean Castilhon, Histoire de Jean de Calais. Sur de nouveaux mémoires (1770). Il y eut plusieurs rééditions de ce texte dont une à Liège en 1787. Nous lui empruntons notre citation (page 1). Cette version de l’histoire de Jean de Calais reprend celle, « originale », de Madame de Gomez dans ses Journées amusantes (1722). Disant s’inspirer d’une « Histoire fabuleuse des rois de Portugal », l’auteur avait composé un conte sur le motif de la « princesse (ici du Portugal) sauvée (par le héros calaisien) et épousée (par lui, malgré l’opposition de son père et d’un rival) ». La version initiale ne contenait pas l’éloge de Calais que nous citons – tout en situant une part de l’action dans cette ville. On notera que Madame de Gomez est aussi l’auteur d’une Histoire d’Eustache de Saint-Pierre et de Beatrix de Guînes au siège de Calais publiée en 1737, intéressante à mentionner pour apprécier l’importance de l’événement dans la littérature française : l’auteur y met en scène deux amoureux, Amaury, fils d’Eustache de Calais, et Beatrix de Guînes, séparés par les nécessités de la guerre contre les Anglais et la défense de Calais qui, une fois la ville prise, se retrouvent, Beatrix ayant obtenu la grâce des bourgeois.
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[5]
G. Simenon, « Mademoiselle Berthe et son amant », in Les Silences de Maigret (Bruxelles, 1942). Cette histoire fait partie des Nouvelles de Simenon publiées par Omnibus au tome X de Tout Maigret (février 2008). On sait d’autre part que le criminel de guerre qui est le narrateur-protagoniste des Bienveillantes de Jonathan Little (2006) vit, sous les traits d’un industriel, dans une ville du Nord où l’on fabrique le tulle et qu’il s’agit vraisemblablement de Calais…
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[6]
Ph. Bouin, Comptine en plomb (Archipoche, 2009).
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[7]
Page 356.
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[8]
C’est par là que, chez l’abbé Prévost*, passe le Chevalier des Grieux amoureux de Manon Lescaut, et, dans la réalité, Rousseau et Stendhal (cf. Souvenirs d’Egotisme*) se rendant en Angleterre ou Chateaubriand, en revenant (cf. Mémoires d’Outre-Tombe*).
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[9]
Smaïn Laacher, Après Sangatte… nouvelles immigrations nouveaux enjeux (La dispute, collection « Comptoir de la politique », 2002).
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[10]
Denis Lecat, En Regard de Sangatte (L’Églantine, 2002).
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[11]
Alix Clémence, Sangatte express (Lyon, Jacques André éditeur, 2006).
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[12]
Lancelot Hamelin, Vraiment un homme Théâtre Avant propos de Hélène Cixous (Quartett, 2011).
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[13]
Voir aussi de Paul Léautaud, Lettres à ma mère (Mercure de France 1956) et l’étude sur « L’inconnue de Calais, d’après l’œuvre de Paul Léautaud » in Cahiers Paul Léautaud numéro 6 (1989).
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[14]
Stéphane Audeguy, L’Enfant du Carnaval (Gallimard, 2009). Le titre de cet essai est emprunté à Pigault-Lebrun lui-même (cf. infra).
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Il était impossible de consacrer un article à chacun des aspects de Calais ni à tous les auteurs qui en ont parlé. Essayer de combler ces lacunes est une des fonctions de notre « Anthologie ». Outre des extraits de certains des écrivains mentionnés plus haut, on y trouvera des textes de Froissart sur le siège de Calais, de Victor Hugo sur sa visite de la ville et les alentours, de poètes-chansonniers du début du xx e siècle déplorant le naufrage du Pluviôse. Pour des raisons de place et de cohérence nous avons limité nos références à des auteurs français. L’anthologie s’articulera autour de trois pôles : « Calais, ville à (re)prendre », essentiellement sous le signe de ses sièges successifs ; « Calais, ville-étape » où l’on embarque, débarque et séjourne : Rousseau y est passé et Louis XVIII y arrive le 18 avril 1814, retour d’exil ; enfin, « Calais, entre terre et mer », synthétisant l’ouverture (pour le meilleur et le pire) de la ville sur l’eau et ses attaches à l’arrière-pays.
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[16]
C’est à Magali Domain que ce numéro doit une partie de ses plus belles illustrations puisqu’elle a bien voulu que nous reproduisions à la fois la gravure de l’église Notre-Dame et le très rare portrait de Pigault-Lebrun jeune qui font partie de sa collection personnelle. Nous l’en remercions.