Résumé
En 2013, le gouvernement marocain a adopté la stratégie nationale d’immigration et d’asile (snia), inaugurant une nouvelle approche dans la gestion des migrations, laquelle consiste à déléguer davantage la coordination de cette politique publique aux autorités municipales et régionales. Cette réforme s’inscrit dans une tendance plus large à considérer les acteurs locaux comme des représentants du niveau de gouvernance le plus approprié et le plus efficace pour répondre aux défis migratoires actuels. L’Union européenne (ue), en particulier, promeut cette gouvernance décentralisée de la gestion migratoire et soutient ces réformes à travers sa coopération avec le Maroc. Pourtant, malgré les améliorations que lesdites réformes visent à apporter dans la gestion des migrations au Maroc, de grands défis demeurent. Notre étude s’intéresse aux agents locaux de la nouvelle gouvernance migratoire marocaine et propose d’examiner les contextes politiques dans lesquels ils agissent, ainsi que les enjeux concrets qui limitent la réalisation des objectifs annoncés dans la réforme de 2013. L’analyse de ce tournant « localiste » nous amène à formuler deux conclusions qui remettent en question les objectifs de « démocratisation » de la stratégie migratoire du Maroc. D’une part, la décentralisation de la gouvernance migratoire a surtout été déployée en réponse à la perception négative au niveau international de la gestion sécuritaire des migrations au Maroc. D’autre part, notre analyse révèle que le transfert de la gestion migratoire aux autorités locales s’est effectué à travers une « démocratisation » de façade. Enfin, nous mettons en garde contre le « piège localiste » [1] que doivent éviter les autorités publiques et les chercheurs.
Mots-clés
- Maroc
- municipalité
- politique locale
- politique migratoire