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Article de revue

L’influence de la variété et des usages des dispositifs de contrôle dans le pilotage de la performance globale : le cas d’un incubateur de startups

Pages 81 à 105

Notes

  • [1]
    Le nom de l’organisation ainsi que ceux des acteurs ont été modifiés afin de maintenir l’anonymat.

Introduction

1La planète brûle et les entreprises ont une part de responsabilité dans cette situation. Pour répondre au défi du Développement Durable (DD), elles ont donc un rôle à jouer en intégrant les préoccupations environnementales et sociales au cœur de leur stratégie. Auparavant focalisées sur leur performance économique, nombre d’entre elles se fixent désormais des objectifs de performance environnementale et sociale, afin d’obtenir une performance globale ou de DD (Capron & Quairel, 2006). Cependant, l’atteinte d’une performance globale ne peut se faire sans le renouvellement de la stratégie et son déploiement, notamment à l’aide de dispositifs de contrôle (Malmi & Brown, 2008) mobilisés selon différents usages (Simons, 1994).

2Le rôle des dispositifs de contrôle dans l’intégration du DD à la stratégie a été conceptualisé en envisageant différents scénarios (Gond et al., 2012). De manière empirique, certaines recherches questionnent également ce rôle en observant les pratiques organisationnelles, leurs conséquences et les limites de l’intégration. Ainsi, Essid et Berland (2011) mettent en avant le manque de temps des managers concernant l’utilisation des dispositifs de contrôle visant différentes performances et les changements qui en découlent en termes d’usages. Ce manque de temps conduirait les managers à donner la priorité aux usages diagnostiques contrôlant une performance non financière et à considérer un nombre restreint d’indicateurs. Renaud (2013b) identifie également plusieurs configurations d’usage interactif des dispositifs de contrôle dédiés à la performance environnementale. Dreveton (2009) se focalise quant à lui sur la construction des dispositifs de contrôle dédiés à la performance DD pour montrer comment les différentes visions du DD qu’en ont les acteurs influencent la conception de tels dispositifs.

3La littérature étudie donc surtout l’influence des usages, au détriment de la nature des dispositifs de contrôle sur l’intégration des performances (Essid & Berland, 2011 ; Renaud, 2013a, 2013b). En outre, le type de performance contrôlée (économique, environnementale et sociale) par chaque dispositif est relativement peu analysé, alors que cela peut influencer le renouvellement et le déploiement stratégique. En effet, certains dispositifs peuvent contrôler un ou plusieurs types de performance (Bon, 2009) en fonction de la manière dont les managers les construisent (Dreveton, 2009). Enfin, peu d’auteurs ont analysé empiriquement le rôle des usages diagnostique et interactif dans l’intégration du pilotage des performances économique, environnementale et sociale (Gond et al., 2012).

4En conséquence, cet article vise à approfondir ces différentes dimensions du pilotage d’une performance globale en répondant à la question de recherche suivante : Comment les dispositifs de contrôle et leurs usages permettent-ils la mise en œuvre et le renouvellement de stratégies centrées sur la performance globale ? À cette fin, nous avons conduit une recherche-action dans un incubateur de startups dédié à l’accompagnement d’entrepreneurs qui répondent à des problématiques environnementales et sociales. Cette recherche contribue à la littérature en montrant l’influence conjointe de différents types de dispositifs de contrôle (administratif et culturel en particulier), de la nature de la performance visée par ces dispositifs et du rôle de leurs usages (diagnostique et interactif) dans la mise en œuvre d’une stratégie orientée vers une performance globale. Elle contribue également à améliorer notre compréhension de la construction et de la mise en œuvre d’un package de contrôle (Malmi & Brown, 2008).

5La suite de l’article est organisée en quatre parties. La première partie présente le cadre théorique, la seconde le contexte empirique et la méthode d’analyse des données. La troisième partie présente les résultats, qui sont discutés dans la quatrième partie.

1 – Cadre théorique

6Pour comprendre les systèmes de contrôle à l’œuvre dans les organisations, la littérature établit une distinction entre les types de contrôle (administratifs, culturels, managériaux ou comptables fondés sur la mesure de performance) et leurs usages (formel ou informel, diagnostique ou interactif). La question de l’intégration du DD à la stratégie visant une performance globale, à la fois économique, environnementale et sociale (Naro & Noguera, 2008) implique donc de s’intéresser à ces deux dimensions. Piloter l’organisation et orienter les comportements en faveur de l’intégration du DD passe par la mise en place de différents dispositifs de contrôle, associés à différents types d’usages.

1.1 – La place du développement durable dans les packages de contrôle

7Le concept de « package de contrôle » (Malmi & Brown, 2008) est particulièrement approprié pour adopter une vision globale des différents dispositifs de contrôle et éviter une focalisation uniquement sur certains d’entre eux (Gond et al., 2012 ; Journeault, 2016). Il permet d’en faire une étude détaillée, d’analyser les relations entre les différents éléments du package et d’intégrer à l’analyse les dispositifs visant une performance environnementale ou sociale (Lueg & Radlach, 2016). Chaque catégorie du package de Malmi & Brown (2008) a pu être observée empiriquement concernant les dispositifs de contrôle dédiés à la performance DD, soulignant ainsi la pertinence de ce cadre conceptuel (Lueg & Radlach, 2016).

8Le package de contrôle est composé de cinq types de contrôle, recouvrant une relative variété de dispositifs. Le contrôle de type planification définit pour l’organisation des objectifs à différents horizons, incarnés notamment dans les plans et budgets intégrant des facteurs environnementaux (Alcouffe et al., 2013 ; Renaud, 2009). Le contrôle cybernétique s’appuie sur des objectifs et des indicateurs de performance mesurables et l’analyse périodique des résultats. Les indicateurs jouent un rôle clé pour permettre de détecter des déviations et mettre en place des actions correctives (Renaud, 2009 ; Travaillé et al., 2018). Le contrôle récompense influence la durée, l’intensité et la direction de l’effort en liant par exemple la rémunération aux objectifs environnementaux ou sociaux (Essid & Berland, 2011). Enfin, le contrôle administratif modifie les comportements individuels grâce à l’organisation du travail, la structure organisationnelle, les règles et les procédures. Les dispositifs relevant de ce type de contrôle peuvent favoriser la socialisation d’individus préoccupés par l’environnement (Gond et al., 2012). Cette socialisation passe également par des dispositifs de contrôle ancrés dans un contrôle culturel. Ce dernier repose sur l’ensemble des croyances et valeurs qui influencent les comportements des employés. Il se matérialise notamment à travers des chartes d’engagements DD (Arjaliès & Mundy, 2013) et s’élabore et se consolide notamment lors des rituels de socialisation tels que des séminaires de formation.

9Ces différents types de contrôle peuvent être dans une relation de complémentarité telle que mise en évidence par Simons (1995) concernant le contrôle administratif et le contrôle culturel, apparentés respectivement au système de limites et à celui de croyance. Le système de croyance encourage les individus dans la recherche de nouvelles opportunités dans un cadre de valeurs partagées. Le système de limites, formalisé dans des codes de conduite, des procédures administratives ou des règles de contrôle interne, restreint les domaines d’exploration possibles. Ces deux systèmes transforment ensemble un espace d’exploration sans limite en un domaine plus restreint. Les dispositifs de contrôle culturel jouent ainsi un rôle spécifique, façonnant les autres éléments du package et aidant à intégrer des principes environnementaux ou sociaux au sein de la culture organisationnelle (Strauß & Zecher, 2013). En définitive, il existe des dispositifs de contrôle variés pour piloter la performance DD (Allix-Desfautaux & Makany, 2015 ; Antheaume, 2013). Cependant, l’observation de l’ensemble des types de contrôle et de leur influence respective ou conjointe sur l’intégration des différentes performances reste limitée dans la littérature.

10Plusieurs études montrent que les dispositifs de contrôle orientés vers la performance économique sont d’une utilité limitée pour adresser les problématiques environnementales et/ou sociales (Crutzen et al., 2017 ; Durden, 2008 ; Gond et al., 2012). Pour répondre à ces dernières, une organisation doit donc déployer des dispositifs de contrôle DD spécifiques, articulant les différents types de performance visés (Antheaume, 2013 ; Journeault, 2016). Ainsi, certains dispositifs de contrôle DD soutiendraient des compétences environnementales distinctes et l’utilisation simultanée de plusieurs de ces dispositifs semblerait nécessaire pour intégrer réellement le DD dans les pratiques organisationnelles (Journeault et al., 2016). Un système de contrôle DD est ainsi défini par sa capacité à s’assurer que les comportements et les décisions des individus sont conformes aux objectifs et à la stratégie DD de l’organisation (Crutzen et al., 2017).

11La distinction entre les dispositifs focalisés sur la performance économique et ceux focalisés sur la performance DD peut sembler quelque peu artificielle. Or, l’approche par le package de Malmi & Brown (2008) justifie conceptuellement cette distinction. En effet, le package se définit comme un ensemble de dispositifs de contrôle développés et mis en œuvre à différents moments, par différents acteurs avec potentiellement différentes finalités. L’identification du type de performance contrôlée par chaque dispositif de contrôle peut donc s’avérer pertinente alors que cela est rarement pris en compte dans les études publiées à ce jour. Cette distinction est utile d’un point de vue analytique car elle permet d’identifier les dimensions de la stratégie centrées sur la performance globale que les managers essayent de piloter ainsi que les dispositifs de contrôle qu’ils mobilisent à cette fin. Enfin, certains dispositifs peuvent servir à contrôler les deux types de performance (Bon, 2009) en fonction de leur utilisation et de leur construction (Dreveton, 2009). Ainsi, prendre en compte le (ou les) type(s) de performance contrôlée(s) par un dispositif permet d’améliorer notre compréhension de l’intégration des performances.

12Les recherches sur les dispositifs de contrôle de la performance DD sont encore peu nombreuses (Crutzen et al., 2017) et se focalisent sur la dimension technique de ces dispositifs (Bouten & Hoozée, 2016). De plus, se contenter de vérifier la présence de tel ou tel dispositif de contrôle dans une organisation ne suffit pas pour expliquer en profondeur les problématiques de pilotage. L’étude des usages que font les managers de ces dispositifs pour piloter l’organisation est également fondamentale (Naro & Noguera, 2008 ; Simons, 1994 ; Travaillé et al., 2018).

1.2 – L’intégration du développement durable selon les usages des dispositifs de contrôle

13Pour mieux comprendre les difficultés à conjuguer des objectifs économiques, sociaux et environnementaux (Mousli, 2010), plusieurs recherches nous incitent à étudier les usages des dispositifs de contrôle, notamment lors de la formulation et de la mise en œuvre de la stratégie (Arjaliès & Mundy, 2013 ; Gond et al., 2012 ; Renaud & Berland, 2020). Dans ce domaine, les dispositifs de contrôle peuvent être utilisés par les managers de plusieurs manières (Essid & Berland, 2011 ; Renaud, 2013a). Simons (1994) fait notamment la distinction entre usage interactif et diagnostique (Tessier & Otley, 2012). Ces deux usages sont directement impliqués dans le processus stratégique : l’usage interactif lors de la formulation de la stratégie et son éventuel renouvellement (Renaud, 2013b), l’usage diagnostique lors de sa mise en œuvre (Naro & Travaillé, 2011a).

14Le contrôle interactif stimule l’émergence de la stratégie en réponse aux opportunités et aux menaces. Il dirige l’attention des managers vers les incertitudes et les aide à formuler des réponses à un environnement changeant. Cet usage sous-entend des interactions régulières entre les différents acteurs de l’organisation (Naro & Travaillé, 2019). L’usage interactif favorise les comportements opportunistes, focalise l’attention, améliore et guide les échanges entre les acteurs et promeut des réponses innovantes pour faire face aux incertitudes stratégiques (Gomez-Conde et al., 2019). Cet usage peut donc avoir des conséquences sur l’intégration des différentes performances. En effet, l’émergence d’une stratégie DD et l’intégration des différents objectifs sont vraisemblablement influencées par les managers qui utilisent le dispositif, notamment en fonction de l’importance qu’ils donnent aux différents types de performance et aux incertitudes stratégiques environnementales ou sociales (Essid & Berland, 2011 ; Gibassier & Alcouffe, 2018 ; Renaud, 2013b).

15Le contrôle diagnostique aide les managers dans la mise en œuvre de la stratégie, qu’elle soit centrée sur des objectifs économiques ou de DD (Gond et al., 2012). Les dispositifs de contrôle sont alors mobilisés pour corriger les actions individuelles, en les rendant visibles et en les alignant avec les objectifs stratégiques de l’organisation. Le contrôle diagnostique permet de suivre les résultats de l’organisation et de les corriger par rapport à des objectifs prédéfinis (Simons, 1994), notamment concernant les impacts environnementaux d’une activité (Renaud, 2009). L’usage diagnostique appuie le contrôle des résultats fondé sur la détection des déviations et la proposition de mesures correctives dans un cadre préétabli (Naro & Travaillé, 2011b). Il aide les managers à évaluer si la mise en œuvre de la stratégie est sur la bonne voie (Gomez-Conde et al., 2019). Les objectifs peuvent être à court ou long terme, financiers ou non financiers, éventuellement en comparant la performance organisationnelle à celle des concurrents (Arjaliès & Mundy, 2013). Le suivi de différents objectifs – économiques, environnementaux ou sociaux – dans le cadre d’un contrôle diagnostique peut entrainer des tensions et arbitrages lors de prises de décisions. Par exemple, les managers peuvent avoir tendance à se focaliser sur les objectifs économiques au détriment des objectifs environnementaux ou sociaux (Essid & Berland, 2011).

16En définitive, le cadre de Simons (1994, 1995) insiste sur la complémentarité des usages diagnostique et interactif des dispositifs de contrôle, considérant que par nature chaque dispositif n’a pas vocation à faire l’objet d’un seul type d’usage (diagnostique ou interactif). Ainsi, le contrôle cybernétique et le contrôle de type planification pourraient être considérés comme favorisant un usage diagnostique, permettant de vérifier la conformité des résultats à des objectifs préétablis. Or, ces deux types de contrôle peuvent également amener à un usage interactif qui conduise à la mise en question des objectifs et à un renouvellement stratégique. Simons (1995) souligne ainsi que tout système de contrôle faisant l’objet d’un usage diagnostique peut être rendu interactif par l’attention et le questionnement réguliers et continus des dirigeants. Usages diagnostique et interactif semblent devoir fonctionner de concert pour construire un cadre de contrôle efficace (Essid & Berland, 2011) et participer à la mise en œuvre et au suivi de la stratégie (Bedford & Malmi, 2015). Les usages des dispositifs de contrôle permettent donc d’éclairer la manière dont ces derniers peuvent aider à faire émerger (usage interactif) et à déployer (usage diagnostique) des stratégies centrées sur la performance globale (Bon, 2009 ; Gomez-Conde et al., 2019). Analyser le rôle de ces usages semble donc essentiel pour comprendre l’intégration des performances (Essid & Berland, 2011 ; Renaud, 2013b). Combinée au cadre conceptuel du package de contrôle, cette approche centrée sur les usages et la performance visée permet d’analyser finement la façon dont les dispositifs de contrôle peuvent favoriser l’émergence et la mise en œuvre d’une stratégie centrée sur la performance globale.

2 – Contexte et méthode

2.1 – Le cas d’un incubateur de développement durable

17L’organisation étudiée, nommée Incub[1], est un incubateur de startups dont l’objectif est d’accompagner des créateurs d’entreprise ayant un projet à dimension sociale et/ou environnementale. Pour remplir sa mission, Incub propose aux entrepreneurs différentes formes d’accompagnement : coaching, formations et, mise à disposition d’un bureau au sein d’un espace de travail commun et de ressources telles que des bases de données, organisation d’évènements… Ces services permettent aux créateurs d’entreprises d’interagir avec les autres entrepreneurs hébergés et avec l’équipe dirigeante pour un prix relativement modeste de 150 euros par mois.

18Incub a été fondé en tant qu’association par Ray en juillet 2017. Ce dernier considère qu’un tel statut est cohérent avec la stratégie et la mission d’Incub qui sont initialement orientées vers le DD. Ray est également propriétaire de l’entreprise qui héberge Incub dans ses locaux. Il n’intervient pas dans la gestion opérationnelle de l’incubateur et a préféré confier cette mission à Bob en le nommant président d’Incub. Bob est salarié de l’entreprise hébergeuse, il n’est pas rémunéré par Incub. La capacité d’Incub à payer un loyer à l’entreprise qui l’héberge constitue un enjeu majeur. Cette situation particulière permet à Ray d’exercer une certaine pression sur Incub et son équipe dirigeante. Dans la suite de cet article, nous désignons Ray comme « actionnaire » d’Incub pour souligner le caractère particulier de cette relation.

19Bob est un entrepreneur à succès qui dirigeait auparavant une start-up de vente de vêtements en ligne. Il se montre sensible à l’impact social et environnemental des organisations. Pour se faire aider dans la gestion et le développement d’Incub, Bob s’est adjoint les services de Tod, Vin et Mat. Tod est diplômé d’une école de commerce et a développé ses compétences professionnelles au sein de banques et de multinationales. Il n’est pas particulièrement intéressé par le DD et se décrit lui-même comme un « capitaliste ». Vin, le plus jeune de l’équipe, est titulaire d’un baccalauréat et n’a aucune expérience professionnelle au moment d’intégrer Incub. En parallèle de son activité chez Incub, il est fortement engagé en faveur du DD et participe activement à des mouvements de luttes sociales et environnementales. Mat, le premier auteur de cet article, réalise une thèse en contrôle de gestion et possède une expérience dans l’accompagnement d’entrepreneurs et la formation professionnelle. Sa présence au sein d’Incub s’explique par son intérêt pour le DD et sa volonté de mener une recherche-action dans le cadre de sa thèse. L’équipe dirigeante d’Incub est donc composée à sa création de quatre personnes : Bob, le président de l’association, Tod et Vin, deux consultants, et Mat, doctorant qui réalise une recherche-action.

2.2 – Recueil et analyse de données

20Les données ont été recueillies dans le cadre d’une recherche-action (Lukka & Vinnari, 2017) menée par Mat au sein d’Incub. Ce dernier a passé huit mois dans l’organisation, de juillet 2017 à février 2018, à raison de deux à trois jours de présence par semaine. Au cours de cette période, Mat a pu assister à la fois à la naissance et à la disparition de l’incubateur. En tant que membre à part entière de l’équipe dirigeante d’Incub, il a participé à l’ensemble de ses activités et missions, à savoir l’accompagnement des entrepreneurs hébergés, la réalisation des prévisions financières, le démarchage des prospects ainsi que la mise en œuvre et l’utilisation des dispositifs de contrôle.

21Dans ce cadre, Mat a pu accéder à l’ensemble des documents de l’organisation (prévisions financières, supports de communication, photos, documents de travail, etc.). La plupart des réunions de travail, ainsi que certains entretiens avec les entrepreneurs incubés et les autres membres de l’équipe dirigeante ont été enregistrés et retranscrits. Le Tableau 1 présente une vue d’ensemble de ces données qui correspondent à un total de 94 heures d’enregistrement, soit 1 653 pages. En outre, Mat a tenu un journal de bord afin de relier le matériau récolté aux évènements et de garantir la traçabilité du processus de recueil et d’analyse des données. Ce journal et l’ensemble des données recueillies (documents, enregistrements, observations) ont permis à l’ensemble des auteurs d’avoir une compréhension approfondie de l’organisation, ainsi que de l’évolution des dispositifs de contrôle et de leurs usages dans le temps.

Tableau 1

Données audio collectées

Type et quantité de donnéesDurée totale
14 entretiens avec les entrepreneurs d’incubés24 heures
9 entretiens avec les autres membres de l’équipe dirigeante8 heures
51 réunions avec les autres membres de l’équipe dirigeante62 heures

Données audio collectées

22La présence dans l’organisation d’un seul membre de l’équipe de recherche crée un équilibre entre proximité et distance par rapport au terrain. En effet, les auteurs qui n’ont pas participé à la collecte de données ont ainsi pu apporter un regard neutre sur le matériau empirique, neutralité essentielle pour approfondir l’interprétation des données. Le matériau empirique a ainsi été codé par les auteurs séparément et selon trois niveaux de codage, visant à identifier la nature des dispositifs de contrôle mis en œuvre selon la typologie de Malmi & Brown (2008), leurs usages diagnostique et/ou interactif (Simons, 1994), et la nature de la performance visée (économique et/ou DD).

23Le codage individuel des dispositifs de contrôle mis en œuvre a ensuite donné lieu à une confrontation et à une harmonisation entre chercheurs. Ce processus, ainsi que les exemples fournis par Malmi & Brown (2008), ont permis de traiter les ambivalences. L’implication régulière de l’un des membres de l’équipe de recherche au sein de l’organisation s’est avérée précieuse pour identifier les usages et le type de performance visée par chaque dispositif de contrôle. La distinction des dispositifs de pilotage de la performance économique et/ou DD permet de bien identifier l’éventuelle priorité stratégique accordée à l’une ou l’autre des performances visées, ainsi que la manière dont les différents dispositifs de contrôle et leurs usages contribuent à l’éventuelle intégration de ces performances.

24L’étude de cas longitudinale et le codage des dispositifs de contrôle, de leurs usages et de la performance visée, ont permis d’identifier trois phases dans la vie d’Incub, chacune caractérisée par différentes orientations stratégiques vis-à-vis de l’intégration de la performance globale et des dispositifs de contrôle au service de cette intégration. Nous présentons ces trois phases dans la partie suivante dédiée aux résultats.

3 – Résultats

25Nos résultats font apparaître trois phases distinctes qui permettent d’analyser comment les dispositifs de contrôle et leurs usages peuvent contribuer à la mise en œuvre et au renouvellement de stratégies centrées sur la performance globale. Elles représentent les évolutions stratégiques de l’organisation, ainsi que la manière dont les dispositifs de contrôle participent ou non au pilotage d’une performance globale de l’organisation. Distinguer performance économique et performance DD permet d’observer dans quelle mesure les managers lient les deux types de performance à l’aide des systèmes de contrôle et donc, s’ils pilotent l’organisation selon un modèle de performance globale. Le Tableau 2 décrit la composition du package de contrôle d’Incub par catégorie de dispositif alors que la Figure 1 synthétise les évolutions stratégiques en soulignant l’apparition de nouveaux dispositifs de contrôle au cours du temps, la transformation de leurs usages (diagnostique et/ou interactif) ou du type de performance visée (économique, DD ou mixte).

Tableau 2

Les dispositifs composant le package de contrôle d’Incub et leurs usages

I. Dispositifs de contrôle de type administratif
a) Réunion avec l’actionnaireDurant ces réunions hebdomadaires, l’actionnaire et Bob échangent lors de la 1re phase sur la santé économique de l’organisation et la sélection d’entrepreneurs DD de manière diagnostique. Durant la 2e et la 3e phase, les réunions deviennent plus interactives et sont le lieu de négociations concernant le loyer. L’actionnaire est désormais focalisé sur la performance économique.
b) Statuts de l’organisationLes statuts d’Incub spécifient que sa mission est d’accompagner et soutenir des entrepreneurs développant des innovations sociales et environnementales. Lors de la première phase, les statuts sont mobilisés de manière diagnostique et orientent les comportements des managers dans une prospection commerciale tournée exclusivement vers des entrepreneurs DD.
c) Règles de sélection des entrepreneursLes managers utilisent les règles de sélection des entrepreneurs de manière diagnostique durant les trois phases. Cependant, celles-ci évoluent au cours du temps. Lors de la 1re, les règles permettent de s’assurer que l’entrepreneur est focalisé sur la résolution de problèmes environnementaux et sociaux. Lors des deux suivantes, le principal critère de sélection de l’entrepreneur est sa capacité à payer sa cotisation le plus longtemps possible. « Systématiquement dans les rendez-vous commerciaux il faut savoir… Il faut qu’on vérifie combien de mois de chômage il reste à l’entrepreneur et comment il finance son activité. […] Est-ce qu’il a de l’argent de côté ou pas ? Et comment il vit ? » (Bob, réunion équipe dirigeante, phase 2).
d) Réunions de l’équipe dirigeanteDurant ces réunions hebdomadaires, l’équipe dirigeante aborde les problèmes rencontrés et décide des éventuelles évolutions stratégiques de l’incubateur. Elle mobilise donc ce dispositif de manière interactive.
« Le vendredi, je veux qu’on se le garde, sans trucs spécifiques à faire. Pour qu’on puisse réfléchir sur la vision et tous les trucs compliqués et stratégiques sur lesquels on n’est pas encore super bon. » (Bob, réunion d’équipe dirigeante, phase 1).
e) Règles de la communautéCes règles sont mises en place et mobilisées de manière diagnostique pour assurer une harmonie entre les entrepreneurs au sein de l’espace de travail. Elles recouvrent différents aspects de la vie quotidienne allant du nettoyage de la vaisselle à l’obligation d’assister aux évènements.
« Vince : Il y en a qui ne veulent pas participer à l’évènement que l’on organise. Bob : Ils n’ont pas le choix. S’il y en a un qui ne veut pas participer, il s’en va. C’est la règle de l’incubateur. » (réunion d’équipe dirigeante, phase 3).
f) Conseil spécial « impact DD »Durant ces heures de conseils, Max utilise ce dispositif de manière diagnostique. Il accompagne un entrepreneur sur l’identification de ses impacts sociaux et environnementaux et sur les actions possibles pour les améliorer.
II. Dispositifs de contrôle de type planification
a) Business plan de l’incubateurLe business plan sur trois ans, construit par les membres de l’équipe dirigeante, est mobilisé de manière interactive lors de fréquentes réunions pour développer de nouvelles pistes stratégiques, telles que l’évolution de l’offre commerciale.
III. Dispositifs de contrôle de type cybernétique
a) Tableau de bord de l’équipe dirigeanteL’équipe dirigeante met en œuvre de manière diagnostique un tableau de bord lui permettant de contrôler des indicateurs économiques tels que le suivi de la facturation des clients ou le niveau de trésorerie.
b) Nombre d’entrepreneurs démarchésL’équipe dirigeante utilise cet indicateur de manière diagnostique à l’aide d’un fichier Excel. Il lui permet de contrôler l’efficacité commerciale.
c) Type d’entrepreneurs accompagnésCet indicateur caractérise l’entrepreneur accompagné par l’incubateur sur le critère de ses finalités DD (ou non). L’équipe dirigeante l’utilise de manière diagnostique afin de suivre le nombre d’entrepreneurs DD accompagnés.
d) Budget de l’incubateurL’équipe dirigeante construit le budget de l’organisation à l’aide d’un fichier Excel. Les managers le mobilisent afin de contrôler les écarts entre dépenses et rentrées d’argent. Ce contrôle des écarts les pousse à s’interroger sur la stratégie de l’organisation et déclenche une évolution de l’offre commerciale (usage interactif).
e) « Feedback workshops »Les managers organisent ces évènements pour prendre connaissance du ressenti des entrepreneurs accompagnés. Ce dispositif mobilisé de manière diagnostique permet d’identifier des améliorations à apporter à l’accompagnement. « On prend deux entrepreneurs une fois toutes les deux semaines, et on leur demande ce qu’ils apprécient, ce qu’ils aimeraient changer. Ce qu’ils aimeraient avoir en plus. Quel a été le temps fort de leur semaine ? » (Vince, réunion équipe dirigeante, phase 3).
f) « Tempêtes de cerveaux »Durant ces évènements, un incubé tente de résoudre les problèmes rencontrés pour développer sa start-up avec l’aide des managers et des autres entrepreneurs. Les managers utilisent ce dispositif de manière diagnostique afin de faire vivre la communauté.
IV. Dispositifs de contrôle de type récompense
a) Rémunération variable des dirigeantsÀ partir de la 2e phase, une part de la rémunération de Tod et Vin est indexée sur le chiffre d’affaires de l’incubateur. Bob utilise ce dispositif de manière diagnostique pour orienter leurs comportements. « Donc il faut que tu aies en tête que ton salaire c’est toi qui te le fais. Oui. C’est en mode entrepreneur. Tu te fais ton salaire. » (Bob, réunion équipe dirigeante, phase 2).
V. Dispositifs de contrôle de type culturel
a) Composition de l’équipe dirigeanteBob constitue l’équipe dirigeante de l’incubateur en fonction des compétences et valeurs (économique ou DD) qu’il a préalablement établies comme nécessaires pour gérer l’incubateur. Il mobilise les managers tout au long de la vie de l’incubateur en fonction des besoins qu’il identifie pour déployer la stratégie (usage diagnostique).
b) Aménagement de l’espace de travailDans la 1re phase, les managers utilisent l’aménagement de l’espace de travail de manière diagnostique et installent le nécessaire pour que les incubés puissent travailler. Pendant la 2e phase, ils réorganisent l’espace de travail pour favoriser les échanges avec les incubés de manière interactive. Durant la 3e phase, ils installent de nombreux objets (poubelle de tri, meubles récupérés, totem de bienvenue) censés mettre en avant la performance de DD, avec une visée de contrôle diagnostique.
c) Slogan de l’incubateurLe slogan (« communauté ») émerge durant la 1re phase lors d’un brainstorming où tous les managers sont présents. Il permet de faire émerger une nouvelle stratégie (usage interactif). Cependant celle-ci n’est mise en œuvre que durant la 3e phase lors de la construction de la communauté (usage diagnostique). « Grâce à l’appartenance à une communauté, les gens restent, même s’ils sont déçus. Ils restent parce qu’il y a des gens qui sont autour. Ils restent pour la communauté. On peut y arriver. » (Entretien Tod).
d) Moments de convivialitéLes moments de convivialité prennent la forme de repas, de petits déjeuners ou encore d’afterworks. Mis en œuvre durant la 2e phase et utilisé de manière interactive, ce dispositif déclenche un changement stratégique (l’avènement de la communauté). Durant la 3e phase, ces moments visent à développer le sentiment d’appartenance à la communauté (usage diagnostique).

Les dispositifs composant le package de contrôle d’Incub et leurs usages

Figure 1

Évolution du type de performance contrôlée et de l’usage (gras pour interactif, pointillé pour diagnostique) des dispositifs de contrôle

Figure 1

Évolution du type de performance contrôlée et de l’usage (gras pour interactif, pointillé pour diagnostique) des dispositifs de contrôle

3.1 – L’émergence du pilotage d’une performance globale

26Incub démarre son activité en juillet 2017, avec pour objectif d’accompagner des entrepreneurs ayant un projet lié au DD. Cette mission est clairement définie dans les statuts et soutenue par l’actionnaire. Pour piloter l’objectif de performance globale, à la fois économique et de DD, les managers mettent en œuvre plusieurs types de dispositifs de contrôle et les utilisent principalement de manière diagnostique. Au cours de cette phase, les dispositifs servant à contrôler la performance DD sont les plus nombreux et servent parfois à contrôler simultanément performance économique et performance DD.

27Les dispositifs de contrôle focalisés sur le DD sont de nature à la fois administrative, cybernétique et culturelle. Ils sont principalement utilisés de manière diagnostique pour déployer la stratégie. Ainsi, les statuts de l’incubateur (Tableau 2, I.b) établissent un contrôle administratif formel, en spécifiant que la mission d’Incub est d’accompagner des entrepreneurs DD, comme l’illustre l’extrait suivant :

28

Favoriser la croissance économique des startups à impact sociétal. Fédérer une communauté d’entrepreneurs ainsi que leurs investisseurs et partenaires institutionnels autour d’un projet commun : valoriser l’innovation sociale et environnementale.

29Le processus de sélection des entrepreneurs (Tableau 2, I.c) constitue également un contrôle administratif, visant à valider au cours d’un entretien, que le projet de l’entrepreneur candidat répond bien à une problématique de DD, mais sans qu’il n’y ait d’exploration particulière de ses valeurs.

30Le contrôle culturel repose quant à lui sur la composition de l’équipe dirigeante (Tableau 2, V.a) et sur l’aménagement de l’espace de travail (V.b). En effet, les quatre managers n’accordent pas la même importance au DD dans le pilotage de l’incubateur. Deux managers (Mat et Vin) lui donnent une importance prioritaire en termes de valeurs, quand les deux autres (Tod et Bob) semblent mobiliser le DD de manière plus instrumentale. Mat a néanmoins été recruté par Bob en raison de sa double compétence en gestion financière et en management du DD. Cependant, Bob fait appel à ces deux types de compétences de manière dissociée et à des moments différents, tantôt pour atteindre des objectifs économiques, tantôt pour atteindre ceux liés au DD. La composition hybride de l’équipe dirigeante est donc un dispositif de contrôle important. Elle constitue un facteur potentiel d’intégration des performances, mais elle peut également être source de tensions selon l’influence respective des différents membres dans les processus de décision.

31L’aménagement de l’espace de travail des entrepreneurs sert à contrôler de manière diagnostique une dimension sociale des objectifs de DD. Ce dispositif de contrôle vise à favoriser le bien-être des incubés et à créer une dynamique collective. Les dirigeants de l’incubateur veillent ainsi à la qualité des interactions entre les entrepreneurs, favorisant le partage de connaissances et la consolidation des valeurs orientées DD.

32Trois autres dispositifs de contrôle participent à l’émergence d’un pilotage de la performance globale (économique et DD), en raison de leur capacité à contrôler les deux performances. Les réunions avec l’actionnaire jouent ainsi un rôle important (Tableau 2, I.a). Comme dispositif de contrôle, utilisé de manière diagnostique, ces réunions entre managers et actionnaire fixent le cadre dans lequel les managers sont supposés piloter l’incubateur. L’actionnaire vérifie la santé économique de l’organisation et la sélection d’entrepreneurs DD, mais aucun lien n’est établi entre ces deux sujets. De même, les réunions hebdomadaires de l’équipe dirigeante donnent lieu à un contrôle interactif (Tableau 2, I.d). Les managers y abordent des sujets économiques ou liés au DD mais font rarement le lien entre les deux types de sujets. Néanmoins, l’indicateur du nombre d’entrepreneurs démarchés est mobilisé de manière diagnostique, avec un effet potentiellement intégrateur des différents types de performance (Tableau 2, III.b). En effet, une bonne performance dans ce domaine permet d’atteindre simultanément les objectifs économiques et de DD.

33Enfin, au cours de cette première phase d’organisation naissante, un tableau de bord relativement sommaire est utilisé de manière diagnostique (Tableau 2, III.a). Comme dispositif de contrôle de la performance économique, il est centré sur le suivi de la facturation client et de la trésorerie. Les compétences gestionnaires de Mat contribuent à ce contrôle de la performance économique.

34À la fin de cette période, les managers ressentent le besoin d’un nouveau dispositif de contrôle DD, permettant d’attirer plus d’entrepreneurs préoccupés par cette thématique. La création d’un slogan, centré sur l’idée d’un collectif formant une « communauté », a pour objectif de rendre l’incubateur plus attractif afin d’en assurer la survie (Tableau 2, V.c). La création du slogan doit également permettre de stimuler une stratégie émergente. Néanmoins, le slogan retenu semble plus mettre l’accent sur l’objectif de créer une communauté, que sur celui d’avoir une communauté centrée sur l’objectif de DD. En définitive, le slogan n’est pas réellement partagé par les membres d’Incub et reste en sommeil.

35Pour résumer, les dispositifs de contrôle mis en place lors de cette première phase sont principalement utilisés de manière diagnostique et servent au déploiement d’une stratégie centrée sur l’accompagnement d’entrepreneurs DD. Le nombre de dispositifs de contrôle est suffisant pour assurer la survie économique de l’incubateur et atteindre les objectifs de DD. Malgré cela, l’intégration du DD dans la stratégie et le pilotage de l’organisation n’est pas complètement effective. En effet, les objectifs économiques et de DD ne sont pas explicitement reliés dans les pratiques de contrôle des managers. Certains dispositifs sont orientés uniquement vers la performance économique et d’autres uniquement vers la performance DD. Quelques dispositifs permettent de contrôler les deux performances, mais les managers ne font pas le lien entre les deux dimensions du pilotage de la performance. En conséquence, l’organisation n’est pas vraiment pilotée selon un modèle de performance globale.

3.2 – Reflux de l’intégration : la rentabilité au détriment du développement durable

36Durant la deuxième phase du développement d’Incub, l’actionnaire Ray se met à exercer une pression financière significative sur l’équipe dirigeante afin que l’incubateur s’acquitte d’un loyer. Les cotisations versées par les entrepreneurs incubés durant la phase précédente sont jugées insuffisantes pour faire face à cette demande : la survie d’Incub est menacée. Les managers décident donc de faire évoluer leur stratégie pour augmenter le chiffre d’affaires. De nouveaux dispositifs de contrôle, de types planification, cybernétique et récompenses, sont mis en œuvre pour renforcer le contrôle de la performance économique (Figure 1).

37Les réunions hebdomadaires avec l’actionnaire deviennent l’occasion d’âpres négociations et sont désormais exclusivement focalisées sur la performance économique. L’entretien de sélection des entrepreneurs, dispositif administratif utilisé de manière diagnostique, joue un rôle important dans le déploiement de la nouvelle stratégie de volume (Tableau 2, I.c). Alors qu’il visait précédemment à contrôler l’orientation DD du prospect, cet entretien sert dorénavant uniquement à vérifier sa capacité financière à verser sa cotisation. Comme l’explique Bob, la survie économique de l’organisation devient la priorité absolue :

38

« Je ne te dis pas qu’on ne va pas faire du DD. Je te dis qu’on a besoin de vivre. Pour l’instant, on fait les startups qu’on a sous les yeux. S’il y a des startups DD, c’est tant mieux. Sinon tant pis… ».
(Bob, réunion de l’équipe dirigeante)

39Pour cela, l’équipe dirigeante s’appuie sur un business plan constituant un nouveau dispositif de contrôle de type planification (Tableau 2, II.a). Utilisé de manière interactive, ce dispositif permet de faire émerger de nouveaux axes stratégiques, tels que l’ouverture de nouveaux sites dans d’autres métropoles. Ce business plan ne fait aucunement référence au DD. Le budget, utilisé de manière interactive, permet également à l’équipe dirigeante de suivre de nouvelles pistes d’optimisation, telles que le changement de l’offre commerciale (augmentation des prix, diminution du volume d’heures d’accompagnement). L’indicateur du nombre d’entrepreneurs démarchés est dorénavant focalisé sur la performance économique. Le déploiement de cette nouvelle stratégie centrée sur la performance économique se traduit également par la mise en place d’un dispositif de contrôle relatif à la rémunération de Tod et Vin, avec une part variable indexée sur le chiffre d’affaires (Tableau 2, IV.a).

40Malgré l’évolution de la stratégie vers une focalisation sur la performance économique, le pilotage de la performance DD n’est pas complètement abandonné. Ainsi, les managers utilisent-ils toujours des dispositifs pour contrôler la performance DD, notamment en raison de la composition de l’équipe. Les managers attachés à la performance DD en font un sujet récurrent lors des réunions d’équipe hebdomadaires, mais pour en constater l’échec à ce stade. Ils développent donc un nouvel indicateur : le type d’entrepreneurs accompagnés, DD ou non DD (Tableau 2, III.c). Mais ce nouveau dispositif de contrôle cybernétique souffre d’un déficit d’attention en raison de l’impératif de remplissage de l’incubateur pour en garantir la survie.

41Pour autant, les dirigeants d’Incub sont conscients du risque de perdre les entrepreneurs sensibles au DD. Conjointement à l’aménagement de l’espace de travail, ils développent donc un nouveau dispositif de contrôle culturel : l’organisation de moments de convivialité (Tableau 2, V.d). Ce dispositif permet aux dirigeants de s’assurer du bien-être des entrepreneurs et de prendre conscience du ressentiment croissant des incubés sensibles au DD. Ce ressentiment découle directement de la nouvelle stratégie économique, en contradiction avec l’objectif initial d’intégration du DD. En effet, les entrepreneurs incubés durant la première phase estiment que la promesse d’accompagner uniquement des entrepreneurs DD n’est pas tenue par Incub. Certains d’entre eux envisagent de quitter l’incubateur si aucun changement n’a lieu.

42En résumé, cette seconde phase voit l’équipe dirigeante d’Incub soumise à une forte pression financière de la part de l’actionnaire. Les managers réagissent en définissant une nouvelle stratégie pilotée à l’aide de dispositifs de contrôle de la performance économique. Ces dispositifs sont utilisés tantôt de manière diagnostique pour assurer le déploiement des objectifs économiques, tantôt de manière interactive pour faire émerger des solutions face aux incertitudes de l’environnement. Dorénavant, l’incubateur accompagne tout type d’entrepreneurs, préoccupés ou non par le DD. Malgré la focalisation sur la performance économique, la composition hybride de l’équipe dirigeante fait que l’incubateur continue à accompagner et à former des entrepreneurs sensibles au DD. Enfin, l’utilisation interactive de dispositifs de contrôle de la performance DD permet aux dirigeants de constater que l’incubateur est en voie de désintégration et accorde trop de place à la dimension économique dans la performance globale.

3.3 – Vers une intégration du développement durable en trompe l’œil

43La focalisation de l’équipe dirigeante sur la performance économique a finalement conduit certains entrepreneurs DD à menacer de quitter l’incubateur. Au cours de cette troisième phase, l’équipe dirigeante décide donc de réagir pour éviter les départs et de réintégrer la performance DD au cœur de son pilotage. Le slogan imaginé en phase 1 est mobilisé pour fédérer les incubés au sein d’une « communauté ». La communauté doit s’appuyer sur un sentiment d’appartenance et le partage de valeurs, quel que soit le degré de préoccupation des incubés pour le DD. Afin de déployer cette stratégie de fidélisation centrée sur la « communauté », les managers mettent en œuvre de nouveaux dispositifs de types administratif et cybernétique et renforcent les dispositifs culturels existants, dans des usages diagnostiques (Figure 1).

44La tentative d’instaurer une « communauté » se traduit en premier lieu par de nouveaux dispositifs de contrôle administratifs, tels que des règles qui s’imposent à l’ensemble des entrepreneurs (Tableau 2, I.e). Ces règles consistent par exemple en l’obligation d’assister à tous les évènements organisés au sein de l’incubateur et au respect des emplacements attribués dans l’espace de travail. Des heures de conseil optionnelles spécifiquement dédiées à l’impact DD des incubés sont également mises en œuvre (Tableau 2, I.f). Elles constituent une autre forme de contrôle administratif et permettent de replacer la performance DD au cœur des dispositifs de contrôle.

45Deux autres nouveaux dispositifs sont mobilisés de manière diagnostique pour faire vivre la communauté. Le premier est un évènement appelé « tempête de cerveaux » et vise à aider les entrepreneurs à résoudre leurs problèmes de développement (Tableau 2, III.f). La présence de tous les incubés est requise au nom de leur engagement pour la « communauté ». Les managers animent l’évènement et prennent ainsi connaissance des difficultés des entrepreneurs. Le deuxième type d’évènement, appelé « feedback workshop », invite deux entrepreneurs à faire part aux managers de leur ressenti concernant les aspects positifs et négatifs de la vie de l’incubateur (Tableau 2, III.e). Ces deux dispositifs focalisent l’attention des managers sur les améliorations souhaitées vis-à-vis de l’accompagnement délivré aux incubés, et in fine visent le renforcement du sentiment d’appartenance à la « communauté ».

46Enfin, le contrôle de la performance DD est soutenu par un dispositif de contrôle culturel focalisé sur l’aménagement de l’espace avec l’installation de nouveaux objets tels que des plantes, des poubelles de tri, un collecteur de piles usagées, un totem ou encore des messages encourageant au respect de l’environnement (Tableau 2, V.b). Des meubles recyclés et des décorations en bois de palettes complètent cet aménagement qui doit contribuer au sentiment d’appartenance à la « communauté » et ainsi fidéliser les entrepreneurs. Ce nouvel aménagement, pensé par l’équipe dirigeante, est accueilli de façons contrastées : plutôt favorablement par les entrepreneurs peu sensibles au DD, avec scepticisme de la part des entrepreneurs orientés DD. Peu enthousiastes, ces derniers restent cependant dans l’incubateur, comme en témoigne l’extrait suivant :

47

« Est-ce que ceux qui mettent les nouvelles poubelles pensent que l’écologie c’est bien ?… Je m’en fous ! Les meubles, les éco-cups, le tri des mégots… il y a tout un tas d’actions concrètes. Il vaut mieux ça que rien. ».
(Entretien avec un incubé)

48Durant cette troisième phase, les managers tentent donc de réintégrer la performance DD dans le pilotage d’une performance globale via la création d’une « communauté ». Cette communauté représente pour eux la clé de l’intégration des performances économiques et DD. Ils focalisent leurs efforts sur la dynamique collective censée favoriser le bien-être et la satisfaction des incubés grâce au partage de connaissances et d’expériences. Ils mettent ainsi en place de nombreux dispositifs de contrôle utilisés de manière majoritairement diagnostique afin de déployer une stratégie DD. Les dispositifs de contrôle de la performance économique servent à accroître le nombre d’entrepreneurs incubés alors que les dispositifs de contrôle de la performance DD servent à les fidéliser, qu’ils soient ou non préoccupés par le DD. Les deux systèmes visent donc conjointement à assurer la survie économique de l’organisation. Cependant, l’ensemble intègre une vision édulcorée du DD reflétée par l’aménagement de l’espace de travail, ainsi que par la participation peu convaincue des entrepreneurs sensibles au DD. En définitive, la performance DD apparaît comme un argument commercial de façade, trahissant l’échec de l’incubateur dans la mise en œuvre effective de sa stratégie DD.

4 – Discussion et conclusion

49Cette recherche a pour objectif de comprendre comment les dispositifs de contrôle permettent la mise en œuvre et le renouvellement de stratégies centrées sur une performance globale. Les résultats apportent plusieurs contributions quant à l’influence du type de dispositifs de contrôle (administratif et culturel en particulier), de leurs usages (diagnostique ou interactif) et de la nature de la performance visée sur l’intégration du DD dans le pilotage organisationnel. Ils contribuent également à la compréhension de l’émergence du package de contrôle.

50Premièrement, nos résultats prolongent et complètent les études focalisées sur l’influence des usages sur l’intégration des performances (Essid & Berland, 2011 ; Renaud, 2013a, 2013b). En effet, ils montrent comment les différents types de dispositifs de contrôle mis en place dans une organisation jouent un rôle important dans l’intégration des performances. Ainsi, durant la phase 1 de la vie d’Incub, l’un des premiers dispositifs de contrôle réside dans la composition de l’équipe dirigeante, dont les membres sont choisis en fonction de leurs compétences et valeurs. Ce dispositif de contrôle culturel, de nature cognitive et normative, conditionne la mise en place et l’utilisation d’autres dispositifs, ainsi que l’intégration des deux natures de performance économique et DD. La composition de l’équipe conduit à tantôt mettre en avant des expertises et objectifs économiques, tantôt des expertises et objectifs DD. Par exemple, la construction du slogan amène chaque acteur à exprimer sa vision de l’incubateur et contribue à l’intégration des performances. En phase 2, la composition de l’équipe a également un impact sur la mise en place d’un business plan et d’un budget. Néanmoins à ce moment-là, seules les compétences gestionnaires de Mat sont mobilisées, ce qui inhibe la contribution de ces outils à l’intégration des performances économique et DD.

51Les réunions de l’équipe dirigeante, comme contrôle administratif, jouent également un rôle important quant à l’intégration des performances au sein d’Incub. Ces réunions obligent les managers à échanger toutes les semaines au sujet des difficultés rencontrées dans le pilotage de l’organisation. Pour alimenter leurs réunions, les managers mobilisent d’autres dispositifs qui peuvent les amener à faire le lien entre les différentes performances, comme lorsqu’ils décident de mettre en place la « communauté » en début de phase 3. Ces résultats montrent que les différents types de dispositifs mis en œuvre n’exercent pas la même influence sur l’intégration des performances (Gibassier & Alcouffe, 2018) et peuvent tantôt agir conjointement, tantôt être en contradiction. Ainsi, les dispositifs de type administratif sont susceptibles de jouer un rôle important en articulant l’ensemble des dispositifs dédiés à l’une ou l’autre des performances. Les dispositifs de type culturel jouent également un rôle important dans l’intégration des performances. Ils peuvent influencer les valeurs des managers en créant progressivement un cadre commun de référence. Ces valeurs peuvent agir également sur la construction d’autres dispositifs de contrôle façonnés en fonction des représentations des individus (Dreveton, 2009). Dans le cas étudié, au contraire, les valeurs des dirigeants évoluent peu et induisent une mobilisation des dispositifs de contrôle culturels qui reste superficielle vis-à-vis du DD et oriente assez peu les comportements en faveur de l’intégration des performances.

52Deuxièmement, cette étude contribue à une meilleure compréhension du rôle du type de performance contrôlée dans l’intégration des performances (Essid & Berland, 2011). Certains dispositifs peuvent servir à contrôler les deux types de performance (Bon, 2009) en fonction de leur construction et de leur utilisation (Dreveton, 2009). Les résultats de cet article mettent en lumière le rôle de ces dispositifs dédiés au double contrôle, successif ou simultané, de la performance économique et/ou DD. En effet, les managers d’Incub utilisent en phase 1 certains dispositifs, tels que les réunions avec l’actionnaire, les réunions de l’équipe dirigeante et l’indicateur du nombre d’entrepreneurs démarchés pour contrôler les deux performances. Néanmoins, le contrôle de la performance économique et celui de la performance DD sont exercés de façon non simultanée. Durant la phase 2, certains dispositifs qui servaient précédemment à contrôler les deux performances, tels que la réunion avec l’actionnaire, ne servent plus qu’à contrôler la performance économique. Cependant, la composition de l’équipe dirigeante, décidée en phase 1, et les réunions de l’équipe dirigeante empêchent l’abandon total de la performance DD lors du changement de stratégie opérée pendant la phase 2. En phase 3, les réunions de l’équipe dirigeante participent à la modification des objectifs de DD via la décision de mettre en place la « communauté » pour tenter de réintégrer la performance DD dans le pilotage organisationnel.

53Ces résultats confirment que les dispositifs de double contrôle agissent sur l’intégration des performances en fonction des acteurs qui les utilisent, de leur vision de la performance DD et de leur pouvoir d’influence (Renaud, 2014). Ainsi, lorsque les utilisateurs ont un pouvoir équivalent, chacun défendant sa propre vision du DD, les dispositifs de double contrôle ne concourent ni à une intégration ni à une désintégration complète des performances, comme observé à l’occasion des réunions entre dirigeants lors des différentes phases de la vie d’Incub. En revanche, en cas d’asymétrie de pouvoir, l’acteur le plus puissant a la possibilité de modifier le type de performance contrôlée par un dispositif et ce afin de promouvoir sa propre vision du DD. C’est ce qui a été observé chez Incub lors de la phase 2, durant laquelle l’actionnaire a réussi à focaliser l’attention sur la performance économique au détriment de la performance DD. Ces résultats répondent donc à l’appel à étudier les attentes et le pouvoir des acteurs afin d’améliorer la compréhension de l’intégration des performances (Travaillé & Naro, 2017).

54Troisièmement, cette étude contribue à la compréhension du rôle des usages diagnostique et interactif des dispositifs de contrôle dans l’intégration des performances (Essid & Berland, 2011 ; Renaud, 2013b). Gond et al. (2012) suggèrent que l’utilisation interactive d’un dispositif de contrôle de la performance DD pousse l’organisation vers une plus grande intégration des objectifs de DD dans sa stratégie. Les résultats de cet article apportent un éclairage différent du rôle des usages interactif ou diagnostique. En effet, en phase 1, Incub tente d’intégrer les deux types de performance, mais n’y arrive que partiellement. Elle atteint ses objectifs dans chacun des deux domaines uniquement grâce à une utilisation diagnostique de dispositifs de contrôle focalisés tantôt sur la performance économique, tantôt sur la performance DD. En phase 2, l’utilisation interactive de dispositifs focalisés sur la performance économique amène les managers d’Incub à modifier leur stratégie pour se focaliser sur un objectif de volume. On assiste alors à un reflux de l’intégration des performances, au détriment de l’objectif de DD.

55Suite à l’utilisation interactive de dispositifs de contrôle de la performance DD (moments de convivialité, aménagement de l’espace de travail), les managers d’Incub réintègrent finalement les deux performances en phase 3, non sans avoir modifié leur objectif en matière de DD. Cette intégration en trompe-l’œil s’effectue grâce à l’utilisation de dispositifs de contrôle focalisés sur la nouvelle performance DD. Ainsi, les résultats montrent que l’utilisation interactive de dispositifs de contrôle focalisés sur la performance économique peut conduire à la désintégration des performances comme lors de la phase 2 chez Incub. Ils montrent également qu’un usage interactif de dispositifs focalisés sur la performance DD peut améliorer l’intégration des objectifs de DD dans certaines conditions, comme lors du passage de la phase 2 à la phase 3. Par conséquent, pour mieux comprendre les mécanismes d’intégration des performances, il semble pertinent de se focaliser sur l’usage des dispositifs et sur la performance qu’ils contrôlent, mais également de bien observer les changements apportés aux objectifs poursuivis par une organisation. Ceci permet également d’éviter l’écueil du « concept ombrelle » évoqué par Gond (2011), en détaillant précisément les objectifs économiques, sociaux et environnementaux qui composent la performance globale.

56Quatrièmement, notre travail contribue à une meilleure compréhension du processus d’élaboration des dispositifs de contrôle qui composent le package (Malmi & Brown, 2008). En effet, l’aspect longitudinal de l’étude permet d’avoir un panorama complet et évolutif du package de contrôle (Davila et al., 2009). Ainsi, nous avons pu montrer que l’objet de contrôle d’un dispositif peut changer. Nous avons également pu observer l’évolution des caractéristiques d’un dispositif de contrôle. Par exemple, les managers d’Incub enrichissent leur tableau de bord tout au long de la vie de l’incubateur. Ils agglomèrent plusieurs indicateurs de performance. Enfin, l’absence de dispositifs de contrôle est souvent présentée dans la littérature comme une cause de disparition d’une jeune organisation. Nos résultats montrent qu’un empilement de dispositifs peut aboutir au même résultat. Faute de temps, les managers peuvent être dans l’incapacité d’utiliser l’ensemble des dispositifs mis en place, ce qui les empêcherait de déployer et contrôler efficacement les stratégies choisies et d’assurer, en même temps, un niveau de production nécessaire à la survie de l’organisation.

57Enfin, les résultats de cette recherche ont également des implications managériales. Ils peuvent aider les managers à mieux comprendre la notion de « performance globale » et à analyser la manière dont les différents objectifs de performance sont pilotés dans leur organisation. Plusieurs conseils peuvent être formulés vis-à-vis du pilotage d’un incubateur selon un modèle de performance globale. Nous avons montré comment l’organisation étudiée cherchait à intégrer plusieurs performances, mais n’y arrivait qu’au prix d’une évolution de ses objectifs vers une vision superficielle du DD. Les managers doivent donc rester vigilants quant au risque d’un tel glissement des objectifs DD et à son impact vis-à-vis des attentes de leurs parties prenantes, au risque de les mécontenter (Naro & Noguera, 2008). Dans ce sens, nous proposons d’intégrer exclusivement des entrepreneurs pro-DD afin d’éviter les tensions ou conflits liés aux différences de représentations du DD, nuisibles à la performance globale. Nous attirons aussi l’attention des managers d’incubateur quant à l’intérêt d’impliquer dans leur démarche des collaborateurs attachés aux dimensions sociale et environnementale de la performance. En effet, ces derniers sont susceptibles de jouer un rôle important de réajustement dans l’équilibre fragile entre les différentes dimensions de la performance globale. Ces recommandations, identifiant les écueils et issues de notre observation, pourraient être encore enrichies par des études comparatives mettant en évidence les déterminants du succès d’un tel type d’incubateur.

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Date de mise en ligne : 04/08/2021

https://doi.org/10.3917/mav.124.0081

Notes

  • [1]
    Le nom de l’organisation ainsi que ceux des acteurs ont été modifiés afin de maintenir l’anonymat.

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