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Article de revue

Les ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage. Les recruteurs les jugent plus compétents mais continuent de recruter en priorité les ingénieurs formés par les grandes écoles

Pages 15 à 36

Notes

Introduction

1 « Pourquoi peut-on former des ingénieurs comme on forme des coiffeurs ? » Avec cette question, Malglaive (1996, p. 85) met immédiatement en évidence le caractère surprenant de l’apprentissage dans le monde des ingénieurs. La formation des ingénieurs est structurée depuis le XVIIIe siècle par de grandes écoles réputées (Ponts et Chaussées, Les Mines, Polytechnique) qui dispensent des savoirs très fortement théoriques (en particulier les mathématiques) (Picon et Chatzis, 1992). L’apprentissage, considéré en France comme une voie de relégation scolaire, apparaît ainsi comme « contre-nature » dans le monde des ingénieurs (Sauvage, 2000). En 1996, seulement 4 % des ingénieurs diplômés l’étaient par la voie de l’apprentissage. Aujourd’hui, les apprentis représentent 15 % des ingénieurs diplômés. Les transformations engendrées par l’apparition de ce nouveau mode de formation ont été analysées par les chercheurs en sociologie (Grelon et Marry, 1995 ; Bouffartigue et Gadéa, 1996, 1997) et en sciences de l’éducation (Malglaive, 1996 ; Grandgérard, 1996).

2 Nous proposons de nous intéresser à l’impact gestionnaire de cette nouvelle modalité de formation des ingénieurs, et en particulier, nous proposons de voir comment les recruteurs perçoivent les ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage ? Considèrent-ils qu’ils ont des compétences spécifiques ? Sont-ils prêts à les recruter ? Les considèrent-ils plus compétents que les ingénieurs qui sortent des grandes écoles ? Pour répondre à ces questions, nous avons mené une étude qualitative dans le secteur du bâtiment. Ce secteur a une double caractéristique intéressante par rapport à notre questionnement. D’une part, le bâtiment a « l’apprentissage chevillé au corps » (Repentin, 2012). Ce secteur d’activité utilise l’apprentissage depuis longtemps et de manière extensive. D’autre part, les métiers du secteur du bâtiment connaissent des évolutions fortes. Ils demandent de plus en plus de compétences transversales (management de sous-traitants, suivi opérationnel, etc.) qui s’acquièrent plus facilement par la voie de l’apprentissage qu’à l’école (APEC, 2010). Nous avons donc choisi ce secteur parce que les recruteurs sont doublement susceptibles d’y valoriser les ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage.

3 Les entretiens que nous avons réalisés montrent toutefois que cela ne suffit pas. Les recruteurs reconnaissent que les ingénieurs formés par l’apprentissage ont des compétences particulièrement intéressantes pour leur activité professionnelle future. Toutefois, ils continuent de plus valoriser les ingénieurs formés dans les grandes écoles. Ils contribuent ainsi à perpétuer le modèle traditionnel de formation des ingénieurs, alors même que ceux-ci disposent de compétences moins immédiatement utilisables que leurs homologues formés par la voie de l’apprentissage.

4 Ces résultats nous permettent alors d’engager une discussion avec la littérature existante. Celle-ci se déploie sur trois axes. Tout d’abord, nous montrons que nos résultats permettent d’alimenter la réflexion sur la place de l’apprentissage dans le système de formation des ingénieurs. Ensuite, nos résultats permettent d’éclairer les ressorts de la persistance du système des grandes écoles. Enfin, nos résultats alimentent la réflexion sur le positionnement des recruteurs. Notre article est structuré de la manière suivante. La première partie présente le système des grandes écoles et les modalités de mise en œuvre de la voie de l’apprentissage dans ce système. Dans la deuxième partie, nous argumentons le choix du BTP comme terrain d’investigation de nos recherches et présentons la méthodologie mobilisée. La troisième partie développe les résultats et la quatrième présente les éléments de discussion.

1 – Revue de littérature : les ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage, genèse et état des lieux

5 « Toute réflexion sur les ingénieurs est, en France, en même temps une réflexion sur les élites et leur système de production » (Bouffartigue et Gadéa, 1996). En France, devenir ingénieur diplômé nécessite d’avoir suivi une formation de 5 ans dans une école d’ingénieurs obligatoirement habilitée par la Commission des Titres d’Ingénieurs (CTI). Ce système d’écoles d’ingénieurs s’est forgé par un long processus depuis le XVIIIe siècle et constitue un véritable héritage pour le groupe des ingénieurs diplômés (1.1). La voie de l’apprentissage ouverte pour former des ingénieurs depuis 1990 apparaît comme le dernier avatar, mais non le moindre, de ce système de formation ancestral (1.2).

1.1 – Les grandes écoles et le savoir mathématique, la marque des ingénieurs diplômés

6 Une analyse historique est nécessaire pour comprendre la figure de l’ingénieur contemporain. Les ingénieurs sont en effet les héritiers d’une longue histoire. Les premières écoles (Ponts et Chaussées, 1747 ; Génie de Mézières, 1748 ; Mines, 1783) sont créées pour former les membres des corps techniques de l’État à des tâches de commandement (Grelon, 1994 ; Shinn, 1978). La création en 1794 de l’École polytechnique marque le dispositif français de formation des ingénieurs. Fondée sur la base des idéaux encyclopédistes de la période des Lumières, la formation valorise les sciences fondamentales et les savoirs académiques (Belhoste, 1989 ; Veltz, 2007). Le savoir mathématique, symbole de la supériorité intellectuelle, constitue alors le fondement de la compétence de l’ingénieur. Polytechnique devient le modèle pédagogique de référence, valorisant le contenu théorique, et « ainsi se met en place un dispositif qui sera pour l’essentiel gardé jusqu’à nos jours » (Picon et Chatzis, 1992).

7 L’essentiel des caractères du champ des grandes écoles d’ingénieurs en France est aujourd’hui encore incarné par l’École polytechnique, surnommée l’X en référence à l’inconnue en mathématiques. Le modèle de l’ingénieur français privilégie, au plan scolaire, les savoirs théoriques et déductifs et, au plan professionnel, l’accès aux fonctions dirigeantes ou managériales. Au plan scolaire, la conviction selon laquelle « la théorie constitue le meilleur viatique pour l’exercice de quelques fonctions que ce soit » (Bouffartigue et Gadéa, 1996) façonne le système de formation et son modèle de réussite basée sur une relative déconsidération des enseignements pratiques au profit des enseignements dits plus généraux. L’ingénieur puise sa légitimité dans « la maîtrise d’un savoir de haut niveau qui peut être aussi défini comme abstrait, ésotérique, théorique, scolaire, déductif » (Bouffartigue et Gadéa, 1997).

8 Au plan professionnel, ce modèle de réussite scolaire est associé à un modèle de carrière : l’accès rapide aux fonctions dirigeantes. Les formations dominées par le généralisme et l’abstraction permettent de décrocher un titre plus qu’elles ne visent une qualification professionnelle (Lange, 1992). Le titre d’ingénieur consacre alors la reconnaissance d’un état définitif pour son titulaire et ne constitue pas une préparation à l’exercice d’un métier : « une telle formation ne saurait être liée à un métier, réalité trop anecdotique et trop contingente » (Malglaive, 1996). La formation vise à « donner la base théorique pour affronter des difficultés imprévisibles » (Malglaive, 1996) plutôt qu’à apporter la solution à des problèmes concrets et immédiats, considérée comme le signe d’une politique trop court-termiste.

9 Si le champ des grandes écoles s’est unifié autour de cette norme sans qu’aucune école n’ait pu installer durablement un modèle alternatif de formation ou un contre-modèle (Lazuech, 1999), l’apprentissage a tenté de quelque peu bousculer le système. L’entrée de ce dispositif au sein du système de formation des ingénieurs a suscité des réactions tant de la part du monde académique que du monde professionnel, en témoigne le titre du séminaire organisé conjointement en 2012 par la CTI, l’IESF (Ingénieurs Et Scientifiques de France) et la Conférence des Grandes Écoles (CGE) : « L’ingénieur, formé par la voie de l’apprentissage, un OVNI dans le monde des ingénieurs ? ».

1.2 – Les ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage : un OVNI dans le monde des ingénieurs ?

10 Au début des années 1990, la possibilité de former les ingénieurs par la voie de l’apprentissage surprend. L’apprentissage est en effet considéré en France comme une voie de remédiation traditionnellement réservée aux élèves en échec scolaire pour apprendre en entreprise un métier souvent manuel. Encore très récemment, le MEDEF déplorait cet « impensé de l’apprentissage » en France : le dispositif reste perçu comme « une voie secondaire, une voie par défaut, une voie faite pour ceux qui ne peuvent emprunter le chemin académique » (Medef, juillet 2014).

11 À l’opposé, les formations d’ingénieurs évoquent un modèle de formation d’excellence académique dans une grande école et concernent des jeunes qui franchissent avec réussite les différentes étapes de leurs parcours scolaires et conduisent à des métiers plus intellectuels. Sauvage (2000) souligne le caractère « contre-nature » de cette association apprentissage-école d’ingénieurs : « même si l’on pouvait sentir un déplacement des représentations dont il faisait l’objet, l’apprentissage faisait en effet toujours surgir l’image de l’homme de métier, du travailleur manuel qui développe son expertise à mesure qu’il affine sa pratique. À l’opposé, les formations d’ingénieurs […] renvoyaient davantage à la figure du cadre, du col blanc qui, dans les esprits, conçoit et organise l’action plus qu’il n’exécute » (p. 125). Le Tableau 1 synthétise les contrastes apparents de ces deux mondes.

Tableau 1

Deux mondes que « tout oppose »

Formations d’ingénieurs Formations par la voie de l’apprentissage
Objectif principal Former une élite intellectuelle/Délivrer le titre d’ingénieur Apprendre un métier
Contenu de la formation Formation générale et théorique Formation professionnelle et pratique
Niveau scolaire Voie d’excellence scolaire pour jeunes « à potentiel » Voie de remédiation pour élèves en échec scolaire, jeunes « en difficulté »
Image Image du cadre « col blanc » Image du travailleur manuel, homme de métier
Type de métier associé Métiers de conception et d’organisation Métiers d’exécution

Deux mondes que « tout oppose »

12 Ce choix français de former des ingénieurs (Bac +5) par l’apprentissage est unique à l’échelle internationale (CTI, 2012). Dans les pays observés par la CTI, la voie de l’apprentissage est limitée aux métiers manuels et ne dépasse pas le niveau de technicien. Même en Allemagne, souvent citée comme modèle de formations par l’apprentissage grâce à son système dual pour l’enseignement professionnel, le niveau le plus élevé accessible par cette voie concerne la licence professionnelle (Bac +3) proposée par des instituts spécialisés.

13 S’il est ouvert aux ingénieurs depuis 1990, l’apprentissage n’a connu un réel développement qu’à partir de 2005 (Issehnane, 2011). La loi Seguin du 3 juillet 1987 permet d’accéder par le biais des contrats d’apprentissage à tous les niveaux de qualification professionnelle, de niveau V (CAP) au niveau I (Bac +5). Dans un contexte de déficit quantitatif et qualitatif d’ingénieurs dans les entreprises françaises, le rapport Decomps (juillet 1989) préconise de « doubler les effectifs d’ingénieurs » en formant des techniciens pour en faire des « ingénieurs de terrain ». Les Nouvelles Formations d’Ingénieurs (NFI), baptisées depuis Formations d’Ingénieurs en Partenariat (FIP) sont ainsi créées à partir de 1990. Avant les années 2000, la formation des ingénieurs par la voie de l’apprentissage est majoritairement le fait d’établissements spécialisés qui proposent les formations conjointement avec la formation continue (CTI, 2012).

14 À partir de 2005, en réponse à l’impulsion gouvernementale (notamment avec la loi de programmation pour la cohésion sociale de 2005), les écoles d’ingénieurs, dont l’activité était jusqu’alors uniquement sous statut étudiant, ouvrent l’accès de leurs diplômes à la voie de l’apprentissage. En 2015, plus de 40 % des formations d’ingénieurs sont accessibles par la voie de l’apprentissage. Elle représente 15 % des diplômés en 2015 (CDEFI, 2015). Les modèles de formation se sont diversifiés : environ 30 % des diplômes d’ingénieurs délivrés par la voie de l’apprentissage sont issus de FIP ; les autres étant du ressort des écoles d’ingénieurs classiques. On note une très forte concentration des apprentis dans certains secteurs d’activité : génie mécanique/génie industriel (41%), électronique/automatique (29 %) et bâtiment travaux publics (10 %) (Pottier, 1996). Les travaux de Pougnet-Rozan (2010) mettent en évidence que ce développement de la voie de l’apprentissage ne s’est pas fait sans mal. Les acteurs y sont multiples et ils ne partagent pas les mêmes intérêts. Les situations de tension et de jeux de pouvoir sont donc omniprésentes. Les acteurs débattent de l’évaluation, de la reconnaissance et de la valorisation du diplôme obtenu par l’apprentissage.

1.3 – Les ingénieurs formés par l’apprentissage : trois attentes spécifiques

15 L’apprentissage pour former des ingénieurs présente trois caractéristiques qui visent toutes à valoriser la pratique et à renforcer la place de l’entreprise au sein des formations d’ingénieurs. Nous développons ci-après ces trois objectifs majeurs de l’apprentissage : fabriquer un autre profil d’ingénieur (1.3.1), dans une recherche optimale d’adéquation formation/emploi (1.3.2) et selon un autre mode pédagogique (1.3.3).

1.3.1 – Un autre profil : des ingénieurs de terrain

16 Premièrement, la voie de l’apprentissage forme des ingénieurs de terrain « dont l’entreprise est largement déficitaire » en complétant les formations d’ingénieurs classiques qui conduisent « plus sûrement à des fonctions de gestion, finance ou management qu’à des fonctions de production » (Aubret, Gilbert et Pigeyre, 1993). Il s’agit de préparer à des métiers d’« ingénieurs d’application, mieux informés des réalités de l’entreprise et dont les penchants pour la production et la conduite des hommes auront été cultivés » (Decomps, 1989). L’objectif affiché est ainsi de pallier des carences du système, d’ailleurs encore récemment soulignées par l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (devenue Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur – HCERES – depuis 2013) : les grandes écoles d’ingénieurs françaises attirent des étudiants d’excellent niveau, et plus particulièrement les « forts en maths », mais elles visent la formation de certaines catégories d’ingénieurs de haut niveau qui ne couvre pas tous les besoins d’un marché en ingénieurs très multiforme (AERES, 2012).

17 L’apprentissage transforme la conception du rôle de la formation d’ingénieur : les savoirs à transmettre sont abordés au regard des fonctions réellement attendues des ingénieurs. La formation est abordée « en termes de compétences, de nature de tâche à réaliser, de type de situations auquel il est nécessaire de faire face, de capacités à résoudre telle ou telle forme de problème » (Malglaive, 1992, p. 275). La démarche met en avant la finalité professionnelle et non plus seulement des niveaux de connaissances ou de savoirs, passant ainsi d’une logique « connaissances » à une logique « compétences ». L’enquête annuelle de 2014 de l’IESF fait état d’une différenciation dans les fonctions occupées par les ingénieurs dans leur premier emploi. Les ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage sont plus souvent affectés à des missions de production que ceux formés par la voie classique, ces derniers étant plutôt représentés sur des fonctions d’étude, de recherche et de conception. Pour s’assurer de l’adéquation de la formation aux besoins, les formations par la voie de l’apprentissage se fondent sur un partenariat entre les écoles et les entreprises.

1.3.2 – Une recherche d’adéquation optimale formation/emploi : le partenariat entre les écoles et les entreprises

18 Les formations par la voie de l’apprentissage proposent un partenariat entre les établissements d’enseignement d’une part, les entreprises et fédérations professionnelles d’autre part, ceci afin de « garantir l’enracinement professionnel de l’enseignement et du diplôme » (CEFI, 1995). Pour l’initiateur des formations par la voie de l’apprentissage, la vraie innovation reste bien ce partenariat qui, loin d’être accessoire, est central (Decomps, 1991). Il se construit dès le montage des projets puisque les fédérations sont associées à l’étude des besoins, à la définition des profils et à la sélection des candidats. Pour la première fois, il institutionnalise la présence des entreprises dans des dispositifs de formation d’ingénieurs. Les entreprises, par le biais des branches professionnelles, sont associées à l’évaluation et à la sélection des candidats, à la construction des programmes de formation, à l’enseignement par l’intervention de professionnels en cours et à la régulation des flux (par la signature d’un contrat de travail avec l’apprenti). Si l’Union des Industries et des Métiers de la Métallurgie (UIMM), ainsi que les fédérations qui lui sont rattachées, ont été les promoteurs actifs de l’apprentissage dans les spécialités de la mécanique, de la maintenance, des matériaux et de l’électronique-informatique, les autres branches (chimie, BTP, agro-alimentaire…) sont aussi parties prenantes. Le partenariat avec des branches professionnelles est souvent représenté par les Instituts des Techniques d’Ingénieur de l’Industrie (ITII) créés à partir de 1990 à l’initiative de l’UIMM et d’autres organisations professionnelles pour répondre aux besoins des entreprises. Cette forte implication de l’entreprise dans la formation est associée à une pédagogie renouvelée et mieux adaptée à un public différent.

1.3.3 – Un autre mode pédagogique pour un autre public

19 Le dispositif pédagogique de l’apprentissage s’appuie sur une interaction forte entre la formation en situation dans l’entreprise (personnalisée et encadrée par un maître d’apprentissage) et la formation académique (collective mais encadrée par un tuteur académique) (Rouvrais et al., 2007). En intégrant l’entreprise dans la conception du programme de formation, dans la prise en charge de modules et dans l’évaluation du jeune, l’apprentissage réhabilite la place de l’enseignement pratique et concret, censé davantage préparer à un métier identifié.

20 Decomps considère que la formation des ingénieurs s’est construite par strates successives, par superposition de différents savoirs au fur et à mesure des évolutions et des innovations : savoirs théoriques (pourquoi ça marche ?) puis techniques (comment ça marche ?) et méthodologiques (comment communiquer et interpréter l’environnement de l’entreprise ?) (Grelon et Marry, 1995). L’apprentissage introduit une quatrième strate : le savoir d’action, c’est-à-dire la formation acquise sur le terrain, considérée comme au moins aussi importante que le savoir acquis à l’école. Le savoir d’action permet de faire la synthèse des savoirs accumulés et de « transformer ce kaléidoscope en une formation cohérente » (Grelon et Marry, 1995, p. 56). Les ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage développent ainsi une forme d’intelligence qualifiée « d’avisée » car résultante « d’un itinéraire où s’acquièrent à la fois connaissances théoriques et savoir général de l’action, au fil duquel s’opère la confrontation progressivement expérimentée de la science et du faire » (Malglaive, 1996, p. 95).

21 Cette forte intrication de la formation à l’école et en entreprise conduit à une démarche pédagogique plus inductive, partant de l’expérience et allant vers la formalisation et la synthèse. Cette méthode vise aussi à diversifier le public des écoles d’ingénieurs en attirant des jeunes ayant des modes d’assimilation différents, en l’occurrence ceux issus de filières professionnelles Bac +2 (DUT-BTS) qui n’auraient pas eu accès à des études d’ingénieur par les voies d’accès traditionnelles (Classes Préparatoires aux Grandes Écoles). Les formations par apprentissage s’adressent ainsi à des populations différentes des formations initiales sous statut étudiant.

Conclusion de la partie 1 : les ingénieurs formés par l’apprentissage, un enjeu pour le recrutement

22 Surprenante, fortement différenciatrice, la voie de l’apprentissage est aussi apparue dans le monde des ingénieurs comme une voie de contournement de la voie royale et, à ce titre, a suscité de nombreuses interrogations quant à la reconnaissance du diplôme d’ingénieur ainsi obtenu. La déclaration, dans un document officiel de la CTI, selon laquelle le diplôme obtenu par la voie de l’apprentissage doit conférer à son détenteur « une même légitimité et un même niveau de reconnaissance que celui de la voie classique » (Remaud, 2012) atteste de ces tensions et de ces craintes. La nécessité pour l’organisme d’habilitation de défendre un même niveau et une « égale honorabilité » (Decomps, 1989) confirme le risque identifié par certains acteurs de créer une nouvelle catégorie d’ingénieurs « entre l’ingénieur grande école et le technicien qui laisserait ainsi le champ libre à l’entreprise pour décider de la place à réserver à ce nouvel ingénieur dans la division sociale du travail » (Bousquet et Grandgérard, 1996).

23 Ces problématiques relatives à l’évaluation, la reconnaissance et la valorisation du diplôme inhérentes à la voie de l’apprentissage ont été mises en évidence par les travaux de Pougnet-Rozan (2010). En effet, le dispositif de l’apprentissage met en scène de multiples acteurs des systèmes éducatif et productif, dont la divergence des intérêts conduit à des situations de tension et de jeux de pouvoir. Les tensions inhérentes à l’évaluation de la qualité de l’ingénieur et à la conception de sa compétence intéressent le gestionnaire car elles sont au cœur du processus de recrutement, acte stratégique de la GRH, en particulier pour les cadres (Dany et Livian, 2002 ; Ghaffari, 2004 ; Dietrich et Pigeyre, 2016). Le recrutement se réalise dans une situation d’asymétrie d’information et peut ainsi être considéré comme relativement risqué du point de vue du recruteur (Cadin et al., 2012 ; Bonu, 1999). Pour décrypter ces tensions et leurs enjeux en termes de recrutement des ingénieurs, nous avons décidé de nous intéresser à la question suivante : comment les recruteurs perçoivent-ils les ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage ?

2 – Méthodologie

24 Comme nous venons de le constater, il existe encore peu de travaux sur les ingénieurs formés par l’apprentissage. Notre question est exploratoire. L’étude de cas apparaît donc comme la méthodologie la plus pertinente (Yin, 2012). Nous avons choisi d’analyser le cas du secteur du BTP dans une région française : celle des Hauts-de-France. Nous motivons doublement ci-après notre choix d’investiguer le secteur du BTP. D’une part, le BTP réserve un accueil particulièrement favorable à l’apprentissage (2.1). D’autre part, les métiers de ce secteur connaissent des évolutions qui devraient conduire les recruteurs à valoriser les compétences spécifiques acquises par les ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage (2.2). Le BTP est donc un cas exemplaire (Yin, 2012). Il devrait être doublement favorable aux ingénieurs formés par l’apprentissage. Nous justifions ensuite notre choix d’investiguer l’ensemble d’une région et nous exposons les données que nous avons recueillies ainsi que la manière dont nous les avons analysées (2.3).

2.1 – Le BTP, un secteur particulièrement favorable à l’apprentissage

25 Notre choix s’est porté sur le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) car il s’agit du berceau du compagnonnage et un bastion historique de l’apprentissage. « La profession du BTP a l’apprentissage chevillé au corps, il est en quelque sorte inscrit dans son ADN » déclarait Thierry Repentin, alors ministre délégué à la Formation professionnelle et à l’apprentissage (2012). Un lien particulier unit ce secteur au dispositif de formation par la voie de l’apprentissage comme l’illustrent notamment les travaux de Moreau (2003, 2008, 2013). Les statistiques récentes attestent de la bonne représentation du BTP dans le paysage français de l’apprentissage. Ainsi, en 2011, l’INSEE indique que le secteur emploie plus de 5 % d’apprentis tandis que ce taux n’atteint même pas les 2 % tous secteurs confondus.

2.2 – Les cadres du BTP, une main-d’œuvre qualifiée en mutation

26 Le secteur français du BTP nous paraît aussi intéressant car les métiers y sont en mutation et les nouvelles compétences requises devraient être favorables aux ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage. Le secteur français du BTP se caractérise par l’existence de quatre « majors » (Vinci, Eiffage, Bouygues et SPIE), des « bâtisseurs indépendants », dont deux nordistes dans le top cinq (Rabot Dutilleul et Ramery) et de nombreuses entreprises plus petites (PME, TPE et entreprises artisanales). Secteur clé de l’économie en France, le BTP a été touché par un effondrement de son activité en 2008, après une décennie de croissance. Ce repli conjoncturel conjugué à des évolutions réglementaires (en France et en Europe) et techniques (développement durable, écoconstruction) a obligé les gestionnaires à adapter les métiers pour répondre à ces exigences, renouveler leurs organisations et intégrer ces nouveaux enjeux dans leur processus de production. Caractérisé par un faible taux d’encadrement (6 % en 2013 (Kalck, 2016)), le BTP a cherché à développer ses capacités d’adaptation aux changements notamment en élargissant les compétences de ses cadres.

27 Les fonctions d’exécution et de chantier, notamment celles de conducteurs de travaux, sont passées d’une culture de l’ingénierie à celle du management de centres de profit (APEC, 2010). Dans un contexte de concurrence accrue sur les différents marchés, les missions de contrôle de gestion opérationnelle, de suivi budgétaire, de reporting (y compris sur des activités connexes aux opérations comme la sécurité, la qualité ou l’environnement), de planification, de management de sous-traitants et de suivi opérationnel des exploitations nécessitent des compétences de plus en plus transversales. « L’image du conducteur de travaux essentiellement focalisé sur la réalisation technique d’un bâtiment est devenue obsolète. Le métier a évolué et pour optimiser un chantier, un conducteur de travaux se doit d’ajouter une dimension administrative, humaine et commerciale à son panel de compétences » [1]. L’ingénieur du BTP voit ses missions s’élargir et doit mobiliser des compétences techniques, financières et managériales.

28 L’évolution des missions des cadres du BTP incite les recruteurs, dans un contexte de hausse générale des niveaux de qualification disponible sur le marché du travail, à relever leurs exigences pour des postes de conducteurs de travaux auparavant accessibles avec un diplôme Bac +2 (DUT-BTS) et encore majoritairement occupés en interne par des niveaux infra Bac +2. Aux yeux des recruteurs, l’apprentissage devrait alors apparaître comme un compromis adapté permettant tout à la fois d’augmenter le niveau de qualification et de favoriser le développement des compétences transversales.

2.3 – Données recueillies et méthodes d’analyse

29 L’avis de recruteurs sur les ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage n’ayant pas encore été documenté, nous avons choisi une méthode qualitative. Les entretiens menés dans le secteur du BTP nous permettent de mettre l’accent sur les acteurs et leurs motivations (Dumez, 2011). Notre démarche n’a pas de portée universelle dans la mesure où nous restons dans le cadre de contextes et de situations par le choix de cas qui ne forment pas un échantillon représentatif susceptible d’une généralisation statistique. Nous visons une généralisation analytique en cherchant à identifier et comprendre « quels types d’engrenages, d’enchaînements, de mécanismes sont à l’œuvre et rendent compte des comportements des acteurs » (Dumez, 2011, p. 51). Nous avons travaillé sur plusieurs cas pour renforcer la portée et la validité externe de la recherche (Yin, 2012).

30 Nous avons fixé un périmètre régional d’investigation, compromis entre la faisabilité matérielle des recherches et la justification d’une politique de l’apprentissage fortement régionalisée. Les données auxquelles nous avons eu accès par le biais des deux CFA de l’enseignement supérieur du Nord-Pas-de-Calais et de Picardie nous ont permis d’identifier les entreprises du BTP de la région des Hauts-de-France utilisatrices du dispositif d’apprentissage pour former des ingénieurs.

31 Notre sélection des cas d’entreprises a suivi deux axes complémentaires. Tout d’abord, nous voulions rencontrer des recruteurs au sein des majors du secteur car elles y jouent un rôle central (Kalck, 2016). Pour cela, nous avons repéré plusieurs cas d’ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage dans les majors du secteur ; ce qui nous a permis d’approcher deux majors via leurs implantations régionales. Nous avons ici fait preuve « d’opportunisme méthodique » (Girin, 1990). C’est grâce à nos contacts avec ces ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage que nous avons pu établir le contact avec ces deux entreprises. Même si rien n’indique que ces deux majors ont un rapport singulier à l’apprentissage, il est certain que des recherches futures gagneraient à reproduire notre analyse sur les deux autres majors qui existent dans le secteur.

32 Ensuite, nous voulions sonder des groupes de différentes envergures et des PME engagés dans le dispositif. Nous avons retenu six groupes régionaux, dont les deux plus importants indépendants nordistes et une PME très bien implantée régionalement. Enfin, nous avons ajouté deux PME non mobilisées dans le dispositif (au niveau ingénieur et au moment de l’enquête) mais dont les avis sont importants pour diversifier les points de vue sur la formation par la voie de l’apprentissage. Notre échantillon se compose finalement de 11 entreprises au sein desquelles nous avons mené 14 entretiens auprès de gestionnaires des RH. Le Tableau 2 propose une vue d’ensemble des entretiens réalisés (les entreprises sont identifiées par code pour respecter notre engagement d’anonymat).

Tableau 2

Les caractéristiques des entreprises enquêtées

Entreprise Effectif agence Effectif ingénieurs (dont part effectif agence) Personne interviewée Code interview
FAP_MAJOR 2 684 20 (1 %) Adjoint DRH FAP_MAJOR-DRH
NOR_MAJOR 723 200 (28 %) Resp. relations écoles NOR_MAJOR-RE
DRH NOR_MAJOR-DRH
ROC_GROUP 750 80 (11 %) Chargé de recrutement ROC_GROUP-REC
Resp. relations écoles ROC_GROUP-RE
DRH ROC_GROUP-DRH
RYB_GROUP 1 000 70 (7 %) DRH RYB_GROUP-DRH
REP_GROUP 1 000 70 (7 %) DRH REP_GROUP-DRH
COX_GROUP 532 10 (2 %) RRH COX_GROUP-DRH
SIB_GROUP 650 140 (22 %) DRH SIB_GROUP-DRH
DAB_GROUP 315 40 (13 %) RRH DAB_GROUP-DRH
MAB_PME 125 2 (2 %) RRH MAB_PME-RRH
TOM_PME 250 5 (2 %) RRH TOM_PME-RRH
CAT_PME 200 5 (3 %) PDG CAT_PME-PDG

Les caractéristiques des entreprises enquêtées

33 Ces entreprises ont toutes formé un ou plusieurs ingénieurs en contrat d’apprentissage (à l’exception de CAT_PME et de TOM_PME, que nous avons volontairement sélectionnées pour cette raison). Elles ont aussi toutes déjà recruté un ingénieur précédemment formé par la voie de l’apprentissage par elles ou par une autre entreprise (sauf CAT_PME). Nous avons retranscrit intégralement 14 entretiens semi-directifs d’une durée d’une heure au cours desquels nous avons questionné dans leurs locaux des responsables de ressources humaines (RRH) de région, des DRH nationaux, des chargés de recrutement ou de relations écoles. Par des questions ouvertes, nous avons exploré différents thèmes en suivant un guide d’entretien préalablement établi : contexte de l’entreprise et caractéristiques, activités et formations des ingénieurs, recrutement et carrières, conditions d’émergence et de développement de l’apprentissage dans l’entreprise pour former des ingénieurs.

34 Les retranscriptions de ces entretiens ont été complétées par l’analyse des documents écrits (plaquettes de communication, diverses publications et sites Internet des entreprises). L’ensemble de ce matériau a bénéficié d’un double traitement, une lecture flottante suivie d’un codage multithématique, considérant que les deux démarches peuvent être utilisées en complément l’une de l’autre à des moments différents de la recherche (Dumez, 2011). La première lecture flottante visait à découvrir l’ensemble des possibles en cherchant à être surpris, sans canaliser dans une direction obligée (Ayache et Dumez, 2011, p. 29). Cette étape a permis de compléter la liste des thèmes qui préexistaient à la collecte et à l’analyse et qui étaient issus d’une part, de notre revue de littérature et d’autre part, de notre vécu professionnel d’enseignant, de tuteur pédagogique auprès d’apprentis et de doctorant. Ces diverses positions ont facilité les échanges avec les acteurs du monde éducatif et du monde professionnel ainsi qu’avec les chercheurs. Ces thèmes nous ont permis de coder ensuite le matériau en cherchant les ressemblances et les différences dans les propos (Dumez, 2011).

3 – Résultats : les recruteurs reconnaissent que les ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage sont plus compétents mais ils continuent d’attacher plus d’importance au nom de l’école qui les a formés

35 Les principaux résultats nous ont permis de confirmer une certaine convergence entre la littérature et les perceptions des recruteurs concernant les modifications apportées par la voie de l’apprentissage dans le système de formation des ingénieurs (3.1). Néanmoins, l’apprentissage ne semble pas transformer le regard des recruteurs sur les ingénieurs diplômés (3.2). Le jugement du marché du travail français sur la qualité de l’ingénieur semble toujours se fonder sur le nom de l’école bien plus que sur la modalité de formation (3.3).

3.1 – Une autre formation pour un autre ingénieur

36 Les principaux résultats issus de l’analyse des propos des recruteurs confirment les caractéristiques de l’apprentissage identifiées dans la littérature. Les recruteurs soulignent le changement de pédagogie proposé par cette nouvelle modalité de formation. La valorisation de la pratique dans la pédagogie constitue aux yeux des recruteurs une réelle différenciation pour les ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage. La place réservée à l’expérience et à la pratique au sein du dispositif de formation permet aux ingénieurs de mieux connaître l’ensemble des métiers et de mettre en œuvre immédiatement la théorie apprise à l’école. De fait, avec l’apprentissage, l’entreprise participe à la formation du futur ingénieur en lui apportant la connaissance du métier. Cette implication est forte dans la mesure où le temps passé en entreprise représente généralement plus de la moitié de la durée totale de la formation. Les recruteurs attestent que l’apprentissage permet de développer, au-delà du gain d’expertise technique, des compétences plus transversales. Deux DRH de groupes régionaux considèrent par exemple que :

  • « Il a la connaissance tout simplement de la vie de chantier, la vie de chantier c’est particulier, il y a beaucoup d’humain et ces aspects-là ne sont pas abordés, à part dans le cadre des stages. Forcément le jeune formé en apprentissage part avec un plus » (SIB_GROUP-DRH) ;
  • « Il a de différent qu’il connaît, au-delà de juste avoir compris, une organisation d’entreprise, ses services, ses liens, c’est qu’il sait comment ça fonctionne, il appréhende ça au quotidien » (REP_GROUP-DRH).

37 Quand l’apprenti est embauché par l’entreprise qui l’a formé, les connaissances accumulées pendant le contrat d’apprentissage sont « utiles » aux yeux des recruteurs qui affirment alors que l’entreprise gagne du temps. La voie de l’apprentissage permet un gain d’opérationnalité directe dès le premier emploi, la période d’apprentissage étant favorable au développement des savoir-être du futur ingénieur. Des DRH comme des responsables relations écoles affirment ainsi :

  • « Ils connaissent toutes les procédures une fois embauchés » (RYB_GROUP-DRH) ;
  • « Je dirais au départ que l’entreprise a investi dans le choix de l’alternance pour en effet avoir des jeunes opérationnels immédiatement » (NOR_MAJOR-DRH) ;
  • « Il n’y a plus de temps d’adaptation, ça fait trois ans qu’ils sont chez nous » (NOR_MAJOR-RE).

38 Ce dispositif semble par ailleurs faciliter le recrutement d’ingénieurs dans les PME, difficile à cause du manque d’attractivité de ces entreprises sur le marché du travail (salaire plus faible et carrière limitée). Les PME investissent dans le dispositif de l’apprentissage pour attirer, former et garder l’apprenti. Deux DRH de PME déclarent ainsi clairement :

  • « Quand on prend un apprenti, c’est toujours avec l’idée de l’embaucher en fin de cursus. C’est vrai qu’aujourd’hui c’est un de nos principaux leviers de recrutement » (MAB_PME-DRH MAB_PME-DRH) ;
  • « C’est un moyen de les attirer et de les embaucher très jeunes » (TOM_PME-DRH).

39 Les échanges avec les recruteurs montrent toutefois aussi la persistance de certaines perceptions de la qualité de l’ingénieur.

3.2 – Des perceptions bien ancrées

40 Malgré les nombreux propos que nous venons de citer, les recruteurs tiennent aussi un discours qui ne reconnaît finalement pas de compétences réellement différenciatrices chez les ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage par rapport à leurs homologues formés sous statut étudiant. Plusieurs de nos interlocuteurs tendent ainsi à tenir des propos apparentés à ceux de ce responsable de recrutement et ce DRH :

  • « L’apprentissage ne joue pas sur les compétences. C’est la personnalité du jeune qui fera sa carrière. L’apprentissage est juste un accessit qui facilite la transition école/emploi » (ROC_GROUP-REC) ;
  • « Je ne vois pas de différences de compétences une fois embauchés entre un ingénieur issu de l’alternance et un ingénieur classique » (DAB_GROUP-DRH).

41 L’apprentissage ne semble pas offrir de réelle plus-value négociable pour l’ingénieur sur le marché de l’emploi. Comme ce chargé de recrutement et ce DRH, certaines majors considèrent même avec méfiance les candidatures d’ingénieurs formés par leurs concurrents :

  • « Je ne peux pas dire qu’ils sont meilleurs je me dois d’être honnête et intègre. Ils sont mieux préparés mais est-ce-que au bout de deux ou trois ans… Est-ce qu’ils sont plus rapides … je ne pense pas… plus efficaces plus efficients… je n’ai pas assez de recul pour le dire » (ROC_GROUP-REC) ;
  • « S’il n’a pas été embauché, c’est qu’il y a un loup, clairement » (FAP_MAJOR-DRH).

42 Pour les majors et les groupes, former un ingénieur par la voie de l’apprentissage n’est pas forcément le signe d’un engagement pour une embauche ou d’une priorité par rapport aux étudiants stagiaires, plusieurs DRH nous l’ont ainsi clairement dit :

  • « Si on a accueilli un stagiaire et un apprenti et qu’on a un poste à pourvoir … [réfléchit] ce qui va compter c’est aussi la motivation entre ces deux personnes, enfin ce qui va compter c’est la période qu’ils ont pu réaliser » (RYB_GROUP-DRH) ;
  • « Il peut y avoir des compétences qui nous échappent. Il peut y avoir des bons éléments comme les stagiaires, il y a de bons stagiaires qui peuvent faire de bons CDI » (FAP_MAJOR-DRH) ;
  • « Je dirais au départ que l’entreprise a investi dans le choix de l’apprentissage […] mais ça ne veut pas dire qu’on n’embauche pas des jeunes qui sortent de l’école après leur stage de fin d’études » (REP_GROUP-DRH).

43 L’opérationnalité évoquée précédemment, trop contingente de l’entreprise formatrice, semble davantage relever d’un « formatage » revendiqué par l’entreprise elle-même. Plusieurs DRH évoquent cette dimension assez franchement :

  • « Cela nous permet entre guillemets de formater aux méthodes de l’entreprise » (SIB_GROUP-DRH) ;
  • « Nous lui inculquons la manière de faire de l’entreprise » (REP_GROUP-DRH) ;
  • « Il a les valeurs du groupe, il va fonctionner à la mode "groupe", à la sauce "groupe" et donc il aura les réflexes qu’on attend » (COX_GROUP-DRH) ;
  • « Ce sont de purs produits DAB_GROUP, c’est comme ça que… ce n’est pas péjoratif… ce sont des DAB_GROUP… ils ont connu au biberon, comme on dit, les valeurs de notre entreprise » (DAB_GROUP-DRH).

44 En définitive, les critères de jugement des recruteurs ne semblent pas réellement modifiés. Nous les développons dans la partie suivante.

3.3 – Des critères de recrutement qui évoluent peu

45 Le nom de l’école ressort très souvent dans les discours des interviewés. Certains peinent même à se souvenir si l’intéressé a été formé par la voie de l’apprentissage mais retrouvent sans mal l’école d’origine au point de désigner le salarié par le nom de son école. La réputation de l’école reste encore le critère déterminant lors du recrutement d’un ingénieur. C’est ce nom qui fait la différence bien plus que le type de cursus suivi (étudiant ou apprenti). Les programmes de formation sont d’ailleurs souvent peu connus des recruteurs. Les propos de ce DRH et de ce RRH rendent particulièrement clairement compte de ces deux points :

  • « Je dois minimiser le risque et le fait d’avoir un ingénieur diplômé d’une école reconnue minimise le risque. Vu le schéma franco-français un peu sur sa dimension prestige, je crois que malheureusement vous aurez, toujours statistiquement et toujours sur cette dimension de minimiser le risque, plus de chances de trouver un bon ingénieur dans une très bonne école qu’un bon ingénieur dans une école de zouzous de province » (ROC_GROUP-DRH) ;
  • « Vous connaissez le contenu de la formation ? Euh, moi personnellement pas forcément, même si je l’ai regardé au début, c’est plus le maître d’apprentissage qui suit le parcours » (MAB_PME-RRH).

46 Chaque école a ainsi son image et sa renommée. Tandis que certains noms d’école sont directement associés par les recruteurs à un cursus exclusif en apprentissage, d’autres bénéficient de la confiance déjà installée par les relations établies dans le cadre de formations par la voie classique proposées par cette école. C’est un peu comme si cette dernière n’avait plus à prouver la qualité des formations qu’elle délivre, même si les modalités de celles-ci changent. Les ingénieurs sont avant tout diplômés de telle école, le type de formation suivie apparaît secondaire.

47 Quant à celles proposant exclusivement la voie de l’apprentissage (très souvent des structures partenariales de type NFI), la situation est plus nuancée. Ces écoles sont reconnues par les recruteurs comme telles, à savoir comme des « fournisseurs » d’apprentis. Dans notre enquête, elles apparaissent aux yeux des acteurs (recruteurs mais aussi ingénieurs interviewés dans la suite de notre travail doctoral) comme moins sélectives. Il semblerait que cette moindre sélectivité induise de la part des recruteurs une moindre confiance voire une méfiance envers l’école concernée et le niveau de qualité de la formation proposée. Les deux DRH cités ci-dessous évoquent clairement cette caractéristique :

  • « Je pense que l’offre de formation en apprentissage pour les ingénieurs n’est pas convaincante, nous recherchons une offre plus qualitative » (REP_GROUP-DRH) ;
  • « Ce qui me garantit un niveau, c’est la qualité de l’enseignement et de l’école. Ça reste entre nous, je préfère largement un "cite une école proposant des formations classiques et en apprentissage" qu’un "cite une école uniquement dédiée à l’apprentissage" » (DAB_GROUP-DRH).

4 – Discussion

48 Nos résultats permettent d’alimenter deux pistes de discussion complémentaires avec la littérature. Tout d’abord, bien que la voie de l’apprentissage permette le développement de nouvelles compétences, les recruteurs confrontés à l’incertitude d’un recrutement continuent d’attacher beaucoup d’importance à la renommée de l’école (4.1). Néanmoins, la formation des ingénieurs par la voie de l’apprentissage apparaît comme une suspicion de la convention de recrutement en vigueur (4.2).

4.1 – L’apprentissage chez les ingénieurs permet le développement de nouvelles compétences mais les recruteurs continuent d’attacher de l’importance à la renommée de l’école

49 La littérature a clairement identifié que, pour les ingénieurs, la formation par la voie de l’apprentissage a un objectif de transformation des compétences (Malglaive, 1992) en créant une relation plus étroite entre les employeurs et les établissements d’enseignement (Decomps, 1991) et en développant un nouveau type de pédagogie, plus orienté vers l’acquisition de savoirs d’action (Grelon et Marry, 1995).

50 Nos résultats montrent que ces objectifs sont très largement atteints. Plusieurs de nos interlocuteurs soulignent que les ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage ont acquis des compétences différentes et plus directement utiles pour leur futur employeur que leurs collègues formés dans le modèle traditionnel. Nos résultats ont montré également que la voie de l’apprentissage a transformé la pédagogie utilisée pour la formation des ingénieurs. Ceux-ci mettent directement en œuvre ce qu’ils ont appris et testent donc beaucoup plus rapidement la pertinence des connaissances acquises.

51 Nos résultats enrichissent toutefois aussi cette littérature en montrant que ces compétences distinctives des ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage ne sont pas nécessairement prises en compte lors des décisions d’embauche. Le recrutement étant un acte stratégique (Dany et Livian, 2002) et risqué (parce que marqué par une très forte asymétrie d’information sur les compétences, la productivité et les comportements des candidats (Cadin et al., 2012)), le nom de l’école qui a formé l’ingénieur continue d’être utilisé par les recruteurs comme une forme de garantie quant à la qualité du candidat. Nos résultats montrent d’ailleurs que plusieurs facteurs de risque se conjuguent pour conduire les recruteurs à chercher dans le nom de l’école une réassurance sur la qualité de l’ingénieur recruté. Par exemple, nos résultats montrent qu’une entreprise refuse parfois de recruter un ingénieur formé par la voie de l’apprentissage qui n’a pas été recruté par l’entreprise où il a fait son apprentissage car le recruteur considère souvent que s’il n’y a pas été embauché, c’est sans doute que cet ingénieur n’est pas bon.

52 Nos résultats montrent que les recruteurs ne vont généralement pas jusqu’à nier les compétences développées par les ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage mais dans le contexte risqué qui est le leur lors d’un recrutement, ils se servent de la renommée de l’école comme d’un signal de la qualité de l’ingénieur qu’ils tentent de recruter. Le risque que représente le recrutement pour une entreprise constitue donc un des leviers par lesquels les écoles renommées défendent et entretiennent leur position dans la hiérarchie du système de formation des ingénieurs.

4.2 – La formation par la voie de l’apprentissage, une suspicion de la convention traditionnelle de recrutement pour cette catégorie professionnelle ?

53 Gomez définit la suspicion de convention comme une information qui tend à remettre en cause la convention existante : il existe « une économie de la suspicion, de la remise en cause des règles et, par conséquent, une analyse possible des échecs et des réussites des stratégies mises en place » (1996, p. 185). Les conventions sont de différents types : effort (Leibenstein, 1982), qualité (Salais, 1989), recrutement (Eymard-Duvernay et Marchal, 1997), etc. Les conventions sont un « ensemble de critères, implicites ou explicites auxquels un individu se réfère au moment de décider » (Gomez, 1996, p. 173). Ces constructions sociales destinées à orienter les comportements sont dotées d’une grande stabilité et montrent une tendance à l’auto-entretien (Salais, 1989). Néanmoins, elles peuvent s’affaiblir lorsqu’une « suspicion » concernant leur efficacité se construit progressivement (Gomez, 1996, p. 186).

54 Nos résultats montrent que la formation des ingénieurs par la voie de l’apprentissage pourrait constituer la base d’une suspicion de la convention actuelle de recrutement des ingénieurs. Cette remise en cause n’est encore que très partielle. Nos résultats montrent que c’est seulement sur les compétences plus transversales qui sont acquises et sur les modes de formation (proximité entreprise–organisme de formation) que les recruteurs reconnaissent que les ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage apportent un plus. Pour ce qui concerne les décisions de recrutement, les acteurs se retrouvent dans un contexte de forte incomplétude de la règle (aucun critère ne permet d’être certain de la qualité d’un ingénieur) et confrontés à un risque majeur (l’erreur de recrutement). C’est exactement dans ce type de contexte (risque et incomplétude de la règle) que les conventions sont les plus utiles et les plus utilisées. Elles sont particulièrement stables et s’autorenforcent car elles proposent aux acteurs une solution pour orienter et justifier leurs actions. Ce contexte explique que les recruteurs continuent très majoritairement de se référer à la renommée de l’école pour prendre leurs décisions de recrutement des ingénieurs. Néanmoins, il apparaît que la formation des ingénieurs par la voie de l’apprentissage réduit la « conviction » des recruteurs dans l’efficacité de la convention existante, celle-ci n’a plus le statut « d’évidence » (Gomez, 1996, p. 182). Les recruteurs perçoivent que les ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage ont développé des compétences qui pourraient leur être particulièrement utiles tout au long de leur carrière. Une alternative à la convention actuelle pourrait donc être en train d’émerger.

Conclusion

55 Notre article s’interroge sur la manière dont les recruteurs perçoivent les ingénieurs formés par la voie de l’apprentissage. Nos résultats montrent que, bien qu’ils leur reconnaissent des compétences différentes et plutôt plus adaptées aux besoins des entreprises, ils continuent de faire davantage confiance à la réputation des écoles dans lesquelles les ingénieurs ont été formés. Ces résultats nous paraissent particulièrement clairs et pertinents. Néanmoins, cette étude qualitative contient des limites inhérentes à la méthodologie choisie. Pour pouvoir généraliser nos résultats, il conviendrait de la répliquer dans d’autres secteurs et dans d’autres entreprises. Sur le plan conceptuel, une analyse en termes de suspicion de convention (Gomez, 1996) permettrait de prolonger les premiers résultats que nous proposons.

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Date de mise en ligne : 14/11/2017.

https://doi.org/10.3917/mav.095.0015

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