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Article de revue

Fénelon épistolier et la tradition moraliste – dans le sillage de François de Sales ?

Pages 341 à 363

Notes

  • [1]
    Même s’il interprète parfois indûment le livre dans son propre sens, comme l’a justement montré Fr. Bouchardy, « S. François de Sales et la controverse Bossuet-Fénelon », Nova et Vetera, n° 41 / 4, 1966, p. 246-257.
  • [2]
    Les Epistres spirituelles du Bienheureux François de Sales, Lyon, V. de Cœursilly, 1626 ; 2nde éd. 1628.
  • [3]
    Fénelon, Correspondance, éd. I. Noye, J. Le Brun et B. Neveu, Paris, Klincksieck [t. I-V], puis Genève, Droz, 18 vol., 1972-2007, t. X, p. 56, lettre 643 (29 janv. 1700). Désormais les références à la Correspondance de Fénelon seront abrégées comme suit : CF, numéro du tome en chiffres romains.
  • [4]
    À compléter par notre François de Sales (1567-1622), un homme de lettres spirituelles. Culture – tradition – épistolarité, Genève, Droz, « Travaux d’Humanisme et Renaissance », 1999, p. 264 et n. 40-41. Sur le rôle que jouent les lettres salésiennes dans la correspondance entre Fénelon et Mme de Maintenon, on se reportera aussi au témoignage de la lettre 825bis de fin 1694 : CF, II, p. 302-312.
  • [5]
    Sur la différence à établir entre épistolier et auteur épistolaire, se reporter à R. Duchêne, Écrire au temps de Mme de Sévigné : lettres et texte littéraire, 2e éd. augmentée, Paris, Vrin, 1982, p. 11-28. Dès 1704, une partie des lettres de Fénelon fut d’ailleurs publiée en un corpus anonyme, sous forme d’opuscules spirituels formant la base des recueils de Réflexions saintes, de Sentiments de pénitence et de piété et autres Œuvres spirituelles dont on trouvera les références bibliographiques dans l’édition critique des Œuvres de Fénelon, éd. J. Le Brun, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1983-1997, t. I, p. 1417-1418.
  • [6]
    C’est ce procédé – largement utilisé par Mme de La Fléchère – qui, dans le cas de Mme de Charmoisy, est à l’origine de la publication de l’Introduction à la vie dévote ; voir V. Mellinghoff-Bourgerie, op. cit., p. 221-232, 333 et 374-381.
  • [7]
    CF, IX, p. 222, commentaire (passage tiré du recueil des Lettres historiques et galantes publié à Londres en 1739).
  • [8]
    À compléter par notre article, « L’écrivain au service des âmes : tradition et avatars de l’épistolarité spirituelle », Travaux de littérature, vol. XXI (« La Spiritualité des écrivains »), 2008, p. 117-130.
  • [9]
    CF, X, p. 122-123, lettre 705 (28 janvier 1701). À rapprocher d’une lettre antérieure à la même, CF, X, p. 73-74, lettre 660 (30 avril 1700) : « Je ne sais si vous avez bien lu les livres de s. Fr[ançois] de Sales. Mais il me semble que vous pourriez lire fort utilement ses entretiens, quelques-unes de ses épîtres, et divers morceaux de son grand traité de l’amour de Dieu. En parcourant vous verrez assez ce qui vous convient. L’esprit de ce bon saint est ce qu’il faut pour vous éclairer, sans nourrir en vous le goût de l’esprit, qui est plus dangereux pour vous que pour un autre ».
  • [10]
    CF, X, p. 71, lettre 657 (15 avril 1700).
  • [11]
    CF, XIV, p. 11, lettre 1194 (29 janvier 1708).
  • [12]
    À compléter par V. Mellinghoff-Bourgerie, art. cit., p. 118-122. Dans cette même lettre, Fénelon écrit encore : « J’espère que l’onction de S. François de Sales découlera de son cœur dans le vôtre pour l’adoucir et pour le calmer » (ibid.).
  • [13]
    Pour l’analyse de ce corpus, voir I. Noye, « Fénelon maître spirituel », La Vie spirituelle, n° 680, 1988, p. 407-418.
  • [14]
    Se reporter, pour plus de précisions, à V. Mellinghoff-Bourgerie, art. cit., p. 124-126. A. Adam rappelle que, de toute façon, avant la rencontre de Mme Guyon, Fénelon pratiquait une « direction encore très conventionnelle », correspondant au programme de Saint-Sulpice (Histoire de la littérature française au XVIIe siècle, Paris, Del Duca, 1949-1956, t. V, p. 137). Après sa rencontre avec la mystique, les lettres qu’il échange avec elle font de lui moins un directeur qu’un dirigé, comme il le reconnaît bien volontiers : voir la lettre du 26 juillet 1689, Madame Guyon et Fénelon. La Correspondance secrète, éd. É. Perrot, Paris, Dervy-Livres, 1982, p. 208. Vu le caractère mystique de leurs échanges, qui exigerait une approche plus théologique que littéraire, cette correspondance-là ne fera pas partie du corpus sur lequel se fonde notre article.
  • [15]
    Dans l’édition en question (Paris, J. de Gigord, 1902, 6e éd. 1920), les lettres choisies ne concernent pas seulement la comtesse de Montberon, mais aussi la comtesse de Gramont, le duc de Bourgogne, Mme de Maintenon, le duc et la duchesse de Beauvillier, le marquis de Seignelay, la marquise d’Alègre, le duc et la duchesse de Chevreuse, les duchesses de Mortemart, le marquis de Blainville, le duc de Chaulnes, l’électeur de Cologne et quelques anonymes.
  • [16]
    Il n’y a pas non plus d’entrée sous ce terme dans le recueil des Pensées et maximes de Fénelon (éd. Duval, Paris, Roret et Roussel, 1821), malgré un classement par thèmes qui l’auraient fait attendre. Cf. les entrées « Dévots-Dévotion », p. 47 sq. ; « Favoris-Faveurs », p. 147 sq. ; « Courtisans », p. 150 sq. ; « Louanges », p. 154 sq. ; « Politique », p. 177 ; « Commerce », p. 192 sq. ; « Vertu », p. 205 sq. ; « Sagesse-Sages », p. 211 sq. ; « Raison », p. 214 sq. ; « Vérité », p. 220 sq. ; « Humilité », p. 226 sq. ; « Temps », p. 234 sq.
  • [17]
    Pour l’étendue du corpus savoyard des lettres salésiennes, se reporter à l’Annexe de notre article sur François de Sales, « Les destinataires de François de Sales à l’intérieur du duché de Savoie », dans L. Terreaux (éd.), Histoire de la littérature savoyarde, Montmélian, à paraître en 2010.
  • [18]
    Comme l’a écrit Michel de Certeau à propos d’un autre corpus : « l’intention de les “produire au jour” en a lentement effacé les particularités. […] Le temps a mué la correspondance personnelle en “pensées” – en pierres d’où s’efface la singularité des événements » (« L’étrange secret. Manière d’écrire pascalienne : la 4e lettre à Mlle de Roannez », Rivista di storia e letteratura religiosa, n° 12-13, 1976-1977, p. 104-105).
  • [19]
    Œuvres de S. François de Sales, éd. des Religieuses de la Visitation du premier Monastère d’Annecy, 27 vol., Annecy, Niérat, 1892-1964, lettre CXC, t. XII, p. 202-206, (l’orthographe a été modernisée par nous-même). Désormais les références à cette édition seront abrégées comme suit : OEA, numéro du tome en chiffres romains.
  • [20]
    Dans le recueil des Épîtres spirituelles, l’identité des destinataires a été systématiquement gommée par souci d’anonymat et de généralisation (cf. V. Mellinghoff-Bourgerie, op. cit., p. 188-190, 239 sq. et 348 sq.).
  • [21]
    Par exemple, dans cette même lettre CXC : « Il faut souffrir notre propre imperfection pour avoir la perfection » (XII, p. 203), ou bien : « Je vous recommande la sainte simplicité » (XII, p. 205), avec la formule finale : « Béni soit Notre Seigneur. Je le supplie qu’il soit votre cœur, votre âme, votre vie, et je suis – Votre serviteur etc. » (XII, p. 206).
  • [22]
    OEA, XII, p. 202.
  • [23]
    Pour la signification exacte du terme, voir B. Dupriez, Gradus. Les procédés littéraires, Paris, UGE, « 10/18 », 1984, p. 239-240. Rappelons que l’évolution de la syntaxe française correspond à l’écart de siècle qui sépare les deux épistoliers : François de Sales a dû rédiger cette lettre en 1603 (voir OEA, XII, p. 202), alors que les lettres de Fénelon à l’épouse du gouverneur de Cambrai ont été écrites entre 1700 et 1713.
  • [24]
    CF, X, p. 104, lettre 688 (dimanche 7 novembre 1700, à la comtesse de Montberon).
  • [25]
    Passage cité par A. Montandon, Les Formes brèves, Paris, Hachette, 1992, p. 8 ; à comparer au jugement de La Rochefoucauld : « La véritable éloquence consiste à dire tout ce qu’il faut et ne dire que ce qu’il faut » (maxime 250).
  • [26]
    Pour le sens exact de ces termes, voir J. Dubois et al., Dictionnaire de linguistique, Paris, Larousse, 1973, ad verb. Si la rhétorique de la parénèse distingue, au niveau des actes illocutoires et perlocutoires, deux modes d’approche éthique – le premier conduisant à la reconnaissance de ce qui est juste et bon (ou injuste et mauvais), le second incitant au bien-agir –, ces deux aspects restent étroitement liés, sinon indissociables dans la pratique : voir P. Rabbow, Seelenleitung. Methodik der Exerzitien in der Antike, Munich, Kösel, 1954, p. 144 sq. et 336-338.
  • [27]
    Lettre autographe CLXVIII, OEA, XII, p. 151.
  • [28]
    CF, X, p. 48, lettre 639 (30 décembre 1699).
  • [29]
    Traité de l’amour de Dieu, livre VIII, chap. III, OEA, V, p. 66 (l’orthographe a été modernisée).
  • [30]
    CF, X, p. 104, lettre 688 (dimanche au soir 7 novembre [1700]).
  • [31]
    OEA, XVI, p. 118 (l’orthographe a été modernisée par nous-même).
  • [32]
    « La vérité est telle que nous n’aimerons jamais nos prochains purement, et comme Dieu le veut, jusqu’à ce que nous ayons corrigé cet amour de nous-mêmes » (éd. M. Bernouilli et J. Metraux, Genève, Labor et Fides, 1965, p. 113).
  • [33]
    Lettre CCXL, OEA, XII, p. 383.
  • [34]
    Lettre autographe DXII, OEA, XIV, p. 120.
  • [35]
    Ibid., p. 119.
  • [36]
    I Jean, III, 19-20 (« et devant lui nous apaiserons notre cœur, si notre cœur venait à nous condamner, car Dieu est plus grand que notre cœur et il connaît tout », trad. de la Bible de Jérusalem, Paris, Cerf, 1973).
  • [37]
    OEA, XIV, p. 119, loc. cit. ; avec citation du Psaume XXXII, 18.
  • [38]
    CF, XIV, p. 153, lettre 1311 (jeudi 8 août 1709).
  • [39]
    CF, XVIII, p. 37, commentaire, n. 2.
  • [40]
    Cf. par exemple les lettres du 19 février 1701 (CF, X, p. 126-127, lettre 109) ; du mardi 10 octobre 1702 (CF, X, p. 289-291, lettre 867) ; de la mi-mai 1703 (CF, XVIII, p. 36-37, lettre 1968) ; du mercredi 10 août 1707 (CF, XII, p. 327-329, lettre 1159) ; ou bien du 8 août 1709 (CF, XIV, p. 153, lettre 1311).
  • [41]
    CF, X, p. 289, lettre 867, loc. cit..
  • [42]
    CF, XIV, p. 276, lettre 1408 (11 octobre 1710, à la douairière de Mortemart).
  • [43]
    CF, II, p. 224, annexe de la lettre 175 (samedi 2 juin 1691).
  • [44]
    Voir L. Van Delft, Les Spectateurs de la vie. Généalogie du regard moraliste, Saint-Nicolas (Québec), Presses de l’Université de Laval, 2005, p. 135-164.
  • [45]
    Voir M. Kruse, « Die französischen Moralisten des 17. Jahrhunderts », dans Margot Kruse : Beiträge zur französischen Moralistik, J. Küpper et alii éd., Berlin / New York, De Gruyter, 2003, p. 6-7.
  • [46]
    CF, II, p. 51, lettre 23 (mardi 10 décembre 1686).
  • [47]
    À compléter par l’étude de J. Lafond, La Rochefoucauld. Augustinisme et littérature, Paris, Klincksieck, 1977, p. 89 et passim.
  • [48]
    Citant de mémoire la maxime 276 dans une lettre à Bossuet (« Je me souviens en ce moment de ce mot de M. de La Rochefoucauld : “L’absence augmente les grandes passions et diminue les médiocres, comme le vent éteint la bougie et allume le feu” »), la cousine de Mme Guyon s’était attiré de la part de l’évêque – qui avait pourtant assisté le duc de La Rochefoucauld à l’article de la mort – cette réponse cinglante : « Vous citez en ce fait un mauvais auteur » (Bossuet, Correspondance, éd. Urbain et Levesque, Paris, Hachette, 1920, t. XIII, p. 83, lettre du 30 mai 1701).
  • [49]
    Fénelon, Œuvres, éd. cit., t. I, p. 4.
  • [50]
    La Bruyère, Les Caractères, éd. R. Garapon, Paris, Garnier, 1962, p. 507 ; cf. la remarque 30 du chapitre « De la Chaire », laquelle souligne les mérites du prélat.
  • [51]
    Rappelons qu’à côté des réunions du Petit Concile (qui s’arrêtèrent, il est vrai, vers 1682), La Bruyère retrouvait à Chantilly la mère de l’abbé de Langeron qui était lui-même un intime de Fénelon.
  • [52]
    Discours sur Théophraste (1688), dans La Bruyère, Les Caractères, éd. cit., p. 15.
  • [53]
    J. Lafond, La Rochefoucauld, op. cit., passim ; L. Van Delft, Le Moraliste classique. Essai de définition et de typologie, Genève, Droz, 1982, chap. VI, p. 176-233.
  • [54]
    Ph. Sellier, « La Rochefoucauld, Pascal, saint Augustin », Revue d’Histoire Littéraire de la France, n° 69, 1969, p. 574.
  • [55]
    Les Caractères, « De la Cour », remarque 99.
  • [56]
    La Rochefoucauld, Maximes, « Maxime supprimées », 6.
  • [57]
    CF, IV, p. 22-24, lettre 322 (25 mai 1695).
  • [58]
    Traité de l’amour de Dieu, livre IV, chap. I, OEA, IV, p. 216-217.
  • [59]
    P. Nicole, Œuvres philosophiques et morales, éd. Ch. Jourdain, Paris, Hachette, 1845 [réimpr. Hildesheim / New York, G. Olms, 1970], chap. XI : « De la faiblesse de l’homme », p. 91.
  • [60]
    CF, XVIII, p. 127, lettre LSP 105* [LSP pour Lettres spirituelles].
  • [61]
    Outre l’article de Ph. Sellier, cité supra n. 54, voir aussi J. Delumeau, Le Péché et la peur. La culpabilisation en Occident (XIIIe-XVIIIe siècles), Paris, Fayard, 1983.
  • [62]
    CF, IV, p. 24, lettre 322.
  • [63]
    La Bruyère, Discours sur Théophraste, éd. cit., p. 13.
  • [64]
    L. Van Delft, Les Spectateurs de la vie, op. cit., p. 128.
  • [65]
    CF, IV, p. 25, lettre 322 (25 mai 1695).
  • [66]
    À compléter par L. Van Delft, Le Moraliste classique, op. cit., chap. VIII in toto.
  • [67]
    Voir A. Montandon, Formes brèves, op. cit., p. 53-54.
  • [68]
    CF, II, p. 217, lettre 163 (31 mars 1691, à la marquise de Laval).
  • [69]
    CF, XVIII, p. 147, LSP 130* (lettre envoyée à la duchesse de Mortemart vers 1693).
  • [70]
    CF, XIV, p. 277, lettre 1408 (11 octobre 1710, à la douairière de Mortemart).
  • [71]
    CF, X, p. 46, lettre 639 (30 décembre 1699, au duc de Chevreuse).
  • [72]
    CF, XIV, p. 277, lettre 1408.
  • [73]
    Ibid., p. 278.
  • [74]
    CF, XII, p. 74, lettre 846 (3 novembre 1703, à la comtesse de Montberon).
  • [75]
    CF, XIV, p. 66, lettre 1239 (16 septembre 1708).
  • [76]
    Selon G. Haroche-Bouzinac, la mise à distance que provoque la lettre conduit à la production quasi spontanée de réflexions générales, qui jouent alors le rôle de « haltes méditatives » (L’Épistolaire, Paris, Hachette, 1995, p. 107).
  • [77]
    Ibid., p. 105. Rappelons que les lettres d’Antoine Godeau furent publiées de façon posthume, en 1713, c’est-à-dire encore du vivant de Fénelon.
  • [78]
    OEA, XII, p. 193 ; à compléter par notre François de Sales, op. cit., p. 131-135 et 155-157.
  • [79]
    Ibid., p. 132-135 ; à compléter par É. Faguet, « Les lettres spirituelles de S. François de Sales », La Revue Latine, n° 3, 1904, p. 513-540 ; Sr. F.-L. L’Espérance, « Le style des lettres de S. François de Sales », Revue de l’Université Catholique de Laval (Québec), n° 5, février 1951, p. 502-519 ; L. Terreaux, « À propos de la correspondance latine de S. François de Sales », dans H. Bordes et J. Hennequin (éd.), L’Unidivers salésien. S. François de Sales hier et aujourd’hui, Paris, Diffusion Champion-Slatkine, 1994, p. 132.
  • [80]
    Lettre CLXVIII, OEA, XII, p. 145. On distinguera cette formule prescriptive de l’adage dont l’autorité est liée à la célébrité des personnages qui auraient émis de telles vérités, qu’il s’agisse de Salomon ou, par extension, des sagesses bibliques (d’où le « Rien n’est si constant sous le ciel qui ne fléchisse ; rien de si pur qui ne recueille quelque poussière », ibid., à la fin du paragraphe).
  • [81]
    Lettre CXC, OEA, p. XII, 205.
  • [82]
    Lettre CLXVIII, OEA, XII, p. 145.
  • [83]
    Ibid., p. 142.
  • [84]
    Voir W. A. Spann, « Franz von Sales und Plinius der Ältere », Jahrbuch für salesianische Studien, n° 3, 1966, p. 3-66.
  • [85]
    Lettre CLXVIII, OEA, XII, p. 141.
  • [86]
    En ce sens, la comparaison imagée de la maxime 276 (citée supra, n. 48) fait figure d’exception. Pour l’ensemble de la question, on se reportera à M. Foucault, Les Mots et les choses. Une archéologie des sciences humaines [1966], Paris, Gallimard, 1990, p. 32-59.
  • [87]
    G. Haroche-Bouzinac (op. cit., p. 104) rappelle que, dès 1683, Du Plaisir souligne dans ses Sentiments sur les lettres et sur l’histoire que « la mode des proverbes » n’est plus de mise dans les lettres.
  • [88]
    Cité dans M. Maloux, Dictionnaire des proverbes, sentences et maximes, Paris, Larousse, 1960, p. X. Sur la sentence comme fleur de rhétorique (au sens où Érasme a rassemblé des flores Senecæ), voir A. Montandon, op. cit., p. 26-27. On notera, justement, que la rhétorique de l’ornement semble étrangère à l’épistolarité fénelonienne.
  • [89]
    J. Dubois, Grammaire structurale du français, Paris, Larousse, 1965-1969, t. I (« Nom et pronom »), p. 114.
  • [90]
    CF, XII, p. 199, lettre 1061 (30 octobre 1705, au vidame d’Amiens). Dans cette citation, comme dans celle de la maxime précédente, les nous et les on ont été mis en relief par nous-même.
  • [91]
    CF, X, p. 126, lettre 709 (samedi 19 février 1701) ; souligné par nous-même.
  • [92]
    J. Dagen, « Le clair-obscur de La Bruyère », Littératures Classiques, supplément du n° 13, janvier 1991, p. 30-31.
  • [93]
    CF, XIV, p. 66, lettre 1239 (16 septembre 1708, au duc de Bourgogne) ; souligné par nous-même.
  • [94]
    CF, XIV, p. 277, lettre 1408 (11 octobre 1710) ; souligné par nous-même.
  • [95]
    CF, IV, p. 27, lettre 324 (Versailles, 4 juillet 1695). Le ton est le même quinze ans plus tard, dans une lettre adressée à de la duchesse douairière de Mortemart, à propos d’une intrigue de cour dont avait souffert sa correspondante : « Un changement soudain et imprévu choque. On ne peut s’y accoutumer ; on ne croit pas en avoir besoin. On croit voir dans ceux qui se retirent ainsi un manquement aux règles de la bienséance et de l’amitié. On prétend y trouver de l’inconstance, du défaut de simplicité, et même de la fausseté » (CF, XIV, p. 279, lettre 1408, du 11 octobre 1710 – avec mise en italique par nous-même, dans les deux citations).
  • [96]
    G. Haroche-Bouzinac, op. cit., p. 86.
  • [97]
    Lettre CLXVIII, OEA, XII, passim, notamment p. 141 : « Le vermisseau qui rongea la courge de Jonas semblait être petit, mais sa malice était si grande que l’arbrisseau en périt. Ces défauts de votre maison semblent bien minces ; mais leur malice est si grande qu’elle gâte votre vœu de pauvreté » (orthographe modernisée par nous-même).
  • [98]
    Voir V. Mellinghoff-Bourgerie, art. cit., p. 128-130 ; à compléter par notre François de Sales, op. cit., p. 168-182, 206-219.
  • [99]
    Lettre CCCXCIX, OEA, XIII, p. 288.
  • [100]
    CF, VIII, p. 458, lettre 588 (février 1699).
  • [101]
    Saint-Simon, Mémoires, éd. Y. Coirault, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1983-1988, t. IV [années 1711-1714], p. 860. Il est vrai que le mémorialiste ne le « connaissait que de visage, trop jeune quand il fut exilé » et que la « grande addition » pour l’année 1695 complète le tableau en faisant de l’abbé de Fénelon un ambitieux intègre (ibid., t. I, p. 250-255), appelé à s’imposer temporairement auprès de Mme de Maintenon, aux dépens de l’évêque de Chartres (ibid., p. 272-275).
  • [102]
    CF, II, p. 141, lettre 96 (janvier 1690 ?) – souligné par nous-même.
  • [103]
    CF, XVIII, p. 36, lettre 1968 (mi-mai 1703).
  • [104]
    Voir Fénelon, Œuvres, éd. cit., p. XXXII. Jean Orcibal (CF, I, p. 13) rappelle aussi qu’il n’hésitait pas à louer les vers de Mlle de Scudéry, qui lui avaient été envoyés, par souci de plaire.
  • [105]
    Cf. A. Adam, op. cit., p. 136.
  • [106]
    CF, XVIII, p. 202, LSP 199*.
  • [107]
    CF, XVIII, p. 195, LSP 191*.
  • [108]
    J. Le Brun, « La condamnation de l’Explication des maximes des saints et la publication du Télémaque au jour le jour », dans Fr.-X. Cuche et J. Le Brun (éd.), Fénelon. Mystique et Politique (1699-1999), Paris, H. Champion, 2004, p. 128.
  • [109]
    Ibid., p. 133.
  • [110]
    CF, VIII, p. 501, lettre 596 (3 avril 1699).
  • [111]
    CF, X, p. 33, lettre 633 (ca. 4 novembre 1699).
  • [112]
    CF, X, p. 105, lettre 688 (7 novembre 1700).
  • [113]
    Sur l’offre de l’imago vitæ comme principe psychagogique annéen, voir V. Mellinghoff-Bourgerie, « L’écrivain au service des âmes […] », art. cit., p. 119-121.

1On sait l’autorité exercée par la théologie de saint François de Sales sur l’auteur de l’Explication des maximes des saints sur la vie intérieure. Mais Fénelon ne s’est pas seulement imprégné du Traité de l’amour de Dieu[1]. Il lisait aussi les lettres de l’évêque de Genève, dans une édition pourvue du titre d’Épîtres spirituelles et qu’avaient façonnée Jeanne de Chantal et Louis de Sales quatre ans après la mort du prélat savoyard [2]. Dans ce recueil, il estimait retrouver « l’esprit du saint », qu’il recommande à des correspondantes comme la comtesse de Montberon :

2

Le jour de S. François de Sales est une grande fête pour moi, Madame. Je prie aujourd’hui de tout mon cœur le saint d’obtenir de Dieu pour vous l’esprit dont il a été lui-même rempli. Il ne comptait pour rien le monde. Vous verrez par ses Lettres et par sa Vie, qu’il recevait avec la même paix, et dans le même esprit d’anéantissement, les plus grands honneurs et les plus dures contradictions. Son style naïf montre une simplicité aimable, qui est au-dessus de toutes les grâces de l’esprit profane. […] Personne ne connaissait mieux que lui la plus haute perfection. Mais il se rapetissait pour les petits et ne dédaignait jamais rien. Il se faisait tout à tous, non pour plaire à tous, mais pour les gagner tous, et pour les gagner à J.C. et non à soi. Voilà, Madame, l’esprit du saint que je souhaite de voir répandu en vous. [3]

3Bien que cette édition salésienne fût peu fiable, Mme de Maintenon en imposait elle-même la lecture au réfectoire de la Maison de Saint-Cyr [4]. Des générations ayant été marquées par le style spirituel des lettres de François de Sales, on est en droit de se demander si le discours épistolaire salésien a pu également inspirer Fénelon, dont le corpus épistolaire a rencontré un succès comparable à celui de l’évêque savoyard. Du fait de leur caractère semi-privé, les lettres de l’un comme de l’autre furent largement diffusées dans les cercles pieux, du vivant même de leurs auteurs, faisant de ces deux épistoliers de véritables auteurs épistolaires[5]. Nous savons que certaines correspondantes de François de Sales copiaient les lettres qu’elles avaient reçues pour les montrer à des tiers [6]. C’est ce qui se passa également pour les lettres de Fénelon, comme le confirme le témoignage de Mme Du Noyer :

4

Il court dans le monde une lettre de l’archevêque de Cambrai à Mme la marquise d’Alègre, la plus belle du monde. Vous savez que ce prélat n’en écrit pas d’autres. [7]

5Ces lettres, réputées les plus belles du monde, sont-elles comparables à celles de François de Sales, le maître à penser de l’archevêque de Cambrai ? C’est la question à laquelle nous nous proposons de répondre dans les pages qui suivent.

Fénelon et la tradition salésienne de la direction épistolaire

6L’histoire littéraire du début du XXe siècle a classé les lettres dans lesquelles dominent les conseils éthico-religieux sous le genre de la lettre de direction, alors qu’au XVIIe siècle elles portaient la dénomination – plus adéquate – de lettres spirituelles[8]. Dans ses lettres, Fénelon donne bien des directives à la façon d’un directeur spirituel mais, en ce cas, il prend toujours soin de se retrancher derrière l’autorité de l’évêque de Genève :

7

Souvenez-vous que si S. François de Sales était au monde et qu’il fût votre directeur, il vous défendrait d’aller en ce cas [sc. maladie de la correspondante, à la messe du 29 janvier]. Il ne vous le défend pas moins du paradis. En quittant la solennité de sa fête, vous suivrez son esprit. Vous le trouverez dans la faiblesse et dans la simplicité bien plus que dans une régularité forcée. Aimons comme lui, et nous aurons bien célébré sa fête. [9]

8Ce que Fénelon admire en François de Sales, ce n’est pas seulement que « ses lettres et ses entretiens sont remplis de grâce et d’expérience [10] », mais aussi la profondeur et la diversité de l’analyse qu’on y trouve :

9

Vous voyez [là] un homme qui, avec une grande pénétration, et une parfaite délicatesse pour juger du fond des choses, et pour connaître le cœur humain, ne songeait qu’à parler en bon homme, pour consoler, pour soulager, pour éclairer, pour perfectionner son prochain. [11]

10Consoler, soulager, éclairer, perfectionner son prochain, ce sont là des termes correspondant à des catégories rhétoriques bien définies et qui, entrées dans les manuels épistolaires jésuites à l’instar d’Érasme, relèvent de la catégorie générale de la parénèse [12]. Dans le corpus épistolaire des lettres à la comtesse de Montberon, Fénelon s’approprie donc le discours parénétique salésien pour endosser le rôle spirituel de directeur[13]. Mais, comme le reconnaît Moïse Cagnac – qui avait lancé le terme de directeur de conscience à propos de Fénelon –, ce dernier ne fut jamais le théoricien de la direction[14]. D’ailleurs, les lettres choisies par Mgr Cagnac pour son volume des Lettres de direction de Fénelon ne sont pas toutes de teneur spirituelle. Elles contiennent, en effet, des conseils variés, dispensés par le prélat à de hauts personnages de l’aristocratie et de la cour – endroit où la spiritualité est souvent appelée à jouer un rôle secondaire [15] –, ce qui explique que Jacques Le Brun ne propose pas d’entrée direction dans l’index qui clôt son édition critique des Œuvres de Fénelon [16].

11Il n’en est pas moins vrai que, là où Fénelon évoque avec ses correspondants la question du rapport à Dieu et au monde, il transcende le domaine épistolaire profane. Au-delà du jeu des personnes grammaticales du dialogue épistolaire usuel – un je qui écrit et un vous auquel l’épistolier s’adresse –, il s’immisce une troisième personne implicite : Dieu, qui peut être considéré comme le référent commun entre destinateur et destinataire. Ce référent est si important qu’il justifie le renvoi par Fénelon aux lettres de saint François de Sales, où Dieu est constamment présent. En les lisant, les correspondants de Fénelon se sentiront concernés, bien que l’épistolier savoyard ne les ait jamais visés comme destinataires. Les lettres de François de Sales s’adressaient à un cercle relativement restreint, en majorité savoyard [17] ; « la cour » qu’y évoquait l’évêque était celle de Turin, non celle de Versailles ; mais grâce aux manipulations subies par le recueil épistolaire, elles restent aptes à toucher le lectorat fénelonien [18].

12On en prendra pour exemple une lettre célèbre qui, selon la tradition, aurait été adressée par François de Sales à Mlle de Soulfour [19]. L’identité de la correspondante est incertaine, seul un appel passe-partout la caractérise (« Mademoiselle »), repris par un traitement tout aussi vague (« ma bonne fille [20] »). Les tournures impératives du type sachez, regardez, ayons, pensons y abondent, de même que les conseils généraux, qui sont autant de poncifs parénétiques [21]. Par son sujet – redresser le psychisme d’une âme scrupuleuse – cette lettre répond exactement au problème abordé par Fénelon dans ses lettres à la très anxieuse Mme de Montberon. Pour que sa correspondante prenne conscience de l’état de son âme, François de Sales s’inspire du registre médical :

13

Les fièvres spirituelles, aussi bien que les corporelles, sont ordinairement suivies de plusieurs ressentiments, qui sont utiles à celui qui guérit pour plusieurs raisons, mais particulièrement parce qu’ils consument les restes des humeurs peccantes qui avaient causé la maladie, afin qu’il n’en demeure pas un brin ; et parce que cela nous remet en mémoire le mal passé, pour faire craindre de la rechute, à laquelle bien souvent nous nous porterions par trop de licence et de liberté, si les ressentiments, comme menaces, ne nous retenaient en bride pour nous faire prendre garde à nous jusques à ce que notre santé soit bien confirmée. [22]

14Lorsque Fénelon s’adresse à l’épouse du gouverneur de Cambrai, il adopte le même registre, mais en remplaçant par la parataxe le style hyperhypotaxique d’une langue surannée [23], ce qui modifie sensiblement la stratégie parénétique :

15

Comme un hydropique en buvant augmente sa soif, un scrupuleux en écoutant ses scrupules, les augmente, et le mérite bien. Le seul remède est de se faire taire, et de se tourner d’abord vers Dieu. […] Courage donc. Soyez simple. Vous ne l’êtes pas assez, et c’est ce qui vous empêche souvent de tout dire, et de questionner. [24]

16Il apparaît que le changement de goût et de style conduit à une nouvelle pédagogie religieuse – dont la préface à l’édition des Lettres chrétiennes et spirituelles de Le Maistre de Sacy, écrite en 1690, circonscrit déjà les contours :

17

Il est bon que l’esprit des lecteurs ait quelque chose à faire sur les sujets auxquels on s’applique ; parce que cela lui donne lieu de s’imprimer plus fortement et plus profondément des vérités dans le cœur. Ainsi il arrive souvent qu’ils sont d’autant mieux instruits que l’on y a employé moins de paroles et qu’on leur a laissé tirer les conséquences des vérités qu’on leur enseigne. [25]

18En revanche, les particularités locutoires du dialogue parénétique sont restées les mêmes [26]. Employé ici par Fénelon, le recours à la deuxième personne de l’impératif reste de rigueur. Pourtant, comme il apparaît dans l’exemple cité précédemment, François de Sales avait voulu modifier la donne en introduisant aussi la première personne, pour adoucir un discours que l’emploi de l’impératif rendait trop autoritaire. C’est pourquoi, même dans ses lettres de remontrances, l’évêque de Genève recourait à des formules de congé dont le ton se voulait conciliant :

19

Donnez-moi, je vous prie très humblement, cette consolation de lire cette lettre en repos et tranquillité d’esprit, et de la peser non au poids du vulgaire, mais au poids du sanctuaire de la charité. [27]

20Fénelon s’applique à faire sienne l’aménité salésienne, comme le prouve la fin d’une lettre au duc de Chevreuse, à qui il écrit :

21

Pardonnez-moi, mon bon duc, tout ce que je viens de vous dire. Si vous ne le trouvez pas bon, j’aurais tort de l’avoir écrit : mais je ne saurais croire qu’après m’avoir écrit avec tant d’ouverture de cœur, vous n’approuvassiez pas mon zèle sans mesure.

22Mais la remarque qui suit ne correspond plus aux exigences de la condescendance salésienne : « Quand même je me tromperais », ajoute l’archevêque de Cambrai, « mon indiscrétion, en vous mortifiant, vous ferait du bien, pourvu que vous la reçussiez en petitesse [28] ». Dans le Traité de l’amour de Dieu, François de Sales expliquait pourtant que

23

celui qui à vive force ouvrirait la bouche à un ami, lui fourrerait la viande dans le gosier et la lui ferait avaler, il ne lui donnerait pas un festin de courtoisie, mais le traiterait en bête et comme un chapon qu’on veut engraisser.

24Et d’expliquer, en guise de commentaire, que

25

cette espèce de bienfait veut être offert [sic] par semonces, remontrances et sollicitations, et non violemment et forcement exercé ; c’est pourquoi il se fait par manière de désir et non de vouloir absolu. [29]

26Pourquoi Fénelon n’a-t-il pas suivi ce principe salésien, qui alliait le bon sens à l’humanité ? Au-delà de la différence de style, la vision pédagogique des deux épistoliers marque des divergences sur lesquelles il convient de se pencher.

L’analyse moraliste de l’amour-propre dans le discours épistolaire

27Dans ses diverses lettres à la comtesse de Montberon, Fénelon fait remonter la source des « scrupules » qui tourmentent sa correspondante au seul amour-propre :

28

Où est la gêne, le trouble et la servitude, là est l’esprit propre, et un amour excessif de soi. […] On n’aime guère le bien-aimé, quand on est si occupé de ses propres délicatesses ! […] Si vous n’eussiez point résisté à Dieu, pour vous écouter, vous n’auriez pas tant souffert. [30]

29C’est là une analyse qui semble prendre appui sur la psychologie salésienne. Car François de Sales exhorte, lui aussi, à « mettre la main dans les replis de nos cœurs pour en arracher les ordes productions que notre amour-propre y fit par l’entremise de nos humeurs, inclinations et aversions [31] ». Ce n’est pas là une position particulièrement originale, puisque Calvin écrivait déjà dans ses Commentaires au Nouveau Testament[32]. Mais l’évêque de Genève ne tend pas à cautionner trop directement l’esprit calvinien de la Réforme. Aussi, pour éviter que l’âme ne s’épuise dans une lutte perdue d’avance contre l’amour-propre, François de Sales rappelle fort à propos – et en guise de consolation – que « l’amour-propre ne meurt jamais que quand nous mourons [33] ».

30Si, en tant qu’épistolier, François de Sales se garde de dénoncer trop violemment l’amour-propre des ses destinataires scrupuleux, c’est parce qu’il sait que cela risquerait de provoquer chez eux (ou chez elles) de nouveaux scrupules. C’est ce qu’il explique clairement à Mme de La Fléchère :

31

Vos imperfections, que vous voyez subtilement, vous troublent encore plus subtilement, et par ce moyen se maintiennent, n’y ayant rien qui conserve plus nos tares que l’inquiétude et empressement de les ôter. [34]

32Alors que, pour l’évêque de Genève, ces tares « sont des imperfections naturelles, et plutôt maladies que péchés ou défauts spirituels [35] », Fénelon méconnaît la position salésienne lorsqu’il rapporte les mouvements néfastes dénoncés par la psychologie salésienne – « empressements », souhaits intempestifs de « perfection », insatisfaction permanente qui entame la « paix de l’âme » – au seul amour-propre.

33Dans de telles situations, l’évêque de Genève s’efforçait de redonner confiance à ses destinataires en multipliant, au contraire, les paraphrases du célèbre verset johannique : « Dieu est plus grand que notre cœur [36] ». Dans cette même lettre à Mme de La Fléchère, François de Sales insiste sur cet aspect :

34

Il ne faut nullement entrer en défiance, car bien que nous soyons misérables, si ne le sommes-nous pas à beaucoup près de ce que Dieu est miséricordieux à ceux qui ont volonté de l’aimer et qui en lui ont logé leurs espérances.[37]

35Face à l’amour-propre, Fénelon évoque sans doute, lui aussi, l’amour de Dieu salésien. Mais le second n’est plus l’antidote du premier. Il importe plutôt à Fénelon d’insister sur l’opposition irréductible entre ces deux amours, en prêtant au Dieu augustinien des sentiments destructeurs :

36

L’amour-propre parle à une oreille, et l’amour de Dieu à l’autre. L’amour-propre est impétueux, inquiet, hardi, et entraînant. L’amour de D[ieu] est simple, paisible, de peu de paroles. Il parle d’une voix douce et délicate. Dès qu’on prête l’oreille à l’amour-propre qui crie, on ne peut plus discerner la voix tranquille et modeste du s[aint] amour. Chacun ne parle que de son objet. L’amour-propre ne veut parler que du moi qui selon lui n’est jamais assez bien traité. […] Au contraire l’amour de D[ieu] veut que le moi soit oublié, qu’on le compte pour rien, que Dieu seul soit tout, que le moi qui est le Dieu des personnes profanes soit foulé aux pieds, que l’idole soit brisée, et que Dieu devienne le moi des âmes épouses, en sorte que Dieu soit ce qui les occupe, comme les autres sont occupées du moi.[38]

37De l’avis de Jacques Le Brun, cette lettre contient « l’une des pages les plus fortes de Fénelon sur l’amour-propre [39] ». Mais il apparaît que cette thématique parcourt l’ensemble de la correspondance fénelonienne [40]. Intarissable quand il s’agit de l’amour-propre, de son essence et de ses ravages, l’archevêque de Cambrai ne cesse de confronter la comtesse de Montberon à ce problème :

38

Vous avez passé votre vie à croire que vous étiez toujours toute aux autres et jamais à vous-même. Rien ne flatte tant l’amour-propre, que ce témoignage qu’on se rend intérieurement à soi-même de n’être jamais dominé par l’amour-propre, et d’être toujours occupé d’une certaine générosité pour le prochain. Mais toute cette délicatesse qui paraît pour les autres, est dans le fond pour vous-même. […] c’est le moi qui vous rend si vive et si délicate. Vous voulez que Dieu aussi bien que les hommes soit content de vous, et que vous soyez toujours contente de vous-même dans tout ce que vous faites par rapport à Dieu. [41]

39Sans égard pour le côté contreproductif de la dénonciation du moi, si justement mis en relief par François de Sales, Fénelon affecte un ton cassant qui devient bientôt la marque de son style épistolaire. Ailleurs, l’archevêque de Cambrai n’hésite pas à personnifier l’amour-propre selon un procédé qui rappelle clairement les moralistes :

40

L’amour-propre ne peut supporter la vue de lui-même, il en mourrait de honte et de dépit. S’il se voit par quelque coin, il se met dans quelque faux-jour pour adoucir sa laideur et pour avoir de quoi s’en consoler. [42]

41Et lorsqu’il s’adresse à cette habituée de la cour qu’était Mme de Gramont, c’est une véritable saynète que l’épistolier élabore dans sa lettre :

42

L’amour-propre, malade et attendri sur lui-même, ne peut être touché sans crier les hauts cris. Touchez-le du bout du doigt, il se croit écorché. Joignez, à cette délicatesse, la grossièreté du prochain, plein d’imperfections, qu’il ne connaît pas lui-même ; joignez-y la révolte du prochain contre nos défauts, qui n’est pas moins grande que la nôtre contre les siens. Voilà tous les enfants d’Adam qui se servent de supplice les uns aux autres ; voilà la moitié des hommes qui est rendue malheureuse par l’autre, et qui la rend misérable à son tour ; voilà, dans toutes les nations, dans toutes les villes, dans toutes les communautés, dans les familles et jusqu’entre deux amis, le martyre de l’amour-propre. [43]

43C’est à la fois à La Rochefoucauld et à La Bruyère que le lecteur se sent renvoyé, à la vue de cette mise en scène. La façon de présenter visuellement « le martyre de l’amour-propre » invite la destinataire à prendre le rôle de spectateur de la misérable condition humaine, selon une perspective qui rappelle la posture de l’auteur des Caractères[44]. Le rappel implicite de La Rochefoucauld est, quant à lui, plus complexe. La personnification de l’amour-propre n’est pas sans évoquer le frontispice de la première édition des Maximes, qui représente justement l’incarnation figurée d’Amour. Mais cet Amour-là, dénommé « l’Amour de la Vérité », n’est pas l’amour-propre. Tout au contraire, son index pointé vers le masque qui cache le visage de Sénèque (il s’agit là d’un buste placé sur un socle où est gravé le nom d’Ovide [45]) fait de lui un personnage positif, qui incarne le combat de l’auteur La Rochefoucauld contre le masque et l’hypocrisie des « fausses vertus » (stoïciennes, en l’occurrence). La personnification proposée par Fénelon ayant une signification inverse, elle aurait donc plutôt pour objectif de démasquer La Rochefoucauld lui-même, l’épistolier insinuant que l’amour de la vérité est déjà, en lui-même, une forme d’amour-propre. Mais la dénonciation de l’hypocrisie est comparable, comme le prouve cette autre lettre à la comtesse de Gramont :

44

Pour les hypocrites, le temps les démasque, et ils se démentent toujours par quelque côté. Ils ne sont hypocrites que pour jouir du fruit de leur hypocrisie. Ou leur vie est molle et amusée, ou leur conduite est intéressée et ambitieuse. On les voit se ménager, flatter, faire divers personnages. La sincère vertu est simple, unie, sans empressement, sans mystère, elle ne se hausse ni se baisse […]. L’hypocrisie peut imiter tout cela, mais très grossièrement. Quand on s’y trompe, c’est ou défaut d’attention, ou défaut d’expérience de la vraie vertu. Des gens qui ne se connaissent point en diamants, ou qui ne les regardent pas d’assez près, peuvent en prendre de faux comme s’ils étaient fins : mais il est pourtant vrai qu’il y en a de fins et qu’il n’est point impossible de les discerner. [46]

45L’attaque de l’amour-propre – héritée d’un discours à la fois philosophique et augustinien, arrivé à maturité bien avant Fénelon [47] – était familière aux destinataires de l’épistolier, du fait de leur fréquentation assidue des écrivains moralistes de l’époque. C’est ce que confirme l’anecdote concernant la célèbre correspondante de Fénelon à Saint-Cyr, Mme de La Maisonfort, à qui Bossuet devait reprocher de citer La Rochefoucauld [48]. Fénelon, de son côté, connaissait bien l’auteur. C’est ainsi que, dans ses Dialogues sur l’éloquence en général, et sur celle de la chaire en particulier, il loue un prédicateur d’avoir « fait une anatomie des passions du cœur humain, qui égale les Maximes de M. de La Rochefoucauld [49] ». Quant à La Bruyère – qui fit l’éloge de Fénelon dans son Discours de réception à l’Académie française[50] et qui était un intime de l’abbé Fleury [51] –, il ne pouvait guère l’ignorer, en tant que figure littéraire de l’Académie. Et l’on sait comment La Bruyère se situait par rapport à ces « deux ouvrages de morale qui sont dans les mains de tout le monde », c’est-à-dire les Pensées de Pascal et les Maximes de La Rochefoucauld :

46

L’un, par l’engagement de son auteur, fait servir la métaphysique à la religion, fait connaître l’âme, ses passions, ses vices, traite les grands et sérieux motifs pour conduire à la vertu, et veut rendre par là l’homme chrétien. L’autre, qui est la production d’un esprit instruit par le commerce du monde et dont la délicatesse était égale à la pénétration, observant que l’amour-propre est dans l’homme la cause de tous ses faibles, l’attaque sans relâche, quelque part où il le trouve ; et cette unique pensée, comme multipliée en mille manières différentes, a toujours, par le choix des mots et par la variété de l’expression, la grâce de la nouveauté. [52]

Formes du discours épistolaire : la posture moraliste de Fénelon

47Comme l’ont bien montré Jean Lafond et Louis Van Delft [53], la vision moraliste est en grande partie héritée de la tradition chrétienne. De son côté, Philippe Sellier estime qu’on trouve dans La Rochefoucauld « une étonnante, difficile, précaire alliance de la théorie augustinienne des vertus et de l’habitude du monde [54] ». En ce sens, il est normal que Fénelon ait adopté leur position.

48L’image du theatrum mundi est particulièrement bienvenue sous la plume de l’épistolier. Tandis que La Bruyère remarquait : « il s’avance déjà sur le théâtre d’autres hommes qui vont jouer dans une même pièce les mêmes rôles ; ils s’évanouiront à leur tour ; et ceux qui ne sont pas encore, un jour ne seront plus : de nouveaux acteurs ont pris leur place. Quel fond à faire sur un personnage de comédie [55] ! », La Rochefoucauld prévenait que l’homme-acteur qui change de masques (?????????, au sens étymologique du terme) est aussi tributaire d’un orgueil qui, un jour, « lassé de ses artifices et de ses différentes métamorphoses, après avoir joué tout seul tous les personnages de la comédie humaine, se montre avec un visage naturel [56] ». Or Fénelon écrit de son côté à la comtesse de Gramont :

49

Ainsi cette figure trompeuse du monde, qui passe comme une décoration de théâtre, nous deviendra un spectacle très réel […] [puisque] les hommes, quelque grands qu’ils paraissent, ne sont rien en eux-mêmes. [57]

50Un autre thème, mis en avant par Louis Van Delft, est celui de l’homo viator. Héritée de la tradition patristique, cette vision se retrouve sous la plume de François de Sales, qui évoque volontiers « cette navigation de la vie mortelle [58] ». Mais, à la fin du Grand Siècle, l’image est devenue si banale qu’elle n’est plus reprise que sur un ton désabusé. Alors qu’en 1682, Nicole écrivait encore dans ses Essais de morale que « nous flottons, dans la mer de ce monde, au gré de nos passions qui nous emportent tantôt d’un côté et tantôt d’un autre, comme un vaisseau sans voile et sans pilote [59] », Fénelon propose d’en prendre son parti, sans prétendre à quelconque amélioration :

51

Laissez couler l’eau sous les ponts ; laissez les hommes être hommes, c’est-à-dire faibles, vains, inconstants, injustes, faux et présomptueux. Laissez le monde être toujours le monde, c’est tout dire : aussi bien ne l’empêcheriez-vous pas. Laissez chacun suivre son naturel et ses habitudes, vous ne sauriez les refondre, le plus court est de les laisser et de les souffrir. Accoutumez-vous à la déraison et à l’injustice. [60]

52Mais le regard de Fénelon s’assombrit à partir du moment où il retrouve le thème pascalien d’un monde qui, au-delà de la vision augustinienne d’une corruption généralisée [61], se présente comme un « vide » et comme un « néant » :

53

Je dis que nous éprouvons, dans les peines de la vie, le néant et le mensonge de tout ce qui n’est pas Dieu : le néant, parce qu’il y a un vide infini dans tout ce qui n’est pas le bien infini et l’unique bien ; de plus on y trouve le mensonge. La créature promet beaucoup, et elle ment. Le néant paraît quelque chose ; mais il n’est rien qu’un néant menteur. […] Enfin, j’ai dit que la vanité et le mensonge se trouvent dans tout ce qui n’est pas Dieu : par conséquent, ils se trouvent aussi en nous-mêmes. Le néant : hélas ! qu’y a-t-il de si vide et qui soit si néant que notre cœur ? [62]

54Bien que cette vision ne soit ni encourageante ni stimulante, c’est-à-dire qu’elle n’ait plus rien de parénétique, Fénelon peut compter sur l’adhésion de la comtesse de Gramont, du fait qu’en 1691 le thème était devenu largement consensuel. Le constat de La Bruyère, selon lequel « les hommes n’ont point changé selon le cœur et selon les passions ; ils sont encore tels qu’ils étaient alors et qu’ils sont marqués dans Théophraste : vains, dissimulés, flatteurs, intéressés, effrontés, importuns, défiants, médisants, querelleux, superstitieux [63] », était devenu à la fin du siècle une sorte de vulgate anthropologique, correspondant à l’entreprise de « démolition du héros » caractéristique des décennies précédentes. C’est ce qui permet à l’épistolier d’utiliser ces thèmes à l’intérieur de son argumentaire directionnel, en procédant de façon prescriptive, mais « en creux » (pour reprendre le terme de Louis Van Delft [64]) :

55

Ne méprisons donc point le monde sans nous mépriser nous-mêmes ; nous sommes plus méprisables que lui, puisqu’ayant plus reçu de Dieu, nous sommes plus ingrats et plus infidèles. [65]

56Finalement, cette vulgate anthropologique sert de protreptique à la conversion. Tout en troquant son rôle d’« éducateur » contre celui d’« observateur », le moraliste garde la posture implicite du « prédicateur », voire du « guide spirituel [66] ». Même sans référence au dogme chrétien, celui-là continue à établir un diagnostic sur l’état des âmes. C’est la raison pour laquelle la forme brève se trouve privilégiée, puisqu’elle réactive la fonction traditionnellement attribuée à l’aphorisme dans la médecine d’Hippocrate : celle de disposer d’une formule courte permettant un diagnostic et des soins rapides (en grec ?????????[67]). Or, cette phraséologie moraliste abonde dans le discours épistolaire de Fénelon, qu’il s’agisse de formules positives ou négatives.

57Citons, parmi les énoncés aphoristiques positifs, des phrases telles que : « La justice est la première des bienséances [68] » ; « La perfection supporte facilement l’imperfection d’autrui [69] » ; « Les passions d’autrui paraissent infiniment ridicules et insupportables à quiconque est livré aux siennes [70] » ; ou bien : « Pour être sobre en paroles, il faut l’être en pensées [71]. » Parmi les tournures négatives, on trouve des remarques de ce genre : « On ne purge le malade qu’en le nourrissant [72] » (un véritable aphorisme, au sens propre du terme) ; « Il faut s’occuper peu du prochain, lui demander peu, en attendre peu, et ne croire pas qu’il nous manque quand notre amour est tenté de croire qu’il y trouve quelque mécompte [73] » ; ou bien : « Ce n’est point la peine qui cause l’infidélité. Mais c’est l’infidélité qui cause la peine [74]. »

58Dans la mesure où l’on peut isoler ces phrases en les séparant de leur contexte, elles relèvent de la maxime enchâssée. Mais ces remarques sont pourtant des chaînons nécessaires au raisonnement et elles ne pourraient être supprimées sans perte de sens. C’est ainsi que, si telle remarque de Fénelon au duc de Bourgogne – « Les grand princes ont plus besoin que tout le reste des hommes des leçons de l’adversité. C’est d’ordinaire ce qui leur manque le plus [75] » – se présente comme une réflexion sur les Grands proche du chapitre IX des Caractères de La Bruyère, elle a ici une valeur argumentative en s’insérant dans la stratégie pédagogique à long terme du précepteur du dauphin.

59L’orientation pédagogique du discours épistolaire devrait donc être le côté par lequel Fénelon rejoint l’approche spirituelle de la lettre, telle que la concevait François de Sales. Or l’analyse comparée des deux discours réserve à nouveau quelques surprises. À l’intérieur du discours épistolaire, la production aphoristique ne s’explique pas seulement, comme il a souvent été dit, par la solitude de l’écriture [76]. Lorsqu’il s’agit de sujets spirituels, ce genre de remarques évite aussi que la lettre ne tourne au sermon, en l’allégeant de développements explicatifs jugés insipides. Alors que le rejet du style de la prédication n’était nullement un impératif pour François de Sales épistolier, il le devient pour les contemporains de Fénelon. C’est ainsi que, dans une de ses lettres, l’évêque de Vence avait formulé cette excuse : « Mais je ne m’aperçois pas qu’ayant commencé une lettre, je fais un sermon ; c’est mon métier à la vérité, mais vous n’en avez pas besoin [77]. » François de Sales, au contraire, considérait la rhétorique épistolaire et celle de la chaire comme équivalentes. C’est ce que prouvent les conseils que l’évêque savoyard donne à deux ecclésiastiques appelés à prêcher, Antoine de Révol et André Frémyot, en estimant que, s’ils savent bien tourner leurs lettres, ils maîtriseront aisément le genre voisin du sermon [78].

60Tributaire de la rhétorique humaniste, l’évêque de Genève pense donc que, dans un cas comme dans l’autre, les sentences, préceptes, adages, proverbes, fables et récits exemplaires auront leur place et leur utilité [79]. Le précepte répond au côté prescriptif de l’enseignement moral et il aura plus d’effet s’il se travestit en une formule aussi courte que savoureuse, du genre : « Il nous faut manger le beurre et le miel avec Notre-Seigneur [80]. » Dans ce contexte, le proverbe (en grec ????????) a, lui aussi, sa place. Méprisé par les écrivains aristocratiques du Grand Siècle, il fait partie de la panoplie rhétorique humaniste, car, en transmettant la sagesse des peuples, il oriente de façon pédagogique la vie pratique. Aussi François de Sales y recourt-il volontiers : « À petit mercier, petit panier », lit-on dans la lettre dite à Mlle de Soulfour [81].

61C’est ce côté pratique et pédagogique qui justifie aussi la place prise par les petits récits exemplaires dans les lettres salésiennes. Ainsi, François de Sales raconte à de nobles religieuses que « la femme du bon Tobie prit à point d’honneur un avertissement de son mari » parce qu’« elle était trop pointilleuse [82] », ou bien il rapporte ce qui arriva à Ismaël « petit garçon », lorsqu’« il commença à piquer et agacer Isaac [83] ». Si ces exemples sont particulièrement bienvenus quand ils sont tirés de la Bible, l’épistolier ne dédaigne pas non plus le recours à l’observation scientifique, avec une prédilection marquée pour l’Histoire naturelle de Pline l’Ancien [84]. Et de faire appel au lion et à l’éléphant qui « s’épouvantent et se trémoussent » devant « un petit poulet » ou un « rat », alors qu’ils ont vaincu « les tigres, les bœufs, les rhinocéros [85] », lorsqu’il s’agit de critiquer les dispenses accordées aux religieuses les mieux dotées…

62Or toutes ces stratégies de persuasion épistolaire disparaissent sous la plume de Fénelon. Tributaire d’une vision du monde de plus en plus introvertie, le prélat français est désormais fermé aux leçons du « grand livre du monde [86] ». De la même façon, on ne trouvera plus de véritables proverbes dans ses lettres. Ceux-là ne sont plus du goût du temps [87]. Comme le suggère implicitement le P. Bouhours, ils ne répondent plus aux normes aristocratiques de la bonne société : « Les sentences sont les proverbes des honnêtes gens comme les proverbes sont les sentences du peuple [88]. » Ce sont donc aussi des raisons socioculturelles qui expliquent pourquoi le style épistolaire de Fénelon s’inspire plus du discours moraliste que de la parénèse rhétorique de François de Sales.

Perspective épistolaire adoptée par Fénelon : du on au je

63Une autre observation confirme le fait que, là où Fénelon fait figure de conseiller, ses lettres reflètent moins le ton spirituel traditionnel qu’elles n’adoptent la perspective moraliste : il s’agit du recours fréquent au on – qui, à la fin du Grand Siècle, devient aussi prisé que le je ne sais quoi. Ce on va de pair avec les citations, aphorismes, maximes et formules courtes qui servent tantôt de signes de connivence entre des correspondants partageant les mêmes goûts, tantôt d’éléments propres à susciter l’acquiescement du destinataire, en faisant appel au sens commun. Chez La Bruyère, l’on est presque devenu un tic de langage. Il suffira de rappeler la remarque 60 du chapitre « Des Ouvrages de l’esprit » :

64

L’on écrit régulièrement depuis vingt années, l’on est esclave de la construction ; l’on a enrichi la langue de nouveaux mots, secoué le joug du latinisme, et réduit le style à la phrase purement française ; l’on a presque retrouvé le nombre que Malherbe et Balzac avaient les premiers rencontré, et que tant d’auteurs depuis eux ont laissé perdre ; l’on a mis enfin dans le discours tout l’ordre et la netteté dont il est capable : cela conduit insensiblement à y mettre de l’esprit.

65Jean Dubois fait de ce on l’« universel des agents [89] » : ce n’est ni exactement l’équivalent d’homme (son origine étymologique), ni celui de nous. En réalité, il présente un indice de généralité, dont le flou n’est nullement innocent. Alors que, dans sa célèbre maxime 19, La Rochefoucauld n’hésite pas à écrire, de façon cruellement incisive : « Nous avons tous assez de force pour supporter les maux d’autrui », Fénelon joue délibérément de l’imprécision du on :

66

On ne se contente ni soi, ni autrui, quand on porte au dedans de soi un fond qu’on ne peut ni suivre ni étouffer. On se tourmente, on se craint soi-même. On n’ose être seul avec soi, ni rentrer dans son propre cœur. On est comme un homme chassé de chez soi, qui est réduit à errer tout autour comme un vagabond. D’ailleurs on n’est point naturel dans le commerce des autres, car on marche avec des entraves, etc. [90]

67Le on remplace ici un vous qui serait trop dénonciateur. En réalité, il a une valeur exclusive, puisque le destinateur Fénelon ne s’inclut pas véritablement dans l’énoncé épistolaire. En revanche, c’est d’un autre emploi que témoigne la lettre du 19 février 1701 à la comtesse de Montberon :

68

Les personnes qui ne s’aiment que par charité, comme le prochain, se supportent charitablement, sans se flatter, comme on supporte le prochain dans ses imperfections. On connaît ce qui a besoin d’être corrigé en soi comme en autrui. On y travaille de bonne foi, et sans mollesse. Mais on fait pour soi comme on ferait pour une personne que l’on conduirait à Dieu. On fait le travail avec patience. On ne se demande, non plus qu’au prochain, que ce qu’on est capable de porter dans les circonstances présentes. On ne néglige rien pour se corriger. Mais on ne se décourage point à force de vouloir être parfait en un seul jour. On condamne sans adoucissement ses plus légères imperfections. On les voit dans toute leur difformité. On en porte toute l’humiliation et toute l’amertume. On ne se chagrine point dans ce travail. On n’écoute point les dépits de l’orgueil et de l’amour-propre, qui mêlent leurs vivacités excessives avec les sentiments forts et paisibles que la grâce nous inspire pour la correction de nos défauts. [91]

69Dans ce passage, le on a un caractère prescriptif. Il remplace un vous qui serait trop autoritaire. S’il inclut le je du destinateur Fénelon, c’est pour suggérer que celui-ci agirait de la manière ici proposée, s’il se trouvait dans la situation psychologique de sa correspondante. De façon implicite, l’épistolier exige que la destinataire se conforme au comportement qu’il prend soin de décrire.

70Dans ces divers cas, il s’agit d’un emploi d’atténuation qui permet à l’épistolier de sauvegarder les bienséances épistolaires, en évitant d’interpeller trop brutalement le destinataire par l’emploi de la deuxième personne. Ainsi, lorsqu’il s’adresse en 1708 au duc de Bourgogne, Fénelon recourt au « clair-obscur » du on – selon le terme employé par Jean Dagen, à propos de La Bruyère [92] – pour excuser l’inexpérience de son ancien élève, en faisant mine de s’assimiler à lui :

71

On ne connaît ni les autres hommes ni soi-même, quand on n’a jamais été dans l’occasion du malheur, où l’on fait la véritable épreuve de soi et d’autrui. [93]

72Mais lorsque le on prend une valeur clairement inclusive, il renforce finalement l’autorité du conseiller, qui agit comme médecin de l’âme :

73

Moins on s’aime, plus on s’accommode aux imperfections de l’amour-propre d’autrui, pour les guérir patiemment. On ne fait jamais aucune incision, sans mettre beaucoup d’onction sur la plaie. On ne purge le malade qu’en le nourrissant. On ne hasarde aucune opération, que quand la nature indique elle-même qu’elle y prépare. On attendra des années pour placer un avis salutaire. On attend que la Providence en donne l’occasion au-dehors et que la grâce en donne l’ouverture en dedans du cœur. [94]

74Face à ces jeux épistolaires du on qui impliquent les partenaires à des degrés divers, le on peut aussi éviter au destinateur de se mettre en avant de façon trop personnelle. C’est le cas à propos de l’évocation de la vie à la cour de Versailles – dont l’épistolier Fénelon avait éprouvé les désagréments, tout autant que sa correspondante, la comtesse de Gramont :

75

Versailles ne rajeunit pas de même, il y faut un visage riant mais le cœur ne rit guère. Si peu qu’il reste de désirs et de sensibilités d’amour-propre, on a toujours ici de quoi vieillir ; on n’a pas ce qu’on veut, on a ce qu’on ne voudrait pas. On est peiné de ses malheurs, et quelquefois du bonheur d’autrui ; on méprise les gens avec lesquels on passe sa vie, et on court après leur estime. On est importuné, et on serait bien fâché de ne l’être pas et de demeurer en solitude. […] Plus on est à la mode, plus on est à la merci de ces lutins. [95]

76En passant du je au on, Fénelon évite ainsi de se mettre en avant en s’exprimant à la première personne – ce je dont Geneviève Haroche-Bouzinac a écrit que son emploi était « le pire des péchés épistolaires après le silence [96] ».

77Ici, une remarque s’impose. Bien qu’il ait été extrêmement attentif aux bienséances épistolaires, François de Sales ne jugeait pas nécessaire de recourir à la ruse du on pour éviter le je. Son discours épistolaire reste toujours dicté par la transparence, que ses lettres contiennent des encouragements ou des réprimandes. Dans la lettre à ses « Révérendes Dames et Sœurs » évoquée plus haut, un nouveau paragraphe s’ouvre sur cette simple phrase : « Mais après tout cela, permettez-moi, je vous supplie, de vous dire mon opinion touchant ces défauts. » Sans violer les règles de civilité, l’épistolier annonce une correction fraternelle en règle – et la suite du texte confirme que le prélat savoyard va droit au but [97].

78Il est vrai que cette lettre, écrite en 1602, est l’une des plus anciennes du corpus épistolaire dit « spirituel ». Plus tard, François de Sales adoptera un autre style pour adoucir ses lettres de réprimande ou, tout simplement, pour contrebalancer l’asymétrie latente qui menace une relation épistolaire à l’intérieur de laquelle les rôles de conseiller (de la part du destinateur) et de conseillé(e) (du côté des destinataires) sont fixés d’avance. Le principe appliqué pour rééquilibrer la relation est celui du recours au code de la lettre d’amitié, qui devient chez l’évêque une marque indélébile de son écriture épistolaire [98]. Pour mieux comprendre en quoi la tactique salésienne se distingue de celle de Fénelon, on citera ce passage d’une lettre adressée par François de Sales à l’un de ses proches :

79

Non, à la vérité, je ne doute nullement que vous m’aimiez fort étroitement ; j’aurais bien peu de sentiment si tant de témoignages que vous m’en avez rendu ne m’en assuraient, outre lesquels j’en ai un dans moi-même qui me suffirait pour cela ; car il ne me semble pas que mon cœur vous peut aimer comme il vous aime si, par une secrète correspondance, le vôtre ne l’attirait ; car l’on a beau dire que la connaissance des mérites force à l’amour (je dis à l’amitié), c’en est vraiment un grand motif, mais inutile si on n’espère pas une réciproque affection. Mais savez-vous pas que je vous ai dit mille fois que je savais que vous m’aimiez et que j’aimais bien fort notre mutuelle amitié, non seulement pour le bien qu’elle me donnait, mais parce que son fondement était éternel ? Je me plais bien fort sur ce sujet. […] – Adieu donc, Monsieur, jusques à vendredi prochain ; ains à Dieu soyons-nous jusques à l’éternité des éternités, car à meilleur maître ne saurions-nous être. Je le supplie que son saint amour fasse toujours vivre joyeusement notre amitié et celle de tous ceux qui nous appartiennent pour lui. Amen. [99]

80On chercherait vainement dans les lettres de Fénelon un ton comparable. Seule une lettre à la marquise d’Alègre – qui se lamentait des désordres moraux de son gendre, le marquis de Barbezieux, fils de Louvois – pourrait soutenir la comparaison :

81

J’apprends, Madame, que Dieu vous donne des croix, et j’y prends part de tout mon cœur. En tout temps, j’ai été sensible à tout ce qui pouvait vous toucher ; mais l’expérience ajoute encore un nouveau degré de sensibilité en moi pour les souffrances d’autrui. […] Je garde maintenant le silence à l’égard de tous mes anciens amis, et je ne le romps pour vous, Madame, qu’à cause que vous êtes dans l’amertume, et que cette bienheureuse société de croix demande un épanchement de cœur pour se soutenir dans l’affliction. [100]

82Mais il faut bien reconnaître que, même dans ses lettres de consolation, Fénelon a des difficultés à trouver le ton affable que la situation exigerait. À plus forte raison, lorsqu’il se considère comme le conseiller de ses destinataires. Sans doute faut-il mettre le ton cassant de ses lettres au compte de l’autoritarisme sans faille que lui reprochait cette mauvaise langue de Saint-Simon :

83

Sa persuasion, gâtée par l’habitude, ne voulait point de résistance ; il voulait être cru du premier mot ; l’autorité qu’il usurpait était sans raisonnement de la part de ses auditeurs, et sa domination sans la plus légère contradiction ; être l’oracle lui était tourné en habitude, dont sa condamnation et ses suites n’avaient pu lui faire rien rabattre ; il voulait gouverner en maître qui ne rend raison à personne, régner directement de plain-pied. [101]

84En réalité, ainsi que nous l’avons souligné au cours de l’analyse, Fénelon est surtout hanté par la destruction du moi haïssable qui s’exprime à travers l’amour-propre. De ce fait, il ne s’approprie que le côté le plus sombre du quiétisme guyonien, son discours spirituel devenant alors non plus mortifiant mais mortifère :

85

Le moi, dont je vous ai parlé si souvent, est encore une idole que vous n’avez pas brisée. Vous voulez aller à Dieu de tout votre cœur, mais non par la perte du moi : au contraire, vous cherchez le moi en Dieu. […] Au reste, il faut tellement sacrifier à Dieu le moi, dont nous avons tant parlé, qu’on ne le recherche plus, ni pour la réputation, ni pour la consultation du témoignage qu’on se rend à soi-même sur ses bonnes qualités ou sur ses bons sentiments. Il faut mourir à tout sans réserve, et ne posséder pas même sa vertu par rapport à soi. [102]

86La dureté de ces phrases pourrait se justifier par le fait qu’elles sont adressées à Mme de Maintenon et qu’elles font partie de la célèbre « Lettre sur ses défauts ». Mais cette même intransigeance réapparaît des années plus tard sous la plume de l’épistolier, lorsque, sans nul égard pour le tempérament dépressif de Mme de Montberon, il écrit à sa correspondante :

87

Vous demandez des remèdes pour guérir. Il ne s’agit point de guérison, mais au contraire de mort. Laissez-vous mourir ; ne cherchez par impatience aucun remède : mais prenez garde qu’un certain courage pour se passer de tout remède, serait un remède déguisé et une source de vie maudite.

88Et de terminer par une phrase à valeur de sentence : « Il ne faut point chercher de remède pour consoler l’amour-propre [103]. » Cette sentence ne déparerait pas les Maximes de La Rochefoucauld mais, replacée dans son contexte, elle transgresse toute considération mondaine au profit d’une spiritualité inexorable – aux antipodes, bien évidemment, de celle d’un saint François de Sales.

89Dans ses premières lettres, pourtant, l’abbé de Fénelon était encore tout miel. Il soignait le tour enjoué et les artifices du badinage hérités de l’esthétique épistolaire de Voiture [104]. Son « esprit complaisant et flatteur » (dont il convenait lui-même) se doublait d’un art de la cour qui lui permettait de manier avec brio les sous-entendus [105]. Après son départ pour Cambrai, Fénelon se réjouit que ses lettres courent de main en main, suscitant l’admiration des dames de la cour, et il s’efforce de séduire ses destinataires par des formules théologiques subtiles où l’énoncé paradoxal tourne à la pointe : « L’abandon parfait va jusqu’à abandonner l’abandon lui-même [106] » ; ou bien : « Le parfait amour […] est content de souffrir sans savoir qu’il souffre bien et d’aimer sans savoir qu’il aime [107]. » Ce ne sont point là, comme dans les lettres de François de Sales, de simples jeux auditifs – s’exprimant à travers les paronomases ou les allitérations –, mais de véritables chutes, telles que les affectaient les moralistes. Car l’obscurité de la formule reste partie prenante du langage aristocratique.

90En effet, tout en aspirant à la destruction du moi par une désappropriation totale, destinée à ouvrir la voie au pur amour, Fénelon reste longtemps prisonnier de sa conscience aristocratique. Comme Jacques Le Brun l’a mis en valeur, les lettres rédigées par l’archevêque peu avant la condamnation par Rome de l’Explication des maximes des saints, ne se rapportent guère à la figure biblique du juste sacrifié, esquissée en son honneur par Chanterac et par d’autres correspondants. Ces lettres témoignent plutôt d’un « sens de l’honneur et des convenances, qui est de caractère social encore plus que moral [108] ». Dans cette perspective, « spiritualité du pur amour, souci de l’honneur nobiliaire et revendication juridique de son droit [109] » se mêlent pour aboutir au célèbre « je ne puis trahir ma conscience [110] ».

91Cette mise en avant du je, avec ses nombreux retours sur soi-même, est tout aussi sensible dans les lettres adressées aux amis qu’il dirige. Là, Fénelon dépeint son propre intérieur, sans complaisance :

92

Je n’ai aucune envie ni d’écrire, ni de parler, ni de faire parler de moi, ni de raisonner, ni de persuader personne. Je vis au jour la journée, assez sèchement et avec diverses sujétions extérieures qui m’importunent, mais je m’amuse dès que je le puis et que j’ai besoin de me délasser. Ceux qui font des almanachs sur moi, et qui me craignent sont de grandes dupes. Dieu les bénisse ! Je suis si loin d’eux, qu’il faudrait que je fusse fou pour vouloir m’incommoder en les incommodant. [111]

93Du fait que cette lettre est adressée au duc de Chevreuse, en qui Fénelon trouvait le plus sûr soutien face aux intrigues qui se fomentaient contre lui à la cour, ces confidences ont évidemment leur raison d’être. Mais, réitérées un an plus tard auprès d’une correspondante autrement timorée, elles ne laissent pas de surprendre. Vis-à-vis de la scrupuleuse comtesse de Montberon que l’archevêque avait placée sous le patronage du bon François de Sales, l’épistolier dévoile tout aussi impitoyablement son état spirituel, selon une tactique pédagogique de l’aveu aux limites de l’insupportable :

94

Pour moi, je suis dans une paix sèche, obscure et languissante, sans ennui, sans plaisir, sans pensée d’en avoir jamais aucun, sans aucune vue d’avenir en ce monde, avec un présent insipide, et souvent épineux, avec un je ne sais quoi qui me porte, qui m’adoucit chaque croix, qui me contente sans goût. […] Je vois tout ce que je porte. Mais le monde me paraît comme une mauvaise comédie, qui va disparaître dans quelques heures. Je me méprise encore plus que le monde. Je mets tout au pis aller, et c’est dans le fond de ce pis aller pour toutes les choses d’ici-bas, que je trouve la paix. [112]

95C’est ainsi que, par la mise en avant du je épistolaire – qui s’observe et se confie en dévoilant a contrario « l’image de sa vie [113] » –, les lettres de Fénelon s’éloignent de la parénèse qui caractérisait l’écriture épistolaire, à la fois empreinte de bonté et d’humilité, d’un saint François de Sales, pour inaugurer le genre épistolaire de la confidence subjective dont la franchise, jugée jusqu’alors inconvenante, va bientôt fleurir après la mort de l’archevêque de Cambrai, tout au long du XVIIIe siècle.

Notes

  • [1]
    Même s’il interprète parfois indûment le livre dans son propre sens, comme l’a justement montré Fr. Bouchardy, « S. François de Sales et la controverse Bossuet-Fénelon », Nova et Vetera, n° 41 / 4, 1966, p. 246-257.
  • [2]
    Les Epistres spirituelles du Bienheureux François de Sales, Lyon, V. de Cœursilly, 1626 ; 2nde éd. 1628.
  • [3]
    Fénelon, Correspondance, éd. I. Noye, J. Le Brun et B. Neveu, Paris, Klincksieck [t. I-V], puis Genève, Droz, 18 vol., 1972-2007, t. X, p. 56, lettre 643 (29 janv. 1700). Désormais les références à la Correspondance de Fénelon seront abrégées comme suit : CF, numéro du tome en chiffres romains.
  • [4]
    À compléter par notre François de Sales (1567-1622), un homme de lettres spirituelles. Culture – tradition – épistolarité, Genève, Droz, « Travaux d’Humanisme et Renaissance », 1999, p. 264 et n. 40-41. Sur le rôle que jouent les lettres salésiennes dans la correspondance entre Fénelon et Mme de Maintenon, on se reportera aussi au témoignage de la lettre 825bis de fin 1694 : CF, II, p. 302-312.
  • [5]
    Sur la différence à établir entre épistolier et auteur épistolaire, se reporter à R. Duchêne, Écrire au temps de Mme de Sévigné : lettres et texte littéraire, 2e éd. augmentée, Paris, Vrin, 1982, p. 11-28. Dès 1704, une partie des lettres de Fénelon fut d’ailleurs publiée en un corpus anonyme, sous forme d’opuscules spirituels formant la base des recueils de Réflexions saintes, de Sentiments de pénitence et de piété et autres Œuvres spirituelles dont on trouvera les références bibliographiques dans l’édition critique des Œuvres de Fénelon, éd. J. Le Brun, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1983-1997, t. I, p. 1417-1418.
  • [6]
    C’est ce procédé – largement utilisé par Mme de La Fléchère – qui, dans le cas de Mme de Charmoisy, est à l’origine de la publication de l’Introduction à la vie dévote ; voir V. Mellinghoff-Bourgerie, op. cit., p. 221-232, 333 et 374-381.
  • [7]
    CF, IX, p. 222, commentaire (passage tiré du recueil des Lettres historiques et galantes publié à Londres en 1739).
  • [8]
    À compléter par notre article, « L’écrivain au service des âmes : tradition et avatars de l’épistolarité spirituelle », Travaux de littérature, vol. XXI (« La Spiritualité des écrivains »), 2008, p. 117-130.
  • [9]
    CF, X, p. 122-123, lettre 705 (28 janvier 1701). À rapprocher d’une lettre antérieure à la même, CF, X, p. 73-74, lettre 660 (30 avril 1700) : « Je ne sais si vous avez bien lu les livres de s. Fr[ançois] de Sales. Mais il me semble que vous pourriez lire fort utilement ses entretiens, quelques-unes de ses épîtres, et divers morceaux de son grand traité de l’amour de Dieu. En parcourant vous verrez assez ce qui vous convient. L’esprit de ce bon saint est ce qu’il faut pour vous éclairer, sans nourrir en vous le goût de l’esprit, qui est plus dangereux pour vous que pour un autre ».
  • [10]
    CF, X, p. 71, lettre 657 (15 avril 1700).
  • [11]
    CF, XIV, p. 11, lettre 1194 (29 janvier 1708).
  • [12]
    À compléter par V. Mellinghoff-Bourgerie, art. cit., p. 118-122. Dans cette même lettre, Fénelon écrit encore : « J’espère que l’onction de S. François de Sales découlera de son cœur dans le vôtre pour l’adoucir et pour le calmer » (ibid.).
  • [13]
    Pour l’analyse de ce corpus, voir I. Noye, « Fénelon maître spirituel », La Vie spirituelle, n° 680, 1988, p. 407-418.
  • [14]
    Se reporter, pour plus de précisions, à V. Mellinghoff-Bourgerie, art. cit., p. 124-126. A. Adam rappelle que, de toute façon, avant la rencontre de Mme Guyon, Fénelon pratiquait une « direction encore très conventionnelle », correspondant au programme de Saint-Sulpice (Histoire de la littérature française au XVIIe siècle, Paris, Del Duca, 1949-1956, t. V, p. 137). Après sa rencontre avec la mystique, les lettres qu’il échange avec elle font de lui moins un directeur qu’un dirigé, comme il le reconnaît bien volontiers : voir la lettre du 26 juillet 1689, Madame Guyon et Fénelon. La Correspondance secrète, éd. É. Perrot, Paris, Dervy-Livres, 1982, p. 208. Vu le caractère mystique de leurs échanges, qui exigerait une approche plus théologique que littéraire, cette correspondance-là ne fera pas partie du corpus sur lequel se fonde notre article.
  • [15]
    Dans l’édition en question (Paris, J. de Gigord, 1902, 6e éd. 1920), les lettres choisies ne concernent pas seulement la comtesse de Montberon, mais aussi la comtesse de Gramont, le duc de Bourgogne, Mme de Maintenon, le duc et la duchesse de Beauvillier, le marquis de Seignelay, la marquise d’Alègre, le duc et la duchesse de Chevreuse, les duchesses de Mortemart, le marquis de Blainville, le duc de Chaulnes, l’électeur de Cologne et quelques anonymes.
  • [16]
    Il n’y a pas non plus d’entrée sous ce terme dans le recueil des Pensées et maximes de Fénelon (éd. Duval, Paris, Roret et Roussel, 1821), malgré un classement par thèmes qui l’auraient fait attendre. Cf. les entrées « Dévots-Dévotion », p. 47 sq. ; « Favoris-Faveurs », p. 147 sq. ; « Courtisans », p. 150 sq. ; « Louanges », p. 154 sq. ; « Politique », p. 177 ; « Commerce », p. 192 sq. ; « Vertu », p. 205 sq. ; « Sagesse-Sages », p. 211 sq. ; « Raison », p. 214 sq. ; « Vérité », p. 220 sq. ; « Humilité », p. 226 sq. ; « Temps », p. 234 sq.
  • [17]
    Pour l’étendue du corpus savoyard des lettres salésiennes, se reporter à l’Annexe de notre article sur François de Sales, « Les destinataires de François de Sales à l’intérieur du duché de Savoie », dans L. Terreaux (éd.), Histoire de la littérature savoyarde, Montmélian, à paraître en 2010.
  • [18]
    Comme l’a écrit Michel de Certeau à propos d’un autre corpus : « l’intention de les “produire au jour” en a lentement effacé les particularités. […] Le temps a mué la correspondance personnelle en “pensées” – en pierres d’où s’efface la singularité des événements » (« L’étrange secret. Manière d’écrire pascalienne : la 4e lettre à Mlle de Roannez », Rivista di storia e letteratura religiosa, n° 12-13, 1976-1977, p. 104-105).
  • [19]
    Œuvres de S. François de Sales, éd. des Religieuses de la Visitation du premier Monastère d’Annecy, 27 vol., Annecy, Niérat, 1892-1964, lettre CXC, t. XII, p. 202-206, (l’orthographe a été modernisée par nous-même). Désormais les références à cette édition seront abrégées comme suit : OEA, numéro du tome en chiffres romains.
  • [20]
    Dans le recueil des Épîtres spirituelles, l’identité des destinataires a été systématiquement gommée par souci d’anonymat et de généralisation (cf. V. Mellinghoff-Bourgerie, op. cit., p. 188-190, 239 sq. et 348 sq.).
  • [21]
    Par exemple, dans cette même lettre CXC : « Il faut souffrir notre propre imperfection pour avoir la perfection » (XII, p. 203), ou bien : « Je vous recommande la sainte simplicité » (XII, p. 205), avec la formule finale : « Béni soit Notre Seigneur. Je le supplie qu’il soit votre cœur, votre âme, votre vie, et je suis – Votre serviteur etc. » (XII, p. 206).
  • [22]
    OEA, XII, p. 202.
  • [23]
    Pour la signification exacte du terme, voir B. Dupriez, Gradus. Les procédés littéraires, Paris, UGE, « 10/18 », 1984, p. 239-240. Rappelons que l’évolution de la syntaxe française correspond à l’écart de siècle qui sépare les deux épistoliers : François de Sales a dû rédiger cette lettre en 1603 (voir OEA, XII, p. 202), alors que les lettres de Fénelon à l’épouse du gouverneur de Cambrai ont été écrites entre 1700 et 1713.
  • [24]
    CF, X, p. 104, lettre 688 (dimanche 7 novembre 1700, à la comtesse de Montberon).
  • [25]
    Passage cité par A. Montandon, Les Formes brèves, Paris, Hachette, 1992, p. 8 ; à comparer au jugement de La Rochefoucauld : « La véritable éloquence consiste à dire tout ce qu’il faut et ne dire que ce qu’il faut » (maxime 250).
  • [26]
    Pour le sens exact de ces termes, voir J. Dubois et al., Dictionnaire de linguistique, Paris, Larousse, 1973, ad verb. Si la rhétorique de la parénèse distingue, au niveau des actes illocutoires et perlocutoires, deux modes d’approche éthique – le premier conduisant à la reconnaissance de ce qui est juste et bon (ou injuste et mauvais), le second incitant au bien-agir –, ces deux aspects restent étroitement liés, sinon indissociables dans la pratique : voir P. Rabbow, Seelenleitung. Methodik der Exerzitien in der Antike, Munich, Kösel, 1954, p. 144 sq. et 336-338.
  • [27]
    Lettre autographe CLXVIII, OEA, XII, p. 151.
  • [28]
    CF, X, p. 48, lettre 639 (30 décembre 1699).
  • [29]
    Traité de l’amour de Dieu, livre VIII, chap. III, OEA, V, p. 66 (l’orthographe a été modernisée).
  • [30]
    CF, X, p. 104, lettre 688 (dimanche au soir 7 novembre [1700]).
  • [31]
    OEA, XVI, p. 118 (l’orthographe a été modernisée par nous-même).
  • [32]
    « La vérité est telle que nous n’aimerons jamais nos prochains purement, et comme Dieu le veut, jusqu’à ce que nous ayons corrigé cet amour de nous-mêmes » (éd. M. Bernouilli et J. Metraux, Genève, Labor et Fides, 1965, p. 113).
  • [33]
    Lettre CCXL, OEA, XII, p. 383.
  • [34]
    Lettre autographe DXII, OEA, XIV, p. 120.
  • [35]
    Ibid., p. 119.
  • [36]
    I Jean, III, 19-20 (« et devant lui nous apaiserons notre cœur, si notre cœur venait à nous condamner, car Dieu est plus grand que notre cœur et il connaît tout », trad. de la Bible de Jérusalem, Paris, Cerf, 1973).
  • [37]
    OEA, XIV, p. 119, loc. cit. ; avec citation du Psaume XXXII, 18.
  • [38]
    CF, XIV, p. 153, lettre 1311 (jeudi 8 août 1709).
  • [39]
    CF, XVIII, p. 37, commentaire, n. 2.
  • [40]
    Cf. par exemple les lettres du 19 février 1701 (CF, X, p. 126-127, lettre 109) ; du mardi 10 octobre 1702 (CF, X, p. 289-291, lettre 867) ; de la mi-mai 1703 (CF, XVIII, p. 36-37, lettre 1968) ; du mercredi 10 août 1707 (CF, XII, p. 327-329, lettre 1159) ; ou bien du 8 août 1709 (CF, XIV, p. 153, lettre 1311).
  • [41]
    CF, X, p. 289, lettre 867, loc. cit..
  • [42]
    CF, XIV, p. 276, lettre 1408 (11 octobre 1710, à la douairière de Mortemart).
  • [43]
    CF, II, p. 224, annexe de la lettre 175 (samedi 2 juin 1691).
  • [44]
    Voir L. Van Delft, Les Spectateurs de la vie. Généalogie du regard moraliste, Saint-Nicolas (Québec), Presses de l’Université de Laval, 2005, p. 135-164.
  • [45]
    Voir M. Kruse, « Die französischen Moralisten des 17. Jahrhunderts », dans Margot Kruse : Beiträge zur französischen Moralistik, J. Küpper et alii éd., Berlin / New York, De Gruyter, 2003, p. 6-7.
  • [46]
    CF, II, p. 51, lettre 23 (mardi 10 décembre 1686).
  • [47]
    À compléter par l’étude de J. Lafond, La Rochefoucauld. Augustinisme et littérature, Paris, Klincksieck, 1977, p. 89 et passim.
  • [48]
    Citant de mémoire la maxime 276 dans une lettre à Bossuet (« Je me souviens en ce moment de ce mot de M. de La Rochefoucauld : “L’absence augmente les grandes passions et diminue les médiocres, comme le vent éteint la bougie et allume le feu” »), la cousine de Mme Guyon s’était attiré de la part de l’évêque – qui avait pourtant assisté le duc de La Rochefoucauld à l’article de la mort – cette réponse cinglante : « Vous citez en ce fait un mauvais auteur » (Bossuet, Correspondance, éd. Urbain et Levesque, Paris, Hachette, 1920, t. XIII, p. 83, lettre du 30 mai 1701).
  • [49]
    Fénelon, Œuvres, éd. cit., t. I, p. 4.
  • [50]
    La Bruyère, Les Caractères, éd. R. Garapon, Paris, Garnier, 1962, p. 507 ; cf. la remarque 30 du chapitre « De la Chaire », laquelle souligne les mérites du prélat.
  • [51]
    Rappelons qu’à côté des réunions du Petit Concile (qui s’arrêtèrent, il est vrai, vers 1682), La Bruyère retrouvait à Chantilly la mère de l’abbé de Langeron qui était lui-même un intime de Fénelon.
  • [52]
    Discours sur Théophraste (1688), dans La Bruyère, Les Caractères, éd. cit., p. 15.
  • [53]
    J. Lafond, La Rochefoucauld, op. cit., passim ; L. Van Delft, Le Moraliste classique. Essai de définition et de typologie, Genève, Droz, 1982, chap. VI, p. 176-233.
  • [54]
    Ph. Sellier, « La Rochefoucauld, Pascal, saint Augustin », Revue d’Histoire Littéraire de la France, n° 69, 1969, p. 574.
  • [55]
    Les Caractères, « De la Cour », remarque 99.
  • [56]
    La Rochefoucauld, Maximes, « Maxime supprimées », 6.
  • [57]
    CF, IV, p. 22-24, lettre 322 (25 mai 1695).
  • [58]
    Traité de l’amour de Dieu, livre IV, chap. I, OEA, IV, p. 216-217.
  • [59]
    P. Nicole, Œuvres philosophiques et morales, éd. Ch. Jourdain, Paris, Hachette, 1845 [réimpr. Hildesheim / New York, G. Olms, 1970], chap. XI : « De la faiblesse de l’homme », p. 91.
  • [60]
    CF, XVIII, p. 127, lettre LSP 105* [LSP pour Lettres spirituelles].
  • [61]
    Outre l’article de Ph. Sellier, cité supra n. 54, voir aussi J. Delumeau, Le Péché et la peur. La culpabilisation en Occident (XIIIe-XVIIIe siècles), Paris, Fayard, 1983.
  • [62]
    CF, IV, p. 24, lettre 322.
  • [63]
    La Bruyère, Discours sur Théophraste, éd. cit., p. 13.
  • [64]
    L. Van Delft, Les Spectateurs de la vie, op. cit., p. 128.
  • [65]
    CF, IV, p. 25, lettre 322 (25 mai 1695).
  • [66]
    À compléter par L. Van Delft, Le Moraliste classique, op. cit., chap. VIII in toto.
  • [67]
    Voir A. Montandon, Formes brèves, op. cit., p. 53-54.
  • [68]
    CF, II, p. 217, lettre 163 (31 mars 1691, à la marquise de Laval).
  • [69]
    CF, XVIII, p. 147, LSP 130* (lettre envoyée à la duchesse de Mortemart vers 1693).
  • [70]
    CF, XIV, p. 277, lettre 1408 (11 octobre 1710, à la douairière de Mortemart).
  • [71]
    CF, X, p. 46, lettre 639 (30 décembre 1699, au duc de Chevreuse).
  • [72]
    CF, XIV, p. 277, lettre 1408.
  • [73]
    Ibid., p. 278.
  • [74]
    CF, XII, p. 74, lettre 846 (3 novembre 1703, à la comtesse de Montberon).
  • [75]
    CF, XIV, p. 66, lettre 1239 (16 septembre 1708).
  • [76]
    Selon G. Haroche-Bouzinac, la mise à distance que provoque la lettre conduit à la production quasi spontanée de réflexions générales, qui jouent alors le rôle de « haltes méditatives » (L’Épistolaire, Paris, Hachette, 1995, p. 107).
  • [77]
    Ibid., p. 105. Rappelons que les lettres d’Antoine Godeau furent publiées de façon posthume, en 1713, c’est-à-dire encore du vivant de Fénelon.
  • [78]
    OEA, XII, p. 193 ; à compléter par notre François de Sales, op. cit., p. 131-135 et 155-157.
  • [79]
    Ibid., p. 132-135 ; à compléter par É. Faguet, « Les lettres spirituelles de S. François de Sales », La Revue Latine, n° 3, 1904, p. 513-540 ; Sr. F.-L. L’Espérance, « Le style des lettres de S. François de Sales », Revue de l’Université Catholique de Laval (Québec), n° 5, février 1951, p. 502-519 ; L. Terreaux, « À propos de la correspondance latine de S. François de Sales », dans H. Bordes et J. Hennequin (éd.), L’Unidivers salésien. S. François de Sales hier et aujourd’hui, Paris, Diffusion Champion-Slatkine, 1994, p. 132.
  • [80]
    Lettre CLXVIII, OEA, XII, p. 145. On distinguera cette formule prescriptive de l’adage dont l’autorité est liée à la célébrité des personnages qui auraient émis de telles vérités, qu’il s’agisse de Salomon ou, par extension, des sagesses bibliques (d’où le « Rien n’est si constant sous le ciel qui ne fléchisse ; rien de si pur qui ne recueille quelque poussière », ibid., à la fin du paragraphe).
  • [81]
    Lettre CXC, OEA, p. XII, 205.
  • [82]
    Lettre CLXVIII, OEA, XII, p. 145.
  • [83]
    Ibid., p. 142.
  • [84]
    Voir W. A. Spann, « Franz von Sales und Plinius der Ältere », Jahrbuch für salesianische Studien, n° 3, 1966, p. 3-66.
  • [85]
    Lettre CLXVIII, OEA, XII, p. 141.
  • [86]
    En ce sens, la comparaison imagée de la maxime 276 (citée supra, n. 48) fait figure d’exception. Pour l’ensemble de la question, on se reportera à M. Foucault, Les Mots et les choses. Une archéologie des sciences humaines [1966], Paris, Gallimard, 1990, p. 32-59.
  • [87]
    G. Haroche-Bouzinac (op. cit., p. 104) rappelle que, dès 1683, Du Plaisir souligne dans ses Sentiments sur les lettres et sur l’histoire que « la mode des proverbes » n’est plus de mise dans les lettres.
  • [88]
    Cité dans M. Maloux, Dictionnaire des proverbes, sentences et maximes, Paris, Larousse, 1960, p. X. Sur la sentence comme fleur de rhétorique (au sens où Érasme a rassemblé des flores Senecæ), voir A. Montandon, op. cit., p. 26-27. On notera, justement, que la rhétorique de l’ornement semble étrangère à l’épistolarité fénelonienne.
  • [89]
    J. Dubois, Grammaire structurale du français, Paris, Larousse, 1965-1969, t. I (« Nom et pronom »), p. 114.
  • [90]
    CF, XII, p. 199, lettre 1061 (30 octobre 1705, au vidame d’Amiens). Dans cette citation, comme dans celle de la maxime précédente, les nous et les on ont été mis en relief par nous-même.
  • [91]
    CF, X, p. 126, lettre 709 (samedi 19 février 1701) ; souligné par nous-même.
  • [92]
    J. Dagen, « Le clair-obscur de La Bruyère », Littératures Classiques, supplément du n° 13, janvier 1991, p. 30-31.
  • [93]
    CF, XIV, p. 66, lettre 1239 (16 septembre 1708, au duc de Bourgogne) ; souligné par nous-même.
  • [94]
    CF, XIV, p. 277, lettre 1408 (11 octobre 1710) ; souligné par nous-même.
  • [95]
    CF, IV, p. 27, lettre 324 (Versailles, 4 juillet 1695). Le ton est le même quinze ans plus tard, dans une lettre adressée à de la duchesse douairière de Mortemart, à propos d’une intrigue de cour dont avait souffert sa correspondante : « Un changement soudain et imprévu choque. On ne peut s’y accoutumer ; on ne croit pas en avoir besoin. On croit voir dans ceux qui se retirent ainsi un manquement aux règles de la bienséance et de l’amitié. On prétend y trouver de l’inconstance, du défaut de simplicité, et même de la fausseté » (CF, XIV, p. 279, lettre 1408, du 11 octobre 1710 – avec mise en italique par nous-même, dans les deux citations).
  • [96]
    G. Haroche-Bouzinac, op. cit., p. 86.
  • [97]
    Lettre CLXVIII, OEA, XII, passim, notamment p. 141 : « Le vermisseau qui rongea la courge de Jonas semblait être petit, mais sa malice était si grande que l’arbrisseau en périt. Ces défauts de votre maison semblent bien minces ; mais leur malice est si grande qu’elle gâte votre vœu de pauvreté » (orthographe modernisée par nous-même).
  • [98]
    Voir V. Mellinghoff-Bourgerie, art. cit., p. 128-130 ; à compléter par notre François de Sales, op. cit., p. 168-182, 206-219.
  • [99]
    Lettre CCCXCIX, OEA, XIII, p. 288.
  • [100]
    CF, VIII, p. 458, lettre 588 (février 1699).
  • [101]
    Saint-Simon, Mémoires, éd. Y. Coirault, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1983-1988, t. IV [années 1711-1714], p. 860. Il est vrai que le mémorialiste ne le « connaissait que de visage, trop jeune quand il fut exilé » et que la « grande addition » pour l’année 1695 complète le tableau en faisant de l’abbé de Fénelon un ambitieux intègre (ibid., t. I, p. 250-255), appelé à s’imposer temporairement auprès de Mme de Maintenon, aux dépens de l’évêque de Chartres (ibid., p. 272-275).
  • [102]
    CF, II, p. 141, lettre 96 (janvier 1690 ?) – souligné par nous-même.
  • [103]
    CF, XVIII, p. 36, lettre 1968 (mi-mai 1703).
  • [104]
    Voir Fénelon, Œuvres, éd. cit., p. XXXII. Jean Orcibal (CF, I, p. 13) rappelle aussi qu’il n’hésitait pas à louer les vers de Mlle de Scudéry, qui lui avaient été envoyés, par souci de plaire.
  • [105]
    Cf. A. Adam, op. cit., p. 136.
  • [106]
    CF, XVIII, p. 202, LSP 199*.
  • [107]
    CF, XVIII, p. 195, LSP 191*.
  • [108]
    J. Le Brun, « La condamnation de l’Explication des maximes des saints et la publication du Télémaque au jour le jour », dans Fr.-X. Cuche et J. Le Brun (éd.), Fénelon. Mystique et Politique (1699-1999), Paris, H. Champion, 2004, p. 128.
  • [109]
    Ibid., p. 133.
  • [110]
    CF, VIII, p. 501, lettre 596 (3 avril 1699).
  • [111]
    CF, X, p. 33, lettre 633 (ca. 4 novembre 1699).
  • [112]
    CF, X, p. 105, lettre 688 (7 novembre 1700).
  • [113]
    Sur l’offre de l’imago vitæ comme principe psychagogique annéen, voir V. Mellinghoff-Bourgerie, « L’écrivain au service des âmes […] », art. cit., p. 119-121.
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