Au lieu d’explorer la manière dont l’extrême droite gagne en popularité, cet article entend mettre en lumière la manière dont la pensée critique – historiquement associée à la gauche – ne parvient pas à inspirer un changement radical. Pour ce faire, j’aimerais inviter à explorer ce que j’appelle la nébuleuse du retour à la terre. Elle englobe diverses alternatives sociales et environnementales à la norme socio-économique dominante, telles que les monnaies complémentaires, les Amap (Associations pour le maintien d’une agriculture paysanne), les cantines populaires, les tiers-lieux comme les fablabs, les coopératives créant des produits écologiquement responsables, les chantiers participatifs dans la construction écologique, les cafés associatifs et les écovillages.
Bien que ces alternatives inspirent l’imagination radicale et que leur nombre augmente de jour en jour, elles sont interprétées de manière concurrente et comme incapables de proposer une alternative. Par exemple, manger des aliments biologiques est vanté comme une possibilité de protéger la nature en évitant les produits chimiques toxiques, de revaloriser le travail des paysans et de créer de l’emploi, car l’agriculture biologique nécessite plus de main-d’œuvre ; mais, dans le même temps, c’est accusé de n’être abordable qu’aux classes les plus aisées, soucieuses de leur bien-être personnel et d’en faire un signe de distinction sociale.De même, les écovillages et autres communautés intentionnelles, loués pour avoir conçu de nouveaux modes de vie réduisant considérablement l’empreinte écologique, pour avoir mis au point de nouvelles « basses » technologies telles que l’habitat passif et mis en place des outils de communication et de gouvernance internes ; mais auxquels on peut reprocher de constituer des groupes sociologiquement assez homogènes, issus majoritairement de la classe moyenne, entretenant des méthodes de communication non violentes, peu propices à l’expression de désaccords porteurs de projets politiques alternatifs…