Quel moment plus propice que la nuit pour rêver collectivement et entrer en résistance ? D’ailleurs, le verbe « résister » ne signifie-t-il pas, étymologiquement, « se soulever, se tenir debout » ? Rester debout une fois la nuit tombée pour avoir voix au chapitre et droit de cité.
Au printemps 2016, la place de la République est devenue le théâtre d’une occupation citoyenne, dans le sillage des « mouvements des places » qui ont déferlé, depuis le début des années 2010, sur les parcs Zuccotti ou Gezi, ainsi que sur les places Tahrir, Puerta del Sol, Maïdan ou Syntagma. L’objectif de ce texte est d’ouvrir une piste de réflexion parmi d’autres, pour tenter de saisir ce qui advient à travers Nuit debout et les « mouvements des places » en tant qu’expériences politiques disruptives qui posent la question de la cité démocratique. Il s’agit de déchiffrer la part de nouveauté politique que charrient ces brèches contemporaines, par une exploration philosophique non exhaustive, qui pourra prendre appui sur des écrits témoignant directement de ces événements ainsi que sur les premières analyses et enquêtes qui ont été menées « à chaud ». Cette esquisse d’interprétation pourra être informée par les sciences sociales (histoire des mouvements sociaux, géographie, sociologie des mobilisations collectives), tout en ayant recours à des outils théoriques empruntés à un pan minoritaire de la philosophie politique contemporaine. Il s’agira, en particulier, de s’appuyer sur le concept de « démocratie sauvage », faisant le pari que ses fondements théoriques et les tensions qui le traversent peuvent apporter des éléments de compréhension aux « mouvements des places » et aux rapports qui peuvent se tisser avec Nuit debout…