Au début des années 1990, la pression sociale, les changements sociaux et politiques en Algérie ont bousculé et influencé le discours officiel et l’écriture de l’histoire nationale. En effet, quand, en octobre 1988, commence à émerger sur le devant de la scène nationale et dans la société civile algérienne une autre mémoire, une mémoire dissidente jusque-là enfermée dans le silence, la jeunesse, en perte de repères et de référents identitaires, demanda à connaître cette autre histoire cachée. Les questions et les interpellations vinrent alors de toutes les composantes de la société. Ce fut le début des révélations et de la déchirure, la fin de l’unanimisme et des tabous. L’Algérie se découvrit plurielle et commença à reconnaître et à intégrer les diversités culturelles et linguistiques qui la composent, cheminant ainsi vers la libéralisation politique et une amorce démocratique.
Ces années furent celles de la mise en écriture des mémoires de la société et la fin de la censure et de l’interdiction ; mais l’autocensure resta de mise. Même si beaucoup de tabous tombent, certains sujets sensibles ne sont toujours pas ou à peine abordés, d’autres sont tout simplement relégués en marge des débats ou renvoyés à la case « sans intérêt ». C’est le cas de l’histoire des harkis qui, parce qu’elle pourrait soulever des problèmes, est banalisée au point de ne plus faire partie de la mémoire commune de la société et n’appartient plus qu’au récit individuel des témoins de la période coloniale…