Colloque international « Vers la Post Radio ; enjeux et mutations des objets et formes radiophoniques », organisé par le Groupe de Recherches et d’Études sur la Radio, Paris, 26-27-28 novembre 2009
1En plus d’être massivement écoutée, la radio fait de plus en plus parler d’elle. Elle disposait déjà de « mémoires » (INA, Joëlle Girard, CHR, SAéM, SPHM), elle fait aujourd’hui l’objet de festivals (Longueur d’Ondes, SonoR, Engrenages, Phonurgia Nova, Radiophonies, Université Radiophonique, Radiophonic), d’un salon (Le Radio), d’émissions autoréflexives (zapping sur lemonde.fr, Les passagers de la nuit et Mégahertz à France Culture), de commémorations (RTL et Nova 2006, France Info 2007), d’autobiographies (Kriss 2005, Bouteiller 2006, Bourdin 2007, Baumgartner 2007), de réseaux d’échange (URTI, EPRA, Panos), de rapports (Hamelin et Teissier en 2009), de forums (Lincoln 2007, Toronto 2009), de critique artistique (Syntone), de lieux de diffusion et de création sonore, fictionnelle, documentaire (hier ACR, Club et Centre d’essai, aujourd’hui arteradio.com, estceque.blogspot.com, jetfm.asso.fr, silenceradio.org, grenouille888.org, ousopo.org) et d’autres événements variés (Cartes Postales Sonores des Zoreilles à Paris, Goûter sonore à Montpellier, 25 ans des radios libres à Arcueil).
2D’un point de vue universitaire, la radio fait l’objet de nombreuses publications d’ouvrages et de revues (Médiatiques, Récit et société 2007, The Radio Journal, MédiaMorphoses 2008, CHR, Recherches en Communication 2008, Journal of Radio and Audio Media, Wildproject 2009) grâce au dynamisme de groupes et réseaux de recherche comme RSN, NARSN, IREN (6ème PCRDT de la CE), la section radio de l’ECREA, le Groupe RADIO de Béatrice Donzelle à Paris (exporté à Vienne par Judith Purkarthofer) et bien sûr le GRER de Jean-Jacques Cheval qui a su, en quelques années, tisser des liens avec plusieurs réseaux, institutions, organismes (SFSIC, IAMCR, AMARC, UNESCO, CMFE), et organiser des ateliers (documentaire, musique) et des colloques internationaux (Bordeaux 2001 et 2004, Lyon 2006).
3C’est dans ce contexte qu’a eu lieu le colloque « Vers la Post Radio » (en hommage à l’ingénieux Pierre Schaeffer mais aussi Kriss et André-Jean Tudesq), où il s’agissait d’interroger les mutations de la radiophonie dans le contexte de la numérisation des TIC.
4Pour cela, la parole a été donnée à 60 participants de 15 nationalités rassemblant aussi bien des universitaires (doctorants et chercheurs) pluridisciplinaires (SIC, sociologie, science politique, histoire, philosophie) que des professionnels de la radio : syndicat (SNRL), radios (RTL, RF, Goom, Pluriel), institut de sondage (Médiamétrie), régulateur (CSA belge), financeur public (FSER), institut de patrimoine (INA), plateforme de diffusion (streamtheworld.com), société de mutualisation de contenus grâce à des journalistes multitasking (Mixmedia), artistes (Singer, Christoffel et Ripault), associations (AER, addor.org, DR), journaliste (RFI), consultant (LabRadio).
5C’est un atout du GRER que de faire communiquer les approches et idées de ceux qui font la radio, la distribuent, la régulent, l’écoutent et l’étudient car chacun semble être dans l’incertitude et l’expectative donc dans le besoin de nouvelles pistes de réflexions prospectives sur les voi(es/x) de la radio. En effet, la radio doit trouver sa place au sein des TIC en combinant d’une part flux et stock, linéaire et délinéaire, streaming et podcast, multiplexage et interopérabilité, qualité du son et métadonnées, pause et retour en arrière, enregistrement et programmation, et en gérant d’autre part l’arrivée des concurrents (webradios et hertziennes en ligne, sites de téléchargement et streaming), distributeurs (opérateur téléphonique, FAI, RNT, satellite), normes (du DAB au T-DMB) et terminaux (récepteur numérique, PC, mobile, TV).
6Ces changements technologiques impliquent des investissements lourds (ralentissant les mises en œuvre, comme ailleurs : TMP, TNT, fibre, 3G), des adaptations économiques (avec des modèles concentrés, convergents, hybrides, intégrés palliant la diminution des audiences et recettes publicitaires), juridiques (coordination des politiques publiques de régulation à l’échelle internationale) et marketing (les radios deviennent des marques multisupports ciblant des publics segmentés et communautarisés grâce à des contenus formatés et thématisés).
Si ce tournant postradiophonique pèse aussi sur les formats, les contenus et la grammaire radiophonique, les professionnels de la radio et de la recherche s’accordent sur les possibilités de la radio à conserver longtemps ses spécificités auditives (son, musique, parole), ses contenus riches (information, divertissement, culture), ses qualités chaleureuses (souplesse, direct, interactivité, instantanéité, mobilité, simplicité, diversité, crédibilité, proximité, accessibilité, immédiateté), ses services pluriels (complémentarité entre les radios publiques, commerciales et les 600 associatives) grâce à ses capacités polymorphiques et polyfonctionnelles de résistance et résilience ainsi que sa force de symbolisation et d’imagination, d’identification et de socialisation. L’émergence de nouvelles pratiques ne peut qu’ouvrir l’espace public médiatique et le champ des études radiophoniques.