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Article de revue

Jules Verne et le journaliste. Imaginer l'information du xxe siècle

Pages 201 à 213

Notes

  • [1]
    Il s’agit là d’une des rares œuvres de Jules Verne se plaçant explicitement dans le futur, avec, notamment, L’Eternel Adam et Paris au xxe siècle.
  • [2]
    Raoul Deberdt, « La Caricature et l’humour français au xixe siècle », Revue encyclopédique Larousse, 228, 1er janvier 1898, p. 36.
  • [3]
    Robida publie également d’autres livres d’anticipation illustrés comme Le xxe siècle. La Vie électrique, en 1890 (sur les avantages et les inconvénients des progrès scientifiques dans ce domaine), Voyage de fiançailles au xxe siècle, en 1892, L’Horloge des siècles (voyage dans le temps), en 1902. En 1908, il illustre également le récit du journaliste Pierre Giffard, l’un des pères du reportage français, La guerre infernale. Notons que Robida n’est pas le seul à composer des œuvres d’anticipation en images, comme en témoigne le numéro spécial de L’Assiette au beurre, du 19 décembre 1901, sur « La conquête de l’espace », signé par Albert Guillaume.
  • [4]
    Finalement, la nouvelle paraît en 1910 (cinq ans après la mort de Jules Verne) dans le recueil Hier et demain (publié par les soins de Michel Verne), sous le titre : « Au xxixe siècle. La journée d’un journaliste américain en 2889 ».
  • [5]
    Voir : Etienne Cluzel, « Les anticipations de Jules Verne et celles… d’Albert Robida », Bulletin du bibliophile, 1, 1961.
  • [6]
    Jules Verne, La journée d’un journaliste américain en 2890, Villelongue d’Aude, Atelier du Gué, 1978 (rééd.), p. 27.
  • [7]
    Ibid., p. 31.
  • [8]
    Eugène Dubief, Le journalisme, Paris, Hachette, 1892, p. 85-86.
  • [9]
    Ibid., p. 258.
  • [10]
    Henri Avenel, « Le mouvement perpétuel de la presse », introduction à l’Annuaire de la presse française et du monde politique, 1901, p. XI.
  • [11]
    Adolphe Brisson, « L’envers du journal », Annales politiques et littéraires, 24 mars 1895.
  • [12]
    Henri Avenel, Annuaire de la presse, 1904-1905, p. I.
  • [13]
    Henri Avenel, « Le mouvement perpétuel de la presse », art. cit.
  • [14]
    Séverine, « Les deux presses », Gil Blas, 31 octobre 1903.
  • [15]
    Pour plus de détails, voir : Christian Delporte, Les journalistes en France, 1880-1950. Naissance et construction d’une profession, Paris, Seuil, 1999.
  • [16]
    Octave Mirbeau, « Le journalisme français », La France, 14 mai 1885.
  • [17]
    Edouard Lockroy, préface à L’Annuaire de la presse, 1889.
  • [18]
    Henry Bérenger, Revue bleue, 4 décembre 1897.
  • [19]
    Eugène Dubief, op. cit., p. 296.
  • [20]
    Paul Pottier, « Professions et métiers : les journalistes », Action populaire, 145, 1907.
  • [21]
    Traduction concrète de la « doctrine Monroe ».
  • [22]
    Louis Vauxcelles, Paul Pottier, « Le New York Herald », Gil Blas, 21 janvier 1904.
  • [23]
    Il avait acquis la célébrité, notamment en couvrant la guerre de Sécession, grâce à une soixante de correspondants de guerre.
  • [24]
    Louis Vauxcelles, Paul Pottier, art. cit.
  • [25]
    Ibid.
  • [26]
    Jules Verne, op. cit., p. 34.
  • [27]
    Voir, par exemple : Paul Brulat, Le Reporter. Roman contemporain, Paris, Perrin, 1898.
  • [28]
    Voir, à ce propos, le témoignage de Georges Pioch, « M. Bunau-Varilla ou le Juste Payeur », Le Journal du peuple, 26 février 1918.
  • [29]
    Emile Zola, Annales politiques et littéraires, 22 juillet 1894.
  • [30]
    Allusion directe à l’actualité américaine : la chaise électrique est utilisée pour la première fois aux États-Unis, le 6 août 1890.
  • [31]
    Verne évoque un nouveau procédé publicitaire, la « publicité aérienne », qui consiste à réfléchir d’immenses affiches sur des nuages, à l’aide de 1 000 projecteurs installés sur le toit du journal.
  • [32]
    Rappelons ce qu’écrivait Hearst, dans l’éditorial du Morning Journal, le 25 septembre 1898 : « La force de la presse est la plus grande force du monde. Dans un régime républicain, les journaux forment et expriment l’opinion publique. Ils déclarent la guerre. Ils punissent les criminels, surtout les puissants. Ils récompensent, en leur donnant une juste publicité, les bonnes actions des citoyens, partout ». Pour sa part, Maurice Bunau-Varilla, le patron du Matin, affirmait : « Mon fauteuil vaut trois trônes ».
  • [33]
    Henri Avenel, « Le mouvement perpétuel de la presse », art. cit.
  • [34]
    Henri Avenel, Annuaire de la presse, 1904-1905, art. cit.
  • [35]
    Séverine, art. cit.

1Comment les journalistes et les gens de presse de la fin du xixe siècle imaginaient-ils l’information du siècle qui allait s’ouvrir ? La question peut paraître paradoxale, au moins à deux titres. D’abord, le journaliste, dont la fonction essentielle est de rapporter l’actualité et d’analyser l’événement, est un homme d’action, donc un homme du présent. S’il s’appuie sur le passé pour expliquer au lecteur les caractéristiques de son temps, il se projette rarement dans un avenir lointain. Et quand il s’interroge sur le futur, c’est pour chercher à définir les effets à court terme d’une situation politique, économique, sociale donnée et soigneusement décrite au présent ; une situation qui préoccupe le lecteur et pose des questions auxquelles le journaliste, fort de ses connaissances, de son expérience, d’éléments qui échappent à l’opinion, tente, en professionnel, de donner des réponses. En revanche, si l’homme de presse est prompt, à la fin du xixe siècle, à étaler sur la place publique les débats souvent rudes qui agitent le monde des journaux à propos de la « bonne » et de la « mauvaise » presse, à prendre l’opinion à témoin dans des controverses qui mettent directement en jeu l’avenir de l’information dans une société démocratique, il ne s’applique guère, sauf exception, à imaginer ce que deviendra cette dernière dans vingt, cinquante ou cent ans. Le journaliste est un homme de la réalité, non de la fiction ; c’est de l’analyse de la réalité qu’il tire sa crédibilité d’informateur.

2Mais il est sans doute une autre raison, plus conjoncturelle celle-ci, qui explique la discrétion des professionnels sur la presse de demain. Dans les deux ou trois dernières décennies du siècle, les journalistes ont déjà l’impression de vivre le futur. Certains l’acceptent, d’autres s’en alarment. Les modes, les supports, les caractères de l’information, en effet, connaissent la plus extraordinaire révolution depuis l’époque mythique de Renaudot : multiplication des titres ; explosion des tirages et du lectorat ; banalisation du journal ; mutations techniques multiformes touchant à la fois aux sources, à l’impression, à la distribution ; soumission de la presse aux lois du marché ; bouleversement des pratiques avec l’essor de la nouvelle et du reportage, etc. Les journalistes ont déjà bien du mal à maîtriser l’évolution récente, à définir de nouveaux repères, à fixer leur nouvelle identité ; ils semblent comme incapables de considérer lucidement leur avenir professionnel.

3Pour comprendre la manière dont était conçue l’information du prochain siècle, l’historien dispose, alors, de trois types d’outils. D’abord, les ouvrages clairement présentés comme des œuvres d’anticipation et qui émanent de personnalités qui, connaissant fort bien la presse pour y publier régulièrement, ne peuvent être toutefois considérées comme des journalistes (Albert Robida, Jules Verne). Ensuite, les textes – trop rares – de professionnels qui, au détour d’une démonstration se laissent aller à imaginer l’avenir (tel Eugène Dubief). Enfin, les écrits de journalistes qui, portant un jugement sur l’évolution récente de la presse, sur l’information de leur temps, débordent leur sujet et laissent percer la façon dont ils voient la presse de demain.

Le siècle de la technique : entre fiction et réalité

4Des œuvres d’anticipation sur l’information du futur, les deux plus marquantes sont sans doute Le xxe siècle, paru en 1883, écrit et illustré par le dessinateur Albert Robida, et La Journée d’un journaliste américain en 2890, de Jules Verne [1]. En matière de « science-fiction », Robida n’en est pas à son coup d’essai. « Visionnaire devineur des féeries de la science de demain », comme le caractérise le critique Raoul Deberdt [2], Robida, jeune illustrateur (il avait alors 21-22 ans), avait commencé à composer en 1869-1870 une série de lithographies pour la petite presse hebdomadaire d’humour (notamment Paris-Comique), sur « La guerre au xxe siècle », reprises et complétées dans un livre finalement publié en 1887. [3] À la fin du xixe siècle, les dessinateurs de presse, peu enclins à suivre la plus brûlante actualité, ne peuvent être regardés comme des journalistes ; eux-mêmes se considèrent plus volontiers comme des artistes-peintres, des lithographes, des illustrateurs. Il reste que Robida construit sa carrière dans la presse. Engagé à 18 ans par Charles Philipon (Le Charivari), collaborateur de multiples feuilles, comme Le Journal amusant, sous le Second Empire (avec Cham, Grévin, Bertall, parfois Daumier), Le Rire ou L’Assiette au Beurre, sous la Troisième République, fondateur et directeur de La Caricature, de 1880 à 1892, Robida est indéniablement un homme de presse, sensible aux questions qui surgissent dans un monde des journaux en pleine transformation.

5Il n’est guère besoin d’insister sur les liens tissés entre Jules Verne et la presse de son époque. L’écrivain a vécu de très près la mutation de l’information, en publiant ses romans en feuilletons dans les journaux, notamment dans le quotidien le plus emblématique du passage de la presse des élites à la presse de masse, Le Petit journal. La Journée d’un journaliste américain en 2890 est une nouvelle, connue des spécialistes, mais relativement ignorée du grand public. Situer l’action à un millénaire de distance de son temps est un moyen habile pour justifier toutes les invraisemblances et se prémunir contre la critique qui n’aurait pas manqué de jaillir si l’auteur s’en était tenu à la description du siècle prochain. Car, au-delà du récit lui-même, la nouvelle est une cruelle satire des moeurs de la fin du xixe siècle, et singulièrement du mode de vie américain (que l’on retrouvera bientôt dans L’Ile à hélice). À l’origine, le texte, commande de Lorettus S. Metcalf pour The Forum, paraît en février 1889 sous le titre « In the year 2889 ». Le véritable auteur en est Michel Verne. Toutefois, Jules Verne le reprend, le modifie énergiquement, avant d’en faire une lecture publique à l’Académie d’Amiens et de le publier sous son nom, en 1891, dans les Mémoires de l’Académie[4].

6Pour Robida, pour Verne, comme pour les hommes de presse de l’époque, le xixe siècle est le siècle de la révolution technique de l’information : les temps qui suivront seront ceux du perfectionnement, de l’épanouissement des applications, de l’aboutissement d’inventions qui fascinent les contemporains ; à commencer par le téléphone, voire le phonographe. Robida, qui situe son livre en 1953, imagine ainsi le téléphonoscope, appareil de communication qui permet à la fois d’entendre, de voir et de dialoguer. « L’ancien télégraphe permettait de comprendre à distance un correspondant ou un interlocuteur, le téléphone permettait de l’entendre, le téléphonoscope permet en même temps de le voir », explique l’auteur du xxe siècle. Le téléphonoscope est relié au fil du téléphone et réservé aux abonnés. L’image est rendue sur une plaque de cristal, encastrée dans une cloison d’appartement, ou posée comme un miroir au-dessus d’une cheminée, tandis que le son est transmis par le haut-parleur du téléphone. Image et son d’un événement peuvent ainsi parvenir en direct au domicile de plus de cinquante mille abonnés, dans leur salon ou leur chambre à coucher, comme le décrivent les illustrations de Robida. Sans entrer dans les détails, le dessinateur envisage de multiples usages pour le nouvel instrument : la possibilité de communiquer avec des amis, de faire des emplettes, de suivre des cours, de surveiller un lieu, mais surtout d’assister à des spectacles en direct (grâce à la Compagnie universelle du téléphonoscope théâtral, fondée en 1945) ou de recevoir chez soi des images d’actualité, comme celles des champs de bataille. Ainsi l’actualité politique rejoint-elle les événements culturels pour devenir, à son tour, grâce à l’image, un troublant et fascinant spectacle.

7L’influence d’Albert Robida sur Jules Verne, s’agissant des innovations techniques, est indéniable [5]. Les emprunts, au demeurant, ne concernent pas seulement l’information et la communication, mais aussi les transports (aérotrains, tubes pneumatiques transocéaniques permettant de transporter les voyageurs à 1 500 kilomètres heure) ou l’alimentation (comme ces usines alimentaires reliées par tubes aux domiciles des abonnés à qui sont distribués des plats à chaque repas). En 2890, le journal est devenu téléphonique et phonotéléphotique. « Le téléphone complété par le téléphote, encore une conquête de notre époque », écrit Jules Verne [6]. Chaque jour, au lieu d’être imprimé, le quotidien est « parlé ». Les acheteurs au numéro peuvent prendre connaissance du dernier exemplaire en se rendant dans l’un des nombreux cabinets phonographiques, où ils entendront le contenu de l’actualité. Quant aux abonnés, ils bénéficient de multiples services. Au moment de la sortie, le soir même, ils peuvent écouter leur journal et en prolonger la consultation par un dialogue direct avec les reporters, les hommes politiques et les savants. Dans la journée, une multitude de littérateurs (sic) est à leur disposition pour leur lire au téléphone le chapitre d’un roman au choix. Par ailleurs, le matin, les reporters communiquent les toutes dernières nouvelles aux abonnés, reçues durant la nuit : soit par téléphone, soit par téléphote (outil à multiples usages, à l’instar du téléphonoscope de Robida). « Les abonnés ont donc non seulement le récit, mais la vue des événements, obtenue par une photographie intensive » [7].

8Chez Robida comme chez Verne, l’information s’approprie l’innovation technique, la détourne de sa destination première, l’applique à ses besoins ; car l’information, par ses caractères mêmes, doit impérativement se saisir des derniers progrès dans le domaine de la technologie de la communication. Les deux auteurs prennent acte d’une mutation essentielle dans l’information de leur siècle : la nécessité de raccourcir le délai qui sépare l’événement de son annonce au lecteur, l’impératif d’immédiateté dans la réception de la nouvelle (source) comme dans sa diffusion. Ce faisant, ils transposent et amplifient une donnée fondamentale de la révolution de la presse, notamment marquée par la primauté de la nouvelle sur l’analyse, la multitude grandissante des faits quotidiens venus du monde entier, la vitesse de la circulation de l’information, précisément facilitée par des outils techniques, fruits du progrès scientifique : le téléphone et, demain peut-être, le phonographe. Ces dernières inventions provoquent, chez certains hommes de presse, un enthousiasme tel qu’ils envisagent déjà les bouleversements que pourront apporter aux pratiques journalistiques les nouveaux instruments.

9Eugène Dubief, par exemple, n’a rien d’un auteur d’anticipation. Ancien secrétaire général de la direction de la presse au ministère de l’Intérieur, directeur politique du Progrès de Lyon, il publie Le journalisme, ouvrage qui explique au lecteur l’histoire, les transformations récentes et le fonctionnement de la presse au début des années 1890. Chez Robida ou Verne, le journal parlé, le journal en images relevaient de la science-fiction. Dubief, lui, partant d’inventions connues, envisage l’étape nouvelle de la révolution de l’information : celle du téléphonographe. Cherchant à faire partager au lecteur sa flamme pour les progrès scientifiques, il dresse un tableau prospectif, n’hésitant pas à écrire à propos du siècle prochain : « Chaque abonné, mis par un fil en communication avec son journal, n’aura plus qu’à tourner une boucle d’acier et à écouter. Non seulement, il aura ainsi les dernières nouvelles recueillies, mais il entendra, avec ou sans commentaires, le sermon du prédicateur, l’opéra nouveau, le discours du ministre ; il saura même, à point nommé, où ont éclaté les applaudissements ou les murmures. Impossible à l’orateur de retoucher la sténographie, ou au critique influent de trop vanter ou de trop dénigrer le jeu des artistes. Déjà on parle d’enseigner par le téléphonographe la musique, la déclamation, les langues vivantes. (…) De partout, les nouvelles afflueront au cabinet du journaliste, comme autant de filets nerveux ; d’autres filets nerveux les transmettront au même instant chez tous les abonnés ou les emmagasineront dans leur phonographe. Puis, qui sait ! nos neveux ayant trouvé enfin l’art de voir à distance, l’image, les gestes, le jeu des acteurs, des orateurs, des personnages célèbres suivront la même voie qui aura transmis leurs actes et leurs paroles. Moyennant l’abonnement le plus minime, le citoyen du xxe siècle pourra évoquer devant lui, à volonté, un diorama vivant de l’Univers et être sans cesse en communion avec tout le genre humain ». Et Dubief de conclure : « Le Livre (…) a sapé de Monument, le Journal a supplanté le Livre ; le Téléphone et le Phonographe supplanteront le Journal » [8]. Ainsi, avec Dubief, sans doute lecteur de Robida et de Verne, manifestement séduit par le téléphonoscope de l’un et le téléphote de l’autre, l’utopie et la fiction deviennent des défis, certes peu réalistes à court terme, mais que pourraient bien, dans quelques décennies, relever les scientifiques.

10Dubief envisage aussi les avancées que permettront, bientôt peut-être, la mise au point et la diffusion de la photographie en couleur, en matière de reportage (la couleur, c’est la vie), et en matière de démocratisation de la culture. « Tous les musées alors appartiendront à tout le monde. Votre journal vous donne en supplément, sur une feuille encartée, La Vierge à la chaise, la Mater dolorosa, le Van Dyck ou le Velasquez le plus célèbre, le Rembrandt le plus rare, ou un de ceux qu’on garde sous un triple écrin au British Museum. N’est-ce pas une merveille nouvelle à ajouter à tant de merveilles ? » [9].

11Porté par son élan lyrique, Dubief en arrive à dire qu’un jour, peut-être, le journaliste, le médiateur ne sera plus indispensable. Une telle affirmation a de quoi inquiéter une profession qui doute. Certes, les propos ont l’allure de boutade. Mais, parmi les journalistes, beaucoup, sans toutefois se résoudre à cette éventualité, estiment que les bouleversements de la presse vont amener, à court terme, la mort d’une certaine conception du journalisme et de la presse. Aussi ne regardent-ils pas l’entrée dans le xxe siècle en toute sérénité. Or, de manière caractéristique, le tableau que dresse Jules Verne du journalisme américain du futur cristallise les éléments multiples de la crise morale traversée par cette fraction des professionnels français.

Le xxe siècle a déjà commencé

12« Nous assistons depuis quelques années à la transformation ou, pour parler plus exactement, à la disparition de ce que fut autrefois le journalisme français », écrit Henri Avenel, le directeur de l’Annuaire de la presse, à l’aube du nouveau siècle [10]. Ce sentiment est unanimement partagé par les gens de presse. Que recouvre cette révolution du « journalisme », qu’il convient d’entendre, non dans sa définition actuelle, mais dans une acception si large qu’elle englobe le « monde des journaux » (fabrication, conception, diffusion de la presse) ? Outre les mutations techniques déjà évoquées : d’abord, un profond bouleversement des contenus, qui passe par l’essor de la nouvelle (le « fait brut », selon l’expression des contemporains) et du reportage sous ses multiples formes, au détriment de l’analyse, de la chronique, de la critique ; ensuite, élément corollaire, le recul rapide de la presse d’idées, de la presse engagée, de la presse « doctrinaire » ou « doctrinale » (sic) au profit de la grande presse d’information générale, avide d’exclusivité, de faits divers, de sensationnalisme ; enfin le basculement de la presse dans la logique du marché (essor de la publicité, concurrence, arrivée massive des capitaux dans les affaires de presse, transformation des journaux en sociétés anonymes, etc.).

13Que faut-il penser de cette révolution de la presse ? Les plus nombreux à s’exprimer sur le sujet déplorent une « industrialisation de la presse », qui a transformé le journal en une « maison de commerce » [11], en une « émanation commerciale destinée à répondre aux goûts du public » [12]. « La Presse tend à devenir une industrie qui, subissant la loi fatale de l’offre et de la demande, est tenue de se plier aux exigences de sa clientèle » [13]. À brève échéance, c’en est fini de la « mission » du journaliste, écrit Séverine, qui porte un regard sans indulgence sur la « foule » des lecteurs. « Elle a la presse qu’elle veut, qu’elle fait, et qu’elle vaut ! », s’exclame-t-elle [14]. On pourrait multiplier les exemples de critiques acerbes sur l’évolution de la presse au tournant du siècle, sur ces journaux soumis aux conseils d’administration, aux actionnaires, à l’affairisme, sur ce journalisme qui a perdu toute conviction et cultive les plus viles instincts de l’homme dans l’unique dessein de vendre du papier, sur ces journalistes qui ne savent plus écrire et ne reculent devant aucun obstacle moral pour obtenir des informations (mensonge, vénalité, violation de la loi et de la vie privée, etc.) [15].

14Qu’ils s’en accommodent – parfois –, qu’ils l’applaudissent – rarement -, ou qu’ils la rejettent – souvent -, les journalistes voient tous dans l’évolution récente de la presse l’influence directe ou indirecte de l’exemple américain. La presse française « s’américanise », dit-on. Le journalisme français a pris tout ce qu’il avait de plus mauvais dans le journalisme américain, s’indigne Mirbeau en 1885 [16]. « Nous nous américanisons tous les jours », s’alarme Lockroy en 1889 [17]. L’américanisation de la presse, voici bien l’explication majeure à tous les maux des journaux français, renchérit Bérenger en 1897 [18]. Eugène Dubief, qui porte un regard bienveillant sur les mutations de l’information, s’emballe brusquement lorsqu’il décrit les journaux aux États-Unis, véritable patrie de la presse moderne. « Le journal anglais, c’est Béhémoth ; le journal américain, c’est Léviathan », s’exclame-t-il. Le journalisme américain est un « journalisme à toute vapeur, à toute rage » : « quant aux informations », ajoute encore Dubief, « ce n’est plus de la vitesse, de la vélocité, c’est de la fantasmagorie. Y a-t-il à Paris une représentation théâtrale à grand orchestre ? Le lendemain à sept heures en même temps que le Parisien, trois heures plus tôt que le Rémois ou le Dijonnais, le New-Yorkais ou le Bostonien a lu sur elle deux ou trois colonnes d’analyse. Y a-t-il un crime à Philadelphie ou à Washington, les journaux feront mieux d’en conter les détails, ils se metteront sur la piste de l’assassin, ils arriveront parfois à le livrer à la police ». [19] Paradigme de la médiocrité professionnelle et morale ou héros social exemplaire, le reporter américain, chacun en convient, est en train de s’imposer comme le modèle du journaliste français. Qu’ils l’acceptent ou le redoutent, les propos tenus par les hommes de presse français débouchent sur la même prévision : le journalisme d’outre-Atlantique d’aujourd’hui, nourri de reportage et d’information, est le journalisme français de demain. Se projetant dans un avenir qu’on peut supposer relativement proche, le journaliste socialiste Paul Pottier affirme : « Plus modernes, plus actifs, plus intéressants pour le public, les reporters dévoreront les « articliers », ou faiseurs d’article, de même que la presse d’information, entourant de plus en plus la presse d’opinion, finira par la manger » [20].

15Or, c’est en tenant compte du contexte évoqué, des peurs, des craintes, des refus, de l’impuissance face une évolution en marche et que rien ne semble pouvoir arrêter, qu’il convient d’apprécier la nouvelle de Jules Verne. Du coup, le récit d’anticipation se transforme, à de multiples égards, comme un texte à clefs aux accents très contemporains. Verne, sous prétexte de dépeindre un journal imaginaire dans mille ans et de l’autre côté de l’Atlantique, se livre à une satire des plus sévères sur la presse de son temps, sur le type de presse qui, venue tout droit des États-Unis est en train d’envahir le sol français. Justifions notre propos par une série d’exemples.

L’Amérique : l’information qui nous attend

16Dans la première version de la nouvelle, destinée à un public américain, le héros était le directeur de l’Earth Chronicle, Fritz Napoléon Smith, descendant de George Washington Smith, fondateur du Manhattan Chronicle. En 1889, il est devenu Francis Bennett, petit-fils de Gordon Bennett, et patron de l’Earth Herald. Le quotidien, qui s’appelait à l’origine le New York Herald, a changé de nom à la fin du xxviie siècle, lorsque les Bennett ont suivi le gouvernement dans la nouvelle capitale des « États-Unis des deux Amériques » [21], Universal City. On aura, sans peine, reconnu sous l’identité de Francis Bennett, le lointain héritier de John Gordon Bennett, fondateur en 1835 du New York Herald, père de la presse américaine où « l’information devance l’événement » [22], promoteur du reportage et de l’interview [23], parti sans un dollar dans l’aventure de son journal, et mort multimillionnaire. Mais le vrai modèle de Francis Bennett, c’est James Gordon Bennett qui, successeur de son père John, assure le prestige international du New York Herald, par le retentissement des reportages menés sur tous les conflits de la planète et des opérations à caractère publicitaire (sauvetage de l’explorateur britannique Livingstone par Stanley, parti à sa recherche en Afrique, en 1871). Les journalistes français le connaissent bien car, en 1887, il a décidé d’installer les locaux de l’édition internationale du New York Herald à Paris (après l’échec de l’implantation à Londres) : ainsi peuvent-ils, chaque jour, apprécier les caractères de la « méthode » américaine ; c’est un peu comme si le loup pointait son museau à la porte de la bergerie.

17Jules Verne projette chez Francis Bennett tous les traits du mythique James. Ce dernier est un véritable « business manager » [24] qui règne en maître sur son journal. Rien ne lui échappe comme rien n’échappe au directeur de l’Earth Herald, que le romancier nous invite à suivre durant la journée du 25 juillet 2890 (car le « journaliste américain », c’est lui). James s’efforce de faire profiter son journal et son public des derniers progrès techniques (en matière de dépêches, par exemple : câble Mackay-Bennett) ; Francis a inauguré le « journalisme phonotéléphonique ». Comme James, qui détient de multiples entreprises sans rapport avec la presse, Francis est un homme d’affaires ; il possède notamment une fabrique d’énergie sur le Niagara. Une foule de « brasseurs d’affaires » se presse dans la salle de réception du quotidien, proposant des opérations, quémandant un conseil. James est précédé d’une réputation de grand businessman qui fait écrire à Vauxcelles et Pottier : « Quand une affaire se lance, Bennett n’en est jamais, néanmoins on se chuchote sous le manteau : « Bennett en est » et on finit par le croire » [25]. Verne soigne les détails. Francis communique avec sa femme, qui séjourne dans un hôtel des Champs-Élysées, grâce à un phonotéléphote ; or, on sait que James, très enclin aux mondanités et fasciné par la modernité parisienne, passe une partie de l’année dans un splendide immeuble des Champs-Élysées. James a transporté le New York Herald du populeux quartier de Newspaper Road dans la fastueuse 5e Avenue ; Francis vient d’inaugurer les nouveaux locaux de l’Earth Herald, qui occupent désormais un somptueux hôtel dans la plus prestigieuse artère d’Universal City, la 16823è Avenue. On pourrait, bien sûr, mettre en évidence d’autres parallèles. Du coup, cette identité étroite entre les deux personnages nourrit la proximité du tableau brossé par Jules Verne, lorsqu’il décrit la nature du journal, de « l’usine Bennett » [26], et alimente les craintes de tous ceux qui dénoncent l’américanisation du journalisme français. En effet, qu’est-ce qui attend la presse française dans l’avenir ?

18Le romancier décrit un journal dominé par la personnalité d’un patron distant, une rédaction rigoureusement hiérarchisée, des tâches soigneusement cloisonnées. Alors que dans les quotidiens français ancienne manière, les journalistes se rencontrent et se succèdent à la même table de l’unique salle de rédaction, les différents collaborateurs du Earth Herald ne se croisent jamais, enfermés qu’ils sont, toute la journée, dans des salles affectées en fonction de la spécialité (salle des romanciers-feuilletonistes, salle des reportages, salle des interviewers, salle de la publicité… ). Cette déshumanisation du métier de journaliste est encore soulignée par deux traits. D’abord, le pullulement des reporters : l’Earth Herald n’en compte pas moins de 1 500. Ensuite, la sédentarisation des journalistes : reliés par des fils à leurs sources et à leur public, ils ne quittent jamais leur bureau. Enfin, le caractère de leur tâche, mécanique et répétitive. Les journalistes sont devenus des pions interchangeables, sans imagination, sans initiative, privés d’indépendance. Leur personnalité et leur talent ne peuvent s’exprimer. Evolution d’autant plus paradoxale que le reporter de la fin du xixe siècle avait transformé le journaliste (souvent cantonné à son cabinet de travail) en un homme de terrain. Verne reprend à son compte un faisceau de critiques sur la nouvelle presse où le journaliste, fondu dans une entreprise (une « usine », dit-on) dirigée par un homme d’affaires lointain et ne connaissant rien au métier, perd son statut social en même temps que son autonomie, se « prolétarise » [27]. Ici, loin de venir au secours de son indépendance, la technique aliène le journaliste et avilit son activité. On retrouve les charges de l’époque contre les grands quotidiens d’information où les rédactions explosent, où les hommes de presse ne sont plus considérés comme des collaborateurs du directeur, mais comme de vulgaires « employés », pour reprendre un mot célèbre du puissant patron du Matin, Bunau-Varilla [28].

19Le réquisitoire prononcé par les contemporains contre une presse qui s’américanise se retrouve à tous les niveaux du récit de Jules Verne. Quelques exemples pour le montrer. D’abord, la dégradation de la qualité du contenu, l’affaissement de la morale individuelle et collective, l’oubli de la mission. « La presse est en train de tuer la littérature », pense Zola au début des années 1890, même s’il ajoute que la presse a l’insigne mérite de répandre la lecture [29]. En 2890, non seulement le romancier, ravalé à l’état de « littérateur », est devenu une machine à raconter des fadaises à un « public enfiévré » (et on se rappelle, à ce propos, la virulence du débat autour des effets pervers du roman-feuilleton sur les masses dans les deux dernières décennies du xixe siècle), mais le public ne lit même plus : la presse a tué la littérature et le romancier ; la technique a ruiné la lecture, le livre et, sans doute, l’écriture. De même, toutes les frontières éthiques ont été pulvérisées sous la pression du sensationnalisme. Le public n’ignore plus rien des tracas gastriques de leur Président, et des reporters, au mépris des règles élémentaires de la justice et de la morale, vont interroger les jurés avant l’issue d’un procès ; ces derniers leur révèlent que l’accusé sera exécuté par électrocution [30]. Ensuite, le journal s’est transformé en une vaste entreprise de publicité qui, chaque jour, écrit Verne, fournit au Earth Herald, trois millions de dollars [31]. Bref, le quotidien est d’abord une immense mécanique destinée à produire de l’argent : et, du reste, Francis Bennett est lui-même à la tête d’une fortune de 30 milliards de dollars. Enfin, Jules Verne stigmatise le pouvoir de la presse, à tel point qu’on peut se demander si, en 2890, le « Quatrième pouvoir » n’est pas devenu tout simplement le premier. Le quotidien américain dispose de 85 millions d’abonnés, sans compter les acheteurs occasionnels, et les enjeux sont devenus interplanétaires. Ministres, ambassadeurs viennent chercher les conseils du « tout-puissant » directeur, implorer son approbation ou son appui, et même le persuader de lancer une campagne de nature à peser sur l’opinion internationale. Ici, l’influence des journaux de Pulitzer est sans doute décelable ; mais, à vrai dire, l’exemple des quotidiens français suffisait amplement. On remarquera, par ailleurs, que Jules Verne rédige sa nouvelle bien avant que la presse de William Hearst n’échauffe les esprits de ses concitoyens en faveur de la guerre contre l’Espagne (1898) [32].

20Dans ces conditions que devient le public ? Un consommateur passif. Les lecteurs ont la presse qu’ils méritent, disait en substance Séverine dans le passage que nous citions plus haut. C’est bien à cette idée que Jules Verne aboutit. Autrement dit : submergé d’informations, informé sur tout, en direct, par le son et par l’image, l’homme de la fin du xxixe siècle n’en est pas pour autant plus libre, plus cultivé, plus raisonnable. La technique, qui n’est pas mise au service des idées mais produite en vue d’un profit immédiat (l’Earth Herald dispose d’une équipe spéciale de savants et de chercheurs) n’est point source de progrès humain, mais matière à abêtissement collectif (avilissement du roman-feuilleton) et à manipulation de masse (campagnes d’opinion).

21Alors que le xixe siècle s’achève, malgré les transformations gigantesques accomplies dans le domaine de la presse, et sans doute à cause d’elles, le regard global des journalistes sur le siècle qui s’ouvre – et pour peu qu’on puisse se fier à des témoignages d’inquiétude dominants – semble partagé entre anxiété et expectative. On sent, chez beaucoup, comme une prudence suspecte ou une crainte confusément exprimée de se projeter dans l’avenir. Il est évidemment banal d’affirmer qu’on imagine toujours le futur en pensant le présent. Mais, en matière de presse, d’information, de moyens et de formes de « communication » (terme bien anachronique dans l’acception que nous lui donnons), la remarque nous semble particulièrement fondée.

22En un temps où les gens de presse ont le sentiment – justifié – de se situer à un tournant de leur histoire identitaire, il est très difficile pour eux de concevoir le siècle prochain sans nostalgie du passé. Alors que le métier, sous la pression de la révolution des techniques et des pratiques, est en train de changer, les journalistes ont l’impression de vivre quotidiennement le futur. L’enthousiasme de Dubief est peut-être plus largement partagé que ne le laissent supposer les sources ; mais l’historien n’a pas les moyens de le montrer. Lui restent, alors, des messages troublants où la peur de demain se mêle à la résignation. Bon gré, mal gré, il faudra bien accepter les lois du marché, explique Avenel [33]. Lui-même s’exprime comme si, paniqué par un mouvement qui lui échappe, il cherchait les moyens de l’arrêter. Ainsi en va-t-il lorsqu’il observe les progrès techniques. « L’information atteint les limites extrêmes de la rapidité et de la précision avec le téléphone et le télégraphe sans fil », écrit-il au tout début du xxe siècle [34]. Au-delà, c’est toute la question de la maîtrise des outils qui est posée ; question qui appelle des réponses peu optimistes. Que deviendra le journaliste au xxe siècle ? S’il ne disparaît pas, en tout cas ne sera-t-il plus le grand éducateur du peuple, le croisé de la vérité, la sentinelle de la liberté, fonctions essentielles qui correspondait à sa mission ? Au mieux deviendra-t-il un simple intermédiaire entre la masse des informations et le public, un modeste pourvoyeur de nouvelles. « La presse ne mène plus l’opinion : elle la suit », déplore Séverine, en 1903 [35].

23En réunissant le fruit d’une imagination éparse en marche, on pourrait se livrer à un jeu amusant, mais bien peu scientifique, consistant rétrospectivement à vérifier la justesse des prévisions, en relevant, ici ou là, les indications annonçant la naissance de la radio, de la télévision, de l’Internet, des téléphones mobiles en images, et autres innovations que nous promettent pour le xxie siècle les fabricants de matériel de communication. Plus sérieusement, tous les projets conçus pour l’information reposent sur des découvertes, abouties ou sur le point de l’être, de la fin du xixe siècle : télégraphe sans fil, photographie, téléphone, phonographe, cinématographe… Le xxe siècle sera donc le siècle de l’information sonore et visuelle. Et, comme toujours en pareille circonstance, on voit plus grand et plus vite : le progrès s’accompagne d’un changement considérable d’échelle.

24Au bout du compte, on retiendra surtout combien l’imagination est travaillée ou canalisée par les débats contemporains. La remarque vaut pour la fin du xixe comme pour la fin du xxe et le début du xxie siècle. De nos jours, se penchant sur les prochaines décennies, les journalistes, inquiets du puissant surgissement des nouvelles techniques de communication, s’interrogent sur leur place dans la société du futur et la mise en cause de leur rôle de médiateurs. Comme au crépuscule du xixe, l’enjeu technique ou technologique révèle une crise d’identité profonde et complexe qui brouille, pour ceux qui la vivent, la vision de l’avenir.


Date de mise en ligne : 01/12/2007

https://doi.org/10.3917/tdm.004.0201

Notes

  • [1]
    Il s’agit là d’une des rares œuvres de Jules Verne se plaçant explicitement dans le futur, avec, notamment, L’Eternel Adam et Paris au xxe siècle.
  • [2]
    Raoul Deberdt, « La Caricature et l’humour français au xixe siècle », Revue encyclopédique Larousse, 228, 1er janvier 1898, p. 36.
  • [3]
    Robida publie également d’autres livres d’anticipation illustrés comme Le xxe siècle. La Vie électrique, en 1890 (sur les avantages et les inconvénients des progrès scientifiques dans ce domaine), Voyage de fiançailles au xxe siècle, en 1892, L’Horloge des siècles (voyage dans le temps), en 1902. En 1908, il illustre également le récit du journaliste Pierre Giffard, l’un des pères du reportage français, La guerre infernale. Notons que Robida n’est pas le seul à composer des œuvres d’anticipation en images, comme en témoigne le numéro spécial de L’Assiette au beurre, du 19 décembre 1901, sur « La conquête de l’espace », signé par Albert Guillaume.
  • [4]
    Finalement, la nouvelle paraît en 1910 (cinq ans après la mort de Jules Verne) dans le recueil Hier et demain (publié par les soins de Michel Verne), sous le titre : « Au xxixe siècle. La journée d’un journaliste américain en 2889 ».
  • [5]
    Voir : Etienne Cluzel, « Les anticipations de Jules Verne et celles… d’Albert Robida », Bulletin du bibliophile, 1, 1961.
  • [6]
    Jules Verne, La journée d’un journaliste américain en 2890, Villelongue d’Aude, Atelier du Gué, 1978 (rééd.), p. 27.
  • [7]
    Ibid., p. 31.
  • [8]
    Eugène Dubief, Le journalisme, Paris, Hachette, 1892, p. 85-86.
  • [9]
    Ibid., p. 258.
  • [10]
    Henri Avenel, « Le mouvement perpétuel de la presse », introduction à l’Annuaire de la presse française et du monde politique, 1901, p. XI.
  • [11]
    Adolphe Brisson, « L’envers du journal », Annales politiques et littéraires, 24 mars 1895.
  • [12]
    Henri Avenel, Annuaire de la presse, 1904-1905, p. I.
  • [13]
    Henri Avenel, « Le mouvement perpétuel de la presse », art. cit.
  • [14]
    Séverine, « Les deux presses », Gil Blas, 31 octobre 1903.
  • [15]
    Pour plus de détails, voir : Christian Delporte, Les journalistes en France, 1880-1950. Naissance et construction d’une profession, Paris, Seuil, 1999.
  • [16]
    Octave Mirbeau, « Le journalisme français », La France, 14 mai 1885.
  • [17]
    Edouard Lockroy, préface à L’Annuaire de la presse, 1889.
  • [18]
    Henry Bérenger, Revue bleue, 4 décembre 1897.
  • [19]
    Eugène Dubief, op. cit., p. 296.
  • [20]
    Paul Pottier, « Professions et métiers : les journalistes », Action populaire, 145, 1907.
  • [21]
    Traduction concrète de la « doctrine Monroe ».
  • [22]
    Louis Vauxcelles, Paul Pottier, « Le New York Herald », Gil Blas, 21 janvier 1904.
  • [23]
    Il avait acquis la célébrité, notamment en couvrant la guerre de Sécession, grâce à une soixante de correspondants de guerre.
  • [24]
    Louis Vauxcelles, Paul Pottier, art. cit.
  • [25]
    Ibid.
  • [26]
    Jules Verne, op. cit., p. 34.
  • [27]
    Voir, par exemple : Paul Brulat, Le Reporter. Roman contemporain, Paris, Perrin, 1898.
  • [28]
    Voir, à ce propos, le témoignage de Georges Pioch, « M. Bunau-Varilla ou le Juste Payeur », Le Journal du peuple, 26 février 1918.
  • [29]
    Emile Zola, Annales politiques et littéraires, 22 juillet 1894.
  • [30]
    Allusion directe à l’actualité américaine : la chaise électrique est utilisée pour la première fois aux États-Unis, le 6 août 1890.
  • [31]
    Verne évoque un nouveau procédé publicitaire, la « publicité aérienne », qui consiste à réfléchir d’immenses affiches sur des nuages, à l’aide de 1 000 projecteurs installés sur le toit du journal.
  • [32]
    Rappelons ce qu’écrivait Hearst, dans l’éditorial du Morning Journal, le 25 septembre 1898 : « La force de la presse est la plus grande force du monde. Dans un régime républicain, les journaux forment et expriment l’opinion publique. Ils déclarent la guerre. Ils punissent les criminels, surtout les puissants. Ils récompensent, en leur donnant une juste publicité, les bonnes actions des citoyens, partout ». Pour sa part, Maurice Bunau-Varilla, le patron du Matin, affirmait : « Mon fauteuil vaut trois trônes ».
  • [33]
    Henri Avenel, « Le mouvement perpétuel de la presse », art. cit.
  • [34]
    Henri Avenel, Annuaire de la presse, 1904-1905, art. cit.
  • [35]
    Séverine, art. cit.

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