1 L’importance accordée aux mots dans notre univers déterminé par le langage fait nécessairement de nous des sujets déterminés par la parole. Si, pour John L. Austin (1962), dire c’est faire, pour Michel Foucault (1966), les mots ne désignent pas les choses mais nos actes. Ceux que nous utilisons – ou même ceux que nous entendons – orientent ou modifient profondément le sens de nos actions et définissent ainsi notre place dans le monde.
2 Dans la clinique, les mots ont cette fonction libératrice, ils accompagnent la relation thérapeutique. La manière dont ils sont utilisés, choisis, entendus ou malentendus influera sur la qualité des liens et du sens donné aux expériences vécues, aux pensées, aux émotions. D’autres ne pourront jamais être prononcés et trouveront d’autres voies d’expression. Ainsi, dans la mesure où les psychologues accordent aux mots une valeur privilégiée, ils sont soumis plus que quiconque à l’exigence de leurs choix.
3 Parler de l’importance des mots est d’autant plus fondamental aujourd’hui que la technicité tend à remplacer la parole. Les mots peuvent devenir éphémères, facilement remplacés par d’autres, estompant la dimension subjective et la conflictualité propre à la vie psychique.
4 Ainsi, à l’épreuve des mots dans la clinique, soignants, soignés, écoutants, écoutés, sont tous embarqués dans la même aventure.
5 Ce dossier reprend quelques-unes de ces « aventures cliniques » où l’on perçoit le pouvoir des mots dans leur faculté de reprise des processus de pensée et d’élaboration, cela dans des contextes variés et parfois même particuliers, comme auprès d’enfants atteints de surdité ou de patients ayant commis un acte criminel.