MICHEL NEYRAUT, Alter ego, Editions de l’Olivier, 2009, 203 pages, 13 €
1Michel Neyraut, membre titulaire de la Société Psychanalytique de Paris, publie Alter ego, brillant essai sur l’identification, ou plutôt sur le principe de l’identification. Cet ouvrage poursuit les réflexions fondamentales de l’auteur, d’abord sur Le transfert (1974), puis sur Les logiques de l’inconscient (1978) et sur Les raisons de l’irrationnel (1997). Dix chapitres déclinent les enjeux et problèmes de l’identification, depuis les citations commentées qui constituent le premier, jusqu’à la notion d’identème dégagée à la fin du livre. Michel Neyraut déploie avec force et élégance des références à la culture intrinsèques à l’exploration du concept d’identification, articulant avec humour figures et concepts en un tissu sans coutures.
2L’usage d’une citation fait partie du problème de l’identification… Michel Neyraut en retient cinq. Le Candide de Voltaire s’identifie à lui-même, baron de Thunder-ten-tronckh, à une autre, Cunégonde, à un modèle, Pangloss, à la partie pour le tout, car sa province vaut pour l’univers. Telle est la voie du bonheur, alors même que tout va vers le pire… Les autres références convoquent Maine de Biran et la communauté organique entre le fœtus et sa mère, Freud qui parle à Yvette Guilbert de Chaplin qui se représente tel qu’il était dans sa jeunesse : l’enfance est source unique de tous les rôles. Ricardo Reis, hétéronyme de Pessoa, souligne que « des moi, il en est plus que moi-même », ce qui n’empêche pas d’exister et de parler en les faisant taire. Enfin, Proust est transfiguré par l’écriture qui le compose, et par laquelle il discerne les réalités avec lesquelles il lui semblait se confondre. Ces références amènent à penser d’abord la genèse de l’identification plutôt que sa révélation. L’identification trouve sa nécessité dans les différences. Les « conquérants de l’identique » qui balbutient aujourd’hui entre conformisme et clonage, ne promettent que des moutons. En revanche, le cinéma nous montre la vie sur une autre scène ; « cette similitude entre deux mondes est au cœur de l’identification ». Zelig, le personnage du film de Woody Allen, est l’homme caméléon, modèle de l’identification absolue devenant de ce fait invisible. Etre semblable à toutes les apparences permettrait d’être adopté, mais même les apparences sont inconciliables, limite induite par l’identification elle-même.
3L’erreur serait de croire que le mouvement identificatoire va nécessairement vers du vrai et du bien. L’identification n’est qu’un mécanisme. Elle se conforme sans réflexion ni distance, comme un reflet ou un écho, à la différence de l’imitation, qui suppose une volonté délibérée. Le caméléon est le prototype d’une adaptation animale de survie. Zelig montre un avatar de l’identification que Winnicott théorise en 1960 comme « faux self », déformation de la personnalité qui s’adapte aux exigences d’un milieu en développant un faux soi-même destiné à protéger le vrai. Mais c’est réintroduire un jugement de valeur. Or, dans la coexistence de la révolte et de la soumission, les normes d’une société interviennent des deux côtés, y compris dans la double adaptation de l’émigration. L’adoption des normes d’une communauté peut aussi servir de vérité suffisante, brouillant à nouveau la distinction entre vrai et faux. La meilleure figure du vrai self de Chaplin est Esmeralda, « la gamine » …
4L’identification est l’assimilation par un sujet de traits appartenant à une autre personne ; elle se saisit sous les figures de l’apparence, en manifestant des oppositions constitutives entre le familier et l’étrange, l’individuel et le collectif. Quand il l’aborde directement, en 1921, Freud distingue les processus narcissiques et les phénomènes sociaux, dégageant la psychanalyse d’une emprise possible de la psychologie collective. L’identification, possible avant tout choix d’objet, est la première manifestation d’un attachement affectif à une autre personne. Elle doit passer par le carrefour œdipien. La synthèse freudienne de 1921 dégage trois formes d’identification : la forme la plus originaire du lien affectif à l’objet ; le substitut d’un lien objectal libidinal ; l’identification partielle à une caractéristique d’une personne qui n’est pas l’objet des pulsions sexuelles. La mélancolie, la prise en compte de l’oralité et l’importance du langage amèneront à aller plus loin encore. Comme le transfert, l’identification est une substitution, un qui pro quo, résultat d’un déplacement accompli : quelqu’un pour quelqu’un d’autre.
5Redistribuant les cartes de l’identification en présence d’une figure symboliquement polyvalente, la situation analytique reprend le déploiement des identifications et leur confère la possibilité d’une substitution ; l’interprétation du transfert reconnaît cette nouvelle assignation. Immobiliser la fonction symbolisante de l’analyste dans une figure prédéfinie par l’identification est une résistance redoutable. Champ de l’identification et champ du transfert se définissent donc réciproquement, à la condition de n’être jamais confondus.
6Mais alors, qui est qui, et où sont les frontières ? Il faut tenir ensemble la prétention de l’identification à l’unité et le défilé des identifications, qui devient l’histoire du sujet lui-même et de ses apparences. La question fondatrice « Que vuoi ? » - Que veux-tu ? - relance un procès sans fin. La façon dont Lacan définit le sujet le fait s’évanouir, aussi désincarné que le Paraclet… Michel Neyraut étudie les destins de l’agressivité dans l’identification chez Freud et chez Lacan, puis revient aux jeux complexes entre l’apparence et l’appartenance sexuelle, et propose quelques réflexions sur l’homosexualité, la bisexualité psychique et l’incomplétude. L’identification transcende l’identité sexuée avant même sa constatation et en même temps elle ne peut pas l’ignorer.
7L’identification a inventé le théâtre, métaphore de l’œil. Une gravure de Claude-Nicolas Ledoux présente le théâtre de l’œil comme l’œil d’un théâtre, tandis que Magritte nous montre un œil étrange qui contemple le vide par un hublot. Mise en scène de l’imaginaire, le théâtre suppose une distinction entre la scène et la salle, agencement qui implique d’imaginer l’intériorité d’un interlocuteur susceptible d’une réponse. L’opéra de Pascal Dusapin A Quia, rappelle que le vis-à-vis fondamental est peut-être surtout d’essence musicale. La réplique, comme réponse, est consubstantielle à la possibilité même d’un sens. Le paradoxe sur le comédien de Diderot (1773) a pour enjeu la médiation des signes, et l’article de Freud « Personnages psychopathiques sur la scène » (1905) porte sur l’économie des affects lors de la représentation. Le spectateur donne libre cours à des motions réprimées, dans la mesure où c’est un autre qui souffre et risque sa vie. Le théâtre met en scène un conflit des identifications, devant des spectateurs sensibles à ce conflit sans le reconnaître comme leur, sans que s’organise une résistance. Dans Hamlet, Freud a dû deviner la nature du conflit.
8Le premier des théâtres est le visage maternel, scène sur laquelle l’enfant épelle les moindres messages, mais théâtre qui, lui-même, déchiffre les moindres signes, sourires ou cris. Winnicott souligne le caractère primordial du visage de la mère. Le visage humain, dont Freud a bien vu qu’il est parfois support d’une inquiétante étrangeté, joue un rôle primordial dans l’identification. Michel Neyraut, dans une sorte de galerie de portraits, commente ainsi la perplexité entre le vivant et l’inanimé soulignée par Freud à propos de la poupée Olympia, le double étudié par Rank (à propos du Portrait de Dorian Gray d’Oscar Wilde), la notion de « mauvais œil », les avatars de soi que l’on crée sur internet, pour en venir à l’altérité irréductible et vulnérable du visage dans la philosophie de Lévinas.
9Dans son commentaire du roman de Julien Green Si j’étais vous, relu à la manière d’une anamnèse, Mélanie Klein éclaire les ressorts et le destin des identifications. Ces tentatives d’entrer dans l’existence d’un autre et de le contrôler expriment les relations avides et jalouses de l’enfance, au moyen d’un clivage qui projette une part de soi dans l’autre personne. L’entrée en force dans un autre s’accompagne de la peur de s’y perdre, la partie perdue est perçue comme idéale, toute la question est de pouvoir se la réapproprier… L’identification est proche du cannibalisme ; plusieurs férocités y sont en concurrence. Il est une identification diachronique corrélative de la construction de la personnalité, et une identification synchronique, disponibilité à s’identifier à l’éventail des rôles et des modèles rencontrés, qui survient après que les distinctions fondamentales et inconscientes du moi se soient constituées. L’introjection permet alors d’acquérir, le surmoi peut s’édifier, et la perte de l’objet devient génératrice d’une identification spécifique.
10L’identification synchronique permet les confrontations à l’idéal que Neyraut aborde « par la face Nord ». Chacun désire voir les choses de haut, du haut d’un cheval ou au dessus de la foule. L’idéal, c’est aussi la Bohême en sautoir, figurée dans une gravure sur bois du monastère de Strahov à Prague, où l’Europe est représentée, à l’apogée des Habsbourg, sous les traits d’une jeune femme. Dans les névroses de guerre, l’idéal du temps de guerre entre en conflit avec l’idéal habituel. Parmi les modèles de l’idéal de guerre, M. Neyraut évoque Kalachnikov, identifié à l’arme qu’il a inventée et Daniel Porret, thuriféraire des exploits des As de 1914-1918, en une démarche d’hommage et de fétichisation, culte des idoles donnant sens à sa vie. Autre idéal préfiguré, celui de Don Quichotte et de ses « homologues », commenté avec malice et nuances, jouissance et subtilité.
11Aujourd’hui, tout s’exhibe dehors ou sur les écrans. Reste la question de l’intimité, dont celle du rêve. Si tout personnage du rêve peut figurer le rêveur lui-même, le statut des identifications s’éclaire – et prolifère. Mais le prénom a valeur d’une intimité et d’une unification, ce qui renvoie au trait unaire lacanien : un élément figure la personne, et sert de support à l’identification du sujet. Dans le rêve de la belle bouchère commenté par Freud, au-delà de l’identification hystérique se profile un principe d’identification qui figure toute la dynamique des échanges lors d’un conflit. Le conflit permet de mettre en évidence le rôle de l’identification dans l’affrontement de forces pulsionnelles contraires. L’identification adhésive y trouve aussi sa place : prévenir les conflits avant même qu’ils n’aient lieu.
12De l’idole à l’ersatz, en passant par la contrefaçon, se succèdent tous les faux-semblants, car il ne suffit pas d’empiler les identifications pour construire une digue. Seule la sublimation strictement définie échappe à cette contrainte : elle est un procédé par lequel on purge un corps de ses parties hétérogènes. Chacun voudrait se fondre en une seule effigie. On en vient ainsi aux éléments de la constitution d’un identème, plus petite unité significative d’une identification, objet imaginaire d’une transaction inconsciente. Les parties composantes peuvent valoir pour le tout, se redistribuer lors d’un deuil ou d’une mélancolie, figurer autre chose que ce qu’elles sont, comme les lunettes qui figurent le père, le plat à barbe de Don Quichotte ou le spectre du remords pour Hamlet. Il faut nommer l’identème, unité d’abord imaginaire, pour lui donner corps. Le spectre qui apparaît dans Hamlet doit être identifié comme le roi défunt, et les lunettes font le signe d’identité de Zelig, identifié à l’identification, identème des identèmes. L’acquisition d’un accessoire, d’un signe de ralliement, d’un geste significatif suffit à signer une identification. Transaction entre le sujet et son modèle, l’identème permet une substitution, qui s’inscrit au registre de l’être alors qu’il semble s’être opéré sur le mode de l’avoir. Trace sensible d’un processus inconscient, l’identème va de la relique, défroque au statut purement métonymique, jusqu’à l’identème absolu, tel l’urinoir renversé de Marcel Duchamp, en passant par le totémisme, l’idole et la contrefaçon, et surtout par le travail du rêve.
13On mesure par ces quelques évocations l’ampleur du parcours identificatoire que nous propose Michel Neyraut au fil d’un ouvrage alerte et rigoureux, profond et malicieux, dont l’humour et le style permettent de porter sans fatigue la charge de pensée. Les enchaînements subtils témoignent d’une pensée singulière nourrie de multiples identifications critiques tant aux œuvres psychanalytiques qu’à des arts et à des artistes qui imprègnent par nombre d’identèmes la pensée théorique de l’auteur, dont l’ouvrage est la plus belle illustration du principe d’identification auquel il a voulu nous initier.
Dominique Bourdin
Psychanalyste, S.P.P.
MAREIKE WOLF-FÉDIDA, Psychopathologie fondamentale suivie de Abécédaire de Pierre Fédida, Editions MJW. Fédition, 2008, 134 pages, 14 €
14L’ouvrage de Mareike Wolf-Fédida Psychopathologie fondamentale constitue à double titre une initiative heuristique pour les Sciences Humaines Cliniques. D’abord, il comble une lacune épistémologique sur la définition de la psychopathologie fondamentale, sa circonscription disciplinaire, ses méthodes, son champ de recherche et ses vecteurs d’application. Deuxièmement, il restitue à l’histoire clinique de la création du premier Laboratoire de Psychopathologie Fondamentale à l’Université Paris VII, ses influences didactiques et ses aléas face aux mutations socio-politiques auxquelles émarge la recherche.
Sciences Humaines Cliniques : humaines, scientifiques et cliniques
15Au delà de l’hommage rendu, l’ouvrage souligne combien la pensée humaniste a toujours accompagné les travaux de Pierre Fédida. L’abécédaire qui poursuit la première partie consacrée à l’émergence et aux mutations de la psychopathologie fondamentale prouve combien l’œuvre de P. Fédida est riche, féconde et rigoureuse. Le fac-similé de la correspondance de Pierre avec le docteur L. Binswanger (page 44) ajoute à l’heuristique de l’ouvrage, sa pertinence et paradoxalement à sa nostalgie en regard des idéologies actuelles de la pathocognition et l’analyse purement quantitative de la sémiologie. En rappelant les fondamentaux de la psychopathologie, ses racines épistémiques comme ses influences didactiques et cliniques, Mareike Wolf-Fédida offre à la communauté scientifique de recherche en Sciences Humaines Cliniques un moment d’humilité et de didactique.
16L’ouvrage présente aussi cet avantage d’être dans l’actualité de la recherche en France. Rappeler les fondamentaux de la psychopathologie, en saisir les composantes d’influences épistémiques (la métapsychologie, les neurosciences, l’anthropologie, la biologie ou la phénoménologie), en préciser les réflexions et les impasses, permet d’engager la psychopathologie fondamentale (et clinique) dans l’héritage médical et philosophique de ces fondateurs et précurseurs. De ces racines scientifiques et éthiques, l’œuvre de P. Fédida émarge à la modernité de ses objets de recherche comme la dépressivité (chapitre 8), la psychosomatique (chapitre 6), l’anthropologie ou la biologie (chapitre 4), etc. A l’heure où l’éthique se réduit à l’administration de la preuve quantitative ou à la sémiologie de type DSM, où la dynamique psychique se réduit à la localisation cérébrale, P. Fédida s’attache à définir le champ de la psychopathologie fondamentale en regard des réflexions propres à D. Widlöcher ou E. Zarifian avec lesquels il a su maintenir un dialogue rigoureux et pertinent.
Clinique et idéologie
17Pierre Fédida était en avance sur son temps tant dans ses considérations cliniques, méthodologiques, épistémologiques qu’éthiques. Il soulignait combien la dynamique psychique ne pouvait se subsumer à la sémiologie, au traitement chimiothérapique de la maladie mentale ou, comme il le fit en 2001, de « privilégier les hypothèses et les modèles sur les doctrines ». L’influence de la psychanalyse sur la circonscription de la psychopathologie fondamentale se démarque des idéologies voulant présenter à tort le Laboratoire de Psychopathologie Fondamentale de Paris VII comme un lieu culturel de l’orthodoxie freudienne. Dans son chapitre 5, Mareike Wolf-Fédida montre la richesse de la recherche que P. Fédida a initié, promu et développé avec l’ensemble des chercheurs de l’UFR des Sciences Humaines Cliniques. La référence métapsychologique est au centre de la démarche clinique de P. Fédida. Tant dans le chapitre 6 consacré à la lecture du symptôme que le chapitre 7 sur la guérison, M. Wolf-Fédida souligne combien P. Fédida, dans ses références à la psychiatrie (C. Lanteri Laura), à la psychanalyse lacanienne, restitue au symptôme son travail de formation symptomatique au travers des figures de liaisons et de déliaisons psychiques propres au travail économique, dynamique et topique de l’appareil psychique et à l’inconscient. P. Fédida rappelait d’ailleurs que le terme d’inconscient est antérieur à « L’esquisse de psychologie scientifique » de 1895 mais date de 1751 (page 79) du juriste écossais H. Homes Kames. Cela accorde à P. Fédida l’érudition des maîtres surtout quand l’humilité du savoir prévaut en regard de la pure connaissance. La preuve de la disparition du symptôme ne peut légitimer une méthode au détriment d’une autre. Dans le développement de ces deux chapitres 7 et 8, l’auteur restitue à la pensée de P. Fédida cette analyse différentielle nécessaire à la place et la fonction de la guérison non réductible à la disparition symptomatique.
Le parangon de la dépression
18P. Fédida fait de la dépression l’affection paradigmatique en psychopathologie. La poly-symptomatologie dépressive émarge à autant de structures psychopathologiques (et nosographies psychiatriques). Sa contribution de recherche sur le diptyque dépression/dépressivité apparaît hautement heuristique. Mieux, P. Fédida augure dans son exemple clinique à A. Warburg (page 90) combien la levée des formes dépressives promeuvent les espaces de créativités et de médiations culturelles soulignées ailleurs par D. W. Winnicott. L’asthénie dépressive devient, en référence à Ehrenberg cette « fatigue d’être soi » quitte à promouvoir les formes esthétisées non plus de la dépression mais de la dépressivité source de créativité à l’image du tango défini telle «une nostalgie qui se danse ». L’auteur insiste sur l’apport de Pierre quant à l’heuristique dépressive à la fois sur le plan transnosographique que transdisciplinaire. Sûrement aujourd’hui, P. Fédida aurait promu l’interculturel comme nouvel éclairage des cultures (au sens de R. Kaës ou de J. Guyotat) et ses expressions non pathogènes de sens.
19En conclusion, plus qu’un nouvel ouvrage sur la psychopathologie, le livre de Mareike Wolf-Fédida constitue une réflexion sur l’avenir et le devenir des sciences humaines cliniques aux carrefours des rabattements behavioristes et des récupérations socio-politiques. Il en restitue à son histoire ancienne et récente ses étayages pour en promouvoir sa scientificité psychodynamique insécable de son éthique.
20Philippe Bessoles
21Docteur en Psychopathologie Clinique
22Maître de Conférences (HDR)
23Université Grenoble II et Paris 7
PHILIPPE PORRET, La Chine de la psychanalyse, Editions Campagne Première, 2009, 319 pages, 22 €
24La pertinence de ce livre commence avec son titre La Chine de la psychanalyse. Titre pris et à prendre à la lettre et à déployer dans tous les sens, à la fois axe de réflexion, de recherche, d’investigation et de questionnement autant que vision et formulation qui témoigne et inscrit une certaine conception de la dite psychanalyse, vivante, mobile, celle d’un savoir pas tout à fait comme les autres, jamais donnée de fait puisqu’elle engage autant celui par et avec lequel elle s’engage que celui qui s’y engage, et n’est opérante que dans un dispositif car « la psychanalyse est moins à saisir ici comme un état que comme un devenir » comme le souligne Philippe Porret dès son introduction précise et claire malgré la complexité de la question et de ses enjeux. Définir les éléments de la donne, les poser et envisager leurs mises en jeu. Faire jouer les interrelations, les interactions, les perspectives, les chocs et les ruptures car cela nous dit l’auteur « ne peut s’envisager que dans les rencontres » c’est-à-dire repérer ce qui est marqué, modelé par les hasards au moins autant que par les intentions et les projets conscients car « la question de la transmission se pose différemment dans ce dérangeant jeu de forces qui s’ignore et méconnait ses effets ». Effets de transmission à cerner - autant dans ce qui tente de se transmettre que par les moyens par lesquels ça se transmet - dans l’histoire et via le phénomène de la mondialisation, ce qui nous ramène au sous-titre/question proposé initialement par l’auteur Histoire ou mondialisation ? Formulation qui enregistre la profonde mutation dans laquelle nous sommes pris et engagés comme habitants et citoyens d’un monde, un monde dont nous n’avons plus la même perception, et dans lequel a fortiori nous voyageons différemment et que nous concevons différemment… voyageurs potentiels, réels ou imaginaires ou mêmes virtuels serions-nous tentés d’ajouter.
25« La psychanalyse s’est-elle déplacée en Chine ? » L’actualité de cette question est son acuité même car elle n’aurait pas pu se poser quarante ans plus tôt « en pleine révolution culturelle » la psychanalyse a-t-elle voyagé ? » comment ce qui caractérise la psychanalyse « la théorie, l’écoute, et la pratique de l’inconscient ont-elles supporté les nécessités d’un périple réorganisant les points de vue ? ». Multitude de questions liées à l’histoire, façonnées par l’histoire par ceux qui la font ceux qui la subissent et ceux qui l’orientent ou la transgressent que pose l’auteur. D’abord les voyageurs, joints réels et imaginaires de contrées fort éloignées et pas seulement géographiquement, aller en Chine, venir en France, trouver, lier les antinomies, les différences radicales entre des mondes différents- Occident et Orient - cultures, visions, traversées, réfléchies en miroirs d’où ce mot de passe-muraille, qui change de genre pour devenir du féminin « la passe-muraille » la psychanalyse ainsi nommée par l’auteur indique la nature des connections et de leurs franchissements souvent inattendus en tous cas pas vraiment linéaires contenant à la fois les symboles celui bien sûr de la Grande Muraille qui a résisté à travers le temps, le symbole des frontières des limites et de leurs traversées, défenses des imaginaires littéraires occidentaux et orientaux et en même temps universels car pouvant figurer des espaces intérieurs voire internes et psychiques.
26C’est au fond dans ce périple aventureux et prenant que Philippe Porret est lui-même engagé, dont il est à la fois témoin et acteur. Le livre précédent de l’auteur racontait le périple formateur d’une analyste -Joyce McDougall- qui fit du voyage le paradigme de la cure ; celui-ci s’attache à ce que devient la psychanalyse lorsqu’on la fait voyager et ce que cela enseigne. Cette Chine de la psychanalyse en est un autre visage, une autre étape, un autre moment. Car on y découvre une multitude de choses, on y entre à la fois par le menu et par les épisodes décisifs de l’histoire par le jeu d’une infinité de va-et-vient, d’obstructions et d’ouvertures, de jeux du hasard répertoriés très précisément. Les modes d’entrée personnels voire affectifs, culturels et savants et les connaissances réciproques délimitent différents prismes qui, combinés au truchement des langues, allemand, anglais, et surtout français et chinois contribuent à dessiner une cartographie, dont Philippe Porret nous donne à la fois l’instantané et le mouvement qui le produit.
27Ce périple s’articule en trois temps, trois livres exactement dont le premier Les branches du sophora chinois s’appuie sur un symbole ancestral l’arbre des pagodes celui « qui se rit du temps » nous dit Philippe Porret « dont les fleurs ont une éclosion très lente -jusqu’à vingt ans- et dont les boutons floraux servaient à teindre la soie en jaune couleur réservée à l’empereur. Le sophora mellifère sera exporté en France et sera pour les anglais l’arbre lettré.» Ce chapitre construit en arborescence reprend un commencement, un élément décisif et contemporain de l’histoire de cette Chine de la psychanalyse, c’est l’histoire de Hua Datong et de Lacan, qui est à la fois le fil conducteur et témoin de ce livre. Jeune chinois grandi avec la révolution culturelle à Chengdu et ayant échappé par miracle « au travail aux champs » Hua Datong…, l’étudiant chinois réalise à travers une réponse de Marx « l’inadéquation du marxisme à l’histoire chinoise » pour lui « les certitudes vacillent les assises du monde et le rapport au savoir sont touchés, c’est une rupture de croyance » nous dit Philippe Porret, l’étudiant s’intéresse à d’autres manières de voir, de sentir et de penser, bien évidemment nous ne pouvons que renvoyer les lecteurs à tous les épisodes de cette histoire personnelle complexe et exemplaire car chaque détail y a son importance et son intérêt, « le penseur formé aux rigueurs du marxisme se ressource au patrimoine de sa culture nationale » et « produit des travaux qui lui vaudront une invitation à travailler » un an en France auprès d’une sinologue des Hautes Etudes, Michel Cartier. Hua Datong découvre la Traumdeutung touché et séduit par l’analogie freudienne des symboles du rêve et du sens dans l’écriture chinoise, pour en arriver au fait qu’il y a en France « un psychanalyste qui a écrit que l’inconscient est structuré comme un langage ? » que Hua Datong ne pourra malheureusement plus rencontrer… C’est ainsi que dans les débuts de l’année 1987, il rencontre Michel Guibal analyste lacanien avec lequel il entreprendra une cure analytique. Rencontre analytique qui se scelle « sur le refus d’une langue mitoyenne possible l’anglais », et qui inaugure des découvertes prodigieuses donnant une place de taille à ce qui va échapper à la compréhension et à l’entendement, cure dont l’un et l’autre donneront des échos qui permettra au chinois en 1994, les retrouvailles avec Pékin et Chengdu. Hua Datong a « installé là une pratique de la psychanalyse dans un pays où la psychanalyse n’existait pas, puis un centre de recherches et de formation et enfin une institution qui pratique la psychanalyse et la psychanalyse seulement ». Ce que Philippe Porret montre avec beaucoup de précision. Car derrière ce qui nous paraît un commencement, il y a environ un siècle d’échanges très riches, de nombreuses ramifications, chassés-croisés, lectures, inscriptions et décrytages au cours de cette « transmission non missionnaire » de la psychanalyse.
28On avance dans ce livre au style très métaphorique à la faveur de pousses, de pollen, de floraison, de poèmes et de citations du chinois précieuses comme si l’auteur qui connaît bien la Chine et la langue chinoise, lui-même imprégné de culture et de sensations et de manières de penser et de s’exprimer chinois se mimétisait sur l’objet de son étude, troublé et influencé lui-même par la turbulence des langues et des signes. Ce livre qui fourmille d’informations, où tout ce qui est secondaire est nécessaire à l’intelligence du tout.
29Le 2ème livre s’intitule Mouvements de pensée, il draine et inventorie les multiples Chines et visions de la Chine, hommage au fond à la pensée et poésie chinoise avec notamment Lu Xun et à la sinologie dont l’auteur sans jamais perdre de vue l’histoire recense la richesse, la profusion et les questionnements. S’ouvre « un immense chantier » avec François Jullien, Jean-François Billeter, Rainier Lanselle, et beaucoup d’autres dont François Cheng qui réinterrogent entre autres, avec Lacan, le chinois et la fonction du signifiant et permet à Philippe Porret de revoir la formulation « écouter ce qui s’écrit dans ce qui s’entend » et que les formations d’inconscient, rêves et lapsus, « révèlent une structure d’écrit tout en se disant » structuration écrite et intérêt donné à la composition des hanzi, car nombre d’analystes français se sont interrogés sur le rapport de Lacan au chinois et l’« apport du chinois qui l’a aidé dans l’élaboration de sa théorie du signifiant » car selon Lacan « les caractères s’identifient au signifiant » parce que le mot phonème lui-même est une sorte de condensé, d’équivocité analyse que Philippe Porret reprend en en détaillant tous les rouages. Il en évalue toujours aussi leurs effets sans perdre de vue la Chine dans ses contextes politiques et sociologiques, « pays qui a connu l’enfer de la pensée unique » où l’introduction des nuances et de ses variations demande un certain recul.
30Le 3ème et dernier livre au titre prometteur Droits de passage trouve son amplitude par rapport aux deux premiers et fait résonner silence, parole, langue et langage et… traduction. Nous entrons dans une séance de supervision avec la présence d’une traductrice ajoutant voix, gestes, regards, questions à celles qui émergaient déjà. Nous sommes de fait dans le vif de la question et de sa perplexité ; « j’ai l’impression nous dit l’auteur de lire deux portées musicales différées, portées par une disharmonie ; l’énoncé me parvient via la traductrice, l’énonciation me touche par la voix de l’analyste dans ses multiples façons d’être affecté par ce qu’il dit.» Décalage, bouleversement du dispositif dont quelque chose de nouveau si l’on y reste exposé peut surgir. Puis enfin séance avec une mère et son enfant, et qui montre comment il est toujours et à chaque fois question d’une formidable aventure car La Chine de la psychanalyse est une invention en cours car « voyager et être psychanalyste… semblaient parfois une seule et même expérience : écouter l’indicible d’un pays, recevoir la violence de ce qu’il nie, découvrir dans l’inédit d’une situation une vérité soudaine ». Et si on doute comme Lacan de la transmissibilité de la psychanalyse qui est à réinventer par chaque analyste on peut difficilement mettre en doute le désir de la transmettre qui anime tous ceux qui ont contribué à faire exister la psychanalyse en Chine et principalement l’auteur de ce livre Philippe Porret.
Marine Esposito Vegliante
Psychanalyste, S.P.F.
SIMONE KORFF-SAUSSE, Eloge des pères, Editions Hachette, 2009, 156 pages, 13,50 €
31« Il n’y a plus de pères ! » Simone Korff-Sausse, qui s’inscrit en faux par rapport à cette affirmation idéologique dénuée de fondements scientifiques, cherche à comprendre ce que sont devenus ces pères d’un nouveau genre. En effet, le modèle ancien de la paternité n’étant plus adapté à notre société, il a fallu en trouver un nouveau. Or, elle constate que, de nos jours, la fonction paternelle semble disqualifiée, le père n’est jamais là où on l’attend comme s’il dérangeait. Ce qui évidemment pose question et ce à quoi elle réfléchit tout au long de cet ouvrage pour conclure que le devenir-père engage l’enfant dans l’homme. Or, autant on admet la projection de la part infantile chez la mère, autant chez le père, c’est plus difficile car l’infantile semble incompatible avec la conception traditionnelle de la virilité. « Le bébé résonne dans l’homme en écho à ses propres expériences infantiles, qui ont été oubliées en raison de l’amnésie infantile, et réprimées à cause de l’image traditionnelle de l’homme. »
32C’est pourquoi les pères d’aujourd’hui qui s’investissent auprès de leur enfant dérangent car ils manifestent et expriment des aspects féminins et infantiles. Au passage, elle s’interroge sur le non-désir d’enfant. « Donner la vie implique inévitablement l’idée de la mort. Mettre au monde un enfant, c’est rencontrer Œdipe, c’est-à-dire celui qui, selon l’oracle, tuera son père et épousera sa mère. Devenir père implique de pouvoir affronter ces enjeux en les tenant pour symboliques et non pas réels, sans quoi le choix est impossible » (…) « Ce que le futur père craint, à travers l’enfant, c’est la vengeance de son propre père. L’enfant sera vécu comme le persécuteur apportant les représailles paternelles… Tout enfant réveille les images paternelles menaçantes, castratrices, potentiellement infanticides, dévorantes. Pour devenir père, le garçon doit assumer la rivalité hostile avec son père et la dépasser. » En écho, les scientifiques qui constatent une diminution de la fertilité masculine (la production spermatique humaine a diminué de 40 %) s’interrogent. D’un côté, on observe un acharnement à vouloir procréer à tout prix des enfants : chez les couples stériles, homosexuels voire chez des adultes seuls, de l’autre il existerait un déclin du désir d’enfant.
33Avec la fin du pater familias, l’auteur constate donc un changement radical dans le domaine de la paternité. Les hommes contemporains inventent des modèles inédits, loin d’être négatifs qui gagnent à être pris en compte. Elle engage aussi bien les soignants que les mères à écouter ces nouveaux pères. Seul l’avenir permettra d’y voir plus clair.
34Danielle Torchin
psychiatre
Exposition
Valadon-Utrillo. De l’Impressionnisme à l’Ecole de Paris, Pinacothèque de Paris 6 mars - 15 septembre 2009
35Il est rare, voire unique, qu’un artiste homme soit le fils d’une artiste femme. L’exposition Valadon-Utrillo de la Pinacothèque de Paris déploie le parcours singulier et intriqué de ces deux peintres, mère et fils.
36Marie Clémentine Valade, née en 1865, issue d’un milieu fort modeste, fille de blanchisseuse et née de père inconnu, jolie et bien faite, fut tout d’abord le modèle, et parfois la maîtresse, de peintres connus et reconnus : Degas, Renoir, Puvis de Chavannes, Toulouse-Lautrec. C’est d’ailleurs ce dernier qui lui aurait suggéré de prendre le prénom de Suzanne, puisqu’elle intéressait tellement ces vieillards (artistes) dont le regard la dénudait pour mieux la magnifier sur la toile. C’est sans doute dans leurs ateliers qu’elle a appris à peindre. C’est une autodidacte, mais aussi une transgressive, puisqu’elle peint, chose rare à l’époque, et qu’elle quitte son milieu social. Femme transgressive, libre, au comportement viril, Suzanne Valadon est aussi une mère, celle de Maurice, qui naît en 1883, alors qu’elle a à peine 18 ans, et de père inconnu, comme elle.
37Sans doute délaissé dans ses jeunes années par une mère plus occupée de peinture et de conquêtes amoureuses que de soins maternels, Maurice, laissé à ceux de sa grand-mère, grandit et s’éduque dans les rues de Montmartre, seul. Ces rues, ce sont ses rues ; il les peindra toute sa vie, mais désolées, vides, avec leurs immeubles blafards barrés d’affiches aux couleurs parfois violentes, sans êtres humains, ou si peu, toujours lointains, toujours de dos. Il évoque peut-être aussi, dans ce vide urbain, l’absence paternelle et la carence maternelle. Et il tente sans doute d’atteindre sa mère en lui offrant sa peinture.
38Alcoolique depuis l’âge de 14 ans, sujet à des crises de delirium tremens régulièrement, Maurice Valadon, puis Utrillo, du nom d’un des amants de sa mère, hospitalisé par son premier beau-père, à peine sorti de l’adolescence, à Sainte-Anne, produira jusqu’à l’âge de trente ans environ, une série de toiles magnifiques et fortes. C’est sa « période blanche », due à l’usage de plâtre dans ses couleurs, donnant un relief très particulier à ses façades des maisonnettes de la Butte. L’artiste aux aplats blancs lumineux le jour se noircit chaque soir. Il accumule toiles claires et diagnostics psychiatriques, heures créatives et errements éthyliques. Sur la Butte Montmartre, on l’appelle Littrillo.
39Les destins croisés de la mère et du fils autour de l’amour (incestuel ?), de la haine et de la peinture vont se tisser. Suzanne se met à peindre - elle n’était que modèle et dessinatrice jusque-là - lorsqu’elle tombe éperdument amoureuse du meilleur ami de son fils qu’elle épousera par la suite. Elle a 44 ans, lui 23. Le choc traumatique produit par la mise en ménage de sa mère avec son meilleur ami est immense. La santé mentale d’Utrillo se dégrade encore. Plus tard, c’est une de ses amies qu’elle jettera dans les bras de son fils afin qu’elle devienne sa femme et puisse l’entourer des soins dont il a besoin, apaiser ses crises folles.
40Si le trait de Suzanne Valadon a de prime abord une facture classique, à la Degas - qui soutient ses premiers essais - petit à petit, sa peinture s’affirme, se confirme, avec force et couleur. Alors que le travail pictural de Suzanne s’épanouit, celui de Maurice s’étiole et se dilue dans l’alcool et les toiles répétitives échangées contre quelques bouteilles. Si Suzanne Valadon ne peignait pratiquement pas lors de la « période blanche » d’Utrillo, elle va produire des toiles vibrantes et colorées lors de la déchéance de Maurice. Les natures mortes de Suzanne Valadon sont joyeuses et vivantes, les rues montmartroises de Maurice Utrillo sont blanches et silencieuses.
41Le conservateur de l’exposition renoncera même à exposer les dernières toiles d’Utrillo, tant le décalage entre les œuvres de la mère et du fils est douloureux. Gaêtan Picon aura ces mots pour parler d’Utrillo : « Quand on est prisonnier de soi-même, justement parce qu’on ne peut pas s’ouvrir au monde, alors on vit dans la répétition. On n’a jamais fini de dire cette unique chose que toujours l’on dit, stoppé dans un traumatisme d’enfant … »
42Le choix pictural est magnifique, il permet de rendre compte aussi bien d’un passage artistique important d’un siècle à l’autre, de l’impressionnisme à l’Ecole de Paris, que des ravages de la relation mère-fils, quand la carence affective précoce conduit aux conduites auto-destructives, quand l’attachement au fils devenu homme, trop proche, dicte un choix amoureux incestuel chez la mère, que l’un se noie quand l’autre se révèle, que l’une meurt dans la déchéance, quand l’autre survit en se répétant médiocrement. Nous contemplons la dramatique esthétique du chassé-croisé d’une mère peintre, libre et fantasque et d’un fils en rage d’amour, d’alcool et de peinture. Leurs toiles, à tous deux, classiques ou novatrices, fortes ou mièvres, vivantes ou désertiques, lumineuses ou lugubres, se font le miroir de la violence de ces liens mère-fils.
43C’est la première fois que les deux artistes sont réunis à Paris. C’est un accrochage rare, riche et passionnant à bien des égards.
44Sylvie Séguret
45Psychologue,
Psychanalyste, Espace Analytique