Couverture de LF_151

Article de revue

Histoire d'É ou de la variation des usages graphiques à la différenciation réglée

Pages 7 à 24

Notes

  • [1]
    La graphie ai de l’imparfait (aimait) et du conditionnel (aimerait) a été approuvée par l’Académie française en 1835 à la place de oi (aimoit, aimeroit) (Catach 2001), qui correspondait depuis le moyen français au è ouvert, par opposition à son emploi dans les mots du type roi, prononcé [Rw?] et [Rwa].
  • [2]
    Ces deux traditions sous-tendent les usages graphiques réels (manuscrits et imprimés). L’« orthographe moderne » (ou « nouvelle », selon les auteurs) est distincte des propositions de réforme phonétiste qui se multiplient à partir du xvie siècle (voir Biedermann-Pasques, 1992) et qui visent exclusivement un fonctionnement phonographique idéal.
  • [3]
    Mais ce texte ne comporte pas les accents et signes auxiliaires dont parle G. Tory.
  • [4]
    EVVRES DE LOVÏSE LABE’ LIONNOIZE. A LION PAR IAN DE TOVRNES. M.D. LVI. (2e édition).
  • [5]
    Buffier (1709) confirme l’emploi de l’accent aigu : « L’e est fermé à la fin des participes passifs: donné, porté ».
  • [6]
    On observe une hésitation au xviie siècle, les mots de la première série pouvant parfois se terminer en ?és (assés, chés).
  • [7]
    Mais E. Dolet préférait le ?z pour marquer le pluriel (1542 : ilz, escriptz, faitz, cité par Catach 1968). Voir aussi la citation de Marot, infra 1.4.
  • [8]
    Dans son Dictionnaire françois (1680), Richelet préfère aussi les finales plurielles ?ez, mais il choisit ?és dans la série à finale en e ouvert progrés, aprés, trés.
  • [9]
    Dans son Dictionnaire critique (1787), Féraud atteste encore de l’hésitation des grammairiens : si ?r ne se prononce pas dans les infinitifs en ?er (aimer comme émé), « les opinions et la pratique sont fort partagées » pour ?r dans les infinitifs en ?ir (finir ou fini), « les uns la prononçant toujours, les aûtres ne la prononçant jamais » (article « R »).
  • [10]
    Selon Cl. Blanche-Benveniste (1991), l’accord du participe passé se fait à l’oral principalement « quand la zone postverbale est vide » (ex. : vous l’avez écrite).
  • [11]
    Ces traités seront cités ici selon les références et dans les abréviations suivantes :
    I. Le Tractatus orthographi(a)e gallican(a)e, qui a été transmis par deux manuscrits, sera cité par Tractatus orthographiae ou seulement par Tractatus pour la version de la fin du xiiie siècle (ms. du British Museum) éditée par Pope (1910) ; pour l’autre, du tout début du xve siècle (ms. d’Oxford) édité par Stengel (1879), il le sera par « Coyfurelly ».
    II. Pour celui qui est intitulé Orthographia Gallica, il est suivi de la lettre de référence de l’édition ; il est représenté dans au moins sept versions et deux éditions en sont actuellement disponibles : Stürzinger (1884) et Johnston (1987) ; ici, c’est l’édition Stürzinger qui a été citée, dont les quatre versions qu’elle donne sont désignées par une lettre : T (version courte de la fin du xiiie s., en latin), H (de ?1377 en français), C (de ?1385), O (d’après 1420).
    Sur les principaux de ces traités et sur leurs relations avec l’enseignement du français en Angleterre, voir en particulier les études critiques et la bibliographie de Kristol (1989 ; 1990).
  • [12]
    Pour la valeur originelle de z, voir § 2.1.3.
  • [13]
    Cette équivalence a été acquise plus précocement dans le nord, où [ts] s’est réduit à [s] plus tôt qu’ailleurs.
  • [14]
    Pour les équivalences entre ts et tz, condamnées par Coyfurelly, voir ci-dessous § 2.1.2.
  • [15]
    Du moins en alternance avec ts, tz.
  • [16]
    La même équivalence est déjà attestée dans une version précédente de l’Orthographia : T (fin xiiie) ; voir la fin du § précédent.
  • [17]
    Les références placées en tête (lettre et chiffre) renvoient à l’édition de Stürzinger (note 11).
  • [18]
    H et CO de l’Orthographia Gallica ; Traité de Coyfurelly.
  • [19]
    Toutes les citations et références qui suivent m’ont été communiquées par Jean-Charles Herbin ; qu’il en soit vivement remercié (N. A-R.).
  • [20]
    Il l’est, en fait, depuis le xiiie siècle.
  • [21]
    Voir §§. 2.1.3. et 2.2.
  • [22]
    Il s’en compte 10 occurrences dans la Séquence de Sainte Eulalie qui n’a que 29 vers.
  • [23]
    Le manuscrit qui a conservé les Serments de Strasbourg est, en effet, plus tardif que l’époque (mi-ixe s.) où les serments eux-mêmes ont été prêtés.
  • [24]
    Z y note majoritairement [ts] à la finale ou à l’intervocalique (fazet, Serments A7) voire [s] (lazsier Eulalie 24) ou [dz] à l’intervocalique (bellezour, domnizelle).
  • [25]
    Dans Jonas la notation de la désinence de P5 est assurée majoritairement par est, en concurrence avec ets, etst, st : faciest, comenciest, aiest, preirets, aiest, seietst ; celle du morphème nominal l’est par ts: doliants CSS.
  • [26]
    On a vu que les traités tardifs ne la distinguent pas ; en morphologie nominale on analysera ez en e-z.
  • [27]
    Avant un brouillage – s’il en est bien – qui semble étonnamment déjà attesté : asnez I a 17 (sauf si = « asnesse »).
  • [28]
    Cette valeur était déjà observable dans Eulalie, où, derrière c, z sélectionnait la prononciation [ts] : czo.
  • [29]
    Pour l’ensemble de cette tradition et sa reconstitution « unitaire », voir notamment La Vie de saint Alexis, Éd. crit. M. Perugi, Genève, Droz, 2000 (Textes littéraires français).
  • [30]
    Voir § précédent ; après l’exemple exceptionnel de la Passion, il apparait beaucoup moins de variations du morphogramme ?ez, qui reçoit ainsi dans ce texte une première forme de stabilisation.
  • [31]
    Cette possibilité de localisation géographique n’est pas toujours ouverte : cela ne l’était pas pour la Passion de Clermont ni les Serments de Strasbourg.
  • [32]
    Les exemples se lisent respectivement: tant de jours, loin, fait(s), grands cris, mère, venue et .
  • [33]
    Les manifestations ultérieures de cette variation, avant l’avènement d’une grammatisation de l’écrit, ne changent rien.

Introduction

1La morphologie verbale du français est souvent source de difficultés, en particulier quand elle ne s’appuie pas sur des correspondances phoniques. C’est notamment le cas des désinences verbales homophones correspondant indistinctement au phonème [e], ?é, ?er et ?ez ; ce problème concerne les verbes en ?er (type aimer), mais aussi les autres verbes si l’on tient compte de la neutralisation tardive de la distinction des timbres de E, en ajoutant à la série les désinences en ?ai- de l’imparfait de l’indicatif [1] (voir Brissaud & Sandon 1999). La différenciation graphique de ces homophones a été introduite progressivement dans l’histoire, suivant des principes différents, phonographique pour ?é, morphographique pour ?ez et ?er. Une vue historique de la question permet de présenter et d’expliquer des choix pas toujours cohérents, faits sur une durée relativement longue et conditionnés par les orientations du moment : attitudes socioculturelles, voire politiques, sur l’orthographe française, contraintes matérielles (manuscrits vs imprimés), etc. Cette approche historique peut servir à évaluer le poids des choix passés dans les difficultés actuelles de l’orthographe française. Dans un premier temps, on présentera la mise en place progressive, du xvie au xviiie siècle, de la norme orthographique actuelle. Dans un second temps, on reviendra sur un état plus ancien du français, pour constater la variation graphique de l’usage des manuscrits et expliquer les premières tentatives de régler cette variation.

1 – Vers l’É moderne (xvie-xviiie siècles)

2L’évolution des usages graphiques en France peut être expliquée, à partir du xvie siècle, par la confrontation entre deux traditions historiques, « l’orthographe ancienne » et « l’orthographe moderne ». La première, dominante du xive siècle au début du xvie siècle, « représente la tradition manuscrite des “praticiens”, hommes de la justice et de l’administration royale, qui utilisaient, dans leurs écritures publiques (manuscrites), une orthographe fort compliquée, truffée de consonnes muettes ayant un rôle idéographique, souvent copiées du latin » (Pellat 2001). Si ces praticiens ajoutent aux mots français des lettres étymologiques, pas toujours fondées (scavoir, poids), ce n’est pas seulement dans le but de modeler l’orthographe française sur le latin : ils ont aussi un souci de lisibilité (emploi de y calligraphique : roy, ayme) et de différenciation phonographique (consonne dans debuoir, feburier, aduenir) ou sémiographique (c dans scauoir) qui, loin d’être systématique, se traduit par des choix empiriques effectués souvent au coup par coup.

3La tradition moderne, défendue par les imprimeurs et auteurs de la Renaissance, qui se réfèrent à la tradition romane primitive, est plus simple au niveau des correspondances phonographiques (graphèmes-phonèmes) et rejette les lettres étymologiques et historiques inutiles. Le développement des trois accents permet de supprimer les lettres diacritiques (tête, côte, pâte ; détruire, étendre ; après, succès). Mais la dimension sémiographique reste prise en compte, notamment quand il s’agit de maintenir l’unité des familles de mots (le ?t final muet de chant est maintenu, pour marquer le lien avec sa famille morphosémantique : chanter, chanteur, etc., par opposition à la famille de champ). Cette tradition est notamment représentée, au xvie siècle, dans les éditions réformées des œuvres de Ronsard et, au xviie siècle, par le Dictionnaire francois de Richelet (1680) [2].

4Du xvie au xviiie siècle, les partisans de ces deux traditions s’affrontent, jusqu’à ce que l’Académie tranche en 1740 et opère les choix qui fondent notre orthographe actuelle.

1.1 – Développement de l’accentuation

5L’événement typographique et phonographique majeur du xvie siècle est le développement de l’accentuation, emblème de l’orthographe moderne. L’introduction des accents en français est déterminée par leur utilisation dans les impressions de textes latins, dès 1501 (édition du Virgile chez Alde Manuce : Catach 1968). G. Tory, « réformateur de l’orthographe et de la typographie » (Catach 1968), est l’un des premiers à souhaiter l’introduction des accents en français (Champfleury, 1529 : Catach 2001) [3]. La Briefue Doctrine pour deument escripre selon la propriete du langaige francoys (1533) distingue, avec l’accent aigu sur la finale, le e « masculin » (chanté) du e « féminin », non accentué (chante).

6Et elle introduit l’accent grave à valeur distinctive dans à, là, delà, où. Ses propositions sont appliquées par les imprimeurs lyonnais, en particulier Etienne Dolet dans les Œuures de Marot publiées en 1538 : on observe dans le texte l’accent aigu non seulement sur ?é final (taillé ; rime amusé / refusé), mais aussi sur ?és, ?ée, ?ées (aymée, nommée) et l’accent grave sur ?e sourd final (il chantè). L’imprimeur Robert Estienne, certes conservateur et partisan des lettres étymologiques, « est le premier à adopter en 1530 l’accent aigu sur les é fermés finals » (Catach 1968), suivant le modèle de l’accent tonique du latin (sans accentuer toujours les féminins : aimee) :

7

E. Quand il est en la fin, il se prononce aussi diuersement. Aucunesfois d’vn son long & esleué, comme Aimé, en ouurant la bouche pour le prononcer long, lequel souuent nous marquons d’vn accent agu des Latins, principalement quand il y peult avoir doubte, comme Aimé, Poureté, Grauité. Quelque fois il ne se prononce qu’à demi son, & en refermant la bouche, & la syllabe de deuant est longue, comme Sapiénce, Iustíce, Chámbre. Telle est sa prolation quand il y en a deux ensemble és participes foeminins, comme Aimee, Enseignee, Creée, Recreée.
(R. Estienne 1569)

8R. Estienne accepte qu’en conséquence le ?z final des pluriels nominaux et verbaux soit remplacé par ?s (vous deués, tachés), mais ses impressions peuvent conserver ce ?z (souligné) :

9

Les Participes preterits des verbes de la premiere coniugaison sont terminez en e long pour le masculin singulier, comme aimé : & pour le femenin on adiouste vn autre e brief : comme aimee. Le pluriel prent vne s à la fin, aimees.
(R. Estienne 1569 : 83)

10Et, comme E. Dolet, il mettra un certain temps l’accent grave sur ?e final sourd, puis il l’abandonnera.

11Grâce à ces imprimeurs, l’accent aigu sur ?é à la finale des mots français se généralise dès le milieu du xvie siècle, permettant en particulier de distinguer le participe passé des verbes en ?er et les formes en ?e sourd (chanté vs chante) : par exemple, dans l’édition de 1556 des Œuvres de Louise Labé [4], on relève la rime calamité / lamenté / molesté / chanté, par opposition à la 3e personne du présent en ?e (semble, presse, apelle). La distinction phonographique ?é / ?e est donc irréversible, y compris dans les formes en ?ée, ?és, ?ées (cf. Ronsard, Hymnes, A. Wechel, 1555 : tournée, estonnée, in N. Catach 1968), tandis que l’on hésite sur l’usage de l’accent grave, limité à cette époque à la distinction des homophones comportant une autre voyelle que ?e (là, où) ; malgré le recul de l’orthographe moderne et de l’accentuation à la fin du xvie siècle, l’usage de l’accent aigu à la finale n’est pas remis en cause.
Les progrès de l’orthographe moderne reprennent en France à partir des années 1650 et le développement des trois accents, en particulier sur e, est très différencié (Pellat 1995), l’accent aigu, bien établi à la finale, se répandant également en position initiale et interne (détruire, aisément). Avec la première édition de son Dictionnaire (1694), l’Académie française, malgré sa préférence pour l’orthographe ancienne, entérine l’emploi de l’accent aigu à la finale (?é, ?ée) pour marquer [e] [5] et, en 1740, elle développe considérablement l’usage des accents, en particulier sur e (Catach 2001). La généralisation de l’accentuation a deux effets liés : une nouvelle notation des timbres vocaliques est introduite sur le plan phonographique et les consonnes diacritiques, en particulier la lettre s, utilisées par l’orthographe ancienne pour donner des indications phonographiques, qui peuvent être équivoques (s indique e ouvert long dans teste et e fermé bref dans destruire), deviennent disponibles pour des fonctions sémiographiques.

1.2 – Les finales plurielles en [e]

12La redéfinition des rôles des consonnes finales ?s et ?z est en effet liée au développement de l’accentuation. Depuis longtemps, on hésite entre ?s et ?z à la finale des mots au singulier (filz / fils ; refuz / refus), en particulier après la lettre e : la consonne finale ?z, historiquement la première et prononcée en liaison jusqu’au milieu du xvie siècle, joue un rôle distinctif pour indiquer que le e qu’elle suit correspond à [E], par opposition aux pluriels terminés par ?s suivant un e sourd (le nez vs les hommes). Au départ, le ?z final oppose indifféremment le e précédent, ouvert ou fermé, au e sourd (aprez, dez, excez, procez, succez ; assez, chez, nez). Progressivement, l’introduction de l’accentuation va différencier les deux timbres de e : la finale ?z est conservée dans la série assez, chez, nez, rez (de chaussée), pour sa valeur graphique distinctive, comme dans le couple nez / nés alors que, dans la série à e ouvert, le ?z est remplacé par ?s, le e précédent recevant d’abord l’accent aigu [6] (aprés, dés, excés, procés, succés), puis, à partir de la fin du xviie siècle, l’accent grave (après, dès, excès, procès, succès).

13La même hésitation entre ?ez et ?és se rencontre longtemps dans les finales plurielles nominales et verbales. Le ?z final, qui avait perdu au xvie siècle son rôle de marque de pluriel [7] au profit de ?s (iours, troys ans, fleurs : Marot 1538 ; desirs, regars : Labé 1556) ou de ?x dans quelques séries (feux, mais on relève aussi feus chez L. Labé), est maintenu au pluriel après e comme marque diacritique de [e] dans les verbes à la 2e personne du pluriel (impératif sachez : Marot 1538 ; vous receuez : Labé 1556), les participes passés (destournez, obstinez : L. Labé 1556) et les noms en ?é (beaultez), par opposition au pluriel en e sourd (larmes, menasses, peines : Labé 1556) ou à la 2e personne du singulier des verbes en ?er, toujours terminée par ?s au présent de l’indicatif (tu cuydes : Marot 1538 ; tu montres, oses : Labé 1556). Ainsi, le ?z final joue un rôle phonogrammique (marque de e fermé) et morphogrammique (marque du pluriel), alors que le ?s n’a qu’un rôle morphogrammique. Au xvie siècle, l’usage ordinaire oppose donc les singuliers en ?é (chanté) aux pluriels en ?ez (chantez). Mais cette dernière notation est occasionnellement concurrencée par la graphie moderne ?és (chantés, beautés), qui permet de généraliser ?s comme marque du pluriel, notamment chez E. Dolet (Catach 1968) et même chez R. Estienne à ses débuts, en 1530 (vous deués, vous me voyés, tachés : Catach 1968) ou encore chez Ronsard en 1555 (abordés : Catach 1968).

14L’usage ordinaire du xviie siècle oppose également les finales ?é du singulier et ?ez du pluriel (voir, par exemple, l’édition des Œuvres de Molière de 1666 : noms comme beautez, libertez ; participes passés comme traitez, reliez), mais on rencontre des finales verbales et nominales en ?és. Dans ses lettres autographes, Pierre Corneille écrit d’abord les pluriels nominaux et verbaux en ?es (importunites, tires) puis, à partir de 1658, il adopte la graphie ?ez (les trois unitez, les seuretez, reseruez), habituelle dans les imprimés. Dans l’édition de 1644 de son Théâtre, même si les finales ?ez dominent (formez, charmez ; Iugez, acceptez), on relève aussi des formes en ?és, nominales (préparés, sacrés) ou verbales (vous preniés, m’accordés). Dans leurs manuscrits autographes, Mme de Sévigné écrit changés, traittes (e avec ou sans accent), Louis XIV les ennemis les plus emportés et Boileau, le plus systématiquement moderne, obligés, ajoûtés ; certains auteurs, comme Antoine Arnauld dans ses lettres, évoluent de ?ez (declarez, elevez) à ?és (tesmoignés). On rencontre également la finale ?és dans une édition des Œuvres de Racine de 1687 (troublés, rassemblés ; vous pensés, parliés) et surtout, presque systématiquement, dans les premières publications de certains textes de Boileau, qui suivent ses habitudes manuscrites, en 1674 (Courés, allés, effacés ; assemblés, negligés, effraiés) et en 1701, principalement pour les participes passés (Ode sur la prise de Namur : agités / vantés). Ces emplois ponctuels de la finale ?és deviennent réguliers, mais se restreignent aux noms et aux participes passés pluriels, au début du xviiie siècle chez les imprimeurs modernes (Pellat 1995), comme G. Desprez, libraire de Port-Royal, qui distingue systématiquement, en 1702 (Pensées de M. Pascal), les finales nominales en ?és (dénaturés, nés, delivrés) des finales verbales en ?ez (vous pouvez).

15L’Académie française se contente en 1694 de la distinction ordinaire entre ?é singulier et ?ez pluriel, suivant en cela la proposition de Mézeray (Mézeray 1673) [8] :

16

Z. Tous les pluriels des noms en é, soit masculins, soit feminins, ont vn z [a la fin] comme prez, rapez, guez [dez], cruautez, beautez, etc. Comme aussy les masculins des part. pass. des verbes en er, comme enseignez, aymez, et les secondes personnes plur. de plusieurs temps et moeufs de tous les verbes (comme vous aymiez) (…).

17Mais Doujat, soucieux de distinguer les classes de mots, propose (Mézeray 1673) de « n’employer le z qu’aux noms et aux partipes (sic) plur. et se servir de l’S pour les verbes et pour les adverbes : mes bien-aymez, vous aimés ».

18Au début du xviiie siècle, Buffier témoigne de l’hésitation de l’usage, à propos des « ocasions où l’e doit se prononcer en é fermé » :

19

Les mots terminez en ez, comme les bontez, vous parlez, &c, que d’autres écrivent par bontés, parlés, &c.
(1709)

20L’Académie française va régler la question, en se mettant en conformité avec les usages imprimés. Après avoir maintenu les finales plurielles en ?ez en 1740, elle établit en 1762 la distinction actuelle, qui unifie les pluriels nominaux en ?s (sauf exceptions, en ?x notamment), par opposition aux pluriels verbaux de 2e personne en ?ez :

L’Académie prend donc une décision médiane, qui est bien dans sa tradition : elle substitue ?és à ?ez dans les notations de pluriels, mais conserve ?ez dans les marques verbales (vous chantez) et aussi dans quelques monosyllabes ou mots courants isolés comme chez, assez, nez, rez (de-chaussée).
(Catach 2001)
Ainsi, dans le cas des formes en ?é fermé, la lettre ?s acquiert une valeur nettement grammaticale (marque de pluriel des noms et des participes passés), alors que la lettre ?z, tout en marquant la 2e personne du pluriel des verbes, garde son rôle diacritique ancien de marque de e fermé.

1.3 – Finales des infinitifs en ?er

21Au xviie siècle, la tendance générale de l’usage est de prononcer le ?r des infinitifs (aimer, finir, avoir, comme battre, rire) ; néanmoins Vaugelas recommande de ne pas prononcer le ?r final dans les verbes en ?er (aller) et ?ir (courir), mais doit admettre que ce ?r se prononce dans certains cas :

22

Ie ne m’estonne pas qu’en certaines Prouinces de France, particulierement en Normandie on prononce par exemple l’infinitif aller, auec l’e ouuert, qu’on appelle, comme pour rimer richement auec l’air, tout de mesme que si l’on escriuoit allair ; car c’est le vice du païs, qui pour ce qui est de la prononciation manque en vne infinité de choses.

23Mais Vaugelas ajoute qu’il faut « prononcer ces infinitifs aller, prier, pleurer, & leurs semblables, comme s’ils n’auoient point d’r, à la fin, & que l’e, qui precede l’r, fust vn e, masculin, tout de mesme que l’on prononce le participe, allé, prié, pleuré, etc. » (1647, De la lettre r, finale des infinitifs).

24Ménage, pour sa part, nuance la remarque de Vaugelas, en précisant que ce R final « se prononce à la fin des vers ; & au milieu, devant une voyelle » (1675, Ch. CXI. De la prononciation des infinitifs en er, en ir, & en oir).

25Au xviie siècle, alors que le ?r final est prononcé dans les verbes en ?oir (avoir), les ?r des infinitifs en ?er et en ?ir restent donc muets, et c’est encore le cas au début du xviiie siècle :

26

À l’infinitif des verbes il [R finale] ne se prononce point, pas même d’ordinaire devant une voyele : on prononce chanter & rire, finir un conte : comme, chanté & rire, fini un conte.
(Buffier 1709, § 926, p. 392)
Mais, à la fin du xviiie siècle, le ?r des verbes en ?ir (courir, finir) se prononce, alors qu’il reste muet dans les verbes en ?er[9]. Ainsi est consacrée la divergence phonographique des infinitifs : le ?r restera muet dans les seuls verbes en ?er et sera prononcé dans les autres verbes ; par conséquent, alors que toutes les terminaisons de l’infinitif présent comportent un r à l’écrit, « l’oral distingue une désinence [e] (type chanter) et une désinence [R] (GMF : 251) » dans les autres verbes. La non-prononciation de ?r dans les verbes en ?er a deux conséquences : elle crée l’homophonie des finales verbales en [e] (chanté, chantez, chanter) et donne à ?r, comme à ?z, le double statut de morphogramme (marque d’infinitif) et de marque diacritique (indiquant le e fermé qui précède, comme dans les finales nominales en ?er du type poirier).

1.4 – L’accord du participe passé

27L’accord du participe passé employé avec l’auxiliaire avoir constitue un bon exemple des complications de l’orthographe française. Clément Marot a le premier formulé cette règle, dans une épigramme célèbre de 1538 :

28

Enfans, oyez vne Lecon :
Nostre Langue à ceste facon,
Que le terme, qui va deuant,
Voulentiers regist le suiuant. (…)
Il fault dire en termes parfaictz,
Dieu en ce Monde nous a faictz :
Fault dire en parolles parfaictes,
Dieu en ce monde, les a faictes. (…)

29Son épigramme a créé un double malentendu historique. En premier lieu, Marot se recommande de l’exemple de l’italien (Dio noi a fatti), qui ne suivait guère en réalité la contrainte de position qu’il défend (Pellat 2002). En second lieu, cette contrainte de l’antéposition de l’objet n’était guère suivie dans l’usage français du xvie siècle : F. Brunot (1966, Le xvie siècle) donne de nombreux exemples de participes passés non accordés avec l’objet antéposé et de participes accordés avec l’objet postposé. Dans les faits, l’accord du participe passé pouvait se faire avec l’objet direct quelle que soit sa position, mais rien n’était systématique à la Renaissance. Cet accord était motivé par la structure originelle des temps français périphrastiques : comme le participe était senti, à l’origine, comme attribut de l’objet direct (cf. j’ai les yeux fermés), il était logique qu’il s’accordât avec celui-ci, de même que le participe passé employé avec le verbe être s’accorde avec le sujet dont il est l’attribut (ses yeux sont fermés). Ensuite, malgré la grammaticalisation de la structure et la perte du lien attributif avec l’objet (cf. il a fermé les yeux), l’accord du participe passé s’est maintenu, quelle que soit sa position.

30La règle plaisante de Marot s’impose au xviie siècle : dans ses Remarques (1647, De l’usage des participes passifs dans les preterits), Vaugelas cite le poème de Clément Marot, qu’il consacre pour la postérité, et choisit donc la règle de position (« Les lettres que j’ay receües »), tout en critiquant l’italien de son époque, qui accorde le participe avec l’objet postposé (« ho riceutte le vostre lettere »). Ce choix d’une règle plus compliquée, qui demande une analyse grammaticale préalable, n’est pas totalement arbitraire. Pour établir la clarté de la langue classique, Vaugelas luttait contre les équivoques. Or, quand l’objet antéposé est un pronom personnel ou un pronom relatif, l’accord du participe passé indique explicitement sa relation avec cet objet saillant et, au-delà, avec son antécédent, et évite ainsi toute équivoque (ces lettres, je les ai reçues).

31Et, même si Vaugelas ne donne pas complètement la règle actuelle de l’accord du participe passé, en maintenant quelques cas de non-accord (Le commerce, parlant d’vne ville, l’a rendu puissante : il considère qu’une seule marque d’accord, sur puissante, suffit), ses recommandations sont généralement suivies par les imprimeurs. Certes, selon Fournier (1998), l’application de la règle n’est pas systématique, et l’on rencontre des « négligences » et des « exceptions », notamment dans les cas particuliers de cette règle. Mais, dans les manuscrits et les imprimés des auteurs classiques que nous avons étudiés, nous observons une tendance générale à accorder le participe passé avec l’objet antéposé, même dans des textes antérieurs aux Remarques de Vaugelas, qui est venu confirmer un usage déjà répandu et le renforcer. Ainsi, les imprimés de Corneille, qui accorde régulièrement le participe passé dans ses lettres autographes écrites de 1641 à 1678, appliquent la règle avant Vaugelas :

32

Rodrigue t’a gaignée. Cet obiet l’a trompée.
(Corneille, Le Cid, 1637)

33Cette règle est bien appliquée par les classiques, dans leurs manuscrits autographes comme dans leurs imprimés :

34

Des Stances que vous m’auez envoyées.
(Lettre de Racine)

35

Qualites que Dieu vous a donnees
(Lettre de Mme de Sévigné)

36

L’assurance que vous luy auiez donnée
(Provinciale XVII, 1657, éd. In-4°)

37

Vous nous avez obligées.
(Œuvres de Molière, Les Précieuses ridicules, 1666)

38

Le train nous a tant secoüez.
(id., Sganarelle)

39

L’espérance qu’elle semble avoir donnée
(Lettre d’Antoine Arnauld, 1686)

40

Les termes qu’ils ont le plus aimez
(La Bruyère, Caractères, 1re éd. 1688)

41

La joie que ma causée l’agreable nouvelle que j’ay receue
(Boileau, lettre autographe à Racine, 1693)

42Cette règle d’accord du participe passé avec l’objet antéposé n’est guère utile pour distinguer à l’oral les participes en ?ée, ?és, ?ées des autres formes verbales en [e], parce qu’elle s’y manifeste uniquement par la prononciation de la consonne finale des participes accordés au féminin (les lettres qu’il a écrites). Seule la liaison pourrait faire identifier un participe passé en [e] accordé au pluriel, mais quand ce participe est placé en fin de groupe syntaxique, ce qui est le cas le plus fréquent de l’accord, elle ne se fait pas [10].
Au terme de cette étude qui décrit la morphogenèse fonctionnelle de la zone de E, il peut être particulièrement édifiant de jeter un regard rétrospectif sur les périodes antérieures qui ont servi de base à la construction d’une norme mais au cours desquelles, finalement, la notion de variantes avait de facto un authentique statut. Comme on va le voir, dans l’histoire du français écrit, exemplifiée par la tradition manuscrite de La vie de saint Alexis, apparait très tôt une forme de systématisation de la variation, en une toute première manifestation d’une linguistique de l’écrit qui ne prendra de forme normative que quelques siècles plus tard.

2 – Les premiers traités d’orthographe ou la geste d’E au Moyen Âge [11]

43On examinera d’abord les essais de formulation des règles élaborés dans quelques traités d’orthographe anciens, puis on décrira la variation et les tendances sous-jacentes, sinon à l’organiser, du moins à l’orienter en fonction de choix largement empiriques.

2.1 – Sur fond d’équivalence, des tentatives de désambigüisation entre s et z [ou entre es et ez]

2.1.1 – s ou z ; des équivalences acquises historiquement

44Les premiers traités d’orthographe – confirmés et précisés par les seconds – font état d’une équivalence historiquement acquise pour la notation de la sifflante sourde [s] entre les lettres finales de forme s et z, cette acquisition d’équivalence [12] étant, en même temps que la preuve, la conséquence de l’évolution du groupe consonantique, toutefois d’origine diverse, [ts] en [s]. En effet, la prononciation de ce groupe telle qu’elle peut être mentionnée dans les traités, parfois divergents, s’était réduite à [s] dans les formes qu’on peut dire « communes » ; d’où – ce qui en est en même temps la preuve – une équivalence acquise [13] entre des graphies respectives et originellement distinctes :

  • z, ts, tz[14] pour [ts]
  • s, ss pour [s] :
    Item omnia nomina et participia terminancia in t in singulari amittent t in plurali et scribantur ac sonabuntur cum s vel z ut saint, faisaunt, alant, in singulari et in plurali sains, faisauns, alans et sic de similibus. T vero in medio semper habet plenam vocem et si fuerit feminini generis vocales immediate sequuntur, ut lez saintez virges du ciel, ad toutz et quantez foitz vouz plerra venir, vous serrez bien venuy, beaucop dez femmez en Loundrez sount merchauntz et sic de similibus.
    (Tractatus Par. stud. éd. Pope, § 15 a)

2.1.2 – Pratiques d’écritures anglo-saxonnes et françaises. Naissance de la faute

45L’équivalence apparait donc acquise entre s et z, quoique non systématiquement pratiquée [15] et, quand elle l’est, elle peut se trouver marquée d’étrangeté puis sanctionnée comme « faute » :

46

Item secundum gallicum t omittatur in istis diccionibus, liz, pounz, porpoinz, et sic cetera cum z vel s. Tamen Vasconici et Anglici scribunt cum t, ut amy sount noz litz faitz, sount noz porpointz prestez quod non est gallicum immo Vasconicum.
(Tractatus Par. stud. éd. Pope : § 15 b)

47La version ultérieure (fin du xive s.) de Coyfurelly fait état de la même différence entre les pratiques anglo-saxonnes et celles des Français, mais en sanctionnant les premières comme fautives :

48

Item omnia nomina et participia terminancia in t numero singulari, in plurali vero cum s vel z scribi debent in fine diccionis, t penitus amovenda, prout rectus sonus exigit, ut saint terminans in t in singulari, in plurali vero facit sainz, pourpoint facit in plurali pourpoins, pot pos…Unde errant qui scribunt huiusmodi dicciones cum tz vel cum ts in plurali secundum ortographiam gallicanam, quia hec est regula generalis inter Gallicos, quod, quoscienscumque ponatur in medio alicuius dictionis, plena voce est pronunciandum et non tacendum…ut les saintes vierges des ciel
(Coyfurelly)

49À la même époque comme à la précédente [16], la version H de l’Orthographia gallica pose – et pratique – comme libre l’équivalence entre ts (ou tz) et z pour les noms adjectifs et substantifs :

50

H 73 Auxint tiels parouls eisnez puissnez et plusours altres nons de dignite serront escriptz od z et n’averont point le soune [17].

2.1.3 – Derrière [e] et d’autres voyelles, alternances, emplois et valeurs de z ; distinctions morphologiques et évolution des idées grammaticales

51Est-ce la relation faite dans les noms entre une finale du singulier en t et sa correspondante en z (ou ts, tz) au pluriel qui a, avec l’appui du substrat anglais, autorisé l’interprétation du z de P5 comme à rapprocher du z obtenu dans les pluriels des noms à base en t ? Il est intéressant de noter le commentaire donné par l’Orthographia gallica et plus détaillé au fur et à mesure des versions :

52

Orthographia gallica T (fin xiiie)
6 Item nomina et verba pluralis numeri hanc vocalem e habencia in ultimis sillabis requirunt hanc litteram z verbi gracia amez, enseignez.
[T9 absent de CO]
9 Item diccio desinens in t in singulari numero requirit hanc litteram z in numero plurali verbi gracia : quand dicimus in singulari dyt ou fet, in plurali autem dicimus (hanc litteram z verbi gracia) dyt(e)z, fet(e)z.
CO 9 Item verba (singularis numeri) habencia in singulari numero in fine hanc litteram t requirunt in plurali hanc litteram z ut in singulari amet (he loveth), liset, in plurali amez (ye love), lisez (ye rede).

53Même si leur statut morphologique n’est pas en tant que tel abordé dans les Traités de grammaire, les finales et désinences verbales en ez sont le lieu de premières évolutions observables des idées grammaticales dont elles peuvent être l’objet :

  • les deux versions du Tractatus limitent leurs remarques aux désinences verbales de la 5e personne du présent (P5) où s et z alternent… « indifferenter…ad libitum scriptoris » :
    Z vero in fine diccionis quasi s sonabitur in effectu, ut querez, serchez, aimez et sic de similibus.
    (Tractatus, § 21)
    Item omnia verba cuiuscumque fuerint conjugacionis terminancia in s indifferenter possunt scribi cum s vel z ad libitum scriptoris, ut amez, veniez, ditez, lisez, pensez, ac omnia participia terminancia in e, cuiusque generis fuerint, debent scribi cum ee dupliciter in fine ad differenciam suorum verborum a quibus descendunt ut amee participiam ad differentiam huius verbi ame, enseignee ad differentiam huius verbi enseigne et sic de similibus.
    (Tractatus, § 23).
    in quibus quidem participiis ac nominibus supradictis…ee dupliciter in sono et scriptura plenario representantur et sic de aliis huiusmodi prout superius declaratum est.
    (Coyfurelly, p. 22)
  • en revanche, l’Orthographia Gallica, dès sa première version (T) contemporaine de Coyfurelly, associe verbes et noms dans ses remarques sur ez, lesquelles se font prescriptives et sélectives (ex. requirunt), apparaissant quasiment, en outre, comme des lois de position :
    • z est interprété comme un pluriel de t (voir § 2.1.2., H 73) ;
    • dès la fin du xive siècle il se dessine une distribution complémentaire :
      • entre s et z derrière e (voir ci-dessus § 2.1.3., CO 9), mais aussi derrière o (voir ci-après § 2.1.4.)
        CO 10 Item omnia verba adjectiva vel participalia terminancia per sonum s debent scribi cum z.
        CO 11 Item omnia nomina adjectiva indifferenter possunt scribi cum s vel com z ut ces cez (these) les lez (they).
      • entre e et ee, où les participes passés, qui sont des formes nominales, s’opposent aux formes verbales : enseignes vs enseignees (Coyfurelly, p. 22).
Il se dessine ainsi, confirmée dans les versions plus récentes des Traités [18], une définition plus précise des cas d’alternance entre es et ez [où possunt s’oppose à debent] :

54

ex. articles et démonstratifs (= verba nomina adjectiva) en s ou z s’opposent aux noms substantifs, lesquels debent scribi en s ainsi qu’aux verba adjectiva vel participalia en s lesquels debent scribi cum z.
(CO 10, 11)

55comme une distribution complémentaire entre s et z selon les catégories grammaticales.

2.1.4 – Les mêmes consignes et tendances valent aussi pour ailleurs que derrière [e]

56

  • noz possessif s’oppose à nos personnel
    H 76 mes nostre vestre noz voz, ut noz, voz letres.
    CO 17 Item nos vos que procedunt de noster nostra nostrum vel vester vestra vestrum possunt scribi indifferenter cum z vel cum s sine u post o.
  • dis le numéral s’oppose à ditz participe passé (Tractatus § 23, Coyfurelly, p. 20)
  • le t de et conjonction ne sonne pas :
    Item t in ista conjuncione et gallice prolata non sonabitur licet scribatur.
    (Tractatus § 15 c)
Une correspondance s’observe ainsi avec les pratiques, quasiment identiques, sauf pour etz (voir le paragraphe précédent).

2.2 – Tentatives comparables de désambigüisations (toutefois moins abouties) entre ez et er ; consignes et pratiques

2.2.1 – Les Traités envisagent aussi z et r, mais pour adopter une position évolutive quant à ez et er : dans le Tractatus de l’étudiant parisien, il est seulement fait état d’une équivalence entre er et ez à l’infinitif

57

R vero aliquando in fine diccionis retinebit sonum r et aliquando sonum z, ut vuilez vouz aler ou voilez vous alez et sic de similibus.
(Tractatus, § 13)

2.2.2 – Dans la pratique, er n’apparait guère remplacé par ez à l’infinitif ; en revanche, l’inverse se trouve : ez remplacé par er, mais seulement en morphologie nominale [19]

58

  • dans des participes passés en ?er, ?ers :
    Arsenal 3143, 1er tiers xive, Hervis de Mes (mss xiiie-xve s.) : boucler, sejorners ; Doon de la Roche (Londres, British Library, Harley, xve s.) : aquiter (pour aquitee), comparer (pour comparee) ;
  • dans des substantifs en ?er, ?ers :
    Arsenal 3143, 1er tiers xive, Hervis de Mes : piter (pour pitié) solez (pour solers) ;
  • dans des infinitifs en ?és, ainsi qu’en ?é (à partir de la fin du xiiie) :
    • infinitifs en ?és : (Henri de Mes, manuscrit T, Turin L-II-14, 1311) copiste I cantés ;
    • infinitifs en ?é : une cinquantaine dans Henri de Mes, manuscrit E (vers 1275) ; dans le manuscrit T : copiste I canté.

2.3 – Un enseignement à tirer de ces variations

59Au terme de ce tour d’horizon, que révèlent finalement les différents exemples de variation orthographique ? Il semblerait que ez reste marqué, mais non pas ?es du moins jusqu’en moyen français où ez est non seulement possible [20] mais fréquent pour noter [e] ; il apparait aussi que, auparavant, l’alternance se faisait davantage entre ez et e, en outre surtout dans le système nominal [21], soit là où elle trouve une justification catégorielle et où elle relève d’un ordre autre que purement graphique : z y resterait – au moins majoritairement – une marque de flexion nominale, l’alternance ez / e étant à mettre en parallèle avec celle de iz / i.

60En conclusion, on peut dire qu’à la 5e personne du présent des verbes, la désinence ez apparait en concurrence avec es, parfois seulement avec e ; de même en morphologie nominale, mais avec une tendance nette à la distribution selon les sous-catégories. Toutefois, cette mise en parallèle ne tient pas compte de l’analyse morphologique et l’on peut se demander si ez n’est pas le seul morphogramme, en tout cas le premier à être apparu dans l’histoire, qui est aussi le premier à avoir été discriminé dans les grammaires.

61L’avènement des accents à fonction phonogrammique aurait ainsi permis de mettre fin au flou du statut antérieur de z et de ez : en cantonnant ?ez à P5 et excluant z des morphogrammes au profit de s, ils auraient institué une distinction décisive entre d’une part les pluriels nominaux à vocalisme [e], de l’autre les formes verbales de P5 et de P2.

3 – En remontant dans l’histoire : deux modèles pour un avenir proche

3.1 – Premières graphies du français, des enseignements à en extraire ; z et ez dans la Passion de Clermont

62Dans les toutes premières transcriptions à être restées du français, l’emploi de la lettre z et de la séquence ez n’est pas aussi marginal que pourrait le faire supposer la diversité de leurs graphies concurrentes. Compte tenu de ce qui s’est révélé marquer d’une part l’histoire des graphies de [e], de l’autre celle des emplois de z et ez, on abordera les images données par ces témoins les plus anciens du français écrit à la lumière de celles qui les ont suivies et en partie remplacées dans l’histoire, avec une idée sous-jacente que mettent en valeur la juxtaposition et l’ordination volontairement faite à rebours de la chronologie : ce qui est décrit en tête de cet article (supra, partie 1) était déjà pratiqué voire fonctionnel dans les tout premiers textes et l’était beaucoup mieux que dans ceux de la fin du Moyen âge (tels qu’ils sont l’objet des premières « règles » et tels d’ailleurs qu’à peu de variation près ils apparaissent).

3.2 – De la fin du ixe siècle à la fin du xe siècle-début du xie siècle : l’émergence d’une notation devenue dominante pour tous et d’une fonction morphogrammique

63Dans les premiers écrits du français, la lettre z est bien attestée [22], mais pas encore avec toute la fonction qu’elle va vite acquérir en tendant à se substituer à ses concurrentes : dans la Séquence de sainte Eulalie (fin ixe), dans Jonas (mi-xe) et dans le manuscrit conservé des Serments de Strasbourg[23] elle n’a qu’une fonction de phonogramme sans « loi de position » encore bien définie [24] même si celle-ci s’ébauche dans les concurrences avec tc à l’intervocalique, cz, ci (clemencie) et c (ciel).

64La fonction morphogrammique apparait dès la Passion de Clermont (mi-xe) avec ez en morphologie verbale pour noter la désinence de P5 [25], z en morphologie nominale [26] ; elle s’y adjoint à celle, précédente, de phonogramme, z fonctionnant comme signe diacritique marqueur de timbre derrière e[27] et de groupe consonantique [28].

65Deux morphogrammes se partagent les catégories : z pour la flexion nominale, ez pour la flexion verbale.

66Il se révèle ainsi que dans l’histoire du français écrit, exemplifiée par la tradition manuscrite de La Vie de saint Alexis, apparaît très tôt une forme de systématisation de la variation, en une toute première manifestation d’une linguistique de l’écrit qui ne prendra de forme normative que quelques siècles plus tard.

3.3 – Les écritures de La Vie de saint Alexis et l’éclosion de la variation systématique

67Le premier grand ensemble scripturaire de la philologie française qu’est la tradition manuscrite de La Vie de saint Alexis [29] (à partir du xie s.) se révèle être à la variation ce que la Passion de Clermont[30] est à l’avènement (sinon l’institution) d’une forme de stabilisation non encore normée des codes graphiques.

68En effet, la « leçon » commune qui se dégage des manuscrits de La Vie de saint Alexis est l’avènement d’une variation vite devenue la caractéristique de l’écrit médiéval et qui commence à devenir systématique autant que localisable géographiquement [31].

69Dès ce qui est considéré comme le premier manuscrit de La Vie de saint Alexis, celui d’Hildesheim, z tend à se généraliser et comme phonogramme pour noter [ts] (ex. tanz jurz, luinz, faiz) et – il le devient par là même – comme morphogramme de P5, ainsi que, en morphologie nominale, comme variante morphogrammique positionnelle de s (granz criz, …) alors que z commute avec d pour noter [?] devant consonne : mezre // medre, la même lettre convenant pour [?] à l’intervocalique (venude) et à la finale (ned) [32].

70On observe ainsi que l’alternance es/ez en P5 est attestée dans un manuscrit du xiiie s., alors que z tend à rester en morphologie nominale et que, par ailleurs, les infinitifs tendent à se fixer sous er.

71Alexis apparait être, du côté de la « norme » de la variation, ce que la Passion est du côté de la stabilisation. Image extraordinairement précoce de ce qui s’observera par la suite et qui, peut-être à la faveur de découvertes techniques, manifeste le changement de mentalités marqué par le passage de l’esprit de la variation manuscrite à « l’esprit typographique ».

72La mise en regard de ce qui s’est succédé dans l’histoire avec, d’une part, l’avènement – dès le xie siècle [33] – d’une variation devenue systématique, de l’autre – à partir des premiers traités, mais étonnamment déjà représentée dans la Passion – l’institution progressive (et plus ou moins raisonnée) d’une standardisation normalisée, inscrit les deux innovations représentées respectivement par la Passion et par la tradition manuscrite de La Vie de saint Alexis non seulement dans leur histoire, mais dans les mentalités de l’écrit dont elles relèvent en imageant les deux formes de la standardisation graphique, soit la normalisation à l’épreuve de l’esprit « variationniste ».

4 – Éléments de conclusion

73Au terme de ce tour d’horizon sur la morphogenèse des formes en [e], quels sont les points forts qui s’imposent ? Le premier porte sans conteste sur l’importance de la variation graphique lors des périodes antérieures à la formation de la norme orthographique, c’est-à-dire pendant l’ancien et le moyen français. Et ce qui compte par-dessus tout parmi ce qui pourrait n’être qu’une polyvalence graphique, c’est la spécialisation progressive d’éléments qui vont donner naissance à ce que l’on appelle aujourd’hui la morphographie du français. À partir de là vont se mettre en place, du xvie au xviiie siècle, les distinctions orthographiques actuelles concernant la morphographie des verbes en ?er, en même temps que l’extension de l’homophonie des formes en [e].

74La phonographie n’est d’ailleurs pas en reste, avec l’introduction de l’accent aigu qui constitue à cet égard un progrès. Il s’ensuit une redistribution des rôles des consonnes diacritiques de l’orthographe ancienne : les finales ?z et ?r gardent ce rôle diacritique (indiquer é fermé), pas seulement dans les finales verbales (cf. nez, poirier), tout en acquérant une valeur morphogrammique (elles marquent respectivement la 2e personne du pluriel et l’infinitif présent des verbes en ?er), qui devient la valeur principale de la finale ?s (marque des pluriels nominaux). L’Académie, créée au xviie siècle pour réglementer l’usage, se contente parfois de l’enregistrer sans le guider, dans le cas des finales en ?é (chanté) et en ?és (chantés). Elle le contrôle partiellement, empêchant la prononciation du ?r final des infinitifs en ?er (chanter), mais pas de ceux en ?ir (finir). À la suite de Vaugelas, elle a réussi à imposer la règle de l’accord du participe passé employé avec avoir, mais l’usage oral actuel ne la suit guère et l’usage écrit est très diversifié, de l’application intégrale de la règle à l’invariabilité du participe. Le résultat de l’évolution des formes verbales en [e] est très différent à l’oral et à l’écrit. La convergence homophonique, rarement compensée par la liaison avec une voyelle qui suit les consonnes finales, s’oppose à la différenciation graphique élaborée à l’écrit, qui constitue une aide pour le lecteur, pouvant identifier immédiatement la forme verbale, mais une difficulté importante pour le scripteur, apprenti voire adulte.

Bibliographie

Bibliographie

  • I. Références anciennes

    • Buffier, C., 1709, Grammaire françoise sur un plan nouveau…, Paris, N. Le Clerc, M. Brunet, Leconte et Montalant.
    • Dictionnaire de l’Académie françoise 1re éd., 1694, Paris, Coignard, 2 vol. ; 2e éd., 1740, Paris, Coignard, 2 vol. ; 3e éd., 1762, Paris, Brunet, 2 vol.
    • Estienne, R., 1569, Traicté de la Grammaire francoise.
    • Féraud, J.?F., 1787-1788, Dictionnaire critique de la langue française, Marseille, J. Mossy, 3 vol.
    • La Vie de saint Alexis, éd. Perugi, Genève, Droz, 2000.
    • Ménage, G., 1675-1676, Observations sur la Langue Françoise, 2e éd., Paris, Cl. Barbin, 2 vol.
    • Pope M. K., ed., 1910, « The Tractatus orthographiae of T.H., Parisii studentis », Modern Language Review, 5, 185-193.
    • Richelet, R., 1680, Dictionnaire francois, contenant les mots et les choses, plusieurs nouvelles remarques sur la langue francoise…, Genève, Jean Herman Widerhold.
    • Stengel E., 1879, « Die ältesten Anleitungsschriften zur Erlernung der französischen Sprache », Zeitschrift für neufranzösische Sprache und Literatur, 1, 1?40.
    • Stürzinger J., 1884, Orthographia Gallica. Ältester Traktat über französische Aussprache und Orthographie, Heilbronn, Altfranzösische Bibliotek’, 4.
    • Vaugelas, Cl.?F., 1647, Remarques sur la langue francoise… ; fac-similé de l’éd. orig. Introd., bblg., index par J. Streicher, Paris, Droz, 1934
  • II. Références modernes

    • Baddeley, S., 1993, L’orthographe française au temps de la Réforme, Genève, Droz.
    • Beaulieux, Ch. (éd.), 1951, Observations sur l’orthographe de la langue francoise. Transcriptions, commentaire et fac-similé du manuscrit de Mézeray, 1673, et des critiques des commissaires de l’Académie, précédés d’une Histoire de la gestation de la 1re édition du Dictionnaire de l’Académie Françoise (1639-1694), Paris, Champion, 269 p + 102 p [Mézeray 1673].
    • Biedermann-Pasques, L., 1992, Les grands courants orthographiques au xviie siècle et la formation de l’orthographe moderne, Tübingen, Niemeyer.
    • Blanche-Benveniste, C., 1991, Le Français parlé. Études grammaticales, Paris, Éditions du CNRS.
    • Brissaud, C. & Sandon, J.?M., 1999, « L’acquisition des formes verbales en /E/ à l’école élémentaire et au collège, entre phonographie et morphographie », Langue française, 124, 40?57.
    • Catach, N., 1968, L’orthographe française à l’époque de la Renaissance (Auteurs, Imprimeurs, Ateliers d’imprimerie), Genève, Droz.
    • Catach, N., 1995 (direction), Dictionnaire historique de l’orthographe française, Paris, Larousse, [DHOF].
    • Catach, N., 2001, Histoire de l’orthographe française (éd. posthume, réalisée par R. Honvault), Paris, Champion.
    • Brunot, 1966, Histoire de la langue française des origines à 1900 [À partir du tome 12 : Histoire de la langue française des origines à nos jours], Paris, A. Colin, nouvelle éd. (sous la direction de G. Antoine, G. Gougenheim, R.L. Wagner) [1re éd. 1905].
    • Fournier, N., 1998, Grammaire du français classique, Paris, Belin.
    • Johnston, E., 1987, Orthographia gallica, Londres, ‘Anglo-norman Text Society’.
    • Kristol, A. M., 1989, « Le début du rayonnement parisien et l’unité du français au Moyen Âge : le témoignage des manuels d’enseignement du français écrits en Angleterre entre le xiiie et le début du xve siècle », Revue de Linguistique romane, 53, 325-367.
    • Kristol, A. M., 1990, « L’enseignement du français en Angleterre (xiiie-xve siècles) : les sources manuscrites », Romania, 111, p. 289-330.
    • Pellat, J.?C., 1995, « L’évolution de l’orthographe des imprimés au xviie siècle (libraires français et hollandais) », « Ces mots qui sont nos mots ». Mélanges d’Histoire de la Langue Française, de Dialectologie et d’Onomastique offerts au professeur Jacques Chaurand publiés par l’Institut Charles Bruneau, numéro spécial 7?10 de la Revue Parlure, 83?96.
    • Pellat, J.?C., 2001, « Repères pour l’histoire de l’orthographe française : le xviie siècle », Variations sur l’orthographe et les systèmes d’écriture. Mélanges en hommage à Nina Catach, Paris, Champion, 2001, 241-256.
    • Pellat, J.?C., 2002, « Par où est passé l’accord du participe ? », CRELIANA, Mulhouse, Université de Haute Alsace, vol. 2, « D’une Italie à l’autre », 79?85.
    • Pellat, J.?C., 2003, « Variation et plurisystème graphique au xviie siècle 7 », Faits de langue, 22, 139-150.
    • Riegel, M., Pellat, J.?C. & Rioul, R., 2004, Grammaire méthodique du français, Paris, PUF, coll. Quadrige (1re éd. 1994) [GMF].

Mise en ligne 01/06/2010

https://doi.org/10.3917/lf.151.0007

Notes

  • [1]
    La graphie ai de l’imparfait (aimait) et du conditionnel (aimerait) a été approuvée par l’Académie française en 1835 à la place de oi (aimoit, aimeroit) (Catach 2001), qui correspondait depuis le moyen français au è ouvert, par opposition à son emploi dans les mots du type roi, prononcé [Rw?] et [Rwa].
  • [2]
    Ces deux traditions sous-tendent les usages graphiques réels (manuscrits et imprimés). L’« orthographe moderne » (ou « nouvelle », selon les auteurs) est distincte des propositions de réforme phonétiste qui se multiplient à partir du xvie siècle (voir Biedermann-Pasques, 1992) et qui visent exclusivement un fonctionnement phonographique idéal.
  • [3]
    Mais ce texte ne comporte pas les accents et signes auxiliaires dont parle G. Tory.
  • [4]
    EVVRES DE LOVÏSE LABE’ LIONNOIZE. A LION PAR IAN DE TOVRNES. M.D. LVI. (2e édition).
  • [5]
    Buffier (1709) confirme l’emploi de l’accent aigu : « L’e est fermé à la fin des participes passifs: donné, porté ».
  • [6]
    On observe une hésitation au xviie siècle, les mots de la première série pouvant parfois se terminer en ?és (assés, chés).
  • [7]
    Mais E. Dolet préférait le ?z pour marquer le pluriel (1542 : ilz, escriptz, faitz, cité par Catach 1968). Voir aussi la citation de Marot, infra 1.4.
  • [8]
    Dans son Dictionnaire françois (1680), Richelet préfère aussi les finales plurielles ?ez, mais il choisit ?és dans la série à finale en e ouvert progrés, aprés, trés.
  • [9]
    Dans son Dictionnaire critique (1787), Féraud atteste encore de l’hésitation des grammairiens : si ?r ne se prononce pas dans les infinitifs en ?er (aimer comme émé), « les opinions et la pratique sont fort partagées » pour ?r dans les infinitifs en ?ir (finir ou fini), « les uns la prononçant toujours, les aûtres ne la prononçant jamais » (article « R »).
  • [10]
    Selon Cl. Blanche-Benveniste (1991), l’accord du participe passé se fait à l’oral principalement « quand la zone postverbale est vide » (ex. : vous l’avez écrite).
  • [11]
    Ces traités seront cités ici selon les références et dans les abréviations suivantes :
    I. Le Tractatus orthographi(a)e gallican(a)e, qui a été transmis par deux manuscrits, sera cité par Tractatus orthographiae ou seulement par Tractatus pour la version de la fin du xiiie siècle (ms. du British Museum) éditée par Pope (1910) ; pour l’autre, du tout début du xve siècle (ms. d’Oxford) édité par Stengel (1879), il le sera par « Coyfurelly ».
    II. Pour celui qui est intitulé Orthographia Gallica, il est suivi de la lettre de référence de l’édition ; il est représenté dans au moins sept versions et deux éditions en sont actuellement disponibles : Stürzinger (1884) et Johnston (1987) ; ici, c’est l’édition Stürzinger qui a été citée, dont les quatre versions qu’elle donne sont désignées par une lettre : T (version courte de la fin du xiiie s., en latin), H (de ?1377 en français), C (de ?1385), O (d’après 1420).
    Sur les principaux de ces traités et sur leurs relations avec l’enseignement du français en Angleterre, voir en particulier les études critiques et la bibliographie de Kristol (1989 ; 1990).
  • [12]
    Pour la valeur originelle de z, voir § 2.1.3.
  • [13]
    Cette équivalence a été acquise plus précocement dans le nord, où [ts] s’est réduit à [s] plus tôt qu’ailleurs.
  • [14]
    Pour les équivalences entre ts et tz, condamnées par Coyfurelly, voir ci-dessous § 2.1.2.
  • [15]
    Du moins en alternance avec ts, tz.
  • [16]
    La même équivalence est déjà attestée dans une version précédente de l’Orthographia : T (fin xiiie) ; voir la fin du § précédent.
  • [17]
    Les références placées en tête (lettre et chiffre) renvoient à l’édition de Stürzinger (note 11).
  • [18]
    H et CO de l’Orthographia Gallica ; Traité de Coyfurelly.
  • [19]
    Toutes les citations et références qui suivent m’ont été communiquées par Jean-Charles Herbin ; qu’il en soit vivement remercié (N. A-R.).
  • [20]
    Il l’est, en fait, depuis le xiiie siècle.
  • [21]
    Voir §§. 2.1.3. et 2.2.
  • [22]
    Il s’en compte 10 occurrences dans la Séquence de Sainte Eulalie qui n’a que 29 vers.
  • [23]
    Le manuscrit qui a conservé les Serments de Strasbourg est, en effet, plus tardif que l’époque (mi-ixe s.) où les serments eux-mêmes ont été prêtés.
  • [24]
    Z y note majoritairement [ts] à la finale ou à l’intervocalique (fazet, Serments A7) voire [s] (lazsier Eulalie 24) ou [dz] à l’intervocalique (bellezour, domnizelle).
  • [25]
    Dans Jonas la notation de la désinence de P5 est assurée majoritairement par est, en concurrence avec ets, etst, st : faciest, comenciest, aiest, preirets, aiest, seietst ; celle du morphème nominal l’est par ts: doliants CSS.
  • [26]
    On a vu que les traités tardifs ne la distinguent pas ; en morphologie nominale on analysera ez en e-z.
  • [27]
    Avant un brouillage – s’il en est bien – qui semble étonnamment déjà attesté : asnez I a 17 (sauf si = « asnesse »).
  • [28]
    Cette valeur était déjà observable dans Eulalie, où, derrière c, z sélectionnait la prononciation [ts] : czo.
  • [29]
    Pour l’ensemble de cette tradition et sa reconstitution « unitaire », voir notamment La Vie de saint Alexis, Éd. crit. M. Perugi, Genève, Droz, 2000 (Textes littéraires français).
  • [30]
    Voir § précédent ; après l’exemple exceptionnel de la Passion, il apparait beaucoup moins de variations du morphogramme ?ez, qui reçoit ainsi dans ce texte une première forme de stabilisation.
  • [31]
    Cette possibilité de localisation géographique n’est pas toujours ouverte : cela ne l’était pas pour la Passion de Clermont ni les Serments de Strasbourg.
  • [32]
    Les exemples se lisent respectivement: tant de jours, loin, fait(s), grands cris, mère, venue et .
  • [33]
    Les manifestations ultérieures de cette variation, avant l’avènement d’une grammatisation de l’écrit, ne changent rien.
bb.footer.alt.logo.cairn

Cairn.info, plateforme de référence pour les publications scientifiques francophones, vise à favoriser la découverte d’une recherche de qualité tout en cultivant l’indépendance et la diversité des acteurs de l’écosystème du savoir.

Avec le soutien de

Retrouvez Cairn.info sur

18.97.9.169

Accès institutions

Rechercher

Toutes les institutions