Notes
-
[1]
Voir Bernard (1991).
-
[2]
Voir, à propos de ce repère R, Schwer (2009) qui rappelle la filiation entre Port-Royal (1660), l’Abbé Girard (1742), Beauzée (1767), Reichenbach (1947), Vet (1980).
-
[3]
Wilmet (1976, 2003) développe un système à dédoublement (axe processuel + axe énonciatif, l’axe énonciatif « regardant » l’axe processuel).
-
[4]
Pour cette raison, l’auxiliaire de parfait have peut être employé pour sur-décaler temporellement un procès dans le passé dans certains cas. Mais le temps ne changera pas. Voir l’exemple (10).
-
[5]
Comparer en français : « il a dit qu’il avait faim / qu’il a faim » avec les mêmes implications.
-
[6]
La nuance évidentielle est discrète, mais immédiatement sensible.
-
[7]
Parmi les nombreuses études, voir celles de Binnick (1991), Comrie (1985), Dowty (1982), Hornstein (1990), Kamp & Reyle (1993), Klein (1994), Partee (1984). Discussions dans Declerck (1986), Hackmack (2001), Michaelis (2006), Schwer (2007).
-
[8]
“A reference to some point or period of time which cannot be identified except in terms of the zero-point of the utterance.” (Lyons, 1968 : 682)
-
[9]
Reichenbach (1947 : 288) se contente de noter comme fondement de sa théorie : “Since the number of tenses is obviously greater, we need a more complex interpretation” et cela indéfiniment, ce qui est à l’opposé d’un système qui doit, pour exister, se donner une frontière avec l’extérieur donc une limite. Cela dit la théorie a conduit à de nombreux raffinements pertinents (voir Gennari 1999, à propos des propriétés d’intervalle des aktionsarts statifs et non-statifs).
-
[10]
L’exemple de Reichenbach est “I had mailed the letter when John came and told me the news”, avec trois points R fusionnés.
-
[11]
Vet (2007) le définit pour sa part comme une « perspective ».
-
[12]
Partee (1984) insiste sur la possibilité (et le besoin) de permettre à R de s’actualiser (updating) au fil du texte en particulier en variant selon l’aktionsart des événements : un procès dynamique est inclus dans R, mais un état inclut R ce qui, par ailleurs, contribue à rendre R d’autant plus flou. Voir l’importante étude de Michaelis (2006) à ce propos.
-
[13]
C’est moi qui souligne.
-
[14]
“[...] there is no a priori reason why complex (multi-word) forms should not be considered to be tense forms, and the fact that English has two temporal perspectives reflects (or is reflected in) the fact that it has two sets of tenses, not that it has only two tenses” (Declerck, Reed & Cappelle, 2006 : 100). Les notions d’aspect et de mode sont dûment reconnues et définies par Declerck mais, par exemple, une forme de perfect est définie en termes de séquence (antériorité) et non d’aspect (op. cit. : 38).
-
[15]
Declerck, Reed & Cappelle (2006 : 102). Cf. chapitre 2.
-
[16]
Voir la différence entre les « T(ime)-relations » exprimées par des marques et les « W(orld)-relations » qui existent dans le monde et ne sont pas nécessairement représentées par des marques.
-
[17]
“Because the conditional tense expresses no more than that the situation time is T-posterior to an orientation time in a past domain, it leaves vague whether the situation time is W-anterior, W-simultaneous or W-posterior to t0.” (Declerck, Reed & Cappelle, 2006 : 450) (T-relations = relations temporelles établies par les temps, W-relations = relations établies par inférence du contexte linguistique et non linguistique, op. cit. : 121)
-
[18]
« La langue est une forme et non une substance. » (Saussure, 1973 : 169)
-
[19]
Je traduis l’expression anglaise self-reference, par souci de simplicité, par auto-référence, mais sui-référence serait plus exact.
-
[20]
Dans le cadre de la théorie générale des systèmes, Luhmann (1995) a pu ainsi écrire que « c’est la communication qui communique ».
-
[21]
Douay et moi-même utilisons le terme de « configurations » interlocutives.
-
[22]
La théorie interlocutive prévoit en réalité un troisième terme singulier qui est la forme pré-réplicative du système lui-même (pour les formes non finies, c’est l’infinitif en face des deux participes et pour les formes tensées, c’est l’impératif).
-
[23]
Le possible passage de was à were marque une sélection supplémentaire mais ne change rien à cela (Douay 2009).
-
[24]
J’emprunte le terme « transactionnel » à Francis Jacques.
1. INTRODUCTION
1 La concordance des temps est un chapitre relativement mineur de la grammaire anglaise, du fait qu’il n’existe que deux temps – le présent et le passé – et que, dans les langues germaniques, les auxiliaires modaux eux-mêmes conjugués à ces deux seuls temps ont réduit l’ancien optatif/subjonctif à presque rien [1]. La question peut être ramenée aux deux cas de figure (a) et (b) suivants :
- la conjugaison au passé du verbe de la subordonnée d’un discours rapporté au passé ;
- des valeurs modales, non temporelles, généralement décrites comme contrefactuelles.
3 Il est difficile alors de parler de concordance, et on préfèrera l’expression « sequence of tenses », et, pour le cas (a) supra, s’est imposé le terme de « backshift (ing) ». Le passé modal est tenu à part, souvent assimilé par analogie au révolu, qui aurait en commun avec le contrefactuel la propriété d’être distinct de l’actualité.
4 Après avoir examiné ce que l’on appelle « sequence of tenses » dans le cadre reichenbachien (SOT) qui domine la question, nous discuterons la synthèse de R. Declerck et montrerons qu’elle ne remet pas en cause le référentialisme qui imprègne les modèles de la temporalité. Le nœud du problème est en effet qu’elle continue à postuler un « présent fondateur », expérimental, auto-défini et absolu, qui permet de répartir les autres temps autour de lui. Or, ce postulat ne repose que sur l’immédiateté et l’évidence et ne répond pas à la question : qui peut observer et distinguer ce moment, et comment ? De même, le passé ne reçoit qu’une définition en « rupture » par rapport à ce présent, de manière si restrictive qu’il est nécessaire de postuler un repère supplémentaire (noté R comme le Reference time de Reichenbach [2]) si on veut expliquer la démultiplication des formes temporelles, étant donné que la représentation est monolinéaire [3]. Mais cet « auxiliaire flottant » est très difficile à définir.
5 La question linguistique est celle de l’institution du moment de parole. Si on pose la question dans un cadre interlocutif et communicatif, où le système doit co-exister pour deux instances séparées, le passé ne peut pas se résumer à « ce qui a été » ni l’irréel à « ce qui n’est pas ». Ce que l’on appelle le temps passé devrait plutôt être posé comme un des repérages relatifs possibles d’une parole qui n’a pas plus de passé que d’avenir per se. La temporalité est inférée et elle provient de relations systématiques, ce qui explique la complexité du rapport entre temps expérimental et temps linguistique.
2. LE « BACKSHIFT »
6 Selon R. Quirk et al. (1985), le backshift se résume à l’attraction du verbe de l’imbriquée vers le passé de l’imbriquante. Ce backshift concerne également les formes composées, elles-mêmes conjuguées aux deux seuls temps du présent et du passé :
9 Cette interprétation est référentielle, le backshift correspondant à un décalage en termes d’époque (« natural temporal distancing », op. cit. : 787). D’ailleurs, si le verbe de l’imbriquée était déjà dans une forme de passé, le changement de temps ne se produirait pas une deuxième fois [4]. Si la proposition imbriquée concerne un événement contemporain du moment pivotal de l’énoncé ou si la proposition est universellement valide, le backshift ne se produit pas, comme en (3) :
11 Dans ce contexte minimaliste, l’auteur aurait pu utiliser could au lieu de can pour retourner la parole à Socrate, et donc, le passé dans le discours rapporté paraît impliquer une altérisation. R. Quirk et al. n’exploitent pas ce fait : l’ensemble n’est considéré par eux que du point de vue de la valeur de vérité de la proposition à un moment x et le backshift n’est alors qu’une « attache » au passé. C’est un point de vue limitatif, car cela pourrait signifier pour could que la proposition n’est plus vraie dans le présent du rapporteur, ce qui n’est pas en cause. Et le passé de la subordonnée n’implique pas un passé d’époque : par exemple He said that he was hungry [5] peut s’appliquer au présent. Ce qui vaut pour les assertions vaut pour les questions et exclamations.
12 Le backshift s’applique aux auxiliaires modaux, comme dans (4) :
14 Cependant, selon R. Quirk et al. le passé des auxiliaires modaux n’a de portée temporelle que limitée et le backshift est beaucoup plus rare. Le cas de must, invariable, est remarquable :
16 Pour le discours indirect libre, R. Quirk et al. donnent l’exemple suivant en notant que le backshift du verbe s’explique par une proposition sous-entendue du type he thought... :
18 On peut objecter que les pensées rapportées pourraient l’être au présent, au discours direct (So that is their plan, is it ? etc.), alors même que ce sont toujours des pensées passées, i.e. dépendantes d’une proposition de type he thought... C’est donc à la faveur d’inférences et par le jeu des éléments déictiques que l’on interprète ce passage comme du discours rapporté, et non pas en raison du backshift. De là d’ailleurs de possibles ambiguïtés entre récit et discours rapporté. On ne peut pas conclure que le verbe de la principale détermine celui de la subordonnée. Donc au principe d’attache ou d’attraction, les grammairiens préfèrent souvent un principe de séquence « naturelle », comme le fait par exemple M. Swan avec aplomb :
20 Il remarque que des changements de temps peuvent impliquer des désaccords avec les points de vue rapportés ou des réserves, car un passé dans la subordonnée renvoie aux paroles originales et peut impliquer une volonté de se dissocier des paroles rapportées [6] :
22 Des observations comme celles de M. Swan sont rares. Temps expérimental et temps verbal paraissant fonctionner indépendamment, le backshift revient souvent à la prescription rhétorique qui recommande de ne pas mélanger les temps, « pour ne pas dérouter le lecteur » (Do not mix tenses, or it will confuse your reader).
3. LE CADRE REICHENBACHIEN
23 La pauvreté morphologique du verbe anglais et la diversité corrélative des interprétations des formes verbales militent pour le caractère pragmatique plus que sémantique de ces formes. Cela explique sans doute la faveur dont jouit, dans une très large majorité des modèles, la théorie des temps et des aspects de H. Reichenbach (1947) [7] : quelques pages seulement dans ses Elements of Symbolic Logic auront suffi à décrire l’ensemble des formes verbales, ce qui implique que le logicien a laissé beaucoup de place aux inférences contextuelles.
24 La formule repose sur la relation entre le moment de la réalisation de l’événement E et le moment de la parole S. Il s’agit d’un système déictique, le moment de parole étant le moment de l’acte de parole (d’où le S de « act of speech », aussi « act of utterance » pour J. Lyons (1968 : 637) [8], avec « a single speaker and at least one addressee »). Entre E et S il n’y a que deux relations possibles : l’antériorité (notée E-S ou S-E) et la simultanéité (notée E, S). La postériorité n’est pas qualitativement différente d’une antériorité (inversée).
25 La première observation (Hackmack, 2001 : 5) est que ces relations ne correspondent pas de manière directe et univoque à des temps spécifiques. Ainsi, dans (9), S-E est représenté par trois formes verbales et, si l’on supprime on Monday, la forme progressive devient plus vraisemblablement E, S :
27 L’inférence intervient nécessairement pour lever ces ambiguïtés. Mais un deuxième repère, autre que S, doit être mis en œuvre. Ainsi, dans (10), le past perfect implique un événement relatif intermédiaire :
John had left on Monday (départ antérieur à lundi, lui-même antérieur à S)
29 Sur la foi de cette observation, H. Reichenbach postule donc un point de référence R qui agit comme médiateur entre E et S, ce qui fait que la relation S/R détermine le temps (passé, présent ou futur) et que la relation E/R traite de l’ordre séquentiel (antériorité, simultanéité, postériorité).
30 Le principal problème devient alors la surcapacité générative du modèle. Des temps n’existent pas en anglais (par exemple un futur postérieur de type S-R-E ou un passé postérieur de forme R-E-S, alors que E-S-R, S-E-R ou E, S-R sont viables comme futurs parfaits [E antérieur à R] et E-R-S comme passé parfait). Il y a aussi la question, qui fait couler beaucoup d’encre, de la distinction entre prétérit (was, E, R-S) et present perfect (have been, E-S, R) : l’ubiquité de R semble l’assimiler à un simple focus sur S ou sur E. Enfin, pour expliquer des formes surcomposées comme I shall have been going to see John (Hackmack, 2001 : 10), H. Reichenbach ne se donnant pas de récursivité ou de frontière de proposition, on serait contraint de dédoubler R (l’un pour le futur parfait S-E-R, l’autre pour le deuxième futur de be going to see) sans compter la nécessité d’une interprétation étendue ou durative (extended) de E pour la forme progressive de go. En bref, il s’agit d’une formule descriptive à partir d’une base linéaire simple, et non d’un authentique système [9].
31 Néanmoins, H. Reichenbach applique son modèle à la concaténation de propositions, donc au backshift. Son hypothèse est une possible constance du point R (Permanence of the R-point) pour un nombre d’événements E supérieur à 1 [10]. La différence entre (11) et (12) est qu’en (12), le point de référence R est constant malgré le changement de proposition :
34 On constate que c’est ce qui est symbolisé par R qui est le véritable levier des sélections de temps. On aimerait donc avoir une définition de ce paramètre. Or, on ne l’a pas. Donné initialement comme un « deuxième événement » avec E, il paraît en réalité symboliser un contexte ou un environnement de E, peut-être un focus attentionnel [11]. La « sémantique floue » de ce R est bien connue, mais il y a d’autres problèmes, comme l’insistance de H. Reichenbach à verrouiller un R principal, y compris sur l’ensemble d’une narration complexe, ce qui devient vite la quadrature du cercle. [12]
35 N. Hornstein (1990), amplifiant le cadre reichenbachien, analyse des combinaisons de structures temporelles ou des modifications à l’aide d’adverbes de temps. Il s’efforce d’expliquer le flottement de R par celui de S. Par exemple *Harry left tomorrow est inattestable parce que la structure temporelle de base de l’adverbe (BTS, basic tense structure) est S-E, R, alors que la structure temporelle dérivée de la phrase (DTS, derived tense structure) est E, R-S. Dans son chapitre 4, N. Hornstein applique son analyse à la « sequence of tenses » et propose une règle (SOT rule) qui consiste à poser que, dans un cas comme (12), le S de la subordonnée est un S2 distinct du S principal et qu’il est identifié au E principal. La proposition est séduisante mais si, d’une certaine façon, on peut accepter que R soit malléable (surtout s’il s’agit d’un focus), c’est plus délicat avec S : en premier lieu, on ne peut pas poser deux (ou plus) actes de parole avec la même valeur déictique (on le voit bien avec he said that he would leave tomorrow, où tomorrow continue à référer à S principal, alors qu’il est un argument de la subordonnée). Le risque de perdre l’ancrage déictique de l’énoncé est très problématique pour la cohérence de l’ensemble relationnel.
36 Reste aussi la généralisation du modèle. C. Vet (2007) critique par exemple H. Reichenbach à propos du français en notant que son modèle ne permet pas de décrire toutes les formes du conditionnel, qu’il ne distingue l’imparfait du passé simple que comme des aspects, le temps restant le même, et qu’il traite comme un présent le futur « d’allure extraordinaire » de J. Damourette et É. Pichon.
4. LA NOTION DE DOMAINE TEMPOREL CHEZ DECLERCK
37 R. Declerck (1990), discutant B. Comrie (1986), propose une synthèse remarquable. À propos de (13), il se demande comment on peut expliquer le passé de was :
39 Il retient trois hypothèses couramment formulées :
- absolute deixis : le passé de la subordonnée réfère à un passé d’époque (temporel) et donc Arthur a été malade dans le passé ;
- relative time : la proposition rapportée est au passé parce que le moment où elle a été dite est donné au passé ;
- backshifting rule : il existe une règle formelle qui change le temps de la subordonnée quand le verbe de la principale est au passé.
41 B. Comrie (1986) tente de ne conserver que la troisième hypothèse, mais R. Declerck lui oppose pas moins de six objections et démontre que seule une combinaison des deux premières hypothèses est correcte. Pour cela, il fait une distinction (Declerck, Reed & Cappelle, 2006 : 383) entre le temps absolu, qui est un repère effectif sur la ligne du temps (situation time) et qui établit à ce titre un « domaine temporel » (ensemble cohérent de références temporelles liées : « a set of one or more times »), et le temps relatif, qui marque la simultanéité, l’antériorité ou la postériorité dans ce domaine temporel. Par coordination ou asyndète, on peut passer d’un domaine à un autre (domain shift). Un sous-domaine est un domaine (avec son propre repère effectif) qui est inclus dans le domaine temporel central (lié au temporal zero point t0) et donc subit un décalage supplémentaire. C’est ce que l’on a en (14) avec un domaine passé (said), un sous-domaine relatif (had admitted) et un autre sous-domaine relatif à ce dernier (was) :
43 La langue anglaise n’a qu’un seul système de temps relatifs, ce qui fait que le prétérit peut être absolu ou relatif, mais le past perfect (had + participe passé) et le conditionnel (would + infinitif) ne peuvent être que relatifs. Par exemple, en (15), le passé felt est relatif à would say et donc correspond à un futur, déictiquement marqué par tomorrow :
45 Ce que montre R. Declerck dans cette synthèse élégante est que le passé peut être relatif et il insiste sur son refus d’une thèse absolutiste qui voudrait qu’un temps passé soit strictement référentiellement temporel. Ce que l’on appelle backshifting s’explique alors, selon lui, par une adaptation de caractère sémantique et ne peut pas être réduit à une règle formelle. D’ailleurs R. Declerck fait appel explicitement à l’inférence (« pragmatic knowledge ») pour établir ou rétablir des relations temporelles, comme dans (16), où il n’y a aucun marqueur et où la consécution est inférée (avec would never come back on n’aurait pas de consécution mais une inclusion) :
47 L’hypothèse de R. Declerck est donc relativiste, sauf sur un point : la définition du domaine central qui conserve avec t0 un ancrage absolu, avec un présent, un post-présent (will + V) et un pré-présent (have + V-en). Dans la subordonnée, on choisit entre temps absolu (domain shift) et temps relatif (incorporation). Il s’y ajoute une considération essentielle : l’utilisation du temps relatif est le choix non marqué (unmarked), ce qui implique que le temps relatif est toujours possible, les maximes de P. Grice (1975) n’autorisant d’ailleurs le temps absolu que dans certains cas de coopération (avec par exemple un adverbe de temps explicite).
5. LA QUESTION DE T0
48 Le centrage en t0 fusionne toutes les relations temporelles et les catégories traditionnelles fondées sur des distinctions « naturelles » de périodes sont inopérantes. À la simultanéité qui fonde le présent doit donc s’ajouter un appareil dissociatif (distance par rapport à t0, écart, visée, rupture, etc). Pour R. Declerck, cet appareil est très basique et il l’amène à considérer comme « temps » des formes aspectuelles ou modales indifféremment [14] (have + V – en est un « pré-présent », will + V un « post-présent », par exemple), jusqu’à se contenter sans examen d’étiquettes sans portée (would + V est un « conditionnel »). La définition de « tense » se confond avec la capacité de la catégorie à localiser temporellement une situation par rapport au moment de parole (« temporal location relative to speech time » [15]).
49 R. Declerck choisit donc d’accumuler différentes « lectures » (readings) des temps avec l’avantage qu’il en rend parfois compte, mais avec le désavantage qu’il mêle parfois indistinctement des considérations formelles, sémantiques et pragmatiques pour justifier la séparation entre absolu et relatif [16]. Les connaissances pragmatiques qu’il convoque n’ont pas de statut théorique et servent, en fait, de soupape adaptative à des catégories simples fondées sur les seules relations de simultanéité, antériorité et postériorité. Par exemple, en (17), R. Declerck explique que le « conditionnel » dit seulement que pray est postérieur à said [17] et le reste est accessible pragmatiquement :
51 L’explication qui est fournie de la distinction entre les « sphères » du présent et du passé est l’inclusion de t0 dans celle du présent et son exclusion de celle du passé. Cette distinction est dite « conceptuelle » (2006 : 147). T0 est un repère non marqué, « donné par définition » et « qu’on assume connu ».
52 La distinction entre absolu et relatif est une distinction centrale et la relativité temporelle est un concept très précieux. Mais, chez R. Declerck, elle repose sur le postulat du caractère absolu de t0. Très révélateur est le fait que le pré-présent, par exemple, n’a aucune raison a priori d’être distingué du passé, puisque les deux sont donnés comme antérieurs à t0. R. Declerck a beaucoup de mal à expliquer la différence, par une vague focalisation temporelle du locuteur (« speaker’s temporal focus on the present or on the past », 2006 : 150), où on retrouve la question du R de H. Reichenbach. La raison est que la relation à t0 est claire pour le pré-présent, le présent et le post-présent, mais elle ne l’est plus pour le passé qui n’est justement pas en rapport de simultanéité avec le domaine central. C’est le même problème qui se pose à toutes les théories de l’énonciation : le passé ne peut recevoir de définition qu’en termes de non-relation (rupture, distance, objectivation, etc). Pour la théorie de R. Declerck, il y a là une contradiction que l’on pourrait presque qualifier de « fondatrice » si elle était résolue, mais ce n’est pas le cas. De ce fait, la distinction entre absolu et relatif, qui est la thèse principale, côtoie sans cesse la circularité.
53 Enfin, se pose la question du passé modal comme en (18) :
55 Dans ce cas de figure, le passé est relatif mais ce ne peut pas être à t0 car on aurait un passé d’époque. On peut supposer alors qu’il marque une simultanéité avec la « situation » représentée par l’expression I wish, qui est naturellement postérieure à t0. Il s’agirait donc d’un usage « spécial » (une exception), manifestant une relation temporelle à un centre qui n’est pas t0. On perd l’argument de la « rupture » car on n’a plus de définition du centre. Peut-on promouvoir une situation désirée (wish) au rang d’un repère temporel comparable à t0 ? En (18), on peut certes voir dans I wish une tension vers une situation contrefactuelle (contrary-to-fact situation), mais il n’est pas expliqué quel est le rapport entre passé et contrefactuel, d’autant que la simultanéité est prise en défaut dans (19) et (20) :
58 En fait, il devrait être logiquement impossible, si on suit l’analyse de R. Declerck, d’avoir des énoncés modaux tels que (18) (19) et (20). Et c’est pratiquement ce qu’il dit lui-même : leur caractère exceptionnel rejoint le caractère qu’il appelle « métaphorique » du présent historique, autre cas exceptionnel puisque l’on traite un passé « comme si » c’était un présent (Declerck, Reed & Cappelle, 2006 : 382).
59 En conclusion, comme l’argumente R. Declerck de manière très convaincante, l’hypothèse de la déixis absolue est intenable. Mais s’il pointe avec justesse le caractère relatif du temps, il doit conserver certains éléments absolus :
What I propose is basically a ‘relative time hypothesis’ supplemented with some elements from the ‘absolute deixis hypothesis’. (Declerck, 1990 : 521)
61 Il n’est donc pas certain que R. Declerck puisse échapper à certaines circularités malgré la force de son argumentation. Pour la concordance, il utilise à l’occasion l’expression « tense harmony », mais il exploite peu le concept, fondant le système des formes verbales sur le caractère « naturel » de t0. Cela nous invite à explorer l’idée que l’harmonie temporelle ne résulte pas d’une nature quelconque, mais qu’elle vise précisément à construire ce point de référence que l’on appelle le présent, qui est tout sauf donné d’avance.
6. UNE THÈSE INTERLOCUTIVE
62 Il y a comme toujours un choix théorique à faire entre le référentialisme et une forme ou une autre de constructionnisme. Ce choix est très généralement fait en faveur du référentialisme. S. Schwer (2007) décrit très bien cela :
Une communauté importante de linguistes considère que le langage réfère in fine à des objets du monde réel qui ont, en tant que tels, une extension temporelle, qu’il convient de faire coïncider par une série d’opérations cognitives, avec l’image métaphorique et spatialisée du temps physique, celle de la ligne géométrique. Cette démarche est connue sous le nom d’approche référentielle (Moeschler 1998, Saussure 2003). (Schwer, 2007 : 1)
64 Or, on est largement fondé à penser que le signe linguistique ne reflète pas les catégories de l’expérience, car ces catégories appartiennent à l’environnement du système et, du fait de leur complexité, elles sont inobservables par lui directement. Elles sont des objets de science, de calcul et de discours scientifique, et ne peuvent pas déterminer par elles-mêmes de forme systématique, sans quoi nous serions à même de les connaître par l’intuition. Si on ne veut pas confondre moyen et fin, on est tenu de considérer que le signe permet d’observer ces catégories et ne se confond pas avec elles, qu’il ne peut donc pas être référentiel et qu’il n’a aucun « contenu » [18]. Le système s’observe lui-même [19] et c’est par la médiation de formes auto-référentielles qu’il traite son environnement.
65 Dans ce cas, communiquer, ce n’est pas transmettre de l’information (du contenu) de A à B, comme dans la métaphore du « conduit » (Reddy 1993). Du point de vue des contenus, l’émetteur et le récepteur sont opaques l’un pour l’autre. En revanche, grâce au langage, ils co-produisent des signes qu’ils peuvent l’un et l’autre identifier. Communiquer, c’est un acte de collaboration de deux systèmes partenaires et c’est donc une réplication du métasystème qui les associe. La parole se définit alors comme une interaction de ce système avec lui-même, une auto-réplication à deux termes qui modifie son environnement.
66 On voit le paradoxe : le système qui, pourtant, est un tout relationnel, utilise en fait deux systèmes distincts, en fait deux versions distinctes de lui-même, pour se répliquer. Chacun des partenaires de la communication relève ainsi d’une double définition : ce que l’on appelle l’émetteur face à un récepteur n’est une entité individuelle qu’en partie seulement, car les deux partenaires sont tous deux à la fois des systèmes individuels et des parties subordonnées du métasystème qui les associe et qui se réplique par leur entremise [20]. Communiquer c’est co-agir pour répliquer ce métasystème par le signe qui le manifeste et, par cette co-action, remettre en question sa propre individualité.
67 Nous poserons que les formes du langage marquent les contours [21] de la relation de communication sémiotique et, en raison de l’auto-référence du système, cette relation ne peut être que fractale, le système étant nécessairement un système de systèmes. On peut distinguer typiquement deux contours majeurs, qui correspondent au vis-à-vis des deux systèmes intégrés [22]. Ces deux formes constituent les paires systématiques qui font les oppositions grammaticales classiques, ce qui nous permettra de considérer le présent et le passé anglais comme un système : les deux « temps » correspondent à cette distinction formelle radicale.
68 La première forme marque le face à face « présent » des deux systèmes individuels vu du point de vue actif du système effectuant la sélection systématique. Dans le cadre référentialiste, on conclura qu’il s’agit d’une forme de réunion paritaire et d’identification dans l’« espace » temporel du présent, les deux systèmes « vivant » la même expérience, pour ainsi dire. Ce serait là oublier l’opacité relative des systèmes : rien ne permet d’affirmer, sinon un postulat, qu’une relation quelconque puisse les réunir d’emblée. Parler, c’est (re) construire une distinction, et donc faire une nouvelle sélection qui est de fait une surdistinction, car chaque nouvelle utilisation du signe impose nécessairement une situation de différenciation par rapport aux autres usages. Ainsi, une distinction est posée entre les deux termes partenaires et permet leur connexion, autrement impossible. Le présent se définit comme cette connexion.
69 Le présent est donc une situation de connexion interlocutive où les partenaires sont associés dans le même espace en se distinguant. On peut les voir comme en superposition. À aucun moment cette situation ne peut être caractérisée comme une époque objective dans l’univers, car elle se reproduit à chaque fois qu’il y a une connexion, donc un acte de réception. Autrement dit, une forme de présent a pour propriété de reconstituer perpétuellement ce « présent » de connexion. Ce trait explique par exemple les valeurs intemporelles. Il en résulte que le t0 énonciativiste n’est que très partiellement opératoire. T0 ne peut être défini que comme l’instant infixable et imprévisible de la réception (co-active) du signe et il ne peut pas être un instant fondateur absolu. Par ailleurs, ce que l’on appelle le présent est seulement l’une des deux formes relationnelles possibles. Autre implication : les termes sont partenaires dans le système global par leur différenciation, qui fait l’information. Par conséquent, le présent nécessairement est une marque de déséquilibre informationnel grâce à la co-extension et à la sur-distinction qu’elle permet.
70 La seconde forme est le contrepoint de la première : elle pose les deux systèmes intégrés du point de vue de la réception. La sur-distinction caractéristique de la réplication s’effectue « ailleurs », c’est-à-dire au niveau de l’autre système. Ce caractère exogène provoque une sous-distinction, cette fois, entre les deux termes, qui sont alignés dans un fonctionnement non sélectif qui nivelle leur différence, interdisant le face à face et la concurrence. Ce fonctionnement « aligné » fonde la chronologie, les deux termes étant de « temps » distincts par la disparition de la superposition. Pour cette raison, le passé est le temps de ce qui est « dépassé » et il se définit comme un « contre-présent ». Pour une prédication donnée, le passé peut marquer aussi bien un décalage chronologique sur la flèche du temps, qu’une perfectivité absolue d’un procès due au « dépassement » caractéristique, ou encore, une absence de distinction et une irréversibilité, avec ce que l’on appelle le passé modal.
7. LE PASSÉ MODAL
71 Reprenons l’exemple (3) :
73 Le passé said s’entend comme un contre-présent chronologique comme il est décrit supra. L’antériorité temporelle est le résultat d’une inférence logique par défaut qui tient compte de la clôture du procès, de sa perfectivité, et de la flèche du temps.
74 On peut alors expliquer le possible backshift en can > could. Le temps de chaque proposition en anglais n’est pas contraint, puisque c’est directement la relation entre les systèmes interlocutifs qui est mise en jeu. Le passé could en (21) marque donc notre deuxième configuration, celle qui signale la réplication comme exogène. C’est l’inférence qui détermine quel est le rapport interlocutif en cause : il peut s’agir de Socrate parlant en son temps d’une époque plus ancienne, mais on peut également avoir une interprétation modale conditionnelle. Dans une définition qui n’est plus temporelle, le passé impose la fermeture de la proposition et la fait dépendre de causalités sur lesquelles les interlocuteurs n’ont pas prise et qui ne fait pas l’objet d’une sélection présente (en français on aurait par exemple : « rien ne pourrait blesser un honnête homme, si l’honnêteté était partout respectée », qui implique a contrario qu’elle ne l’est pas). D’une certaine manière, la proposition devient un scénario à base logique qui est placé hors des sélections et différenciations interlocutives. Dans les deux cas, la sous-distinction entre les interlocuteurs externalise la prédication par rapport à leur connexion.
75 On a le même phénomène en (22) :
77 Wish exprime un vœu (pieux), qui n’engage pas ou faiblement le locuteur, et le passé, dans une expression figée comme celle-là, marque un vœu purement rhétorique face à l’impossibilité de mettre en scène effective la présence de John. Aucun des partenaires interlocutifs n’est en mesure de modifier le cours des choses [23].
78 Dans d’autres cas, le passé modal alterne avec le présent, et a plusieurs valeurs, toutes ayant pour effet de marquer une situation comme « dépassée », ce que l’on peut comprendre comme le signal d’une absence de connexion, donc d’une urgence et d’une coercition accrue. C’est le cas en (23) où le présent leave se contenterait de rappeler l’heure du départ, par exemple conventionnellement fixée, alors que le passé left exercerait une pression, combinant externalité de la sélection et nécessité de sa mise en œuvre :
80 On peut comprendre ce dépassement comme une pré-scénarisation et une altérisation. Les alternances du type de celle de (24) marquent volontiers des contraintes de ce type, aussi bien dans la protase que dans l’apodose, puisque les deux propositions sont soumises au même pré-cadrage. Le passé de rained et would marquent une sous-sélection interlocutive qui fait fonctionner la proposition hors-connexion :
82 Il convient cependant d’être prudent dans le repérage de l’origine des scénarisations en question. Essentiellement, la réplication du système repose sur la dépersonnalisation du sens, la perte partielle sinon totale de son caractère privé. La plupart du temps, ce partage est immédiatement interprété par inférence dans la conversation ordinaire (il peut y avoir des ratés), mais ce peut être beaucoup plus complexe dans des textes écrits et rhétoriquement élaborés, où interfèrent de nombreux phénomènes de codification.
8. CONCLUSION
83 Ce rapide parcours montre que le modèle reichenbachien, qui a pour lui toutes les vertus de la catégorisation logique et de la simplicité pédagogique, pose des problèmes théoriques complexes et que les aménagements volontiers critiques, de Hornstein à Declerck, rendent ces problèmes encore plus aigus autour de la sémantique des repères E, R et S. Il nous semble préférable de récuser le référentialisme et d’accepter au moins une version d’auto-référence du système. Seules la bipolarité interlocutive et communicative et la définition transactionnelle [24] du signe sont actuellement en mesure d’expliquer les propriétés structurantes du langage. En fait de concordance, on ne voit en anglais que la discordance du langage par rapport à une supposée harmonie référentielle.
Bibliographie
Références
- ARNAULD A. & LANCELOT C. (1660), Grammaire générale et raisonnée de Port-Royal, Paris : P. Le Petit.
- BEAUZÉE N. (1767), Grammaire générale, ou Exposition raisonnée des éléments nécessaires du langage : pour servir de fondement à l’étude de toutes les langues, Paris : J. Barbou.
- BERNARD B. (1991), « Existe-t-il un subjonctif en anglais contemporain ? », Cahiers de recherche en grammaire anglaise 5, 7-21.
- BINNICK R. (1991), Time and the Verb : A Guide to Tense and Aspect, Oxford (NY) : Oxford University Press.
- COMRIE B. (1985), Tense, Cambridge : Cambridge University Press.
- COMRIE B. (1986), “Tense in Indirect Speech”, Folia Linguistica 20, 265-296.
- DECLERCK R. (1986), “From Reichenbach (1947) to Comrie (1985) and beyond”, Lingua 70, 305-364.
- DECLERCK R. (1990), “Sequence of Tenses in English”, Folia Linguistica 24 (3/4), 513-544.
- DECLERCK R. (1991), Tense in English : its Structure and Use in Discourse, London : Routledge.
- DECLERCK R., REED S. & CAPPELLE B. (2006), The Grammar of the English Verb Phrase. Volume 1 : The Grammar of the English Tense System. A Comprehensive Analysis, Berlin/New York : Mouton de Gruyter.
- DOUAY C. (2009), « Would you vote forObama if he were white ? L’alternance were/was et la problématique de l’altérité », Sigma/Anglophonia 26, 247-266.
- DOWTY D. R. (1982), “Tenses, time adverbs, and compositional semantic theory”, Linguistics and Philosophy 5, 23-55.
- GENNARI S. (1999), “Tense, aktionsart and sequence of tense”, in F. Corblin, C. Dobrovie-Sorin & J.-M. Mandarin (eds), Empirical issues in Formal Syntax and Semantics 2, Bern : Peter Lang, 309-332.
- GIRARD G. (1742), Les vrais principes de la langue françoise, Paris : Le Breton.
- GRICE P. (1975), “Logic and conversation”, in P. Cole & J. Morgan (eds), Syntax and semantics 3 : Speech arts, New York : Academic Press, 41-58.
- HACKMACK S. (2001), “Reichenbach’s Theory of Tense and its Appication to English”. [http://www.fb10.uni-bremen.de/khwagner/verb/pdf/Reich.pdf]
- HORNSTEIN N. (1990), As time goes by : tense and universal grammar, Cambridge (MA) : MIT Press.
- KAMP H. & REYLE U. (1993), From discourse to logic, Dordrecht/London/Boston : Kluwer Academic Publisher.
- KLEIN W. (1994), Time in language, London : Routledge.
- LUHMANN N. (1995), Social Systems, Stanford : Stanford University Press.
- LYONS J. (1968), Introduction to Theoretical Linguistics, Cambridge : Cambridge University Press.
- MICHAELIS L. (2006), “Time and tense”, in B. Aarts & A. McMahon (eds), The Handbook of English Linguistics, Oxford : Blackwell, 220-243.
- PARTEE B. (1984), “Nominal and Temporal Anaphora”, Linguistics and Philosophy 7, 243-286.
- QUIRK R., GREENBAUM S., LEECH G.N. & SVARTVIK J. (1985), A Comprehensive Grammar of the English Language, London : Longman.
- REDDY M. (1993), “The Conduit Metaphor”, in A. Ortony (ed.), Metaphor and Thought, Cambridge : Cambridge University Press, 164-201.
- REICHENBACH H. (1947), Elements of Symbolic Logic, Berkeley (CA) : University of California Press.
- REICHENBACH H. (1956), The direction of time, Berkeley : University of California Press.
- ROULLAND D. (2010), « Préface », in G. Le Tallec-Lloret (éd.), La concordance des temps en espagnol moderne. Unité du signe, modes, subordination, Rennes : Presses Universitaires de Rennes, 7-10.
- SAUSSURE F. (DE) (1973), Cours de linguistique générale, Paris : Payot.
- SCHWER S. R. (2007), « Représentation mathématique du temps : après Reichenbach ». [http://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00132549/fr/]
- SCHWER S. R. (2009), « Représentation du Temps, relations temporelles et théories des temps verbaux » [http://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00403655/fr/]
- SWAN M. (20053), Practical English Usage, Oxford : Oxford University Press.
- VET C. (1980), Temps, aspects et adverbes de temps en français contemporain, Genève : Droz.
- VET C. (2007), “The descriptive inadequacy of Reichenbach’s tense system : a new proposal”, in L. de Saussure, J. Moeschler & G. Puskas (eds), Tense, Mood and Aspect : Theoretical and Descriptive Issues, Amsterdam/New York : Rodopi, 7-26.
- WILMET M. (1976), Études de morpho-syntaxe verbale, Paris : Klincksieck.
- WILMET M. (20033), Grammaire critique du français, Paris/Bruxelles : De Boeck & Duculot.
Mots-clés éditeurs : théorie interlocutive, temps relatif, contrefactuel, concordance des temps, temps absolu, t0, auto-référence
Mise en ligne 13/11/2013
https://doi.org/10.3917/lang.191.0095Notes
-
[1]
Voir Bernard (1991).
-
[2]
Voir, à propos de ce repère R, Schwer (2009) qui rappelle la filiation entre Port-Royal (1660), l’Abbé Girard (1742), Beauzée (1767), Reichenbach (1947), Vet (1980).
-
[3]
Wilmet (1976, 2003) développe un système à dédoublement (axe processuel + axe énonciatif, l’axe énonciatif « regardant » l’axe processuel).
-
[4]
Pour cette raison, l’auxiliaire de parfait have peut être employé pour sur-décaler temporellement un procès dans le passé dans certains cas. Mais le temps ne changera pas. Voir l’exemple (10).
-
[5]
Comparer en français : « il a dit qu’il avait faim / qu’il a faim » avec les mêmes implications.
-
[6]
La nuance évidentielle est discrète, mais immédiatement sensible.
-
[7]
Parmi les nombreuses études, voir celles de Binnick (1991), Comrie (1985), Dowty (1982), Hornstein (1990), Kamp & Reyle (1993), Klein (1994), Partee (1984). Discussions dans Declerck (1986), Hackmack (2001), Michaelis (2006), Schwer (2007).
-
[8]
“A reference to some point or period of time which cannot be identified except in terms of the zero-point of the utterance.” (Lyons, 1968 : 682)
-
[9]
Reichenbach (1947 : 288) se contente de noter comme fondement de sa théorie : “Since the number of tenses is obviously greater, we need a more complex interpretation” et cela indéfiniment, ce qui est à l’opposé d’un système qui doit, pour exister, se donner une frontière avec l’extérieur donc une limite. Cela dit la théorie a conduit à de nombreux raffinements pertinents (voir Gennari 1999, à propos des propriétés d’intervalle des aktionsarts statifs et non-statifs).
-
[10]
L’exemple de Reichenbach est “I had mailed the letter when John came and told me the news”, avec trois points R fusionnés.
-
[11]
Vet (2007) le définit pour sa part comme une « perspective ».
-
[12]
Partee (1984) insiste sur la possibilité (et le besoin) de permettre à R de s’actualiser (updating) au fil du texte en particulier en variant selon l’aktionsart des événements : un procès dynamique est inclus dans R, mais un état inclut R ce qui, par ailleurs, contribue à rendre R d’autant plus flou. Voir l’importante étude de Michaelis (2006) à ce propos.
-
[13]
C’est moi qui souligne.
-
[14]
“[...] there is no a priori reason why complex (multi-word) forms should not be considered to be tense forms, and the fact that English has two temporal perspectives reflects (or is reflected in) the fact that it has two sets of tenses, not that it has only two tenses” (Declerck, Reed & Cappelle, 2006 : 100). Les notions d’aspect et de mode sont dûment reconnues et définies par Declerck mais, par exemple, une forme de perfect est définie en termes de séquence (antériorité) et non d’aspect (op. cit. : 38).
-
[15]
Declerck, Reed & Cappelle (2006 : 102). Cf. chapitre 2.
-
[16]
Voir la différence entre les « T(ime)-relations » exprimées par des marques et les « W(orld)-relations » qui existent dans le monde et ne sont pas nécessairement représentées par des marques.
-
[17]
“Because the conditional tense expresses no more than that the situation time is T-posterior to an orientation time in a past domain, it leaves vague whether the situation time is W-anterior, W-simultaneous or W-posterior to t0.” (Declerck, Reed & Cappelle, 2006 : 450) (T-relations = relations temporelles établies par les temps, W-relations = relations établies par inférence du contexte linguistique et non linguistique, op. cit. : 121)
-
[18]
« La langue est une forme et non une substance. » (Saussure, 1973 : 169)
-
[19]
Je traduis l’expression anglaise self-reference, par souci de simplicité, par auto-référence, mais sui-référence serait plus exact.
-
[20]
Dans le cadre de la théorie générale des systèmes, Luhmann (1995) a pu ainsi écrire que « c’est la communication qui communique ».
-
[21]
Douay et moi-même utilisons le terme de « configurations » interlocutives.
-
[22]
La théorie interlocutive prévoit en réalité un troisième terme singulier qui est la forme pré-réplicative du système lui-même (pour les formes non finies, c’est l’infinitif en face des deux participes et pour les formes tensées, c’est l’impératif).
-
[23]
Le possible passage de was à were marque une sélection supplémentaire mais ne change rien à cela (Douay 2009).
-
[24]
J’emprunte le terme « transactionnel » à Francis Jacques.