Couverture de PSYE_522

Article de revue

L'adolescent transgresseur sexuel

Pages 309 à 338

Notes

  • [1]
    Psychiatre infanto-juvénile, Université catholique de Louvain, Service de psychiatrie infanto-juvénile des cliniques universitaires Saint-Luc et ssm Chapelle-aux-Champs, Bruxelles.
  • [2]
    Nous sommes conscients d’une part d’arbitraire dans cette distinction ; en effet, ce n’est pas tant l’acte qui signe le fonctionnement pathologique du sujet concerné que la manière dont s’organise et se déploie sa personnalité. Ainsi, certains comportements, considérés comme mineurs sur le plan pénal, sont perpétrés par des jeunes profondément perturbés.
  • [3]
    La cellule « Goupados » (18, rue Evers à 1000 Bruxelles), issue de l’équipe sos Enfants de l’ulb (Université libre de Bruxelles), a pour objectif de rencontrer chaque jeune de façon intense afin de réaliser une évaluation de sa personnalité et de proposer, ensuite, des pistes de travail spécifiques à la problématique de la délinquance sexuelle, dont celle d’intégrer un groupe thérapeutique.
  • [4]
    Sans avoir scellé les collaborations dans des conventions écrites qui risquent de « rigidifier » une stratégie de travail en réseau, des cliniciens d’entités différentes travaillent dans la même optique mais avec des mandats et des épistémologies distinctes. Ainsi, l’accompagnement « complet » inclut le passage du jeune, après une évaluation clinique, dans plusieurs « modules », c’est-à-dire qu’il rencontre un thérapeute individuel, est intégré dans une thérapie de groupe et participe à des entretiens de famille. Selon les situations et la discussion entre intervenants, certains jeunes ne suivront que l’un ou l’autre « module ».
  • [5]
    Partons du présupposé que le jeune a reconnu avoir transgressé sexuellement ; la reconnaissance peut être partielle voir même « minimaliste », pour autant que les éléments contextuels confortent que l’agression a bien été réalisée par l’adolescent en question.
  • [6]
    Dans le cas de ce dernier test, on évalue les capacités de tolérance et de contrôle au stress, le traitement des informations comme la médiation cognitive (la manière dont les informations visuelles sont traduites et interprétées) en se référant au jugement, à l’épreuve de réalité, l’idéation qui implique l’organisation d’un ensemble de représentations mentales ainsi que l’émotion, l’affectivité et la perception de soi et des relations interpersonnelles.
  • [7]
    Les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine ainsi que les anxiolytiques et les neuroleptiques, qui sont parfois utilisés dans une stratégie de prise en charge des auteurs d’agressions sexuelles, n’ont pas reçu l’amm (Autorisation de mise sur le marché).
  • [8]
    La différence de format est sensible car ces adolescents ne sont plus centrés sur le seul thérapeute de la rencontre individuelle.
  • [9]
    Par famille, nous entendons les parents et la fratrie ainsi que les membres proches et les substituts parentaux, vu la multiplicité des contextes familiaux. Ainsi, par exemple, il nous est arrivé de rencontrer un jeune avec son père et sa compagne étant donné qu’ils accueillaient exclusivement le garçon qui n’avait plus de contact avec sa mère biologique. Il peut également s’agir des grands-parents quand l’adolescent vit depuis longtemps chez eux, les parents ayant démissionné.

1Quand diverses études nous apprennent qu’un grand nombre d’abuseurs adultes ont commencé leur « carrière » à l’adolescence, que les adolescents sont impliqués dans la moitié des agressions sexuelles sur des enfants et dans près d’un tiers des viols de femmes adultes, nous sommes confortés dans le fait de porter attention aux jeunes qui transgressent dans le champ sexuel.

2Comme l’indique McKibben (2006), si les programmes spécifiques de traitement pour adolescents existent en Amérique du Nord depuis plusieurs dizaines d’années, ils suscitent toujours des réactions polarisées au sein des professionnels (Jacob, McKibben et Proulx, 1993). Les uns estiment qu’il faut éviter une radicalisation et une stigmatisation, appréhendant ces comportements comme épiphénomènes de l’adolescence, tandis que les autres optent pour une intervention rapide, afin d’éviter une cristallisation des préférences sexuelles déviantes, s’appuyant sur l’importance des données issues de la population adulte. L’absence de réponse facile et universelle à cette polarisation se complexifie par des aspects éthiques spécifiques à l’intervention en matière sexuelle auprès d’adolescents auteurs d’agression sexuelle.

3Les modèles cognitivo-comportementaux comme les théories psychodynamiques ont tenté de cerner les facteurs psychoaffectifs en jeu chez l’agresseur sexuel (McDougall, 1978, 1996 ; McKibben, 2006). On doit certainement également s’attendre à des avancées des neurosciences dans ce champ spécifique à la suite, par exemple, de la mise en évidence des liens entre neurones-miroirs et compétences sociales. Aujourd’hui, la plupart des cliniciens s’accordent pour développer des modèles de compréhension et de traitement intégrant les diverses épistémologies. Ainsi, sont pris en compte différents niveaux essentiels d’actions : neurologique, cognitif et conscient et enfin ceux des processus inconscients. Ces niveaux s’articulent à des formats d’accompagnement différenciés à savoir individuel, groupal et familial (de Becker, Hayez et Cabillau, 2000 ; de Becker, 2002, 2005).
Notre réflexion se centre sur ces jeunes âgés entre 11 et 17 ans, qui agissent délibérément une transgression sexuelle, seul ou en bande, sur des pairs, des enfants ou encore des adultes. Le point de départ des rencontres évaluatives, puis de traitement, consiste donc en un acte d’agression où le consentement de l’autre n’a pas été respecté. Nous nous situons clairement dans le registre de la pathologie de l’acte, par la transgression réalisée, en laissant de côté les jeux initiatiques, les « dérapages à deux », l’inceste fraternel [2]

4Se pencher sur la question des jeunes qui transgressent dans le champ sexuel, vise deux grandes polarités en termes de santés publique et mentale :

5

  • La première tente de rencontrer un jeune patient dans sa problématique en vue de l’aider, de le soigner et de le réhabiliter à ses propres yeux et à ceux des autres. Soulignons que la grande majorité de ces adolescents ne reçoit aucun accompagnement, ni traitement, étant donné que les faits transgressifs ne sont généralement pas connus en dehors de la famille. Méfiante par rapport à toute démarche extérieure, n’en reconnaissant que peu de retombées positives, celle-ci soutient rarement une initiative de ce type ; une autorité mandante s’avère dès lors plus que nécessaire.
  • La seconde comporte une dimension de préventions secondaire et tertiaire, tant dans l’intérêt des victimes que de la société. En effet, un accompagnement spécialisé de ces adolescents réduit le risque de récidives.
En conséquence, négliger d’intervenir à ce niveau, conduit à favoriser l’émergence de ce que certains appellent une « disposition pédophilique » (Forget, 2008). Laisser un jeune livré à lui-même et surtout à sa pulsionnalité, ne peut que l’inciter à réitérer l’acte et à y consacrer une grande part d’énergie psychique.
Nous nous inscrivons dès lors dans les lignes de recommandation établies en 1966 par Shoor et al. qui définissaient la nécessité que ces jeunes fassent l’objet d’une évaluation et d’un traitement spécialisés. L’auteur mettait en garde contre une banalisation trop rapide des agressions sexuelles réalisées par les adolescents, qu’il avait diagnostiqués comme immatures sociaux et sexuels. Plus de quarante ans plus tard, cette étude est toujours d’actualité.

Quelques repères d’ordre épidémiologique

6Les considérations qui figurent ici sont issues de notre pratique, croisées principalement à celles d’une initiative centrée sur la thérapie de groupe [3], et confrontées aux constatations de différents travaux scientifiques. Ces données sont à lire comme des indicateurs de tendance, étant donné qu’à l’adolescence certainement, il n’est guère aisé de lever le voile de l’intime, sexuel en l’occurrence. Il existe ce que d’aucuns nommeraient « des chiffres noirs ».

7Qu’apprenons-nous ? Les faits transgressifs connaissent leur acmé aux alentours de quatorze ans. La moitié de ces jeunes vivent dans leur famille nucléaire. Seulement un tiers de ceux-ci ne présentent pas de retard d’apprentissage scolaire. Si deux tiers ont commis des faits sur une seule victime connue, un tiers des jeunes ont agressé plusieurs victimes avec une moyenne de quatre victimes par adolescent. La majorité des faits abusifs se réalisent au sein des cercles familiaux et sociaux de proximité. Environ sept jeunes sur dix font état d’événements traumatiques importants et répétés durant leur enfance.

8Des auteurs, comme Awad et Saunders (1984), Barudy (1997), Vizard et al. (1995), observent qu’à la différence des autres formes de délinquance juvénile, les adolescents qui transgressent sexuellement n’appartiennent à aucun groupe homogène précis ou significatif. On en retrouve donc dans toutes les couches de la population. Les mêmes auteurs estiment que la plupart de ces adolescents ont connu une histoire d’abus physique ou sexuel et proviennent de milieux familiaux violents où les parents portent en eux une victimisation liée à leur propre enfance. Ainsi, nombre de ces jeunes présentent des carences psychosociales et affectives à différents niveaux ainsi qu’une inadaptation aux normes sociales et scolaires.

9Une caractéristique attire notre attention : l’appartenance socioculturelle. En effet, dans la population rencontrée, on relève des différences entre les jeunes issus de la Communauté européenne et ceux provenant d’une autre culture. Ainsi, la victime n’est pratiquement jamais masculine dans le cas de faits réalisés par les jeunes issus de la Communauté extra-européenne. Ceux provenant de la Communauté européenne agressent préférentiellement des enfants, c’est-à-dire des victimes d’âge développemental nettement différent du leur. La grande majorité de ces mêmes jeunes commettent l’agression de manière solitaire alors que ceux issus d’autres régions que la Communauté européenne agissent davantage en bande. Les jeunes issus de la première catégorie agressent davantage les victimes au sein de la famille alors que les jeunes de la seconde privilégient les cibles plus éloignées sur le plan affectif.
Retenons donc, que les adolescents issus de la Communauté européenne commettent isolément des faits dans le cercle familial sur des victimes plus jeunes qu’eux, tandis que ceux d’origine extra-européenne commettent essentiellement des faits extra-familiaux, en bandes, sur des jeunes proches en âge et de sexe féminin.
Sans y mettre de jugement de valeur ou de connotation de gravité, on peut considérer l’hypothèse que l’agir transgressif sexuel serait en lien avec une problématique interpersonnelle pour les jeunes issus de la Communauté extra-européenne et que la transgression s’étayerait sur une problématique intra-psychique chez ceux provenant de la Communauté européenne.

Tentatives de compréhension

L’agir des adolescents dans une société donnée

10Les comportements symptomatiques à l’adolescence paraissent plus actifs voire plus aigus qu’à d’autres périodes de l’existence, en se situant davantage dans le champ des agirs, soit retournés contre soi-même, soit à l’égard de l’autre (Forget, 2008 ; Tyrode et Bourcet, 2000).

11Comme le souligne Raoult (2008), la lecture, la compréhension de l’agir sont marquées par diverses terminologies comme le passage à l’acte, en acte, par acte, la mise en acte, le recours à l’acte, l’acting-in, l’acting-out… Étant donné que celui-ci relève d’enjeux et de niveaux psychiques hétérogènes, l’agir se distribue sur une continuum de significations, pouvant se situer dans une adresse à un tiers, mettre en scène un conflit interne, sauvegarder le sentiment d’existence sur un plan narcissique.

12L’adolescence est par définition une période où l’agressivité dans ses fonctions créatrices et destructrices est à la fois moteur et défi. Durant ce temps de passage, le jeune doit négocier avec lui-même, sa famille et les autres. Étape de transformations multiples, de reviviscence des conflits œdipiens, de recherche d’identité, l’adolescence voit la sexualité faire irruption dans le réel du corps. Cette émergence du réel, l’adolescent doit l’articuler, l’assimiler aux différents aspects de son identité et de sa personnalité.

13Lemitre et Coutanceau (2006) considèrent que l’exposition du soi intime peut actualiser ce qu’ils nomment un « conflit d’extériorité », que l’agression sexuelle tente de gérer en faisant l’économie d’une rencontre authentique avec l’autre. L’angoisse du monde extérieur est sans doute à relier à un fonctionnement caduque de l’interface pare-excitant ; un trouble de la « transitionalité » confronte l’adolescent à une réalité sensorielle trop excitante.

14L’identité, qui pour une part est inconsciente, se façonne progressivement et se constitue dans le recours à l’autre et en l’occurrence dans le consentement aux apprentissages. Celui-ci repose sur le respect des marques d’autorité reconnues à l’adulte, c’est-à-dire que le sujet, durant l’enfance, accepte de renoncer à sa jouissance pulsionnelle immédiate et d’en passer par les exigences et les attentes de l’adulte ; en d’autres termes, il fait passer la satisfaction de l’adulte avant la sienne.

15À l’adolescence, le surgissement de la sexualité dans la réalité ne permet plus au jeune de se référer simplement à l’autorité de l’adulte. L’agir prend alors fréquemment la forme d’un acting-out comme remise en cause de cette autorité, l’acte possédant une adresse. L’acting-out se déroule dans un contexte qui peut être mis en lien avec l’histoire du sujet, tandis que le passage à l’acte est en soi une action soudaine, brute, un point de franchissement dénué de réflexion préalable. Ici, la valeur signifiante reste opaque à son auteur. Cette précision est intéressante car elle relie ce que nous disent les jeunes qui transgressent quand ils confient être privés de tout moyen de contrôle et d’assumer dès lors une part de responsabilité ; il arrive qu’un sujet soit exclu de son propre passage à l’acte.

16Par ailleurs, Wildlöcher (2006) opte pour l’expression « mise en acte » plutôt que « passage à l’acte », étant donné que le mot « passage » signifie qu’il y a un élément qui est déplacé. En réalité, il y a une expression « agie » qui, au lieu d’être traitée dans des élaborations secondaires, vient occuper la scène de la réalité matérielle. La pression de l’inconscient, constituant la puissance du passage à l’acte, représente l’objet central du traitement, pour peu qu’il soit accessible.

17On considère parfois que le comportement sexuel non adapté traduit l’intégration par le jeune de valeurs sociofamiliales faussées, dans lesquelles la notion d’interdit n’a pas sa place. Effectivement, chez nombre d’entre eux, nous constatons la présence d’un sens moral déficient où les concepts de bien et de mal se confondent.
Rappelons aussi que le sens d’une conduite sexuelle repose avant tout sur la perception que le sujet a de lui-même et de la relation à l’autre. Se pose alors la question de la frontière entre le normal et ce qui relève de l’abusif. Toute société a ses références ; dans notre communauté, il y a consensus pour qualifier la relation sexuelle entre un adulte et un enfant comme une relation inégalitaire, où l’enfant est objectivé au bénéfice de l’adulte qui chercherait dans ce contact une gratification personnelle. L’abus sexuel se réfère à la question du consentement dont l’absence définit l’abus. L’inceste, en revanche, renvoie à la relation de parenté qui détermine les partenariats socialement permis et/ou interdits. Il peut donc y avoir inceste sans qu’il y ait le moindre abus sexuel, car cette distinction se réfère à des systèmes de normes distincts. L’abus sexuel se définit en fonction de ce que Foucault (1976) nomme « le dispositif de sexualité », gérant le désir et le pouvoir, alors que l’inceste renvoie au dispositif d’alliance qui organise les règles et leur transmission.

18Le consentement est donc l’élément central (mais pas unique) sur lequel s’établit un jugement de conformité ou, à l’opposé, de déviance. Dans une perspective sociologique, les travaux de Collart (2005) donnent un éclaircissement pertinent sur les liens entre la personne abusive et les normes sociales ; trois registres sont ainsi proposés pour comprendre et analyser les situations :

  • celui de la personne dans ses rapports à la sexualité ; dans ce registre, le jeune évoque les hypothèses explicatives à l’égard de ses comportements, les éventuels éléments de son histoire personnelle qu’il met en relation avec l’agression sexuelle ;
  • celui de la société qui définit la position que prend le jeune par rapport au cadre social normatif, avec ce qu’il accepte et rejette ;
  • celui de la dyade interactionnelle entre les partenaires ; le jeune est ici invité à parler de la manière dont il qualifie l’interaction sexuelle, ce qu’il dit de l’autre, la victime en l’occurrence.
Par ailleurs, Collart distingue quatre catégories basées sur différentes logiques d’intégration du lien social : la logique de contestation du cadre social normatif, la logique du jeu avec la limite, la logique de sous-culture, et la logique de mise entre parenthèses de la norme. Notre expérience nous amène certes à retrouver des adolescents dans les différentes catégories, mais avec une majorité de ceux-ci dans une logique de mise entre parenthèses de la norme. En effet, le fonctionnement et le raisonnement psychique sont circonstanciels dans le sens où le jeune qui s’inscrit dans cette logique considère exclusivement ses propres besoins comme guides de ses comportements et dans ce sens, ne reconnaît pas ou disqualifie le cadre social normatif. L’exploration de ces items apporte des éléments complémentaires utiles à la compréhension de l’agir sexuel.

La transgression sexuelle à l’adolescence

19Dans les épistémologies psychodynamiques, nous constatons la mise en évidence d’éléments nous éclairant sur la compréhension de l’agir transgressif sexuel. Autant il y a convergence de regards et d’analyse pour certains paramètres, autant les auteurs se différencient pour d’autres, avançant des aspects qui peuvent paraître contradictoires. Pour notre part, les différences rendent compte de la complexité et de l’hétérogénéité des tableaux symptomatologiques et des personnalités en jeu. De plus, les populations étudiées qui soustendent les réflexions théorico-cliniques sont variées et issues d’origines socioculturelles diverses.

20Il est intéressant de partir des travaux de Balier et Bouchet-Kervella (2008), auteurs reconnus pour avoir étudié le comportement sexuel déviant, dont ils estiment que les formes sont infiniment diverses et apparaissent au sein d’organisations extrêmement variées ; le type d’actes commis ne suffit en aucun cas à lui seul à inférer la structure mentale sous-jacente. Ils montrent qu’une motivation qui pousse à l’acte abusif peut être comprise comme une manière de se défendre contre l’angoisse mortifère née d’un traumatisme subi pendant la petite enfance. Dans ce sens, le passage à l’acte ne correspond pas à la recherche d’une gratification sexuelle, mais à une construction défensive pour se sauver d’un débordement psychique. Comment le sujet intègre ces traumatismes précoces ? Balier (1996) distingue passage à l’acte et recours à l’acte, quant à la manière dont le sujet traite les éléments traumatiques en les intégrant à sa sexualité ; il tente de les maîtriser soit dans la répétition, soit en luttant contre le retour des traces traumatiques, non mentalisés et clivés au risque d’un appauvrissement du Moi.

21Dans les formes de passages à l’acte, l’auteur retrouve un vécu profondément dépressif avec insatisfaction dans la relation à l’autre, et l’autre sexe en particulier. L’histoire indique la présence d’un environnement primaire participant à la mise en place des premiers processus d’intrication pulsionnelle. Toutefois, ces jeunes ont connu des retraits brusques d’investissement, essentiellement maternels, conjugués à un manque d’investissement par le père. L’enfant, privé trop tôt du soutien affectif et narcissique normalement assuré par les figures parentales, s’est trouvé considérablement fragilisé et s’est donc accroché à des fixations prégénitales. On peut alors penser que l’adolescent dénie l’insupportable désinvestissement de ses parents en prenant un enfant comme partenaire, assurant une fonction de double externe à valeur fétichique (avec lequel il espère une pseudo-réciprocité).

22Balier situe le recours à l’acte du côté de la perversion, voire de la psychose. Ces jeunes peuvent connaître une vie sociale bien organisée, reflet de l’existence d’un clivage radical du Moi. Le recours à l’acte a pour signification d’échapper à une menace de disparition de soi-même résultant d’un traumatisme vécu à un âge très précoce, dénué de traces conscientes. Se met alors en place le couple anéantissement/toute-puissance qui représente l’enjeu principal de l’acte sexuel transgressif (Hurni et Stoll, 1996).

23Comme dans la première modalité réactionnelle, la position du père est lointaine, voire absente, ou encore hypervalorisée tout en étant inaccessible ; il y a peu de possibilités de véritable identification à ce père distant. Sans discerner la tiercéité du père et en l’absence de représentation différenciée, le risque est grand de disparaître dans le vécu maternel.

24Ainsi, que ce soit du côté du passage à l’acte ou du recours à l’acte, on observe des traumatismes narcissiques de base ; l’enfant s’est vu imposer des pertes trop soudaines ou trop précoces dans les échanges narcissiques primaires. Le traumatisme est aussi renforcé par le sentiment d’avoir été un enfant indésirable. De la sorte, comme le montrent les travaux de Roman (2000), le sujet recourt préférentiellement au clivage du Moi avec présence de déni et d’affects dépressifs. Dans les situations où il y a attrait pour un plus jeune, la place de la rencontre avec celui-ci indique un surinvestissement libidinal, à la fois érotique et narcissique, l’autre étant perçu comme un double externe idéalisé.

25Pour nombre d’auteurs, le comportement déviant des adolescents transgresseurs sexuels s’inscrit dans une psychopathologie franche (Becker et al., 1991 ; Smallbone et Dadds, 2000 ; Tyrode et Bourcet, 2000). Pour d’autres, l’agir transgressif grave dans la réalité des faits peut traduire des aléas de développement, voire une crise d’adolescence (Greco et Talgorn, 2000). Habituellement, la personnalité de ces jeunes est marquée par la rigidité et s’organise autour de traits dépressifs ou phobo-obsessionnels. Certains aspects de leur fonctionnement psychique sont retrouvés dans bien des études, comme l’immaturité psychoaffective, une agressivité mal gérée, une contention émotionnelle massive (Haesevoets, 2001). Lemitre et Coutanceau (2006) considèrent que les angoisses corporelles liées à une représentation du corps mal structurée traduisent des enveloppes psychiques fragiles qui, en conséquence, assurent mal leurs fonctions de contenance ou de pare-excitation.

26Comme l’adolescence représente une période de remaniement des repères internes du sujet, celui-ci est plus susceptible de réagir aux stimulations par des troubles plus ou moins intenses. Par-delà les grandes différences observées sur le plan clinique, on constate régulièrement l’insuffisance des défenses mentales qui favorise les comportements externalisés pour tenter d’évacuer les tensions psychiques pénibles ou tenter de restaurer un Moi idéal, abîmé par ailleurs. On retrouve également des troubles plus ou moins importants du narcissisme associés à une fragilisation du sentiment de continuité identitaire, une menace d’effondrement dépressif. Ces états peuvent être reliés à l’absence d’imagos parentales dont la construction a été entravée par divers traumatismes. Pour Laforest et Paradis (1990), la plupart de ces jeunes inhibés, isolés, solitaires, présentent une faiblesse dans l’estime et l’affirmation de soi.

27Vizard, Munck, et Misch (1995) mettent en évidence, par une revue d’études sur les abus sexuels commis par des adolescents, que leurs comportements recouvrent les mêmes formes que chez les auteurs adultes. Mais, si les faits ont la même traduction matérielle, leur interprétation et signification doivent intégrer les dimensions développementales propres à l’adolescence.
L’étiologie d’une conduite sexuelle déviante est complexe, hétérogène et demande de considérer certes le jeune sujet mais également son environnement familial qui, à cet âge de la vie, garde toute son importance en termes de supports référentiels, de modèles identificatoires. C’est ainsi que des hypothèses ont été avancées entre transgression sexuelle et théorie de l’attachement d’une part, et transmission intergénérationnelle d’autre part (Marshall, 1994).
Malgré un engouement certain pour ces perspectives, il est délicat de reconnaître aujourd’hui d’autres éléments que la conceptualisation proposée par Lafortune (1996, 2001, 2006) relative à la transmission intergénérationnelle d’une problématique d’agression sexuelle chez des adolescents. L’auteur a ainsi mis en évidence des « voies de transmission par l’entremise de traumatismes repérables, d’une relation captive avec la mère, de l’identification de l’adolescent agresseur sexuel à des figures perverses et du secret du sexuel » (Tardif et al., 2005, p. 62).
Tardif et al. poursuivent en estimant qu’il existe deux trajectoires principales de transmission : « La première, que nous qualifions de transmission directe, aura pour caractéristique de transférer des éléments de victimisation sexuelle des parents aux enfants. La deuxième est plutôt une transmission indirecte : il n’y a pas de trace de victimisation des parents aux enfants, mais plutôt la présence d’un rapport de domination/soumission dans le lien d’attachement qui aurait été sexualisé par l’adolescent. Ainsi, nous supposons que le poids du facteur de victimisation des parents affectera la relation d’attachement et déterminera le mode de transmission directe chez un plus grand nombre d’adolescents qui ont commis des agressions sexuelles intrafamiliales. Dans le cas des parents non victimisés, nous croyons que le poids des perturbations de la relation d’attachement sera axé sur un mode de domination/soumission (sans aspect sexuel). Ce mode relationnel de domination/soumission envers un autre enfant sera recherché, puis sexualisé par un grand nombre d’adolescents qui ont commis des agressions sexuelles extrafamiliales » (ibid.).

Modalités thérapeutiques

28Nous développons notre réflexion à propos de l’accompagnement de jeunes ayant posé des actes de transgression dans le champ sexuel et pour lesquels des éléments psychopathologiques évoqués précédemment sont présents.

Le cadre

29Différentes approches se conçoivent, ne s’excluant nullement les unes les autres, mais constituant davantage une enveloppe partenariale (de Becker, 2005). La description qui suit se base sur l’expérience de collaborations entre services qui offrent des soins complémentaires ; les jeunes sont ainsi rencontrés par des cliniciens d’entités distinctes. Des concertations régulières maintiennent la cohérence des projets spécifiques [4].

30Parler de traitement ne prend sens qu’après avoir abordé la question du cadre de l’accompagnement. Elle renvoie d’emblée à deux notions, celle liée à la loi et à ses modalités d’expression et d’application et celle constituée par le cadre thérapeutique lui-même, englobant l’ensemble des interventions cliniques. Selon les pays et les législations, les dépositaires du cadre légal ne sont pas automatiquement représentés par les professionnels de la justice. Le rappel de la loi n’est d’ailleurs pas l’exclusivité de la parole du magistrat ou de l’officier de police. Les cliniciens peuvent et doivent aussi assurer cette fonction d’énonciation de la transgression des limites, en étant attentifs à clarifier les mandats pour éviter les confusions de rôle. Dans cette dimension, sont compris les aspects de sanction négative que des actes imposés par le concret de la vie viennent confirmer.

31L’expérience indique que plus les faits se sont passés dans le cercle familial ou social proche, plus les protagonistes (jeune, parents) privilégient l’aide médico-psychologique en évitant toute « judiciarisation ». Les cliniciens eux-mêmes préfèrent en général cette option, ne dégageant pas les bénéfices d’une ouverture vers le sociojudiciaire. Mais, maîtrisent-ils tous les enjeux ainsi que les apports éventuels d’une autre instance ? Par ailleurs, plus la distance affective entre l’adolescent transgresseur et la victime est grande, plus la situation sera « judiciarisée ».

32Soulignons également que si les cliniciens, s’appuyant sur des éléments valables, décident de faire appel aux autorités judiciaires contre l’avis de la famille, celle-ci se retournera habituellement pour protéger « son jeune »…, et elle-même !
Quant au cadre thérapeutique, il regroupe différents niveaux d’action, dont le premier consiste à faire le point, c’est-à-dire à évaluer, à poser un diagnostic.

L’évaluation

33Une évaluation clinique ne vise pas tant à appréhender la matérialité des faits que de comprendre l’implication des personnes concernées [5] ; elle comporte d’emblée une intention thérapeutique. Cette évaluation poursuit plusieurs types d’objectifs. S’il y a lieu de situer le jeune par rapport à un système de classification des troubles mentaux, comme le dsm IV-tr ou la cim-10, poser un diagnostic implique d’identifier les facteurs passés et présents liés à la transgression ; il s’agit d’attribuer un sens au passage à l’acte et d’établir des liens éventuels entre différents aspects évoqués par le jeune. Les objectifs thérapeutiques de cette évaluation consistent, à partir de l’identification des déficits liés à la transgression sexuelle, à proposer un accompagnement adapté. Dans certaines circonstances, cette évaluation comporte un volet administratif lorsqu’elle inclut la rédaction d’un rapport destiné à éclairer un tiers ou un mandant. Giovannangeli (2000) souligne que l’évaluation doit pouvoir également répondre aux questions liées à la prévention de la récidive et donc aux aspects de pronostic quant à la dangerosité du jeune sujet.

34À partir d’une compréhension dynamique intrapersonnelle et afin de construire une thérapie adaptée et une mise en place d’un programme de gestion du risque, Clipson (2003) propose différentes composantes dans l’évaluation [9]. De manière schématique, l’auteur est attentif :

  • aux faits d’agression sexuelle ; celle-ci peut être explorée avec précision car les auteurs ont souvent tendance à minimiser, à nier ou à présenter une distorsion cognitive. On investigue également les pensées du jeune (insight) sur la chaîne de justification et de rationalisation qui ont conduit à l’acte. Il y a lieu d’être particulièrement prudent par rapport aux attitudes de manipulation ou de menace du jeune ;
  • à l’empathie à l’égard des victimes ; il y a lieu ici de déterminer le type de relation que l’agresseur pense avoir avec la victime (comment perçoit-il cette relation ?). On interroge ce que le jeune pense de l’expérience de la victime, pendant et après l’agression ;
  • à l’histoire personnelle et familiale : on explore avec le jeune la composition de sa famille, les mythes fondateurs, les liens et les enjeux relationnels. Les antécédents de violence, de maltraitance doivent être recherchés (victimisation). Sont abordés également les éventuels avatars de développement, les problèmes émotionnels et de comportement durant l’enfance ainsi que le parcours scolaire ;
  • à la socialisation, en estimant avec le jeune les types de relations qu’il entretient ;
  • à son histoire sexuelle : cette étape explore les aspects liés au développement psycho-sexuel du jeune avec les comportements, les fantasmes, les préférences… Elle inclut les éventuelles expériences dans l’enfance, les messages que le jeune a reçus de la part des adultes et des parents en l’occurrence ;
  • aux antécédents médicaux personnels et familiaux, en précisant les pathologies importantes, particulièrement celles ayant causé des lésions cérébrales ainsi que toutes les incapacités physiques potentielles du jeune, les processus de consommation éventuelle d’alcool, de substance psychoactive, de médicaments. Dans cet item, on examine l’histoire des éventuels symptômes psychiatriques des membres de la famille et leur traitement corollaire ;
  • à la prévention à la récidive ; cette étape évalue l’existence de tout traitement ancien ou en court, en déterminant les caractères et contenu de l’accompagnement thérapeutique. Ici, on invite le jeune à proposer les moyens qu’il compte mettre en œuvre pour ne pas récidiver et s’il se sent prêt à s’impliquer activement dans un traitement. On aborde également la manière dont il compte répondre à ses besoins sexuels dans l’avenir.
Ce canevas qui reprend un processus d’anamnèse spécialisé connaît différentes adaptations. L’évaluation demandera plusieurs unités de temps ; pour l’adolescent, il s’agit souvent des premières occasions de parler de lui à travers une problématique. Ainsi, de façon très générale, il est invité à évoquer le plus honnêtement et clairement possible ce qu’il a posé comme acte, avec les interrogations éventuelles qu’il se pose ainsi que les différentes difficultés qu’il rencontre ou qu’il a rencontrées dans son existence.

35La manière dont il va réagir à cette invitation de remise en question et au travail d’introspection constitue un élément déterminant pour l’éventuelle phase thérapeutique qui s’en suivra.
Si, dans l’absolu, l’évaluation représente la clé de voûte qui définit les indications thérapeutiques, elle doit intégrer la dimension développementale de l’adolescence aux modèles cliniques établis auprès des délinquants sexuels adultes. Par définition, ceux-ci manifestent une symptomatologie plus enkystée et possèdent des traits de personnalité plus affirmés que ceux des adolescents. De plus, chaque sujet, quel que soit son âge, ne procède pas suivant le même modus operandi et seule une variété de paramètres interagissant entre eux peut expliquer l’élaboration et l’aboutissement d’une agression sexuelle. Ainsi, s’il est utile de s’appuyer sur l’un ou l’autre canevas d’évaluation, il y a lieu de considérer tous les aspects du comportement et du fonctionnement psychique du jeune.

— Les tests psychologiques

36À côté des entretiens cliniques, d’anamnèse personnelle et sociofamiliale, prend place une approche par certains tests psychologiques.

37Les épreuves projectives peuvent être utilisées pour étudier le fonctionnement mental des jeunes auteurs d’agressions sexuelles. Elles permettent également d’évaluer leurs traits de personnalité en estimant l’importance des problématiques agressives, narcissiques et sexuelles. C’est essentiellement le tat (Thematic Apperception Test) et le Rorschach qui sont utilisés [6]. Lafortune (2006), à partir d’une étude de résultats de délinquants sexuels adultes, a confirmé les éléments mis en évidence par ailleurs : présence d’une capacité d’attachement réduite, vulnérabilité narcissique, représentations immatures de soi et d’autrui, hostilité marquée, manque d’empathie et mauvaise épreuve de la réalité dans des contextes interpersonnels.

38Une remarque s’impose par rapport à ces tests projectifs prenant place dans une évaluation clinique d’auteur d’agression sexuelle. En effet, idéalement, l’administration du Rorschach devrait survenir à un temps propice où le sujet se dit prêt à s’interroger sur lui-même ; il y a donc lieu de proposer la passation de ces tests à un moment suffisamment opportun dans l’évaluation pour que les éléments recueillis soient pertinents (évaluation des ressources que le jeune peut mobiliser).

39Il existe d’autres tests qui approchent les troubles de la personnalité comme le mmpi qui, à côté d’échelles cliniques classiques, retient 15 échelles de contenu spécifique aux adolescents. Le mmpi, qui est l’outil d’évaluation de la personnalité le plus utilisé par les experts en Europe, se fonde sur une conception dimensionnelle de l’approche de la personnalité et non pas une conception catégorielle. Ainsi, ici, au lieu de juxtaposer des catégories de trouble à un sujet, celui-ci est décrit selon des traits de personnalité. Développé en Amérique du Nord (Canada), le maspaq (questionnaire de mesure de l’adaptation sociale et personnelle) appréhende la perception, par le jeune, de sa situation actuelle à travers les dimensions de sa vie personnelle et sociale ; la régulation familiale, les capacités psychosociales, les valeurs et les croyances du jeune sont ainsi approchées. D’autres tests existent et sont de plus en plus utilisés comme celui qui évalue la psychopathie chez les auteurs d’agressions sexuelles (le pcl-r), des tests spécifiquement centrés sur l’évaluation du déni ou encore le test de frustration de Rozensweig, qui constitue un test projectif restreint destiné à montrer les types de réactions aux différents stress de la vie quotidienne. En reliant le passage à l’acte sexuel à un état de frustration et/ou d’humiliation, il est intéressant d’explorer comment l’adolescent déploie ses ressources et sa réactivité en pareille circonstance. Existent également l’échelle des sensations de Zuckerman et celle d’alexithymie de Toronto. On peut encore évaluer les capacités d’empathie ainsi que la sphère psychosexuelle chez l’auteur d’agressions sexuelles, avec, par exemple, le « Multiphasic Sex Inventory » (msi), instrument qui est standardisé pour les adolescents (Pham, 2006).

40Comme nous l’avons évoqué plus haut, les affects dépressifs prennent régulièrement place dans l’économie de l’auteur d’agression sexuelle. Il peut dès lors s’avérer utile de procéder à une mesure d’indices de dépression en utilisant l’inventaire de dépression de Beck, en complément à l’entretien systématique.

41Quant à l’évaluation phallométrique (pléthysmographie pénienne), si elle est toujours utilisée pour les délinquants sexuels adultes, nous n’avons pas connaissance d’études de validation et de fidélité de l’outil pour la tranche d’âge des adolescents.

42Parmi les tests d’évaluation, certains sont centrés sur la prédiction de la réitération d’un passage à l’acte. Si de nombreuses échelles ont été élaborées dans l’objectif de prédire le risque de récidive, aucune d’entre elles ne s’est réellement imposée.
À côté des tests psychoaffectifs, il est souvent utile de procéder à une évaluation de l’intelligence en rappelant qu’il n’est pas rare de constater combien certains jeunes restent fixés à des modalités de pensée opératoire, sans accéder aux raisonnements hypothético-déductifs. Dès lors, des notions comme la réciprocité font défaut à côté de réelles difficultés d’élaboration.
L’évaluation centrée sur l’adolescent ne suffit pas. Elle doit nécessairement explorer le contexte sociofamilial dans lequel celui-ci est ancré. S’il est classique d’entendre la présence d’éléments de dysfonctionnement familial, certainement dans les situations d’agressions intrafamiliales et d’incestes fraternels, notre expérience nous incite à la prudence. Loin de vouloir stigmatiser le jeune, de « pathologiser sa déviance », nous rencontrons des constellations et dynamiques familiales très diverses allant des plus chaotiques aux relativement « normales ». La transgression sexuelle peut signifier un signal d’alerte tout comme elle peut correspondre à une perturbation psychologique s’inscrivant dans des troubles familiaux sévères.

Le traitement

43Après l’évaluation, la grande majorité des jeunes patients est orientée vers une thérapie incluant une prise en charge individuelle, de groupe et familiale ; un traitement chimiothérapique est rarement retenu (Haesevoets, 1997 ; Smith et coll., 2005). Une précision s’impose par rapport à ce dernier aspect. En effet, le niveau neurologique ne doit certainement pas être négligé. D’une façon générale, un médicament psychotrope infère une relative sédation de la tendance à l’acte pouvant également faciliter une approche psychologique [7]. En revanche, les médicaments de type antiandrogène et les analogues de la GnRH qui sont, dans certaines situations, utilisés dans la population délinquante adulte, ne sont pas prescrits aux adolescents étant donné leurs effets secondaires.

44C’est donc essentiellement au niveau des processus conscients et inconscients que l’on conçoit l’accompagnement de ces jeunes transgresseurs.

45À la suite d’Hamon (1998, 1999) et Ciavaldini (1999, 2001), l’intention générale du traitement consiste à responsabiliser, tout en mobilisant, autant que faire se peut, des valeurs comme la réciprocité et l’autonomisation.

— Les rencontres de parole individuelles — d’inspiration analytique

46Le processus thérapeutique vise à appréhender, sinon une souffrance, du moins les processus qui sous-tendent l’acte dans la perspective de permettre au jeune sujet de se positionner différemment entre autres dans le champ relationnel. Entreprendre une thérapeutique des transgressions sexuelles, c’est se confronter bien souvent au clivage du Moi. Nombre de ces adolescents présentent des distorsions cognitives dans le sens qu’ils sont convaincus du consentement, voire même d’une demande active de la part de la victime. Ils évoquent également un plaisir réciproque éprouvé dans les échanges affectifs et érotiques.

47Cette démarche introspective vise aussi à mettre en évidence la nature de certaines pressions précipitantes se situant dans l’histoire de l’adolescent. On explore également les mécanismes défensifs et d’identification ainsi que des liens d’attachement. Comme évoqué plus haut, sont habituellement mis en évidence des zones conflictuelles, des carences, des frustrations, ainsi que des antécédents de maltraitance. Le jeune peut, par exemple, s’identifier en partie à des personnages sombres de son histoire et présenter des traits pervers, inscrits en lui comme des points de fixation.

48Comme dans toute psychothérapie, nous estimons que rouvrir ses anciennes blessures, en parler, se sentir accueilli quand on les évoque, amène à une plus grande sérénité, et à ce que les tensions qui en résultent s’atténuent. Aborder dans un cadre sécurisé des aspects existentiels et affectifs offre au jeune des perspectives en termes de prise de conscience, d’appropriation de son histoire et de responsabilisation. Développer une sensibilité aux conséquences d’un acte sur soi et sur l’autre et comprendre les mécanismes psychoaffectifs liés à certains processus, comme l’identification de fantasmes spécifiques, participent à l’humanisation. Ainsi, ces rencontres individuelles proposent, outre une reconstruction sur le plan narcissique, le développement de capacités empathiques.

49Si, avec le temps, beaucoup de jeunes concèdent à une mise au travail dans ce face à face où ils acceptent d’aborder leurs failles, certains ne peuvent entreprendre une telle démarche, cadenassés qu’ils sont dans et par leurs mécanismes psychiques et/ou par leurs limitations, ainsi que par l’angoisse corollaire à toute remise en question.
S’écartant du modèle analytique classique, l’approche proposée par Frenken (1994) intègre une dimension cognitivo-behavioriste et un travail d’introspection dans l’accompagnement thérapeutique.

— La thérapie de groupe

50Inscrit de longue date dans les programmes d’accompagnement en Amérique du Nord, le groupe thérapeutique comporte des finalités sur les plans introspectif et éducatif ; il vise, entre autres, la conscientisation et la restructuration cognitive (Calicis et Mertens, 2008).

51Le travail en groupe, qui a une fonction de tiers mais également de contenant humanisant et soutenant, vise à comprendre et à changer. L’exploration de chacune des histoires et cultures personnelles des jeunes permet progressivement de saisir ce qui a permis la transgression sexuelle. En effet, un certain nombre estime que la transgression sexuelle leur est « tombée dessus, par hasard ». Ils établissent spontanément peu de liens entre des faits de leur passé et les transgressions qu’ils ont réalisées.

52Le groupe est un dispositif intéressant pour ce type de problématique où la honte et l’angoisse sont très présentes. Parler de faits transgressifs sexuels semble un peu moins hasardeux dans le cadre de rencontres avec des pairs qui ont posé des actes semblables, étant entraînés par les autres jeunes du groupe (Smith et Petibon, 2005).

53L’encadrement que propose un groupe amène une plus grande sécurisation propice à une responsabilisation collective et individuelle. Également confrontant, le groupe permet de travailler des questions de limites où « la dynamique des semblables » met à mal des mécanismes de défense comme le déni et les rationalisations. Cette modalité thérapeutique est indiquée pour les adolescents marqués par des troubles de l’identité, un défaut de mentalisation, une élaboration laborieuse ou encore une précarité des processus d’intériorisation ; ces jeunes sont en souffrance par le fait même de leur activité psychique, où le passage et le recours à l’acte viennent soulager quelque peu les tensions internes. Toute pensée peut représenter une source de danger et d’angoisse. Si penser individuellement est menaçant, la rencontre en groupe décentre et diffracte les liens entre les différents participants [8].

54Nous respectons un temps d’énonciation des faits par chacun ; en évitant de se perdre dans les détails, source d’une éventuelle jouissance déplacée, nommer comporte en soi une visée thérapeutique par l’induction d’un processus de mentalisation. Le vécu exprimé nourrit les associations et confronte les représentations des membres du groupe.

55Ce type de rencontres encourage également les processus de socialisation, souvent mis en défaut chez ces jeunes. En effet, beaucoup d’entre eux présentent des difficultés dans les habilités sociales et vivent en conséquence dans la solitude. Ayant une très mauvaise estime d’eux-mêmes, ils se perçoivent comme inférieurs à leurs pairs, dévalorisés et n’arrivent pas à gérer la déception. Se sentant exploités et abusés, ils vivent les autres comme menaçants et agressants. Les séances de groupe tentent de développer la capacité d’empathie, en renforçant l’estime de soi, en apprenant à reconnaître, exprimer sentiments et désirs, à formuler des demandes et des refus sans verser dans la violence.
À la suite des travaux de Cyrulnik (1999, 2006), nous effectuons un travail de restauration narcissique qui passe par une restructuration de l’histoire du jeune. Nous veillons à prendre le temps d’une reconnaissance de leur propre état de victime de leur histoire. Négliger de reconnaître sa part de propre traumatisme amplifie l’insensibilité à la souffrance de l’autre. Sans risquer un processus de victimisation, nous parlons des carences que nombre de ces jeunes ont connues. Un indicateur traduit cette nécessité, lorsque dans les échanges entre les jeunes on entend des propos tels que : « Comme on a détruit ma propre enfance, alors moi, je me venge et j’agresse les autres. » Cette modalité fait référence à la spirale de légitimité destructrice décrite par Boszormenyi-Nagi pour qualifier la compulsion à s’en prendre à des tiers non concernés (Heireman, 1989). Cette prise de conscience rompt le cercle vicieux de la vengeance et réduit le risque de récidive.

— L’approche systémique familiale

56Cet axe prend place pour des actes posés dans le cercle intra- ou extra-familial [9].

57À la suite d’Hayez (2008), on peut penser que lorsqu’un trouble des conduites s’installe chez un jeune, les facteurs pathogènes issus de la famille sont souvent plus puissants que les facteurs positifs. Ceci étant dit, même si différentes catégories de constellation familiale dans lequel prend place l’abus sexuel ont été décrites, notre expérience ne nous autorise pas à « catégoriser » les familles avec jeunes transgresseurs sexuels. Certes, il est fréquent de rencontrer des familles éclatées, démunies, dépassées, non concernées…, mais ce n’est pas toujours le cas. Bien des combinaisons sont possibles et rendues complexes par les multiples recompositions familiales, mais l’équation qui consisterait à penser qu’une famille qui dysfonctionne va de pair avec un jeune qui transgresse sexuellement n’est pas valable. La réciproque demande de la nuance.

58En effet, à l’éclairage de ce que nous avons exposé plus haut, nous retrouvons habituellement dans les systèmes familiaux concernés, des éléments explicites de perturbations psychiques individuelles et/ou relationnelles. Il arrive que, derrière des « écrans » et de puissants mécanismes défensifs, certaines familles n’abordent pas « leurs secrets honteux » et optent pour stigmatiser l’un ou l’autre de ses membres (le jeune lui-même, par exemple) ou encore un tiers. L’enjeu lié à l’implication familiale se révèle capital dans la mesure où les professionnels se doivent d’essayer de mobiliser la famille, non dans une démarche culpabilisatrice mais dans une visée de responsabilisation. Quoi qu’il en soit, nous nous appuyons sur le principe d’un traitement incluant systématiquement l’environnement familial du jeune.

59Les objectifs des interventions auprès des parents et des familles sont divers et tiennent compte des demandes et interrogations qui sont exprimées dès les premiers contacts. Épinglons celles qui sont régulièrement posées par l’adulte : « Pourquoi a-t-il fait cela ? Dois-je lui parler de tout cela ? Est-ce que j’ai pu faire quelque chose qui a pu mener à cela ? Pourquoi dois-je m’impliquer dans le traitement ? Si vous ne pouvez me dire les causes précises, comment pouvez-vous l’aider ? Est-ce que ça arrivera encore ? Comment pouvez-vous être si certain qu’il ait fait cela, ce n’est pas ce qu’il m’a raconté ? Reparler de tout cela ne risque-t-il pas de lui faire plus de tort que de bien ? Comment le fait d’être traité avec d’autres personnes qui ont fait des choses pires que lui peut-il l’aider ? Pourquoi, tant de gens sont-ils au courant ? Je ne veux pas que cela s’ébruite. Pourquoi nous dites-vous que nous aurons peut-être des choses à changer dans la famille ? Pensez-vous que nous aurions pu nous douter de quelque chose ? Voulez-vous me dire que mon enfant a été abusé ?… »
McKibben (2006 ; Jacob, McKibben, Proulx, 1993) propose un canevas structuré dans l’intervention qui intègre une formalisation du processus de clarification avec la famille et qui s’articule avec les autres axes du traitement. Des séquences successives dans les prises de position sont fréquemment observées ; pour l’illustrer, mentionnons quelques états dans un décours chronologique :

60

  • Le jeune refuse de clarifier ; il invoque l’incapacité de ses parents à (le) comprendre. Il est peu sensible aux réactions et aux conséquences de son comportement au niveau de la famille.
  • Le jeune laisse entendre que la famille ne sait pas tout, qu’il lui a dissimulé ses ressentiments à son égard, une victimisation antérieure, des fantaisies déviantes… Puis, il accepte de clarifier un aspect ou l’autre. Il se montre toutefois ambivalent, redoute les réactions familiales ou attend exagérément des retours positifs.
  • En réalisant une première clarification, le jeune a mis ses proches au courant. Ayant entendu leurs réactions, il est moins centré sur les conséquences de la transgression à son niveau, et est plus à l’écoute des réactions familiales, du souhait de comprendre le sens de l’acte, d’être rassuré, de pouvoir départager les responsabilités, de parler de prévention…
  • Le jeune informe la famille sur son traitement, certains aspects de son contenu, ses limites, sur les modifications désirées quant à son avenir comme sujet en relation.
  • Face à ses proches qui ont entendu la nature du problème dont le cycle d’agression, qui ont clarifié leurs possibilités de soutien, le jeune tâche, dans un principe de réalité, de répondre aux différentes attentes.
D’une façon très générale, l’approche systémique et les entretiens familiaux invitent le jeune à communiquer avec ses proches, à replacer la transgression dans ses dimensions relationnelles, dans une perspective générationnelle. Des rencontres de parole doivent parfois être imposées, le professionnel assumant que c’est lui le demandeur. Pour l’une ou l’autre situation dite « réfractaire » où tant le jeune que sa famille se montrent réticents, le temps, la patience, la ténacité du clinicien amènent les protagonistes à se montrer réceptifs et à accepter de s’impliquer un minimum.

61Par ailleurs, il n’est pas rare que les parents aient tendance à éviter, à minimiser voire à rejeter leur enfant. Un soutien à leur niveau vise à aider ces parents à rester « en sympathie » avec leur fils, à ne pas le réduire à ses seuls comportements transgressifs (« le monstre déshonorant la famille »). Un risque, au niveau des réactions parentales, consiste à adopter une désignation, en termes de « faute », sur un des protagonistes concernés (soit c’est l’adolescent qui « porte la casquette », soit c’est l’autre qui est « faussement victime…, qui se venge »…). Les parents peuvent eux-mêmes être menacés par le clivage, la stigmatisation du « premier contre le second… » ; une autre forme de lien duel pathogène émerge. Les thérapeutes veillent à déplacer la désignation de la « faute » sur l’adolescent seul vers une prise de conscience parentale de leur implication dans un processus…, et en conséquence vers une reconnaissance de responsabilité partagée, appliquée au minimum au niveau de la prise en charge (Haesevoets, 1997).
Soulignons aussi, à la suite des travaux de Tardif et al. (2005), que les interventions liées aux antécédents de victimisation devraient être plus intenses pour les agressions sexuelles intra-familiales alors que le travail sur les pratiques éducatives serait judicieux avec les familles d’auteurs d’agressions extrafamiliales.

Conclusion

62Le fait de transgresser comme symptôme peut être relié aux grandes catégories des troubles externalisés du comportement. Concernant leur compréhension étiopathogénique, une perspective intégrative prenant en compte la complexité des facteurs en jeu est de plus en plus reconnue comme pertinente à l’heure actuelle. Ainsi, de multiples facteurs interviennent comprenant des déterminants génétiques, neuropsychologiques, hormonaux, mais également environnementaux, et enfin ceux liés au tempérament et à la personnalité. Diverses lectures peuvent également être réalisées à partir de la clinique, qu’elles soient sociologiques, psychologiques ou encore psychanalytiques. Ceci étant dit, il existe différents types de fonctionnement de personnalité qui sous-tendent les troubles des conduites derrière l’agir sexuel transgressif. C’est donc bien l’hétérogénéité des significations à donner à l’acte qu’il y a lieu de considérer. De là découle une multiplicité des points de vue possibles pour définir et évaluer le caractère abusif d’un comportement. Un trait commun traverse cependant les composantes, à savoir la toute-puissance lorsque le jeune fait sa loi et présente un écart avec la norme sociale (Hayez, 2001, 2004). Par ailleurs, habituellement, l’adolescent qui transgresse sexuellement est un sujet qui sexualise une angoisse de base qu’il porte en lui depuis longtemps.

63Par rapport à ces jeunes, les cliniciens ont toujours à se poser certaines questions comme : ces comportements symptomatiques peuvent-ils être compris comme accidentels ? Peut-il s’agir d’un acte d’exploration, d’un surplus d’énergie mal canalisée, de l’expression d’une psychopathologie franche ?

64L’ensemble des considérations appuient la nécessité de réaliser une évaluation rigoureuse pour proposer, dans la grande majorité des cas, un accompagnement thérapeutique. Ici, on doit porter attention à l’émergence de deux points clé, à savoir la prise de conscience et le fait d’assumer ses responsabilités (Ryan, 1989, 1991).
Automne 2008

Bibliographie

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Mots-clés éditeurs : agir, victimisation, transgressions sexuelles, pulsions sexuelles, agresseurs sexuels

Date de mise en ligne : 01/02/2010.

https://doi.org/10.3917/psye.522.0309

Notes

  • [1]
    Psychiatre infanto-juvénile, Université catholique de Louvain, Service de psychiatrie infanto-juvénile des cliniques universitaires Saint-Luc et ssm Chapelle-aux-Champs, Bruxelles.
  • [2]
    Nous sommes conscients d’une part d’arbitraire dans cette distinction ; en effet, ce n’est pas tant l’acte qui signe le fonctionnement pathologique du sujet concerné que la manière dont s’organise et se déploie sa personnalité. Ainsi, certains comportements, considérés comme mineurs sur le plan pénal, sont perpétrés par des jeunes profondément perturbés.
  • [3]
    La cellule « Goupados » (18, rue Evers à 1000 Bruxelles), issue de l’équipe sos Enfants de l’ulb (Université libre de Bruxelles), a pour objectif de rencontrer chaque jeune de façon intense afin de réaliser une évaluation de sa personnalité et de proposer, ensuite, des pistes de travail spécifiques à la problématique de la délinquance sexuelle, dont celle d’intégrer un groupe thérapeutique.
  • [4]
    Sans avoir scellé les collaborations dans des conventions écrites qui risquent de « rigidifier » une stratégie de travail en réseau, des cliniciens d’entités différentes travaillent dans la même optique mais avec des mandats et des épistémologies distinctes. Ainsi, l’accompagnement « complet » inclut le passage du jeune, après une évaluation clinique, dans plusieurs « modules », c’est-à-dire qu’il rencontre un thérapeute individuel, est intégré dans une thérapie de groupe et participe à des entretiens de famille. Selon les situations et la discussion entre intervenants, certains jeunes ne suivront que l’un ou l’autre « module ».
  • [5]
    Partons du présupposé que le jeune a reconnu avoir transgressé sexuellement ; la reconnaissance peut être partielle voir même « minimaliste », pour autant que les éléments contextuels confortent que l’agression a bien été réalisée par l’adolescent en question.
  • [6]
    Dans le cas de ce dernier test, on évalue les capacités de tolérance et de contrôle au stress, le traitement des informations comme la médiation cognitive (la manière dont les informations visuelles sont traduites et interprétées) en se référant au jugement, à l’épreuve de réalité, l’idéation qui implique l’organisation d’un ensemble de représentations mentales ainsi que l’émotion, l’affectivité et la perception de soi et des relations interpersonnelles.
  • [7]
    Les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine ainsi que les anxiolytiques et les neuroleptiques, qui sont parfois utilisés dans une stratégie de prise en charge des auteurs d’agressions sexuelles, n’ont pas reçu l’amm (Autorisation de mise sur le marché).
  • [8]
    La différence de format est sensible car ces adolescents ne sont plus centrés sur le seul thérapeute de la rencontre individuelle.
  • [9]
    Par famille, nous entendons les parents et la fratrie ainsi que les membres proches et les substituts parentaux, vu la multiplicité des contextes familiaux. Ainsi, par exemple, il nous est arrivé de rencontrer un jeune avec son père et sa compagne étant donné qu’ils accueillaient exclusivement le garçon qui n’avait plus de contact avec sa mère biologique. Il peut également s’agir des grands-parents quand l’adolescent vit depuis longtemps chez eux, les parents ayant démissionné.
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