Introduction
1Étymologiquement, le motdélinquance dérive du mot latin délinquere qui signifie être en faute. Selosse [1] a proposé dans ce sens un détail assez clarifiant. Il a précisé que la racine latine linquo est supplantée dans les langues romanes par laxo qui veut dire « lâcher, laisser, abandonner ». Comme le préfixe « de » marque un éloignement, le composé de-linquo renvoie à deux filiations sémantique : d’une part « manquer à », d’où « faire une faute, faillir, être en faute », d’autre part « éloigner, séparer, priver ». L’étymologie associe alors ce qui est hors règle à ce qui déroge et dérange en séparant les choses et les individus. Ainsi, est considéré comme délinquant celui qui enfreint l’ordre des choses et la hiérarchie des valeurs en déplaçant ce qui est assigné et en agissant ce qu’il ne peut contenir. À cette définition étymologique se sont greffées des définitions données par certaines disciplines. De ce fait, en droit, la délinquance renvoie à l’ensemble des infractions (crime, délit et contravention) qui sont punies par la loi et qui exposent son auteur à des poursuites judiciaires ou par la police. Born [2] a relevé que le concept de délinquance ne peut être compris que dans son acception légale. Alors, « le droit pénal considère comme délinquant toute personne commettant un délit punissable par la loi. Le délinquant est la personne découverte et sanctionnée par le système judiciaire » [2, p. 60]. En sociologie la délinquance est située dans le contexte général de la déviance. Cette dernière notion englobe et déborde la première. La délinquance est donc perçue comme tout acte qui provoque la sanction. Cette conception rappelle la définition que Durkheim [3] a donnée au crime, à savoir qu’il est tout acte puni et constitue ainsi l’objet d’une science sociale appelée la criminologie. Dans le même cadre, Sillamy [4] définit la délinquance comme une désadaptation qui exprime le conflit qui oppose l’individu à la société. En psychologie et en psychiatrie la délinquance désigne les conduites symptomatiquement complexes et multidimensionnelles qui s’expriment par la transgression des règles sociales et des interdits et dont la signification peut varier du simple appel à de véritables troubles psychopathiques. Elle est essentiellement une pathologie des liens, de l’identité et des limites [5]. Dans ce sens elle n’est pas la maladie mentale, mais peut être un symptôme dans un trouble mental. Alexandre et Alexandre [6] ont indiqué qu’à l’heure actuelle, la pédophilie (trouble de comportement sexuel ou comportement sexuel délinquant dans lequel les auteurs ont une préférence sexuelle pour les enfants) ne sont pas considérés par bon nombre de psychiatres comme une maladie mentale (p. 134). Selosse [7] a relevé que « pour le psychologue, la délinquance traduit également un trouble de la relation, de la communication et de la puissance dans la mesure où elle se sert d’autrui ou de ses biens pour s’exprimer. Elle se présente comme une perturbation des rapports aux objets, aux sujets et au pouvoir qu’il convient d’essayer d’interpréter tout au plan objectif que symbolique, au-delà des divers registres de l’audience publique et du décollage juridique » (p. 194). Ainsi définie, la délinquance peut être le fait, aussi bien, des jeunes que des personnes adultes. La délinquance des jeunes recouvre toutes les activités préjudiciables commises par des sujets mineurs aux yeux de la loi (les jeunes de moins de 18 ans en France et au Cameroun par exemple). Depuis toujours, la société cherche des solutions pour aider les jeunes impliqués ou concernés par les actes et les comportements délinquants à se soustraire de ces actes et à corriger ces comportements. Plusieurs chercheurs appartenant à des spécialités différentes ont mis leur savoir en jeu par rapport à cette question. L’objectif de cet article est de dresser le panorama de leurs travaux dans une perspective évolutionniste. Nous cherchons plus précisément à cerner comment a évolué la prise en charge thérapeutique des jeunes délinquants à travers les travaux de ces chercheurs.
2Nous utilisons la méthode d’analyse documentaire. Ainsi les documents repérés sur la question ont été lus, puis synthétisés, afin de retenir l’essentiel qui constitue le corpus de cet article.
3 Mais, avant de rendre compte de ces travaux, il convient d’abord de dire un mot sur le statut de l’enfant délinquant tel qu’envisagé par ces spécialistes qui ont manifesté un intérêt pour cette catégorie d’enfants.
Du statut de l’enfant délinquant chez les spécialistes
4L’enfant délinquant n’a pas été de tout temps considéré comme devant bénéficier d’un statut et d’un traitement particuliers. Avant le xixe siècle, ce dernier est longtemps resté perçu comme un « adulte en miniature ». Duché [8] souligne dans une perspective générale que les auteurs même du xixe siècle comme ceux du début du xx e siècle qui traitaient des troubles (mentaux) de l’enfant ne prenaient pas en compte ses spécificités. Les nosologies et les descriptions cliniques qu’ils en faisaient étaient empreintes d’un évident adulto-morphisme.
5Aussi, l’enfant délinquant a connu des interprétations diverses par les spécialistes de plusieurs domaines. De « l’enfant coupable » des pénitentiaires, il est passé dès le début du xix e siècle à « l’enfant victime », représentation construite par les philanthropes et les néo-philanthropes ; puis à « l’enfant inadapté », représentation construite par les psychiatres. Depuis 1970 (surtout en France), une nouvelle représentation est née, à savoir « l’enfant handicapé » [7].
6 Les attitudes vis-à-vis de la prise en charge du jeune délinquant vont varier [9] suivant ces interprétations et les observations dont il a été l’objet.
L’orientation de prise en charge par les pénitentiaires
7Pour les pénitentiaires le traitement de l’enfant délinquant devait être axé sur la répression, qui seule, peut l’amener à corriger son comportement. Considéré comme coupable, il devait être puni. C’est une mesure qui prônait l’individualisation du traitement.
8Renouard [9] souligne que l’enfermement que les pénitentiaires prônaient comme mesure de lutte contre la délinquance avait pour conséquence l’écartement de la famille. Leur finalité de prise en charge ne visait que le mineur délinquant seul considéré comme responsable de sa conduite antisociale ou de son comportement répréhensible. Cette orientation du traitement des jeunes délinquants par les pénitentiaires sera jugée au début du xix e siècle par les philanthropes et les néo-philanthropes comme trop inhumaine. Ces derniers vont donc l’abandonner au profit d’une nouvelle orientation qu’ils considèrent beaucoup plus humaine et qui vise à reconnaître au jeune sa valeur d’enfant. Dans cette mouvance, en France le texte de l’ordonnance du 2 février 1945 va valoriser le statut de l’enfant délinquant en consacrant un certain nombre de principes novateurs parmi lesquels : l’institution du juge des enfants, le principe de la primauté de l’éducatif sur le répressif, la mise en place d’un régime de mesures éducatives (milieu ouvert et placement) et de solutions pénales spécifiques, principe de l’irresponsabilité en cas d’absence de discernement, etc. [10]. Malgré ses imperfections, cette ordonnance combinée à celle de 1958, constitue un progrès majeur mettant l’accent avant tout sur la protection du mineur qui n’est plus réduit à son acte mais perçu et accompagné en fonction de son développement et sa maturation (création des mesures d’assistance éducatives). Le juge des enfants et tous ses satellites (principalement le service d’éducation surveillée qui deviendra la Protection judiciaire de la jeunesse [PJJ]) vont au cours des vingt années qui vont suivre axer leur rôle essentiellement sur la protection [10]. Mais, en raison aujourd’hui des phénomènes de délinquance, parfois graves dont les mineurs ont moins de 13 ans (à l’après-guerre, donc en 1945, on n’observait guère des conduites délinquantes avant l’âge de la puberté, qui, n’apparaissait jamais chez les enfants garçons avant l’âge de 13 ans), de l’insuffisance des réponses apportées à la primo délinquance et des conditions de détention scandaleuses etc., le gouvernement français, à travers, le rapport Varinard consacré par deux textes votés en 2002 et 2007 a remis en cause les acquis de l’ordonnance de 1945. On retient globalement de ce rapport Varinard que ses propositions sont un durcissement du régime applicable aux mineurs, notamment par l’élévation du seuil de responsabilité pénale, l’incarcération, la garde à vue dès l’âge de 12 ans (actuellement 13 ans) [10]. On peut remarquer que ces mesures mettent encore l’accent sur la répression et non sur l’éducation, or Blatier [35] attire l’attention sur le fait que tout enfant délinquant est un enfant en souffrance psychique. Par conséquent, sa prise en charge devrait chercher à mettre fin à cette souffrance et non seulement à punir l’enfant.
9Par ailleurs lorsque l’état demande de détecter les troubles de comportement très tôt chez l’enfant, c’est-à-dire dès le jeune âge, afin de prévenir une délinquance potentielle plus tard, le risque de caricature est très grand, car ce ne sont pas tous les jeunes enfants agressifs qui deviennent délinquants. Aussi, il y a risque de confondre les pulsions agressives intriquées aux pulsions libidinales qui participent à la structuration du moi de l’enfant au cours de son développement et la pathologie. Nous devrions donc rester prudents face aux pareilles initiatives et apprendre à canaliser ces pulsions agressives de l’enfant, afin qu’elles servent uniquement à la structuration de sa personnalité et à son orientation vers des destins meilleurs.
L’orientation de prise en charge par les philanthropes et les néo-philanthropes
10Pour les philanthropes la prise en charge de l’enfant délinquant doit se pencher sur sa « moralisation ».
11 À en croire Renouard [9], si le délinquant mineur a commencé à être traité différemment de l’adulte, c’est avec la contribution des philanthropes et des néo-philanthropes. Il précise que dès le début du xix e siècle, les psychiatres ne se sont guère intéressés aux caractériels et délinquants. Sauf quelques-uns comme Heuyer [11] qui a consacré en 1912 sa thèse de doctorat en médecine aux enfants anormaux et délinquants. Lebovici [12] le confirme lorsqu’il écrit : « les psychiatres du xix e siècle ne s’intéressent guère aux caractériels et délinquants sur lesquels se penchent les philanthropes tels que Tocqueville et Demtetz. Ce dernier a fondé la colonie agricole de Mettray » (p. 9).
12Il ressort alors qu’au début et pendant le xix e siècle, les philanthropes ont porté un nouveau regard sur le jeune délinquant. Ce dernier est considéré comme un jeune criminel moralement abandonné. Sa délinquance est le fait de la pauvreté dans laquelle vit sa famille. Il est plus victime de la précarité de son milieu de vie d’origine que coupable. Sa délinquance est vue comme associée à celle de ses parents. Renouard [9] reprend à ce propos La Roche Foucault qui dès 1819 s’est insurgé contre la thèse constitutionnaliste du docteur Voisin et le cite « le plus grand nombre de criminels dans tous les États de l’Europe se trouve dans la classe la plus privée d’éducation ». Voisin repris par Renouard [9] pensait que, la plupart des criminels étaient des enfants mal nés, ou s’ils n’ont pas une organisation défectueuse, ils ont été horriblement mal placés dans le monde extérieur, ils ont vécu dans les circonstances les plus propres à pervertir les sentiments moraux, à fausser l’intelligence, et renforcer les dispositions animales déjà nativement présentes. Par conséquent, une bonne partie de la politique criminelle du xix e siècle était accaparée par la lutte contre le vice, les violences et les transgressions sexuelles, contre tous les comportements venant des campagnes et introduits dans un paysage urbain. Dans cette mouvance, les philanthropes se sont surtout lancés dans une mission de civilisation des enfants des classes pauvres. Selon eux, l’imposition du modèle familial bourgeois serait le meilleur moyen de faire reculer la délinquance des jeunes. La solution était d’éloigner les pauvres des villes. C’est pour cela qu’ils ont initié la stratégie de l’école obligatoire dont la mission éducative devait viser autant les parents que les enfants dont la délinquance était perçue comme le décalque de celle des parents. Éduquer l’enfant et à travers lui ses parents, était donc l’objectif des philanthropes et des néo-philanthropes [9]. C’est donc pour faire face à la délinquance des jeunes interprétée comme résultante de celle de leurs parents qu’ils se sont engagés à éduquer les familles dont sont issus ces jeunes. L’école joue alors un rôle fondamental. Elle est le laboratoire où l’on va mesurer les écarts culturels à la norme scolaire et les écarts des classes populaires à la morale civique.
13 Alors, le mineur délinquant est désormais considéré comme victime et non coupable. La famille est pointée comme étant responsable de sa conduite antisociale. Renouard [9] fait remarquer que « ce qui sépare l’enfant coupable de l’enfant victime, c’est l’utilisation de la déviance du second pour pointer celle de sa famille et l’interpréter comme cause potentielle de celle de l’enfant. En passant du coupable à l’enfant victime, on transite de la responsabilité individuelle à la responsabilité familiale, on déculpabilise en partie l’enfant pour mieux culpabiliser totalement sa famille » (p. 62). Une nouvelle finalité de prise en charge de la délinquance des jeunes est proposée : la moralisation. En éduquant à travers l’école obligatoire, les philanthropes cherchent à moraliser l’enfant et sa famille. Renouard [9] précise que : « à la fin du xix e siècle, le législateur et les institutions s’intéressent moins au délinquant, victime d’une mauvaise éducation et par conséquent membre d’une famille que l’on cherchait à moraliser « (p. 63). Cependant, l’absence de rationalisation des méthodes et des objectifs des philanthropes va susciter des critiques à leur égard. Cette limite constituera le socle sur lequel se développera la représentation des psychiatres.
Le traitement envisagé par les psychiatres
14Renouard [9] souligne que la réorganisation du champ de la prise en charge de la délinquance des jeunes par les psychiatres a été motivée par une certaine incapacité des philanthropes à rationaliser leur méthode et leurs objectifs, ultime et essentielle visée de l’État à cette époque (l’État luttait pour une rationalisation du champ de la délinquance des jeunes).
15 Alors que les philanthropes parlent de moralisation des enfants des classes pauvres, pour les psychiatres, la moralisation est contingente. Aussi vont-ils au cours des décennies 1920-30 développer une stratégie qui consiste à disqualifier les dispositifs philanthropiques. Ils engagent une réorganisation du champ de la prise en charge thérapeutique de la délinquance des jeunes qui s’accorde avec les transformations économiques de l’époque : la rationalisation du travail par le taylorisme. Dans cette réorganisation, Ils proposent de nouvelles méthodes d’investigation et de traitement orienté vers une nouvelle finalité. Renouard [9] renseigne qu’« à l’indifférenciation classificatoire des néo-philanthropes qui accueillaient indistinctement tous les mineurs et se contentaient seulement d’assurer leur éducation morale et religieuse dans l’isolement bucolique du placement agricole sans faire un travail préalable d’orientation et de triage, la psychiatrie infantile opposa une nosographie très diversifiée dans laquelle chaque classe à caractères distinctifs devrait impliquer des mesures éducatives appropriées ou des méthodes de traitement spécifiques dont l’organisation cohérente trancherait avec le syncrétisme des recettes éducatives des néo-philanthropes » (p. 112).
16 Des nosographies sont dès lors élaborées par certains auteurs. Paul-Boncour cité par Renouard [9] distingue :
- le « perverti ou pervers proprement dit »,
- le « pervers définitif »,
- le « pervers intermittent »,
- le « pervers d’occasion ou utilitaire »,
- le « pervers instable ».
17 Dans le même ordre d’idées, Jacob repris par Renouard [9] propose une nosographie toute différente basée sur l’âge mental :
- l’imbécile (son âge mental varie entre 2 et 4 ans, et entre 2et 5 ans à partir de 16 ans) ;
- le débile profond (à 13 ans, il a une intelligence variant entre celle d’enfants de 6 ans 3 mois et 7 ans 8 mois ; à 16 ans, il a entre 7 et 8 ans et demi d’âge mental) ;
- l’idiot (il a un âge mental inférieur ou égal à celui d’un enfant de 3 ans).
18 Pour certains psychiatres, la délinquance et toutes autres formes de déviances juvéniles à l’instar de l’anormalité scolaire devraient être expliquées par la débilité mentale. À ce propos, Renouard [9] cite Heuyer qui affirmait que : « la débilité mentale se rencontre à divers degrés chez la plupart des anormaux scolaires et des délinquants juvéniles » (p. 113).
19Avec la rationalisation du travail promue à cette époque par le taylorisme, vont naître des nouveaux concepts qui deviendront fondamentaux pour la réorganisation du champ de traitement de la délinquance : l’adaptation et la réadaptation. Ces concepts sont dans les années 20 et surtout 30 en raison de la crise, un des thèmes majeurs de la classe dirigeante. La psychiatrie qui domine le champ à cette époque va alors adopter ces concepts et en faire la finalité de la prise en charge thérapeutique de la délinquance des jeunes. Renouard [9] précise que la gestion psychiatrique vise avant tout l’adaptation ou la réadaptation. Ce qui compte, c’est l’adaptation ou la réadaptation par l’apprentissage scolaire, par l’inscription familiale, par l’insertion professionnelle. De cette nouvelle finalité naîtra une nouvelle représentation de l’enfant délinquant : « l’enfant inadapté ».
20Renouard [9] renseigne que les psychiatres sont restés cependant partagés entre deux attitudes à adopter en ce qui concerne le traitement de la délinquance des jeunes. D’un côté, les partisans d’une très forte médicalisation. Pour eux, le délit est le symptôme de la maladie à l’exclusion de toute autre cause et le délinquant est un malade qu’on peut soigner et conduire par un traitement approprié vers la guérison. Même si ces psychiatres reconnaissent d’après cet auteur, les influences sociales dans le déclenchement de la délinquance, ils pensent qu’elles ne sont que des « causes occasionnelles » ne conduisant à la délinquance « que les natures qui y sont prédisposées par leurs tares constitutionnelles ». Cette attitude va dominer toute la psychiatrie infantile du début du xx e siècle imprégnée encore des hypothèses constitutionnalistes, organicistes défendues par les auteurs des siècles précédents [12]. Une telle attitude trop rigide posera un problème sérieux puisque la délinquance des jeunes ne saurait s’inscrire dans le cadre, somme toute étroite, de la maladie mentale. C’est pourquoi à côté de ces partisans d’une très forte médicalisation, va se développer la tendance des psychiatres « sociaux » qui ne réduisent pas l’étiologie de « l’inadaptation » voire de la délinquance des jeunes aux facteurs biologiques. Pour eux, on ne doit pas certes écarter la dimension biologique ou psychologique dans l’explication, mais les facteurs sociaux doivent être pris en compte. Pour ces psychiatres sociaux, la réduction de la délinquance à la maladie mentale est théoriquement impossible. La représentation « d’enfant inadapté » et la « réadaptation sociale » comme finalité de prise en charge sont des éléments qui ont donné une impulsion à cette nouvelle tendance. Elle privilégie une explication multifactorielle devant combiner les facteurs biologiques, psychologiques et sociaux. Cette position à l’intersection du social, du psychologique et du médical permettra d’éviter une thérapeutique fortement médicalisée de la délinquance et de privilégier des interventions à caractère médico-social. Cette attitude a dominé le champ du traitement de la délinquance des jeunes dès le second lustre des années trente [9]. Jusque-là les soins sont restés centrés sur l’individu et non sur la famille dans son ensemble. Il s’agissait de prendre en compte dans l’anamnèse les éléments liés à la famille et non d’une prise en charge familiale où la famille est prise comme objet et acteur de la thérapie.
L’orientation spécifique des psychiatres des enfants
21 Précisons par ailleurs que la prise en charge thérapeutique véritable de la délinquance des jeunes est l’œuvre des pionniers de la psychiatrie infantile. En effet, la littérature renseigne que la psychiatrie infantile est née sous l’impulsion des recherches sur la délinquance des jeunes. Toutefois, les travaux de Lebovici [12] et de Duché [8] nous renseignent que des éducateurs, des pédagogues et certains médecins se sont intéressés à l’enfant délinquant avant la naissance de la psychiatrie infantile. « La psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent n’a pris une véritable autonomie que depuis peu » déclare Duché (p. 3) [8]. Pour Lebovici [12] « la psychiatrie infantile n’existe pas avant le xxe siècle ». Renouard [9] pense qu’elle est née plus exactement en 1925 avec la délinquance juvénile comme discipline essentielle.
22Duché [8] a publié dans le Traité de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent un article intitulé « Histoire de la psychiatrie de l’enfant » où il cite un certain nombre de travaux réalisés par les pédagogues, les éducateurs et les médecins sur la prise en charge de la délinquance des jeunes. Wichern par exemple a créé en Allemagne la « maison sauvage ». L’idée dominante était d’extraire les enfants délinquants des prisons pour adultes, la prison étant selon lui l’école du crime. En 1832, le comte d’Argout a établi une différence entre la sanction pénale qui doit être appliquée aux condamnés et la mesure éducative qui seule convient aux enfants acquittés comme ayant agi sans discernement. Il est en quelque sorte l’inventeur des « familles d’accueil » dont il précisera les qualités exigées pour être retenues. Emminghaus a considéré l’enfant délinquant plus comme victime d’une maladie à soigner et à aider que comme un pervers à châtier ; Stanley Hall a fondé le « pédagogical seminary » ; on peut aussi citer Meyer, cofondateur du mouvement ortho-pédagogique ; Healy, auteur du livre L’Individu délinquant ;Aichorn qui à partir de ses expériences personnelles a promu une approche originale de la délinquance des jeunes. En France, Heuyer [11] dans sa thèse de doctorat en médecine traite des enfants anormaux et délinquants et insiste sur les conditions sociales de la délinquance.
23Médecins ou non, la plupart de ces précurseurs visaient la rééducation de ceux qu’ils qualifiaient des arriérés mentaux ou des débiles.
24Duché [8] et Lebovici [12] attestent que la psychiatrie infantile est née au xx e siècle, mais qu’au début de ce siècle, elle est encore imprégnée des hypothèses constitutionnalistes et organicistes qui ont dominé pendant les siècles précédents. Elles sont restées centrées sur l’internement hospitalier et l’accent était mis sur l’individualisation du traitement. De là se confirme l’idée que l’adhésion des premiers pédopsychiatres à une forte médicalisation touchait à tout ce qui concernait l’enfant au plan psychopathologique. Aussi, la délinquance des jeunes relevait de la même problématique constitutionnaliste ou organiciste et des mêmes pratiques thérapeutiques. En effet, les psychiatres de l’enfant à cette époque voyaient dans tout jeune délinquant un « anormal » ou recherchaient chez ce dernier des mobiles qui relèvent de la maladie mentale. On se rappelle des travaux de Lombroso [13] sur les « criminels nés » qui ont largement influencé Dupré. Ce dernier a décrit le pervers constitutionnel.
25 Dans ces mêmes travaux, Duché [8] et Lebovici [12] parlent du rôle qu’a joué la psychanalyse dans la modification de l’approche constitutionnaliste ou organiciste de la psychopathologie chez l’enfant. C’est d’abord à Freud qu’ils attribuent ce rôle. Duché [8] précise que Freud a reconstitué la vie instinctuelle de l’enfant par la connaissance qu’il en a grâce aux cures psychanalytiques de ses patients adultes, qu’il s’agisse de la découverte du sens des rêves, de celle du complexe d’Œdipe, de l’angoisse de castration, de la scène primitive, la reconnaissance de la sexualité infantile allant bouleverser l’intelligence du psychisme de l’enfant. Freud a aussi montré l’importance de l’environnement et plus particulièrement du milieu familial, dans la genèse de maints troubles affectifs de l’enfant et de l’adolescent, les censures sociales et familiales s’opposant aux exigences et aux pulsions de l’enfant.
26 Lebovici [12] ajoute que Freud a décrit la psyché d’une façon totalement nouvelle, soit par la connaissance qu’il avait eue au cours de la cure psychanalytique des adultes, soit par l’observation directe, voire la psychanalyse de l’enfant. En un mot, Freud a décrit la névrose infantile qui déploie ses effets répétitifs dans la névrose de transfert. Dès lors, l’approche de l’enfant consultant et non consultant a été radicalement modifiée. En plus, il a fait entrer la famille dans l’évaluation des troubles mentaux de l’enfant lorsqu’il a décrit les conflits familiaux (la scène œdipienne) et les imagos qui dépendent en partie au moins des réactions interpersonnelles dans la famille.
27 Dans ce même cadre, Duché [8] cite les travaux des psychanalystes post-freudiens qui de préférence ont travaillé sur l’enfant. Il renseigne que ces psychanalystes post-freudiens ont mis l’accent sur l’impact de l’environnement familial sur la structuration de la personnalité de l’enfant, son développement et son fonctionnement mental, ainsi que sur la cure des psychopathologies chez l’enfant. La psychothérapie du groupe familial s’est développée et depuis quelques années on étudie les compétences précocissimes du bébé et les interactions qui s’établissent entre lui et sa mère, ce qui aboutit à des interventions thérapeutiques ayant valeur préventive.
28 En restant dans la même perspective de signalement des travaux sur la psychiatrie infantile et par extension sur la prise en charge de la délinquance des jeunes, nous relevons les travaux de Casoni et Brunet [14]. Ces auteurs présentent plusieurs études où sont produites des explications de nature psychanalytique sur la délinquance. Ils rappellent en plus de la thèse de Freud [15] sur le délinquant par sentiment de culpabilité, les travaux de : Aichorn [16] sur le délinquant névrotique et le délinquant caractériel, tous deux victimes des carences du milieu familial ; Klein [17, 18] sur le délinquant au surmoi primitif extrêmement sévère ; Friedlander [19, 20] sur la délinquance latente ; Winnicott [21] sur la tendance antisociale qui mènerait à des agirs délinquants ; Degreef [22] sur le délinquant au désengagement affectif ; Debuyst [23, 24] sur la délinquance névrotique et la délinquance normale ; Balier [25, 26] sur le délinquant caractérisé par une incapacité de maîtrise de ses pulsions ; Eissler [27] sur la différence entre une personne névrotique et une personne au comportement délictueux, ainsi que sur l’hypothèse de l’injustice parentale comme facteur générateur de la délinquance des jeunes ; Johnson et Surek [28] sur l’hypothèse de l’identification à une conscience morale parentale délinquante et le délinquant au surmoi lacunaire ; Redl et Wineman [29] sur l’enfant agressif animé par une haine pernicieuse résultante de la perturbation de ses relations avec ses parents et sur le surmoi groupal du délinquant ; Mailloux [30] sur le délinquant au sentiment d’identité négative dû au rejet par les parents ; Frechette et Leblanc [31] sur la personnalité délinquante ; Kernberg [32, 33] sur la délinquance due à des pathologies du narcissisme ; Yovselson et Samenow [34] sur le choix précoce par l’enfant d’une carrière délinquante.
29 Casoni et Brunet [14] indiquent que l’ensemble de ces travaux relève de la psycho-criminologie psychanalytique. Cette dernière est née du souci d’effectuer une étude individualisée qui vise à comprendre la personne de celui qui a commis l’acte délictueux ou criminel. Aussi, les modes cliniques d’approche de la délinquance qu’elle propose reposent sur le traitement du psychisme du délinquant à travers l’interprétation de son passé, de ses rêves, de ses mécanismes de défense, de ses résistances, de ses processus de transfert. La psychothérapie psychanalytique ou encore psychothérapie analytique est le vocable généralement utilisé pour désigner ces modes de traitement. La thérapie ici ne s’appuie sur ou ne se réfère à aucune description nosographique normative ou système de classification diagnostique normatif (le DSM-IV par exemple) comme c’est le cas avec les approches psychiatriques traditionnelles.
30Loin de constituer une recherche sur un nouveau mode clinique d’approche de la délinquance, les travaux de Casoni et Brunet [14] sont une description des recherches réalisées dans ce sens par de nombreux psychanalystes.
31 Blatier [35] a produit un travail de ce genre, dans lequel elle a décrit quelques méthodes du traitement psychologique jusqu’ici utilisé auprès des mineurs délinquants. Les méthodes soulignées dans ce travail sont en premier celles fondées sur les approches psycho-éducatives, en second celles d’inspiration psychanalytique et enfin celles d’inspiration cognitivo-comportementale.
Blatier et les méthodes actuelles de traitement
32Dans le premier ensemble constitué des méthodes fondées sur les approches psycho-éducatives, Blatier [35] souligne les méthodes psycho-éducatives d’entraînement aux compétences sociales et cognitives et les nouveaux modes de prise en charge institutionnelle développés ces dernières années pour des mineurs délinquants qualifiés de « cas difficiles » (les pratiques partenariales et les nouvelles structures).
33 S’agissant des méthodes psycho-éducatives d’entraînement aux compétences sociales et cognitives, Blatier [35] renseigne qu’elles regroupent principalement des programmes d’entraînement aux compétences cognitives et sociales au sein de la famille ou dans le cadre de placements institutionnels.
34 Le développement des compétences sociales a été largement utilisé seul ou en association avec un autre traitement, pour les mineurs pour lesquels un diagnostic de déficit de l’attention avec hyperactivité (TDAH) a été posé. Blatier [35] cite de nombreux travaux qui ont relevé que la stabilité du diagnostic de ce trouble est corrélée à l’apparition ultérieure des troubles de conduites constitués de problèmes significatifs dans les relations interpersonnelles, de difficultés à suivre les règles dans des contextes comme l’école, ainsi que de transgression des lois et des normes sociales. Elle s’appuie sur Biederman, Faraone, Keenan, Knee, Tsuang [36] et fait savoir avec eux qu’un grand nombre de ces enfants ont une parenté présentant des troubles antisociaux, dépressifs et anxieux ou de l’addiction. Elle se réfère également à Campbell [37] pour préciser que le travail avec ces mineurs consiste en un diagnostic, puis en une intervention centrée sur le développement de compétences parentales et sur une action à l’égard du mineur, qui porte sur les déficits scolaires, sociaux émotionnels. L’insistance est aussi portée sur les compétences sociales spécifiques permettant d’optimiser l’exposition aux nombreuses situations d’apprentissage [35]. Pour cet auteur, le dépistage précoce est très important pour assurer l’efficacité de l’apprentissage de compétences pro-sociales ou de traitement de type psychothérapie cognitive et de groupe afin de développer les compétences sociales spécifiques.
35 Quant aux programmes d’entraînement aux compétences cognitives, Blatier [35] renseigne que, certains consistent en une éducation intellectuelle précoce, d’autres associent un entraînement des parents aux compétences parentales et dans le même temps un entraînement des enfants de 7 à 9 ans aux compétences sociales. Ces traitements qui sont des modes de rééducation visent la reconstruction d’une image positive chez le mineur, la mise en situation de réussite et la création de liens l’encourageant dans ce sens.
36 Parlant du traitement psyco-éducatif des cas dits « difficiles » (appelés ainsi parce qu’ils mettent en échec les nombreuses mesures éducatives, les placements en famille d’accueil ou en établissement), Blatier [35] évoque deux modes d’intervention : les pratiques partenariales et les nouvelles structures.
37 Dans les pratiques partenariales, il s’agit des protocoles d’accord pour des interventions conjointes. Ainsi, les mesures judiciaires de suivi éducatif sont utilisées conjointement avec un suivi médico-psychiatrique. Il y a aussi la participation d’une équipe de secteur psychiatrique à une prise en charge en milieu ouvert et l’accueil d’urgence, par une équipe médico-éducative dans certaines unités des hôpitaux généraux, après décision de médecins et de magistrats, particulièrement pour des enfants ou des adolescents qui se situent aux frontières des indications de l’administration en milieu psychiatrique.
38 Les nouvelles structures renvoient aux possibilités de placement qui se sont multipliées aujourd’hui. Parmi elles, il y a l’hébergement (les mineurs délinquants sont hébergés dans des centres accueillant également des mineurs en danger) ; les centres de jour (elles permettent au mineur de suivre des activités de remise à niveau scolaire ou de qualification professionnelle) ; le placement familial, permanent ou ponctuel, mais qui reste rare. Par rapport au placement familial, Revellaud, Guyod et Mahé [38] ont décrit leur expérience auprès d’un enfant violent où ils ont fait recours à l’accueil familial thérapeutique associé à une médiation thérapeutique (musicothérapie) et à quelques fragments significatifs de sa psychothérapie dans le but de reconstruire ses liens affectifs.
39 Le second ensemble des méthodes de prise en charge thérapeutique de la délinquance des mineurs évoqué par Blatier [35] comprend les traitements d’inspiration psychanalytique. Elle révèle d’abord que les théories psychanalytiques considèrent en général le comportement antisocial en termes de conflit névrotique ou de faille dans le développement du surmoi [34]. Parmi les traitements d’inspiration psychanalytique qu’elle relève, il y a le traitement proposé par Aichorn [16] et Eissler [27] qui consiste à se présenter dans la position d’un délinquant potentiel mais surdoué, qui aurait pu exceller dans ce domaine mais a finalement choisi la voie de l’honnêteté. Le délinquant est censé s’accorder à ce « moi idéal » et le thérapeute le faire évoluer vers une relation de transfert-miroir ; le traitement qui repose sur la nécessité d’agir sur le narcissisme pathologique propre à la délinquance : il passe par un phénomène purement narcissique de projection (la création d’une idole permettant de maintenir un haut niveau d’excitation et l’illusion de toute puissance) et peu par des mécanismes d’introjection ou d’identification ; le traitement centré sur la mise en mots des difficultés ou souffrances du passé, l’apprentissage d’un nouveau mode de symbolisation afin d’éviter les passages à l’acte destructeur (la présence de modèles identificatoires en la personne des éducateurs constitue ici un étayage important). Blatier [35] cite aussi dans cet ensemble les thérapies psychanalytiques groupales (qui s’opèrent en groupe).
40 Le troisième ensemble concerne les traitements cognitivo-comportementaux. Blatier [35] dit qu’ils sont fondés sur les principes fondamentaux selon lesquels les pensées guident les comportements. Un changement dans les pensées peut produire un changement dans les actes. En effet, certaines recherches ont révélé que la théorie cognitivo-comportementale à laquelle sont liés les traitements cognitivo-comportementaux tente de tenir compte de l’importance des pensés ou cognitions dans l’explication du comportement humain. Essentiellement, selon cette théorie, les symptômes psychopathologiques sont compris comme résultant des pensés ou des cognitions erronées. La thérapeutique vise à modifier les cognitions qui sont jugées inadéquates [14]. En d’autres termes, le traitement en thérapie cognitivo-comportementale de la délinquance est basé sur la modification des croyances inadaptées des délinquants et leurs distorsions cognitives.
41 Blatier [35] renseigne aussi que certains thérapeutes s’appuient sur les théories de l’attribution pour produire un changement dans les pensées qui pourrait produire un changement dans les actes. Le but poursuivi consiste alors à substituer des attributions causales adaptées à celles qui sont dysfonctionnelles, en anticipant l’altération que ce changement risque de produire dans le comportement. Cette option implique la construction chez le sujet de référents pour le jugement moral.
42 Pour les mineurs criminels sexuels, Blatier [35] signale que la thérapie vise la baisse de l’excitation sexuelle par des techniques comportementales, qui peuvent être associées à des techniques pharmacologiques. D’autres techniques de déconditionnement, telles que des techniques destinées à créer l’aversion, des techniques de désensibilisation systématique (axées sur un scénario imaginé), les traitements pharmacologiques, anti-androgéniques, qui sont utilisés dans certains cas pour la baisse de la testostérone, donc d’une baisse de l’excitation sexuelle ont été aussi soulignées. C’est également le type de thérapie relevé par Alexandre et Alexandre [6] dans ce cas. Rault, Latourelle et Piquemal [39] parlent d’un dispositif qu’ils ont mis en place à l’hôpital auprès de cette population, dont une évaluation clinique, puis des groupes thérapeutiques de parole, l’utilisation de photo-langage, des rencontres « triangulaires » réunissant patients, soignants et conseillers d’insertion pendant toute la durée des soins (environ 18 mois). Ils précisent qu’ils le font dans le cadre de l’obligation de soins prescrite par l’article 132-45 du Code pénal français aux auteurs de violence ou d’agression sexuelle. L’obligation de soins est une mesure générale applicable avant ou après la condamnation pénale. Elle est non spécifique à la délinquance sexuelle et aucune relation entre les autorités judiciaires et sanitaires n’est prévue, aucune expertise psychiatrique préalable n’est nécessaire pour la mettre en œuvre. L’obligation de soins est différente de l’injonction de soins créée par la loi du 17 juin 1998 relative au suivi socio-judiciaire. Cette dernière est applicable lorsque le suivi socio-judiciaire est encouru et lorsqu’une expertise médicale conclut à la possibilité de soins, dans le cadre d’un sursis avec mise à l’épreuve, d’une libération conditionnelle, d’une surveillance judiciaire ou d’une surveillance de sureté. Elle fait intervenir le médecin coordonnateur en application des dispositions de l’article L. 3711-1 du Code de la sante publique. L’expertise médicale préalable est nécessaire pour l’ordonner ou la prononcer et la supprimer [10].
43 Les programmes multimodaux forment le dernier ensemble des traitements psychologiques des mineurs délinquants décrit par Blatier [35]. Il s’agit des programmes où l’environnement, les éléments cognitifs, psychologiques, affectifs et comportementaux sont pris en compte. Selosse [7] annonçait que l’étiologie de la délinquance est complexe en ce sens qu’elle met en lumière l’importance des facteurs multiples : médicaux, sociaux, psychiques etc. Alors, tout traitement ne peut être envisagé que dans une perspective interdisciplinaire dans laquelle chaque spécialiste apporte sa contribution, qui n’est exclusive d’aucune autre.
44 Parmi les programmes multimodaux, Blatier [35] relève : celui initié par Howells, Watt, Hall et Baldwin [40] qui repose sur l’intervention précoce, la formation des parents et l’intervention concertée des différents milieux de vie de l’enfant ou de l’adolescent (efficace dans la lutte contre les troubles des conduites et les comportements antisociaux), le travail thérapeutique inclut une évaluation du comportement violent et l’identification des facteurs induisant le comportement, de façon à évaluer les risques de récidive. Il intègre une prise en compte des besoins du mineur, des variables environnementales (contextes actuels et passés des actes violents et conséquences fonctionnelles des actes), ainsi que des variables intra-personnelles (traits et dispositions personnelles, patterns de cognition, comportement interpersonnel, éventuels abus subis par le délinquant, etc. ; ceux de Finckenauer [41] conçus par rapport à chaque type de délinquance (sporadique, persistante, explosive).
45 Par rapport à la délinquance sporadique (où les liens à autrui sont préservés et qui présente des déficits psychologiques sans que la personnalité soit massivement affectée), des programmes qui réduisent la dyssocialité sont proposés. Ils mettent l’accent sur la réintégration sociale en agissant sur l’entourage des mineurs, réduisent l’influence des pairs inadaptés et développent les opportunités scolaires.
46 Pour le délinquant persistant intermédiaire (qui récidive sur des délits de gravité moyenne, qui est marqué par des failles importantes de personnalité et une grande irresponsabilité), l’essentiel du travail porte sur l’estime de soi, la réduction de l’influence des pairs, la réduction de l’impossibilité à assumer des rôles sociaux.
47 Pour le délinquant explosif (structuré sur un mode névrotique et qui se caractérise principalement par un désengagement interpersonnel), le traitement peut s’effectuer par une psychothérapie associant une approche psycho-éducative.
48 Il y a aussi les programmes initiés par Leblanc [42] en faveur des délinquants graves (coupé radicalement des instances sociales, qui ont développé un concept de soi négatif, de la méfiance, de l’hostilité, de l’irritation, qui ont le sentiment d’être coupés des autres et qui présentent un risque élevé de devenir un criminel adulte). Le travail thérapeutique consiste à travailler à la modification du comportement et à la clarification des valeurs, en mettant l’accent sur les rapports entre les attitudes et les actions, par l’utilisation de programmes accroissant le sentiment de responsabilité.
49 Blatier [35] souligne également dans ce cadre le traitement de jeunes délinquants sexuels qui repose sur le développement des compétences sociales qui manquent à ces mineurs associé à l’apprentissage de la critique d’un comportement (par exemple dire non à un groupe de pairs délinquants) et au contrôle de leur anxiété et à l’apport des réponses plus appropriées pour résoudre les problèmes.
50 Par rapport à la prévention de la récidive, Blatier [35] évoque tous les programmes qui incluent un travail d’identification qui pourrait susciter un comportement sexuel inapproprié et l’apprentissage par le délinquant à percevoir une défaillance. Il doit aussi savoir mettre en place des stratégies de coping.
51 Blatier parle aussi des programmes de gestion de l’agressivité qui, existent et des techniques de sensibilisation qui sont utilisées.
52 Les thérapies familiales ont aussi été évoquées, bien qu’elles n’aient pas fait l’objet d’un ample développement par Blatier [35]. D’après elle, il est possible d’intégrer les familles dans la prise en charge. Des traitements portent sur les familles et leurs patterns d’interaction. Elle se réfère dans ce cadre aux travaux de Patternson, Chamberlain et Reid [43], de Alexander et Parson [44] et retient que les principales conclusions de ces chercheurs sont que les patterns d’interaction parents-enfants délinquants varient d’une famille à l’autre, que l’intervention comportementale à court terme montre des changements significatifs entre les familles traitées et les familles non traitées.
L’orientation spécifique de la prise en charge par les thérapeutes familiaux
53Les thérapies familiales ont fait l’objet de plusieurs recherches qui se sont intéressées à leur implication dans le traitement de la délinquance. Le mérite de ces thérapies est qu’elles n’excluent pas de leur champ d’investigation les autres approches explicatives de la délinquance. Elles prennent en compte comme semble l’être le souci de Selosse [7] la dimension complexe de l’étiologie de la délinquance. En effet, les thérapies familiales par vocation reposent sur des principes multidisciplinaires, transdisciplinaires et interdisciplinaires. Elles se sont aussi nourries de nombreux apports : psychodynamiques, biologiques, éthologiques, anthropologiques, comportementaux et cognitifs, cybernétiques et systémiques. Elles relient les champs de la médecine, de la psychiatrie, de la psychologie, de la justice, du travail éducatif et social [45]. Lehalle [46] précise que les approches systémiques ont cherché à renouveler à la fois l’analyse génétique, l’analyse actuelle du fonctionnement des jeunes délinquants dans le milieu de vie (familial et social) et l’intervention psychologique.
54 Ferreira [47] a tenté une conceptualisation nouvelle et réussie de ce qui rend impossible à l’enfant l’intégration familiale. Il a développé le concept de double-bind traduit par « double contrainte » ou encore « injonction paradoxale » pour rendre compte des cas où des messages contradictoires, proviennent de deux sources également vitales (la mère et le père par exemple), ce qui met l’enfant dans un système de tension d’où il ne peut sortir que par la délinquance. Le thérapeute intervient par la prescription des paradoxes (double-bind thérapeutique) dans le but d’améliorer la communication intra-familiale, afin de supprimer les comportements délinquants.
55 Minuchin [48] s’est intéressé aux jeunes délinquants des ghettos portoricains et nord-américains. Il a relevé que les relations au sein des familles où évoluent ces enfants sont caractérisées par des engrenages, des rejets, des coalitions ou des délitements. Il a en outre remarqué un non-respect des hiérarchies et des générations au sein de ces familles. Selon Minuchin [49] l’intervention thérapeutique avec ces familles doit viser à les transformer, ce qui entraînera un changement dans les comportements et les processus psychiques internes de leurs membres. Le thérapeute ici centre son action sur le démantèlement des coalitions, l’aménagement des frontières, les triangulations, la restructuration des règles et des interactions.
56 Benoît [50] renseigne que les personnes qui présentent des comportements déviants, y compris la délinquance, sont placées devant une double injonction paradoxale. Elles doivent évoluer et des facteurs internes et externes les bloquent. Il s’agit du double lien (devoir changer sans pouvoir changer). Ces personnes apparaissent non plus comme des « victimes » ou des « malades », mais plutôt comme des « héros », se vivant comme porteur d’une mission tragique. Les troubles du comportement du délinquant traduisent à travers ses actes antisociaux, des messages familiaux non verbalisés mais agis. Face à ces situations où dans la famille, la verbalisation est remplacée par le passage à l’acte, les intervenants – thérapeutes – de la protection maternelle et infantile, travailleurs sociaux à tâches éducatives, services d’aide divers : de justice, de police, etc., doivent accéder à une représentation plus large des systèmes sociaux qui les sollicitent. Ici c’est le recours à un dispositif multisectoriel (psycho-médico-juridico-éducative) qui est encouragé. Il s’agit d’un dispositif qui intègre tous les secteurs ou domaines de la prise en charge.
57 Selosse [7] fait savoir que, les troubles des conduites à l’origine des prises en charge, des interventions, soit normatives soit répressives soit thérapeutiques des enfants et des jeunes, relèvent d’une étiologie complexe. Aucune approche de type mono-disciplinaire ne peut être satisfaisante, ni intellectuellement, ni techniquement, ni socialement parlant. Cette complexité amène à privilégier des approches des disciplines multiples avec des perspectives complémentaires (la thérapie familiale systémique répond à ce critère). Des recherches actuellement entreprises sous forme de thérapie familiale ont montré que les enfants placés en institutions répétaient dans leur groupe de vie en internat les perturbations relationnelles qu’ils avaient apprises au sein de la socio-matrice familiale dont ils gardent l’empreinte. La répétition d’une même configuration conflictuelle se fait alors par transfert sur les figures de substitution. Aussi si l’internat se borne à travailler sur le sujet sans intervenir sur la sociomatrice familiale pathogène, il aura du mal à apprécier l’origine des troubles ou des conflits et il risque fort de voir réapparaître ceux-ci à l’occasion du retour dans la constellation parentale. Il rappelle que compte tenu de la diversité des problématiques narcissiques et de leur origine souvent carentielle profonde et précoce chez de nombreux mineurs, il peut également y avoir nécessité d’élargir l’accompagnement réparateur à l’ensemble de la constellation familiale qui, elle aussi, a besoin d’être restaurée. De nombreux adolescents aux comportements antisociaux réitérés souffrent d’un passé de négativité foncière qui entraîne une négation sociale débouchant sur un négativisme comportemental [7].
58 Ausloos [51] reprend le concept de « double lien » et montre l’importance d’une communication paradoxale dans le déclenchement de la délinquance de l’enfant. Il montre que les familles où prévalent les transactions délictogènes transforment l’escalade symétrique entre les parents et leur violence, en une implication du jeune. Chaque conjoint utilise le jeune pour agresser l’autre. Il ajoute que le mode transactionnel des familles avec un membre délinquant est de l’ordre du chaos. Les transactions chaotiques sont caractérisées par l’inconsistance des règles bien plus que par leur rigidité, par la trop grande ouverture du système que par sa fermeture, par des changements incessants bien plus que par le non-changement. Il s’agit d’un temps événementiel, caractérisant l’instabilité du rythme de vie de ces familles, où « tout change sans cesse » : l’information circule, mais elle ne peut être retenue, stockée, mémorisée. Les événements se succèdent sans cesse et viennent tout remettre en question, le temps événementiel est haché, morcelé, disséqué. Le chaos se définit comme l’ensemble des réactions en tous sens à des stimuli divers avec lesquels on est confronté sans pouvoir en prendre distance ou avoir un répit avec une perte de maîtrise de la situation de soi [50]. La réaction de sidération vitale de l’être humain ayant perdu tous ses liens est une réponse éthologique courante lors du morcellement chaotique des situations.
59 Ausloos [51] considère que le recours à la technique du « double lien scindé thérapeutique » en thérapie permet de supprimer le phénomène de « désignation » et de résoudre le problème de passage à l’acte chez le mineur délinquant. Dans les situations de « double lien » ou « double contrainte pathogène », le jeune réagit par des « passages à l’acte ». Il agit au dehors ce qui ne peut être dit au-dedans. Cela peut constituer une synthèse de deux messages contradictoires. Dans le cadre d’une institution pour enfant, Ausloos [51] va plus loin : l’absence de communication entre l’institution et la famille peut amplifier les phénomènes de double lien scindé et dès lors la problématique du jeune. Pour tenter d’y remédier il propose la « co-thérapie scindée » ou « double lien scindé thérapeutique » : deux thérapeutes rencontrent la famille du jeune placé en institution ; l’un, psychologue, psychiatre ou assistant social, « thérapeute 1 », plus extérieur à l’institution, est particulièrement sensible à la dynamique familiale et à ce qui se joue entre la famille et l’institution ; l’autre, « thérapeute 2 », en général un éducateur, soutient le jeune et le projet institutionnel mis en place pour ce dernier. L’entretien familial se termine par la connotation positive donnée par le « thérapeute 1 » et par la précision du projet pédagogique amenée par le « thérapeute 2 », l’un et l’autre, donnant des messages différents mais se montrant en accord. Contrairement à ce qu’il a vécu, le jeune se trouve alors dans la situation où quoi qu’il fasse, il ne se trouve pas en tort, car les deux « parties » se parlent et sont d’accord pour travailler ensembles [52].
60 Latimer [53] a relevé que des évaluations de nombreux programmes de traitement réalisées par des chercheurs [54-56] et des méta-analyses [57, 58] ont confirmé le rôle positif que joue la famille dans le traitement du comportement délinquant. Howell et Hawkins [59] ont relevé que les interventions destinées à former les parents à gérer de façon positive leurs enfants ont nettement réduit la délinquance. Robert et Camasso [60] ont étudié les dix interventions les plus couramment utilisées auprès des délinquants dans les années 1980 et constaté que la thérapie familiale était la seule à produire des résultats entièrement positifs et convaincants.
61Sans nier l’importance des dimensions intrapsychiques de la délinquance, Laupies et Rendu [61] prennent en compte les dimensions interactionnelle, structurale et éthique relationnelle et soutiennent qu’en pratique, le travail systémique et contextuel permet de traiter la crise et de rendre le délinquant disponible pour un travail d’élaboration psychique.
Conclusion
62En se référant aux différents travaux qui ont été relevés et synthétisés ici, plusieurs modes cliniques d’approche de la délinquance peuvent être dégagés :
- le mode clinique d’approche psychiatrique qui porte sur le traitement des maladies mentales (psychoses, névroses, perversion) ou des déficiences intellectuelles (débilité) ou encore des troubles de la personnalité (personnalité antisociale ou psychopathique, personnalité borderline ou état limite, personnalité narcissique) responsables des conduites antisociales ;
- le mode clinique d’approche psychanalytique – psychodynamique – qui porte sur le traitement du psychisme du délinquant soumis aux conflits intrapsychiques ou internes et aux motivations inconscientes qui ont guidé chez lui le passage à l’acte criminel ou délictueux ;
- le mode clinique d’approche biomédicale et neuropsychologique qui porte sur la diminution des pulsions sexuelles, le traitement des lésions cérébrales et de certaines maladies organiques responsables des troubles de comportement et de conduite chez un sujet qui commet des actes délictueux ou criminels, bref coupable des infractions ;
- le mode clinique d’approche cognitivo-comportemental qui porte sur la modification des apprentissages inadaptés, des pensées ou cognitions erronées ou inadéquates à l’origine des conduites antisociales ou comportements délinquants ;
- le mode clinique d’approche systémique et contextuel qui porte sur la modification du contexte ou le traitement des patterns transactionnels mal adaptatifs au sein de la famille ou des interactions dysfonctionnelles au sein de celle-ci.
63En effet, cet article qui avait pour objectif de dresser un panorama des travaux effectués sur la prise en charge thérapeutique des jeunes délinquants dans une perspective évolutionniste montre au final combien la réflexion sur cet objet a été florissante, d’époques en époques, entre les spécialistes de différents domaines et les auteurs. La prise en charge thérapeutique des jeunes délinquants présente de ce point de vue un caractère suffisamment dynamique.
Liens d’intérêts
64l’auteur déclare ne pas avoir de lien d’intérêt en rapport avec ce texte.
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Mots-clés éditeurs : prise en charge, psychothérapie, délinquance juvénile
Date de mise en ligne : 01/04/2016
https://doi.org/10.1684/ipe.2016.1464