Un serviteur qui tue au couteau son maître lors d’une garden party organisée en l’honneur de l’anniversaire du fils de ce dernier : voilà comment se termine le film Parasite, après avoir fait le récit de la confrontation sociale complexe qui se déploie entre une famille riche de la banlieue de Séoul et ses domestiques embauché·e·s pour les servir au quotidien. Cette Palme d’Or du festival de Cannes de 2019 met en scène sans détours la violence des inégalités socio-économiques qui marquent la société coréenne et, plus généralement, la société dans son ensemble, cristallisée dans l’intimité d’une maison où la proximité physique de corps marqués par des univers sociaux très éloignés devient insupportable. Le réalisateur du film, Bong Joon-Ho, réactualise un objet qui a été très investi dans la littérature : celui de l’improbable (voire l’impossible ?) côtoiement entre riches et pauvres, de la subalternité contrainte des second·e·s pour survivre, du ressentiment envers celles et ceux qui les dominent et les exploitent, qui finit par se transformer en drame. Le meurtre comme expression de la souffrance des dominé·e·s et acte de désespoir a fait le succès des Bonnes de Jean Genet (1947) ou, plus récemment, de Chanson douce de Leïla Slimani (2016). La servitude, la docilité et l’oppression des corps finissent par prendre le dessus sur la bienséance et les règles morales dont le respect, d’un coup, s’effondre : la seule issue au mal-être individuel et à l’injustice sociale est de tuer celui ou celle qu’on sert et les privilèges qu’il ou elle représente…
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