Notes
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[1]
Cet article se fonde sur le rapport CIRANO publié aux Presses Internationales de Polytechnique (Warin, 2016) et consiste en une synthèse orientée ici vers la question de la définition d’un accord de deuxième génération. Les erreurs et omissions restent les miennes..
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[2]
Fellow au CIRANO (Montreal) et Visiting Scholar à Weatherhead Center for International Affairs (Harvard University)
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[3]
Thierry Warin, Commerce de marchandises entre le Canada et l’Union européenne : un état des lieux avant l’AÉCG. (Montréal, Canada : Presses Internationales Polytechnique, 2016)
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[4]
Richard Baldwin, « Column : 21st Century Trade and the 21st Century WTO. » RIETI, 2014. http://www.rieti.go.jp/en/special/p_a_w/014.html..
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[5]
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[6]
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[15]
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[17]
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[19]
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[20]
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[21]
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[22]
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[23]
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[24]
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1Tenu le 6 mai 2009 à Prague en République tchèque, le sommet Canada-Union européenne (UE) représente une date importante tant pour le Canada que pour l’UE dans l’histoire de l’Accord économique et commercial global (AECG). Cette date marque le lancement des négociations officielles afin de définir les contours de ce nouvel accord de commerce préférentiel. Le protocole d’accord a été signé le 18 octobre 2013. Le 5 août 2014, le Canada et l’UE ont annoncé que leurs fonctionnaires s’étaient entendus sur le texte complet de l’accord, et que la traduction et l’examen juridique final allaient commencer. Le 26 septembre 2014 à Ottawa, un premier texte proposé pour ratification a été validé par les parties. Cependant, le mécanisme des règlements des litiges sur les investissements internationaux a créé une levée de boucliers en Europe, notamment dans le contexte des négociations avec les États-Unis sur un prochain accord de libre-échange. Un nouvel accord a été trouvé fin février 2016 avec la mise en place d’un nouveau mécanisme juridique d’évaluation de la protection des investissements internationaux, incluant notamment un système d’appel.
2Le 5 juillet 2016, la Commission européenne a proposé que le texte soit catégorisé comme un accord « mixte ». Dans le droit européen, cela veut dire que certaines prérogatives sont de droit national et doivent être validées par les parlements nationaux (et parfois provinciaux). L’objectif était de s’assurer que tous les chapitres de l’AECG soient compris et validés par les États membres.
3Avant le vote aux Parlements nationaux européens, le Conseil de l’Union européenne publie le 27 octobre 2016 un document intitulé « Instrument interprétatif commun concernant l’AECG entre le Canada, l’Union européenne et ses États membres ». Son objectif est de proposer une interprétation des articles du traité sur l’AECG. Écrits en termes juridiques, certains articles sont décodés et les principes pour une interprétation sans ambiguïté sont rappelés.
4Le 28 octobre 2016, le Conseil adopte une série de décisions : d’abord, la signature de l’accord, ensuite l’application provisionnelle de l’accord et enfin l’envoi au Parlement européen pour ratification. L’article 218 du Traité sur l’Union européenne stipule la majorité qualifiée au niveau du Parlement européen, mais le Conseil s’attend à une unanimité des votes des parlements nationaux.
5Pourtant, le Parlement wallon rejette l’accord lors d’une première votation fin octobre 2016, mettant en avant notamment le mécanisme juridique de protection des investissements internationaux. Rassuré ensuite par le texte du 27 octobre 2016, il finit par ratifier l’AECG.
6Au moment de la rédaction de cet article, alors que l’application provisionnelle devrait avoir lieu le 21 septembre 2017, d’autres étapes sont encore possibles. L’objectif de cet article est de faire un état des lieux du commerce de marchandises entre le Canada et l’Union européenne avant l’entrée en vigueur de l’AECG. Dans ce contexte, il s’agit aussi de présenter les quelques éléments qui en font un accord de deuxième génération. C’est une étude quantitative descriptive, sans connotation normative en faveur ou contre les dispositions juridiques de l’AECG ou ses enjeux politiques. Il s’agit aussi d’une perspective un peu plus canadienne qu’européenne dans l’étude des données. Ce qui peut être intéressant pour les analystes des deux continents.
7Il faut reconnaître que cet accord est différent des autres accords commerciaux. Il est généralement présenté comme étant un accord de deuxième génération, c’est-à-dire un accord bilatéral (par rapport au multilatéralisme de l’OMC), mais qui respecte les grands principes de l’OMC tout en mettant d’avantage l’accent sur les barrières non tarifaires que sur les barrières tarifaires.
8L’UE et le Canada sont deux économies développées parmi les plus riches au monde. Les droits de douane entre l’UE et le Canada sont déjà très faibles et les échanges sont très libéralisés. Alors en quoi l’AECG est-il un accord important ? Justement parce que la nature des échanges entre le Canada et l’UE fait que les barrières non tarifaires (les barrières techniques et sanitaires) restent les barrières les plus importantes, sans pour autant exagérer les différences entre deux pays développés. [3]
9Il peut s’agir, d’une certaine façon, d’un projet pilote pour l’UE dont l’objectif est de poser les grands principes de la nouvelle doctrine européenne en matière d’accords de libre-échange. Ces grands principes sont d’autant plus importants que le prochain grand accord en cours de négociation est l’accord de Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (PTCI) entre l’UE et les États-Unis. Dans ce contexte, l’AECG peut effectivement servir de référence. En effet, le Canada présente au moins deux avantages pour tester un texte pilote : (1) c’est une économie riche et déjà bien intégrée avec l’UE et (2) c’est une économie nord-américaine, fortement intégrée avec les États-Unis à travers l’accord de libre-échange nord-américain (Aléna).
10Dans ce contexte, la question de recherche ici est la suivante :
11QR. Quels sont les éléments qui font de l’AECG un accord de deuxième génération ?
12Cette question repose sur deux hypothèses propres aux accords internationaux d’une part, et propres aux accords de deuxième génération d’autre part, respectivement :
13H1. La première hypothèse est que l’AECG joue le rôle normal de facilitateur des échanges et donc de véhicule de diversification commerciale (propriété inhérente à tous les accords). Ce sera l’objet de la section suivante que d’étudier les caractéristiques intrinsèques qui font de l’AECG un accord de première génération.
14H2. La seconde hypothèse est qu’un certain nombre d’outils de l’AECG permettent certes la facilitation des échanges, mais surtout une intégration commerciale plus profonde. Ce sera l’objet de la section 2 que d’étudier les éléments de l’accord dans le contexte du commerce international canadien qui en font un accord de deuxième génération.
15Ces deux temps dans l’analyse suivent en réalité la nomenclature proposée par Baldwin [4] qui explique que le commerce international au XXIe siècle a une double nature : (1) il intègre des composantes nouvelles liées notamment à la réduction des coûts de transport et aux technologies de l’information et de communication qui permettent la mise en place et le développement de chaînes de valeur mondiales ; (2) il conserve des éléments du XXe siècle qui était caractérisé par un commerce d’échanges de produits réalisés dans un pays et vendus dans un autre.
16Dans ce contexte, l’OMC et le multilatéralisme doivent intégrer ces deux composantes. À défaut, des mégas accords commerciaux comme le Partenariat Trans-Pacifique (PTP), ou l’AECG vont combler le vide donnant place à une forme de multilatéralisme régional. [5]
17Dans l’histoire des accords commerciaux canadiens, l’AECG occupera probablement une place importante. Pour l’instant, l’accord le plus important en terme de valeur commerciale fut l’Accord de libre-échange Canada/États-Unis (ALECEU) qui entra en vigueur en octobre 1987. Il a ensuite été remplacé par l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA), un accord trilatéral avec les États-Unis et le Mexique (en vigueur depuis janvier 1994). Le pays a aussi des accords de libre-échange en vigueur avec Israël (janvier 1997), le Chili (juillet 1997), le Costa Rica (novembre 2002), l’Association de libre-échange européen (l’Islande, le Liechtenstein, la Norvège et la Suisse) (juillet 2009), le Pérou (août 2009), la Colombie (août 2011), la Jordanie (octobre 2012) et le Panama (avril 2013). L’ALE a été signé avec le Pérou et les négociations d’ALE conclues avec l’UE et la Corée en 2014 (accord entré en vigueur au 1er janvier 2015). De plus, le Canada illustre son intérêt aux marchés ouverts et aux opportunités d’affaires diverses en négociant présentement avec onze autres pays et blocs commerciaux. Il n’est alors pas surprenant que le Canada soit parmi les pays les plus ouverts parmi les grandes économies (voir graphique 1). L’indicateur présenté ici est maintenant classique et se construit en faisant la somme des importations et des exportations en pourcentage du PIB [6].
Ouverture commerciale (importations et exportations), moyenne 2008-2012 (en % du PIB)
Ouverture commerciale (importations et exportations), moyenne 2008-2012 (en % du PIB)
18L’intérêt pour le Canada est double. D’une part, depuis l’Acte unique européen de 1986, l’Union européenne a travaillé à intégrer ses économies. Jusqu’en 2015, elle représente la première économie au monde contribuant pour 23,7 % du PIB mondial en 2014, par rapport à 22,3 % pour les États-Unis (Banque Mondiale, 2015). En termes de commerce total (somme des importations et des exportations), c’est aussi le premier partenaire commercial des États-Unis et de la Chine (Organisation mondiale du commerce, 2015).
19D’autre part, un autre intérêt pour le Canada est de pouvoir diversifier ses partenaires commerciaux. La forte interdépendance commerciale entre le Canada et les États-Unis a suscité de nombreuses études. Une très grosse partie des exportations canadiennes de biens est destinée en effet aux États-Unis. Le sujet a attiré l’attention aux niveaux national et international et a créé une grande effervescence dans la littérature académique. Cameron and Loukine [7] ont souligné le risque plus élevé de n’avoir qu’un seul gros partenaire. Sarisoy Guerin et Napoli (2008) soulignent qu’il serait dans l’intérêt du Canada de diversifier ses bases d’exportation en rendant les firmes canadiennes plus résilientes aux cycles économiques des États-Unis. Correa and Seccareccia [8] expliquent que l’économie canadienne est plus sensible aux basculements de l’économie états-unienne depuis l’Aléna. Plus récemment, faisant suite aux doctrines commerciales anti libre-échanges énoncées par les deux candidats pendant la campagne électorale américaine de l’automne 2016, l’AECG peut être vu du côté canadien comme une option supplémentaire pour les exportations canadiennes à un moment où l’Alena risque d’être renégocié.
20Nous pouvons répartir les travaux empiriques sur les impacts en deux grandes catégories : (1) les études économiques – par exemple et pour n’en citer que quelques-unes : un article produit par la branche européenne d’Affaires étrangères et Commerce international Canada [9], une étude des coûts et des bénéfices potentiels d’un partenariat rapproché entre l’Union européenne et le Canada menée conjointement par la Commission Européenne et le Gouvernement du Canada [10] ou Leblond & Strachinescu-Olteanu [11], et (2) les études de statistiques descriptives : Lemaire & Cai [12], Sarisoy Guerin & Napoli [13] et Stanford [14].
21Toutefois, la communauté académique est contradictoire sur les impacts potentiels. Toutes choses égales par ailleurs, selon ces études, les évaluations varient entre des gains significatifs [15] ou modestes jusqu’à des pertes pour l’économie canadienne. Leblond & Strachinescu-Olteanu [16] ont estimé que l’AECG aurait un impact de 10,1 milliards de dollars sur les importations provenant de l’UE par rapport aux importations prévues sans accord, et du côté des exportations canadiennes vers l’UE, elles augmenteraient de 2,1 milliards de dollars (soit 6,3 %). Cameron et Loukine [17] ont estimé quant à eux un faible impact sur le commerce international canadien : dans un scénario d’élimination importante des droits de douane dans les secteurs agricoles et dans le reste de l’économie, les exportations sont susceptibles de s’étendre à 0,8 % et les importations d’augmenter de 1,2 % au plus. Ils expliquent que les bénéfices de l’élimination des droits de douane seraient surtout en faveur des provinces de Québec et de l’Ontario, qui ont un niveau relativement élevé d’intégration commerciale avec l’UE. Une crainte serait que l’expansion commerciale proposée avec l’Union européenne détourne une portion du commerce intra-Aléna. On parle alors de distorsion de commerce. Cela restera très probablement au niveau de la crainte théorique aux vues de la taille du commerce avec les États-Unis et surtout de la nature de ces relations commerciales qui ont une composante intra-industrielle relativement forte. L’étude EC-GC (2008) conclut que la totalité des exportations de l’UE vers le Canada augmenterait de 24,3 % ou de 8,6 milliards d’euros tandis que les exportations canadiennes vers l’UE augmenteraient de 20,6 % ou de 8,6 milliards d’euros. Les résultats des deux études dépendent des hypothèses du modèle d’équilibre général calculable (EGC) qui ont été critiquées. En se fondant sur les expériences précédentes de libéralisation du commerce, Lemaire et Cai [18], et Sarisoy Guerin et Napoli [19] estiment aussi que l’accord augmentera l’efficacité des économies. Cependant, Stanford [20] explique que le commerce canadien avec l’Union européenne se dégradera avec une perte nette entre 28 000 et 150 000 emplois en fonction d’un des trois scénarios de réduction de droits de douane et des développements dans les taux d’échange bilatéraux. Pourtant, cet argument a été réfuté par Leblond [21], comme vu précédemment.
22Les différences d’analyse sur les impacts de l’AECG dans la communauté académique semblent refléter les résultats empiriques mixtes sur les effets de l’Aléna sur l’économie canadienne. S’il y a de nombreux éléments de preuve quant aux bénéfices substantiels pour le Canada, les arguments défavorables sont aussi à prendre en compte, sans toutefois les exagérer.
23Nous allons présenter quelques arguments reposant sur la lecture de l’AECG dans le contexte du commerce international canadien. Regarder l’AECG du point de vue canadien est intéressant parce que son profil commercial est moins complexe que celui de l’UE, nous évitant de devoir introduire des variables de contrôle qui nuiraient à l’analyse. Dans les sections suivantes, nous présenterons les arguments en lien avec la première hypothèse, i.e. en quoi l’AECG joue un rôle traditionnel de véhicule de diversification du commerce international. Nous présenterons enfin les arguments en relation avec la seconde hypothèse reliée à l’intégration commerciale.
L’AECG : un accord de première génération
24L’AECG comme véhicule de diversification du commerce canadien devrait jouer un rôle qui est celui des accords traditionnels, que l’on définit ici comme des accords de première génération.
25Dans le cas canadien, le commerce est très homogène, en direction quasi exclusive vers les États-Unis, c’est une des raisons d’ailleurs pour lesquelles l’étude de l’AECG sous l’angle canadien est particulièrement intéressante. La forte interdépendance commerciale entre le Canada et les États-Unis était devenue une réalité bien avant la création de l’Aléna. Néanmoins, dans les deux dernières décennies, en moyenne 82,2 % des exportations annuelles du Canada étaient destinées au marché des États-Unis. Pour cette raison, le Canada a un indice d’Herfindahl-Hirschmann de la concentration des exportations supérieur à celui de l’Union européenne (voir le graphique suivant).
Indice Herfindhal des exportations de marchandises en 2008 et 2012
Indice Herfindhal des exportations de marchandises en 2008 et 2012
Exportations canadiennes par pays ou région, 1990-2013 (en %)
Exportations canadiennes par pays ou région, 1990-2013 (en %)
Note : La méthode de dispersion unité-valeur utilise un facteur α = 15% pour distinguer le commerce intra-industrie horizontal et vertical.26Depuis peu, les exportations canadiennes sont en phase de diversification géographique. Ceci est le résultat de l’importance grandissante des relations commerciales avec l’Union européenne et les économies émergentes d’Asie, notamment la Chine. L’intérêt grandissant des firmes canadiennes envers les États membres de l’UE semble être un signe du rétablissement des relations commerciales « normales » entre le Canada et l’UE après la distorsion initiale qui a suivi l’implantation de l’Aléna. Le tableau suivant montre que les exportations vers les marchés européens dans les cinq dernières années sont dorénavant aux niveaux pré-Aléna (1990-1994).
27Plus élevé que pour des économies comparables de l’OCDE, l’indice de concentration des exportations au Canada illustre aussi sa structure de production qui est fortement influencée par sa grande dotation en matières premières. Tels que présentés dans le tableau suivant, deux groupes de produits (combustibles minéraux et voitures automobiles) ont constitué à eux seuls 39,1 % des exportations du Canada vers le monde en 2013.
28Le Canada et l’Europe ont une longue histoire de coopération économique. Une des premières initiatives de l’après-guerre fut un accord de coopération économique pour développer et diversifier les échanges commerciaux réciproques et favoriser la coopération économique entre la Communauté économique européenne (CEE) et le Canada en 1976. Ce premier accord a préparé le terrain pour la conclusion de nombreux accords sectoriels, par exemple en coopération pour les études supérieures et la formation (1995, 2000), en reconnaissance des procédures d’évaluation de conformité (1998), en coopération douanière (1998), en mesures sanitaires par rapport au commerce de bétail et de produits animaliers (1998), en coopération scientifique et technologique (1995, 1999), en coopération et en coordination des autorités de compétition (1999) et en commerce de vins et de spiritueux (2004). Les importations des deux partenaires commerciaux sont assujetties aux droits de douane suivant la règle de la nation la plus favorisée, avec l’exception notable des droits de douane préférentiels accordés aux produits de la Grande-Bretagne jusqu’à la fin de 1997.
Secteurs d’exportation du Canada (en % du total des exportations)
Secteurs d’exportation du Canada (en % du total des exportations)
29L’idée de départ pour les négociations en vue d’un accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne a couramment été créditée à M. Dorian Price, l’ancien ambassadeur de l’UE au Canada, transmettant une proposition de l’Allemagne pour approfondir la coopération économique bilatérale dès l’automne 2006 [22]. Mais le lancement des négociations officielles avec une échéance précise n’arriva qu’après la prise de position du Premier ministre Jean Charest pour un partenariat Canada-UE fort au Forum économique mondial à Davos (Suisse) en janvier 2007. Les premières négociations ont débuté à Ottawa en octobre 2009 après qu’une étude conjointe Canada-UE [23] ait révélé les bénéfices nets au niveau agrégé pour les deux parties et que l’accord de Prague ait été conclu (mai 2009).
30Le tableau suivant illustre l’évolution du commerce canadien par partenaire pour la période 1995-2013. Nous pouvons y noter l’importance de l’UE.
Commerce canadien par pays, 1995-2013
Commerce canadien par pays, 1995-2013
31Le Canada accuse un déficit commercial persistant avec l’Union européenne qui est largement compensé par le surplus grandissant de commerce des produits et marchandises avec les États-Unis (voir le graphique suivant).
Balance commerciale du Canada avec l’UE et les USA, 1990-2013 (en milliards de $ US)
Balance commerciale du Canada avec l’UE et les USA, 1990-2013 (en milliards de $ US)
32Cette structure des flux commerciaux reflète le déficit en commerce de marchandises avec la plupart des États membres de l’UE sauf les Pays-Bas et la Belgique. Le déficit du commerce extérieur est particulièrement prononcé avec l’Allemagne, le Royaume-Uni, la France et l’Italie. Ces derniers sont d’ailleurs les quatre partenaires commerciaux européens les plus importants du Canada.
33La question se pose maintenant de savoir si la diversification du commerce canadien vers l’Europe va se faire de façon inégale en augmentant l’intensité commerciale avec seulement quelques pays, par exemple les 4 partenaires européens principaux vus ci-dessus.
34Les développements récents à travers la mesure de l’intensité du commerce bilatéral suggèrent que les flux de commerce réels sont inférieurs à l’importance du Canada et de l’UE dans le commerce mondial. C’est probablement une des justifications économiques les plus importantes pour cet accord. Pour analyser ce phénomène, la mesure de l’intensité commerciale est souvent utilisée pour déterminer si la valeur des échanges entre deux partenaires est plus grande ou plus petite par rapport à leur importance respective dans le commerce mondial. Tel qu’illustré dans le graphique 4, malgré la sous-capacité commerciale entre les deux partenaires, une tendance positive a été observée au cours des années 2000. La relation la plus intense de commerce bilatéral est avec le Royaume-Uni, qui en 2009 reflétait l’importance mondiale des deux partenaires. Le commerce avec le Royaume-Uni influence fortement la relation avec l’UE étant donné que les indices pour les deux autres partenaires majeurs (France et Allemagne) sont très loin en dessous de leur potentiel. Ces deux marchés seront donc intéressants à suivre après l’entrée en vigueur de l’AECG afin de voir si l’intuition selon laquelle l’intensité commerciale devrait augmenter avec ces deux pays s’avère vérifiée.
Indice d’intensité de commerce entre le Canada, l’UE, la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni, 2000-2009
Indice d’intensité de commerce entre le Canada, l’UE, la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni, 2000-2009
Partenaires commerciaux européens, moyenne 2004-2013
Partenaires commerciaux européens, moyenne 2004-2013
35Ceci est d’autant plus intéressant que le Royaume-Uni a voté pour une sortie de l’Union européenne. À l’heure de cet article, il nous est impossible de connaître les conditions auxquelles le Royaume-Uni sortira, notamment en matière commerciale. Du point de vue canadien, la sortie du Royaume-Uni est particulièrement importante à suivre, notamment en ce qui concerne les prochaines conditions de libre-échange entre les deux pays. L’accord entre le Royaume-Uni et l’Union européenne peut avoir des répercussions sur les conditions et la dynamique des flux commerciaux entre le Canada et le Royaume-Uni.
Les 20 produits les plus exportés du Canada vers l’UE entre 2011 et 2013 (en millions de dollars US)
Les 20 produits les plus exportés du Canada vers l’UE entre 2011 et 2013 (en millions de dollars US)
Les 20 produits les plus importés depuis l’UE entre 2011 et 2013 (en millions de dollars US)
Les 20 produits les plus importés depuis l’UE entre 2011 et 2013 (en millions de dollars US)
36Les importations canadiennes de l’UE sont caractérisées par une concentration géographique moins forte ainsi qu’une concentration en produits moins importante par rapport à ce que ce que l’on a pu voir pour les exportations. Telle qu’illustrée dans le tableau suivant, la part des 20 importations canadiennes les plus importantes est d’environ 50 % des parts dans les exportations totales de l’UE entre 2011 et 2013. Les produits composant la plus grande part des exportations de l’UE vers le Canada sont les médicaments constitués par des produits mélangés ou non à des fins thérapeutiques ou prophylactiques (8,59 %) ; huiles de pétrole brut et non brut et huiles obtenues de minéraux bitumineux (ensemble représentant environ 13 %) ; les automobiles et autres véhicules automobiles principalement conçus pour le transport de personnes (8,03 %), turboréacteurs, turbopropulseurs et autres turbines à gaz (3,29 %).
37Les principaux pays exportateurs de l’UE sont le Royaume-Uni, l’Allemagne et la France. Le Royaume-Uni constitue une part particulièrement importante des exportations totales de l’Union européenne vers le Canada dans les catégories des huiles de pétrole brut et non brut et des huiles obtenues de minéraux bitumineux (76,7 %), parties d’avions non alimentés et d’avions à propulsion (71,1 %), turboréacteurs, turbopropulseurs et autres turbines à gaz (59,6 %). À nouveau, la question de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne crée certaines incertitudes au niveau des approvisionnements canadiens. De son côté, l’Allemagne s’est forgée une position dominante au niveau des exportations de l’UE en matière d’automobiles et autres véhicules automobiles (72,4 %), tandis que 44,4 % des exportations françaises vers le Canada sont composées de vins de raisins frais, incluant les vins fortifiés. Il est intéressant de souligner que la Pologne représente aussi une portion significative des importations canadiennes, particulièrement pour les produits autres meubles et leurs parties (22,8 %) et arbres de transmission (19,4 %).
38Il est important de noter que la part des produits non classifiés (Produits non spécifiés selon le genre - 99) dans les exportations totales est très grande lorsqu’on la compare à la moyenne internationale. Par exemple, la part des produits non spécifiés dans les importations totales au Canada en 2008 était de 3,6 % et donc suffisamment élevée pour placer le pays au 19e rang parmi les 146 pays membres du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (SH 2007) [24].
39En résumé, l’AECG jouera très probablement un rôle traditionnel d’accord de première génération en ce sens qu’il facilitera la diversification du commerce international canadien tout en permettant l’augmentation de l’intensité commerciale d’une façon un peu mieux répartie au sein des pays européens. Qu’en est-il maintenant des caractéristiques qui en font potentiellement un accord de deuxième génération ?
L’AECG : un accord de deuxième génération
40Pour répondre à notre question de recherche, il nous faut faire ressortir les éléments importants qui peuvent aider à comprendre ce qu’est un accord de deuxième génération. En effet, il faut reconnaître que cette définition d’accord de deuxième génération est toute nouvelle, et elle est encore à construire.
41C’est dans ce contexte qu’il faut regarder les flux commerciaux entre le Canada et l’Union européenne. Ces derniers sont importants et sont la conséquence en particulier des efforts de libéralisation commerciale sous l’ombrelle de l’OMC. Aujourd’hui pourtant, la part du commerce bilatéral entre l’UE et le Canada est seulement une petite portion du commerce international de chacune des parties. L’AECG vise à être un instrument important pour enlever les obstacles institutionnels au commerce et encourager la création de nouveaux échanges et d’opportunités de croissance en approfondissant la coopération économique et politique de ces deux partenaires transatlantiques.
42Le commerce de marchandises a augmenté avec les améliorations des technologies de l’information et de communication. Ces dernières ont permis l’établissement de chaînes de valeur mondiales, allant au-delà du commerce de marchandises en y associant les services, la propriété intellectuelle et les investissements [25]. Dans ce contexte, un accord de deuxième génération est un accord qui facilite le développement et accompagne ces chaînes de valeur.
43L’AECG entre l’UE et le Canada peut être considéré comme un accord novateur et particulièrement intéressant dans le système multilatéral mondial de commerce, et ce, au moins pour trois raisons. Premièrement, le projet de l’AECG a lieu à une époque où l’élan pour la libéralisation commerciale multilatérale (et même bilatérale) a ralenti et où l’enthousiasme pour la ronde de Doha a diminué. Deuxièmement, étant donné l’importance du Canada et de l’UE dans l’économie mondiale, il est probable que les exportateurs de pays tiers soient affectés par les changements de flux commerciaux causés par l’accord. Troisièmement, l’arrangement commercial préférentiel augmentera les pressions pour des arrangements similaires avec cette nouvelle zone constituée de l’Union européenne et du Canada. C’est la dimension « pouvoir de convaincre » (« soft power »).
44Après le moratoire, durant la période 1996-2006, l’UE a adopté une politique commerciale que l’on peut qualifier d’activiste à travers une série d’arrangements commerciaux (essentiellement visant la réduction des barrières tarifaires) avec plusieurs pays développés et émergents [26]. Pour l’opinion générale, l’UE semble avoir adopté des politiques justes et pragmatiques ayant une étendue extra-régionale. À travers ces accords, l’UE est devenue un acteur majeur de la mondialisation (valeur de ces échanges pour l’UE : 3 400 milliards de dollars versus 520 milliards de dollars pour les États-Unis) (Ahearn 2011) [27]. Contrairement aux accords de commerce préférentiels de première génération, l’accord avec le Canada s’applique non seulement à un volume commercial plus important, mais il servira aussi probablement de modèle pour des arrangements futurs avec les pays de l’OCDE. Cela ne veut pas dire que les prochains accords seront un copier-coller, mais les nouvelles pratiques intégrées dans l’AECG pourront être évaluées et soit retenues soit mises de côté pour les prochains accords.
45Alors que leurs compétiteurs étrangers bénéficient de l’accès préférentiel sur plusieurs marchés, les entreprises américaines augmentent la pression pour implanter une politique commerciale activiste aux États-Unis. L’AECG fera peut-être augmenter cette pression. Les implications ont clairement été reconnues le 18 juillet 2008 quand l’ancien président français Nicolas Sarkozy et le président de la Commission européenne José Barroso ont écrit une lettre au Premier Ministre canadien Stephen Harper qui soulignait que l’accord augmenterait les demandes de négociations d’autres accords avec d’autres pays de l’OCDE – notamment le Japon, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, et potentiellement les États-Unis [28].
46Les objectifs de l’accord sont multiples. D’abord, il s’agit d’une franchise de droits de douane pour au moins 98 % des lignes tarifaires des produits non agricoles (98 % pour l’UE et 98,4 % pour le Canada). Ensuite, il s’agit d’intégrer les économies avec des reconnaissances mutuelles de normes bien plus que de libéraliser les échanges. En effet, par exemple, la collaboration autour des questions de propriété intellectuelle devrait être améliorée (un acte important pour les entreprises pharmaceutiques, par exemple). Les barrières non tarifaires sont aussi un élément important du texte de l’accord. Par exemple, les certifications seront plus transparentes et le Canada aura des bureaux de certification CE sur son territoire, diminuant les coûts d’exportation vers l’UE et les risques associés. Enfin, les marchés publics seront ouverts aux entreprises des deux économies comme cela n’a jamais été le cas dans les autres accords auxquels ces économies participent. Enfin, il semble que les termes de l’accord évolueront en fonction des nouvelles législations passées dans chacun des pays et provinces. Cette évolution serait suivie par un comité en charge d’assurer la pérennité de l’accord. Ceci est le fruit des lacunes des accords précédents, et notamment de l’Alena dans le cas du Canada.
Les barrières tarifaires
47Les échanges commerciaux entre le Canada et l’UE sont déjà relativement libéralisés. Les biens de l’UE qui entrent au Canada font face à un droit de douane correspondant à celui de la nation la plus favorisée (NPF) pondéré par les échanges (2,9 % en 2008) [29]. De plus, 73,4 % des importations canadiennes de biens de l’UE en 2008 étaient assujetties à un programme hors droits de douane, comparé à 43 % en 1996 (voir tableau suivant). Ces réductions de droits de douane ont été obtenues à la suite des efforts de libéralisation menés par l’OMC.
Droits de douane NPF ad valorem pour les importations canadiennes (en %)
Droits de douane NPF ad valorem pour les importations canadiennes (en %)
48La réduction graduelle des barrières tarifaires dans le commerce agricole a mené à une part grandissante des produits agricoles importés de l’UE. Malgré la différence observée entre les prix des biens agricoles et manufacturiers – ces derniers ayant tendance à monter beaucoup plus vite que les autres [30] – la part des produits agricoles parmi les importations totales canadiennes de biens de l’UE a grimpé graduellement pour passer de 4,4 % en 1996 à 5,6 % en 2008.
49Malgré ces efforts, une part substantielle des biens importés fait encore face à des droits de douane appliqués dans une fourchette de 5 à 10 % (voir le graphique suivant).
Distribution des importations canadiennes provenant de l’UE entre 1996 et 2008 selon les droits de douane appliqués (en %)
Distribution des importations canadiennes provenant de l’UE entre 1996 et 2008 selon les droits de douane appliqués (en %)
50Par exemple, l’accès au marché de l’UE pour les Canadiens paraît être plus difficile en termes de barrières tarifaires. Pour 58 des 96 codes des lignes tarifaires à deux chiffres du Système harmonisé de description et de codage (SH 2007), les exportateurs canadiens faisaient face à des droits de douane appliqués NPF plus élevés que leurs homologues européens sur le marché canadien. Les secteurs les plus protégés au sein de l’UE sont le tabac et les substituts pour tabacs manufacturés ; préparations de légumes, de fruits ou d’autres parties de plantes, et préparatifs de la viande, de poissons ou de crustacés, ou autres invertébrés aquatiques avec des droits de douane appliqués de 39,67 %, 17,29 % et 15,23 % respectivement. À l’exception de poissons et crustacés, mollusques et autres invertébrés aquatiques, la part des autres chapitres du SH (07) des exportations canadiennes vers l’UE assujettie aux plus hauts droits de douane est en réalité négligeable. En conclusion, il est très probable que ces hauts droits de douane NPF appliqués par l’UE aient un impact négatif sur les exportations canadiennes. Cela devrait s’améliorer pour le Canada avec l’AECG.
51La protection tarifaire des dix secteurs les plus importants d’exportations canadiennes envers l’UE est présentée dans le tableau 18. L’UE impose des droits de douane plus élevés sur les produits importés classifiés comme étant des produits chimiques inorganiques (3,29 %) ; avions, navettes spatiales et leurs parties (2,28 %) ; machinerie électrique et l’équipement et parties associées (1,10 %) et réacteurs nucléaires, chaudières, machines et appareils (1,09 %). D’autre part, les secteurs de l’UE désavantagés qui font face à des droits de douane plus élevés sur le marché canadien sont les céréales et perles fines ou de culture, pierres gemmes ou similaires, métaux précieux, doublés de métaux précieux.
Les barrières non-tarifaires
52Les efforts de l’AECG ont surtout porté sur les barrières non tarifaires. En effet, certaines études ont montré que les barrières non tarifaires étaient un obstacle sérieux au commerce de marchandises Canada-UE [31]. Étant donné le niveau relativement bas de protection tarifaire, les barrières non tarifaires (réglementations, quotas et contingents tarifaires) peuvent être considérées comme étant des obstacles relativement plus importants aux relations commerciales bilatérales.
53À titre d’exemple, les exportateurs canadiens soulignent que les réglementations européennes sur les emballages, l’étiquetage, les certifications et les standards de sécurité sont les barrières les plus communes à l’accès au marché de l’UE.
54Néanmoins, les deux partenaires commerciaux maintiennent des pratiques commerciales équitables. Les disputes bilatérales sont rares. Ces frictions de commerce n’ont ni suscité l’attention des médias ni modifié l’excellente relation politique et économique que maintiennent le Canada et l’Europe. La plupart des désagréments surviennent pour des raisons de concurrence plutôt que pour des raisons reliées à des différences majeures dans les politiques ou les institutions de ces deux partenaires. Tel qu’illustré dans le tableau suivant, dans les dernières deux décennies, le Canada a présenté seulement neuf cas à l’Organe de règlement des différends de l’OMC, et l’UE a déposé six plaintes. À noter que la plupart de ces différends avaient pour secteurs d’origine : l’industrie pharmaceutique, l’automobile, et la manufacture de produits alimentaires et de boissons (secteurs d’autant plus intéressants qu’ils ont en réalité un fort niveau d’intégration de leur chaîne de valeur entre l’UE et le Canada).
Différends commerciaux entre le Canada et l’UE
Différends commerciaux entre le Canada et l’UE
55Une autre dimension concerne les marchés publics et les appels d’offres. L’UE est très ouverte du point de vue réglementaire sur les marchés publics. Elle est néanmoins en train de considérer une révision de sa position en demandant de plus en plus la réciprocité des pays avec lesquels elle signe des accords commerciaux. Les propositions législatives de la Commission européenne visant à renforcer la réciprocité dans l’accès aux marchés publics et à protéger l’UE de ses partenaires commerciaux jugés déloyaux ne font pas l’unanimité au sein des États membres. Par exemple, la Commission européenne pourrait réglementer différemment l’accès aux marchés publics. Les marchés publics représentent 20 % du PIB de l’UE et ne sont pas régis par la jurisprudence de l’OMC. Il est proposé que pour un appel d’offres supérieur à 5 millions d’euros, toute partie contractante dans l’UE pourra demander à la Commission européenne que soient retirées les candidatures étrangères sous prétexte que la non-réciprocité est avérée. La Commission pourra également décider de fermer le marché européen à un pays en cas de discrimination répétée et sérieuse des fournisseurs européens. Ceci risque de fermer la porte aux entreprises de travaux publics canadiennes par exemple, sauf lorsque l’accord entrera en vigueur.
56Les contrats accessibles aux entreprises étrangères sur le territoire de l’UE s’élèveraient à 352 milliards d’euros, tandis que les appels d’offres ouverts aux entreprises européennes porteraient sur 178 milliards d’euros aux États-Unis, et seulement 27 milliards d’euros au Japon.
AECG et chaînes de valeur
57Dans le fond, en poussant l’argument (peut-être) à l’extrême, la question posée ici est celle de savoir si un accord de deuxième génération est une version douce d’une politique d’intégration entre deux économies. Une méthode potentielle pour répondre à cette question est de regarder le proxy que représentent les chaînes de valeurs entre les deux zones économiques que sont le Canada et l’UE.
58Les implications en termes de coûts d’ajustement d’une expansion commerciale peuvent différer de façon importante en fonction de la nature de l’échange. Pour cette raison, nous allons faire la différence entre le commerce intra-industrie et le commerce inter-industrie.
59En effet, une grande proportion du commerce intra-industrie dans la totalité du commerce international est couramment considérée comme étant moins perturbatrice au niveau du marché du travail et des distributions de revenus que le commerce inter-industrie. Pour ce qui est du commerce intra-industrie, il est largement reconnu que des coûts d’ajustement plus élevés résulteront plutôt d’une forte extension des échanges intra-industries verticaux que des échanges horizontaux de biens différenciés.
60Le degré d’échange intra-industrie canadien avec tous ses partenaires importe autant que le commerce bilatéral avec l’UE, l’idée étant que les secteurs canadiens qui font déjà face à un niveau élevé de compétition extérieure – ne serait-ce qu’uniquement avec les États-Unis – auront des coûts d’ajustement transitoires inférieurs après le processus de libéralisation commerciale.
61L’analyse comparative des flux d’exportations et d’importations indique que l’échange de produits manufacturiers entre le Canada et l’UE pourrait être de nature inter-industrie. À ce stade, la comparaison des produits les plus échangés semble révéler les compositions différentes de leurs échanges bilatéraux, qui seraient un échange de ressources naturelles pour des médicaments et du pétrole. Si les échanges inter-industries dominent les échanges bilatéraux entre le Canada et l’UE, cela implique que différents secteurs de l’économie canadienne subiront des coûts d’ajustement différents suivant l’expansion commerciale à venir.
62C’est un fait bien établi qu’une part relativement importante du commerce international entre les économies développées consiste en un échange de biens appartenant à la même classification industrielle (le commerce intra-industrie, CII). La nature, les déterminants et les implications de ce commerce intra-industrie sont différents de ceux du commerce inter-industrie, qui comprend l’échange de biens complètement différents, par exemple l’échange de légumes pour de la machinerie.
63Depuis le travail novateur de Balassa [32], l’aspect intra-industrie du commerce attire beaucoup d’attention dans la littérature théorique et empirique sur le commerce international. Cependant, ce n’est qu’avec l’arrivée de l’étude influente de Grubel et Lloyd (1975) [33] que la recherche empirique sur le CII a prouvé sa robustesse. Ils proposent l’indice Grubel-Lloyd, qui depuis est devenu la mesure la plus utilisée pour calculer le niveau de commerce intra-industrie (CII) entre deux partenaires commerciaux.
64La mesure du commerce intra-industrie a traditionnellement été limitée au commerce de produits manufacturés Hoekman, Maskus, et Saggi [34]. Néanmoins, une liste assez longue de travaux empiriques récents permet de préciser le niveau de commerce intra-industrie pour tous les produits.
65La littérature sur le CII a déterminé que la part montante du commerce intra-industrie ne se conforme pas au modèle traditionnel Chamberlin-Heckscher-Ohlin de commerce international qui propose que le commerce de biens se fasse principalement entre des pays de niveaux économiques différents. Nous sommes davantage dans une configuration à la Linder.
66Les contributions subséquentes de Krugman [35] introduisent l’hypothèse du commerce de biens différenciés horizontalement (qualité similaire, mais attributs différents) produits dans un environnement monopolistique compétitif avec des rendements d’échelle croissants. Leur conclusion est que lorsque les pays s’ouvrent aux échanges internationaux, les niveaux de demande similaires dans les pays avec des fonds équivalents font augmenter le CII. Ce type de commerce est connu sous le nom de commerce intra-industrie horizontal.
67Des études plus récentes ont observé que les échanges de biens internationaux dans la même industrie peuvent aussi impliquer des produits de qualité différente [36], phénomène connu sous le nom de commerce intra-industrie vertical. Étant donné qu’il y a des forces différentes derrière le commerce intra-industrie vertical, la littérature souligne aussi l’importance de distinguer entre le CII vertical basé sur la qualité [37] et celui basé sur les investissements directs étrangers [38].
68Du point de vue théorique, le CII horizontal est accepté et considéré comme étant un indicateur d’approximation cohérent avec les théories de commerce modernes, voire plus pertinent pour analyser le commerce entre des économies développées ; tandis que le CII vertical est considéré comme étant davantage relié aux théories traditionnelles des avantages comparatifs et étant plus adapté à l’analyse du commerce entre pays ayant des niveaux de revenus différents (les modèles commerciaux dits « Nord-Sud »). L’impossibilité de séparer les deux concepts peut facilement nuire aux interprétations des résultats empiriques. Les CII verticaux et horizontaux sont non seulement influencés par des facteurs différents, mais les implications d’ajustement pour un échange donné diffèrent également entre les deux. La décomposition de l’échange permet de mesurer les changements dans le modèle de commerce.
69Le commerce entre deux économies reposant à la fois sur du CII horizontal et vertical est considéré comme étant le moins perturbateur des marchés de travail et des distributions de revenus que le commerce seulement inter-industrie. Dans le cas du commerce intra-industrie, les facteurs de productivité changent avec des perturbations moindres (l’hypothèse de l’ajustement harmonieux). La logique est qu’une expansion commerciale devrait remplacer les facteurs productifs des industries se contractant, mais que ces remplacements seront facilement absorbés par les industries grandissantes. À cause des coûts d’ajustement plus faibles, les secteurs ayant de hauts niveaux de commerce intra-industrie sont ainsi susceptibles de démontrer une attitude moins protectionniste.
70Pour un grand nombre d’observations, il manque en général des données nord-américaines utilisant le Système harmonisé à six chiffres.
71Tel qu’indiqué dans le tableau suivant, il est possible de faire la différence entre le commerce intra-industrie vertical du commerce intra-industrie horizontal, mais une grande portion du CII est encore non allouée. Malgré cette limite, nous pouvons tout de même souligner que parmi le commerce alloué, une partie importante du commerce international avec l’UE est de type inter-industrie, tandis que le commerce intra-industrie constitue une portion importante du commerce avec les États-Unis.
Part du commerce bilatéral canadien avec les États-Unis et les principaux partenaires européens en 2009
Part du commerce bilatéral canadien avec les États-Unis et les principaux partenaires européens en 2009
72La méthode choisie pour faire la différence entre le commerce horizontal et vertical est la méthode d’appariement exportations-importations suggérée par Kandogan [39]. Cependant, le choix du niveau approprié d’agrégation reste un sujet important puisqu’il influence de façon importante la représentation du commerce intra-industrie.
73En valeurs moyennes, pendant la période 1996-2009, le commerce intra-industrie représentait plus de 60 % de la totalité du commerce international canadien. Le commerce intra-industrie est essentiellement un commerce avec les États-Unis, alors que le commerce avec l’UE est davantage inter-industrie. La composition du commerce intra-industrie canadien varie, mais reste essentiellement un commerce intra-industrie horizontal. Nous observons que la part du commerce intra-industrie vertical a légèrement augmenté, ce qui est le signe de l’internationalisation de la chaîne de production.
Conclusion
74Les importations canadiennes venant de l’UE sont caractérisées par une concentration géographique et en produits moins forte que ce que l’on a pu voir pour les exportations. La part des 20 importations canadiennes les plus importantes représente environ 50 % dans les exportations totales de l’UE dans les trois dernières années. Cependant, depuis quelques années, le commerce avec l’UE représente seulement 10 % du flux total de commerce canadien.
75D’un point de vue macroéconomique, nous pouvons nous attendre à ce que les effets soient ressentis disproportionnellement à travers différents secteurs et différentes provinces, parce que (1) il y a des protections douanières différentes et des niveaux d’exposition différents aux concurrents extérieurs, et (2) il y a des différences significatives dans les structures de production et de commerce dans les provinces canadiennes. Ces différences présentent un argument fort pour une analyse sectorielle des implications de l’accord commercial à venir plutôt que de l’ensemble de l’économie (à un niveau agrégé).
76En ce qui concerne les barrières non tarifaires, il s’agit à la fois des accès aux marchés privés et publics. Au niveau de l’accès aux marchés privés, des améliorations peuvent être trouvées dans le système notamment du côté canadien. Ces améliorations des importations ne nuiraient pas à l’économie canadienne, mais au contraire nous pouvons supposer qu’elles permettraient une plus grande flexibilité dans la chaîne logistique. Au niveau des marchés publics, il y aura une plus grande compétition dans les appels d’offres. Pour les appels d’offres canadiens, cela n’empêchera pas les entreprises canadiennes de remporter ces appels d’offres en raison de leur chaîne d’approvisionnement, de leur connaissance du tissu de production local, mais cela rendra les conditions plus strictes et probablement tirera les coûts vers le bas. Les implications en termes de coûts d’ajustement d’une expansion commerciale peuvent différer significativement en fonction de la nature de l’échange.
77Une des conclusions importantes est que la plupart du commerce international avec l’UE est de type inter-industrie, tandis que le commerce intra-industrie constitue une portion dominante du commerce avec les États-Unis. Les coûts d’ajustement des libéralisations et des expansions commerciales sont en moyenne plus faible dans les secteurs exposés au commerce intra-industrie.
78Nous avons vu également que les échanges commerciaux entre le Canada et l’UE sont extrêmement résilients et les facteurs influençant les échanges analysés au niveau des secteurs ne peuvent être généralisés à tous les secteurs. Cela provient de la nature historique des échanges entre le Canada et l’UE. Nous pouvons imaginer que l’entrée en vigueur de l’accord ne peut que renforcer ces liens commerciaux historiques.
79Dans ce contexte, nous avons proposé une analyse des flux commerciaux entre le Canada et l’Union européenne afin d’étudier les éléments qui font de l’AECG un accord de deuxième génération. Nous avons pu insister sur son importance dans la prise en compte des chaînes de valeur et des barrières non tarifaires. C’est en cela qu’il se différencie des accords de première génération qui s’intéressaient d’abord aux barrières tarifaires et ensuite seulement aux barrières non tarifaires.
Notes
-
[1]
Cet article se fonde sur le rapport CIRANO publié aux Presses Internationales de Polytechnique (Warin, 2016) et consiste en une synthèse orientée ici vers la question de la définition d’un accord de deuxième génération. Les erreurs et omissions restent les miennes..
-
[2]
Fellow au CIRANO (Montreal) et Visiting Scholar à Weatherhead Center for International Affairs (Harvard University)
-
[3]
Thierry Warin, Commerce de marchandises entre le Canada et l’Union européenne : un état des lieux avant l’AÉCG. (Montréal, Canada : Presses Internationales Polytechnique, 2016)
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[5]
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