Notes
-
[1]
Le système totalitaire, trad. J.-L. Bourget, R. Davreu et P. Lévy, Paris, Seuil « Points », 1972, p. 215.
-
[2]
Idem, p. 216.
-
[3]
Ibidem, p. 218.
-
[4]
Condition de l’homme moderne, trad. G. Fradier, Paris, Presses-Pocket « Agora », 1983 p. 232.
-
[5]
La vie de l’esprit, volume 1, La pensée, trad. L. Lotringer, Paris, PUF, « Philosophie d’aujourd’hui », 2000, p. 37.
-
[6]
Idem, p. 35.
-
[7]
L’impérialisme, trad. M. Leiris, Paris, Seuil, « Points », 1984, p. 281-282.
-
[8]
Idem, p. 288.
Introduction
1Nous étudierons ici la manière dont Hannah Arendt a compris la relation entre la pensée et l’action ou encore entre la philosophie et la politique. L’idée directrice de son œuvre est que la « vie contemplative » a oblitéré, tout au long de l’histoire de la philosophie, la « vie active », et que dans cette dernière, l’action n’a elle-même jamais été reconnue comme telle, mais toujours subordonnée au savoir-faire technique.
2Le privilège accordé à la pensée pure lui paraît constituer un oubli, constitutif de la tradition philosophique de Platon à Heidegger, de ce qui est au cœur de l’existence humaine, la pluralité. La pensée pure est en effet censée appartenir à un être capable de n’être vraiment lui-même que dans le « dialogue silencieux de l’âme avec elle-même » (Platon), parce qu’il peut alors parvenir, par la dialectique, à la vérité universelle, qui dépasse les opinions changeantes et subjectives. Arendt procède ainsi tout au long de son œuvre à l’analyse des fondements de la tradition philosophique et à la déconstruction de l’illusion de la pensée pure.
3Pour ce faire, elle propose une redéfinition complète des domaines de la vie active (travail, œuvre et action), et elle met en évidence l’importance de l’action dans une existence humaine accomplie, parce que, c’est dans l’action que les hommes intègrent leur condition de pluralité, en même temps qu’ils assument leur mortalité et exercent leur capacité à « entreprendre quelque chose de neuf » (spontanéité).
4Si l’on peut faire un parallèle entre l’analyse initiée par Arendt et l’entreprise phénoménologique, dans sa volonté de retourner aux choses mêmes, on doit pourtant remarquer que la centralité de l’action dans l’œuvre de la philosophe constitue une anti-épochê, le rejet « d’une mise hors circuit de l’attitude naturelle ». L’œuvre d’Arendt récuse en effet toute forme de dualisme entre l’opinion (ou le sens commun) et la vérité, entre le paraître et l’être, entre l’ego et le monde commun.
5Il convient donc de mettre en évidence ce que vise Arendt, en montrant que le privilège accordé à la pensée pure constitue une abstraction, ignorante de ce qui fonde la pensée, à savoir l’inscription de l’être humain dans une pluralité humaine indépassable, à l’intérieur de laquelle il fait l’expérience de l’identité et de la différence, de son historicité et de sa liberté.
Le totalitarisme : la destruction de la pluralité et du monde
6Le point de départ de notre étude peut être l’analyse menée par Arendt des régimes totalitaires, au début des années cinquante, parce qu’elle met en évidence, d’une manière concrète, quoiqu’encore peu développée du point de vue philosophique, l’ensemble des aspects que nous avons évoqués auparavant.
7Son analyse du totalitarisme permet de le distinguer clairement des régimes despotiques et d’en montrer le caractère radical. Les régimes despotiques ou tyranniques sont caractérisés par l’absence de lois, la soumission à l’arbitraire du despote (le despotès est chez les Grecs le maître de maison, et en particulier le maître des esclaves, qui n’est soumis à aucune limite ; le tyran, c’est celui qui a pris le pouvoir par la force et l’exerce en dehors de tout principe légal). Arendt montre, en s’appuyant sur Montesquieu, que le principe d’action qui régit les relations entre les particuliers comme entre les particuliers et le pouvoir, à l’intérieur de la tyrannie, c’est la peur (l’honneur dans les aristocraties, et la vertu dans les républiques).
8Contrairement au despotisme, le totalitarisme est soumis à des lois, mais des lois extérieures à l’action humaine, les lois de l’idéologie (lois de la Nature pour le nazisme et lois de l’Histoire pour le communisme), des lois qui, au lieu de donner un cadre commun aux actions humaines (incertaines), d’assurer une stabilité à l’intérieur d’une condition humaine soumise au changement, sont des lois du mouvement, indifférentes aux décisions humaines et soumettant les hommes à un ébranlement continuel de la société dans laquelle ils vivent.
9Par ailleurs, les régimes totalitaires détruisent toute protection juridique au profit de la séparation entre les « ennemis objectifs » du régime (c’est-à-dire toutes les populations que l’idéologie décrit comme responsables de la division sociale, alors qu’ils sont, le plus souvent, innocents de toute résistance) et les populations qui sont censées former seules la base de la nouvelle organisation sociale (prolétariat, race aryenne, au Cambodge « le peuple ancien » agraire et communautaire).
10Concernant l’absence de lois servant à encadrer l’action, à donner une protection juridique, les régimes totalitaires ne s’adressent pas aux hommes dans leur pluralité, mais ont pour objectif de parvenir à la formation d’un Homme unique, qui agisse sans se rapporter à lui-même et obéisse de manière mécanique. Ils font ainsi disparaître l’action, au sens de l’activité par laquelle les hommes manifestent leur individualité, au sein d’un espace commun de paroles et de décisions. Pour Arendt, ces régimes ne laissent de ce fait place à aucun principe d’action, qu’ils récusent au contraire au profit de l’idéologie.
Ce dont a besoin le règne totalitaire pour guider la conduite de ses sujets, c’est d’une préparation qui rende chacun d’eux apte à jouer aussi bien le rôle de bourreau que celui de victime. Cette préparation à deux visages, substitut d’un principe d’action, est l’idéologie. [1]
12En mettant l’action de côté, le totalitarisme détruit le monde, c’est-à-dire l’espace commun qui sépare et relie tout à la fois les hommes, qui les unit et les individualise en même temps, au profit de masses anonymes dans lesquelles ils ne peuvent que se laisser entraîner par le mouvement ou se condamner à un sentiment d’impuissance. Quand les hommes ne peuvent discuter, par la parole, le sens de leurs actions, ils ne sont plus en mesure de manifester leur individualité, de s’en saisir, de la faire exister au milieu des autres et donc de la faire reconnaître, ils connaissent la « désolation », dans laquelle ils ne réussissent pas à entretenir de relation avec eux-mêmes, faute d’en entretenir avec les autres.
13La pluralité, le monde comme espace commun étant ainsi empêchés, c’est non seulement l’action qui disparaît au profit d’un comportement prédéterminé par l’organisation totale de la société, mais aussi la pensée autonome, se modelant sur les expériences de la réalité, parce que l’idéologie impose un « sur-sens » au réel, une fiction qui récuse tout ce qui ne serait pas en accord avec elle. Arendt dit que l’idéologie est la « logique d’une idée » [2], c’est-à-dire un enchaînement d’idées qui doit permettre de dire de manière exhaustive le sens du réel.
Les idéologies admettent toujours le postulat qu’une seule idée suffit à tout expliquer dans le développement à partir de la prémisse, et qu’aucune expérience ne peut enseigner quoi que ce soit, parce que tout est compris dans cette progression cohérente de la déduction logique. [3]
15Cette étude du totalitarisme n’a pas de soubassement philosophique véritable. C’est à cette lacune que répond La condition humaine (1958), puisque ce livre met en évidence les caractéristiques permanentes de la condition humaine qui seules permettent de comprendre ce qu’est l’humanité de l’homme – qu’on ignore le plus souvent, parce qu’on en a une image mutilée, une image solipsiste –, c’est-à-dire la condition de pluralité qui l’inscrit dans un monde commun, lequel préexiste à chacun mais que l’action contribue à transformer.
Pluralité, vie active et pensée
16Arendt fait apparaître les principales caractéristiques de la pensée et de la vie active, leur unité fondée dans la condition humaine de pluralité, ce qui lui permet d’éclairer la signification de l’illusion philosophique de la domination de la première sur la seconde et de tous les dualismes prédominants dans les représentations philosophiques. Pour Arendt, à la suite d’Aristote, l’homme est un animal politique, sa pensée et son action s’inscrivent dans une « paradoxale pluralité d’être uniques » [4].
17Pour Arendt, la condition humaine se caractérise par la natalité, la spontanéité et la pluralité. Les hommes et les femmes donnent naissance (natalité) à des enfants qui ont une faculté d’entreprendre quelque chose de neuf (spontanéité), qui se distinguent les uns des autres non pas naturellement, mais parce qu’ils manifestent leur singularité par l’action et par la parole. Ils sont pluriels de manière irréductible.
18Mais cette pluralité ne s’exprime pas dans tous les aspects de leur existence (vie active et pensée). Arendt distingue, comme on le sait, trois dimensions de ce qu’elle nomme la « vita activa ».
19Le travail est la condition de la vie humaine, il permet la production de biens consommables qui assurent la conservation de la vie. Pour les Grecs, il se rapproche de ce fait de la nature, parce qu’il est commun à toutes les espèces vivantes.
20L’œuvre se distingue du travail, parce qu’elle produit des biens durables et introduit une artificialité qui distingue le monde humain de la nature. Les œuvres ont connu des évolutions importantes et traduisent directement l’intelligence acquise au cours de l’histoire. Pourtant, elles n’expriment qu’imparfaitement la condition humaine, parce que, sans être indifférentes à la pluralité des hommes (division sociale des tâches, coopération), la singularité y est réduite car personne n’y est irremplaçable et une tâche technique est d’abord une relation avec des savoirs et revient à une situation de solitude (la solitude de l’artisan dans son atelier).
21L’action est la traduction directe de la condition de pluralité, parce qu’elle est le produit de la capacité des hommes de commencer quelque chose, en dehors de toute prévisibilité, dans la mesure où elle n’a pas de but lui préexistant et ne relève donc pas de l’instrumentalité mais de la liberté et aussi parce qu’elle n’a pas de finalité extérieure aux relations entre les hommes, comme nous l’a appris Aristote (distinction de la praxis et de la poiésis), vu que les hommes agissent toujours les uns par rapport aux autres, les uns sur les autres et même ensemble (ce qu’Arendt nomme « action de concert »). De plus, l’action s’associe naturellement à la parole, elles sont toutes les deux des facultés de manifester sa singularité devant les autres.
22Pour Arendt, l’être humain, parce qu’il possède cette faculté d’agir et de parler, ne peut pleinement réaliser son être que dans l’espace public. De ce fait, il n’existe pas de pensée, non plus que de liberté, qui soit séparée de la condition de pluralité des hommes.
23Si l’œuvre de l’homo faber réussit bien à créer un monde d’objets durables, il ne s’agit pas encore d’un monde humain, doué de signification. C’est l’action (qui exprime la liberté humaine) et la parole qui le peuvent. La pensée s’inscrit dans ce cadre, puisque les facultés mentales d’un être humain ne peuvent être séparées de la place qu’il occupe dans une société.
Bien que ces activités [les activités mentales grâce auxquelles nous nous distinguons des autres espèces animales] présentent entre elles de grandes différences, toutes ont en commun d’être une dérobade au monde tel qu’il apparaît et un repli sur le soi. Ce ne serait pas bien grave si nous n’étions que simples spectateurs, démiurges lancés dans le monde pour veiller à ses besoins, pour en jouir, pour nous en distraire tout en conservant quelque autre région en guise d’habitat naturel. Mais, en fait, nous sommes du monde et pas simplement au monde ; nous aussi sommes des apparences avec nos arrivées et nos départs, nos apparitions et nos disparitions ; et, bien que venus de nulle part, nous nous sentons équipés de pied en cap pour faire face à tout ce qui nous apparaît et prendre part au jeu du monde. Ces attributs ne se volatilisent pas quand nous nous trouvons engagés dans des activités mentales et fermons volontairement les yeux du corps, pour reprendre la métaphore platonicienne, afin d’ouvrir ceux de l’esprit. [5]
25Cet énoncé signifie que nous n’avons pas d’identité hors du monde commun, que le rattachement à l’humanité plurielle n’est pas une déchéance dans une quotidienneté inauthentique à la manière de Heidegger, mais au contraire la signification de toute vie authentique, engagée, libre, assumant la condition humaine.
26Pourtant, l’histoire de la philosophie accorde une place importante et durable à l’idée d’une séparation de l’âme et du corps, de l’homme et du monde, de la contemplation et de l’action, en concevant les premiers comme indépendants et supérieurs en dignité aux seconds.
27Arendt récuse toutes les séparations par rapport au monde, au corps, à la sensibilité, à la réalité expérimentée, à ce que les hommes reçoivent donc et qui s’imposent à eux comme leur condition. « Être en vie signifie occuper un monde qui précédait votre arrivée et survivra à votre départ » [6]. Il s’agit d’une critique de la métaphysique, laquelle métaphysique revient chaque fois qu’on récuse le réel au nom d’une réalité inaccessible aux sens et censée commander ce que l’on perçoit (la mathesis universalis cartésienne comme la cité de Dieu du christianisme ou le monde intelligible platonicien). Il y a aussi quelque chose de métaphysique dans le totalitarisme, non seulement dans la sur-réalité idéologique mais aussi dans la mise entre parenthèses de ce qui est spontanément transmis aux hommes, le monde, les liens sociaux, la moralité.
28Cette critique croise la réduction phénoménologique, mais contrairement à la perspective husserlienne qui conduit à la saisie de mon existence comme un moi pur, il s’agit pour Arendt de mettre entre parenthèses tout ce qui se substitue à l’expérience première que les hommes font de leur condition (de pluralité).
29La fuite à l’égard du monde procède de la dévalorisation de la condition humaine, considérée comme sans noblesse, aveugle, trop diverse pour être saisissable et comprise. La pluralité a ainsi largement été considérée comme un défaut à dépasser. Ce qui dérange en elle, c’est son insaisissabilité. Les hommes, parce qu’ils sont pluriels et libres, sont immaîtrisables. De même l’action est imprévisible et irréversible, ce qui impose de sérieuses limites à la volonté de maîtrise.
30La philosophie est de ce fait depuis ses origines en rupture avec l’action. Et la politique elle-même a souvent tenté d’écarter la pluralité au profit de l’unité et de rendre l’humanité intelligible, notamment en se réduisant à l’action de légiférer, qui a un résultat clairement identifiable, parce qu’elle fixe des cadres qui introduisent de la stabilité dans les affaires humaines. Elle s’apparente alors au travail de l’artisan (fabrication, œuvre).
Une éthique de l’amour du monde : l’exemple des droits de l’homme
31Pour Arendt, la politique, qui ne se réduit pas à l’exercice du gouvernement (distinction commandement-obéissance), est ce qui donne pleinement sens à la condition de pluralité, puisque dans la politique, on s’expose, on décide, on justifie ses décisions par la parole. C’est le moment par excellence où les hommes se rencontrent, réalisent ce qu’ils sont, réfléchissent et pensent de la manière la plus lucide et la plus alerte, deviennent donc des êtres complets.
32Arendt met en évidence les tendances déjà fortes dans les années cinquante et soixante vers un économisme et un technicisme dépolitisés, traduisant une indifférence à l’égard du monde commun. Contre ces tendances, Arendt fonde une éthique de la préservation du monde, comme espace qui relie et sépare les hommes, condition de leur humanisation, de leur intégration à une communauté et de leur individualisation.
33Notre auteur traque toutes les formes de prétendue autonomie individuelle, d’essence aristocratique dans le cas de la philosophie grecque ou d’essence démocratique dans le monde moderne de l’État de droit et de la société économique. Cela est dangereux, le désintérêt pour l’action et la politique tend à rendre les hommes superflus, parce que l’existence humaine n’a pas de consistance propre, quand elle se réduit à la seule dimension naturelle du vivre. Pour Arendt, il n’existe pas de droits inhérents à une nature humaine immuable, dont les hommes pourraient jouir, tout en ne faisant partie d’aucune communauté humaine donnée. Les apatrides, réfugiés et victimes des régimes totalitaires sont privés de tout droit, en étant expulsés de leur communauté d’origine ou déchus de leurs droits nationaux (lois de Nuremberg, 1935). Il n’y a pas de droits qui transcendent notre appartenance au monde, entendu comme domaine d’expression de la pluralité humaine agissante.
34Ainsi les droits de l’homme doivent-ils être compris non comme un droit naturel mais comme le « droit d’avoir des droits », c’est-à-dire le droit d’appartenir à une communauté qui protège la spontanéité des hommes, leur capacité d’agir, et qui ne les considère donc pas comme des atomes sociaux, dont on pourrait éventuellement décider l’éradication ou la marginalisation, si le besoin s’en faisait sentir pour la société prise comme un tout.
Être privé des Droits de l’Homme, c’est d’abord et avant tout être privé d’une place dans le monde qui rende les opinions signifiantes et les actions efficaces. Quelque chose de bien plus fondamental que la liberté et la justice, qui sont des droits du citoyen, est en jeu lorsque appartenir à la communauté dans laquelle on est né ne va plus de soi, et que ne pas y appartenir n’est plus une question de choix, ou lorsqu’un individu se trouve dans une situation telle qu’à moins de commettre un crime, la manière dont il est traité par autrui ne dépend plus de ce qu’il fait ou ne fait pas. Cette situation extrême, ni plus ni moins, est la situation des gens que l’on prive des droits de l’homme. Ce qu’ils perdent, ce n’est pas le droit à la liberté, mais le droit d’agir ; ce n’est pas le droit de penser à leur guise, mais le droit d’avoir une opinion. Dans certains cas les privilèges, et dans la plupart les injustices, les anathèmes ou les condamnations leur sont infligés au gré du hasard et sans aucune relation avec quoi que ce soit qu’ils fassent, qu’ils aient fait ou pourraient faire. Nous n’avons pris conscience de l’existence d’un droit d’avoir des droits (ce qui signifie : vivre dans une structure où l’on est jugé en fonction de ses actes et de ses opinions) et du droit d’appartenir à une certaine catégorie de communauté organisée que lorsque des millions de gens ont subitement perdu ces droits sans espoir de retour par suite de la nouvelle situation politique globale. [7]
36Le droit est en effet garanti exclusivement par l’appartenance à une communauté, parce qu’il n’y a qu’en elle que des garanties peuvent être accordées à chacun par tous. « Il semble qu’un homme qui n’est rien d’autre qu’un homme a précisément perdu les qualités qui permettent aux autres de le traiter comme leur semblable » [8].
37Les hommes ne peuvent pas compter sur leur seule existence individuelle pour leur garantir des droits.
Conclusion
38Le totalitarisme a réalisé une potentialité tragique de « l’acosmisme » (indifférence à l’existence du monde), de la prétendue indépendance de la pensée, de la nature humaine à l’égard du monde commun, d’une intelligence technique séparée de la responsabilité politique et du sens commun (Eichmann).
39La philosophie d’Arendt s’efforce donc de constituer une éthique du monde commun, de l’action politique, c’est-à-dire de mettre le souci pour le monde au cœur d’une critique des crises qui secouent la modernité.
Notes
-
[1]
Le système totalitaire, trad. J.-L. Bourget, R. Davreu et P. Lévy, Paris, Seuil « Points », 1972, p. 215.
-
[2]
Idem, p. 216.
-
[3]
Ibidem, p. 218.
-
[4]
Condition de l’homme moderne, trad. G. Fradier, Paris, Presses-Pocket « Agora », 1983 p. 232.
-
[5]
La vie de l’esprit, volume 1, La pensée, trad. L. Lotringer, Paris, PUF, « Philosophie d’aujourd’hui », 2000, p. 37.
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[6]
Idem, p. 35.
-
[7]
L’impérialisme, trad. M. Leiris, Paris, Seuil, « Points », 1984, p. 281-282.
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[8]
Idem, p. 288.