Notes
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[1]
Cette lettre fait partie de la collection Cely-Trevilian (SAL MS 444). Nous remercions la Society of Antiquaries d’avoir bien voulu nous autoriser à la publier, ainsi que M. Adrian James, bibliothécaire-adjoint, qui a aimablement facilité nos recherches.
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[2]
Et non pas, comme le prétendent les éditeurs de la correspondance de Balzac (Corr. Pl. II, p. 1356), « directeur » (voir à ce propos l’Annuaire dramatique de la Belgique, deuxième année [1840], p. 121). Les fonctions de directeur du Théâtre du Vaudeville furent confiées entre 1830 et juin 1840 à l’ancien collaborateur de Lord R’Hoone, Étienne Arago, et ensuite (Arago ayant été renvoyé par ses actionnaires mécontents) à Aspaïs Trubert. C’est indubitablement de ce dernier que parle Balzac dans sa lettre à Mme Hanska du 3 juillet [1840], lorsqu’il proclame que « le directeur n’a pas le sou » (LHB, t. I, p. 516). Sur la femme de Trubert, qui était la maîtresse de Sylvain Gavault, homme d’affaires de Balzac à l’époque, et que Balzac évoque à plusieurs reprises, voir ibid., p. 784, n. 1, p. 812, et t. II, p. 702, n. 3.
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[3]
À noter aussi l’éventualité, émise par Patrick Berthier (dans sa note « Folbert, Chabert, Falbert ? », AB 1987, pp. 394-398), que Le Colonel Chabert porte les traces d’une connaissance, de la part de Balzac, de Folbert, ou le Mari de la cantatrice, vaudeville de 1832 signé Léon [Halévy], Jaime, et Jules [Jules-Henry de Vernoy, dit de Saint-Georges]. Précisons, avec F.W.J. Hemmings, que le Théâtre du Vaudeville ne montait pas seulement des vaudevilles (voir Hemmings, Theatre and State in France 1760-1905, Cambridge, Cambridge University Press, 1994, p. 168).
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[4]
lhb, t. I, p. 489.
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[5]
L’enveloppe a été également conservée dans le même album : « Monsieur Dutacq, 16, rue du Croissant, Paris » ; cachet de la poste : « 1 juillet ». Nous tenons à remercier le docteur Susan Wharton pour son aide précieuse quant au déchiffrement de ce manuscrit.
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[6]
Pièce mise en évidence par René Guise (qui cependant la date du 19 octobre 1839) dans son article « Un grand homme du roman à la scène (suite) », AB 1968, pp. 338-340. R. Guise reprend cette discussion dans BO, t. XXII, pp. 697-712. Voir également Corr. Pl. II , p. 610.
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[7]
Pierre Descaves commente cette collaboration ainsi : « Dans les Coulisses du passé, en 1873, Paul Foucher apporte cette note pittoresque : aux répétitions, Jaime, le “fournisseur” habituel des Bouffes-Parisiens, croyait à un succès. Il manifesta l’intention de signer la pièce en même temps que Balzac ; il fut proprement invité à aller se promener, car la direction de la Gaieté spéculait sur “une affiche de grandes places” et comptait principalement sur le nom du père de La Comédie humaine. Jaime s’effaça » (Descaves, Balzac dramatiste, Éditions de la Table ronde, 1960, p. 183). Signalons que Foucher dut confondre Ernest Jaime avec son fils Adolphe (né en 1824), qui, effectivement, fut beaucoup joué aux Bouffes-Parisiens.
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[8]
Selon P. Descaves, « pour la “mise en scène”, bien que le mot n’existât pas, M. Meyer [Horace Meyer, co-directeur, avec Lemoine-Montigny, du Théâtre de la Gaîté] fit appel au froid et méthodique Dutacq, qui ne sut pas procurer à l’ouvrage, déjà passablement démantelé par les « refaiseurs », ni l’allure, ni le ton de la comédie moderne auxquels Balzac avait pensé en écrivant ce “mélodrame vertueux” » (op. cit., p. 185). Le même auteur insiste sur le fait que Bayard et Jaime « ont accentué tout le côté « mélo » de la comédie » (ibid., p. 187).
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[9]
Voir Corr. Gar., t. IV, pp. 612-613 (lettre datée du 29 juillet [18]43). Contrairement à ce qu’affirme R. Guise (voir BO, t. XXII, p. 699), cette lettre n’indique pas forcément que Balzac ignorait le travail de Bayard, qui, d’ailleurs, suit de près le manuscrit de l’auteur. Rappelons que le manuscrit de Paméla Giraud, entièrement de la main de Balzac, se trouve au fonds Lovenjoul.
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[10]
Cette répartition du travail entre Bayard et Jaime a été savamment étudiée par R. Guise (voir BO, t. XXII, p. 702 et pp. 705-709). En guise de conclusion, il observe : « La simple et sincère jeune fille de Balzac devient, chez lui [Jaime], une héroïne de mélodrame » (p. 706).
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[11]
Voir BO, t. XXII, p. 697, et « Un grand homme du roman à la scène (suite) », art. cit., p. 338.
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[12]
BO, t. XXII, p. 701. L’hypothèse de R. Guise est retenue, mais non sans un apparent brin d’hésitation, par R. Pierrot et H. Yon (Corr. Pl. II , p. 1176, n.1 de la lettre 39-239).
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[13]
LHB, t. I, p. 501. Rappelons cependant qu’une partie de ce projet de pièce (jamais réalisé) que fut Le Mariage de mademoiselle Prudhomme passe dans une autre pièce à naître de la plume de Balzac à cette époque, à savoir Vautrin, dont l’unique représentation, on le sait, fut celle du 14 mars 1840 (voir BO, t. XXII, p. 642). Un projet balzacien de faire « reparaître » Monnier dans un vaudeville intitulé La Conspiration Prudhomme se fera jour en 1848 (voir Corr. Gar., t. V, p. 345, n. 2, et 349, ainsi que BO, t. XXII, p. 739).
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[14]
Corr. Pl. II , p. 1356. Il faudrait lire en fait 1804. Jaime décédera à Versailles, le 7 juin 1884.
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[15]
Jaime, Souvenirs de 1848 à 1871, Versailles, Adolphe Laurent, 1871, p. 5.
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[16]
Henri Blémont, « Ernest Jaime », dans Dictionnaire de biographie française (fascicule datant de 1990).
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[17]
Voir Blémont, art. cit., ainsi que Ségolène Le Men, « The Musée de la caricature », in Todd Porterfield, The Efflorescence of Caricature 1759-1838, Farnham, Ashgate, 2011, pp. 175-94 (p. 178).
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[18]
Il importe de noter qu’en tant que peintre, Ernest Jaime adopte, à ses débuts du moins, une autre version de son nom, à savoir Jean-François Jaime. E. Bénézit, dans son remarquable Dictionnaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs, fera malencontreusement d’Ernest et de Jean-François deux artistes distincts ; mais l’article qu’il lui a consacré retient qu’il « figura au Salon, de 1831 à 1864, avec des Vues […]. Le Musée de Compiègne conserve de lui : Rue de Paris. Il fit représenter plusieurs pièces au Vaudeville, l’auteur dramatique Adolphe Jaime est son fils ». En ce qui concerne Ernest Jaime, Bénézit précise qu’il « a gravé de nombreuses estampes à partir de 1825 d’après H. Vernet, Gudin, Gérard, Jacottet, Destouche, Thomas, X. Leprince, Ciceri, Grenier, Decamp, de Dreux, etc, notamment dans la Revue des Peintres, L’Album cosmopolite (1838) ».
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[19]
Voir S. Le Men, « The Musée de la caricature », p. 178, ainsi que Valérie Sueur-Hermel, « Avant la lettre : lithographies de Daumier pour Le Charivari », Revue de la Bibliothèque nationale de France, 19 (2005), pp. 21-25.
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[20]
George Beaumont Wicks en recense une cinquantaine (voir son précieux répertoire, The Parisian Stage, University AL, University of Alabama Press, 1950-1967, t. III).
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[21]
Voir Édouard Fournier, Variétés historiques et littéraires, Jannet, puis Pagnerre, 1855-1863, t. II, p. 127 ; et la notice nécrologique qui parut dans la Gazette anecdotique, littéraire, artistique et bibliographique, 1884, p. 341.
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[22]
Jaime, Souvenirs, éd. cit., p. 6.
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[23]
Henri Dalméras, La Vie parisienne sous la république de 1848, Albin Michel, 1921, p. 412.
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[24]
Émile Thomas, Histoire des Ateliers nationaux, Michel Lévy frères, 1848, p. 86 ; voir aussi ibid., pp. 110-111. Thomas rappelle également que « Ce pauvre Jaime pourtant, avait le talent de se faire des ennemis avec une merveilleuse facilité. Je me rappelle ! entr’autres, une violente algarade qu’il faillit avoir avec M. Martelet » (ibid., p. 86).
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[25]
Ce recueil renferme, parmi d’autres, des vers adressés « À Sa Majesté l’Empereur Napoléon III » (1852) et « À Sa Majesté l’Impératrice » (1858).
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[26]
Jaime, Souvenirs, p. 6.
-
[27]
« JAIME, auteur dramatique. Pseudonyme de ROUSSEAU » (Félix Bourquelot et Alfred Maury, La Littérature française contemporaine, 1827-1849, t. IV, Delaroque aîné, 1852, p. 377). Précisons que ces auteurs font de l’auteur dramatique et du rédacteur du Musée de la caricature ([E.] JAIME) deux écrivains différents. Dans l’article du même ouvrage consacré à P.-J. Rousseau on lit : « Presque toutes les pièces de M. Rousseau ont été publiées sous le nom de M. JAIME » (t. VI, Delaroque aîné, 1857, p. 247). Voir aussi Georges d’Heilly, Dictionnaire des pseudonymes, 1868 (« JAIME »).
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[28]
Son décès est attesté dans un entrefilet paru dans Le Constitutionnel du 27 juillet 1849 : « Un des doyens de la presse judiciaire, M. James Rousseau, est mort subitement ce matin dans les bureaux de la Gazette des Tribunaux, dont il était un des plus spirituels rédacteurs. »
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[29]
Trois (et seulement trois) des vaudevilles de Jaime (et autres) sont attribués par le catalogue de la BnF à « Jaime, Pierre-Joseph Rousseau dit ».
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[30]
La France littéraire, t. VIII (1836), pp. 234-235.
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[31]
La Littérature française contemporaine, t. VI, p. 246. Dans ces chroniques, « l’information laisse place à l’anecdote, le sérieux au rire, l’exactitude des paroles rapportées aux bons mots que produira la verve du chroniqueur » (Amélie Chabrier, « “Que la fiction vous serve de guide dans ce pays des réalités”. Mutations de la poétique de la chronique judiciaire dans Le Tribunal illustré (1879-1882) », Interférences littéraires/Literaire interferenties, 7 (novembre 2011), pp. 23-40 (p. 28).
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[32]
Voir Wicks, op. cit., t. III. Dans son volume précédent, Wicks, suivant le catalogue de la BnF, lequel cite à son tour celui de Soleinne, attribue à P.-J. Rousseau un petit nombre de vaudevilles créés pendant la Restauration – mais ceux-ci seraient à attribuer plutôt à Auguste Rousseau. Le Quérard de La France littéraire semble avoir été à l’origine de cette confusion, laquelle aurait également induit en erreur F.W.J. Hemmings, lorsqu’il prétend que P.-J. Rousseau fut, avec Alexandre Dumas et A. de Leuven, l’auteur d’un vaudeville intitulé La Chasse et l’Amour, représenté au Théâtre de l’Ambigu-Comique le 22 septembre 1825 (voir Hemmings, The Theatre Industry in Nineteenth-Century France, Cambridge, Cambridge University Press, 1993, p. 253).
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[33]
Sa première pièce, Le Chevreuil ou le fermier anglais, qui, selon son propre dire, fut « confiée au talent de l’inimitable Odry » connut « un éclatant succès » lorsqu’elle fut jouée sur la scène du Théâtre des Variétés (voir Jaime, Souvenirs, éd. cit., p. 6). Les co-auteurs de Jaime, selon Wicks, furent Léon Halévy et, vraisemblablement, Odry lui-même.
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[34]
Bien évidemment, cette cessation d’activité s’expliquerait tout aussi bien par la participation de Jaime à la vie publique à partir de 1848 (voir Blémont, art. cit.).
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[35]
BO, t. XXII, p. 701.
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[36]
Il s’agit d’un feuilleton paru dans Le Siècle, le 11 juillet 1859. R. Guise fait peu de cas du fait que le récit de Biéville, vieux de vingt ans en ce qui concerne les faits, situe la collaboration que nous sommes en train d’examiner bel et bien dans le contexte de l’histoire de la genèse de Paméla Giraud (voir BO, t. XXII, pp. 700-701). Nous profitons de cette occasion pour remarquer qu’à l’époque on se trompait souvent en voyant dans le nom de Desnoyers de Biéville un pseudonyme de Louis Desnoyers (voir, par exemple, l’Annuaire dramatique de la Belgique pour 1839, p. 80 et p. 114, ainsi que l’article consacré à ce dernier dans Le Gaulois du 12 mai 1913).
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[37]
Intitulée De l’or ou le rêve d’un savant (Théâtre du Gymnase, 11 novembre 1837).
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[38]
Voir BO, t. XXII, p. 701.
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[39]
Il convient d’insister également sur le fait qu’il n’existe rien qui relie le projet « Prudhomme » à Jaime ni à Bayard.
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[40]
Voir BO, t. XXII, p. 709.
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[41]
Voir ibid., p. 700.
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[42]
Voir LHB, I, p. 516 (lettre datée du 3 juillet 1840).
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[43]
Voir ibid., p. 704. Sur l’histoire des représentations de Paméla Giraud, voir ibid., p. 710, ainsi que Guise, « Un grand homme du roman à la scène (suite) ».
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[44]
Il n’est pas exclu que la rédaction, du moins en grosse partie, remonte, comme le prétend Lovenjoul, aux années 1837 et 1838.
1 Il existe dans les collections de la Society of Antiquaries of London (Burlington House, Piccadilly) un album d’autographes qui abrite une lettre de Balzac, laquelle semble avoir échappé au regard des chercheurs [1]. Il s’agit d’un billet adressé depuis Les Jardies à Armand Dutacq, directeur-gérant du Siècle, mais en fait destiné à Ernest Jaime, directeur de scène [2] auprès du Théâtre du Vaudeville et auteur de nombreux vaudevilles, créés le plus souvent, et selon l’usage, en collaboration. Rappelons que parmi ceux-ci figure le drame-vaudeville en trois actes tiré du Père Goriot en 1835 et signé Théaulon, Decomberousse et Jaime [3].
2 Le billet en question porte la date du « 30 juin », sans aucune indication de l’année, mais il date manifestement de 1839, dans la mesure où Balzac y fait allusion à la fameuse chute qu’il avait faite chez lui le 2 juin de cette année, accident qui l’avait obligé à garder le lit pendant quelques semaines (40 jours, écrira-t-il à Mme Hanska [4]). Il faut convenir pour autant que cette lettre n’apporte aucun élément nouveau quant aux conséquences de cette chute. Son intérêt est autre.
3 Cette petite lettre constitue, en effet, une nouvelle pièce dans l’histoire complexe mais chichement documentée des rapports entre Balzac, Ernest Jaime et un des collaborateurs de ce dernier, Jean-François-Alfred Bayard. En apparence bien anodine, elle nous semble, en fait, de nature à modifier sensiblement les conclusions auxquelles est arrivé René Guise au sujet de la chronologie des œuvres théâtrales entreprises par Balzac dans les années 1839-40, et notamment en ce qui concerne la genèse de Paméla Giraud. En même temps, elle nous offrira l’occasion de faire le point sur la carrière d’un personnage peu connu, qui occupa néanmoins une place éminente dans l’histoire du vaudeville français des années 1830 et 1840.
4 Voici le texte intégral de cette courte missive :
30 juin [1839]
Mon cher Dutacq faites lire ceci à votre fëal Jaime
Mon cher Maître, je ne suis sorti de mon lit qu’il y a deux ou trois jours, il y a eu des complications, et sous peine d’être alité six mois, il a fallu obéir à tout ce que les médecins ont ordonné ; néanmoins, depuis 4 jours, je suis à mon bureau, je puis travailler et tout sera prêt mercredi. Je suis content et c’est tout vous dire, je ne dis pas cela souvent, j’ai retrouvé mes précieux instruments de cervelle en bon état, mais la jambe ne me permet pas la moindre marche un peu difficile, je ne tourne pas la cheville comme le poignet.
mille complimens
de Bc
aux Jardies Vous pouvez venir mercredi à 9 heures du matin, à moins avis contraire qui vous annoncerait que je vais à Paris [5]
6 Jusque-là, l’élément principal du dossier des rapports entre Balzac et Jaime était constitué d’une lettre que celui-ci adressa au romancier le 17 octobre 1839 [6]. D’après cette lettre, Jaime, ayant reçu ce qu’il appelle « le travail de M. Bayard », sollicite d’urgence un rendez-vous avec notre auteur. On sait, de même, que Jaime et Bayard seront responsables du remaniement de Paméla Giraud, telle que la pièce (abusivement attribuée à Balzac [7]) sera finalement représentée au Théâtre de l’Odéon (et ensuite au Théâtre de la Gaîté) en septembre 1843 [8]. Comme Balzac devait l’apprendre par une lettre que lui enverra le très fidèle Sylvain Gavault [9], les deux premiers actes étaient dus à Bayard, et les trois suivants à Jaime [10]. Toujours est-il que R. Guise, à travers une analyse à la fois subtile et ponctuelle, voit dans ce « travail » de Bayard dont parle Jaime en octobre 1839 une allusion non pas à Paméla Giraud, comme l’avaient supposé Lovenjoul et à sa suite Douchan Z. Milatchitch [11], mais bien au « scénario d’une pièce sur Prudhomme, plus précisément sans doute du Mariage de mademoiselle Prudhomme [12] » dont Balzac avait longuement entretenu Mme Hanska dans une lettre datée du 10 octobre 1837 et à laquelle il fera de nouveau allusion dans une lettre qu’il adresse à la même correspondante le 20 janvier 1840 : « En ce moment j’organise une pièce pour un homme d’un grand talent, pour Henri [sic] Monnier dont je voudrais tirer parti, ce sera une pièce où Prudhomme jouera le principal rôle [13]. » Nous soutiendrons au contraire que dans la lettre de Jaime du 17 octobre 1839, ainsi que dans celle que nous présentons, que Balzac lui avait donc adressée par le truchement de Dutacq le 30 juin, il s’agit bien de Paméla Giraud.
7 *
8 Quelques remarques s’imposent d’abord sur l’identité du vaudevilliste Jaime, à propos de qui les éditeurs de la Correspondance de Balzac se contentent de dire qu’il naquit en 1802 [14] pour mourir en 1884, ayant embrassé une carrière de « journaliste et polygraphe ». Certes on sait relativement peu de choses sur sa vie, mais il est tout de même possible d’embrasser l’essentiel à partir de quelques témoignages épars. Selon ses propres Souvenirs de 1848 à 1871, Jaime naquit en 1804, fils d’un fabricant de bronzes « ruiné par l’invasion de 1815 ». « Sachant à peine lire et écrire, mais avide d’instruction », il se livra « sans professeur à l’étude du dessin », tout en développant une passion tout aussi grande pour la littérature [15]. Ses premiers moyens de subsistance lui furent fournis par le dessin et la lithographie. Il se souviendra avoir commencé par colorier des éventails ; mais il réussit bientôt à donner de « petites lithographies dans le goût romantique [16] ». Il participa notamment à la Galerie de S.A.R. Mme la duchesse de Berry (1822) et aux célèbres Voyages pittoresques et romantiques dans l’ancienne France, du baron Taylor et Charles Nodier [17]. Il fut en même temps aquarelliste [18]. Une aquarelle exposée au Salon de 1831 lui valut une médaille d’or de deuxième classe. Quérard, dans La Littérature française contemporaine, le fait figurer, avec Jacob et autres, comme auteur d’un Cours complet de dessin. Pendant la monarchie de Juillet, il crée des légendes servant de commentaire à des caricatures de Philipon et de Daumier [19], tout en dirigeant, à partir de 1834, les numéros successifs de l’ouvrage collectif Le Musée de la caricature, lesquels, en 1838, furent réunis en deux volumes aujourd’hui recherchés. Ceci à côté de sa participation entre 1831 et 1847, avec de nombreux collaborateurs différents, à une production de vaudevilles qui, de son propre aveu, aurait compté « près de cent pièces [20] ». En 1848, il entra dans l’administration, devenant en 1852 commissaire central à Versailles [21]. La BnF conserve une circulaire électorale du citoyen Jaime qui date de 1848. Dans ses Souvenirs, celui-ci raconte comment, « effrayé du désordre qui régnait dans Paris », il offrit au Maire du 5e arrondissement de « tenter de rétablir l’ordre » [22]. Il fut dûment chargé de « la surveillance du service de l’ordre à l’entrée extérieure de la Mairie », ce qui mène, dans ces mêmes Souvenirs, à une description assez détaillée de ses activités. Selon Henri Dalméras, Jaime vaudevilliste aurait interprété également un rôle imprévu auprès du Club central des Ateliers nationaux, lors de la création de ceux-ci en 1848 :
Le vaudevilliste Jaime recevait dix francs par jour pour prendre la parole dans chaque séance du club. Il lui arriva souvent (et c’était, d’ailleurs, dans ses attributions) de calmer par un mot d’esprit, et plus encore par un calembour, les clubistes les plus exaltés. Ils riaient et ils étaient désarmés. Ce maintien de l’ordre par le vaudeville est une des plus ingénieuses inventions de l’époque. Malheureusement, à la longue, elle perdit beaucoup de son efficacité [23].
10 Dans son histoire des Ateliers nouveaux, Émile Thomas, premier directeur des mêmes Ateliers, parle assez longuement de Jaime, qui effectivement en fut l’un des quatre sous-directeurs, chargé, pour son compte, de la discipline générale, où « il rendit de réels et d’éminents services [24] ». Retenons que les collections de la BnF renferment également un document imprimé de 1848 intitulé : « Au nom du citoyen Émile Thomas, commissaire de la république, le citoyen Jaime, aux ouvriers. Discours prononcé à la séance préparatoire du dimanche 2 avril. » En 1850, Jaime fera paraître un petit recueil de Chansons populaires, dédiées aux ouvriers amis de l’ordre. Au cours des dernières années de son existence, il signe plusieurs recueils de dessins et de lithographes, un recueil de vers (Un peu de tout. Heures perdues)), paru en 1866 [25], un volume de la même année intitulé À soixante ans, suivi, en 1871, des Souvenirs de 1848 à 1871 et d’une plaquette intitulée Les Prussiens à Versailles et dans le département de Seine-et-Oise : protestation contre les assertions du Moniteur officiel prussien.
11 Dans ses Souvenirs de 1848 à 1871, Jaime relate que de 1831 à 1848 il fut « témoin de bien des événements », et fut « en relations constantes avec des célébrités politiques, littéraires et artistiques ». Il prétend avoir « recueilli de curieuses notes qu’un jour je publierai, ce sera la préface de ce livre, elle viendra après l’épilogue [26] ». Il est permis de regretter l’apparente perte de ces pages, lesquelles auraient sans doute renfermé au moins une mention de ses rapports avec l’auteur de Paméla Giraud.
12 Ne négligeons pas pour autant le fait que, selon les continuateurs de La France littéraire de Quérard, toute la production littéraire et historique de Jaime était, en fait, due à Pierre-Joseph Rousseau [27], nonobstant la mort de celui-ci en 1849 [28], ce qui explique sans doute le fait que le National Union Catalog, ainsi que le catalogue du British Museum (qui deviendra par la suite celui de la British Library) attribuent à Rousseau l’intégralité des écrits d’Ernest Jaime, vaudevilles et autres [29]. Selon Quérard [30], Rousseau fut le beau-fils de l’imprimeur parisien P. Gueffier. Il serait devenu, en 1823 ou 1824, rédacteur de la Gazette de France, fournissant à ce journal des articles de littérateur et de poésie. Il aurait été attaché aussi à la rédaction du Drapeau blanc. Quérard précise également que Rousseau fut l’auteur d’ « une foule de chansons insérées dans les Soupers de Momus et autres recueils ». Selon les auteurs de la continuation de La France littéraire de Quérard, Rousseau fut aussi pendant vingt ans un des rédacteurs de la Gazette des Tribunaux, où il donna « des comptes rendus gais et spirituels des scènes de la police correctionnelle [31] ». Sous le quasi-pseudonyme de « James Rousseau », il participa à plusieurs entreprises de l’ « infra-littérature » de l’époque, notamment Paris, ou le Livre des Cent et un (où son « Monsieur de Paris », au t. V, évoque, à la suite de Balzac, l’exécuteur des hautes-œuvres, Sanson) et trois Physiologies parues en 1841-1842 (celles du « viveur », de la « portière » et de « Robert Macaire »). On peut facilement imaginer que Balzac et Rousseau se connaissaient, d’autant plus que celui-ci avait participé à l’élaboration du Code civil, manuel complet de la politesse, du ton, des manières de la bonne compagnie, d’Horace Raisson, ouvrage autrefois attribué par Albert Prioult à Balzac. L’année suivante, il fut, à lui seul, l’auteur d’un Code épicurien pour l’année 1829 et d’un Code théâtral, tous deux signés « J. Rousseau ». C’est sur la page de titre de ce dernier opuscule qu’il se donne pour « l’un des auteurs du Code civil ». Détail piquant mais difficilement susceptible d’interprétation : Paméla Giraud met en scène un M. et une Mme Rousseau et leur fils Jules...
13 Si Rousseau fut en outre vaudevilliste, les seuls exemples du genre qu’il signe de son vrai nom, au moins dans la version « James Rousseau », datent tous deux de juin 1831 : il s’agit de La Rue Quincampoix, ou l’origine de Mayeux et de L’Auberge de Grosse Tête, montés l’un et l’autre au Nouveau Théâtre Molière [32]. Il pourrait paraître significatif à cet égard que le premier vaudeville signé « Jaime » date d’octobre de la même année [33]. Autrement dit, cette chronologie serait à première vue en faveur de l’assertion des continuateurs de Quérard, ce qui est également le cas lorsque l’on constate que Jaime ne produit plus de vaudevilles après la mort de Rousseau [34]. Par contre, il n’est nullement question de voir en « Jaime » un simple pseudonyme. Il est sans doute purement fortuit que Jaime et James représentent deux versions du même prénom, même si les auteurs de vaudevilles se déguisaient souvent derrière des prénoms – vrais comme faux – comme nous avons eu l’occasion de le remarquer plus haut à propos des auteurs de Folbert, ou le Mari de la cantatrice. Le « M. Jaime » qui figure sur la page de titre de ces nombreux vaudevilles renvoie incontestablement à Ernest Jaime et, ainsi que nous l’avons vu, ce dernier semble les avoir revendiqués tous (au point même d’en exagérer éventuellement le nombre). Toujours est-il que l’affirmation catégorique des continuateurs de Quérard n’est pas nécessaire- ment fausse à tous points de vue. Il est tout à fait possible, étant donné la nature industrielle du genre du vaudeville et des autres activités auxquelles Jaime participait, que Rousseau fût employé par lui comme associé sinon comme « nègre ».
14 *
15 Pour revenir à la lettre de la Society of Antiquaries, elle donne visiblement raison à R. Guise lorsque ce dernier émet l’hypothèse que Balzac aurait été mis en rapport avec la direction du Théâtre du Vaudeville par Dutacq (qui figurait parmi les actionnaires dudit théâtre) « vers le milieu de l’année 1839 [35] ». Mais en même temps, elle remet en question la conclusion que l’éminent spécialiste de Balzac tire de la lettre de Jaime du 17 octobre. S’appuyant sur le témoignage bien postérieur d’Edmond [Desnoyers] de Biéville [36], lui-même collaborateur de Bayard [notamment, en ce qui concerne le contexte actuel, dans une adaptation de La Recherche de l’Absolu [37]], R. Guise voit dans l’allusion que fait Jaime au « travail de M. Bayard » une indication que celui-ci venait de livrer à son confrère un plan ou scénario, lequel devait servir de base à une élaboration de la part de Balzac lui-même. Dans la mesure où il semble légitime de supposer qu’il s’agit toujours du projet auquel Balzac avait fait allusion dans sa lettre à Jaime du 30 juin, il n’est plus possible d’associer « le travail de M. Bayard » à un simple scénario. Car cette lettre de Balzac révèle qu’il aurait lui-même entrepris le travail initial, et au point d’assumer la responsabilité de l’éventuel « tout ». Au même titre, elle invalide l’idée que le projet en question ne pouvait pas être celui de Paméla Giraud (et, par là, la conclusion de R. Guise lorsqu’il affirme que la rédaction balzacienne de cette pièce date des premiers mois de 1840). Cette double hypothèse dépendait de sa conviction que le manuscrit de Paméla Giraud ne ressemblait en rien à une création suivant un plan prédéterminé [38]. Il est évident que cet argument perd toute valeur dès lors que le « travail de M. Bayard » se révèle être postérieur à celui de Balzac [39].
16 La lettre de Balzac à Jaime du 30 juin semble indiquer que c’était d’un commun accord que Balzac devait fournir le premier jet de la pièce, et qu’il incombait à Bayard d’opérer par la suite un travail de simplification selon les exigences d’un genre dont cet auteur dramatique, en tant que « soudeur », pour parler avec Étienne Arago [40], avait une très ample connaissance. À en juger par la version de la pièce qui finalement vit le jour en 1843, il s’agissait vraisemblablement d’un travail qui déjà à cette époque ne devait porter que sur les deux premiers actes. Reste néanmoins à commenter l’évidente impatience de Jaime, laquelle se lit à travers la tentative de Balzac dans sa lettre du 30 juin de rassurer ce dernier, et qui s’actualisera dans celle de Jaime trois mois plus tard.
17 Pour R. Guise, Jaime, au début de cette collaboration qui pour lui n’en était pas une, n’aurait eu qu’un rôle d’intermédiaire [41]. Il nous semble au contraire tout aussi vraisemblable qu’un rôle d’auteur fut réservé à ce vaudevilliste chevronné dès l’établissement du projet collaboratif. Si celui-ci s’empresse d’avoir un entretien avec Balzac le plus tôt possible après le 17 octobre, ce pourrait être afin qu’ils pussent tous deux prendre connaissance du travail de Bayard et ensuite se mettre d’accord sur l’achèvement de la pièce. Autrement dit, Jaime était censé prendre le relais. Et pourtant tout laisse supposer qu’il ne s’attelle pas à sa tâche de sitôt. Les raisons éventuelles sont sans doute plurielles. Il se peut que le travail fut retardé par la déconfiture du Théâtre du Vaudeville, lequel n’avait toujours pas de salle fixe à la suite de l’incendie qui l’avait ravagé plus d’un an auparavant. En même temps, on sait, grâce à Balzac lui-même, qu’à cette époque les autres salles de théâtre parisiennes n’étaient pas toutes non plus florissantes [42]. Il est loin d’être impossible que Balzac, malgré sa promesse faite à Jaime dans sa lettre du 30 juin, n’ait pas réussi à poursuivre sa rédaction au-delà des parties sur lesquelles Bayard avait œuvré. Il n’est pourtant pas exclu que Jaime et lui soient arrivés à s’entendre sur les prochaines étapes du projet, d’autant plus que les trois derniers actes de la comédie-mélodrame de Bayard-Jaime, celles dues à Ernest Jaime, ne correspondent nullement au manuscrit balzacien, et que Jaime semble avoir bien voulu profiter de l’absence de celui-ci en 1843 pour la monter [43].
18 *
19 Récapitulons. L’évidente allusion, dans cette lettre de Balzac via Dutacq à Ernest Jaime du 30 juin 1839, au manuscrit d’une pièce de théâtre que le dramaturge aspirant aurait été sur le point de terminer ne pourrait désigner, nous semble-t-il, que Paméla Giraud. Il en est de même en ce qui concerne le « travail » de Bayard dont parle Jaime dans sa lettre du 17 octobre de la même année. Les arguments qui ont été présentés contre l’identification du « travail » de Bayard avec un remaniement d’une pièce dont le titre fait évidemment écho au roman de Samuel Richardson, dépendent, tous, de la présupposition que ce « travail » revêtait la forme d’un scénario ou d’un plan, alors qu’une telle interprétation de la lettre de Jaime n’a rien d’une évidence, surtout à la lumière de la lettre que Balzac avait adressée à ce dernier trois mois plus tôt. Jusqu’à nouvel ordre, la rédaction de Paméla Giraud, du moins dans ses premières parties, ne serait donc plus à situer, comme l’avait cru R. Guise, dans les premiers mois de 1840, mais dans une période plus ou moins antérieure à la deuxième semaine de juillet de l’année précédente [44].
Notes
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[1]
Cette lettre fait partie de la collection Cely-Trevilian (SAL MS 444). Nous remercions la Society of Antiquaries d’avoir bien voulu nous autoriser à la publier, ainsi que M. Adrian James, bibliothécaire-adjoint, qui a aimablement facilité nos recherches.
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[2]
Et non pas, comme le prétendent les éditeurs de la correspondance de Balzac (Corr. Pl. II, p. 1356), « directeur » (voir à ce propos l’Annuaire dramatique de la Belgique, deuxième année [1840], p. 121). Les fonctions de directeur du Théâtre du Vaudeville furent confiées entre 1830 et juin 1840 à l’ancien collaborateur de Lord R’Hoone, Étienne Arago, et ensuite (Arago ayant été renvoyé par ses actionnaires mécontents) à Aspaïs Trubert. C’est indubitablement de ce dernier que parle Balzac dans sa lettre à Mme Hanska du 3 juillet [1840], lorsqu’il proclame que « le directeur n’a pas le sou » (LHB, t. I, p. 516). Sur la femme de Trubert, qui était la maîtresse de Sylvain Gavault, homme d’affaires de Balzac à l’époque, et que Balzac évoque à plusieurs reprises, voir ibid., p. 784, n. 1, p. 812, et t. II, p. 702, n. 3.
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[3]
À noter aussi l’éventualité, émise par Patrick Berthier (dans sa note « Folbert, Chabert, Falbert ? », AB 1987, pp. 394-398), que Le Colonel Chabert porte les traces d’une connaissance, de la part de Balzac, de Folbert, ou le Mari de la cantatrice, vaudeville de 1832 signé Léon [Halévy], Jaime, et Jules [Jules-Henry de Vernoy, dit de Saint-Georges]. Précisons, avec F.W.J. Hemmings, que le Théâtre du Vaudeville ne montait pas seulement des vaudevilles (voir Hemmings, Theatre and State in France 1760-1905, Cambridge, Cambridge University Press, 1994, p. 168).
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[4]
lhb, t. I, p. 489.
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[5]
L’enveloppe a été également conservée dans le même album : « Monsieur Dutacq, 16, rue du Croissant, Paris » ; cachet de la poste : « 1 juillet ». Nous tenons à remercier le docteur Susan Wharton pour son aide précieuse quant au déchiffrement de ce manuscrit.
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[6]
Pièce mise en évidence par René Guise (qui cependant la date du 19 octobre 1839) dans son article « Un grand homme du roman à la scène (suite) », AB 1968, pp. 338-340. R. Guise reprend cette discussion dans BO, t. XXII, pp. 697-712. Voir également Corr. Pl. II , p. 610.
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[7]
Pierre Descaves commente cette collaboration ainsi : « Dans les Coulisses du passé, en 1873, Paul Foucher apporte cette note pittoresque : aux répétitions, Jaime, le “fournisseur” habituel des Bouffes-Parisiens, croyait à un succès. Il manifesta l’intention de signer la pièce en même temps que Balzac ; il fut proprement invité à aller se promener, car la direction de la Gaieté spéculait sur “une affiche de grandes places” et comptait principalement sur le nom du père de La Comédie humaine. Jaime s’effaça » (Descaves, Balzac dramatiste, Éditions de la Table ronde, 1960, p. 183). Signalons que Foucher dut confondre Ernest Jaime avec son fils Adolphe (né en 1824), qui, effectivement, fut beaucoup joué aux Bouffes-Parisiens.
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[8]
Selon P. Descaves, « pour la “mise en scène”, bien que le mot n’existât pas, M. Meyer [Horace Meyer, co-directeur, avec Lemoine-Montigny, du Théâtre de la Gaîté] fit appel au froid et méthodique Dutacq, qui ne sut pas procurer à l’ouvrage, déjà passablement démantelé par les « refaiseurs », ni l’allure, ni le ton de la comédie moderne auxquels Balzac avait pensé en écrivant ce “mélodrame vertueux” » (op. cit., p. 185). Le même auteur insiste sur le fait que Bayard et Jaime « ont accentué tout le côté « mélo » de la comédie » (ibid., p. 187).
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[9]
Voir Corr. Gar., t. IV, pp. 612-613 (lettre datée du 29 juillet [18]43). Contrairement à ce qu’affirme R. Guise (voir BO, t. XXII, p. 699), cette lettre n’indique pas forcément que Balzac ignorait le travail de Bayard, qui, d’ailleurs, suit de près le manuscrit de l’auteur. Rappelons que le manuscrit de Paméla Giraud, entièrement de la main de Balzac, se trouve au fonds Lovenjoul.
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[10]
Cette répartition du travail entre Bayard et Jaime a été savamment étudiée par R. Guise (voir BO, t. XXII, p. 702 et pp. 705-709). En guise de conclusion, il observe : « La simple et sincère jeune fille de Balzac devient, chez lui [Jaime], une héroïne de mélodrame » (p. 706).
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[11]
Voir BO, t. XXII, p. 697, et « Un grand homme du roman à la scène (suite) », art. cit., p. 338.
-
[12]
BO, t. XXII, p. 701. L’hypothèse de R. Guise est retenue, mais non sans un apparent brin d’hésitation, par R. Pierrot et H. Yon (Corr. Pl. II , p. 1176, n.1 de la lettre 39-239).
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[13]
LHB, t. I, p. 501. Rappelons cependant qu’une partie de ce projet de pièce (jamais réalisé) que fut Le Mariage de mademoiselle Prudhomme passe dans une autre pièce à naître de la plume de Balzac à cette époque, à savoir Vautrin, dont l’unique représentation, on le sait, fut celle du 14 mars 1840 (voir BO, t. XXII, p. 642). Un projet balzacien de faire « reparaître » Monnier dans un vaudeville intitulé La Conspiration Prudhomme se fera jour en 1848 (voir Corr. Gar., t. V, p. 345, n. 2, et 349, ainsi que BO, t. XXII, p. 739).
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[14]
Corr. Pl. II , p. 1356. Il faudrait lire en fait 1804. Jaime décédera à Versailles, le 7 juin 1884.
-
[15]
Jaime, Souvenirs de 1848 à 1871, Versailles, Adolphe Laurent, 1871, p. 5.
-
[16]
Henri Blémont, « Ernest Jaime », dans Dictionnaire de biographie française (fascicule datant de 1990).
-
[17]
Voir Blémont, art. cit., ainsi que Ségolène Le Men, « The Musée de la caricature », in Todd Porterfield, The Efflorescence of Caricature 1759-1838, Farnham, Ashgate, 2011, pp. 175-94 (p. 178).
-
[18]
Il importe de noter qu’en tant que peintre, Ernest Jaime adopte, à ses débuts du moins, une autre version de son nom, à savoir Jean-François Jaime. E. Bénézit, dans son remarquable Dictionnaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs, fera malencontreusement d’Ernest et de Jean-François deux artistes distincts ; mais l’article qu’il lui a consacré retient qu’il « figura au Salon, de 1831 à 1864, avec des Vues […]. Le Musée de Compiègne conserve de lui : Rue de Paris. Il fit représenter plusieurs pièces au Vaudeville, l’auteur dramatique Adolphe Jaime est son fils ». En ce qui concerne Ernest Jaime, Bénézit précise qu’il « a gravé de nombreuses estampes à partir de 1825 d’après H. Vernet, Gudin, Gérard, Jacottet, Destouche, Thomas, X. Leprince, Ciceri, Grenier, Decamp, de Dreux, etc, notamment dans la Revue des Peintres, L’Album cosmopolite (1838) ».
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[19]
Voir S. Le Men, « The Musée de la caricature », p. 178, ainsi que Valérie Sueur-Hermel, « Avant la lettre : lithographies de Daumier pour Le Charivari », Revue de la Bibliothèque nationale de France, 19 (2005), pp. 21-25.
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[20]
George Beaumont Wicks en recense une cinquantaine (voir son précieux répertoire, The Parisian Stage, University AL, University of Alabama Press, 1950-1967, t. III).
-
[21]
Voir Édouard Fournier, Variétés historiques et littéraires, Jannet, puis Pagnerre, 1855-1863, t. II, p. 127 ; et la notice nécrologique qui parut dans la Gazette anecdotique, littéraire, artistique et bibliographique, 1884, p. 341.
-
[22]
Jaime, Souvenirs, éd. cit., p. 6.
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[23]
Henri Dalméras, La Vie parisienne sous la république de 1848, Albin Michel, 1921, p. 412.
-
[24]
Émile Thomas, Histoire des Ateliers nationaux, Michel Lévy frères, 1848, p. 86 ; voir aussi ibid., pp. 110-111. Thomas rappelle également que « Ce pauvre Jaime pourtant, avait le talent de se faire des ennemis avec une merveilleuse facilité. Je me rappelle ! entr’autres, une violente algarade qu’il faillit avoir avec M. Martelet » (ibid., p. 86).
-
[25]
Ce recueil renferme, parmi d’autres, des vers adressés « À Sa Majesté l’Empereur Napoléon III » (1852) et « À Sa Majesté l’Impératrice » (1858).
-
[26]
Jaime, Souvenirs, p. 6.
-
[27]
« JAIME, auteur dramatique. Pseudonyme de ROUSSEAU » (Félix Bourquelot et Alfred Maury, La Littérature française contemporaine, 1827-1849, t. IV, Delaroque aîné, 1852, p. 377). Précisons que ces auteurs font de l’auteur dramatique et du rédacteur du Musée de la caricature ([E.] JAIME) deux écrivains différents. Dans l’article du même ouvrage consacré à P.-J. Rousseau on lit : « Presque toutes les pièces de M. Rousseau ont été publiées sous le nom de M. JAIME » (t. VI, Delaroque aîné, 1857, p. 247). Voir aussi Georges d’Heilly, Dictionnaire des pseudonymes, 1868 (« JAIME »).
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[28]
Son décès est attesté dans un entrefilet paru dans Le Constitutionnel du 27 juillet 1849 : « Un des doyens de la presse judiciaire, M. James Rousseau, est mort subitement ce matin dans les bureaux de la Gazette des Tribunaux, dont il était un des plus spirituels rédacteurs. »
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[29]
Trois (et seulement trois) des vaudevilles de Jaime (et autres) sont attribués par le catalogue de la BnF à « Jaime, Pierre-Joseph Rousseau dit ».
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[30]
La France littéraire, t. VIII (1836), pp. 234-235.
-
[31]
La Littérature française contemporaine, t. VI, p. 246. Dans ces chroniques, « l’information laisse place à l’anecdote, le sérieux au rire, l’exactitude des paroles rapportées aux bons mots que produira la verve du chroniqueur » (Amélie Chabrier, « “Que la fiction vous serve de guide dans ce pays des réalités”. Mutations de la poétique de la chronique judiciaire dans Le Tribunal illustré (1879-1882) », Interférences littéraires/Literaire interferenties, 7 (novembre 2011), pp. 23-40 (p. 28).
-
[32]
Voir Wicks, op. cit., t. III. Dans son volume précédent, Wicks, suivant le catalogue de la BnF, lequel cite à son tour celui de Soleinne, attribue à P.-J. Rousseau un petit nombre de vaudevilles créés pendant la Restauration – mais ceux-ci seraient à attribuer plutôt à Auguste Rousseau. Le Quérard de La France littéraire semble avoir été à l’origine de cette confusion, laquelle aurait également induit en erreur F.W.J. Hemmings, lorsqu’il prétend que P.-J. Rousseau fut, avec Alexandre Dumas et A. de Leuven, l’auteur d’un vaudeville intitulé La Chasse et l’Amour, représenté au Théâtre de l’Ambigu-Comique le 22 septembre 1825 (voir Hemmings, The Theatre Industry in Nineteenth-Century France, Cambridge, Cambridge University Press, 1993, p. 253).
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[33]
Sa première pièce, Le Chevreuil ou le fermier anglais, qui, selon son propre dire, fut « confiée au talent de l’inimitable Odry » connut « un éclatant succès » lorsqu’elle fut jouée sur la scène du Théâtre des Variétés (voir Jaime, Souvenirs, éd. cit., p. 6). Les co-auteurs de Jaime, selon Wicks, furent Léon Halévy et, vraisemblablement, Odry lui-même.
-
[34]
Bien évidemment, cette cessation d’activité s’expliquerait tout aussi bien par la participation de Jaime à la vie publique à partir de 1848 (voir Blémont, art. cit.).
-
[35]
BO, t. XXII, p. 701.
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[36]
Il s’agit d’un feuilleton paru dans Le Siècle, le 11 juillet 1859. R. Guise fait peu de cas du fait que le récit de Biéville, vieux de vingt ans en ce qui concerne les faits, situe la collaboration que nous sommes en train d’examiner bel et bien dans le contexte de l’histoire de la genèse de Paméla Giraud (voir BO, t. XXII, pp. 700-701). Nous profitons de cette occasion pour remarquer qu’à l’époque on se trompait souvent en voyant dans le nom de Desnoyers de Biéville un pseudonyme de Louis Desnoyers (voir, par exemple, l’Annuaire dramatique de la Belgique pour 1839, p. 80 et p. 114, ainsi que l’article consacré à ce dernier dans Le Gaulois du 12 mai 1913).
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[37]
Intitulée De l’or ou le rêve d’un savant (Théâtre du Gymnase, 11 novembre 1837).
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[38]
Voir BO, t. XXII, p. 701.
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[39]
Il convient d’insister également sur le fait qu’il n’existe rien qui relie le projet « Prudhomme » à Jaime ni à Bayard.
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[40]
Voir BO, t. XXII, p. 709.
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[41]
Voir ibid., p. 700.
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[42]
Voir LHB, I, p. 516 (lettre datée du 3 juillet 1840).
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[43]
Voir ibid., p. 704. Sur l’histoire des représentations de Paméla Giraud, voir ibid., p. 710, ainsi que Guise, « Un grand homme du roman à la scène (suite) ».
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[44]
Il n’est pas exclu que la rédaction, du moins en grosse partie, remonte, comme le prétend Lovenjoul, aux années 1837 et 1838.