Couverture de RJE_153

Article de revue

L’Union européenne et la mise en œuvre du protocole de Nagoya. Faut-il se réjouir de l’adoption du règlement n. 511 /2014 ?

Pages 437 à 462

Notes

  • [1]
    Préambule de la Convention sur la Diversité Biologique, 1992.
  • [2]
    Un fournisseur peut être défini comme « celui qui fournit ces ressources à l’utilisateur en lui conférant le droit d’en faire usage. La nature exacte du fournisseur est fixée par le droit interne. Dans certains pays, le fournisseur est désigné comme l’individu autorisé légalement à prélever du matériel biologique et le vendre/donner à toute autre personne, y compris les ressources génétiques inhérentes. Dans d’autres pays, les droits sur le matériel biologique sont distincts des droits sur les ressources génétiques que ce matériel biologique contient, tendant ainsi à démontrer que le gouvernement est le fournisseur des ressources génétiques, même si le propriétaire du matériel biologique qui le fournit est une personne physique ». M.Walloe et T. Young, « Au-delà de l’accès : l’application du partage juste et équitable des avantages en vertu de la CDB », UICN, Droit et politique de l’environnement, n° 67/2, 2009, p. 12.
  • [3]
    Les utilisateurs peuvent être définis comme : « tout personne physique, entreprise, université, organisme, gouvernement ou autre entité qui « utilise » ou acquiert des ressources génétiques en vue de les utiliser, ou qui tire des avantages de leur utilisation ». Ibid.
  • [4]
    Voir la liste complète des signataires sur http://www.cbd.int/convention/parties/list/.
  • [5]
    Voir la liste des États ayant adopté des mesures d’APA sur http://www.cbd.int/abs/measures/groups.shtml.
  • [6]
    « Les Lignes directrices de Bonn doivent aider les Parties, les États et les autres intervenants à élaborer des stratégies concernant l’accès et le partage des avantages, ainsi qu’à déterminer les étapes du processus d’accès aux ressources génétiques et de partage des avantages. Elles visent, plus précisément, à les assister lorsqu’ils établissent des mesures législatives, administratives ou de politique générale sur l’accès aux ressources génétiques et le partage des avantages ou lorsqu’ils négocient des contrats en la matière ». Secrétariat de la Convention sur la Diversité Biologique, « Lignes directrices de Bonn », 2002, P. IV.
  • [7]
  • [8]
    La CDB est approuvée par la Communauté Économique Européenne dans une décision du Conseil du 25 octobre 1993.
  • [9]
    Les rapports de l’UE sont disponibles sur le site de la CDB : http://www.cbd.int/reports/search/?country=eur
  • [10]
    Institute for European Environmental Policy (IEEP), Ecologic Institute, GHK, Study to analyse legal and economic aspects of implementing the Nagoya Protocol on ABS in the European Union. Final report for the European Commission, DG Environment. Institute for European Environmental Policy, Brussels and London, 2012.
  • [11]
    Rapport UE, executive summary, p. 1.
  • [12]
    Proposition de Règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l’accès aux ressources génétiques et au partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation dans l’Union, COM(2012) 576 final, 2012. Disponible en ligne : http://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=COM:2012:0576:FIN
  • [13]
    European Commission, Impact Assessment accompanying the document Proposal for a Regulation of the European Parliament and of the Council on Access to Genetic Resources and the Fair and Equitable Sharing of Benefits Arising from their Utilization in the Union, SWD(2012) 292 final, 2012a. Disponible en ligne : http://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=CELEX:52012SC0292
  • [14]
    Avis du Comité économique et social européen sur la « Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l’accès aux ressources génétiques et au partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation dans l’Union », COM(2012) 576 final, 2013. Disponible en ligne : http://eescopinions.eesc.europa.eu/eescopiniondocument.aspx?language=en&docnr=2314&year=2012
  • [15]
    European Commission, 2012a, op. cit. p. 19.
  • [16]
    Thomas Burelli, « Faut-il se réjouir de l’adoption du protocole de Nagoya ? », RJE 1/2012, p. 45-62.
  • [17]
    « Overall, there is a major expectation that the EU and its Member States will swiftly ratify and implement the Nagoya Protocol », European Commission, op. cit. p. 8.
  • [18]
    Institute for European Environmental Policy (IEEP), Ecologic Institute, GHK, op. cit., p. 173-206.
  • [19]
    European Commission, 2012a, op. cit., p. 6.
  • [20]
    40 des 42 réponses proviennent d’utilisateurs individuels ou de groupes d’utilisateurs. European Commission, Impact Assessment (Annexes) accompanying the document Proposal for a Regulation of the European Parliament and of the Council on Access to Genetic Resources and the Fair and Equitable Sharing of Benefits Arising from their Utilization in the Union, SWD(2012) 292 final, 2012b, p. 93-94. Disponible en ligne : http://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=CELEX:52012SC0292.
  • [21]
    European Commission, 2012a, op. cit., p. 12-13.
  • [22]
    Institute for European Environmental Policy (IEEP), Ecologic Institute, GHK, op. cit., p. 205 ; European Commission, 2012a, op. cit., p. 13.
  • [23]
    Institute for European Environmental Policy (IEEP), Ecologic Institute, GHK, op. cit., p. 205-206.
  • [24]
    European Commission, 2012a, op. cit., p. 16.
  • [25]
    Ibid, p. 5.
  • [26]
    Ibid, p. 3.
  • [27]
    Ibid, p. 4.
  • [28]
    Ibid, p. 16.
  • [29]
    Tobin Brendan, « Biopiracy by law : European Union Draft Law Threatens Indigenous Peoples’ Rights over their Traditional Knowledge and Genetic Resources », European Intellectual Property Review, 2014, p. 126.
  • [30]
    « However, verifying if GR to which these communities have established rights are of interest for users and whether ILCs based in the EU hold any TKaGR are questions that go beyond the scope of this study », Institute for European Environmental Policy (IEEP), Ecologic Institute, GHK, op. cit., p. 94.
  • [31]
    Il s’agit du Grupo Intercultural Almáciga basé en Espagne. Cette organisation se décrit comme « an NGO working to support Indigenous Peoples’ human rights globally through self-development projects and facilitation of the participation of their chosen representatives at the multilateral level ». Les réponses envoyées à l’UE sont publiées en ligne à l’adresse : http://ec.europa.eu/environment/consultations/abs_en.htm.
  • [32]
    Si l’UE dispose d’une politique relative aux peuples autochtones dans le cadre de son action extérieure, elle n’a pas développé une expertise particulière en ce qui concerne les populations autochtones présentes dans l’Union à l’image, par exemple, en France avec les Kanak (Nouvelle-Calédonie), les Amérindiens (Guyane française) ou encore les Polynésiens (Polynésie française). Un certain nombre d’informations spécifiques concernent les communautés autochtones et locales de l’UE dans les fiches des États dans le rapport des experts mandatés par l’UE. Ces fiches ne couvrent néanmoins qu’un faible nombre d’États parmi les 27 membres de l’UE et ne traitent ainsi pas de certaines populations pouvant être qualifiées d’autochtones (notamment les Samis en Scandinavie).
  • [33]
    European Commission, 2012a, op. cit., p. 13.
  • [34]
    Ibid, p. 13-14 ; Institute for European Environmental Policy (IEEP), Ecologic Institute, GHK, op. cit., p. 93
  • [35]
    European Commission, 2012a, op. cit., p. 16.
  • [36]
    Ibid.
  • [37]
    European Commission, 2012b, op. cit., p. 94.
  • [38]
    Ibid, p. 93-94.
  • [39]
    « Bien que de façon parfois peu visible, la plupart des institutions publiques de recherche tirent les fils de la circulation des ressources biologiques. En effet, elles sont devenues des intermédiaires irremplaçables dans la chaîne de valorisation depuis que les entreprises les associent aux opérations de bioprospection ». Florence Bellivier et Christine Noiville, « Code de conduite et équité des échanges de ressources biologiques », (2006) 15 Iddri – Idées pour le débat 8.
  • [40]
    Préambule du Règlement (UE) N. 511/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relatif aux mesures concernant le respect par les utilisateurs dans l’Union du protocole de Nagoya sur l’accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation, JOUE, 2014, p. 59. Disponible en ligne : http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX:32014R0511
  • [41]
    Proposition de Règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l’accès aux ressources génétiques et au partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation dans l’Union, COM(2012) 576 final, 2012 ; Voir aussi le commentaire de Sarah Vanuxem, « Le devenir des régimes d’Accès aux ressources génétiques et de Partage des Avantages (APA) : Étude comparée des projets calédonien et européen », Droit de l’environnement, n° 214, 2013, p. 256-260.
  • [42]
    Par exemple, l’ethnobotanie est une discipline particulièrement dynamique qui fait l’objet de nombreuses publications chaque année.
  • [43]
    Thomas Burelli, « Collaboration entre scientifiques et communautés autochtones et locales : Le patrimoine culturel immatériel autochtone face aux logiques de développement et de valorisation de l’innovation », in Droit et Innovation, LGDJ, 2013, p. 135-154.
  • [44]
    Voir en ce sens le cas exemplaire de la Bibliothèque Numérique des Savoirs Traditionnels en Inde. Disponible en ligne à l’adresse : www.tkdl.res.in.
  • [45]
    Notamment l’article 31 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, A/RES/61/295, 17 septembre 2007.
  • [46]
    Sur la décolonisation des rapports entre chercheurs et populations autochtones, voir notamment Linda Tuhiwai Smith, Decolonizing Methodologies : Research and Indigenous Peoples (2012) Second Edition, Zed Books.
  • [47]
    Les nouveaux médias et la multiplication des bases de données relatives aux savoirs traditionnels aidant, il est de plus en plus aisé d’obtenir et de diffuser des informations concernant les cas d’usages abusifs des savoirs traditionnels (c’est-à-dire sans recueil de consentement préalable et /ou de partage des avantages). Ces cas sont de plus en plus médiatisés à l’image du « Captain Hook Awards for Biopiracy » à l’initiative de la coalition contre la biopiraterie.
  • [48]
    Voir notamment l’analyse des experts mandatés par l’UE : Institute for European Environmental Policy (IEEP), Ecologic Institute, GHK, op. cit., p. 69-78.
  • [49]
    European Commission, 2012a, op. cit., p. 19-20
  • [50]
    « Member states strongly feel that the Union does not have competence to decide whether access to genetic resources over which Member States hold sovereign rights shall in the future be subject to prior informed consent and benefit-sharing requirements or not ». Ibid, p. 20.
  • [51]
    « Whatever the case may be, it seems that there is currently no need for the Union to take binding Union-level measures on access. So far, only two Member States have legislated on access, there is very limited practical experience with the functioning of their access frameworks, and no indication that these would raise issues under the acquis ». Ibid.
  • [52]
    Article 288 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE).
  • [53]
    Article 3, Règlement (UE) n° 511/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014.
  • [54]
    Ibid.
  • [55]
    Tobin Brendan, op. cit., p. 127.
  • [56]
    « Legal certainty can be achieved, if implementing measures focus only on traditional knowledge that is directly associated with genetic resources as documented in domestic access permits and in mutually agreed terms. This excludes all other types of traditional knowledge that may indirectly become relevant to the utilisation of genetic resources within the EU », European Commission, Impact Assessment (Annexes), op. cit., p. 28.
  • [57]
    Ibid.
  • [58]
    Ibid.
  • [59]
    Voir notamment Henri-Philippe Sambuc, La protection internationale des savoirs traditionnels : la nouvelle frontière de la propriété intellectuelle, L’Harmattan, 2003, p. 60-80 ; Fikret Berkes, Sacred Ecology. Traditional Ecological Knowledge and Resource Management, Philadelphie, Taylor & Francis, 2008, p. 3. ; Marie Battiste et James Youngblood, Henderson, Protecting indigenous Knowledge and heritage : a global challenge, Purich Publishing Ltd., Saskatoon, Saskatchewan, 2000, p. 46.
  • [60]
    Brendan Tobin démontre dans sa contribution le caractère infondé de cette argumentation dans la mesure où d’autres termes tels que « invention » ou « gènes » ne font pas l’objet de définitions internationalement reconnues mais font néanmoins l’objet de protections dans le champ de la propriété intellectuelle. Tobin Brendan, op. cit., p. 126.
  • [61]
    Notons qu’en France la Polynésie utilise le terme de biopiratage pour une définition sensiblement identique à celle du règlement européen. Loi du pays n° 2012-5 du 23 janvier 2012 relative à l’accès aux ressources biologiques et au partage des avantages résultant de leur valorisation.
  • [62]
    Ibid, p. 128-129.
  • [63]
    Natural Justice and Berne Declaration, “Access or Utilisation — What Triggers User Obligations ? A Comment on the Draft Proposal of the European Commission on the Implementation of the Nagoya Protocol on Access and Benefit Sharing”, 2013. En ligne à l’adresse http://naturaljustice.org/wp-content/uploads/pdf/Submission-EU-ABS-Regulation.pdf.
  • [64]
    Ibid, p. 11.
  • [65]
    Ibid.
  • [66]
    Article 4, Règlement (UE) n° 511/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014.
  • [67]
    Tobin Brendan, op. cit., p. 127.
  • [68]
    Ibid, p. 128.
  • [69]
    Article 12, Protocole de Nagoya, 15 octobre 2010, C. N. 782. 2010. TREATIES-1.
  • [70]
    Article 4, Règlement (UE) n° 511/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014.
  • [71]
    Article 2, Ibid.
  • [72]
    À ce jour ce centre d’échange n’existe pas.
  • [73]
    Point 28, préambule, Règlement (UE) n° 511/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014.
  • [74]
    Article 5(1), Ibid.
  • [75]
    Selon le règlement une « collection » est « un ensemble d’échantillons de ressources génétiques prélevés et les informations y afférentes, rassemblés et stockés, qu’ils soient détenus par des entités publiques ou privées ». Il n’est ainsi pas explicitement fait référence aux savoirs traditionnels, sont-ils compris dans les « informations y afférentes » ? Article 3, Règlement (UE) n° 511/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014.
  • [76]
    Voir notamment le cas de l’Agence de Développement de la Culture Kanak en Nouvelle-Calédonie : http://www.adck.nc/patrimoine/departement/presentation.
  • [77]
    Article 5(3), Règlement (UE) n° 511/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014.
  • [78]
    « Cela devrait se révéler particulièrement profitable aux chercheurs académiques, universitaires et aux chercheurs poursuivant des fins non commerciales, ainsi qu’aux petites et moyennes entreprises, et cela devrait contribuer à une réduction des exigences en matière administrative et de conformité ». Point 28, préambule, Ibid.
  • [79]
    Article 8, Ibid.
  • [80]
    Disponible en ligne à l’adresse : https://www.cbd.int/doc/publications/cbd-bonn-gdls-fr.pdf.
  • [81]
    Code de conduite éthique propre à assurer le respect du patrimoine culturel et intellectuel des communautés autochtones et locales, 2010. Disponible en ligne : www.cbd.int/traditional/code/ethicalconduct-brochure-fr.pdf
  • [82]
    Article 6, Règlement (UE) n° 511/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014.
  • [83]
    Article 9, Ibid.
  • [84]
    Ibid.
  • [85]
    Article 7, Ibid.
  • [86]
    Point 25, préambule, Ibid.
  • [87]
    Article 7, Ibid.
  • [88]
    Point 25, préambule, Ibid.
  • [89]
    Article 7, Ibid.

1Le 16 avril 2014 le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne ont adopté le règlement n° 511/2014 relatif aux mesures concernant le respect par les utilisateurs dans l’Union du protocole de Nagoya sur l’accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation (APA). Il s’agit d’un texte visant à la mise en œuvre de la Convention sur la Diversité Biologique (CDB) de 1992 et du protocole de Nagoya adopté le 29 octobre 2010.

2La CDB est un texte adopté lors du sommet de la terre de Rio en 1992 qui poursuit trois objectifs : « la conservation de la diversité biologique, l’utilisation durable de ses éléments constitutifs et le partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques[1] ». Ce texte réaffirme les droits de souveraineté des États sur leurs ressources naturelles (art. 15(1)) et donc le pouvoir d’en organiser l’accès en particulier en ce qui concerne les ressources génétiques. Néanmoins, conscients de la nécessité de permettre un accès à celles-ci (notamment en vue de leur étude et de leur valorisation), mais aussi d’organiser le partage des avantages qui pourraient découler de leur utilisation avec les fournisseurs [2], les États ont inclus les principes d’un accès facilité (art. 15.2) aux ressources génétiques pour les utilisateurs [3], et celui du partage des avantages juste et équitable découlant de leur utilisation (art. 15.7). La CDB introduit aussi la notion de savoirs traditionnels définie comme les connaissances, innovations et pratiques (ci-après « les savoirs traditionnels ») des communautés autochtones et locales et en reconnaît l’importance pour la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique. La CDB reconnaît l’importance pour les États d’encourager un partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation de ces savoirs (art. 8j).

3Depuis 1992, si près de 163 États ont signé la CDB [4], seule une minorité d’entre eux a pris l’initiative d’adopter un dispositif d’accès et de partage des avantages [5] (APA). Afin de stimuler la mise en œuvre de ce texte et d’offrir un certain nombre d’orientations aux États, les parties à la Convention se sont pourtant réunies à plusieurs reprises et ont élaboré en 2002 les lignes directrices de Bonn, document d’orientation non contraignant [6]. Dès 2004, les États ont commencé à travailler à la négociation et l’élaboration d’un cadre international contraignant afin de faire avancer efficacement l’adoption de dispositifs d’APA. Ce cadre international – le protocole de Nagoya – a été adopté le 29 octobre 2010. Ce texte concerne plus spécifiquement le troisième objectif de la CDB – le partage juste et équitable des avantages - considéré comme un moyen de contribuer à la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité. Ce texte vient approfondir les obligations des parties à la CDB et vient accentuer la pression pour sa mise en œuvre effective.

4Au regard de la CDB et du protocole de Nagoya, l’Europe constitue un cas très original dans la mesure où tant l’UE que les États membres sont parties à ces textes et donc responsables de leur mise en œuvre. Dans le cadre d’une problématique comme celle de l’APA dont les enjeux sont à la fois locaux et globaux, cette situation constitue une source de complexité étant donné les deux niveaux d’action envisageables (national et européen), mais aussi une opportunité de coordination entre les politiques et les législations des États membres. En tant que cadre d’intégration régionale, l’Union Européenne peut en effet contribuer à initier et développer une politique harmonisée, pouvant potentiellement dépasser certains blocages nationaux.

5L’adoption d’un règlement par l’Union européenne apparaît donc a priori bienvenue dans la perspective d’une mise en œuvre rapide et globale du protocole de Nagoya entré en vigueur le 12 octobre 2014. La conclusion de ce règlement a d’ailleurs été saluée au niveau européen comme une étape importante vers la mise en œuvre des principes internationaux et notamment par Sandrine Bélier, eurodéputée écologiste, rapporteur du Parlement européen sur ce texte, et pour qui : « ce règlement met enfin en place un outil de lutte contre la biopiraterie (…) [et] il interdit l’utilisation, dans l’UE, des ressources génétiques acquises illégalement[7] ».

6Dans cette contribution, nous proposons d’analyser l’apport de l’action de l’Union européenne dans la perspective de la mise en œuvre du protocole de Nagoya. Pour cela, nous analyserons d’abord la stratégie de l’UE d’un point de vue global, ce qui inclura l’analyse de la pertinence d’une action européenne ainsi que l’étude du raisonnement et des choix juridiques effectués (I). Dans une seconde partie, nous analyserons de manière approfondie les concepts et les mécanismes adoptés (II).

I – L’Union européenne sur la voie de la mise en œuvre de la CDB et du protocole de Nagoya

7L’UE s’est montrée particulièrement impliquée dans le cadre des négociations internationales relatives à la conservation de la biodiversité depuis 1992. Il faut néanmoins attendre le protocole de Nagoya en 2010 pour que l’UE entreprenne l’adoption de mesures concrètes (A). À la suite de l’adoption de ce texte, l’UE a en effet lancé des réflexions et des consultations afin d’évaluer la pertinence d’une action (B). Ces études et consultations ont conduit à l’adoption d’un règlement qui constitue une approche originale de la mise en œuvre du protocole de Nagoya dans le contexte européen (C).

A – L’Union européenne de Rio a Nagoya

8L’UE participe de manière très active depuis 1992 aux négociations internationales dans le cadre de la CDB, à laquelle elle devient partie le 21 décembre 1993 [8]. Si jusqu’en 2014 l’UE n’a adopté aucune mesure de mise en œuvre de l’APA en Europe, elle a néanmoins poursuivi ses efforts au niveau international et régulièrement rempli ses obligations consistant principalement dans la remise de rapports périodiques [9]. L’UE a par ailleurs activement participé à la dixième conférence des parties qui s’est déroulée à Nagoya (Japon) et qui a vu l’adoption du protocole de Nagoya le 29 octobre 2010. L’UE a signé le protocole le 23 juin 2011 et a accédé au statut de partie le 12 octobre 2014 lors de l’entrée en vigueur de celui-ci.

9Contrairement à la CDB, l’UE s’est montré très tôt déterminée à agir pour la mise en œuvre du protocole de Nagoya. La Commission européenne a ainsi commandé en 2011 une étude intitulée Study to analyse legal and economic aspects of implementing the Nagoya Protocol on ABS in the European Union[10]. Il s’agissait au travers de ce rapport d’identifier les voies d’une mise en œuvre effective du protocole de Nagoya dans l’UE en analysant les outils juridiques existants, les options de mise en œuvre disponibles ainsi que les effets économiques, sociaux, environnementaux probables des options [11]. Une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l’accès aux ressources génétiques et au partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation dans l’Union a été publiée en 2012 [12] accompagnée d’une étude d’impact réalisée par les services de la Commission européenne [13] (ci-après « la Commission »). Cette première version a fait l’objet d’un avis du Comité économique et social européen en 2013 [14], ce dernier pointant alors des lacunes. Une nouvelle version prenant en compte un certain nombre de remarques du Comité économique et social européen a finalement été adoptée le 16 avril 2014 soit quelques mois avant l’entrée en vigueur du protocole de Nagoya.

10Il apparaît au travers des travaux de l’UE que le protocole de Nagoya représente une étape fondamentale pour la mise en œuvre de l’APA. Ce texte est en effet perçu et défini comme un instrument approfondissant le cadre établi par la CDB, mais aussi est surtout comme un instrument contraignant pour les parties. Ainsi, selon l’étude d’impact : « The Nagoya Protocol to the Convention on Biological Diversity is a global environmental agreement that establishes a legally binding framework for maximising the benefits of genetic resources use in favour of the conservation and sustainable use of biological diversity worldwide[15] ».

11Le caractère juridiquement contraignant du protocole de Nagoya ne doit pourtant pas être exagéré. Il repose en effet principalement sur la nature de l’instrument, c’est-à-dire un protocole plutôt qu’une déclaration. L’analyse approfondie de la plupart des obligations du protocole démontre pourtant que les parties disposent d’une grande marge de manœuvre puisqu’elles sont en général tenues à un double test relatif, d’une part, à la pertinence d’une action et, d’autre part, au choix des outils à mobiliser. En ce sens il n’existe pas de différence majeure entre le protocole de Nagoya et la CDB, si ce n’est dans le détail des principes qui sont plus approfondis dans le premier [16].

12L’analyse des travaux de l’UE révèle que son action s’inscrit avant tout en réponse aux attentes des partenaires de l’Union quant à la mise en œuvre rapide et efficace du protocole [17]. Il s’agit là d’une contrainte politique, même si comme nous allons le voir, celle-ci peut potentiellement avoir de réelles répercussions juridiques notamment pour les utilisateurs européens évoluant en dehors de l’UE.

B – Une action nécessaire pour le développement d’une économie basée sur l’exploitation des ressources de la biodiversité

13À la suite de l’adoption du protocole de Nagoya, l’UE a lancé une vaste étude sur les aspects légaux et économiques de la mise en œuvre du protocole dans l’Union. Dans cette étude, les experts s’intéressent notamment aux pratiques en matière d’accès et d’utilisation des ressources génétiques et des savoirs traditionnels associés [18].

14Cette étude a été complétée par une consultation publique réalisée en ligne du 24 octobre au 30 décembre 2011 et pour laquelle 43 réponses ont été reçues. Selon la Commission européenne, ce chiffre en apparence faible n’est pas de nature à limiter la portée de la consultation, car ces répondants représentent un très grand nombre de membres. Cette consultation est vraisemblablement un succès pour la Commission qui considère que « the respondents covered most sectors potentially affected by implement measures under the Nagoya Protocol[19] ». Au travers de ces résultats, dont la portée est néanmoins critiquable comme nous le verrons, l’UE dresse le portrait de l’utilisation des ressources génétiques (1) et des savoirs traditionnels (2).

1 – L’utilisation des ressources génétiques : priorité de l’UE

15Les données concernant les utilisateurs et les fournisseurs de ressources génétiques sont nombreuses dans le rapport des experts commandé par la Commission ainsi que dans l’étude d’impact. Dans le cadre de la consultation publique, la quasi-totalité des répondants est par ailleurs constituée d’utilisateurs et/ou de fournisseurs de ressources génétiques [20].

16Grâce aux données collectées, les experts mandatés par la Commission européenne ont mené une étude sectorielle à propos des principaux utilisateurs et fournisseurs de ressources génétiques et des savoirs traditionnels associés dans l’UE. Néanmoins, malgré cette étude approfondie, la Commission indique qu’il n’existe pas de données précises concernant le volume des ressources génétiques utilisées dans l’Union et les aspects économiques de ces utilisations [21].

17Il ressort de ces analyses qu’il existe une grande diversité d’acteurs intéressés par l’accès et l’utilisation des ressources génétiques [22] (et dans certains cas par les savoirs traditionnels associés), dont les principaux sont l’industrie pharmaceutique, les collections de cultures, les jardins botaniques, le secteur de la sélection végétale, le secteur horticole, l’industrie de la lutte biologique, la recherche universitaire, l’industrie de l’élevage animalier, le secteur industriel des biotechnologies, l’industrie agroalimentaire, les banques de gènes et l’industrie forestière. Ces acteurs ont parfois développé des pratiques en lien avec l’APA, néanmoins, le rapport pointe un fossé entre ces pratiques et les obligations prévues par le protocole de Nagoya [23].

18En ce qui concerne les usages actuels et futurs des ressources génétiques, si, selon l’étude d’impact, les demandes d’accès aux ressources génétiques « sauvages » ont diminué dans la plupart des secteurs, l’intérêt global pour l’accès et l’utilisation des ressources génétiques a lui augmenté et il est attendu que cet intérêt continue de grandir ou à tout le moins qu’il demeure stable [24].

19Les conclusions du rapport d’experts et de l’étude d’impact de la Commission sont sans équivoque : il est impératif d’agir pour les utilisateurs européens et le développement d’une économie basée sur l’exploitation des ressources de la biodiversité [25]. Il s’agit ainsi de garantir un accès sécurisé et peu coûteux aux ressources génétiques [26]. Il s’agit aussi de prévenir les accusations de biopiraterie [27], mais également d’offrir des gages aux États fournisseurs à l’extérieur de l’Union afin que ces derniers facilitent en retour l’accès aux utilisateurs européens [28].

2 – L’utilisation des savoirs traditionnels associés aux ressources génétiques : un champ méconnu et incompris

20L’étude mandatée par la Commission européenne et la consultation publique concernent aussi les savoirs traditionnels associés aux ressources génétiques. Les données sont néanmoins beaucoup moins précises et détaillées dans ce domaine [29]. En effet, dans l’étude des experts, les communautés autochtones et locales ne font pas l’objet d’une étude approfondie en tant que fournisseurs de ressources génétiques et de connaissances traditionnelles associées [30]. De la même manière, une seule des réponses à la consultation publique émane d’une organisation revendiquant représenter les communautés autochtones et locales [31].

21Les travaux préparatoires en vue de l’adoption du règlement européen souffrent ainsi d’un véritable déficit en ce qui concerne la description et l’analyse des enjeux et des attentes des communautés autochtones et locales, notamment celles qui sont localisées dans l’UE. Ce déficit n’est pas véritablement étonnant étant donné le peu de connaissance et d’expertise des institutions européennes en ce qui concerne ces populations [32].

22Le faible nombre de sources n’empêche pourtant pas les experts et la Commission de dresser un paysage de l’utilisation des savoirs traditionnels associés par les utilisateurs européens. Ils se basent pour cela principalement sur quelques sources documentaires ainsi que sur les déclarations des utilisateurs de ressources génétiques. Ce qui n’est pas sans poser certaines difficultés concernant la crédibilité de ce paysage étant donné les interprétations parfois différentes sur ce que constitue par exemple une utilisation des savoirs traditionnels ou encore sur la notion même de communautés autochtones et locales.

23Selon l’étude d’impact, la mobilisation des savoirs traditionnels associés à des ressources génétiques, est pertinente dans certains cas, mais limitée d’un point de vue global [33]. En effet, quand bien même les savoirs traditionnels relatifs aux propriétés et aux fonctions des végétaux et des animaux en lien avec leur environnement est reconnu, et si ces savoirs peuvent fournir des informations essentielles pour le développement d’innovations biotechnologiques, l’étude d’impact conclut que d’un point de vue général, les utilisateurs européens mobilisent de manière très limitée les savoirs traditionnels [34].

24En ce qui concerne l’évolution de la demande en matière de savoirs traditionnels, la Commission estime qu’il est probable qu’elle décline, alors que ces savoirs continueront d’être pertinents dans le cadre de certains marchés de niches [35] (notamment le marché des cosmétiques et le marché alimentaire). L’étude d’impact souligne en outre que les savoirs traditionnels deviennent de moins en moins pertinents pour la découverte de propriétés intéressantes associées aux ressources génétiques sauvages en raison des progrès scientifiques [36].

25Ainsi, les savoirs traditionnels sont principalement considérés comme pouvant jouer un rôle important dans le cadre de « basic research activities of non-commercial sectors » pour l’identification de propriétés et fonctions de certaines ressources génétiques [37]. En effet selon l’étude d’impact, les utilisateurs en amont de la chaîne de valorisation des ressources génétiques sont les plus concernés par la mobilisation des savoirs traditionnels au contraire des utilisateurs en aval [38]. Ce raisonnement n’est possible qu’en distinguant strictement entre utilisateurs en amont et utilisateurs en aval, distinction très artificielle [39]. La mobilisation et l’apport des savoirs traditionnels pour l’identification d’une ressource et d’usages dans le cadre d’une recherche universitaire ne « disparaissent » pas lorsque les résultats de cette recherche font l’objet d’une valorisation commerciale par un autre acteur de la chaîne.

26Dans le préambule du règlement européen, les savoirs traditionnels font l’objet de très peu de développements. Les connaissances traditionnelles détenues par les communautés autochtones et locales sont en effet uniquement définies comme « susceptibles de fournir des informations importantes pour la découverte scientifique de propriétés génétiques ou biochimiques intéressantes des ressources génétiques[40] ».

27Il faut noter ici que le vocabulaire des institutions européennes a évolué depuis la première version du règlement de 2012 puisque les connaissances traditionnelles étaient alors désignées comme de potentiels « indices [41] ». Les termes ne nous apparaissent néanmoins toujours pas entièrement satisfaisants dans la mesure où de nombreuses études et cas de valorisation de ressources de la biodiversité démontrent le caractère déterminant et essentiel des connaissances traditionnelles dans le cadre des projets de recherche les mobilisant. Il s’agit alors du moyen principal d’identification de ressources et le cas échéant d’usages associés [42].

28Il est en outre important de mentionner que les savoirs traditionnels subissent souvent dans le cadre des projets de développement des processus progressifs de marginalisation et d’occultation. Tout au long de la chaîne de valorisation des ressources entre les chercheurs et les communautés autochtones, tant les délais de développement, les transferts successifs de ressources que les mentalités de certains utilisateurs contribuent en effet à diminuer progressivement la reconnaissance de l’apport des communautés et de leurs savoirs, jusqu’à parfois conduire à une absence totale de reconnaissance de leur mobilisation dans la recherche [43]. Il est néanmoins possible grâce à la vigilance d’individus ou d’institutions dans certains cas de déceler ce genre de procédés [44].

29Autant dans les travaux de réflexions que dans le règlement de l’UE, les savoirs traditionnels ne sont envisagés que comme de simples ressources mobilisables dotées ou non d’un potentiel économique pour les utilisateurs extérieurs aux communautés. Ces travaux ne procèdent à aucune analyse de l’importance culturelle, sociale, identitaire et économique des savoirs traditionnels pour les communautés autochtones et locales. Les savoirs traditionnels, indispensables à la survie matérielle et culturelle des communautés, ne sont donc analysés que du point de vue du volume des savoirs prétendument utilisés selon les déclarations des utilisateurs et en l’absence de toute étude scientifique de synthèse sur le sujet. En conséquence, la problématique du respect tant du contenu, que des procédures d’accès aux savoirs traditionnels ne sont pas traités ni dans les travaux de réflexion préparatoires, ni dans le règlement. Or, si les cas d’utilisations des savoirs traditionnels sont probablement moins nombreux que les cas d’utilisations de ressources génétiques, en conclure que la problématique de la circulation des savoirs traditionnels ne nécessiterait pas autant d’attention que celle des ressources génétiques constitue selon nous, une grave erreur d’appréciation de l’importance de la protection de ces savoirs tant pour les communautés que pour les utilisateurs. Alors que pour les premiers, il s’agit d’éléments identitaires et culturels fondamentaux dont le respect fait partie des droits reconnus aux peuples autochtones [45] et est indispensable pour la décolonisation des rapports avec les communautés autochtones [46]. Pour les seconds, rappelons à quel point les accusations d’utilisations abusives des savoirs traditionnels peuvent se révéler dévastatrices pour leur réputation [47].

C – Le choix d’une mise en œuvre partielle plutôt que l’immobilisme

30La problématique de la mise en œuvre du protocole de Nagoya est particulièrement complexe dans l’Union européenne. En effet, tant l’UE et les États membres sont parties à ce texte international et sont donc potentiellement concernés par sa mise en œuvre. L’adoption du règlement a donc nécessité une analyse approfondie de la pertinence et de l’impact d’actions nationales et européennes en fonction des obligations du protocole de Nagoya [48].

31Selon l’étude d’impact, la mise en œuvre de ce texte repose sur deux piliers : d’une part, la régulation de l’accès aux ressources génétiques et aux savoirs associés, d’autre part, le contrôle des utilisateurs afin de s’assurer que les ressources et les savoirs utilisés dans l’Union ont été acquis légalement. Cette démarche nous apparaît particulièrement intéressante dans la mesure où elle permet de décomposer les obligations du protocole et de déterminer le niveau d’action le plus approprié entre l’UE et les États membres.

32Selon l’étude d’impact, une approche de l’UE en ce qui concerne le contrôle des utilisateurs (le second pilier) est perçue par les autorités et les utilisateurs comme un champ où l’harmonisation serait particulièrement pertinente :

33

« an EU-harmonised approach to implementing the user-compliance pillar of the Protocol would provide for legal certainty and establish a level playing field for all actors in the EU genetic resources value chain, minimising their risks of operation and maximising research and development opportunities for researchers and companies. It would also prevent situations where differences in user-compliance obligations between different Member States create costs and barriers for researchers and companies that are active in more than one Member State[49] ».

34Pour ce qui est du premier pilier, l’UE européenne n’a pas souhaité s’engager dans la voie de la régulation de l’accès aux ressources génétiques et aux savoirs traditionnels associés. En effet, selon l’étude d’impact, la compétence de l’UE n’apparaît pas évidente et est d’ailleurs contestée par les États membres [50].

35L’étude d’impact souligne en outre le fait qu’il n’existe aucune urgence à élaborer un cadre contraignant d’accès et de partage des avantages harmonisé au niveau européen, et qu’il existe peu d’expériences nationales en Europe sur lesquelles s’appuyer. Il s’agit donc d’un volet sur lequel l’Union n’estime pas une intervention légitime de sa part et confie (encore pour un temps) aux États membres la responsabilité d’agir [51].

36L’UE opte en conséquence pour une mise en œuvre partielle des obligations du protocole de Nagoya en concentrant son action sur l’adoption de mesures principalement à destination des utilisateurs. Pour cela l’UE a préféré l’adoption d’un règlement européen, c’est-à-dire un acte de portée générale et obligatoire dans toutes ses dispositions. Le règlement européen est en outre directement applicable dans l’ordre juridique des États membres et s’impose à tous les sujets de droit, donc aux utilisateurs européens [52]. Il s’agit donc d’un instrument dont la force normative apparaît potentiellement forte étant donné la nature de l’instrument choisi mais aussi des garanties normatives offertes par la possibilité pour la Commission d’enquêter et de poursuivre les États membres ne remplissant pas leurs obligations.

37La stratégie adoptée nous semble donc dotée d’un potentiel très intéressant dans la mesure où l’inaction récurrente des États est court-circuitée et l’UE se trouve ainsi dotée d’une réglementation globale et harmonisée pour l’ensemble des utilisateurs. Ce faisant, l’UE participe à l’accélération de la mise en œuvre du protocole de Nagoya et garantit un cadre d’obligations communes aux utilisateurs réduisant ainsi les traitements différenciés.

38Néanmoins, au-delà de la volonté d’agir et de l’adoption d’un instrument contraignant à destination principalement des utilisateurs, il s’agit maintenant de s’interroger sur la nature et la portée des obligations consacrées. Analysons donc maintenant plus en détail du dispositif mis en place par le règlement européen.

II – Un règlement au service de la stimulation et du développement d’une économie basée sur l’exploitation des ressources de la biodiversité

39Les utilisateurs de ressources génétiques constituent la cible privilégiée des rédacteurs du règlement (A) qui prévoit un ensemble de principes et de mécanismes en vue de sécuriser leur environnement et de prévenir les risques de contestation (B).

A – Les utilisateurs cible privilegiée du règlement europeen

40Le règlement européen vise quasi-exclusivement les utilisateurs de ressources génétiques et de savoirs traditionnels associés. Ainsi l’apport conceptuel du règlement est constitué essentiellement de clarifications au bénéfice de ces acteurs (1). Le champ d’application du règlement est quant à lui défini de telle sorte qu’il constitue un nouveau point de départ pour les utilisateurs de ressources génétiques et de savoirs traditionnels (2).

1 – L’apport conceptuel du règlement : des clarifications pour les utilisateurs et leurs activités

41Les définitions fournies par le règlement européen ne sont pas d’une grande originalité et se contentent pour la plupart de reprendre les définitions de la CDB et du protocole de Nagoya. Les seuls véritables efforts conceptuels concernent les utilisateurs et leurs activités.

42Parmi les nouvelles définitions figure celle d’« utilisateur », de « connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques », d’« accès », de « ressources génétiques auxquelles il a été accédé illégalement », « association d’utilisateurs » (dont nous parlerons plus bas) et « certificat de conformité internationalement reconnu » (que nous traiterons également plus bas).

43Ces définitions n’apportent que très peu de clarté supplémentaire à l’image de la notion d’utilisateur définie comme « une personne physique ou morale qui utilise des ressources génétiques ou des connaissances traditionnelles associées à des ressources génétiques[53] ». Or, si le règlement européen reprend la définition d’utilisation de ressources génétiques du protocole de Nagoya, il ne propose aucune définition de l’utilisation des connaissances traditionnelles associées, ce qui souligne à la fois le peu d’attention dont les communautés autochtones font l’objet dans le règlement, mais aussi le manque d’expertise de l’UE en la matière.

44D’autres définitions sont plus problématiques, à l’image de la notion de « connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques » définies comme « les connaissances traditionnelles détenues par une communauté autochtone ou locale présentant un intérêt pour l’utilisation des ressources génétiques et décrites en tant que telles dans les conditions convenues d’un commun accord qui s’appliquent à l’utilisation des ressources génétiques[54] ». Le règlement ne prévoit donc la protection des savoirs traditionnels que dans la mesure où ils sont décrits explicitement comme associés à une ressource génétique dans un contrat visant l’utilisation de ressources génétiques. Les savoirs ne figurant pas dans un contrat ne sont donc pas protégés [55]. Il s’agit de cette manière de ne protéger que les savoirs traditionnels directement associés à une ressource génétique, c’est-à-dire explicitement associés à une ressource et ce au sein de documents d’accès. En conséquence, tous les savoirs pouvant indirectement conduire à des utilisations de ressources génétiques ne sont pas inclus dans cette définition [56]. Selon l’annexe de l’étude d’impact de la Commission, il s’agit notamment des savoirs publiés dans une revue scientifique consultée par un chercheur qui par la suite mobilisera ces savoirs dans le cadre d’un projet de recherche [57]. Ce chercheur ne sera pas considéré, selon le règlement, comme utilisant des connaissances traditionnelles associées à des ressources génétiques et, en l’absence de protection globale de ces connaissances en droit européen, ne sera tenu à aucune obligation (par exemple de déclaration, de recueil de consentement ou encore de partage des avantages).

45De la même manière, il est probable que les savoirs traditionnels auxquels il aura été accédé dans le cadre de projets (par exemple des études ethnobotaniques) qui ne visent pas directement l’utilisation des ressources génétiques, mais uniquement la collecte du patrimoine immatériel autochtone (dont l’étude pourra néanmoins révéler certaines utilisations potentielles), ne seront pas protégés au titre du règlement. Il est d’ailleurs probable que certains projets seront définis de cette manière afin d’éviter l’application du règlement européen et de ses obligations.

46Par cette démarche, l’UE a souhaité adopter une définition claire et restrictive afin de garantir un maximum de sécurité juridique au profit des utilisateurs mais aussi afin de ne pas interférer avec les négociations en cours au sein de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle à propos d’une protection globale du patrimoine culturel immatériel autochtone [58]. Ce faisant, l’UE navigue entre le souci d’adopter des définitions claires et précises et la volonté de ne pas empiéter sur les prérogatives des États et des discussions internationales en cours.

47Ceci est confirmé par un autre aspect de cette définition car, si le règlement définit bien la notion de savoirs « associées aux ressources génétiques », il n’éclaire pas la notion de « connaissances traditionnelles ». Le seul élément de définition du règlement concernant cette notion est donné en préambule où les connaissances traditionnelles sont décrites comme « les connaissances, les innovations et les pratiques des communautés autochtones et locales englobant des modes de vie traditionnels qui présentent un intérêt pour la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique ». Les rédacteurs du règlement européen n’ont ici pris aucun risque et se sont contentés de reprendre les termes de la CDB et du protocole de Nagoya sans chercher à approfondir cette notion en adoptant par exemple une définition basée sur les modes et le contexte de développement des savoirs traditionnels ou encore au moyen d’une liste d’exemples [59]. Selon la Commission, l’absence de définition internationalement reconnue de la notion de savoirs traditionnels constitue une justification à cette situation [60].

48Enfin, la notion de « ressources génétiques auxquelles il a été accédé illégalement » est, elle, un ajout absent de la première proposition de règlement mais aussi des textes internationaux. Elle est définie comme « les ressources génétiques et les connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques auxquelles il n’a pas été accédé conformément aux dispositions législatives ou réglementaires nationales en matière d’accès et de partage des avantages du pays fournisseur qui est partie au protocole de Nagoya qui requiert d’obtenir le consentement préalable donné en connaissance de cause ». Il s’agit là d’une tentative de définition de la notion de biopiratage selon des termes moins stigmatisants pour les utilisateurs [61]. Elle apparaît particulièrement favorable à ces derniers puisque le caractère illégal d’un accès dépendra de l’existence de dispositions législatives ou réglementaires nationales en matière d’APA d’un État partie au protocole de Nagoya. En l’absence de dispositif, les utilisateurs ne pourront pas être accusés de ne pas avoir respecté les obligations d’APA reconnues en droit international [62]. Il est en outre important de noter que le règlement adopte une vision très restrictive des règles à respecter pour les utilisateurs puisque le caractère illégal d’un accès est défini en fonction d’un cadre national, sans que soient mentionnées les normativités locales et privées potentielles tels que par exemple les codes ou protocoles des fournisseurs et en particulier ceux des communautés autochtones et locales. Ces derniers devront être reconnus par les cadres nationaux d’APA afin que leur application devienne obligatoire au regard du règlement européen. Ce texte adopte donc finalement la même démarche que la CDB et le protocole de Nagoya, à savoir celle qui consiste à s’appuyer sur la mise en œuvre de l’APA par les États, qui ont par ailleurs pour la plupart failli dans cette tâche jusqu’à présent.

2 – Le champ d’application du règlement : un nouveau départ pour les utilisateurs

49Le champ d’application du règlement européen constitue un des éléments les plus problématiques et permet d’apprécier la volonté des institutions européennes de protéger les utilisateurs et leurs secteurs d’activité. Néanmoins, comme nous le verrons, certaines conséquences des choix terminologiques n’ont peut-être pas été anticipées par les rédacteurs.

50Le règlement européen « s’applique aux ressources génétiques sur lesquelles les États exercent des droits souverains et aux connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques auxquelles il est donné accès après l’entrée en vigueur du protocole de Nagoya pour l’Union ». Dès lors, ne sont concernés que les accès effectués à partir du 12 octobre 2014. Toute la question consiste à savoir ce que signifie « l’accès ». Selon l’article 2 du texte, il s’agit de « l’acquisition de ressources génétiques ou de connaissances traditionnelles associées à des ressources génétiques se trouvant dans un pays qui est partie au protocole de Nagoya ».

51Le choix comme élément déclencheur pour l’application du règlement européen de la notion d’acquisition plutôt que celle d’utilisation n’est pas anodin [63]. Il va permettre de régulariser les pratiques de collecte s’étant déroulées avant l’entrée en vigueur du règlement et de prévenir les effets que pourraient avoir ces collectes après l’entrée en vigueur du texte.

52Toutes les ressources génétiques et les connaissances traditionnelles acquises avant le 12 octobre 2014 ne sont pas concernées par l’application du règlement européen. Ainsi les ressources génétiques acquises dans le cadre de collections et conservées avant 1993 et surtout entre 1993 et le 12 octobre 2014 (période pendant laquelle la CDB était en vigueur) n’entrent pas dans le champ d’application du règlement.

53Il s’agit donc de valider, du point de vue du droit européen, la légalité de ces acquisitions qui pourront par ailleurs faire l’objet d’utilisations (entamées avant l’entrée en vigueur du règlement et perdurant ou encore débutant après son entrée en vigueur) par leurs détenteurs, sans qu’il soit nécessaire de respecter le règlement européen [64]. Le Muséum National d’Histoire Naturelle (MNHN) pourra ainsi, par exemple, continuer d’exploiter les ressources acquises avant le 12 octobre 2014 et, en cas de découverte importante, ne sera pas concerné par l’application du règlement. Il s’agit donc clairement de définir un nouveau point de départ pour les utilisateurs et de faire table rase du passé [65]. Si l’exclusion des cas d’utilisations antérieures au 12 octobre 2014 peut apparaître justifiable au regard du principe de non-rétroactivité, celle des cas d’utilisations qui ont commencé avant cette date et qui se poursuivent et celle des utilisations nouvelles sont incompréhensibles.

54Ceci a par ailleurs pour effet de faire disparaître le lien entre le fournisseur initial et les utilisateurs ayant acquis des ressources avant l’entrée en vigueur du règlement. Les utilisateurs ayant constitué des collections jusqu’au 12 octobre 2014 sont ainsi considérés comme de nouveaux fournisseurs initiaux potentiels de ressources génétiques auprès de qui le règlement européen s’appliquera. Les nouvelles acquisitions auprès de ces collections, par exemple celles du MNHN, devront donc à partir du 12 octobre 2014 respecter les dispositions du règlement. Dans cette hypothèse, le MNHN ne sera pas tenu de contacter au titre du règlement européen le fournisseur initial des ressources acquises avant le 12 octobre 2014.

55En ce qui concerne les savoirs traditionnels, le même raisonnement est applicable. Le règlement européen ne concernera pas l’ensemble des acquisitions qui ont eu lieu avant le 12 octobre 2014 mais dont l’utilisation et l’exploitation perdurent aujourd’hui (notamment par la publication et la réédition d’ouvrages ou encore par le dépôt de droits de propriété intellectuelle concernant des innovations développées grâce aux savoirs autochtones). Si la question des acquéreurs antérieurs au 12 octobre 2014 est réglée par le règlement, celle des acquéreurs postérieurs à l’entrée en vigueur du règlement apparaît intéressante dans le cas des savoirs autochtones. En effet, de nombreux savoirs traditionnels ont été acquis et divulgués de manière publique au travers de diverses sources bibliographiques avant le 12 octobre 2014. Or, ces savoirs peuvent encore être mobilisés par différents utilisateurs. Toute la question consiste donc à déterminer si un utilisateur qui accède à un savoir traditionnel par exemple par la consultation d’un ouvrage ou son achat acquiert ce savoir au sens du règlement européen et doit donc en respecter les dispositions. Dans l’affirmative, le fournisseur serait vraisemblablement l’auteur de l’ouvrage et non pas les communautés puisque l’acquisition n’a pas lieu auprès des communautés mais auprès de l’auteur-fournisseur. Cette hypothèse entre clairement en contradiction avec l’esprit de la définition de connaissances associées à une ressource génétique que nous avons discuté plus haut, néanmoins elle ne nous semble pas pouvoir être totalement écartée étant donné la lettre du règlement s’appuyant sur l’acquisition comme élément déclencheur pour l’application du règlement.

56Le choix de la notion d’acquisition a été pensé comme une manière de garantir un certain degré de sécurité juridique pour les utilisateurs. C’est le cas puisque ces derniers ne pourront pas être inquiétés pour les utilisations de ressources acquises avant l’entrée en vigueur du règlement. Ce choix est néanmoins source d’injustices pour les fournisseurs ayant transféré leurs ressources et leurs savoirs avant l’entrée en vigueur du règlement. Il pourrait en outre interférer avec les accords contractuels qu’ont pu développer les utilisateurs pour leurs acquisitions et utilisations avant l’entrée en vigueur du règlement et prévoyant par exemple une obligation de partage des avantages. Le choix de la notion d’utilisation comme déclencheur pour l’application du règlement aurait pu corriger en partie ces injustices puisque toute nouvelle utilisation aurait obligé un utilisateur même détenteur d’une ressource ou d’un savoir avant le 12 octobre 2014 à conclure un accord avec le fournisseur. L’UE a néanmoins préféré couper ce lien et éviter ainsi des allers et retours entre fournisseurs et utilisateurs à l’occasion de nouvelles utilisations de ressources déjà acquises.

B – Des principes et des mécanismes pour sécuriser l’environnement des utilisateurs et prévenir les contestations

57Le règlement européen prévoit une série de principes et de mécanismes en vue de sécuriser l’environnement des utilisateurs parmi lesquels, une obligation de diligence (1), la création d’un réseau de fournisseurs certifiés (2), la reconnaissance de bonnes pratiques (3), et enfin des mécanismes de contrôle et de sanction (4).

1 – L’obligation de diligence

a – L’obligation de s’informer et de respecter les dispositifs d’APA

58Le cœur du dispositif européen repose sur l’obligation de diligence qui impose aux utilisateurs de faire « preuve de la diligence nécessaire afin de s’assurer que l’accès aux ressources génétiques et aux connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques qu’ils utilisent s’est effectué conformément aux dispositions législatives ou réglementaires applicables en matière d’accès et de partage équitable des avantages et que les avantages font l’objet d’un partage juste et équitable selon des conditions convenues d’un commun accord, conformément à toute disposition législative ou réglementaire applicable[66] ».

59Le règlement européen vise donc à responsabiliser les utilisateurs en les obligeant à s’informer et à mettre en œuvre des moyens pour respecter les cadres d’APA dans les États où s’effectue l’accès. On notera néanmoins qu’il s’agit d’une obligation de moyen et non de résultat de la part des utilisateurs et que cette obligation ne concerne que les cas dans lesquels il existe des dispositions législatives ou réglementaires applicables en matière d’APA [67]. Or, pour de nombreux États, il n’existe pas encore de cadre légal.

60De plus, l’obligation des utilisateurs ne prend pas explicitement en compte l’existence potentielle de cadres de régulation privés à l’initiative des fournisseurs [68]. Nous pensons notamment aux codes et protocoles d’accueil des communautés autochtones et locales. Ces codes et protocoles sont pourtant reconnus dans le protocole de Nagoya et il est prévu que « les Parties s’efforcent d’appuyer, selon qu’il convient, l’élaboration par les communautés autochtones et locales, y compris les femmes de ces communautés, de : Protocoles communautaires relatifs à l’accès aux connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques et au partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation[69] ». Dans le règlement, les communautés autochtones et locales ne sont donc pas désignées comme des fournisseurs à part entière aux côtés des États et il revient à ces derniers de reconnaître ou non des droits à ces communautés pour qu’elles puissent légalement agir en tant que fournisseurs.

61Autre exemple de l’intensité relative des obligations prévues au titre du règlement : « les ressources génétiques et les connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques ne sont transférées et utilisées que selon des conditions convenues d’un commun accord si celles-ci sont requises par les dispositions législatives ou réglementaires applicables[70] ». Cette obligation est ici clairement conditionnée par l’adoption de dispositifs d’APA à l’initiative des États.

b – La preuve de la diligence

62Le règlement européen prévoit plusieurs moyens pour les utilisateurs de prouver qu’ils ont bien fait preuve de diligence. Ils peuvent pour cela obtenir un certificat de conformité internationalement reconnu, c’est-à-dire : « un permis ou un document équivalent délivré au moment de l’accès comme preuve que l’accès à la ressource génétique dont il traite s’est effectué conformément à la décision d’accorder le consentement préalable donné en connaissance de cause, et que des conditions convenues d’un commun accord ont été établies, pour l’utilisateur et l’utilisation qui y sont précisés, par une autorité compétente[71] » et déposé auprès du centre d’échange sur l’accès et le partage des avantages [72] prévus à l’article 14 du protocole de Nagoya. Il s’agit du cas idéal dans lequel un État a adopté une procédure d’APA et délivre des certificats de conformité enregistrés au niveau international.

63Faute de certificat de conformité internationalement reconnu, les utilisateurs ne doivent pas pour autant renoncer à leurs projets de collecte, mais seront tenus de récolter, de conserver et de transférer aux utilisateurs ultérieurs un certain nombre d’informations et de documents :

64

« 1. la date et le lieu d’accès aux ressources génétiques ou aux connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques ;
2. la description des ressources génétiques ou des connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques utilisées ;
3. la source auprès de laquelle les ressources génétiques ou les connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques ont été directement obtenues, ainsi que les utilisateurs ultérieurs des ressources génétiques ou des connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques ;
4. l’existence ou l’absence de droits et d’obligations liés à l’accès et au partage des avantages, y compris des droits et obligations relatifs aux applications et à la commercialisation subséquentes ;
5. les permis d’accès, le cas échéant ;
6. les conditions convenues d’un commun accord, y compris les modalités de partage des avantages, le cas échéant. »

65Il s’agit là d’informations somme toute assez classiques afin d’assurer la traçabilité des ressources génétiques et des savoirs traditionnels.

66Il existe en outre deux cas dans lesquels les utilisateurs seront réputés avoir fait preuve de diligence. Il s’agit principalement de la situation dans laquelle « les utilisateurs obtiennent une ressource génétique provenant d’une collection inscrite au registre des collections au sein de l’Union[73] ».

2 – La création d’un réseau de fournisseurs certifiés

67Afin de faciliter l’accès aux ressources génétiques tout en garantissant la sécurité juridique des utilisateurs, le règlement européen prévoit la création d’un registre des collections considérées comme respectant les obligations de la CDB et du protocole de Nagoya [74]. Les utilisateurs accédant aux ressources génétiques de ces collections sont donc assurés d’avoir fait preuve de la diligence nécessaire dans le cadre de l’accès à des ressources génétiques (le règlement européen ne semble pas envisager la possibilité de l’existence de collections ou bibliothèques de savoirs [75] dont il existe pourtant des exemples pour certains dans l’Union Européenne [76]).

68La demande de reconnaissance doit émaner du détenteur d’une collection et être effectuée auprès d’un État membre. Si la collection satisfait les exigences du règlement, l’État membre notifie à la Commission son nom et les coordonnées de son détenteur, ainsi que le type de collection afin que celle-ci l’inscrive au registre. Il revient aux détenteurs de collections de prouver qu’ils disposent de procédures et de mécanismes propres à assurer le respect des obligations de la CDB et du protocole de Nagoya, ainsi que des outils et pratiques permettant de garantir la traçabilité des ressources conservées [77].

69Les collections seront chargées de la mise en place d’instruments de suivi et de contrôle appropriés dans le cadre de l’échange d’échantillons de ressources génétiques et d’informations y afférentes avec d’autres collections.

70Les États membres seront tenus de vérifier « régulièrement » si les conditions de l’inscription sont toujours remplies, et pourront le cas échéant informer la Commission afin qu’elle procède à la radiation d’une collection du registre.

71Par la certification de ces collections, il s’agit de constituer un réseau d’institutions auprès desquelles les utilisateurs pourront avoir la garantie d’avoir rempli leur obligation de diligence. Il s’agit donc de sécuriser leur environnement puisque de nombreux accès ont lieu auprès de collections ex situ[78].

3 – La reconnaissance de Bonnes pratiques

72Le règlement européen prévoit la possibilité pour les associations d’utilisateurs ou toutes autres parties intéressées de faire reconnaître comme « bonnes pratiques » auprès de la Commission « un ensemble de procédures, d’instruments ou de mécanismes qu’elles ont développés et sur lesquels elles exercent une surveillance[79] ».

73Il faut pour cela que ces pratiques permettent aux utilisateurs de satisfaire à leurs obligations au titre du règlement, c’est-à-dire l’obligation de diligence (article 4) ainsi que celle de déclaration dans le cadre d’un financement public ou de la commercialisation de produits (article 7). Un registre des bonnes pratiques reconnues par la Commission sera publié sur internet.

74Par le biais de la reconnaissance des bonnes pratiques, il s’agit d’encourager la responsabilisation et l’autorégulation des associations d’utilisateurs. Ces derniers ont tout intérêt à se saisir de cette opportunité dans la mesure où le respect de bonnes pratiques reconnues constituera un élément de preuve supplémentaire du respect de leur obligation de diligence mais aussi un moyen de se prémunir contre d’éventuelles insuffisances dans leurs démarches. Il s’agit donc d’offrir l’opportunité aux utilisateurs de voir reconnaître officiellement leurs pratiques et donc de leur offrir un moyen de défense préventif.

75Il sera toutefois possible de remettre en cause le statut des bonnes pratiques. La procédure apparaît néanmoins particulièrement favorable aux utilisateurs puisqu’il faudra démontrer l’existence de « cas répétés ou significatifs où les utilisateurs mettant en œuvre une bonne pratique n’ont pas satisfait aux obligations qui leur incombent » au titre du règlement européen. Ceci déclenchera une procédure de concertation entre la Commission et l’association d’utilisateurs concernée ou d’autres parties prenantes afin d’examiner « si ces cas témoignent d’éventuelles insuffisances dans la bonne pratique concernée ».

76En cas d’insuffisance(s) avérée(s), la sanction consistera dans la radiation de la bonne pratique. Il est fort probable que la Commission et les associations d’utilisateurs, afin de préserver l’intégrité et la réputation des utilisateurs, préféreront favoriser la concertation et la modification des bonnes pratiques en cause, plutôt que de procéder à leur radiation pure et simple.

77Selon ce modèle, les autorités publiques s’appuient très fortement sur l’initiative et les actions des utilisateurs. Ceci traduit selon nous autant la volonté de laisser les premiers intéressés définir les procédures les plus adéquates, que l’expression de l’incapacité des autorités publiques à définir elles-mêmes un corpus de bonnes pratiques. Il est d’ailleurs frappant de constater que le règlement européen ne cite ni les lignes directrices de Bonn [80] qui constituent pourtant un ensemble d’orientations pouvant servir de base à la définition de bonnes pratiques, ni le Code Tkarihwaié : ri [81] adopté lors de la dixième conférence des parties à Nagoya. Ce code propose pourtant un certain nombre de principes éthiques généraux et de considérations particulières qui peuvent être particulièrement utiles aux utilisateurs dans leurs démarches dès lors que sont impliquées des communautés autochtones et locales.

78Il est en outre important de souligner que la responsabilisation et l’autorégulation n’est une solution explicitement envisagée que pour les utilisateurs. En effet, rien n’est prévu pour les fournisseurs et en particulier pour les communautés autochtones et locales. Le règlement aurait pu prévoir la possibilité pour les fournisseurs de faire reconnaître des procédures et mécanismes comme des bonnes pratiques, prouvant le respect de l’obligation de diligence pour les utilisateurs. Le règlement prévoit néanmoins la possibilité de la reconnaissance de bonnes pratiques à l’initiative d’une association d’utilisateurs, mais aussi de « toutes autres parties intéressées ». Il est donc potentiellement envisageable que des communautés autochtones et locales puissent tenter de faire reconnaître leurs propres cadres de régulation comme des bonnes pratiques. On notera toutefois que ces bonnes pratiques doivent faire l’objet d’une surveillance, or il n’est pas certain que toutes les communautés autochtones et locales soient en mesure d’assurer un tel contrôle sur les procédures.

4 – Les mécanismes de contrôle et de sanction

79Le contrôle des utilisateurs relève, lui, des autorités compétentes qui doivent être désignées par chaque État membre [82]. Les contrôles devront s’effectuer selon un plan « élaboré suivant une approche fondée sur les risques[83] », ou sur la base « d’informations utiles, notamment sur la base de préoccupations fondées émanant de tiers, quant au non-respect du présent règlement par un utilisateur[84] ».

80Le règlement européen prévoit la mise en place de deux points de contrôle obligatoires dans le cadre de la surveillance du respect de leurs obligations par les utilisateurs. Le premier de ces points se situe en amont de la chaîne d’étude des ressources et des savoirs, tandis que le second se situe complètement en aval avant la commercialisation d’un produit.

81Ainsi « les bénéficiaires d’un financement pour des travaux de recherche impliquant l’utilisation de ressources génétiques et de connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques qu’ils fassent une déclaration attestant qu’ils font preuve de la diligence nécessaire[85] ». La déclaration des utilisateurs devra intervenir au moment de la réception des fonds [86] et devrait permettre de prouver la connaissance par les utilisateurs de leur obligation de diligence, mais aussi d’établir une liste de projets (non exhaustive car tous les projets ne donnent pas lieu à un financement public) portant sur l’utilisation des ressources génétiques et/ou des savoirs traditionnels associés. Ces déclarations devront être adressées aux États membres et à la Commission.

82Le second point de contrôle est situé « au moment du développement final d’un produit élaboré par le biais de l’utilisation de ressources génétiques ou de connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques[87] ». Deux cas de figure sont alors envisageables selon qu’une autorisation de mise sur le marché (AMM) est requise ou non. Dans le premier cas (une AMM est requise), la déclaration doit avoir lieu avant d’obtenir l’AMM. Dans le second cas, la déclaration doit intervenir lors du développement final et avant la mise sur le marché de l’Union [88]. La déclaration doit alors être effectuée auprès de l’autorité compétente et le certificat internationalement reconnu ou les informations équivalentes doivent lui être remis.

83Le règlement européen ne prévoit pas de point de contrôle intermédiaire le long de la chaîne de valorisation, notamment au moment du dépôt de droits intellectuels. Il aurait pu être envisagé l’obligation de déclaration de l’origine des ressources et des savoirs lors d’un dépôt de droits de propriété intellectuelle (et donc la remise du certificat internationalement reconnu) afin d’éviter l’octroi de droits de propriété impliquant des ressources ou des connaissances dont l’acquisition pose problème.

84En ce sens, si le point de contrôle au moment du financement apparaît particulièrement pertinent afin de couper court à tout projet avant une collecte et une utilisation abusive, le point de contrôle fixé avant la commercialisation d’un produit apparaît bien tard selon nous au cours de la chaîne de valorisation. En effet, imagine-t-on sérieusement, l’UE refuser la commercialisation d’un produit dont le développement et la préparation à la mise sur le marché auront nécessité d’importantes ressources humaines et économiques et pourraient en outre contribuer à créer de la richesse ?

85En tout état de cause, les sanctions en cas de non-respect des obligations du règlement européen ne sont pas définies par ce dernier, mais doivent l’être par les États membres d’ici au 11 juin 2015 et devront être proportionnées et dissuasives [89]. Il est ici assez étonnant de constater que l’UE, si déterminée à harmoniser les règles applicables aux utilisateurs afin de leur offrir un niveau de sécurité juridique très important, n’a pas souhaité suivre cette logique jusque dans le domaine des sanctions applicables.

Conclusion

86Depuis la signature du protocole de Nagoya, l’UE a démontré une réelle volonté de mettre en œuvre ses engagements internationaux dans le cadre de la CDB, notamment par la conduite d’études et l’organisation de consultations auprès de la société civile et des États membres. On regrettera néanmoins que ces études n’aient pas permis d’obtenir une connaissance complète de l’état du droit dans l’UE en ce qui concerne l’APA et qu’elles n’abordent que de manière très marginale le rôle et les droits des communautés autochtones et locales.

87Les efforts de l’UE ont néanmoins conduit à l’adoption du règlement n. 511/2014. Il s’agit d’une initiative d’harmonisation d’autant plus intéressante qu’elle ne concerne pas uniquement un État, mais dans le cas présent 27 États où sont localisés de nombreux utilisateurs et fournisseurs. Devant la complexité de la mise en œuvre du protocole de Nagoya dans l’UE, il faut saluer les efforts et le raisonnement des institutions européennes qui, plutôt que de laisser les États membres seuls responsables de la mise en œuvre du protocole, ont choisi d’agir dans le champ du contrôle des utilisateurs, soit selon elles, le domaine le plus approprié pour une harmonisation à ce jour.

88L’UE a ainsi façonné un cadre de contrôle sur mesure pour les utilisateurs en apportant un certain nombre de clarifications conceptuelles, mais aussi en prévoyant des principes et des mécanismes propres à sécuriser leurs activités et à les prémunir contre des accusations d’usages abusifs.

89Au travers de ce cadre, l’UE place les utilisateurs face à leurs responsabilités en leur confiant une obligation de diligence dans le cadre de leurs activités d’accès et d’utilisations des ressources génétiques et des savoirs traditionnels. Il ne s’agit néanmoins pour eux que d’une obligation de moyens vis-à-vis des éventuels dispositifs d’APA existants au sein des États fournisseurs. En cela le règlement européen n’est pas source de nouvelles obligations spécifiques en termes d’accès, ni un guide, même très général, pour les utilisateurs. On regrettera en outre la volonté de l’UE de ne pas s’engager au-delà des cadres nationaux et de ne pas reconnaître l’importance et la légitimité de cadres de régulations privés (notamment en ce qui concerne les communautés autochtones et locales).

90Dans ce règlement, les enjeux propres aux communautés autochtones et locales et leurs savoirs ne sont traités que de manière très marginale. Les savoirs sont en effet appréhendés comme des ressources à l’image des ressources génétiques et non comme des éléments du patrimoine culturel immatériel autochtone. Il s’agit clairement d’une occasion manquée pour l’UE qui disposait avec ce règlement d’une opportunité pour reconnaître un certain nombre de droits en faveur des peuples autochtones et notamment la reconnaissance de leurs codes et protocoles d’accès.

91À trop vouloir respecter la compétence des États, mais aussi les discussions internationales en cours pour une protection globale du patrimoine culturel immatériel, l’UE s’est contrainte à un exercice périlleux consistant à tenter de définir un cadre original et ambitieux sans pour autant empiéter sur ces deux sphères d’action concurrentes. Le résultat nous apparaît comme une occasion manquée pour l’adoption d’un cadre véritablement orignal et tenant compte de l’ensemble des intérêts en jeu, dont ceux des communautés autochtones et locales qui représentent bien souvent les acteurs dans la position la plus fragile face aux utilisateurs.

92Néanmoins, le règlement européen n’est pas véritablement décevant en ce sens que l’intérêt quasi-exclusif de l’UE pour les utilisateurs est pleinement assumé et argumenté dans les divers travaux préparatoires. Ainsi, en clarifiant les obligations des utilisateurs et en leur permettant par divers biais de désamorcer d’éventuelles accusations d’usages abusifs et donc de protéger leur réputation, l’adoption du règlement peut être interprétée de leur point de vue comme un succès indéniable.


Mots-clés éditeurs : communautés autochtones et locales, accès et partage des avantages, protocole de Nagoya, Union Européenne, utilisateurs

Mise en ligne 03/09/2015

Notes

  • [1]
    Préambule de la Convention sur la Diversité Biologique, 1992.
  • [2]
    Un fournisseur peut être défini comme « celui qui fournit ces ressources à l’utilisateur en lui conférant le droit d’en faire usage. La nature exacte du fournisseur est fixée par le droit interne. Dans certains pays, le fournisseur est désigné comme l’individu autorisé légalement à prélever du matériel biologique et le vendre/donner à toute autre personne, y compris les ressources génétiques inhérentes. Dans d’autres pays, les droits sur le matériel biologique sont distincts des droits sur les ressources génétiques que ce matériel biologique contient, tendant ainsi à démontrer que le gouvernement est le fournisseur des ressources génétiques, même si le propriétaire du matériel biologique qui le fournit est une personne physique ». M.Walloe et T. Young, « Au-delà de l’accès : l’application du partage juste et équitable des avantages en vertu de la CDB », UICN, Droit et politique de l’environnement, n° 67/2, 2009, p. 12.
  • [3]
    Les utilisateurs peuvent être définis comme : « tout personne physique, entreprise, université, organisme, gouvernement ou autre entité qui « utilise » ou acquiert des ressources génétiques en vue de les utiliser, ou qui tire des avantages de leur utilisation ». Ibid.
  • [4]
    Voir la liste complète des signataires sur http://www.cbd.int/convention/parties/list/.
  • [5]
    Voir la liste des États ayant adopté des mesures d’APA sur http://www.cbd.int/abs/measures/groups.shtml.
  • [6]
    « Les Lignes directrices de Bonn doivent aider les Parties, les États et les autres intervenants à élaborer des stratégies concernant l’accès et le partage des avantages, ainsi qu’à déterminer les étapes du processus d’accès aux ressources génétiques et de partage des avantages. Elles visent, plus précisément, à les assister lorsqu’ils établissent des mesures législatives, administratives ou de politique générale sur l’accès aux ressources génétiques et le partage des avantages ou lorsqu’ils négocient des contrats en la matière ». Secrétariat de la Convention sur la Diversité Biologique, « Lignes directrices de Bonn », 2002, P. IV.
  • [7]
  • [8]
    La CDB est approuvée par la Communauté Économique Européenne dans une décision du Conseil du 25 octobre 1993.
  • [9]
    Les rapports de l’UE sont disponibles sur le site de la CDB : http://www.cbd.int/reports/search/?country=eur
  • [10]
    Institute for European Environmental Policy (IEEP), Ecologic Institute, GHK, Study to analyse legal and economic aspects of implementing the Nagoya Protocol on ABS in the European Union. Final report for the European Commission, DG Environment. Institute for European Environmental Policy, Brussels and London, 2012.
  • [11]
    Rapport UE, executive summary, p. 1.
  • [12]
    Proposition de Règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l’accès aux ressources génétiques et au partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation dans l’Union, COM(2012) 576 final, 2012. Disponible en ligne : http://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=COM:2012:0576:FIN
  • [13]
    European Commission, Impact Assessment accompanying the document Proposal for a Regulation of the European Parliament and of the Council on Access to Genetic Resources and the Fair and Equitable Sharing of Benefits Arising from their Utilization in the Union, SWD(2012) 292 final, 2012a. Disponible en ligne : http://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=CELEX:52012SC0292
  • [14]
    Avis du Comité économique et social européen sur la « Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l’accès aux ressources génétiques et au partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation dans l’Union », COM(2012) 576 final, 2013. Disponible en ligne : http://eescopinions.eesc.europa.eu/eescopiniondocument.aspx?language=en&docnr=2314&year=2012
  • [15]
    European Commission, 2012a, op. cit. p. 19.
  • [16]
    Thomas Burelli, « Faut-il se réjouir de l’adoption du protocole de Nagoya ? », RJE 1/2012, p. 45-62.
  • [17]
    « Overall, there is a major expectation that the EU and its Member States will swiftly ratify and implement the Nagoya Protocol », European Commission, op. cit. p. 8.
  • [18]
    Institute for European Environmental Policy (IEEP), Ecologic Institute, GHK, op. cit., p. 173-206.
  • [19]
    European Commission, 2012a, op. cit., p. 6.
  • [20]
    40 des 42 réponses proviennent d’utilisateurs individuels ou de groupes d’utilisateurs. European Commission, Impact Assessment (Annexes) accompanying the document Proposal for a Regulation of the European Parliament and of the Council on Access to Genetic Resources and the Fair and Equitable Sharing of Benefits Arising from their Utilization in the Union, SWD(2012) 292 final, 2012b, p. 93-94. Disponible en ligne : http://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=CELEX:52012SC0292.
  • [21]
    European Commission, 2012a, op. cit., p. 12-13.
  • [22]
    Institute for European Environmental Policy (IEEP), Ecologic Institute, GHK, op. cit., p. 205 ; European Commission, 2012a, op. cit., p. 13.
  • [23]
    Institute for European Environmental Policy (IEEP), Ecologic Institute, GHK, op. cit., p. 205-206.
  • [24]
    European Commission, 2012a, op. cit., p. 16.
  • [25]
    Ibid, p. 5.
  • [26]
    Ibid, p. 3.
  • [27]
    Ibid, p. 4.
  • [28]
    Ibid, p. 16.
  • [29]
    Tobin Brendan, « Biopiracy by law : European Union Draft Law Threatens Indigenous Peoples’ Rights over their Traditional Knowledge and Genetic Resources », European Intellectual Property Review, 2014, p. 126.
  • [30]
    « However, verifying if GR to which these communities have established rights are of interest for users and whether ILCs based in the EU hold any TKaGR are questions that go beyond the scope of this study », Institute for European Environmental Policy (IEEP), Ecologic Institute, GHK, op. cit., p. 94.
  • [31]
    Il s’agit du Grupo Intercultural Almáciga basé en Espagne. Cette organisation se décrit comme « an NGO working to support Indigenous Peoples’ human rights globally through self-development projects and facilitation of the participation of their chosen representatives at the multilateral level ». Les réponses envoyées à l’UE sont publiées en ligne à l’adresse : http://ec.europa.eu/environment/consultations/abs_en.htm.
  • [32]
    Si l’UE dispose d’une politique relative aux peuples autochtones dans le cadre de son action extérieure, elle n’a pas développé une expertise particulière en ce qui concerne les populations autochtones présentes dans l’Union à l’image, par exemple, en France avec les Kanak (Nouvelle-Calédonie), les Amérindiens (Guyane française) ou encore les Polynésiens (Polynésie française). Un certain nombre d’informations spécifiques concernent les communautés autochtones et locales de l’UE dans les fiches des États dans le rapport des experts mandatés par l’UE. Ces fiches ne couvrent néanmoins qu’un faible nombre d’États parmi les 27 membres de l’UE et ne traitent ainsi pas de certaines populations pouvant être qualifiées d’autochtones (notamment les Samis en Scandinavie).
  • [33]
    European Commission, 2012a, op. cit., p. 13.
  • [34]
    Ibid, p. 13-14 ; Institute for European Environmental Policy (IEEP), Ecologic Institute, GHK, op. cit., p. 93
  • [35]
    European Commission, 2012a, op. cit., p. 16.
  • [36]
    Ibid.
  • [37]
    European Commission, 2012b, op. cit., p. 94.
  • [38]
    Ibid, p. 93-94.
  • [39]
    « Bien que de façon parfois peu visible, la plupart des institutions publiques de recherche tirent les fils de la circulation des ressources biologiques. En effet, elles sont devenues des intermédiaires irremplaçables dans la chaîne de valorisation depuis que les entreprises les associent aux opérations de bioprospection ». Florence Bellivier et Christine Noiville, « Code de conduite et équité des échanges de ressources biologiques », (2006) 15 Iddri – Idées pour le débat 8.
  • [40]
    Préambule du Règlement (UE) N. 511/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relatif aux mesures concernant le respect par les utilisateurs dans l’Union du protocole de Nagoya sur l’accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation, JOUE, 2014, p. 59. Disponible en ligne : http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX:32014R0511
  • [41]
    Proposition de Règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l’accès aux ressources génétiques et au partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation dans l’Union, COM(2012) 576 final, 2012 ; Voir aussi le commentaire de Sarah Vanuxem, « Le devenir des régimes d’Accès aux ressources génétiques et de Partage des Avantages (APA) : Étude comparée des projets calédonien et européen », Droit de l’environnement, n° 214, 2013, p. 256-260.
  • [42]
    Par exemple, l’ethnobotanie est une discipline particulièrement dynamique qui fait l’objet de nombreuses publications chaque année.
  • [43]
    Thomas Burelli, « Collaboration entre scientifiques et communautés autochtones et locales : Le patrimoine culturel immatériel autochtone face aux logiques de développement et de valorisation de l’innovation », in Droit et Innovation, LGDJ, 2013, p. 135-154.
  • [44]
    Voir en ce sens le cas exemplaire de la Bibliothèque Numérique des Savoirs Traditionnels en Inde. Disponible en ligne à l’adresse : www.tkdl.res.in.
  • [45]
    Notamment l’article 31 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, A/RES/61/295, 17 septembre 2007.
  • [46]
    Sur la décolonisation des rapports entre chercheurs et populations autochtones, voir notamment Linda Tuhiwai Smith, Decolonizing Methodologies : Research and Indigenous Peoples (2012) Second Edition, Zed Books.
  • [47]
    Les nouveaux médias et la multiplication des bases de données relatives aux savoirs traditionnels aidant, il est de plus en plus aisé d’obtenir et de diffuser des informations concernant les cas d’usages abusifs des savoirs traditionnels (c’est-à-dire sans recueil de consentement préalable et /ou de partage des avantages). Ces cas sont de plus en plus médiatisés à l’image du « Captain Hook Awards for Biopiracy » à l’initiative de la coalition contre la biopiraterie.
  • [48]
    Voir notamment l’analyse des experts mandatés par l’UE : Institute for European Environmental Policy (IEEP), Ecologic Institute, GHK, op. cit., p. 69-78.
  • [49]
    European Commission, 2012a, op. cit., p. 19-20
  • [50]
    « Member states strongly feel that the Union does not have competence to decide whether access to genetic resources over which Member States hold sovereign rights shall in the future be subject to prior informed consent and benefit-sharing requirements or not ». Ibid, p. 20.
  • [51]
    « Whatever the case may be, it seems that there is currently no need for the Union to take binding Union-level measures on access. So far, only two Member States have legislated on access, there is very limited practical experience with the functioning of their access frameworks, and no indication that these would raise issues under the acquis ». Ibid.
  • [52]
    Article 288 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE).
  • [53]
    Article 3, Règlement (UE) n° 511/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014.
  • [54]
    Ibid.
  • [55]
    Tobin Brendan, op. cit., p. 127.
  • [56]
    « Legal certainty can be achieved, if implementing measures focus only on traditional knowledge that is directly associated with genetic resources as documented in domestic access permits and in mutually agreed terms. This excludes all other types of traditional knowledge that may indirectly become relevant to the utilisation of genetic resources within the EU », European Commission, Impact Assessment (Annexes), op. cit., p. 28.
  • [57]
    Ibid.
  • [58]
    Ibid.
  • [59]
    Voir notamment Henri-Philippe Sambuc, La protection internationale des savoirs traditionnels : la nouvelle frontière de la propriété intellectuelle, L’Harmattan, 2003, p. 60-80 ; Fikret Berkes, Sacred Ecology. Traditional Ecological Knowledge and Resource Management, Philadelphie, Taylor & Francis, 2008, p. 3. ; Marie Battiste et James Youngblood, Henderson, Protecting indigenous Knowledge and heritage : a global challenge, Purich Publishing Ltd., Saskatoon, Saskatchewan, 2000, p. 46.
  • [60]
    Brendan Tobin démontre dans sa contribution le caractère infondé de cette argumentation dans la mesure où d’autres termes tels que « invention » ou « gènes » ne font pas l’objet de définitions internationalement reconnues mais font néanmoins l’objet de protections dans le champ de la propriété intellectuelle. Tobin Brendan, op. cit., p. 126.
  • [61]
    Notons qu’en France la Polynésie utilise le terme de biopiratage pour une définition sensiblement identique à celle du règlement européen. Loi du pays n° 2012-5 du 23 janvier 2012 relative à l’accès aux ressources biologiques et au partage des avantages résultant de leur valorisation.
  • [62]
    Ibid, p. 128-129.
  • [63]
    Natural Justice and Berne Declaration, “Access or Utilisation — What Triggers User Obligations ? A Comment on the Draft Proposal of the European Commission on the Implementation of the Nagoya Protocol on Access and Benefit Sharing”, 2013. En ligne à l’adresse http://naturaljustice.org/wp-content/uploads/pdf/Submission-EU-ABS-Regulation.pdf.
  • [64]
    Ibid, p. 11.
  • [65]
    Ibid.
  • [66]
    Article 4, Règlement (UE) n° 511/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014.
  • [67]
    Tobin Brendan, op. cit., p. 127.
  • [68]
    Ibid, p. 128.
  • [69]
    Article 12, Protocole de Nagoya, 15 octobre 2010, C. N. 782. 2010. TREATIES-1.
  • [70]
    Article 4, Règlement (UE) n° 511/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014.
  • [71]
    Article 2, Ibid.
  • [72]
    À ce jour ce centre d’échange n’existe pas.
  • [73]
    Point 28, préambule, Règlement (UE) n° 511/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014.
  • [74]
    Article 5(1), Ibid.
  • [75]
    Selon le règlement une « collection » est « un ensemble d’échantillons de ressources génétiques prélevés et les informations y afférentes, rassemblés et stockés, qu’ils soient détenus par des entités publiques ou privées ». Il n’est ainsi pas explicitement fait référence aux savoirs traditionnels, sont-ils compris dans les « informations y afférentes » ? Article 3, Règlement (UE) n° 511/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014.
  • [76]
    Voir notamment le cas de l’Agence de Développement de la Culture Kanak en Nouvelle-Calédonie : http://www.adck.nc/patrimoine/departement/presentation.
  • [77]
    Article 5(3), Règlement (UE) n° 511/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014.
  • [78]
    « Cela devrait se révéler particulièrement profitable aux chercheurs académiques, universitaires et aux chercheurs poursuivant des fins non commerciales, ainsi qu’aux petites et moyennes entreprises, et cela devrait contribuer à une réduction des exigences en matière administrative et de conformité ». Point 28, préambule, Ibid.
  • [79]
    Article 8, Ibid.
  • [80]
    Disponible en ligne à l’adresse : https://www.cbd.int/doc/publications/cbd-bonn-gdls-fr.pdf.
  • [81]
    Code de conduite éthique propre à assurer le respect du patrimoine culturel et intellectuel des communautés autochtones et locales, 2010. Disponible en ligne : www.cbd.int/traditional/code/ethicalconduct-brochure-fr.pdf
  • [82]
    Article 6, Règlement (UE) n° 511/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014.
  • [83]
    Article 9, Ibid.
  • [84]
    Ibid.
  • [85]
    Article 7, Ibid.
  • [86]
    Point 25, préambule, Ibid.
  • [87]
    Article 7, Ibid.
  • [88]
    Point 25, préambule, Ibid.
  • [89]
    Article 7, Ibid.
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