La responsabilité des Européens sur leur propre sécurité globale est une aspiration largement partagée en France et exprimée avec une intensité variable chez beaucoup de nos partenaires de l’Union. Les discussions politiques sur le sujet, amorcées depuis la décennie 1990, ont évolué ces dernières années avec l’affirmation d’une ambition d’« autonomie » et le franchissement d’étapes concrètes, comme l’adoption de la « boussole stratégique », texte d’expression stratégique proposé par l’Allemagne, et le lancement de projets d’armements partagés de nouvelle génération. Aucun seuil décisif d’autonomie n’a cependant été franchi.
Le déclenchement par la Russie d’une attaque armée de grande ampleur contre l’Ukraine introduit une rupture dans cette évolution lente et indécise. La confirmation d’un défi de sécurité majeur aux limites de l’Union est susceptible de faire advenir dans la réalité politique et stratégique l’Europe puissance que les dirigeants français recommandent. Que peut-on en entrevoir au stade actuel du déroulement de ce conflit, et quel espace d’initiative cela ouvre-t-il à l’Allemagne et à la France ?
Des actions concrètes montrent un changement réel d’attitude de la collectivité des dirigeants européens pour contrer effectivement l’agression russe. La mise en place de sanctions économiques substantielles pénalisant la Russie en profondeur et la détermination à faciliter le transfert d’armements nécessaires à la résistance ukrainienne ont été partagées en quelques jours par tous les États membres…